Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Pourquoi s’arrêteraient-ils de le faire ?
Mme Colombe Brossel. En outre, les nouveaux auditeurs de France Inter entrent pile-poil dans les catégories que la ministre de la culture souhaite viser. Peut-être que Radio France a « loupé le virage du numérique », mais ses équipes ont bien réussi à prendre le tournant des podcasts, vu les audiences. ! Il faudra donc m’expliquer comment on peut obtenir de tels résultats en ayant raté ce virage…
On constate donc que nous faisons face à une logique totalement idéologique, qui ne s’appuie pas sur la réalité. Aujourd’hui, Radio France est un outil de service public de radio qui est efficace, qui fonctionne, qui est adapté au monde d’aujourd’hui et qui ne subit pas, comme un boulet au pied, les freins liés au fait d’avoir raté le virage du numérique.
Il faudrait nous donner davantage d’explications sur les raisons de l’impérative nécessité de mettre au pas Radio France et de la faire entrer dans une holding exécutive. Puisque nous ne partageons pas le constat de départ – non pas parce que nous nous y opposons par principe, mais parce qu’il est faux ! –, la solution que vous nous proposez n’est pas adaptée.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Mes chers collègues, j’imagine une personne qui nous écouterait ou assisterait à nos débats sans savoir de quoi nous parlons, et qui entendrait parler de Radio France comme d’une espèce de dinosaure archaïque, totalement dépassé, qui aurait besoin de fusionner avec la télévision pour produire des podcasts.
Alors, puisqu’il existe une application radio France, je l’ai consultée. Voici les podcasts que l’on peut écouter cet été : Albert Camus – sujet consensuel – ; Marie Curie ; Le Meilleur des jeux vidéo ; La Traque de Mohamed Amra ; Staline ; In Extremis ; Canicule sentimentale – il y en a pour tous les goûts – ; Deepfakes ; Pavarotti ; Attentat de Nice ; Un Été avec Alexandre Dumas ; Gilles Deleuze ; L’Heure du rap ; L’Année 1984 ;…
M. Stéphane Piednoir. Très intéressant…
Mme Laurence Rossignol. … L’Odyssée de la croisière ; Germaine Tailleferre, la rebelle des années folles ; Les Châteaux de la Loire ; Les Envahisseurs qui ont changé le monde ; Contre-Vents ; Fureurs ; Comment occuper les enfants ? ; La Guerre de deux et demi ; 2 minutes pour être en forme ; Les Jumeaux ; French Touch… (Marques d’agacement sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. Ce n’est pas le sujet !
Mme Laurence Rossignol. Je dispose de deux minutes : il me reste encore cinquante-six secondes ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Comme je ne suis pas certaine que vous sachiez de quoi vous parlez lorsque vous évoquez Radio France (On le réfute sur les travées du groupe Les Républicains.), il me semble utile de poursuivre.
Je continue donc : Bosnie-Herzégovine ; Les Vacances ; Les Maîtres du roman populaire français ; Benjamin Tranié ; Les Liens du cœur ; Crimes et témoignages ; L’Engagement selon Malraux – j’imagine que Malraux satisfait tout le monde, il n’entre pas dans la catégorie des gauchistes woke – ; Les Bleues du foot, un thème populaire qui plaît à tout le monde ;…
Mme Laurence Rossignol. … L’Idée de voyage ; Alfred Dreyfus – j’ai cru comprendre que c’était aussi devenu un sujet consensuel – ; Histoire de la poésie ; Adulescence ; Histoires de voix ; Penser l’été…
Voilà ce que vous jugez indigne de l’idée que vous vous faites des médias.
M. Max Brisson. Personne n’a dit cela !
M. Mathieu Darnaud. Vous inventez !
Mme Laurence Rossignol. C’est ce que vous nous dites depuis le début, car vous voulez détacher le linéaire des podcasts. Or il n’y a pas de podcast sans linéaire ! (Applaudissements sur des travées du groupe SER. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. N’importe quoi !
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture. Caricature !
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Mes chers collègues, nous avons tous plébiscité Radio France, car cette radio a deux vertus.
M. Mathieu Darnaud. On a compris !
Mme Sylvie Robert. D’abord, elle produit en interne. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je veux bien que vous ironisiez, mais donnez-nous des arguments ! Elle produit donc en interne, ce qui est déjà très important.
