M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble de la proposition de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons aujourd’hui au terme d’un long chemin pour des professionnels indispensables à notre système de santé : les infirmières et les infirmiers de France. Cet accord, trouvé en commission mixte paritaire le 3 juin dernier, était attendu depuis maintenant plus de deux ans par les concernés. Reconnaissons-le : il était temps de répondre au mal-être grandissant, à la perte d’attractivité et à l’essoufflement de la profession, pourtant au cœur de nos soins.
Comme dans de nombreux métiers du médico-social, une part importante des professionnels soignants, tels que les infirmiers, envisage de quitter la profession dans les prochaines années. Cette réalité, déjà largement décrite, reste à mes yeux assez alarmante. Elle illustre avec force la crise d’attractivité qui touche le secteur en raison de formations insuffisantes, d’une rémunération peu valorisante et de conditions de travail de plus en plus difficiles. À cela s’ajoute la question des déserts médicaux, face auxquels nos politiques publiques peinent encore à apporter des réponses à la fois efficaces et acceptées par les territoires.
D’abord, ce texte permet de refonder le socle législatif de la profession. Six grandes missions viennent désormais définir clairement le métier d’infirmier : les soins, la coordination, la mise en œuvre du parcours de santé, la prévention, la formation et la recherche.
Pour la première fois, la loi reconnaît formellement les « consultations infirmières » et le « diagnostic infirmier », deux actes pourtant déjà largement pratiqués, mais jusqu’ici invisibles dans notre droit.
Le changement de paradigme est réel pour la profession : il permet enfin de sortir d’une logique d’actes techniques pour aller vers une approche par compétences et responsabilités.
Ensuite, ce texte ouvre de nouveaux horizons professionnels.
Premièrement, les fameux infirmiers en pratique avancée pourront désormais exercer dans de nouveaux champs : la santé scolaire, la protection maternelle et infantile et l’aide sociale à l’enfance. Force est de constater que nous en avons terriblement besoin.
Deuxièmement, le statut d’infirmier coordonnateur, particulièrement dans les Ehpad, est enfin reconnu dans la loi.
Troisièmement, les infirmiers scolaires sont désormais considérés comme une spécialité infirmière à part entière.
Quatrièmement, mon groupe salue l’expérimentation dans cinq départements, dont au moins un en outre-mer, de l’accès direct à un infirmier, c’est-à-dire sans passer par le médecin traitant, au sein de structures d’exercice coordonné. Nous soutenons pleinement la mesure pour améliorer l’accès aux soins, notamment dans les zones sous-dotées.
Cinquièmement, grâce à un amendement sénatorial, une forme de pratique avancée par spécialité pourra se développer. Je pense aux blocs, à l’anesthésie et à la puériculture. C’est une reconnaissance supplémentaire.
Enfin, par ce texte, le législateur ne s’arrête pas à des questions de structuration : il touche aussi à la vie concrète des professionnels. Ainsi, une procédure facultative est prévue pour la reprise d’activité après une interruption de carrière, une mesure bienvenue dans une profession très féminisée.
La proposition de loi permet également d’engager la discussion sur la pénibilité du métier, un point crucial qu’il faut continuer à faire vivre dans les négociations salariales.
De plus, elle contient l’harmonisation des indemnités kilométriques pour les infirmiers exerçant en milieu rural. Cette mesure de bon sens est enfin à la hauteur des contraintes réelles de terrain.
L’accord trouvé en CMP conserve les grands équilibres : il respecte l’avis de l’Académie nationale de médecine sur les prescriptions tout en consolidant l’autonomie professionnelle des infirmiers ; il permet de clarifier le cadre de l’accès direct sans remettre en cause le rôle du médecin traitant.
Ce compromis est utile, solide et respectueux du travail parlementaire. Il compte parce qu’il reconnaît enfin les compétences réelles des infirmiers, sur lesquelles repose en grande partie notre système de santé, parce qu’il soulage les médecins dans un contexte de forte tension et, surtout, parce qu’il offre des perspectives de carrière attractives, à un moment où le pays a besoin de recruter 80 000 infirmiers supplémentaires d’ici à 2050 afin d’assurer une couverture complète des besoins dans nos territoires.
Comme l’avait mentionné mon collègue Dominique Théophile, je tiens à saluer une nouvelle fois l’esprit de responsabilité qui a présidé à l’élaboration et à l’adoption de ce texte. (Mme Maryse Carrère applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Anne-Sophie Romagny applaudit également.)
Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte de pénurie de soignants et de vieillissement de la population, nous sommes nombreux à constater que les infirmiers occupent une place essentielle auprès des patients – comme cela a toujours été le cas. Ils ont la main qui rassure, le regard qui veille et le geste qui soigne.
La proposition de loi que nous nous apprêtons à voter vise à reconnaître pleinement la réalité de leur exercice, tel qu’il a évolué au fil des années. Elle répond à des attentes anciennes et légitimes de toute une profession, qui agit avec compétence, engagement et discrétion auprès des patients.
Le cadre juridique actuel, fondé sur un décret de 2004, est devenu inadapté. Il ne reflète plus la diversité ni la richesse des missions accomplies quotidiennement par ces professionnels, que ce soit en établissement, en libéral ou dans les structures médico-sociales.
Dans cet esprit, ce texte a pour objet de redéfinir les contours du métier d’infirmier au travers de plusieurs avancées majeures.
Premièrement, il consacre les missions socles de la profession et introduit deux nouvelles notions jusqu’ici réservées au champ médical : la consultation infirmière et le diagnostic infirmier. Par ailleurs, il ouvre un droit de prescription de certains produits de santé et d’examens complémentaires, et autorise l’accès direct pour les soins de premier recours.
Deuxièmement, le texte renforce le rôle des infirmiers en pratique avancée, qui pourront désormais exercer dans des secteurs jusque-là fermés : protection maternelle et infantile (PMI), santé scolaire, aide sociale à l’enfance. Les infirmiers spécialisés – anesthésistes, de bloc, puéricultrices – auront accès à la pratique avancée tout en conservant leur spécialité, suivant leur demande.
Pour ce qui concerne les IPA, le vrai enjeu est de développer le nombre de ces praticiens et leur action en médecine de ville.
Troisièmement, saluons la reconnaissance comme spécialité infirmière des infirmiers coordonnateurs en Ehpad, conformément aux recommandations du Sénat, ainsi que des infirmiers scolaires et universitaires. Je me félicite que la commission mixte paritaire ait finalement choisi de maintenir cette avancée.
Les infirmières scolaires exercent, en effet, une mission singulière, au plus près des élèves, qui va bien au-delà des soins. Elles sont en première ligne, notamment face aux fragilités psychologiques des élèves, sujet cher au groupe du RDSE. Leur rôle est profondément ancré dans l’écoute, la prévention et l’accompagnement. Reconnaître une spécialité dédiée revient à répondre à une attente ancienne de la profession, mais aussi à adresser un signal de reconnaissance indispensable à l’heure où le métier peine à attirer.
Quatrièmement, une expérimentation d’accès direct est lancée dans cinq départements : pendant trois ans, les patients pourront consulter une infirmière en première intention pour des actes ne relevant pas de son rôle propre. En première lecture, le Sénat avait adopté deux amendements identiques, portés par notre groupe et les rapporteurs, visant à réserver l’accès direct, en ambulatoire, aux seuls infirmiers exerçant dans les structures d’exercice coordonné les plus intégrées.
Je me réjouis que la CMP ait conservé la rédaction issue du Sénat. Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), en raison de leur grande diversité, ne garantissent pas toujours un niveau de coordination suffisant entre les professionnels de santé. J’appelle toutefois à la vigilance sur les modalités concrètes de l’expérimentation hors champ de compétences, notamment sur la fluidité de la transmission des informations entre infirmier et médecin, sur le maintien du rôle pivot du généraliste et sur l’évaluation impérative du dispositif avant une éventuelle généralisation.
Cinquièmement, une procédure de reprise d’activité, pour les professionnels ayant interrompu leur carrière, complète utilement la proposition de loi en conciliant exigence de qualité et accompagnement adapté.
Ce texte consensuel est attendu depuis longtemps par les professionnels eux-mêmes. Toutefois, soyons lucides : cette reconnaissance s’accompagne de deux exigences impératives.
En premier lieu, les décrets d’application devront être publiés rapidement. Le précédent de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, nous l’a appris : un texte sans décret est une promesse sans effet !
En second lieu, la question de la revalorisation financière ne peut plus être éludée. Le partage des compétences doit s’accompagner d’un partage de la reconnaissance. Cela passe par une meilleure rémunération.
Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE apportera son soutien à ce texte en souhaitant qu’il contribue à renforcer un système de santé en souffrance, qui tient grâce au dévouement de ces professionnels. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Marie-Pierre Richer applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour le groupe Union Centriste. (M. Laurent Burgoa applaudit.)
Mme Anne-Sophie Romagny. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte, dont j’ai eu l’honneur d’être rapporteure aux côtés de Jean Sol, marque une étape décisive et bienvenue dans l’évolution et la reconnaissance de la profession d’infirmier.
Je concentrerai mon propos sur les dispositions que j’ai plus particulièrement suivies en tant que rapporteure.
L’article 2 de la proposition de loi permet d’apporter au statut de la pratique avancée des évolutions attendues par les professionnels.
D’abord, il a pour objet de fixer le cadre législatif nécessaire à la reconnaissance d’une forme de pratique avancée chez les infirmiers de spécialité : anesthésistes, de bloc opératoire et puériculteurs. De fait, un amendement adopté sur notre initiative en première lecture au Sénat a permis de clarifier la rédaction retenue en indiquant que chaque spécialité pourrait se voir reconnaître, en temps voulu, une forme de pratique avancée spécifique, qui ne se recoupe pas avec celle des IPA.
Ensuite, il est prévu à l’article 2 que les domaines d’intervention en pratique avancée puissent « être définis selon une approche populationnelle », ce qui répond à une demande forte des IPA.
Enfin, l’article 2 ouvre l’exercice en pratique avancée à de nouveaux lieux, notamment aux établissements scolaires, afin de permettre aux infirmiers de ces structures d’évoluer professionnellement, s’ils le désirent. Comme dans l’ensemble des terrains d’exercice reconnus pour l’instant, la pratique avancée s’y exercera en lien avec un médecin, ainsi que l’a souhaité notre assemblée.
Le texte de l’article 2 issu du Sénat est équilibré. Il satisfaisait à la fois les infirmiers en pratique avancée, les infirmiers de spécialité et l’Ordre. Aussi la CMP n’y a-t-elle apporté que des modifications d’ordre rédactionnel.
Inséré par le Sénat, l’article 1er quater A été maintenu à l’issue de la commission mixte paritaire. Il confère un statut d’infirmier de spécialité aux infirmiers de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, et ouvre la voie à un diplôme de niveau bac+5 pour ces professionnels, dont la formation connaît actuellement de trop grandes disparités entre les académies.
En reconnaissant que l’exercice d’infirmier scolaire requiert des qualités et des compétences spécifiques, le législateur envoie un message fort de confiance à ces professionnels qui œuvrent sans relâche pour la santé de nos enfants, dans des conditions de plus en plus dégradées.
L’article 1er ter, qui renforce l’accompagnement à la reprise d’activité, a connu des modifications substantielles lors de la commission mixte paritaire.
En premier lieu, il y est prévu une procédure d’évaluation des compétences pour les infirmiers souhaitant reprendre leur activité après une interruption d’au moins six ans. L’évaluation et, le cas échéant, les formations ou stages complémentaires étaient rendus obligatoires dans le texte issu du Sénat. Sur notre initiative, la CMP a réécrit ce dispositif pour l’inscrire dans une démarche d’accompagnement, fondée sur le volontariat.
Rendre cette procédure contraignante aurait, en effet, envoyé un signal de défiance aux professionnels, contraire à l’esprit du texte. L’objectif est de fluidifier le retour à l’activité en offrant aux infirmiers qui douteraient de leurs compétences la possibilité de les faire évaluer, à leur demande, et de bénéficier s’ils le souhaitent de mesures de formation théorique ou pratique afin d’aborder avec davantage de sérénité leur reprise de fonctions.
En second lieu, afin d’améliorer le suivi de la démographie infirmière, l’article 1er ter dans sa rédaction issue du Sénat faisait obligation aux infirmiers de déclarer à l’ordre toute interruption d’activité excédant une certaine durée, fixée à six ans sur l’initiative du Gouvernement à la suite du débat en séance publique. Comme la commission l’avait alors signalé, ce choix n’aurait pas permis à l’Ordre de disposer d’une visibilité satisfaisante sur les interruptions d’activité. La CMP a donc souhaité renvoyer à un décret la fixation exacte du seuil et borner celui-ci à trois ans.
Enfin, l’article 2 bis, inséré au Sénat et adopté sans modification lors de la CMP, renvoie aux partenaires conventionnels la conception d’une définition uniforme de l’agglomération, afin d’assurer une meilleure équité dans la facturation des indemnités kilométriques.
