M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le ministre, face au contexte géopolitique que nous connaissons, vous souhaitez réintroduire cette procédure dérogatoire supprimée par la loi Valletoux.
Nous ne disposons pas d’évaluation quantitative ou qualitative, qu’il s’agisse du recours à cette procédure ou du nombre de praticiens qui pourraient en bénéficier. Peut-être pourriez-vous nous communiquer ces données qui, à ce stade, font défaut.
De plus, la loi Valletoux a créé une voie de passage spécifique pour répondre à la situation des Padhue présents sur le territoire national, mais non lauréats des EVC, afin qu’ils puissent exercer temporairement sous réserve du passage de ces épreuves. L’autorisation temporaire dont il s’agit est délivrée pour une durée de treize mois renouvelables une fois.
Pour autant, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 67 rectifié est présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly et Silvani, M. Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 112 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa, pour les personnes disposant d’une expérience professionnelle sur le territoire français dans la profession, ou le cas échéant la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, les épreuves de vérification des connaissances prennent la forme d’un examen. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions de mise en œuvre du présent alinéa. » ;
II. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au deuxième alinéa, pour les personnes disposant d’une expérience professionnelle sur le territoire français dans la profession, ou le cas échéant la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, les épreuves de vérification des connaissances prennent la forme d’un examen. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions de mise en œuvre du présent alinéa. » ;
La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 67 rectifié.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, le dépôt de cet amendement ne saurait vous étonner : voilà quelques années maintenant que nous défendons les Padhue, et nous sommes ravis que vous nous rejoigniez ! (M. le ministre s’exclame.) Je constate en effet que nous proposons des mesures communes en ce sens.
En parallèle, un certain nombre de dispositions réglementaires doivent être prises pour sortir les Padhue de la précarité et donc conserver leurs compétences, sans lesquelles notre système de santé serait encore plus en difficulté.
En particulier, pour les Padhue remplissant un certain nombre de conditions, il est nécessaire de transformer en examen le concours chargé d’évaluer leurs compétences. Dans bien des cas, ces dernières ne font aucun doute, puisque les praticiens dont il s’agit exercent d’ores et déjà dans nos services de santé.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 112.
M. Yannick Neuder, ministre. Madame Brulin, l’article 8 nous donne enfin l’occasion de nous accorder sur un point – j’en veux pour preuve nos deux amendements identiques – et je suis très heureux que vous rejoigniez la position du Gouvernement ! (Sourires.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, que les choses soient bien claires : nous devons bien sûr continuer de contrôler avec vigilance les connaissances et les compétences des Padhue. L’ensemble des praticiens exerçant en France doivent être soumis au même degré d’exigence, car chacun de nous, chacun des membres de nos familles doit être soigné avec la même confiance, que ce soit par un Padhue, par un médecin issu de l’Union européenne ou par un médecin diplômé en France. Cela étant, diverses mesures de simplification semblent aujourd’hui s’imposer.
Au titre de l’année 2024, 4 000 postes de Padhue ont été attribués, mais un certain nombre d’affectations restent problématiques malgré la réussite au concours. J’ai pris soin de les recenser : on en dénombre à peu près 300. J’ai confié ce dossier à la DGOS et, dans les jours qui viennent, je me pencherai personnellement sur le sujet pour que tout Padhue ayant réussi l’examen se voie bien proposer un poste. Nous allons résoudre ce problème avec la DGOS – je m’y engage devant vous.
Plus précisément, il faut bien distinguer les enjeux relatifs aux voies externe et interne.
Pour la voie interne, le recours à des commissions nationales ne me paraît pas acceptable. Permettez-moi de citer mon expérience personnelle : en tant que praticien hospitalier, je validais à la fois mes externes et mes internes. Je ne voyais pas pourquoi je ne pouvais pas valider les Padhue. Il est tout à fait normal que l’on rétablisse une évaluation par les chefs d’unité, de pôle, de service, ou encore par les présidents des commissions médicales d’établissement (CME). Si cette organisation reste à définir, il est indispensable d’assurer localement la validation des compétences.