M. Mathieu Darnaud. C’est de l’obstruction !
Mme Sylvie Robert. Par ailleurs, 40 % des podcasts de Radio France sont écoutés.
M. Cédric Vial, rapporteur. 50 % !
M. Max Brisson. Quel rapport ?
M. Olivier Paccaud. Cette réforme ne changera rien aux podcasts !
Mme Sylvie Robert. Mais calmez-vous ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Max Brisson. Je suis calme !
Mme Sylvie Robert. Je ne demanderai donc qu’une seule chose à la ministre et au rapporteur.
On l’a dit, les audiences sont importantes, Radio France a pris le virage du numérique et les podcasts sont très écoutés. Laurence Rossignol a raison, les podcasts sont alimentés par le linéaire : c’est un élément extrêmement important, car cela donne du choix.
Alors en quoi cette holding apportera-t-elle une valeur ajoutée à ce qui existe déjà ? Pouvez-vous nous donner des exemples concrets ? À quoi pensez-vous ? Comment Radio France va-t-elle faire mieux, finalement ?
M. Stéphane Piednoir. Ça ne tient pas la route.
Mme Sylvie Robert. Car c’est bien ce que vous lui demandez. En l’intégrant dans cette holding, vous sous-entendez qu’elle n’en fait pas assez et qu’elle devra faire mieux. Mais comment ? Expliquez-nous et, surtout, à ce stade du débat, donnez-nous des arguments, au lieu de critiquer, de sourire ou de plaisanter ; donnez-nous des arguments ! (Calmez-vous ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mes chers collègues, soyons sérieux. Nous parlons de l’audiovisuel public dans notre pays, ce n’est pas rien ! C’est un enjeu majeur, un enjeu démocratique, et vous en riez… Nous voulons des arguments et un véritable débat de fond. (M. le président de la commission de la culture s’impatiente.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Cédric Vial, rapporteur. J’apporterai quelques arguments, mais j’ai l’impression que vous ne nous écoutez pas ou que vous ne nous entendez pas.
Nous n’avons jamais dit que Radio France n’était pas une radio de qualité, écoutée. Bien au contraire ! Vous nous faites un procès sur un point que nous n’avons jamais évoqué. Il y a d’ailleurs sur Radio France une émission intitulée Le Vrai ou faux, qui traite des fake news, une par jour. Rien qu’avec ce que nous avons entendu pendant nos débats ce soir, si nous leur faisions un signalement, ils en auraient pour trois mois d’émission ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Ne nous faites donc pas dire ce que nous n’avons pas dit.
M. Rémi Cardon. Ce n’est toujours pas un argument !
M. Cédric Vial, rapporteur. En effet, les taux d’écoute de la radio en général baissent. Les chiffres de Radio France sont plutôt stables ; il y a même quelques antennes qui progressent légèrement et qui ont obtenu de très bons résultats cette année. Nous n’avons jamais dit le contraire !
Qu’attendez-vous ? Que cela ne marche plus pour les accompagner ? Pourquoi ont-ils lancé des podcasts ? Parce qu’ils ont anticipé les besoins des usagers. (On le confirme sur les travées du groupe SER.) Il faut que nous les accompagnions, car ces besoins évoluent encore et il faut les satisfaire.
Mme Sylvie Robert. Mais quels besoins ? Dites-nous concrètement de quoi il s’agit !
M. Cédric Vial, rapporteur. Ma chère collègue, vous vous demandiez pourquoi les podcasts de Radio France marchent aussi bien. C’est vrai qu’ils fonctionnent bien, et ce pour de nombreuses raisons.
Première raison : leur qualité, qui découle de la qualité des antennes. C’est ce que nous disons depuis tout à l’heure. Nous avons, et nous voulons, un service public de qualité, dans lequel nous puissions avoir confiance.
Aujourd’hui, France Info et France Culture, notamment, sont des antennes dans lesquelles les gens ont confiance parce qu’elles sont pluralistes.
Mme Laurence Rossignol. Le problème, c’est France Inter, n’est-ce pas ?