Le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte, qui constitue une avancée majeure pour la profession d’infirmier. Elle est attendue, légitime et profondément juste. Cette proposition de loi vient saluer l’expertise, l’engagement et la rigueur de celles et de ceux qui, chaque jour, soignent, accompagnent et soulagent les patients avec courage, dans des conditions souvent dégradées. Profitons de cette tribune pour leur exprimer, encore, notre reconnaissance ! Il nous appartient maintenant, mes chers collègues, d’adopter définitivement ce texte afin de permettre son entrée en vigueur rapide. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Marie-Pierre Richer et M. Bernard Jomier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a trouvé un accord sur la proposition de loi sur la profession d’infirmier. C’est une très bonne nouvelle pour les intéressés, lesquels attendent depuis des années une reconnaissance et une revalorisation de leur métier.
Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos propos sur votre ambition, traduite par la lettre de cadrage que vous mettez en avant pour les futures négociations. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que mon groupe sera des plus attentifs et vigilants à ce que les infirmiers libéraux voient leur rémunération effectivement revalorisée.
J’insiste sur le secteur hospitalier, où les salaires restent extrêmement faibles alors que ces derniers sont précisément un élément d’attractivité essentiel. En effet, 50 % des infirmières quittent l’hôpital au cours de leurs dix premières années d’exercice en raison de la faiblesse de la rémunération.
Mme Céline Brulin. Par ailleurs, le Sénat avait souhaité reconnaître la pénibilité du métier. Je tiens à la mettre en avant, même si la CMP n’a pas fait ce choix : il faut absolument la prendre en compte, même si cette profession est très belle, comme chacun dans cet hémicycle l’a décrit avec ses mots.
La reconnaissance des missions du métier, la création de consultations infirmières, l’autorisation de prescrire des médicaments et la consécration d’un accès direct aux infirmiers de premier recours ne seront à nos yeux un réel progrès que si ces mesures se traduisent et se concrétisent par des revalorisations.
De la même manière, le texte reconnaît la pratique avancée dans l’exercice des différentes spécialités. Le Sénat a fait un travail intéressant pour clarifier la différence entre spécialité et pratique avancée. Toutefois, je tiens à préciser qu’il faut financer les formations. De nombreux établissements hospitaliers souhaiteraient pouvoir accompagner les professionnels qui désirent s’orienter vers la pratique avancée, mais n’ont pas les moyens de payer la formation et le remplacement des praticiens concernés.
Je me réjouis particulièrement que la commission mixte paritaire ait refusé la suppression de l’article 1er quater A. Celui-ci a été introduit par le Sénat afin de confier un statut d’infirmier de spécialité aux infirmiers de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur. Les enjeux de santé de notre jeunesse, et spécifiquement de santé mentale – je fais un clin d’œil à Jean Sol, qui est comme moi rapporteur d’une mission d’information sur le sujet –, nécessitent cette consécration.
Je terminerai mon intervention sur les conditions d’études dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi). Nous devons continuer de travailler sur le sujet. Les chiffres montrent une progression importante des abandons dans ces structures, en contradiction avec les besoins de notre pays. Ce problème ne concerne pas uniquement la première année puisque 7 % des étudiants abandonnent en deuxième année et 4 % en troisième année.
Ces chiffres témoignent selon nous d’un profond malaise et d’un manque d’accompagnement pédagogique et social. Selon la très intéressante Enquête bien-être de 2025 de la Fédération nationale des étudiant.e.s en sciences infirmières (Fnesi), les chiffres sont alarmants. Il faut nous pencher sur la question pour apporter des solutions.
Lors de nos débats sur ce texte en première lecture, mon groupe avait déposé un amendement visant à sortir les Ifsi de la plateforme Parcoursup. Monsieur le ministre, vous aviez indiqué partager notre analyse en reconnaissant qu’« il y a quelque chose qui ne va pas » et en ajoutant que vous étiez « favorable à une collaboration avec la commission des affaires sociales du Sénat […] pour travailler sur ce problème ». À la suite de ces propos, le président de la commission des affaires sociales, M. Mouiller, s’était engagé à étendre la mission relative aux dysfonctionnements du Pass (parcours accès santé spécifique) – LAS (licence accès santé) à la question de l’accès aux Ifsi. Notre groupe réitère son souhait d’y participer afin d’avancer au plus vite sur le sujet.
