Le titre Ier du livre V du code civil est complété par un article 2496 ainsi rétabli :
« Art. 2496. – Lorsqu’elle est faite à Mayotte par acte reçu par l’officier de l’état civil, la reconnaissance de paternité ou de maternité régie par les articles 316 à 316-5 est reçue par l’officier de l’état civil de la commune de Mamoudzou, sauf si elle est simultanée à la déclaration de naissance prévue à l’article 55.
« Lors de l’établissement de l’acte de reconnaissance d’un enfant né à Mayotte, l’auteur de la reconnaissance est informé des obligations découlant des articles 371-1 et 371-2 du code civil, de l’article 227-17 du code pénal et de l’article L. 823-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. »
Mme la présidente. L’amendement n° 81, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement vise à supprimer l’article 3. La centralisation à Mamoudzou des actes de reconnaissance de maternité et de paternité aura pour conséquence une inégalité d’accès au service public : un traitement véritablement discriminatoire sera organisé en fonction de la zone d’habitation.
En effet, les difficultés de circulation sur le territoire sont réelles. Les personnes habitant de l’autre côté de l’île seront dissuadées de se rendre au chef-lieu pour y accomplir les actes de reconnaissance de paternité ou de maternité. Cette centralisation compromettra un grand principe des droits de l’enfant, à savoir le droit à une identité.
Cet article est d’autant plus préoccupant que l’accès au droit est plus difficile pour les plus vulnérables : la mesure permettra de se débarrasser très facilement des plus fragiles. Aussi, nous vous proposons de voter en faveur de notre amendement afin de supprimer une telle discrimination.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ma chère collègue, la commission ne pense pas du tout que les dispositions de l’article auront l’effet que vous décrivez. Au contraire, nous estimons que la centralisation à Mamoudzou des reconnaissances de paternité et de maternité répond à un objectif d’intérêt général : elle permettra de mieux détecter les fraudes, qui visent à contourner les règles de séjour sur le territoire français.
Quelque 78 % des naissances ayant lieu à Mamoudzou, les reconnaissances sont d’ores et déjà effectuées dans cette commune. Environ 25 % de celles-ci ont lieu concomitamment à la déclaration de naissance : elles ne sont donc pas concernées.
Ce dispositif ne prive pas les parents de la possibilité d’établir la filiation à l’égard de leur enfant. Ils peuvent le faire à tout moment en se rendant à Mamoudzou sans délai.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis.
Mme la présidente. La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour explication de vote.
M. Saïd Omar Oili. Monsieur le ministre, la commune de Mamoudzou recevra-t-elle une compensation financière du fait de la surcharge de travail ? Puisque l’enregistrement de l’enfant doit se faire dans un certain délai, n’existe-t-il pas un risque d’avoir à l’avenir des enfants dépourvus d’extrait de naissance ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État. Comme vient de l’indiquer Mme la rapporteure, 75 % des naissances ont lieu à Mamoudzou. Les actes de reconnaissance relèvent d’une compétence régalienne exercée dans un cadre défini, aussi les compensations n’ont-elles pas lieu d’être.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le ministre, quelle est la réalité statistique des reconnaissances frauduleuses de maternité à Mayotte ? Je ne parviens pas à me faire une idée du phénomène. Je vous remercie de répondre à ma question.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 81.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les circonstances le justifient, l’officier de l’état civil peut déléguer, par une décision motivée, à un officier de l’état civil d’une autre commune de Mayotte, les reconnaissances prévues aux alinéas précédents. »
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement vise à permettre des délégations ponctuelles dans les communes éloignées de la part de l’officier d’état civil de Mamoudzou, afin que les parents souhaitant faire une reconnaissance ne soient pas obligés de se déplacer au chef-lieu en étant contraints par les délais. Il convient de tenir compte des difficultés de transport ou de mobilité de certaines populations, en particulier des plus fragiles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Votre amendement vide le dispositif de sa substance en permettant que l’officier d’état civil de Mamoudzou délègue à d’autres communes les reconnaissances de paternité et de maternité.
