PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Vermeillet
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la chambre des territoires sait ce que notre pays doit à l’engagement des sapeurs-pompiers.
Nous connaissons tous la valeur des Sdis. Nombre de drames sont évités chaque année grâce à l’action quotidienne de plus de 200 000 femmes et hommes, partout sur le territoire.
Au nom de mon groupe, et encore plus au regard des événements dramatiques récents, je tiens à rendre hommage à ces femmes et à ces hommes qui veillent, interviennent et sauvent.
Je renouvelle notre soutien et notre reconnaissance à celles et ceux qui, au cours de leur mission, ont été blessés, mais aussi aux familles de ceux dont la vie a été brisée. J’y associe leurs proches et leurs collègues.
Je veux dire ici ce que nous avons aussi affirmé à propos des soignants notamment : la République ne tolérera aucune violence envers les sapeurs-pompiers. Ceux qui s’en prennent à eux doivent répondre de leurs actes devant la justice.
La majorité des sapeurs-pompiers sont des hommes et des femmes qui ont pris librement l’engagement, en parallèle de leur vie privée et professionnelle, de porter secours et assistance à nos concitoyens, contribuant directement aux missions de sécurité civile de toute nature qui sont confiées aux services d’incendie et de secours.
Depuis longtemps, ils remplissent leur mission avec un sens du devoir exemplaire. Si leurs services se sont adaptés aux mutations de la société, le dérèglement climatique et la multiplication des événements de tous ordres accroissent aujourd’hui la pression qui pèse sur eux.
Je peux vous parler des inondations survenues dans mon département. À chaque fois, les pompiers sont présents, fidèles au poste, réactifs et solidaires. Plus au sud, les sécheresses favorisent des incendies majeurs. Là encore, les services d’intervention sont en première ligne.
Face à cette intensification des risques, notre collègue Grégory Blanc propose la création de groupes de vacataires mobilisables en cas de besoin.
L’intention est louable, et c’est la raison pour laquelle le Sénat a inscrit ce texte à son ordre du jour, dans un espace transpartisan.
Oui, les pompiers ont besoin de renforts. Toutefois, nous devons rester vigilants : il serait dangereux de bouleverser l’équilibre subtil sur lequel repose notre sécurité civile.
Nous connaissons les contraintes posées par la jurisprudence européenne. Il ne s’agit pas de les ignorer ni de les aggraver.
Je salue le travail de notre rapporteur, qui a su entendre les objections légitimes et proposer des ajustements utiles. Renforcer notre modèle suppose de rester fidèle à ses fondements, à commencer par le principe du volontariat.
La rédaction adoptée par la commission permet de préserver l’équilibre entre volontaires et professionnels, sans créer un troisième statut. C’est important.
Dans un contexte budgétaire contraint, il était aussi essentiel de ne pas fragiliser les finances de nos collectivités locales. L’adoption du texte initial aurait pu aller à l’encontre de cet objectif.
Oui, notre modèle est appelé à évoluer, mais il est sage d’attendre les conclusions du Beauvau de la sécurité civile avant d’engager des réformes structurelles. Cette concertation permettra d’intégrer les préoccupations de toutes les parties prenantes. Nous le devons aux pompiers comme à nos concitoyens.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires abordera les débats avec vigilance et votera majoritairement contre ce texte. Nos sapeurs-pompiers protègent la vie. À nous de protéger leur mission avec la même exigence. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Petrus. (Mme Nadine Bellurot applaudit.)
Mme Annick Petrus. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui dans sa version issue des travaux de la commission des lois ne correspond plus à la proposition initiale. Et c’est une bonne chose.
La création d’un statut hybride de vacataire opérationnel, à mi-chemin entre sapeur-pompier volontaire et professionnel, soulevait de nombreuses réserves. Ni utile ni opportune, elle risquait de brouiller la lisibilité de notre modèle de sécurité civile, tout en alourdissant la charge financière pesant sur les Sdis.
Si j’ai souhaité m’exprimer ce soir en tant qu’ancien officier sapeur-pompier, c’est parce qu’à Saint-Martin, nous avons engagé un chantier majeur : la création d’un service territorial d’incendie et de secours autonome.
