Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Jacques Lozach. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte fait suite à la mission d’information du Sénat sur l’intervention des fonds d’investissement dans le football français et entend en tirer des enseignements pour l’ensemble du sport professionnel.

Permet-il des avancées en matière de transparence, d’éthique, de solidarité, de justice budgétaire, de démocratie ? Nous pensons que c’est le cas – j’en veux pour preuve l’article 10 relatif à la lutte contre le piratage des contenus sportifs –, d’où notre assentiment général.

Cependant, dans le cadre de la recherche d’un nécessaire équilibre entre le rôle stratégique de l’État et l’autonomie du mouvement sportif, cette proposition de loi n’étudie pas toutes les implications sociales, sociétales ou économiques du sport professionnel, ce qui suscite un certain nombre d’observations de notre part.

Il y a seulement neuf mois, nous célébrions l’exceptionnel bilan sportif obtenu par la France aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, avec 64 médailles obtenues et 22 fédérations récompensées, témoignage d’une réussite globale incontestable. Ces résultats sont essentiellement dus à des sportifs professionnels et à une organisation sous-jacente qui fut transcendée par l’apport du programme « Ambition bleue ».

En termes de résultats, le sport professionnel ne se porte donc pas si mal que cela en France. Toutefois, il regroupe des sports collectifs et des sports individuels pour lesquels la donne est très différente. Par exemple, la Ligue professionnelle d’athlétisme, premier sport olympique, a connu un échec patent. Il ne faut donc pas analyser le sport professionnel au prisme d’une seule discipline, fut-elle la plus médiatisée.

Par ailleurs, évitons d’avoir une vision manichéenne de la réalité : il n’y a pas, d’un côté, les bons présidents de fédération et, de l’autre, les mauvais présidents de ligue, ou inversement !

Certains considéreront sans doute que, pour trouver le bon compromis entre autorégulation du système et interventionnisme de l’État ou des instances bénéficiant d’une délégation de l’État, on a poussé le curseur un cran trop loin du côté de l’interventionnisme. D’où la nécessité, lorsque cela sera possible, de procéder à une évaluation du texte, d’autant plus qu’il s’agit d’une proposition de loi, c’est-à-dire d’un texte sans étude d’impact ni avis du Conseil d’État.

Dans la quasi-totalité des cas, les relations entre les fédérations et les ligues ou entre les fédérations et les filières commerciales sont aujourd’hui au beau fixe. Néanmoins, les initiatives récurrentes en vue de la création de ligues privées ou les projets de lancement de compétitions internationales semi-fermées fragilisent les ligues nationales.

Nous rappelons notre attachement au principe de solidarité entre les premières divisions nationales d’un championnat et les divisions inférieures ; entre les équipes de France et les clubs ; entre les activités à caractère amateur et les activités à caractère professionnel. Il s’agit de solidarités que tout le monde revendique, mais qui sont mises à mal dans certaines circonstances. Par exemple, lors de la crise de la covid-19, certains présidents de club ont réclamé la suppression de la taxe Buffet, symbole de la solidarité entre sport amateur et sport professionnel, et dont le montant s’élève à seulement 6 % du budget du seul PSG…

En juillet 2020, la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale a publié un rapport d’évaluation de la loi du 1er mars 2017 visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs. Dans ses préconisations, elle a mis l’accent sur des enjeux qui demeureront partiellement en friche à l’issue de nos débats.

Ses rapporteurs ont ainsi réclamé une plus grande effectivité des chartes et comités d’éthique et de déontologie dans toutes les disciplines, et l’assurance que les directions nationales du contrôle de gestion (DNCG) disposent réellement des ressources humaines et matérielles nécessaires à l’accomplissement de leurs missions.

Ils ont en outre regretté un évident laxisme pour sanctionner les sportifs et les clubs qui font appel en toute connaissance de cause aux prestations de personnes ne possédant pas la qualité d’agent sportif, ou l’absence de prise en compte au niveau national de rapports et observations des chambres régionales des comptes qui ont décortiqué localement certaines pratiques de clubs professionnels.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous devrions intégrer ces recommandations dans toute approche du sport professionnel.

Dans ce texte, il y a un grand absent : l’argent public, via les collectivités locales.