Par ailleurs, difficultés de transport ou non, les reconnaissances peuvent être établies à tout moment à Mamoudzou.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Le titre Ier du livre V du code civil est complété par un article 2497 ainsi rétabli :
« Art. 2497. – Lorsque l’enfant est né à Mayotte, la durée du sursis à l’enregistrement de la reconnaissance prévue à la première phrase du troisième alinéa de l’article 316-1 ne peut excéder deux mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée. La durée du sursis prévue à la deuxième phrase du troisième alinéa du même article 316-1 est portée à trois mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée, lorsque l’enquête est menée, en totalité ou en partie, à l’étranger par l’autorité diplomatique ou consulaire. »
Mme la présidente. L’amendement n° 98, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 4, qui allonge la durée du sursis à l’enregistrement des reconnaissances d’enfant. De fait, le procureur de la République peut soit prononcer l’enregistrement d’une reconnaissance, soit décider d’un sursis.
L’allongement du délai ferait peser de lourdes conséquences sur les enfants concernés. En effet, l’ouverture de droits sociaux ou l’accès aux services de santé seraient alors également bloqués, compromettant la sécurité psychique et physique des enfants et renforçant la précarité et l’errance administrative des parents assujettis à des procédures longues et imprévues.
Par ailleurs, pouvez-vous, monsieur le ministre, me préciser – je vous le demande une fois encore – le nombre d’actes frauduleux de reconnaissance de maternité ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Le délai actuel de sursis à l’enregistrement d’une reconnaissance de paternité ou de maternité est insuffisant pour confirmer ou infirmer le caractère frauduleux de la démarche, compte tenu de la complexité des enquêtes à mener.
La commission pense que l’allongement, qui reste raisonnable, du délai a un but d’intérêt général : il permet de mieux détecter les reconnaissances frauduleuses, qui nuisent à l’intérêt de l’enfant. En effet, les auteurs de ces démarches souvent n’assureront pas leurs obligations parentales. Lutter contre ces fraudes, c’est œuvrer en faveur de l’intérêt de l’enfant.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 98.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Première phrase
Remplacer le mot :
deux
par le mot :
quatre
2° Seconde phrase
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
six
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Cet amendement vise à renforcer la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité à Mayotte. Concrètement, il a pour objet de porter de deux à quatre mois le délai initial de sursis que peut décider le procureur de la République pour vérifier une reconnaissance lorsqu’un doute sérieux pèse sur la sincérité de cette dernière. De plus, il tend à faire passer de trois à six mois ce délai lorsqu’une enquête est menée à l’étranger par les autorités diplomatiques ou consulaires.
Cette mesure est essentielle. En effet, les reconnaissances frauduleuses de paternité sont devenues à Mayotte un phénomène préoccupant, utilisées comme un moyen de contourner le droit de séjour. Le droit actuel ne permet pas aux services concernés, notamment au parquet, de mener des enquêtes complètes et sérieuses dans des délais aussi courts, surtout lorsqu’il faut interroger des autorités étrangères.
Il faut aussi rappeler que ces reconnaissances frauduleuses ont des effets très concrets : elles permettent à des personnes de rester sur le territoire, de toucher des aides sociales et, parfois même, d’accéder à la nationalité. Ce n’est pas un détail ! Maintenir les choses en l’état, en ne touchant pas aux délais trop courts pour enquêter, laisserait la porte ouverte à un système de détournement du droit qui affaiblit notre politique migratoire et désorganise un peu plus le département, déjà sous pression, qu’est Mayotte.
Par cet amendement, les garanties procédurales ne sont pas remises en cause. Il s’agit non pas de bloquer les reconnaissances de paternité légitimes, mais de permettre au parquet de travailler efficacement, grâce à des délais réalistes, et de distinguer ainsi les reconnaissances honnêtes de celles qui sont non justifiées, ces dernières étant parfois organisées dans une logique de fraude.
Cette mesure simple, ciblée et nécessaire s’inscrit dans une volonté de rétablir l’ordre républicain à Mayotte et de lutter contre les abus qui sapent à la fois notre droit et la confiance dans nos institutions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Mon cher collègue, allonger les délais de sursis à l’enregistrement dans les proportions que vous proposez serait disproportionné au regard de l’article 73 de la Constitution. Elles porteraient une atteinte excessive au droit à mener une vie familiale.