Pour la voie externe, destinée à évaluer les connaissances, il faut effectivement transformer le concours actuel en un examen, mais je ne peux pas le faire par décret : il nous faut un véhicule législatif. Monsieur le président de la commission, votre proposition de loi nous permet de procéder à cette réforme et je vous en remercie.
Nous aurons ainsi fluidifié toute la partie interne pour 2025 et, pour 2026, nous bénéficierons de ce véhicule législatif. Le rythme de croisière reste à préciser, mais quelque 4 000 praticiens à diplôme hors Union européenne viendront renforcer les effectifs de nos hôpitaux à partir de l’année prochaine. Gardons bien à l’esprit que, dans certains établissements, les Padhue représentent de 30 % à 40 % de la masse médicale.
Enfin – je le dis sans provocation aucune –, on peut concevoir que les Padhue souhaitent à terme sortir de l’hôpital, pour faire du « projeter-vers » ou de « l’aller-vers » en exerçant à l’extérieur de leur établissement de santé.
À ce titre, je vais lancer d’ici quelques jours une expérimentation dans mon département : il s’agira, pour ces médecins, d’aller d’un centre hospitalier universitaire (CHU) vers un hôpital périphérique, puis vers des maisons médicales pour y apporter de nouvelles compétences.
Plus largement, je souhaite recréer les statuts mixtes que nous avons connus par le passé, grâce auxquels les praticiens hospitaliers pouvaient exercer une activité libérale et, ce faisant, renforcer le maillage territorial des soins.
Sur ce sujet, il faut savoir faire preuve d’une grande ouverture : c’est tout le sens de cet amendement.
Madame Brulin, je le répète, je suis très heureux que vous nous rejoigniez sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le ministre, la réforme des EVC, que vous avez annoncée dès le mois de février dernier, me paraît bienvenue sur le principe. En 2024, les résultats de ces épreuves ont suscité des critiques et des interrogations : il fallait que ces incompréhensions soient levées.
Pour autant, la création d’un examen spécifique ne doit pas conduire à dégrader les exigences d’évaluation des candidats. Notre commission continuera d’y veiller – nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen de l’article 9.
En outre, il ne suffit pas de remplacer un concours par un examen pour répondre aux attentes des différents acteurs. Il faut garantir une réelle équité entre spécialités ; en ce sens, il faut s’efforcer d’homogénéiser les exigences des jurys entre spécialités.
Ce travail doit être mené avec les représentants des Padhue, ceux des ordres professionnels, les acteurs du monde hospitalier et les doyens d’université, en conservant le même objectif : la qualité de la formation. C’est à cette condition que la réforme des EVC sera une réussite.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé à examiner personnellement les 300 dossiers de ces praticiens qui, malgré des notes correctes obtenues à l’examen de 2024, sont aujourd’hui en difficulté faute de proposition d’affectation.
Je vous en remercie d’autant plus que, tous groupes politiques confondus, nous avons plaidé en ce sens. Nous attendons évidemment le résultat de cette analyse.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Mes chers collègues, je voterai ces deux amendements identiques, déposés respectivement par Mme Brulin et par le Gouvernement.
Lors de l’examen du présent texte en commission, j’ai moi-même appelé l’attention sur la nécessité de clarifier les conditions de réussite des Padhue aux épreuves de vérification des connaissances.
En effet, j’ai été alerté par de nombreux médecins étrangers qui exercent en France depuis plusieurs années, qui ont obtenu aux EVC des notes largement supérieures à dix et qui, pourtant, ont été recalés. Dans le même temps – c’est ce que l’on m’a certifié –, certains candidats ont été reçus malgré des notes inférieures à la moyenne…
De telles situations sont incompréhensibles dans le contexte de désertification médicale que connaissent bon nombre de nos territoires.
Le Gouvernement prévoit une dérogation en faveur des praticiens exerçant sur le territoire français : pour ces derniers, les épreuves de vérification des connaissances prendraient la forme d’un examen et non d’un concours. En parallèle, on laisserait davantage de place aux responsables ayant accueilli les Padhue au titre de l’évaluation, dans le parcours de consolidation des compétences.