L’occasion nous était pourtant donnée de dresser le bilan de la loi du 28 décembre 1999 portant diverses mesures relatives à l’organisation d’activités physiques et sportives, qui avait donné naissance à un nouveau statut juridique, celui de société anonyme sportive professionnelle. Cette loi visait à soulager les collectivités territoriales dans la foulée des mesures Pasqua de 1995, qui permettaient à ces collectivités de subventionner des clubs professionnels pour des missions d’intérêt général ou dans le cadre du financement de prestations. Ces missions auraient mérité d’être réexaminées, notamment à la lumière des nouvelles compétences du bloc communal – communes et EPCI.

La France, patrie de Pierre de Coubertin et pays créateur des trois plus grands événements sportifs internationaux, a sans doute un rôle à jouer en termes d’exemplarité et pourrait produire un effet d’entraînement au niveau européen, en matière de sport professionnel notamment. Or, depuis le traité de Lisbonne de 2009, a-t-on véritablement progressé en matière de politique sportive européenne ? Je ne le pense pas vraiment. Ainsi, le problème de la multipropriété, mentionné par certains de nos collègues, n’est toujours pas réglé.

En matière de méthodologie et de calendrier, sans doute eut-il été souhaitable de faire précéder toute réforme d’une grande conférence nationale sur le sport professionnel.

En conclusion, je dirai que le sport comme élément de la culture, comme facteur de socialisation et d’émancipation, ne se développera pas sans la référence à un sport professionnel exemplaire. Ce texte entend y contribuer, raison pour laquelle nous lui apportons notre soutien. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. Cyril Pellevat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le football fédère, émancipe et constitue un formidable vecteur de cohésion sociale. Il s’agit de l’un des sports les plus populaires en France.

Et pourtant, aujourd’hui, le football professionnel est en danger. À cet égard, le texte que nous examinons soulève des enjeux considérables, car le constat est sans appel : le modèle économique actuel est à bout de souffle, avec un déficit cumulé des clubs professionnels de football s’élevant à 1,2 milliard d’euros. Depuis 2020, le secteur traverse une crise sans précédent.

Les déceptions liées au partenariat entre la Ligue de football professionnel et le fonds d’investissement CVC Capital Partners, les départs successifs de Mediapro et Amazon, ou encore le piratage de contenus sportifs sont autant de facteurs qui n’ont fait qu’aggraver l’incertitude dans laquelle se trouvent nos clubs.

Face à cela, plusieurs leviers d’action existent. C’est ce que met en lumière le rapport de la mission d’information du Sénat sur l’intervention des fonds d’investissement dans le football professionnel français, qui formule trente-cinq recommandations, et dont s’inspire l’auteur de la présente proposition de loi.

Ce texte s’articule autour de trois axes : améliorer la gouvernance et la viabilité économique du sport professionnel ; mieux contrôler la gestion des ligues et des sociétés sportives ; renforcer la lutte contre le piratage de contenus sportifs.

Au-delà du sport professionnel, ce sont aussi nos territoires qui sont concernés par cette réforme, car le sport professionnel participe de nos identités locales.

En matière de gouvernance et de viabilité, la proposition de loi comporte des mesures clés, notamment pour garantir une gestion plus transparente. Les obligations des ligues, compte tenu de la subdélégation dont elles bénéficient, sont précisées. Elles devront ainsi rendre compte chaque année au ministère des sports de l’exercice de leur subdélégation.

Les critères de retrait ou de refus de renouvellement d’une subdélégation sont également précisés, même si ce point ne fait pas consensus.

En commission, un amendement du rapporteur a été adopté pour offrir la possibilité aux fédérations sportives de créer une seconde ligue professionnelle pour la gestion du sport professionnel féminin. Je salue cette mesure.

De même, la commission a voté des dispositions indispensables pour mieux encadrer la profession d’agent sportif. Le texte prévoit ainsi une obligation de formation mettant l’accent sur l’éthique ; il appelle à davantage de transparence en matière de rémunérations et prévoit le renforcement des sanctions en cas d’exercice illégal de cette profession.

La proposition de loi comprend également un volet concernant le contrôle de la gestion des ligues et des sociétés sportives. L’objectif est de préserver la viabilité du modèle économique du sport professionnel. À cet effet, l’article 9 instaure un contrôle de la Cour des comptes sur les ligues professionnelles et les sociétés commerciales.