M. Cédric Vial, rapporteur. On pourrait peut-être faire encore mieux, mais ce pluralisme est reconnu.
Deuxième raison : le très bon référencement des podcasts, notamment sur certaines plateformes, comme celle d’Apple et d’autres plateformes américaines avec lesquelles des négociations sont en cours. Or, pour négocier plus facilement avec ces plateformes, je peux vous assurer qu’il vaut mieux être plus gros et avoir une force de négociation plus large, au lieu d’être seul face à elles.
Je ne reviens pas sur la qualité de la ligne éditoriale, qui est indépendante aujourd’hui et qui le sera demain. Nous ne sommes toujours pas en train de changer cela !
Autre raison, parmi bien d’autres, qui explique pourquoi ces podcasts s’en sortent aussi bien et pourquoi les radios privées font moins de podcasts : c’est parce qu’il n’y a pas de modèle économique.
Mme Sylvie Robert. Et alors ?
M. Cédric Vial, rapporteur. Le podcast, aujourd’hui, ne rapporte pas. Le service public peut se permettre – et heureusement, car c’est son rôle – de produire des podcasts parce que l’argent public le finance et que, pour ce support, il n’existe pas, ou très peu, de modèle économique avec de la publicité. C’est une des raisons, en plus de la qualité de ses podcasts que j’évoquais, pour lesquelles le service public est très puissant dans ce domaine. Il y a donc des raisons à cette réussite, et elles sont objectives.
Encore une fois, nous ne dénigrons pas ce que fait Radio France : nous voulons simplement l’aider, l’accompagner, pour faire face aux enjeux de demain.
Mme Sylvie Robert. C’est-à-dire ? Quels enjeux de demain ?
M. le président. La parole est à Mme Karine Daniel, pour explication de vote.
Mme Karine Daniel. Je souhaite, à l’occasion de cette discussion, saluer les élèves de CM2 de l’école Jacques-Prévert de Clisson, qui ont gagné le concours de création de podcasts de France Inter, « L’école des Odyssées ». Combien de classes ont participé à ce concours ? 1 400.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Et alors ?
Mme Karine Daniel. Cette classe a remporté le concours en relatant la vie de Jeanne de Belleville, ébouriffante femme du Moyen Âge. Je vous invite vraiment, mes chers collègues, à écouter ce podcast remarquable.
Monsieur le rapporteur, peut-être n’y a-t-il pas de modèle économique derrière ce podcast, mais il y a en tout cas un véritable projet d’éducation aux médias, de médiation et d’appropriation des outils de la radio et du numérique par des écoliers.
M. Mathieu Darnaud. Hors sujet !
Mme Karine Daniel. Pas du tout !
Au travers de la question que j’ai posée tout à l’heure – à laquelle je n’ai toujours pas eu de réponse – sur l’affectation des moyens et la distribution des budgets aux différentes filiales de la holding envisagée, nous nous interrogeons sur la capacité future de ces filiales à assurer des missions qui, certes, n’ont pas de modèle économique en tant que tel, mais sont utiles en matière de politique publique, notamment dans le domaine de l’éducation aux médias.
Ces missions ont une vraie valeur ajoutée du point de vue de l’éducation à la citoyenneté, de l’utilisation et de l’appropriation des outils de la radio et de la télévision par les jeunes générations, en les orientant vers les médias publics. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée s’impatiente.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Marques de satisfaction sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Rachida Dati, ministre. À quoi sert une holding, une direction unique, un chef d’orchestre ?
Cela sert d’abord à avoir une capacité d’arbitrage, qui n’existe pas aujourd’hui et qui manque, vous le savez bien. Il y a des difficultés entre Radio France et France Télévisions. Les coopérations par le bas ont été lancées voilà un moment. J’ai d’ailleurs retrouvé une note de 2023 cosignée par Mmes Veil et Ernotte, qui parlait de développer les coopérations par le bas pour aboutir à une gouvernance unique des deux sociétés. En 2023, je n’étais pas là !
On s’est rendu compte ensuite que les coopérations fondées sur cette note ne fonctionnaient pas, que les choses n’avançaient pas. À mon arrivée, en 2024, j’ai reçu les deux directrices, je leur ai demandé d’agir de manière plus volontariste en faveur des coopérations. Cela s’est un peu accéléré, mais la gouvernance unique devait constituer le point d’arrivée de ce mouvement.
