M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 et 6.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis

(Non modifié)

L'article L. 741-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de refus caractérisé de l'étranger de se soumettre au relevé des empreintes digitales et à la prise de photographies lors de son placement en rétention administrative et lorsque ces opérations constituent l'unique moyen de l'identifier avec certitude, l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, l'agent de police judiciaire peut, sur autorisation du procureur de la République que l'officier de police judiciaire a saisi préalablement d'une demande motivée, procéder à cette opération sans le consentement de l'intéressé, en présence de son avocat. L'étranger doit avoir été dûment informé des conséquences de son refus. L'opération prévue au présent alinéa fait l'objet d'un procès-verbal, qui mentionne le jour et l'heure auxquels elle a lieu. Ce procès-verbal est présenté à la signature de l'étranger intéressé, qui est informé de la possibilité de ne pas le signer. S'il refuse de le signer, mention est faite du refus et des motifs de celui-ci. Le procès-verbal est transmis au procureur de la République, copie en ayant été remise à l'intéressé. Le recours à la contrainte est strictement proportionné et tient compte de la vulnérabilité de la personne. L'article L. 824-2 demeure applicable. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 3 est présenté par M. Chaillou, Mme de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 7 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Christophe Chaillou, pour présenter l'amendement n° 3.

M. Christophe Chaillou. L'article 2 bis prévoit la possibilité de recourir à la contrainte physique pour relever les empreintes digitales des personnes refusant de se soumettre à une telle démarche.

Je formulerai trois remarques.

Première remarque, cet article est de toute évidence un cavalier législatif.

Ma deuxième remarque porte sur les tensions qui peuvent éclater dans les CRA. Nous craignons fortement que la mise en œuvre de mesures contraignantes, comme celle que prévoit cet article 2 bis, qui est d'ailleurs attentatoire aux droits de la personne, soit problématique, notamment parce qu'elles concernent des personnes qui sont souvent très malades, parfois dans des états d'excitation difficiles. Le dispositif de cet article nous paraît exposer les personnels des centres de rétention administrative à des situations particulièrement complexes.

Enfin, ma troisième remarque porte sur l'utilité de cette disposition. Compte tenu des circulaires qui ont été prises il y a quelques mois, les personnes qui se trouvent aujourd'hui dans des centres de rétention administrative ont été condamnées à des peines de prison. Dans la mesure où elles ont été incarcérées, leurs empreintes digitales et leur photographie ont en toute logique été prises, et ce en vertu d'un cadre parfaitement légal.

Je ne vois pas ce que cette mesure apportera de plus par rapport aux dispositions existantes, sinon davantage de tensions, de difficultés, notamment pour les agents des centres de rétention administrative.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l'amendement n° 7.

M. Guy Benarroche. Il convient d'ajouter aux arguments avancés par mon collègue Christophe Chaillou contre le recours à la contrainte pour la prise des empreintes digitales et de photographies des étrangers, en premier lieu que les articles L. 821-2, L. 822-1 et L. 824-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile punissent déjà d'un an d'emprisonnement le fait de refuser le relevé de ses empreintes digitales. Aussi, en permettant le recours à la contrainte, l'article 2 bis s'inscrit dans une dynamique qui renforcera la déshumanisation des personnes placées dans les CRA.

En second lieu, le recours à la coercition, alors que ces personnes ne sont pas suspectées, je le rappelle, d'avoir commis une infraction pénale, porte atteinte au droit au respect de la présomption d'innocence et au principe de dignité de la personne humaine. Il participe également à la hausse des tensions, comme l'a très bien rappelé M. Chaillou, entre les agents des CRA et les personnes retenues ; une telle mesure dégrade de ce fait les conditions de travail des personnels.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Lauriane Josende, rapporteure. L'article 2 bis, introduit à l'Assemblée nationale par notre regretté collègue Olivier Marleix, autorise la prise d'empreintes et de photographies sans le consentement de l'étranger placé en rétention administrative.

En effet, l'une des principales difficultés auxquelles nous nous heurtons pour mettre en œuvre l'éloignement de ces personnes réside dans leur identification et la détermination de l'État dont ils sont ressortissants, ce dont tous les praticiens peuvent témoigner. La jurisprudence comporte de nombreux exemples dans lesquels l'étranger refuse de donner ses empreintes afin de dissimuler son identité, et, par conséquent, de faire obstacle à son éloignement, ce qui conduit souvent le juge à prolonger sa rétention.

Ces dispositions devraient donc contribuer à réduire la durée de rétention, ce dont vous devriez vous féliciter, mes chers collègues.