Enfin, le texte comporte un important volet sur la lutte contre le piratage des contenus sportifs. Pour rappel, la loi du 25 octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique, adoptée sur l’initiative du Sénat, avait déjà mis en place des mesures fortes contre le piratage.

Elle avait notamment permis à l’Arcom de bloquer des sites transmettant illégalement des événements sportifs sur le fondement d’une ordonnance du président du tribunal judiciaire. Pour la seule année 2022, plus de 7 000 noms de domaines ont été bloqués à ce titre.

Compte tenu de l’ampleur du phénomène que représente le piratage, il est nécessaire d’aller plus loin. C’est ce que prévoit l’article 10 de la présente proposition de loi en renforçant les prérogatives de l’Arcom dans ce domaine. Cette autorité pourra ainsi mettre en place un système automatisé afin d’assurer le blocage en temps réel, pendant une manifestation sportive, de l’accès à des sources de diffusion illicites. À cet effet, elle aura la possibilité de communiquer aux signataires des accords volontaires anti-piratage une liste des données d’identification des services faisant l’objet de blocages.

Le texte prévoit également des délits spécifiques inspirés de l’infraction de contrefaçon de droit d’auteur prévue par le code de la propriété intellectuelle. Ces nouveaux délits viseraient le fait d’éditer ou de mettre à disposition du public des sites ou services de piratage sportif ou de commercialiser des boîtiers ou logiciels y donnant accès.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de ce texte. Néanmoins, nous resterons attentifs aux modifications qui pourraient y être apportées à la faveur de l’examen de la centaine d’amendements déposés.

Je conclurai par l’évocation des États généraux du football professionnel, lancés ce printemps par la Fédération française de football. À cette occasion, Philippe Diallo a dénoncé un problème structurel tenant au modèle économique même sur lequel repose le football professionnel, à savoir les droits audiovisuels et le système des transferts.

Si la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui est ambitieuse et prévoit des mesures essentielles, il est indéniable qu’une restructuration en profondeur du secteur devra s’opérer, en impliquant toutes les parties prenantes. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC et au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Grosperrin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. Jacques Grosperrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui est le fruit du travail exigeant des sénateurs Michel Savin et Laurent Lafon.

La loi visant à démocratiser le sport en France, promulguée en 2022, représentait un tournant en faveur d’un modèle sportif plus inclusif et transparent. Cependant, elle n’a pas suffi à résoudre les dysfonctionnements institutionnels et économiques mis en lumière par le rapport sur la gouvernance de la Ligue de football professionnel (LFP).

Je ne suis pas aussi enjoué que vous, madame la ministre, car le modèle économique du football français est à bout de souffle. La domination du PSG ne suffit plus à masquer la perte de compétitivité de nos clubs. Des scandales économiques, comme ceux liés à Mediapro et CVC Capital Partners, ont plongé les ligues professionnelles dans une situation financière précaire. Les pertes des clubs français sont estimées à 270 millions d’euros après droits de mutation, ce qui porte leur déficit structurel cumulé à plus d’un milliard d’euros. La rupture récente entre la LFP et DAZN a encore aggravé cette incertitude financière.

Des problèmes de gouvernance majeurs ternissent le sport de haut niveau, comme en témoignent certaines affaires récentes, que ce soit dans le rugby – je pense aux révélations concernant un président de fédération – ou dans le football – je fais référence aux relations brumeuses entre le président de la LFP et le président d’un grand club français.

Ces situations, cette « hémorragie », prospèrent en raison de l’omerta qui gangrène la gouvernance des fédérations. Le mot est fort, madame la ministre, mais je l’assume, car il décrit une réalité.

Face à une gouvernance obsolète et antidémocratique, une réponse législative était nécessaire pour rétablir équilibre et transparence. Il y a lieu de s’en réjouir, monsieur le rapporteur.

Ce texte apporte des réponses claires.

Tout d’abord, il vise à rétablir la confiance dans les institutions sportives.

À cet égard, le plafonnement des rémunérations des dirigeants dans les instances sportives délégataires et l’instauration d’une part limitée de représentants des clubs à statut professionnel au sein de l’assemblée générale des fédérations marquent la fin d’une certaine forme de clanisme.

La proposition d’associer les supporters à la gouvernance du sport à titre consultatif est une avancée, même si je regrette que leurs voix ne soient pas davantage prises en compte.