Ce projet répond à une nécessité absolue, celle de garantir aux Saint-Martinois une sécurité civile réactive, efficace et pleinement adaptée aux réalités de l’île. Je tiens d’ailleurs à remercier M. le ministre François-Noël Buffet, qui m’avait reçue il y a quelques semaines, et dont le soutien a été déterminant pour faire avancer ce dossier. Son écoute attentive et son engagement concret nous permettent de franchir une étape importante dans la structuration du Sdis de Saint-Martin.
Notre expérience locale confirme ce que ce texte évite désormais : le volontariat souffre d’un manque non pas de vocations, mais de disponibilité.
À Saint-Martin, les contraintes sociales, économiques et géographiques rendent le recrutement de volontaires encore plus complexe qu’ailleurs. Nous avons besoin d’outils simples, souples, compréhensibles et pleinement adaptés aux dynamiques de terrain.
La création d’un troisième statut, aussi flou juridiquement qu’instable financièrement, n’aurait rien résolu. Elle aurait, au contraire, créé de la confusion entre engagement citoyen et logique contractuelle, en contradiction avec l’esprit même du volontariat.
Je participerai d’ailleurs, le 26 mai prochain, à la concertation organisée à Saint-Martin dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile. Ce sera l’occasion de faire remonter les réalités de terrain et les attentes spécifiques de notre territoire.
Mes chers collègues, alors que les conclusions du Beauvau sont attendues, il est plus que jamais essentiel de conforter notre modèle, sans le complexifier. Celui-ci repose sur une conviction forte, celle que la sécurité civile est l’affaire de tous. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc vise à créer un groupe de vacataires opérationnels volontaires de sécurité civile, afin de renforcer ponctuellement les effectifs des Sdis dans nos territoires.
Personne ici ne conteste l’état de tension croissante que connaît notre modèle de sécurité civile. Malgré l’engagement exemplaire de près de 250 000 sapeurs-pompiers, dont plus de 78 % sont volontaires, notre système est sous pression.
Les interventions ont augmenté de manière exponentielle, en particulier dans le champ du secours à la personne, qui représente désormais plus de 80 % des sorties. À cela s’ajoutent les effets du dérèglement climatique, qui multiplie les événements extrêmes sur l’ensemble des territoires.
Je tiens à ce stade à témoigner de notre reconnaissance envers tous ceux qui répondent présents face à ces défis, jour et nuit. Nous saluons le dévouement des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires et pensons aujourd’hui avec une émotion particulière au pompier volontaire gravement blessé ce week-end en Haute-Savoie. Son engagement, comme celui de tous ses camarades, mérite notre plus profond respect.
Le Sénat s’est depuis longtemps engagé aux côtés des sapeurs-pompiers. Il a soutenu des textes importants et a été à l’origine d’un certain nombre d’entre eux : je pense à la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras, qui a conforté le volontariat, à la récente proposition de loi visant à garantir le suivi de l’exposition des sapeurs-pompiers à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ou encore à la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé, que nous avons adoptée hier et qui a permis de sécuriser le statut des professionnels de santé intervenant au sein d’un service départemental d’incendie et de secours.
La proposition de loi de notre collègue, que nous examinons aujourd’hui, s’inscrit dans le prolongement de cet engagement constant. Celle-ci, toutefois, aussi bien dans sa version initiale que dans sa version modifiée par la commission, soulève des interrogations.
La version initiale prévoyait la création d’un nouveau statut de vacataire opérationnel, distinct à la fois de celui de sapeur-pompier volontaire et de celui de sapeur-pompier professionnel. Or cette approche a suscité de vives réserves de la part des parties prenantes et notamment de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Celle-ci a mis en garde contre une possible dénaturation du volontariat, une confusion des statuts et les coûts élevés que la mise en œuvre de cette réforme entraînerait pour les Sdis. Elle a aussi rappelé les risques juridiques liés à la jurisprudence Matzak, qui assimile certaines astreintes volontaires à du temps de travail salarié.
Face à ces critiques, le rapporteur a proposé une réécriture du texte, afin de supprimer l’expérimentation visant à créer un groupe de vacataires opérationnels et de conférer un fondement légal aux contrats saisonniers de sapeur-pompier volontaire, qui relevaient jusqu’à présent du seul cadre réglementaire.
Toutefois, ces ajustements restent insuffisants.