En conclusion, cette proposition de loi crée beaucoup d’attente chez les infirmières et les infirmiers. Notre groupe votera en faveur de ce texte, mais, pour transformer l’essai, il faudra que le Gouvernement tienne ses engagements en matière de revalorisations salariales. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Anne Souyris. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi un léger détour vers ce que sera le quotidien des infirmiers et des infirmières ces prochains jours.
Certes, il fait frais dans cet hémicycle. Pourtant, nous ressentons toutes et tous les effets de la vague de chaleur précoce qui frappe l’Hexagone. Il n’y a pas d’incertitude : le mercure atteindra 38 degrés dans les jours qui viennent. Nous suffoquerons, alors même que l’été n’est pas encore arrivé. Depuis le début des relevés en 1947, il s’agira de la cinquantième vague de chaleur qu’aura subie la France. Les occurrences du phénomène se multiplient avec le réchauffement climatique.
En même temps, nous apprenons que l’objectif des accords de Paris pour le climat de maintenir le réchauffement global à 1,5 degré Celsius d’ici à la fin du siècle n’est désormais plus atteignable. Au contraire, ce seuil devrait être atteint d’ici à la fin de la décennie. Localement, l’Hexagone s’est déjà réchauffé de 1,9 degré Celsius.
L’avenir est au mieux périlleux, au pire sombre pour le climat, la vie dans notre pays et la santé.
Rappelons que, lors de la terrible canicule de 2003, 15 000 personnes sont mortes et que, à l’été 2023, 5 000 personnes ont été tuées par la chaleur.
Le changement climatique fragilise et « embolise », d’un même coup, notre système de santé. Il est donc impératif de le préparer aux effets d’un réchauffement de 1,5, de 2, voire de 4 degrés Celsius.
Malheureusement, pour le climat, je crains que le jour d’une action politique à la hauteur de l’urgence ne soit pas venu. En revanche, pour les soignants et les soignantes, je me réjouis que, après le Ségur de la santé, le législateur reconnaisse enfin le rôle central de la profession infirmière dans notre système de soins.
Les infirmiers et infirmières, actrices de terrain, constituent un maillon essentiel – il faut le répéter ! – de l’accès aux soins dans tous nos territoires. Ils représentent un pilier majeur tant de la prévention en santé, par exemple face aux vagues de chaleur, que de la santé environnementale. Cette profession est indispensable à la santé publique, à la santé scolaire, à la prévention de la perte d’autonomie, à la santé mentale, bref, à notre humanité.
Face aux tensions grandissantes de notre système de soins, liées au changement climatique, au vieillissement de la population et à l’explosion de cas de maladie chronique, face au travail remarquable des infirmiers partout en France, il était temps que nous valorisions ce métier.
À ce titre, je salue les auteurs de la présente proposition de loi, Nicole Dubré-Chirat et Frédéric Valletoux, ainsi que nos rapporteurs, Jean Sol et Anne-Sophie Romagny.
La commission mixte paritaire est parvenue à établir un texte qui préserve les principaux apports des débats parlementaires. Je pense notamment à la reconnaissance de la spécialité infirmière du corps de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, essentielle pour repérer les troubles de santé mentale chez les jeunes et les signes de maladie, ainsi que pour mener des actions de prévention.
L’ouverture d’un accès direct aux infirmières et aux infirmiers pour les soins de premier recours est aussi une bonne chose. Je salue également la création d’une expérimentation pour un accès direct, c’est-à-dire en dehors de leur rôle propre, dans le cadre d’un exercice coordonné.
Si l’ensemble est satisfaisant, nos débats sur la profession ne sont évidemment pas clos. Mon groupe sera attentif en particulier à trois éléments dans les mois à venir.
D’abord, nous veillerons à l’application de la présente loi, en particulier à l’ouverture de discussions conventionnelles et à la revalorisation des revenus infirmiers. Vous en avez fait la promesse, monsieur le ministre ; aussi, mon groupe y sera vigilant.
Ensuite, nous ferons attention au renforcement des moyens accordés à la santé mentale et au devenir de notre proposition de créer une spécialité autonome d’infirmière psychiatrique.
Enfin, nous serons attentifs à l’ouverture de moyens pour doter les infirmières de formations et d’outils visant à prévenir les risques liés au changement climatique et à la santé environnementale.