Sur le fond, il s'agit de mettre fin à une situation absurde : aujourd'hui, l'étranger est tenu, sous peine de sanctions pénales, de donner ses empreintes digitales, mais on ne peut l'y contraindre. Une telle situation revient donc à engorger la justice pénale pour des sanctions dérisoires et à encourager ces comportements d'obstruction. C'est inacceptable !

Quant à la violence que vous décrivez, il ne faut pas l'exagérer : d'ailleurs, en ouvrant la possibilité d'un recours à la contrainte, je ne doute pas que nous verrons le nombre de refus diminuer.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

Permettez-moi de citer les extraits de deux décisions du Conseil constitutionnel, puisque j'ai entendu dire que certaines dispositions figurant dans ce texte violeraient nos règles de droit.

Le 25 janvier 2024, quelques semaines après l'adoption du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, le Conseil constitutionnel a censuré, en statuant sur le fond, un article qui prévoyait la prise d'empreintes, ce qui nous permet aujourd'hui de disposer d'une analyse argumentée du Conseil sur une telle mesure. Dans sa décision, le juge constitutionnel a reconnu que cette mesure avait ainsi « poursuivi l'objectif de lutte contre l'immigration irrégulière qui participe de la sauvegarde de l'ordre public, objectif de valeur constitutionnelle ». C'était en 2024.

Par ailleurs, dans sa décision du 13 mars 2003, le Conseil constitutionnel explique que la prise d'empreintes est un « prélèvement externe », c'est-à-dire un prélèvement « n'impliquant aucune intervention corporelle interne », qui « ne comportera donc aucun procédé douloureux, intrusif ou attentatoire à la dignité des intéressés ».

Par conséquent, à deux reprises, à vingt ans d'intervalle, le Conseil constitutionnel a estimé qu'une prise d'empreintes, même quand elle est forcée, respecte pleinement nos règles de droit.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 et 7.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis.

(L'article 2 bis est adopté.)

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 3 bis

(Non modifié)

Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° L'article L. 523-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Si, au regard de la gravité et de l'actualité de la menace et sur la base d'une appréciation au cas par cas, cette mesure s'avère insuffisante, l'autorité administrative peut le placer en rétention. Ces mesures sont applicables uniquement à l'étranger qui n'est titulaire d'aucun document de séjour en cours de validité, sans préjudice de l'attestation mentionnée à l'article L. 521-7. » ;

b) Après la référence : « L. 521-1 », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « et qui présente un risque de fuite peut faire l'objet d'une assignation à résidence afin de déterminer les éléments sur lesquels se fonde sa demande d'asile. Si cette mesure est insuffisante, sur la base d'une appréciation au cas par cas, l'autorité administrative peut le placer en rétention. » ;

2° L'article L. 523-2 est ainsi modifié :

a) Le 1° est complété par les mots : « et ne présente pas de garanties de représentation effectives suffisantes » ;

b) Le 4° est complété par les mots : « et ne présente pas de garanties de représentation effectives suffisantes » ;

3° Le premier alinéa de l'article L. 523-6 est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « En l'absence d'introduction de la demande d'asile dans un délai de cinq jours à compter de la notification de la décision de placement en rétention ou » sont supprimés ;

b) Après la deuxième occurrence du mot : « décision », sont insérés les mots : « de clôture, ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 4 est présenté par M. Chaillou, Mme de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 8 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Christophe Chaillou, pour présenter l'amendement n° 4.

M. Christophe Chaillou. L'article 3 bis prévoit le placement en rétention administrative de demandeurs d'asile, alors même qu'aucune mesure d'éloignement n'a encore été décidée à leur encontre.

Je rappelle que la finalité de la rétention administrative est de permettre l'exécution d'une mesure d'éloignement. Nous parlons ici non pas d'un système de détention ou d'une prison, mais d'un dispositif ayant pour objet de permettre la reconduite effective d'un étranger à la frontière. Aussi, ne le détournons pas de son objectif premier pour enfermer des personnes dont la demande d'asile est en cours d'examen.

Nous le savons tous, l'asile est, pour un étranger, une protection contre son renvoi vers un pays où il craint des persécutions. En autorisant le placement en rétention des demandeurs d'asile avant même l'instruction de leur demande, cet article 3 bis tend à les exposer, de manière anticipée, à un risque que la procédure d'asile vise justement à prévenir.