Tout d’abord, ils ne répondent pas aux inquiétudes liées à l’introduction d’une forme de semi-professionnalisation du volontariat. En cherchant à sécuriser les contrats saisonniers, nous risquons d’introduire de nouvelles zones grises dans la réglementation et d’ouvrir la porte à des requalifications juridiques, voire à un glissement progressif vers un modèle hybride, qui remettrait en cause les fondements mêmes de notre sécurité civile, qui repose sur l’engagement citoyen, libre et non salarié.
Ensuite, et peut-être surtout, cette proposition de loi intervient alors que nous attendons les conclusions du Beauvau de la sécurité civile, qui devront nous guider pour faire évoluer de manière cohérente notre modèle. Il serait hasardeux d’ajouter une brique nouvelle, potentiellement source d’instabilité, à un édifice en cours de refonte.
C’est pourquoi, si nous saluons l’intention et la volonté de l’auteur de ce texte et du rapporteur de répondre à des besoins réels et de soutenir nos forces de secours, les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants expriment des réserves sur la pertinence du dispositif proposé et, vous l’aurez compris, sur son opportunité, à l’approche de la communication des conclusions du Beauvau de la sécurité publique.
En conséquence, nous sommes défavorables à l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, s’il est un métier qui incarne à la fois le courage et le dévouement et qui suscite le respect unanime de nos concitoyens, c’est bien celui de sapeur-pompier.
Mais derrière cet imaginaire commun se cache une réalité plus âpre. Les 250 000 femmes et hommes qui œuvrent chaque jour pour notre sécurité interviennent parfois dans des conditions très difficiles, sans toujours recevoir la reconnaissance ni le respect qu’ils méritent.
L’actualité, marquée par la multiplication des actes de violence à l’égard des sapeurs-pompiers, tout récemment à Évian-les-Bains ou encore dans mon département des Hautes-Pyrénées, nous le rappelle tristement.
Le Parlement éprouve à l’endroit de la profession la plus grande considération, qu’il a manifestée ces dernières années par l’adoption de deux lois majeures en 2021 et 2023.
L’examen de ce texte, dans le cadre de l’espace transpartisan, illustre une fois encore l’attention constante et les préoccupations que suscite, sur toutes les travées de cet hémicycle, l’avenir de notre modèle de sécurité civile.
En effet, nous partageons tous un même constat : notre système est à bout de souffle. Les Sdis sont de plus en plus sollicités, parfois jusqu’à saturation. Le maillage territorial des centres d’incendie et de secours s’est dangereusement fragilisé, menaçant l’équité de l’accès aux secours.
Si le nombre de sapeurs-pompiers volontaires, en 2023, a franchi pour la première fois en vingt ans le seuil symbolique des 200 000, les effectifs demeurent insuffisants. Cette situation rejaillit sur la disponibilité opérationnelle des Sdis, fortement affaiblie. J’en veux pour preuve qu’en 2008, 25 millions de Français habitaient à plus de dix minutes d’intervention d’une caserne de pompier ; ils sont aujourd’hui plus de 36,5 millions.
À l’avenir, cette tendance pourrait s’aggraver sous l’effet d’au moins trois dynamiques préoccupantes : le vieillissement démographique, l’aggravation des événements climatiques extrêmes et la diminution des moyens à disposition des Sdis.
En l’absence de réponse structurelle, l’ensemble de notre architecture de protection civile risque de s’effondrer. Il est donc urgent d’agir.
Notre rôle est clair : proposer des idées nouvelles, en débattre, les confronter et faire émerger des avancées concrètes, utiles et durables pour nos sapeurs-pompiers et leurs autorités de tutelle.
C’est à cet exercice exigeant qu’est soumise la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc, qui vise à créer, à titre expérimental, un groupe de vacataires opérationnels.
Sur le principe, je suis favorable à ce que l’on introduise dans la loi de nouveaux outils organisationnels pour répondre aux pics d’activités. L’expérimentation est un vecteur intéressant pour tester la pertinence de ces mesures.
Néanmoins, le dispositif proposé initialement par l’auteur du texte présentait des limites sur les plans budgétaire, juridique et opérationnel. Nous devons plutôt repenser le cadre d’exercice des sapeurs-pompiers volontaires dans son ensemble, comme l’a suggéré mon collègue du RDSE Jean-Yves Roux au ministre de l’intérieur en novembre dernier.