À quoi sert une holding ? À éviter que l’usager français, qui finance l’audiovisuel public, ne se retrouve là où il ne veut pas être, soit obligé de suivre des médias qui ne l’intéressent pas, dont il s’est détourné. Il faut que l’audiovisuel public s’adapte à de nouveaux usages ! (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
M. Pierre Ouzoulias. C’est déjà ce qu’il fait !
Mme Rachida Dati, ministre. La holding permettra donc des investissements massifs dans le numérique. Au sein du conseil d’administration, la stratégie sera coordonnée, unique, cohérente et massive, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Il faut ensuite chercher les gens là où ils sont, en renforçant la proximité. Monsieur le sénateur Jadot, les audiences de France Info ont baissé de 14 % ! Cela ne marche pas ! (Mêmes mouvements.)
M. Thomas Dossus. Quelles sont les audiences ?
Mme Rachida Dati, ministre. Si l’on veut une information fiable et de qualité, il faut un moyen permettant de relancer France Info avec les outils actuels.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Parlez-vous de France Info ou de France Info TV ?
Mme Rachida Dati, ministre. Madame Rossignol, j’ai été très sensible à votre litanie des podcasts sur Deleuze ou sur la Bosnie-Herzégovine, mais à qui s’adressent-ils ? Selon vous, Deleuze serait réservé à certains, et le football, c’est populaire, ce serait pour le reste ? Je vous remercie de votre charité ! (Mme Marie-Pierre de La Gontrie s’exclame.) Nous voulons, nous, que les Français puissent s’intéresser à tout, que l’accès aux programmes soit simple. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie fait des moulinets avec ses index de chaque côté de son visage.)
Un peu de respect, madame de La Gontrie ! Je ne suis pas fille de sénateur, certes,…
M. Pierre Ouzoulias. Moi non plus, je ne suis pas fils de sénateur !
Mme Rachida Dati, ministre. … mais vous ne pouvez pas me faire ce geste ! S’il vous plaît, respectez-moi, y compris dans votre gestuelle. Je ne suis pas votre femme de ménage ! (Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ah bon ?
Mme Rachida Dati, ministre. Votre réponse est éloquente ! Je vous le répète, je ne suis pas votre femme de ménage ! Mon père ouvrier a peut-être travaillé pour votre père, mais cette époque est révolue ! (Mêmes mouvements.)
Mme Monique de Marco. C’est incroyable !
Mme Rachida Dati, ministre. Il faut aller chercher les Français là où ils sont et s’adapter à leur usage de l’audiovisuel public. Là est l’intérêt d’une gouvernance unique, d’une stratégie cohérente et coordonnée.
En ce qui concerne les audiences, vous demandez pourquoi changer Radio France et France Inter. Mais seuls 9,8 % des auditeurs de France Inter sont des Français des classes populaires !
M. Pierre Ouzoulias. Les chiffres des téléchargements ne sont pas pris en compte !
Mme Rachida Dati, ministre. On peut choisir de rester entre nous, comme je l’ai dit – 38 % des auditeurs de France Inter sont des CSP+ (catégories socioprofessionnelles élevées) –, mais, selon moi, il faut engager une stratégie volontariste pour intéresser tous les Français à la radio et à la télévision publiques, que, je le répète, ils financent.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et créer une holding changerait cela ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Qu’est-ce que cela va changer ?
M. Roger Karoutchi. Allez, votons !
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour explication de vote.
M. Yan Chantrel. Madame la ministre, nous venons d’avoir une explication assez particulière…
Mme Rachida Dati, ministre. Parler des classes populaires, cela vous gêne ? (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Yan Chantrel. Depuis le début de l’examen de ce texte, vous n’avancez aucun argument.
M. Yan Chantrel. Vous vous livrez à des attaques personnelles pour masquer le vide de votre pensée sur ce projet.
M. Yan Chantrel. Ce que vous faites en revanche, madame la ministre, avec tout le respect que je vous dois, c’est attaquer le service public, en vous en prenant à des journalistes lors d’une émission du service public. C’est du jamais vu !
Mme Rachida Dati, ministre. C’était un signalement contre un mode de management ! Des agents du service public ont été attaqués !
M. Yan Chantrel. Je représente les Français établis hors de France ; dans quel autre pays voit-on des ministres attaquer des journalistes du service public sur une chaîne du service public, en les menaçant d’un procès et d’un signalement au titre de l’article 40 du code de procédure pénale ?