Par ailleurs, le placement en rétention administrative compromet l'effectivité d'un certain nombre de droits procéduraux des demandeurs d'asile, notamment le droit de faire valoir les éléments de leur demande dans des conditions dignes et équitables.

Dans ce contexte, une telle disposition nous paraît complètement disproportionnée et contraire à un certain nombre de nos principes, notamment le principe de nécessité. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons sa suppression.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l'amendement n° 8.

M. Guy Benarroche. Bis repetita placent… L'argumentaire de M. Chaillou est implacable. Sa description correspond par ailleurs exactement à la réalité.

La situation est aujourd'hui ubuesque : les centres de rétention administrative sont destinés à placer en rétention un certain nombre de personnes qui doivent quitter le pays, parce qu'elles sont sous le coup d'une OQTF ; or cet article 3 bis, dont je me demande bien par quelle aberration il figure dans le texte, prévoit que des personnes n'étant pas sous le coup d'une telle mesure – il s'agit de simples demandeurs d'asile – peuvent être placées en centre de rétention administrative dans l'attente d'être expulsées de notre pays.

Cet amendement ne me semble obéir à aucune logique particulière. J'aurais même tendance à estimer qu'il s'agit d'un cavalier législatif.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Lauriane Josende, rapporteure. Dans sa décision rendue le 23 mai dernier en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel, s'il a censuré les dispositions relatives aux motifs du placement en rétention des demandeurs d'asile issues de la loi du 26 janvier 2024, n'a pas remis en cause leur principe même.

L'article 3 bis a précisément pour objet de tirer les conséquences de cette décision. Le placement en rétention des demandeurs d'asile serait désormais possible dans deux cas de figure limitatifs : d'une part, en cas de menace à l'ordre public, celle-ci devant être grave et actuelle ; d'autre part, en cas de risque de fuite, lorsque l'étranger a présenté sa demande devant une autorité autre que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

Je rappelle enfin que le droit européen, et plus précisément la directive Accueil de 2013, permet, dans des conditions d'ailleurs beaucoup moins restrictives, le placement en rétention des demandeurs d'asile. En effet, la demande d'asile ne doit pas être détournée afin de faire obstacle à l'éloignement du territoire national des étrangers en situation irrégulière. C'est là un constat de bon sens. Nous constatons malheureusement trop souvent un tel détournement. L'article 3 bis permettra de lutter contre ce phénomène.

La commission émet par conséquent un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 et 8.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3 bis.

(L'article 3 bis est adopté.)

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 5

(Non modifié)

Après la première phrase du premier alinéa de l'article L. 813-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il précise le jour et l'heure du début et de la fin de la retenue et la durée de celle-ci, les heures auxquelles la personne retenue a pu s'alimenter et, le cas échéant, la prise d'empreintes digitales ou de photographies ainsi que l'inspection visuelle ou la fouille des bagages et effets personnels et les dates et heures de début et de fin de ces opérations.  – (Adopté.)

Article 6

(Non modifié)

I. – Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :

1° G L'article L. 761-8 est ainsi modifié :

a) Le 5° est ainsi modifié :

– les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « quatre-vingt-seize heures » ;

– à la fin, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « cent vingt heures » ;

b) Le 6° est ainsi modifié :

– les mots : « vingt-huit jours » sont remplacés par les mots : « vingt-six jours » ;

– les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « quatre-vingt-seize heures » ;

– à la fin, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « cent vingt heures » ;

c) Au deuxième alinéa du 7°, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « cent vingt heures » ;

1° à 3° (Supprimés)

II. – Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre, par voie d'ordonnance, les mesures relevant de la compétence de l'État nécessaires à l'application et, le cas échéant, à l'adaptation de la présente loi dans les collectivités qui relèvent de l'article 74 de la Constitution, à l'exception de Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Cette ordonnance est prise dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de deux mois à compter de la publication de l'ordonnance – (Adopté.)

Article 7

(Non modifié)

Les articles 1er à 4 et 6 entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'État, et au plus tard trois mois après la promulgation de la présente loi – (Adopté.)

M. le président. Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Christophe Chaillou, pour explication de vote.

M. Christophe Chaillou. Au risque de répéter ce qui a déjà été dit plusieurs fois cet après-midi, et pour faire écho à la volonté exprimée à plusieurs reprises dans cet hémicycle de mieux protéger les Français, je tiens à rappeler que nous sommes tous attachés à la protection de nos concitoyens.

Pour autant, nous ne pensons pas que cette proposition de loi permettra de mieux protéger les Français. L'allongement de cent jours de la durée de rétention de personnes étrangères qui, parfois, n'ont même pas fait l'objet de mesures de rétention constitue-t-il, selon vous, une véritable garantie de sécurité supplémentaire ?