Dès lors, il était délicat de maintenir en l’état ce texte. Cela aurait sans doute nécessité un effort de pédagogie supplémentaire. Je salue donc la proposition du rapporteur de pérenniser dans la loi le dispositif d’engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires, actuellement régi par le décret du 9 octobre 2009. Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen soutient cette idée.
Surtout, de la sorte, nous ne préemptons pas le débat que nous aurons prochainement sur la traduction législative des conclusions du Beauvau de la sécurité civile. Le projet de loi que le Gouvernement présentera devra être à la hauteur des enjeux. Le groupe RDSE y sera particulièrement attentif. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Bernard Delcros. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’associe à l’hommage qui a été rendu par les orateurs précédents au sapeur-pompier qui a été violemment agressé, il y a quelques jours, alors qu’il intervenait pour porter secours. Je tiens aussi à saluer l’ensemble des pompiers de France.
Nous examinons ce soir la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc qui concerne les sapeurs-pompiers volontaires et qui vise à créer un groupe de vacataires opérationnels pour faire face aux défis de la sécurité civile.
Le sujet est d’importance. Je salue le travail de fond de notre collègue rapporteur Jean-Michel Arnault, qui a largement fait évoluer le texte initial et qui s’est employé, avec toute son énergie et toutes ses compétences, à trouver une solution d’équilibre et de compromis.
Il convient de rappeler que le concours des sapeurs-pompiers volontaires à l’exercice des missions de sécurité civile est absolument indispensable, tout particulièrement dans les territoires les plus ruraux.
Les 200 000 sapeurs-pompiers volontaires représentent 80 % de l’effectif des pompiers de notre pays. Ils assurent près de 70 % des interventions réalisées sur le territoire national et la quasi-totalité des missions dans les zones rurales. Dans les départements ruraux, comme le Cantal, la sécurité civile ne pourrait en aucun cas être assurée sans eux.
C’est pourquoi nous devons sans cesse encourager et faciliter le volontariat. Si le nombre de sapeurs-pompiers volontaires a globalement, comme cela a été souligné, tendance à augmenter depuis une vingtaine d’années, ce phénomène ne concerne pas l’ensemble du territoire national. Ainsi, dans les départements ruraux, le nombre de sapeurs-pompiers volontaires continue de diminuer et le recrutement de volontaires reste un enjeu majeur de sécurité civile.
Nous savons bien que la principale difficulté liée au volontariat demeure la disponibilité, essentiellement en raison de l’articulation avec les activités professionnelles exercées par ailleurs. Or notre système de sécurité civile requiert une disponibilité toujours plus importante pour faire face à la diversification et à l’augmentation du nombre de leurs missions.
Comme les pompiers professionnels, les pompiers volontaires doivent être capables – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre – de gérer de multiples situations : secours à des personnes, incendies, accidents sur la voie publique, etc. Cela suppose de maintenir un niveau exigeant de formation et de préparation physique, ce qui requiert beaucoup de temps en dehors des interventions et appelle une grande disponibilité.
Nous devons toujours chercher à améliorer leur statut et à faciliter l’exercice de leurs missions de service public.
Dans sa version initiale, le texte que nous examinons visait à créer, à titre expérimental, pour une période de deux ans, dans cinq départements, des groupes de vacataires opérationnels de sécurité civile. Ces derniers auraient été composés de sapeurs-pompiers volontaires souhaitant réaliser des gardes plus nombreuses, sur une durée maximale de soixante jours par an.
En lieu et place du dispositif initial, la commission, sur l’initiative de son rapporteur Jean-Michel Arnaud, dont je tiens de nouveau à saluer le travail, propose d’inscrire dans la loi, pour le sécuriser juridiquement, le dispositif de l’engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires, afin de répondre à des besoins opérationnels ponctuels. Il s’agit de recentrer la proposition de loi autour du dispositif existant des contrats saisonniers.
Toutefois, si le volontariat doit être encouragé et la sécurité civile sans cesse améliorée, les arguments légitimes qui ont été avancés non seulement par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, mais aussi par les Sdis eux-mêmes, ont conduit les membres du groupe Union Centriste, dans leur majorité, à souhaiter le retrait du texte, dans l’attente des conclusions du Beauvau de la sécurité civile, qui a été mené en étroite concertation avec l’ensemble des acteurs, et notamment avec la FNSPF. Comme le ministre l’a indiqué dans son propos liminaire, la publication de ces conclusions est imminente.