Sachant que le sursis est renouvelable une fois, l’allongement du délai à six mois en cas d’enquête menée à l’étranger – cela arrive assez fréquemment – pourrait priver l’enfant de reconnaissance durant une année, et donc mettre à mal sa filiation.
Le texte dans sa rédaction actuelle contient un dispositif suffisamment équilibré. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 est adopté.)
Article 5
Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 823-11, le montant : « 15 000 euros » est remplacé par le montant : « 75 000 euros » ;
2° La dernière ligne du tableau du second alinéa des articles L. 832-1 et L. 833-1 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 820-1 à L. 823-10 |
||
L. 823-11 |
La loi n° … du … |
||
L. 823-12 à L. 824-12 |
» ; |
3° La dernière ligne du tableau du second alinéa des articles L. 834-1, L. 835-1 et L. 836-1 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 822-5 à L. 823-10 |
||
L. 823-11 |
La loi n° … du … |
||
L. 823-12 à L. 824-12 |
» |
– (Adopté.)
Après l’article 5
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 76, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre V du code civil est ainsi modifié :
1° À l’article 2492, après le mot : « Mayotte », la fin de l’article est ainsi rédigée : « , à l’exception des articles 19-1, 19-3, 19-4, 20-5, 21-7 à 21-12, 21-13-1, 21-13-2. » ;
2° Les articles 2493, 2494 et 2495 sont abrogés.
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 102, présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 423-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 423-…. – Un enfant né à Mayotte, pour lequel l’article 2493 du code civil est applicable, se voit délivrer automatiquement, à l’âge de dix-huit ans, un titre de séjour pluriannuel portant la mention “vie privée familiale – jeune né en France”. »
La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Cet amendement a pour objet d’automatiser l’enregistrement d’une première demande de titre de séjour mention « jeune né en France ». Cette mesure vise, d’une part, les enfants qui remplissent les conditions classiques d’acquisition de la nationalité française, mais qui se voient empêchés de la demander du fait des nouvelles dérogations, d’autre part, les jeunes qui remplissent les conditions pour obtenir un titre de séjour.
En effet, les jeunes qui remplissent les conditions d’accès à la nationalité française, conditions en vigueur partout sur le territoire national sauf à Mayotte, sont obligés de faire une demande de titre de séjour à leur majorité. Ils sont alors confrontés à une multitude d’obstacles, qui vont du manque d’information à la fermeture ou au blocage de la préfecture.
Du fait de ces obstacles, l’obtention d’un titre de séjour prend d’un à trois ans. Pendant cette période, les enfants deviennent majeurs et obtiennent leur baccalauréat : le délai pour s’inscrire à Parcoursup expire et ils se retrouvent automatiquement en année blanche, sans possibilité d’étudier ou de travailler.
La préfecture et le rectorat ont créé un système qui permet à une poignée d’élèves de bénéficier d’un canal de régularisation auprès de la préfecture pour continuer leurs études. Il ne concernerait que 450 jeunes alors que plus du triple le nombre d’élèves deviennent chaque année bacheliers. Laisser les jeunes sans solution pour obtenir un titre de séjour revient à les condamner à l’errance et à les priver de leurs ambitions.
Mon groupe dénonce le phénomène des jeunes en errance à Mayotte, que la commission entretient en maintenant les intéressés dans l’errance administrative, et donc dans la précarité économique. Par conséquent, il s’agit par cet amendement d’élargir le canal de régularisation créé par la préfecture et le rectorat pour l’ouvrir aux autres bacheliers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Concernant l’amendement n° 102, la délivrance automatique d’un titre de séjour risquerait de créer un appel d’air, et donc d’accroître l’immigration irrégulière à Mayotte. Par ce texte, nous poursuivons un objectif contraire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 102.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Chapitre III
Mieux lutter contre l’immigration irrégulière et faciliter l’éloignement
Article 6
Le second alinéa du 3° de l’article L. 761-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :
« À Mayotte, l’étranger peut, dans des circonstances exceptionnelles, bénéficier d’une aide au retour. Il peut également, sous réserve de l’existence d’un projet économique viable, bénéficier d’une aide à la réinsertion économique ou, s’il est accompagné d’un ou plusieurs enfants mineurs, de mesures d’accompagnement. Les conditions d’attribution de ces aides sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’immigration et du ministre chargé des outre-mer, après avis du conseil d’administration de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. – (Adopté.)