Ce texte vise à sécuriser la délégation et à encadrer les montages capitalistiques. Il renforce les obligations des ligues et offre la possibilité aux fédérations de leur retirer leur subdélégation. Lors de sa conférence de presse du 12 mai dernier, Philippe Diallo a dressé un constat clair et sans ambages. Il a proposé de refonder le système actuel du football français, avec l’idée fondatrice de calquer notre modèle sur la Premier League anglaise.

Bien que tentante, cette proposition est-elle adaptée aux réalités françaises ? Si nous voulons réellement réconcilier compétitivité et solidarité en encadrant la répartition des droits télévisuels, comme le prévoit l’article 7, nous ne devons pas prendre exemple sur le système anglais, favorable aux meilleures équipes.

En ce qui concerne la gestion des ligues et des sociétés sportives, je m’interroge sur la permanence, l’indépendance et les pouvoirs réels de la DNCG.

Par ailleurs, cette proposition de loi vise à mieux lutter contre le piratage des contenus sportifs, un phénomène qui coûte chaque année des dizaines de millions d’euros à l’écosystème du sport et à l’État, ainsi privé de recettes fiscales. Ces mesures sont nécessaires pour protéger les droits des diffuseurs et assurer des revenus stables aux clubs.

Cependant, il nous faut rester prudents sur la capacité de l’Arcom à bloquer efficacement les services pirates souvent hébergés sur des sites miroirs difficiles à détecter et à fermer. Il faut aussi éviter que des services légaux soient touchés par erreur, car ils reposent parfois sur les mêmes infrastructures d’hébergement que les sites illégaux.

Ce texte prévoit des blocages en temps réel et de nouveaux délits visant les plateformes illégales. Ces mesures sont importantes, mais elles ne résoudront rien tant que l’on ne s’attaquera pas aussi aux causes économiques du piratage, comme le prix des abonnements, devenus trop chers, ou l’inaccessibilité des opérateurs locaux aux droits de diffusion.

Il est donc crucial, madame la ministre, de bâtir une offre légale, riche et accessible à tous les passionnés. (Mme la ministre marque son approbation.) Pour cela, il nous faudra organiser des états généraux de la diffusion des contenus sportifs, réunissant tous les acteurs, afin d’élaborer un modèle plus juste et équilibré.

En cet instant, j’ai une pensée pour le FC Sochaux-Montbéliard, berceau du professionnalisme. Sans gouvernance responsable, même les clubs les plus anciens et les plus enracinés peuvent tomber…

Ce texte transpartisan remet le sport professionnel en ordre de marche. Vous l’aurez compris, le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi, car elle conjugue performance et responsabilité. La transparence doit être la règle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions. – M. Adel Ziane applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme beaucoup d’entre vous, j’aime le sport et je suis un fervent supporter de nos athlètes et des équipes françaises. Même si je suis davantage amateur de l’ovalie que du ballon rond, surtout quand il s’agit du club de Grenoble, je dois dire que l’évolution du football professionnel français fait peine à voir. On peut même dire qu’elle nous irrite. Je parle non pas des joueurs, bien évidemment, mais de sa structure, de son organisation et de son modèle économique.

Dans un contexte où les dérives se multiplient depuis de nombreuses années, force est de constater que les inégalités entre les clubs se sont renforcées et que depuis le départ de la société Mediapro, en 2020, le nombre de diffuseurs a augmenté.

Dernier épisode en date : le conseil d’administration de la Ligue de football professionnel a acté, le 2 mai dernier, la fin de la collaboration avec DAZN comme principal diffuseur de la Ligue 1.

En outre, le nombre de supporters qui regardent désormais les matchs sur des plateformes illégales a explosé, ce qui entraîne un manque à gagner considérable pour les clubs et, dans une moindre mesure, pour l’État, une perte évaluée à 280 millions d’euros en 2023.

Tous ces constats figurent dans le rapport de la mission d’information sur l’intervention des fonds d’investissement dans le football professionnel français, publié en octobre 2024. Ce rapport très instructif, que nous pouvons saluer collectivement, a été une source de réflexion importante pour l’élaboration du texte que nous examinons cet après-midi.

Cette proposition de loi est à mes yeux utile et nécessaire. Il prévoit un équilibre satisfaisant pour la plupart des acteurs concernés.

Tout d’abord, le texte accompagne avec lucidité la transformation de la gouvernance du football professionnel. Et quoi de mieux pour transformer une gouvernance que de mettre en place une nouvelle organisation ?