Nous sommes très réservés sur cette proposition de loi, car nous estimons qu’elle est prématurée. Pour ces raisons, les membres du groupe Union Centriste considèrent, dans leur grande majorité, qu’il n’est pas opportun de donner une suite favorable à ce texte.
Toutefois, je ne doute pas que nous pourrons débattre de nouveau de ce sujet, de manière consensuelle, une fois que les conclusions du Beauvau de la sécurité auront été présentées, ce qui devrait avoir lieu au cours des prochaines semaines. (Applaudissements sur les travées des groupes UC ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons vise, après le travail réalisé par le rapporteur et la commission, à sécuriser, tout en lui donnant plus de visibilité, l’investissement des sapeurs-pompiers volontaires qui s’engagent sur de courtes périodes, pour répondre à des besoins opérationnels de sécurité civile ponctuels, dans le cadre de contrats saisonniers.
J’ai moi aussi, en cet instant, une pensée pour le sapeur-pompier volontaire de Haute-Savoie qui a été percuté par un véhicule, alors qu’il tentait, avec ses collègues, de faire cesser un rodéo urbain. Je lui avais déjà rendu hommage lundi, lorsque nous avons examiné la proposition de loi relative aux missions des professionnels de santé, vétérinaires, psychothérapeutes et psychologues des services d’incendie et de secours.
Je tiens aussi à rendre un hommage appuyé aux 200 000 hommes et femmes, qui, partout en France, s’engagent chaque jour au service de nos concitoyens comme sapeurs-pompiers volontaires. Ils représentent, comme cela a été dit, 80 % des effectifs de la sécurité civile : c’est une particularité de notre modèle, dont nous pouvons nous réjouir, car elle démontre que l’engagement demeure une valeur forte dans notre pays.
Cette particularité mérite d’être réinterrogée à la lumière des défis auxquels sont soumis les sapeurs-pompiers. C’est le sens de la proposition de loi de notre collègue Grégory Blanc, même si les solutions proposées ne se sont pas avérées opportunes ou opérantes.
La mobilisation des sapeurs-pompiers est plus cruciale que jamais pour répondre à la multiplication des sollicitations : opérations visant à apporter des secours et des soins d’urgence aux personnes, qui représentent 86 % des interventions des Sdis, opérations liées au dérèglement climatique, qui provoque des événements et des crises dans des territoires de plus en plus nombreux et de plus en plus divers, ou aux catastrophes naturelles, qui semblent s’intensifier.
Finalement, les interventions des sapeurs-pompiers correspondent de moins en moins au cœur de leurs missions et visent de plus en plus à pallier l’affaiblissement d’autres services publics, ce qui met notre système en tension.
En disant cela, je ne remets évidemment pas en cause l’engagement, le dévouement, les compétences ou le professionnalisme de nos sapeurs-pompiers, qu’ils soient volontaires ou professionnels.
Il s’agit au contraire de réfléchir aux évolutions que nous pouvons apporter à notre système de protection civile, sans fragiliser l’existant.
Nous devons définir un nouveau modèle de financement de nos Sdis. Le système actuel, qui repose quasi exclusivement sur les départements et sur le bloc communal, est à bout de souffle, car ces collectivités elles-mêmes sont au bord de l’asphyxie.
Nous devons aussi nous interroger sur les conséquences de la jurisprudence Matzak, cette épée de Damoclès qui pèse sur le fonctionnement de nos Sdis. Il faut trouver des solutions.
J’ai entendu ce que vous avez dit à cet égard, monsieur le ministre. Certains pensent pouvoir compléter la directive européenne sur le temps de travail par une directive qui prenne en compte les spécificités des services de protection civile, mais cela n’a malheureusement pas été possible durant la présidence française de l’Union européenne.
Nous attendons tous du Beauvau de la sécurité civile un nouveau modèle de financement, qui nous permette de recruter des professionnels et d’investir dans les équipements nécessaires à leurs interventions et à leur protection. Nous souhaitons aussi que les missions des sapeurs-pompiers, qu’ils soient volontaires ou professionnels, fassent l’objet d’une reconnaissance pleine et entière.