Ces mesures justes et pertinentes permettront de régulariser la situation de nombreux Padhue ayant donné la preuve de leur engagement et de leur compétence.
Enfin, je salue l’expérimentation que M. le ministre s’apprête à lancer dans son département. Une telle initiative pourrait d’ailleurs être déployée ailleurs. Nombre de Padhue relevant d’établissements périphériques, dont les compétences et les connaissances ont été validées, sont à même d’assurer des consultations en maison de santé.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 67 rectifié et 112.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Lors du scrutin public n° 269, mes collègues Raphaël Daubet, Philippe Grosvalet et Michel Masset auraient souhaité voter pour.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
4
Amélioration de l’accès aux soins dans les territoires
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins dans les territoires.
Dans la suite de la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’examen de l’article 9.
Chapitre II (suite)
Renforcer l’offre de soins dans les territoires sous-dotés
Article 9
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 4111-2 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Les cinquième et sixième alinéas sont ainsi modifiés :
– après la troisième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, pour les lauréats candidats affectés dans un établissement de santé, le chef de service, le chef de pôle et le coordonnateur local de la spécialité peuvent décider de saisir conjointement la commission mentionnée au premier alinéa avant la fin du stage d’évaluation. » ;
– après le mot : « délai », la fin de l’avant-dernière phrase est ainsi rédigée : « de quatre mois après que la commission nationale a rendu son avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences. » ;
– après la même avant-dernière phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « À défaut, lorsque la commission nationale n’a pas décidé de la réalisation d’un stage complémentaire, le silence gardé par l’autorité compétente vaut décision d’acceptation et autorisation d’exercice. » ;
c) (nouveau) Le septième alinéa est ainsi modifié :
– après la troisième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, pour les lauréats candidats affectés dans un établissement de santé, le coordonnateur en maïeutique, le chef de pôle et le directeur de la structure de formation en maïeutique peuvent décider de saisir conjointement la commission mentionnée au premier alinéa avant la fin du stage d’évaluation. » ;
– après le mot : « délai », la fin de l’avant-dernière phrase est ainsi rédigée : « de quatre mois après que la commission nationale a rendu son avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences. » ;
– après la même avant-dernière phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « À défaut, lorsque la commission nationale n’a pas décidé de la réalisation d’un stage complémentaire, le silence gardé par l’autorité compétente vaut décision d’acceptation et autorisation d’exercice. » ;
2° L’article L. 4221-12 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
– après la troisième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, pour les lauréats candidats affectés dans un établissement de santé, le chef de service, le chef de pôle et le coordonnateur local de la spécialité peuvent décider de saisir conjointement la commission mentionnée au premier alinéa avant la fin du stage d’évaluation. » ;
– après le mot : « délai », la fin de l’avant-dernière phrase est ainsi rédigée : « de quatre mois après que la commission nationale a rendu son avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences. » ;
– après la même avant-dernière phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « À défaut, lorsque la commission nationale n’a pas décidé de la réalisation d’un stage complémentaire, le silence gardé par l’autorité compétente vaut décision d’acceptation et autorisation d’exercice. »
M. le président. L’amendement n° 114, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Rétablir le a dans la rédaction suivante :
a) Après le mot : « peut », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « , après consultation de l’instance ordinale compétente, autoriser individuellement à exercer les personnes titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre permettant l’exercice, dans le pays d’obtention de ce diplôme, certificat ou titre, de la profession de médecin, dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, chirurgien-dentiste, le cas échéant dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, ou de sage-femme. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de mise en œuvre du présent alinéa. »
II. – Alinéas 4 et 5
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
b) Aux cinquième, sixième et septième alinéas, les mots : « commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider de la réalisation d’un stage complémentaire » sont supprimés ;
III. – Alinéas 6 à 11
Supprimer ces alinéas.