Que se passera-t-il au bout de ces cent jours ? Ces personnes seront-elles moins dangereuses ? Sans doute pas. Nous proposera-t-on d'allonger le délai de cent jours supplémentaires, alors même que nos centres sont sous tension, car à la limite de leurs capacités ?

Cette proposition de loi a été déposée sous le coup de l'émotion, à la suite d'un drame qui – je le répète une fois de plus – résulte d'une erreur administrative. Il n'y a pas de tabou en la matière. Nous devons traiter les dysfonctionnements dont il s'agit. De même, nous sommes tout à fait prêts à évoquer les questions liées à la rétention et d'autres sujets encore. Simplement, visons l'efficacité. Or il nous semble que cette proposition de loi n'est pas efficace et qu'elle ne répond pas à votre préoccupation première.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi visant à faciliter le maintien en rétention des personnes condamnées pour des faits d'une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 348 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l'adoption 228
Contre 108

Le Sénat a adopté.

La parole est à M. le ministre d'État.

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Je remercie le Sénat du travail accompli depuis le dépôt de cette proposition de loi sur l'initiative de Jacqueline Eustache-Brinio. Ce long parcours vient de s'achever, du moins au sein de la Haute Assemblée.

En outre, je tiens à saluer en votre nom le personnel des centres de rétention administrative.

Nous nous accorderons tous sur ce point : ces femmes et ces hommes accomplissent un travail difficile, qui mérite notre reconnaissance. Ils sont au quotidien en première ligne, et les situations auxquelles ils sont confrontés ne sont pas toujours faciles. Merci pour eux ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)

Mme Lauriane Josende, rapporteure. Très bien !

5

Simplification du droit de l'urbanisme et du logement

Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi de simplification du droit de l'urbanisme et du logement (texte de la commission n° 827, rapport n° 826).

La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)

M. Guislain Cambier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en première lecture en séance, nous avions regretté que cette proposition de loi s'apparente à un fourre-tout. En outre, ce texte nous avait paru trop étroit pour contenir les véritables réformes qu'attendent nos élus en vue d'une simplification du droit de l'urbanisme et du logement.

À l'issue de ce parcours législatif, nous n'avons pas changé le plomb en or. En revanche, ce qui est certain, c'est que nous avons su tirer le meilleur parti du présent texte, grâce au travail effectué avec Sylviane Noël et Marc-Philippe Daubresse, que je salue, mais aussi grâce à nos échanges nourris et constructifs avec le ministère du logement comme avec l'Assemblée nationale.

Afin de simplifier les normes applicables en matière d'urbanisme, l'article 1er A, intégralement réécrit en commission mixte paritaire (CMP), réduit de quatre à deux le nombre de procédures d'évolution des documents d'urbanisme. Ces démarches s'en trouveront accélérées et sécurisées.

Madame la ministre, je salue le travail de vos services, qui se sont attelés à cette lourde réforme dans des délais contraints, ce qui explique d'ailleurs les amendements rédactionnels assez substantiels qui ont été déposés pour toiletter le présent texte.

À l'issue de la réunion de la CMP, de nombreuses mesures chères au Sénat ont été conservées, comme l'accord obligatoire du maire en cas de dérogation au plan local d'urbanisme (PLU) ou la possibilité de mieux adapter les règles du PLU aux spécificités des territoires, dans une stricte logique de subsidiarité.

Les mesures introduites par le Sénat pour accompagner la densification et la requalification urbaine ont également été maintenues, notamment celles qui sont relatives au quartier d'affaires de La Défense, à la réhabilitation d'immeubles de centre-ville ou encore aux opérations de renaturation dans le cadre de permis multisites.

Je pense aussi, et surtout, à l'assouplissement des conditions d'adhésion aux établissements publics fonciers (EPF), ainsi qu'à l'augmentation de la durée de portage foncier. Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir bien voulu accompagner ces mesures tant attendues des collectivités territoriales, dans le contexte de contrainte foncière que nous connaissons.

Au nom de tous ceux qui, depuis de nombreuses années, insistent dans cet hémicycle sur la nécessité de traiter le sujet des biens sans maître et qui, depuis de tout aussi nombreuses années, se sont heurtés aux règles de recevabilité financière, je vous remercie très chaleureusement. Vous avez bien voulu soutenir l'introduction, dans le présent texte, de la réduction du délai d'appropriation des biens sans maître de trente à quinze ans : c'est une clef essentielle de mobilisation des bâtiments vacants, notamment dans les zones en déprise.