M. Yan Chantrel. On ne voit cela que dans des régimes qui ne sont pas démocratiques. C’est du jamais vu en France !
Ces interventions illustrent votre attitude à l’égard du service public et cela nous fait craindre le pire par rapport à la création de la holding ! Madame la ministre, vous êtes l’incarnation de ces dérives, vous continuez de nous menacer et de tenter de nous intimider, mais vous ne nous faites pas peur !
M. Olivier Paccaud. Cela vole haut…
M. Yan Chantrel. Nous prendrons tout le temps nécessaire pour débattre calmement, tranquillement, sur des positions de fond ; en effet, depuis le début de nos discussions, nous nous concentrons sur le fond, mais vous n’êtes pas capable de donner un seul argument de fond, ce qui est pathétique !
M. Yan Chantrel. En revanche, vous essayez de passer en force par tous les moyens. Nous, nous resterons là, nous serons mobilisés jusqu’au bout pour ne pas laisser passer ce texte et pour lutter contre les dérives que vous incarnez en permanence, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Le groupe Union Centriste votera évidemment contre ces amendements.
Nous sommes accusés de ne pas développer nos arguments. Nous proposons un modèle adapté aux enjeux de demain et nous avons un désaccord de fond ; mais, de grâce, arrêtez de caricaturer nos positions ! Nous avons déjà subi la litanie assez ennuyeuse de titres de programmes, au demeurant très tentants.
J’ai particulièrement apprécié la comparaison avec des pays étrangers ; au cours des nombreux débats que nous avons eus récemment, sur le temps de travail ou sur les retraites, vous avez toujours refusé de telles comparaisons, parce que « notre histoire », parce que ceci, parce que cela…
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Eh oui !
Mme Annick Billon. Bien entendu, nous voterons contre ces amendements et, bien entendu, nous soutenons le service public.
M. Roger Karoutchi. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, je ne comprends pas le jeu auquel nous jouons.
M. Pierre Ouzoulias. Sur ce texte, le Gouvernement n’a pas demandé la procédure accélérée. Le Gouvernement ne l’a pas non plus inscrit à l’ordre du jour prévisionnel de la session extraordinaire de septembre prochain ; et nous apprenons à l’instant même, par une dépêche de l’Agence France-Presse (AFP), que le Gouvernement ne demanderait pas l’ouverture d’une séance au-delà de vendredi minuit.
M. Pierre Ouzoulias. Par conséquent, de toute façon, madame la ministre, votre texte ne sera pas voté, et nous l’examinerons de nouveau à la rentrée de septembre.
Compte tenu de ces conditions, je préférerais que notre dialogue soit apaisé et surtout que vous nous apportiez des réponses techniques. Madame la ministre, comment connaissez-vous la caractérisation sociale des auditeurs qui téléchargent des podcasts ?
M. Pierre Ouzoulias. Techniquement, je ne vois pas comment cela serait possible. Les analyses de Médiamétrie reposent sur des appels, durant lesquels les personnes décrivent leur utilisation de la radio. On connaît le nombre et le lieu des téléchargements, mais on ne peut connaître l’origine sociale des auditeurs. Je ne comprends pas d’où viennent les chiffres que vous avancez : il faut nous le préciser. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. J’aimerais également comprendre d’où viennent les chiffres avancés par la ministre. Madame la ministre, comment pouvez-vous avancer que France Info ne marche pas, alors que, durant la dernière saison, son audience était en hausse ? Selon les derniers chiffres de Médiamétrie, elle a accueilli 126 000 auditeurs supplémentaires en un an.
La réalité, madame la ministre, c’est que vous n’aimez pas le service public, c’est que la neutralité et l’indépendance du service public vous gênent. (Mme Catherine Di Folco et M. Jean-Raymond Hugonet protestent.)
Yan Chantrel l’a indiqué il y a un instant, lorsque vous menacez des journalistes du service public durant une émission de grande audience, dont les extraits sont bien sûr repris sur les réseaux sociaux, vous vous rendez coupable des mêmes dérives que celles qui se multiplient aux États-Unis, dans une démocratie qui tend de plus en plus vers l’autocratie.