IV. – Alinéa 13
Rétablir le a dans la rédaction suivante :
a) Après le mot : « peut », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « après consultation de l’instance ordinale compétente, autoriser individuellement, le cas échéant, dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation, à exercer la pharmacie les personnes titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre permettant l’exercice de la profession de pharmacien dans le pays d’obtention de ce diplôme, certificat ou titre, le cas échéant dans la spécialité correspondant à la demande d’autorisation. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de mise en œuvre du présent alinéa. » ;
V. – Alinéa 15
Rédiger ainsi cet alinéa :
- Les mots : « commission mentionnée au premier alinéa émet un avis sur la poursuite du parcours de consolidation des compétences et peut décider la réalisation d’un stage complémentaire. » sont supprimés.
VI. – Alinéas 16 et 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre. Il s’agit de fluidifier, par cet amendement, la procédure d’autorisation de plein exercice des Padhue lauréats des épreuves de vérification de connaissances. En effet, la procédure actuelle est longue et mène à de nombreux refus des commissions nationales d’autorisation d’exercice (CNAE), liés au lieu de réalisation des stages.
Cet amendement tend ainsi à refondre la procédure d’autorisation par voie réglementaire, au travers d’un nouveau dispositif. Ce dernier s’appuiera sur une consultation de l’instance compétente de l’ordre pour chaque profession concernée. La nouvelle procédure donnera plus de place à l’évaluation par les responsables des établissements ayant accueilli le Padhue et facilitera l’accueil des lauréats hors des CHU, pour un meilleur accès aux soins sur l’ensemble du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le ministre, votre amendement tend à « écraser » le texte de la commission à l’article 9. Vous ne serez donc pas surpris de notre avis défavorable.
Sur la suppression de l’avis de la commission nationale d’autorisation d’exercice, que vous proposez avec votre amendement, la plupart des acteurs entendus s’y opposent fermement, en particulier les trois ordres professionnels, mais aussi la conférence des présidents de commission médicale d’établissement (CME) de CHU et certains représentants des Padhue. Cette suppression nous paraît présenter des risques, en créant les conditions d’un conflit d’intérêts au sein des établissements d’affectation des Padhue. En effet, ces structures, tout en étant confrontées au besoin de pourvoir des postes de médecins, seraient chargées de se prononcer directement sur l’autorisation d’exercice.
De plus, le maintien de l’avis de la commission nationale n’a pas eu pour effet de freiner l’augmentation du nombre de Padhue autorisés à exercer. Selon le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom), les avis de la commission sont ainsi défavorables dans moins de 15 % des cas seulement, et le nombre de postes de médecins ouverts aux EVC a été multiplié par quatre depuis 2019. L’on ne peut donc considérer que la commission nationale bloque la délivrance des autorisations d’exercice.
La commission des affaires sociales avait par ailleurs inscrit dans l’article la possibilité de raccourcir la durée du parcours de consolidation des compétences à la demande des autorités locales. Je pense que vous étiez plutôt favorable à cette idée-là, monsieur le ministre. Ainsi, serait pris en compte l’avis du chef de service, du chef de pôle et du coordonnateur local de la spécialité. Votre amendement supprime cette possibilité, ce qui est dommage, car cela prive les autorités chargées de la supervision du Padhue d’un pouvoir autonome d’appréciation.
La commission avait également proposé de limiter le délai de la délivrance de l’autorisation d’exercice à quatre mois après l’avis de la commission nationale, alors que les Padhue restent souvent, après la fin de leur parcours de consolidation des compétences, dans une situation précaire en attendant cette autorisation. De nombreux acteurs nous ont en effet alertés sur les délais excessivement longs de délivrance de ladite autorisation. Je rappelle en outre que, passé un délai de douze mois, l’avis est réputé défavorable.
En conclusion, la réécriture que vous proposez de cet article nous paraît inappropriée sur le fond et ne pas répondre aux attentes exprimées par les acteurs que nous avons entendus pendant nos auditions.
M. le président. Je mets aux voix l’article 9.
(L’article 9 est adopté.)