Fidèle à ses traditions, le Sénat a d'ailleurs globalement veillé à ce que les territoires ruraux et les petites villes puissent aussi bénéficier de toutes les mesures de simplification proposées via ce texte. D'une part, il a étendu à l'ensemble des communes la possibilité de déroger au cas par cas aux règles du PLU ; de l'autre, il a assoupli les règles de changement de destination dans les zones naturelles, agricoles et forestières.

Mes chers collègues, ce sont là des mesures très attendues des élus locaux. Sur ce point en particulier, je tiens à saluer l'esprit d'ouverture et de compromis dont a fait preuve notre collègue député Harold Huwart, rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale.

Les assouplissements pour l'installation de bâtiments agricoles en zone littorale, introduits en séance au Sénat, ont eux aussi été conservés, dans une version certes légèrement resserrée, mais conforme à ce que nous avons voté dans le projet de loi d'orientation agricole. Ces dispositions devraient, cette fois, passer le cap du Conseil constitutionnel.

Sur d'autres mesures – je dois le concéder –, nous n'avons pas eu gain de cause. Mais, comme vous le savez, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire est toujours le fruit d'un compromis.

Le Sénat est la chambre de la raison et de la modération : les élus locaux n'auraient pas compris que nous nous arc-boutions sur des dispositions ciblées – je pense aux carrières ou encore aux règles d'urbanisation en zone de montagne –, dont les effets de bord auraient pu dépasser largement nos intentions et qui trouveraient mieux leur place dans des textes sectoriels.

De même, les obligations de solarisation risquaient de compromettre l'adoption définitive de ce texte par l'Assemblée nationale. D'un commun accord avec M. Huwart, qui l'avait pourtant lui-même proposé dans sa rédaction initiale, nous avons donc décidé de supprimer l'assouplissement suggéré pour les bâtiments existants à l'article 1er, dans l'attente d'un texte de transposition de la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments.

Au sujet des parkings, nous avons d'un commun accord rétabli le texte de l'Assemblée nationale. Ce choix permet de satisfaire à l'obligation de solarisation en plantant des arbres tout en conservant un seuil minimal d'ombrières photovoltaïques, fixé à 35 % de la moitié de la surface totale du parc.

Afin de privilégier un approvisionnement souverain, nous avons en outre maintenu le report de quelques mois de cette obligation votée par le Sénat.

De toute façon, ces différentes dispositions ne doivent entrer en vigueur que dans plusieurs années : nous avons tout le temps d'en débattre à la faveur de futurs textes, sachant que la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments devra être transposée dans moins d'un an.

Vous le voyez, c'est un texte d'équilibre que nous vous proposons ; un texte pragmatique, au service de nos élus, qui permettra d'accélérer la production de logements en prenant mieux en compte les spécificités de chaque territoire.

Bien entendu, cette proposition de loi devra être complétée par d'autres mesures plus structurelles, mais je vous invite pour l'heure à l'adopter sans réserve. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains. – M. Teva Rohfritsch applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, chère Dominique Estrosi Sassone, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la demande de simplification n'est nulle part si forte que dans le champ de l'urbanisme et du logement. Vous le savez, vous qui, dans cette chambre des territoires, rencontrez au quotidien leurs habitants et leurs élus ; vous qui, par vos travaux institutionnels, avez largement investi la thématique de la simplification des normes.

Le présent texte pose la première pierre de cet édifice de simplification. Je salue le travail accompli depuis le mois d'avril dernier par le Sénat comme par l'Assemblée nationale pour ajuster sa rédaction et, surtout, la compléter en y ajoutant de nouvelles simplifications, cohérentes avec l'esprit qui a animé son auteur, Harold Huwart.

Le Gouvernement soutient bien entendu cette ambition simplificatrice et la proposition de loi qui vient la traduire. En complément de l'intervention de M. le rapporteur, Guislain Cambier, je ne citerai que quelques exemples.

La navette parlementaire a ainsi permis d'aller plus loin pour accélérer la mutation des zones pavillonnaires, alléger les formalités préalables aux opérations d'aménagement, faciliter l'évolution des projets et des permis ou encore renforcer la couverture du territoire par ces outils d'ingénierie que sont les établissements publics fonciers.

De même, dans le champ du contentieux de l'urbanisme, elle a consacré des avancées majeures sans lesquelles nous ne saurions maîtriser les délais d'autorisation des projets.