Je rappelle que les budgets des Sdis ont aussi été grevés par l’augmentation du taux de cotisation à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), ce qui a des effets significatifs sur leur fonctionnement, alors que le décret sur la bonification des trimestres pour la retraite des sapeurs-pompiers volontaires justifiant d’au moins dix ans de service se fait toujours attendre, de même que la pérennisation de la prestation de fidélisation et de reconnaissance.
Le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky votera la proposition de loi telle qu’elle a été modifiée par la commission des lois, tout en souhaitant ardemment, monsieur le ministre, que tous les chantiers que je viens d’évoquer trouvent rapidement une issue positive. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Lutte contre les incendies et les inondations, secours d’urgence aux personnes, gestion des risques industriels, intervention sur les accidents de la route : les nombreuses missions confiées aux pompiers nous rappellent, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu’ils sont indispensables pour sauver des vies, mais aussi pour protéger nos biens et nos espaces naturels.
Le dévouement et la bravoure des pompiers sont d’autant plus à saluer qu’ils exercent souvent leurs missions dans des conditions difficiles et au péril de leur vie : aux risques encourus lors des interventions, s’ajoute l’exposition à des fumées toxiques, à l’amiante et aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), qui constituent un vrai danger pour leur santé.
Enfin, il faut malheureusement ajouter à cette liste les agressions injustifiables et innommables auxquelles les pompiers sont de plus en plus confrontés.
Je voudrais ainsi rendre hommage au pompier sergent-chef d’Évian-Les-Bains, Niccolo Scardi, qui a été percuté par une voiture samedi lors d’un rodéo urbain et qui se trouve toujours à l’hôpital dans un état critique. Au nom du groupe GEST, j’adresse à sa famille et à ses proches nos pensées les plus émues, en espérant qu’il se rétablisse et obtienne justice le plus rapidement possible.
En dépit des drames qui peuvent survenir dans l’exercice des missions qui lui sont propres, le métier de pompier continue de susciter des vocations. Notre pays compte ainsi 240 000 pompiers, dont 80 % de volontaires assurant 67 % des interventions.
Le modèle français, qui repose sur la combinaison entre un corps de professionnels très bien formés et des volontaires qui restent à disposition des Sdis pour intervenir en cas de forte demande, est évidemment une chance.
Cette organisation, unique en Europe, est un atout que nous devons renforcer. En raison de la multiplication des catastrophes climatiques extrêmes, les pompiers auront tendance à être davantage mobilisés pour protéger la population. Du fait du changement climatique, les pics exceptionnels de sollicitation vont devenir la norme.
Nous devons donc ouvrir le débat sur le meilleur moyen d’adapter notre système de sécurité civile face à cette nouvelle donne climatique. L’examen de ce texte, déposé par notre collègue Grégory Blanc, que je tiens à remercier, nous en fournit précisément l’occasion.
L’expérimentation d’un système de réserve, sur le modèle de celles de l’armée, de la police et de la gendarmerie, qui était proposée dans la rédaction initiale, constitue une piste intéressante, même s’il convient de réfléchir à l’articulation de ce système avec le volontariat, pour ne pas risquer de fragiliser ce dernier.
Conforter le modèle français du volontariat nécessite de prendre le temps de la réflexion. Je suis heureux que notre groupe ait ouvert le débat. Celui-ci devra se poursuivre.
Cette proposition de loi, telle qu’elle a été réécrite par la commission – je tiens d’ailleurs à remercier le rapporteur pour son travail –, vise à sécuriser juridiquement la pratique des contrats saisonniers de sapeur-pompier volontaire : c’est une avancée notable, car la spécificité du modèle français n’est pas toujours bien comprise par les instances européennes. Ce renforcement du droit constitue un pas positif pour en garantir la pérennité.
Nous espérons que le débat ouvert par l’examen de ce texte permettra de résoudre les enjeux auxquels sont confrontés nos pompiers. Je pense notamment aux enjeux sociaux, importants pour la fidélisation des pompiers volontaires et pour attirer de nouvelles recrues, à la réduction des risques sanitaires, à l’amélioration du matériel et au renforcement des moyens, ou encore à l’articulation entre les pompiers et les autres services de secours. Je sais que je peux compter, sur tous ces sujets, mes chers collègues, sur votre volontarisme, dans l’esprit qui anime cet espace transpartisan de notre ordre du jour.
Alors que Beauvau veut reprendre la main, par le biais des assises de la sécurité civile, nous serons attentifs aux prochaines annonces du Gouvernement sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)