Ainsi, l’article 6 offre à la FFF la possibilité de créer une société commerciale associant la Fédération aux clubs détenteurs des droits audiovisuels. Il s’agira d’une véritable société de clubs, sur le modèle du championnat anglais, la Premier League, qui a fait ses preuves, et dans laquelle la FFF disposera d’un pouvoir élargi, conformément au projet souhaité par son président, Philippe Diallo.

Contrairement à la FFF, les autres ligues sportives peuvent créer des sociétés commerciales depuis la loi de 2022 visant à démocratiser le sport en France, afin de mieux gérer les droits sportifs. Désormais, la FFF pourra, elle aussi, disposer d’une nouvelle organisation.

Pour que la transition du football professionnel français puisse se faire dans les meilleures conditions, je défendrai un amendement visant à porter de trois à six mois le délai prévu à l’article 11 bis.

Mes chers collègues, ce texte ne prévoit pas seulement une réforme de la gouvernance du football professionnel, il propose également une refonte de l’organisation du sport professionnel en France. Je pense à l’encadrement de la rémunération des dirigeants des fédérations sportives, au renforcement de l’éthique à travers les nouvelles obligations de déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), aux nouvelles incompatibilités ou encore à l’instauration du contrôle par la Cour des comptes des ligues professionnelles et des sociétés commerciales.

J’évoquerai surtout les nouvelles règles concernant la mise en œuvre des subdélégations dont bénéficient actuellement les six ligues professionnelles de basketball, de cyclisme, de handball, de rugby, de volley-ball et de football.

En effet, les ligues professionnelles auront de nouvelles obligations. Elles devront rendre compte de l’exercice de la subdélégation dont elles bénéficient et remettre un rapport sur ce sujet. Elles devront respecter le plafond applicable à la rémunération du président du conseil d’administration d’une entreprise publique et l’appliquer à celles d’un dirigeant ou d’un salarié de ligue. Elles devront également respecter l’incompatibilité de fonction entre le fait de diriger ou d’être membre de l’organe délibérant d’une ligue professionnelle et celui de détenir des intérêts ou d’exercer des fonctions au sein d’une entreprise de diffusion audiovisuelle.

Sur les enjeux de rémunération, je proposerai par amendement d’exclure la référence à la convention de subdélégation pour éviter que ces questions n’empoisonnent les négociations entre les fédérations et les ligues.

L’article 2 écarte le principe de tacite reconduction d’une convention de subdélégation afin de maintenir le dialogue entre les structures. Il s’agit d’encadrer le retrait ou le non-renouvellement de la subdélégation qui pourrait entraîner une dissolution de la ligue et le transfert de ses biens à la fédération l’ayant créée. Cet encadrement, s’il est justifié, doit être limité et précis, compte tenu des inquiétudes légitimes des ligues.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement tendant à supprimer l’alinéa 7 de l’article 2, qui prévoit qu’une fédération sportive délégataire puisse retirer la subdélégation qu’elle a octroyée « en cas de difficulté sérieuse de financement des activités sportives ». Je proposerai également, par le biais d’un autre amendement, de porter de deux à quatre mois le délai maximum prévu pour le retrait ou le non-renouvellement de la convention.

Mes chers collègues, ces nouvelles contraintes devraient faire l’objet d’un rééquilibrage. Cela a été fait en commission et j’espère que nous irons plus loin en séance au cours de nos débats.

Toutefois, si ce texte instaure de nouvelles obligations pour les ligues, il comporte également d’autres mesures, à l’instar de l’autorisation de création d’une seconde ligue féminine. Une telle possibilité est la bienvenue dans un contexte où le sport professionnel féminin prend de l’ampleur et gagne en visibilité.

Par ailleurs, l’article 2 bis, créé en commission, permet d’encadrer la profession d’agent sportif afin de lutter contre l’implication d’intermédiaires ne disposant pas de la licence d’agent.

Je dirai un mot également sur le renforcement de la lutte contre le piratage des contenus audiovisuels sportifs. L’article 10 permettra à l’Arcom de bloquer en temps réel, grâce à un système automatisé, la diffusion des contenus sportifs piratés, et ce sans ordonnance judiciaire, contrairement à ce qui se fait depuis 2021. Cette mesure prometteuse fera, je n’en doute pas, consensus dans cet hémicycle.