C’est ainsi que cela commence : on attaque d’abord les médias. D’autres comme Yannick Jadot l’ont déjà dit, nous sommes en train de toucher à l’indépendance de l’information, qui est un pilier de la démocratie. Si, en 2027, l’extrême droite arrivait au pouvoir, vous leur auriez offert tous les outils permettant de contrôler totalement l’information et de mettre fin à la liberté du débat démocratique dans notre pays.
M. Roger Karoutchi. C’est légèrement caricatural…
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Cette fin de session extraordinaire se révèle être une extraordinaire session, car il s’agit en réalité d’une « session Rachida Dati » ! Souvenez-vous, mes chers collègues, nous nous accordions hier soir pour convenir, lors de l’examen de la proposition de loi visant à réformer le mode d’élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille, qu’il s’agissait d’une loi Rachida Dati…
Madame la ministre, veuillez m’en excuser, mais il s’agit aussi ce soir d’une loi Rachida Dati et, si nous ne vous entendons pas beaucoup,…
M. Guy Benarroche. … nous pensons que c’est parce que vous ne voulez pas parler, mais peut-être est-ce en réalité parce que vous n’avez pas d’argument technique à apporter. Nous aimerions bien les connaître, ces arguments, si vous les aviez : cela permettrait de lever un doute, de savoir quelles sont les raisons qui vous motivent. Mais tant que vous ne parlez pas, madame la ministre, nous ne pouvons pas savoir…
M. Guy Benarroche. Madame la ministre, si cela ne vous dérange pas, je préférerais que vous preniez la parole plutôt que de m’interrompre ; tels sont les usages dont nous avons l’habitude au Sénat.
M. le président. Pas d’interpellation directe de Mme la ministre, monsieur Benarroche !
M. Guy Benarroche. Je n’interpelle personne, monsieur le président.
En ce qui me concerne, je tenais à féliciter M. le rapporteur de l’exactitude de ses propos au sujet de la qualité du travail de Radio France. Cette radio remplit une mission de service public. Elle ne répond pas forcément aux exigences d’un modèle économique, mais en définitive, par la qualité de ses programmes, elle sert la Nation.
Toutefois, il y a quelque chose que je n’arrive pas à comprendre – dans le monde économique dont je suis issu, la chose paraît bizarre – : à partir du moment où nous disposons d’un outil qui fonctionne correctement,…
M. le président. Merci, mon cher collègue.
M. Guy Benarroche. … qui donne de meilleurs résultats que les sociétés privées qui le concurrencent, pourquoi le supprimer ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Merci de participer à l’animation !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Attendez la chute, ma chère collègue ! (Sourires.)
Mes chers collègues, permettez à un sénateur qui n’est pas membre de la commission de la culture d’intervenir. Je sens le soupçon de certains collègues de la gauche de l’hémicycle par rapport aux intentions des auteurs de la proposition de loi, de M. Lafon, des membres des différents groupes qui soutiennent ce texte et du Gouvernement.
J’en suis persuadé, nous avons tous un amour et une passion pour le service public, et en particulier pour le service public audiovisuel.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il n’y a que des preuves d’amour !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Nous sommes tous conscients du rôle des chaînes locales, à la télévision comme à la radio. Madame Rossignol, vous avez omis de mentionner la très bonne émission d’Alain Finkielkraut, « Répliques », le samedi matin, avant « Concordance des temps », qui est une autre très bonne émission. On aurait pu les mentionner aussi.
Puisque nous sommes soupçonnés de préparer l’éviction d’Untel ou d’Untel, je veux rappeler que – les faits sont têtus –, s’il y a un journaliste qui a été évincé par le pouvoir politique, c’est Daniel Bilalian,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’était Jean-Pierre Elkabbach !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. … en décembre 1991, après que le ministre de l’intérieur Philippe Marchand avait levé le petit doigt !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous n’étiez pas né ! (Rires.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne. J’avais 14 ans, je regardais la télévision, et je me souviens avoir été choqué (Applaudissements ironiques et rires sur les travées du groupe SER.) de voir ce journaliste évincé par le pouvoir politique.
Un dernier point : nos amis de la gauche devraient savoir comment fonctionne une holding, puisque c’est ce qu’ils pratiquent au quotidien : le Nouveau Front populaire, c’est une holding et pourtant chacun des partis qui en font partie y vit ! (Exclamations sur les travées du groupe SER.)