Article 7
I. – Après le 5° de l’article L. 761-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :
« 5° bis L’article L. 741-5 est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« “Lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision, l’étranger accompagné d’un mineur qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 peut, pour le temps strictement nécessaire à l’organisation de l’éloignement et qui ne peut excéder quarante-huit heures, être placé dans des lieux spécialement adaptés à la prise en charge des besoins de l’unité familiale.
« “Les caractéristiques de ces lieux, indépendants des lieux de rétention et qui garantissent aux membres de la famille une intimité adéquate, dans des conditions qui tiennent compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, sont définies par décret en Conseil d’État.
« “En cas d’impossibilité matérielle de procéder à l’éloignement pour une raison étrangère à l’administration, l’autorité administrative peut proroger ce placement pour un nouveau délai de vingt-quatre heures.
« “L’étranger qui fait l’objet d’une décision de placement ou de prorogation de celui-ci en application des deuxième et quatrième alinéas du présent article peut la contester devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire dans un délai de quarante-huit heures. Le magistrat du siège du tribunal judiciaire statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant sa saisine.
« “Sous réserve de ces adaptations, les chapitres I à IV du titre IV du livre VII sont applicables.” ; ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2027.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié est présenté par Mme Narassiguin, M. Omar Oili, Mmes Artigalas et Le Houerou, MM. Lurel, Kanner et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 105 est présenté par Mmes Corbière Naminzo et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 145 est présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.
Mme Corinne Narassiguin. Nous n’aurions pas imaginé, monsieur le ministre, que, à l’occasion d’un texte portant sur la refondation de Mayotte, soit de nouveau posée la question de la rétention des mineurs.
Cette question, nous la pensions dernière nous puisque le Parlement, par la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, avait enfin voté – c’est l’une des rares mesures que nous avions approuvée dans ce texte – la fin du placement des mineurs en rétention.
Quels que soient les mots choisis et les efforts du Gouvernement pour ne pas employer celui de rétention, c’est pourtant bien une forme de rétention des mineurs à Mayotte que permettrait l’article 7.
Il faut dire les choses telles qu’elles sont : cet article permettra de placer des étrangers mineurs dans un lieu de privation de liberté. De toute évidence, les engagements du précédent gouvernement sont reniés.
Certes, la dernière loi immigration avait prévu une entrée en vigueur différée de la fin de la rétention des mineurs pour Mayotte, mais Gérald Darmanin avait assuré à la représentation nationale que cette entrée en vigueur différée à 2027 ne visait pas « à revenir sur la décision historique d’interdire l’enfermement des mineurs dans des centres de rétention administrative (CRA), y compris à Mayotte ».
De façon plus claire encore, il affirmait : « Ce que nous proposons c’est de reporter la date d’entrée en vigueur de cette mesure à Mayotte, pas d’y renoncer. » Le reniement est total, d’autant que vous avez déposé un amendement pour prolonger la mesure jusqu’au mois de juillet 2028.
Le Gouvernement cherche à rassurer et affirme que ces lieux ne sauraient être assimilés à des lieux de rétention, car ils seront « indépendants des CRA ». Qu’ils soient indépendants des CRA est une chose, mais cela ne signifie pas que les conditions de rétention y seront différentes. D’ailleurs, l’étude d’impact précise très clairement que ces lieux constitueront « un cadre plus restrictif de liberté » que ne l’est l’assignation à résidence, en raison, notamment, « d’un dispositif de surveillance plus resserré ».
Disons les choses clairement : il s’agit d’un rétablissement de la rétention des mineurs. Nous y sommes frontalement opposés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 105.
Mme Evelyne Corbière Naminzo. Nous demandons la suppression de cet article, qui vise à permettre l’enfermement des enfants en rétention.
Depuis 2012, la France a fait l’objet de huit condamnations par la CEDH pour avoir infligé des « traitements inhumains et dégradants » en rétention administrative.