Ce texte, je le redis, est utile et nécessaire. Il a été enrichi en commission et j’espère que nos débats en séance permettront d’aboutir à une version équilibrée. Les membres du groupe RDPI pourront ainsi le voter avec autant de fierté que celle que nous éprouvons lorsque nous voyons des sportifs français gagner !

Mme la présidente. La parole est à M. Ahmed Laouedj. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Ahmed Laouedj. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d’abord à saluer la qualité du travail effectué sur cette proposition de loi.

Ce texte vise à mieux encadrer un secteur aussi influent que le sport professionnel et à lui donner un cadre juridique à la hauteur des enjeux économiques, sociaux et éthiques du secteur. Nous étions nombreux ici l’appeler de nos vœux.

Nous n’examinons pas aujourd’hui une simple réforme technique, nous avons avec ce texte l’occasion de rééquilibrer les forces dans le monde du sport, de renforcer la régulation de ce secteur, sa transparence et sa responsabilité. Surtout, nous pouvons redonner du souffle à un modèle parfois à bout de course.

Il faut le dire clairement, le sport professionnel français, en particulier le football, fait aujourd’hui face à de multiples défis : instabilité économique, gouvernance parfois insuffisamment lisible, tensions croissantes autour des droits audiovisuels… Le cas Mediapro a laissé des traces. Et chacun ici sait que la prochaine négociation sur les droits télévisuels sera un moment crucial.

Sur tous ces aspects, la proposition de loi comporte des avancées en prévoyant un meilleur encadrement de la gestion des ligues professionnelles, un recentrage des fédérations dans le pilotage global, des garde-fous contre les conflits d’intérêts et les excès de rémunération, une transparence accrue grâce au contrôle de la Cour des comptes, et une ouverture timide, mais bienvenue, à l’égard des supporters et des territoires.

Mais si nous voulons bâtir un modèle sportif plus durable, plus équilibré, nous devons aller plus loin et, surtout, ne pas oublier une pièce maîtresse de l’écosystème : le sport amateur.

Mes chers collègues, il existe aujourd’hui un déséquilibre croissant entre deux mondes qui ne se parlent plus assez : d’un côté, celui du haut niveau, de l’exposition médiatique et de la performance ; de l’autre, celui des clubs de quartier, des éducateurs, des bénévoles, qui forment au quotidien les champions de demain.

Je le dis avec conviction : nous ne pourrons pas repenser le sport professionnel sans associer plus étroitement celles et ceux qui tiennent le sport dans nos territoires.

C’est dans cet esprit que les membres du groupe du RDSE ont déposé plusieurs amendements visant à renforcer l’équilibre de cette proposition de loi.

Nous proposerons ainsi de mettre fin à la multipropriété, de prévoir des exigences supplémentaires pour protéger l’intégrité du joueur, et, enfin, de donner les moyens au ministre de tutelle de contrôler les flux de capitaux étrangers dans nos territoires.

Pour ma part, j’ai souhaité que les clubs amateurs et les milliers de bénévoles qui font vivre le sport dans nos territoires ne soient pas oubliés dans le cadre de cette réforme.

Je me félicite que le Gouvernement ait repris à son compte ma proposition de soutenir les clubs amateurs par l’intermédiaire des fédérations.

Le sport est un outil d’émancipation, de cohésion, de santé, d’éducation. Il est aussi un formidable levier d’intégration sociale, notamment dans des territoires comme la Seine-Saint-Denis, que j’ai l’honneur de représenter.

Dans ces territoires, le sport ne se résume pas à un spectacle du week-end. Le rôle des clubs amateurs est essentiel. Il est temps de le reconnaître à sa juste valeur.

Enfin, je tiens à remercier l’ensemble des acteurs du monde sportif, qu’ils soient professionnels ou amateurs, qui, chaque jour, s’engagent avec passion. Il s’agit non pas de dresser les uns contre les autres, mais de bâtir ensemble un modèle plus juste et plus solidaire.

C’est dans cet esprit que je salue les avancées que permet cette proposition de loi, tout en appelant à faire preuve d’une vigilance particulière lors de sa mise en œuvre. Par ailleurs, j’y insiste, il conviendra de l’articuler étroitement avec les politiques publiques en faveur du sport pour tous.

Les membres du groupe du RDSE voteront bien sûr ce texte.