Article 10
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du I de l’article L. 4111-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’il est réalisé au sein de ces structures d’exercice coordonné, les lauréats candidats à la profession de médecin, de chirurgien-dentiste et de sage-femme sont prioritairement affectés dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins au sens du 1° de l’article L. 1434-4. » ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 4221-12 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’il est réalisé au sein de ces structures d’exercice coordonné, les lauréats candidats à la profession de pharmacien sont prioritairement affectés dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins au sens du 1° de l’article L. 1434-4. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 27 est présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 94 rectifié bis est présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Poumirol, MM. Uzenat, Gillé et Kanner, Mmes Conconne, Canalès et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Mérillou, P. Joly et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Anne Souyris, pour présenter l’amendement n° 27.
Mme Anne Souyris. L’article 10 prévoit que les médecins, dentistes et sages-femmes titulaires d’un diplôme obtenu hors de l’Union européenne, les Padhue, soient orientés en priorité vers les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante. Nous nous y opposons fermement.
Tout d’abord, cette mesure constitue en elle-même une stigmatisation, une différenciation de facto. Surtout, cette distinction est problématique. En effet, l’article introduit une rupture d’égalité entre praticiens selon le lieu d’obtention de leur diplôme. Nous nous y opposons et tout en nous interrogeant sur la constitutionnalité du dispositif.
Ensuite, cet article contribue à entretenir le « deux poids, deux mesures », avec une régulation forte pour les Padhue et faible pour les diplômés nationaux. De là à la défense de la préférence nationale, il n’y a qu’un pas, lequel semble franchi par cet article.
Enfin, l’article 10 attise une stigmatisation des Padhue. Pourtant, ils et elles pallient déjà largement les carences de notre système de santé. Pour toutes ces raisons, nous appelons à supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 94 rectifié bis.
Mme Annie Le Houerou. Pour les mêmes raisons, nous souhaitons supprimer cet article. L’obligation qu’il prévoit à l’endroit des seuls praticiens étrangers nous semble injuste et discriminatoire.
En effet, l’obligation d’installation, donc la régulation, a été rejetée au cours de l’examen des articles précédents. Il paraît donc difficile d’imposer aux Padhue ce que vous avez refusé d’appliquer, mes chers collègues, aux autres médecins.
Par ailleurs, je souhaitais souligner que la procédure de reconnaissance des compétences des Padhue est d’ores et déjà anormalement compliquée, comme nous l’avons reconnu lors de l’examen des deux articles précédents. Il conviendrait, en outre, de s’assurer que les Padhue affectés selon des critères de territoire le seront au titre de stages considérés comme validants. En effet, il semblerait qu’existent parfois des difficultés d’affectation sur certains postes lorsque ces derniers ne permettent pas la validation des stages.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Rappelons les termes du débat, afin de ne pas nous tromper de sujet.
Les Padhue, comme les étudiants suivant le cursus du troisième cycle, contribuent de façon essentielle au fonctionnement de notre système de santé – nul ne pourra dire le contraire. La priorité est donc de leur assurer des conditions de formation et d’encadrement de qualité, pour garantir autant que possible la délivrance de leur autorisation d’exercice par l’autorité ministérielle compétente.
Or, depuis la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, dite loi Valletoux, ils peuvent être affectés dans des structures d’exercice coordonné en ville, c’est-à-dire en centre de santé et en maison de santé. Je rappelle d’ailleurs que ces affectations ne sont toujours pas effectives aujourd’hui, en raison de difficultés liées au vecteur financier de prise en charge de la rémunération de ces praticiens. J’espère que ces obstacles pourront être levés très rapidement, un an et demi après l’adoption de la loi Valletoux.
Dans le cadre de ces affectations, qui restent à concrétiser, il est proposé de favoriser les zones sous-denses, comme cela est aujourd’hui prévu – je vous le rappelle – pour les docteurs juniors. Nous employons la même terminologie que lorsque nous avons travaillé sur la quatrième année d’internat de médecine générale, ni plus ni moins ! En faire un problème de discrimination, c’est pousser le bouchon un peu loin…