L’enfermement administratif des enfants en rétention est interdit dans l’Hexagone depuis le 26 janvier 2025 et le sera à Mayotte à partir du 1er janvier 2027. La création d’unités familiales, quand bien même les conditions pourraient être moins dégradées que dans un CRA, constitue toujours une privation de liberté. La détention d’un enfant au motif du statut migratoire de ses parents est une violation des droits de l’enfant. Qui décide à sa naissance du statut administratif de ses parents ?
Je vous demande de voter contre cette disposition extrêmement préoccupante, indigne du pays qui prétend être celui des droits de l’homme !
Mme la présidente. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 145.
Mme Mélanie Vogel. Lors des négociations sur le pacte européen sur la migration et l’asile, le gouvernement français avait tenté de trouver une majorité d’États membres pour autoriser au niveau européen l’enfermement des enfants.
Cette tentative a échoué et nous avons progressivement abouti, en 2024, à une loi interdisant la rétention des mineurs. C’est une bonne chose : nous devrions en être fiers puisque l’enfermement des mineurs contrevient à nos engagements internationaux.
Que voyons-nous, ici, au travers d’un dispositif appelé « unité familiale » ? Rien de moins que la possibilité de placer en rétention des mineurs avec leurs parents, soit exactement l’inverse de ce que nous avons voté l’année dernière, conformément aux obligations internationales de la France.
Je rejoins les intervenants qui se sont exprimés avant moi. Il n’y a aucune raison valable pour qu’une mesure conforme aux droits humains dans l’Hexagone ne soit pas applicable à Mayotte. Pourquoi les enfants n’y bénéficieraient-ils pas des mêmes droits fondamentaux que ceux que la France est censée promouvoir et protéger partout sur son territoire, mais aussi à travers le monde ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Ces trois amendements visent à supprimer purement et simplement l’article 7, qui crée à Mayotte un régime spécifique de placement en unité familiale pour les étrangers accompagnés d’un mineur.
Replaçons le sujet dans son contexte. En 2023, 2 143 familles comprenant 2 909 mineurs accompagnants ont été placées en rétention à Mayotte, soit 97 % des mineurs en rétention sur tout le territoire national, pour une durée inférieure à vingt-quatre heures.
La loi du 26 janvier 2024 a prévu l’interdiction de la rétention des mineurs, même accompagnés. L’entrée en vigueur à Mayotte de cette interdiction a été reportée au 1er janvier 2027, compte tenu de la situation migratoire particulière de Mayotte. Ainsi que le Conseil d’État l’a relevé dans son avis sur le projet de loi, les particularités du territoire justifient pleinement des mesures dérogatoires en la matière.
Supprimer toute possibilité de rétention des mineurs reviendrait à conférer une immunité absolue contre l’éloignement aux clandestins parents d’un enfant mineur, l’assignation à résidence ne présentant pas les mêmes garanties pour assurer l’effectivité de l’éloignement. Je rappelle, au demeurant, que ces familles sont retenues dans des lieux spécialement dédiés et habilités localement.
Compte tenu du caractère massif de l’immigration familiale et de l’ampleur des reconnaissances frauduleuses de paternité, supprimer l’article 7 serait un frein majeur à l’éloignement des étrangers en situation irrégulière. La commission est donc défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. La suppression du placement des familles dans les centres de rétention est une mesure forte qui a été soutenue par le gouvernement précédent dans le cadre de la loi du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration.
Cette interdiction est effective depuis janvier 2024 sur l’ensemble du territoire, à l’exception du département de Mayotte dans lequel le législateur a choisi de laisser un peu de temps à l’exécutif.
Comme Mme la rapporteure vient de le souligner, la situation tout à fait exceptionnelle de Mayotte, compte tenu de la pression migratoire qui s’exerce sur l’archipel et de la nature de cette immigration irrégulière, majoritairement familiale, a nécessité le report de l’application de cette interdiction, afin de maintenir des capacités opérationnelles d’éloignement des étrangers en situation irrégulière accompagnés de mineurs.
Le Gouvernement n’a donc pas renoncé à l’objectif, à terme, d’interdire le placement en rétention des mineurs à Mayotte. C’est là où se situe notre débat. Le nombre de mineurs accompagnant leurs parents est particulièrement élevé au centre de rétention administrative de Pamandzi. Il avoisine chaque année les 3 000 depuis 2019 : il était de 2 900 mineurs accompagnants en 2023, contre 87 mineurs la même année pour l’ensemble de la France hexagonale. C’est bien la preuve que nous devons continuer à disposer à Mayotte d’infrastructures spécifiques permettant d’éloigner les familles.
Madame Narassiguin, vous affirmez que l’environnement des unités familiales sera similaire à celui des CRA, avec une « présence policière constante », des « appels réguliers aux haut-parleurs », des « grillages » et des « barbelés » – je vous renvoie à l’objet de votre amendement. Je connais votre engagement sur ces dossiers, et je le respecte pleinement, mais je veux vous dire qu’il n’en sera rien : les unités familiales seront des bâtiments indépendants des CRA, c’est-à-dire situés sur une emprise distincte, où l’intimité de chaque famille sera préservée.
Cette garantie figure dans le texte même de l’article 7. Comme l’énonce l’étude d’impact qui a valeur juridique, le régime de surveillance y sera plus léger. Il n’y aura aucun policier à l’intérieur, ni grillages, ni barbelés, ni haut-parleurs. De telles unités existent d’ailleurs dans des pays européens comme la Belgique.
Ces unités familiales n’auront pas vocation à accueillir l’ensemble des familles potentiellement concernées, mais elles permettront d’offrir une alternative plus sécurisée que l’assignation à résidence – compte tenu des problématiques de logement – pour permettre à la loi de la République, en l’occurrence celle qui prévoit l’éloignement des personnes en situation irrégulière, de s’appliquer.
En outre, il est inexact de prétendre que le dispositif de rétention des familles avec mineurs violerait nos engagements internationaux. Cinq arrêts du 12 juillet 2016 concernant la France ont rappelé que la rétention de familles avec mineurs ne méconnaît pas, par principe, les articles 3, 5 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il doit simplement s’agir d’une mesure de dernier ressort si aucune autre mesure n’apparaît suffisante pour la mise en œuvre des décisions de retour. Je vous invite à lire les arrêts de la CEDH A.B. et autres c. France du 12 juillet 2016.
Par ailleurs, ce dispositif est conforme à la directive dite Retour de 2008, dont l’article 17 prévoit que « les familles placées en rétention dans l’attente d’un éloignement disposent d’un lieu d’hébergement séparé qui leur garantit une intimité adéquate ».
Il est enfin compatible avec l’affirmation du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant par la Convention de New York.
Supprimer sèchement cet article reviendrait à compliquer à l’extrême de nombreux éloignements à Mayotte, alors que la pression migratoire doit être mieux jugulée. Autrement dit, cette suppression reviendrait à compliquer encore davantage la vie des Mahorais.
Pour ces motifs, je suis défavorable à ces amendements.
Pour répondre brièvement à la question qui m’a été posée, la reconnaissance frauduleuse est le fait de se servir d’une déclaration de filiation mensongère, souvent par des hommes de nationalité française, pour des enfants de mères étrangères en situation irrégulière. Cela facilite la régularisation du séjour de la mère, voire l’accès ultérieur à la nationalité française.
En 2023, 7 % des reconnaissances de paternité ont été considérées comme frauduleuses, soit 583 cas sur 8 328 : le phénomène n’est donc pas anodin. En 2022, cela représentait 20 % de la fraude détectée sur des documents français lors des demandes de titres de séjour, d’où les dispositions que nous avons prises tout à l’heure. C’est le sens de nos débats sur ce texte.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié, 105 et 145.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 35 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le III de l’article 86 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration est abrogé.
La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.
Mme Sophie Briante Guillemont. Cet amendement de réécriture va dans le même sens que les amendements de suppression précédents. Il vise à interdire sans délai le placement des mineurs en centre de rétention administrative à Mayotte.
Comme je l’ai souligné dans la discussion générale, le groupe du RDSE souhaite voter ce texte qui comporte de nombreuses mesures importantes pour l’avenir de Mayotte, mais cela nous sera très difficile si l’article 7 est maintenu en l’état.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Cet amendement, totalement irréaliste au regard de la situation à Mayotte, rendrait impossibles plusieurs milliers d’éloignements chaque année.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État. Même avis.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 35 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 36 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Masset, Gold et Grosvalet, Mme Pantel et M. Daubet, est ainsi libellé :