En conclusion, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera pour ce texte et restera vigilant quant à son application.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Bernard Jomier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi sur la profession d’infirmier apporte des évolutions attendues par le premier métier paramédical de notre pays. Avec 600 000 professionnelles, les infirmières sont, en effet, un des piliers de notre système de santé.
Je veux tout d’abord saluer leur travail et leur engagement auprès des patients. Mieux reconnaître leur profession est un enjeu fondamental, y compris pour la pérennité de notre système de soins. C’est d’ailleurs en pensant d’abord à elles et aux aides-soignants que j’avais déposé la proposition de loi relative à l’instauration d’un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé, texte définitivement adopté le 23 janvier 2025. Je remercie M. le ministre de travailler actuellement sur les actes réglementaires qu’appelle celui-ci.
Les infirmiers, qui sont à 87 % des infirmières, font partie de ces professionnels qui se rendent encore au domicile des patients. Ils et elles jouent un rôle essentiel pour prendre en charge la perte d’autonomie et accompagner le vieillissement de la population de notre pays. Or, selon une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), les besoins en soins infirmiers progressent plus vite que les effectifs. Il faut être attentif à ne pas manquer d’infirmiers d’ici à quelques années.
Il était donc essentiel de réviser le cadre de la profession. Cette proposition de loi permettra, dès sa promulgation, de mieux définir le métier. En effet, elle reconnaît à ces professionnels un domaine de compétences propres, le précise et structure leur action autour de cinq missions socles. Elle consacre également la recherche en sciences infirmières, ce qui est important.
Mon groupe est satisfait de l’évolution du texte, à l’Assemblée nationale puis au Sénat. À cette occasion, je salue la qualité du travail de nos rapporteurs, Anne-Sophie Romagny et Jean Sol. Je les remercie.
D’abord, le texte inscrit dans la loi la consultation infirmière, qui permettra à ces professionnels d’exercer pleinement leurs missions de prévention et d’éducation thérapeutique, et d’intervenir dans le cadre de leur rôle propre.
Ensuite, cette proposition de loi inscrit dans le droit le diagnostic infirmier, qui existe dans les textes réglementaires depuis tout de même trente ans ! Il s’agit pour l’infirmier non pas d’identifier une pathologie, mais d’analyser les besoins du patient et les risques auxquels il est confronté dans sa situation de santé. Ce diagnostic infirmier, distinct du diagnostic médical, est pratiqué depuis longtemps. Aussi, il est bien délimité.
Si mon groupe est favorable à la consultation et au diagnostic infirmiers, il est, en revanche, réservé quant à l’expérimentation prévue à l’article 1er quater, qui permet l’accès direct aux infirmières et aux infirmiers « pour des actes ne relevant pas de leur rôle propre ». Bien sûr, il faut reconnaître les compétences de ces professionnels : c’est tout l’intérêt de ce texte. Toutefois, nous devons également rester vigilants sur celles des uns et des autres et veiller à ne pas désorganiser les parcours de soins.
L’ouverture de l’exercice en pratique avancée pour les infirmières spécialisées anesthésistes, de bloc opératoire et puéricultrices est un autre enjeu majeur de ce texte. La formulation issue des travaux du Sénat et conservée par la CMP permet d’offrir à ces spécialités l’autonomie permise par la pratique avancée, tout en conservant les conditions d’exercice et de formation. Nous en sommes satisfaits.
Enfin, notre groupe se félicite de la création d’une spécialité pour les infirmières de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur. Cette évolution était attendue par ces professionnelles, là aussi, depuis trente ans, et le Sénat a su entendre leurs justes arguments.
L’exercice infirmier en milieu scolaire et universitaire est en effet spécifique ; il s’articule autour de la prévention, de l’éducation à la santé et, surtout, il vise à assurer la réussite des élèves et des étudiants. En consacrant une spécialité infirmière sanctionnée par une formation de niveau master, nous renforçons à la fois l’attractivité du métier et la qualité du service rendu aux élèves, aux étudiants et à leurs familles. Le maintien de cette mesure était pour nous un enjeu essentiel de la commission mixte paritaire, et nous nous réjouissons de l’avoir obtenu.
S’agissant de reconnaître pleinement la profession infirmière, des chantiers restent bien sûr à traiter, notamment en matière de rémunérations et de conditions de travail. Néanmoins, ce texte contient des avancées importantes et, vous l’aurez compris, notre groupe votera donc en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire.