M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 113 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
L’amendement n° 277 rectifié est présenté par MM. Patient, Buis et Buval et Mme Schillinger.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 7 à 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 113.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent amendement, qui nous a été suggéré par le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom), vise à supprimer les dispositions de l’article 17 relatives à l’obligation de mise sous objectif de professionnels de santé ciblés pour hyper-prescription. En effet, le médecin doit pouvoir refuser une mise sous objectif, qui est souvent perçue comme une qualification implicite de fraude ou de faute – d’où la présence de cette mesure dans le présent projet de loi –, ce qui pose un problème de principe.
De plus, la méthodologie des contrôles réalisés présente de nombreux biais structurels. D’ailleurs, celle-ci s’est peu à peu resserrée. Le délai entre la prescription et le contrôle fausse l’analyse de la pertinence médicale. La typologie de la patientèle n’est pas toujours, ou est difficilement prise en compte. Les critères statistiques ne reflètent pas la complexité clinique.
Le Cnom rappelle en outre que la relation médecin-patient repose sur la confiance et qu’une approche purement quantitative du soin ne saurait se substituer à l’évaluation clinique lors de la consultation.
Par ailleurs, une mise sous objectif contrevient à l’obligation du médecin de délivrer les soins qu’il juge adaptés et de qualité, en lien avec les besoins réels et l’état de santé du patient. Elle porte également atteinte à son indépendance professionnelle et à la liberté de prescription, principes consacrés par la loi.
Le médecin ne peut être contraint dans sa pratique professionnelle par une décision unilatérale du directeur de la caisse primaire d’assurance maladie, auquel il serait alors lié par un rapport de subordination administrative. Le praticien doit pouvoir refuser cette mise sous objectif d’une réduction quantitative des prescriptions – car c’est de cela qu’il s’agit. Libre à la CPAM, ensuite, d’engager la mise sous accord préalable : ce sera alors à celle-ci d’assumer la responsabilité de récuser ou de limiter une prescription jugée pertinente par le médecin au regard de l’ensemble des particularités et de la situation du patient.
M. le président. L’amendement n° 277 rectifié n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 173 rectifié est présenté par MM. Sol et Milon, Mme Micouleau, M. J.B. Blanc, Mme Malet, MM. Anglars et Chatillon, Mme M. Mercier, M. Panunzi, Mme Dumont, MM. Daubresse et Naturel, Mme Richer, MM. Hugonet et Sido, Mme Petrus, MM. Khalifé, Brisson, H. Leroy, Somon, Burgoa et Houpert, Mmes P. Martin et Imbert et MM. Belin, Delia et Meignen.
L’amendement n° 222 est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly et Brulin, MM. Barros, Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour présenter l’amendement n° 173 rectifié.
M. Jean-Claude Anglars. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 222.
Mme Céline Brulin. Nous proposons, par cet amendement, de supprimer l’alinéa 8 de l’article 17.
Il me semble que cet article – c’est, en tout cas, la lecture que j’en fais – visait à s’attaquer aux centres de santé privés qui prolifèrent sur fond de désertification médicale, et dont un certain nombre ont été convaincus de fraude, pour ne pas dire pire. Si je peux souscrire à cet objectif de lutte contre des cabinets privés assez peu recommandables, je considère que le fait de priver les médecins de leur liberté de prescription n’est pas la bonne solution.
Je fais partie de ceux dont les exigences sont nombreuses à l’égard des médecins, mais les priver de ce qui est le cœur de leur métier me semble délétère dans la période que nous vivons. En effet, pour le dire de manière un peu caricaturale, on leur demande en quelque sorte d’être des agents comptables de la sécurité sociale.
Or nous savons bien que les contrôles d’ores et déjà opérés sont très compliqués et peu convaincants, notamment parce qu’un délai important sépare la prescription du contrôle, ce qui fausse l’analyse de la pertinence médicale. Je peux vous assurer, car j’ai en tête de nombreux exemples que je n’aurai malheureusement pas le temps de développer, que la typologie des patients, qui peuvent développer des pathologies différentes selon leur condition sociale ou la profession qu’ils exercent, n’est pas du tout prise en compte.
Ces dispositions portent donc un coup terrible à la relation de confiance, primordiale, qui doit prévaloir entre un médecin et son patient, en lui substituant une sorte de rapport de subordination administrative qui me semble très dangereux pour l’ensemble de la profession et les patients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales. Mon argumentaire sera identique pour les trois amendements en discussion commune. Selon nous, il ne s’agit aucunement, avec ces dispositions, de remettre en cause la liberté de prescription. Si tel était le cas, la commission serait évidemment favorable à ce que nos collègues proposent.
Dans tout ce que nous faisons, notamment en matière de lutte contre la fraude, la question de la proportionnalité est essentielle.
Ces amendements, pour être clair, visent à supprimer la possibilité pour l’assurance maladie de rendre obligatoire la mise sous objectif pour les médecins surprescripteurs. Or cette mise sous objectif est un outil efficace et, je le répète, proportionné de régulation des dépenses de santé couvertes par l’assurance maladie. Elle permet une réduction de 30 % en moyenne des prescriptions sous sanction, tout en respectant le principe du contradictoire. Je ne peux donc pas laisser passer ce que je viens d’entendre à l’instant. Par ailleurs, 30 % des procédures sont abandonnées après les observations du médecin, ce qui montre qu’il s’agit d’une vraie procédure contradictoire.
Encore une fois, cette mesure sanctionne non pas une faute, mais une pratique objectivement surprescriptive, identifiée à partir d’un taux de prescription deux fois supérieur à la moyenne et au plus près du terrain. Une correction a été apportée en 2022 après que des abus de l’assurance maladie ont été constatés : il s’agit d’être encore plus précis, car, effectivement, la surprescription n’est pas la même partout. Ainsi, depuis septembre dernier, le ciblage est le plus fin possible. Il prend en compte la typologie de la patientèle, les caractéristiques socioéconomiques et l’offre de soins locale.
La mesure, proportionnée – j’y insiste –, ne concerne qu’une extrême minorité de praticiens, ceux qui abusent, c’est-à-dire 0,4 % des médecins en 2024. Ces derniers sont alors suivis individuellement par un pair.
Si nous voulons vraiment lutter contre la fraude, il faut rejeter ces amendements. La commission émet par conséquent un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Stéphanie Rist, ministre de la santé, des familles, de l’autonomie et des personnes handicapées. En complément, je dirai que la proportion de professionnels de santé qui abusent et qui fraudent est faible. Il y en a toutefois, et ce pour un montant estimé à 2 milliards d’euros par le Haut Conseil du financement de la protection sociale.
L’article 17 s’articule autour de trois axes : premièrement, il lève l’interdiction de cumuler la sanction conventionnelle et la sanction financière ; deuxièmement, il étend le champ du contrôle de la surprescription aux centres de santé et aux plateformes, qui ne sont aujourd’hui contrôlés que par rapport aux seules indemnités journalières ; troisièmement, il rend obligatoire la mise sous objectif pour les surprescripteurs détectés.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur tous ces amendements en discussion commune.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le rapporteur, on ne peut pas prendre pour argument la baisse de 30 % des prescriptions. Lors de leur audition par la commission des affaires sociales – si l’on ne tire aucune conséquence des auditions, autant ne plus en faire ! –, les représentants du syndicat des médecins généralistes (MG France) ont en effet indiqué que c’est la menace d’une pénalité de 30 % qui poussait les médecins à se conformer aux préconisations. En clair, c’est soit payer une pénalité, soit assumer de renouveler un arrêt de travail…
Or la prise en compte de la situation clinique et personnelle d’un patient peut conduire les praticiens à ne pas respecter les recommandations, lesquelles ne sont après tout que des repères de bonnes pratiques ou de simples informations données aux médecins. Il n’y a pas, face à une pathologie donnée, des médecins qui respectent les préconisations et d’autres qui surprescrivent.
Vous affirmez, monsieur le rapporteur, que le dispositif est efficace, car les médecins baissent leurs prescriptions. Oui, mais ils ne le font que parce qu’autrement ils paieraient ! Ils ne sont pas convaincus pour autant et maintiennent que c’est à la CPAM, dans ce cas-là, d’agir de façon autoritaire. Ils ne sont pas d’accord avec le transfert de responsabilité qui s’est opéré de la CPAM vers eux.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Anglars. Au vu des explications qui viennent d’être données par M. le rapporteur et Mme la ministre, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 173 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 113.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 96, présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. L’alinéa 11 a été introduit dans le texte sur l’initiative des rapporteurs. Il tend à mettre fin au remboursement par l’assurance maladie des produits de santé et des prestations prescrites par un professionnel de santé déconventionné durant la période de la sanction. Cela revient à sanctionner non pas seulement les praticiens, mais également leurs patients. Nous ne pouvons l’accepter, les patients n’étant pour rien dans les faits reprochés au professionnel concerné.
Cette mesure pourrait avoir des conséquences très concrètes, comme des ruptures de soins, notamment dans les territoires déjà en tension où trouver un autre praticien conventionné relève parfois du parcours du combattant.
Selon France Assos Santé, 60 % des Français renoncent à des soins ou les reportent pour des raisons financières. Si, en plus, ils ne sont pas remboursés quand ils consultent un médecin déconventionné, cela va poser problème.
Il n’en reste pas moins que nous pourrons nous interroger, en d’autres temps, sur le déconventionnement et le fonctionnement du secteur 3 en médecine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur le déremboursement des prescriptions des professionnels de santé déconventionnés pour fraude, voté en commission la semaine dernière.
Le déremboursement des prescriptions durant la période de déconventionnement apparaît pourtant nécessaire, car il traduit la rupture de confiance entre l’assurance maladie et le professionnel de santé fautif. Il constitue aussi, il faut le dire, un instrument dissuasif essentiel pour lutter contre la récidive.
Contrairement à ce que je viens d’entendre, cette disposition n’aura pas d’effet significatif sur l’accès aux soins dans la mesure où celle-ci est, je le redis, proportionnée, puisqu’elle ne concernera que soixante-dix médecins par an, soit un nombre marginal à l’échelle nationale.
Je n’ai pas un goût prononcé pour la polémique, mais permettez-moi tout de même de relever que vous allez défendre dans quelques instants l’amendement n° 94, qui vise au contraire à étendre le déremboursement à tous les médecins déconventionnés. Allez chercher la logique ! Étrangement, vous ne voyez là aucun risque de rupture dans l’accès aux soins. (Mme Raymonde Poncet Monge proteste.)
L’alinéa 11 prévoyant un dispositif proportionné, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous souhaitez, monsieur le sénateur, supprimer le déremboursement des prescriptions des médecins déconventionnés pour fraude.
Nous avons eu ce débat en première lecture à l’Assemblée nationale, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un amendement visant à dérembourser toutes les prescriptions des médecins déconventionnés a été adopté. Nous aurons donc l’occasion d’en discuter ici aussi, au Sénat, dans quelques jours.
Pour l’heure, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Il faut faire une distinction entre les médecins déconventionnés et sanctionnés pour avoir commis une infraction et les médecins qui s’installent et font le choix de ne pas être conventionnés.
Les patients qui consultent un médecin non conventionné savent à qui ils s’adressent et que leur consultation sera à leur charge, qu’elle ne leur sera pas remboursée. En revanche, les patients ne sont pas forcément informés du fait que leur médecin a été sanctionné et qu’il est donc déconventionné. Dans ce cas, ils pourraient être pénalisés.
Il y a là une nuance qu’il convient de souligner.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Le déconventionnement et le choix volontaire d’exercer en secteur 3 sont deux choses tout à fait différentes. La consultation d’un médecin en secteur 3 est remboursée à hauteur d’un euro à peine. C’est déjà une forme de pénalité pour le patient.
L’amendement adopté dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que Mme la ministre a évoqué, pose la question de savoir si l’on doit continuer de rembourser les prescriptions d’un médecin qui n’est pas conventionné. Ce cas de figure n’a rien à voir avec celui que vient de mentionner notre collègue, celui d’un médecin déconventionné pour fraude : ne conviendrait-il pas dans cette situation de procéder au remboursement des prescriptions, sachant que les patients pourraient pendant un certain temps ne pas être au courant du déconventionnement ?
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous soutiendrons cet amendement. L’alinéa 11, qui a été introduit en commission par voie d’amendement, reporte sur les patients la punition qui devrait en fait être infligée aux médecins fraudeurs.
Je vous propose de passer en revue tous les articles du projet de loi et d’appliquer à chacun d’eux le même principe qu’ici, à savoir mettre à contribution tous ceux qui dépendent de fraudeurs. Cela va vous faire bizarre !
Dans une société idéale, tout le monde aurait accès à un médecin et pourrait, comme le permet le système de santé en France, choisir son praticien. Or, aujourd’hui, ce n’est plus possible, six millions de Français étant sans médecin traitant.
J’entends qu’un faible nombre de médecins – fort heureusement ! – seraient concernés par la disposition prévue à l’alinéa 11. Néanmoins, des patients pourraient se retrouver contraints de consulter un médecin ayant été déconventionné après avoir commis une fraude sans aucune possibilité de consulter qui que ce soit d’autre, ce qui serait une double peine : soit ils paieront pour leur médecin, soit, s’ils s’y refusent, ils se retrouveront sans médecin. On parle beaucoup de proportionnalité des sanctions, on en est ici assez loin…
M. le président. L’amendement n° 130 rectifié bis, présenté par Mme Demas, M. Séné, Mmes Aeschlimann, Imbert, Ventalon et Joseph, M. Lefèvre, Mme Micouleau, MM. Burgoa et Sido, Mmes Primas et Evren, MM. Anglars, Brisson et Panunzi, Mmes Dumont, Belrhiti, Gosselin, Josende et Petrus et MM. Belin et Bruyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…. Après le troisième alinéa de l’article L. 162-15-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de fraude individuelle avérée au cours des deux dernières années pour un montant au moins égal à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale par un professionnel de santé alors qu’il est ou était salarié d’une structure conventionnée, la caisse primaire d’assurance maladie peut refuser de placer ce professionnel de santé sous le régime conventionnel. Un décret fixe les modalités d’application du présent alinéa, notamment la durée maximale de refus du conventionnement. En cas de récidive dans les cinq ans, le précédent alinéa s’applique. »
La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.
Mme Marie-Do Aeschlimann. L’article L. 162-15-1 du code de la sécurité sociale permet déjà aux caisses primaires d’assurance maladie de renforcer leur contrôle sur les professionnels de santé. Toutefois, lorsque les structures sont fermées pour fraude, certains professionnels impliqués peuvent reconventionner leur activité individuelle sans obstacle, alors même que leurs agissements ont été établis.
Si cet amendement de notre collègue Patricia Demas était adopté, les caisses primaires d’assurance maladie pourraient refuser temporairement le conventionnement du professionnel concerné si la fraude individuelle était avérée au cours des deux dernières années et si le montant de la fraude était substantiel, en l’occurrence s’il était au moins égal à huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.
Cet amendement est essentiel pour rendre les conséquences de la fraude plus tangibles. Il s’agit, au fond, de responsabiliser les professionnels sans déséquilibrer le système de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. La disposition proposée est à la fois justifiée et proportionnée. La commission y est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Cet amendement tend à introduire une proposition figurant dans le rapport Charges et produits pour 2026 de la Caisse nationale de l’assurance maladie. J’y suis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 17, modifié.
(L’article 17 est adopté.)
Après l’article 17
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 106 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 114-17-1-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « peut procéder à l’annulation de tout ou partie de » sont remplacés par les mots : « procède à l’annulation de toute ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à permettre à l’assurance maladie de récupérer l’ensemble des cotisations sociales du professionnel de santé qu’elle a prises en charge lorsque celui-ci est reconnu coupable de faits à caractère frauduleux.
Je rappelle, puisque nous traitons de la fraude sociale, que, selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale, 10 % de la fraude sociale provient de la facturation par des professionnels de santé de prestations indues, 56 % de cette fraude étant imputable à l’évitement des cotisations sociales. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 a instauré la possibilité de recouvrer la participation de l’assurance maladie au financement des cotisations du professionnel frauduleux, mais cette mesure peut ne porter que sur une partie du financement et demeure facultative.
Le présent amendement vise à supprimer ce caractère facultatif afin de faire de la récupération de l’intégralité des cotisations prises en charge le principe premier. Il ne tend toutefois pas à remettre en cause le pouvoir d’appréciation de l’administration selon les circonstances, qui devrait exister dans tous les champs de la lutte contre la fraude, y compris lorsque l’appréciation au cas par cas demeure nécessaire.
On nous oppose que c’est pour permettre le recouvrement que l’on ne procède qu’à un recouvrement partiel. Je rappelle que nous avons précédemment supprimé la totalité des allocations de certains bénéficiaires et doublé le montant des amendes afin de les rendre dissuasives.
Nous devons donc recouvrer la totalité des sommes, et non une partie seulement, comme on le fait pour toutes les personnes morales ou physiques qui ont fraudé.
M. le président. L’amendement n° 88, présenté par M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Le Houerou, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 114-17-1-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « peut procéder » sont remplacés par le mot : « procède ».
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement vise à rendre automatique l’annulation par l’assurance maladie de sa prise en charge des cotisations sociales d’un professionnel de santé reconnu coupable de faits à caractère frauduleux.
Aujourd’hui, lorsqu’un professionnel de santé commet une fraude au détriment de la sécurité sociale, il peut être sanctionné pénalement ou financièrement, mais l’annulation de la prise en charge de ses cotisations sociales n’est pas systématique. Elle relève d’une appréciation au cas par cas, ce qui crée une forme d’incohérence dans le traitement des situations et peut aboutir à une inégalité de traitement entre les auteurs de faits similaires.
Nous considérons qu’un professionnel de santé qui a bénéficié de la solidarité nationale pour le paiement de ses cotisations commet une double faute lorsqu’il fraude : il manque de probité professionnelle et de sens de la responsabilité collective.
La sécurité sociale, rappelons-le, n’est pas un fonds abstrait ; c’est le patrimoine commun de celles et ceux qui n’ont rien d’autre. Détourner ses ressources, c’est porter atteinte à un pilier de notre modèle social.
Il est donc légitime de prévoir une sanction automatique et de ne pas laisser de place à l’arbitraire. En votant cet amendement, nous renforcerions notre crédibilité en matière de lutte contre la fraude et nous adresserions un message clair : tout professionnel reconnu coupable verra la prise en charge de ses cotisations sociales par l’assurance maladie automatiquement annulée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Nous ne portons pas le même regard sur ces deux amendements en discussion commune.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 106 rectifié, qui tend à prévoir une obligation d’annulation totale.
L’amendement n° 88 vise, quant à lui, à prévoir une annulation partielle ou complète de la prise en charge des cotisations sociales sur les revenus indus d’un professionnel de santé reconnu coupable de fraude. Le principe de gradation et de personnalisation de la sanction par le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie est ainsi respecté. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le rapporteur, nous faisons une lecture quelque peu différente de ces deux amendements. Une sanction administrative doit être personnalisée, elle ne peut donc pas être automatisée. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je retire mon amendement au profit de l’amendement n° 88 de mon collègue Jean-Luc Fichet.
Je constate tout de même que les arguments développés sont véritablement orthogonaux selon que l’on parle des assurés, d’auteurs de fraude fiscale, ou des professionnels de santé, dont le montant des fraudes équivaut pourtant aux deux tiers du montant global des fraudes sociales.
Pour les professionnels de santé, on dispose d’un pouvoir d’appréciation, on tient compte de la situation et on personnalise la sanction ; pour les assurés, en revanche, on récupère tout et on double le montant des amendes !
Vous avez eu tort de traiter dans un même projet de loi la fraude sociale et la fraude fiscale, parce que cela crée une équivalence entre des individus qui ne jouent pas dans la même cour, un peu comme si vous faisiez jouer les uns contre les autres des clubs de football de Ligue 1 et de Ligue 2. Mais, après tout, tant mieux, car cela montre que vous ne justifiez pas de la même manière la fraude imputable aux professionnels de santé et celle des bénéficiaires du RSA ou de la prime d’activité. Je précise que cela ne signifie pas que nous défendons ces derniers.
Quand on demande des sanctions proportionnées, la prise en compte de la situation personnelle et un pouvoir d’appréciation pour les assurés, on nous dit non. À l’inverse, on nous oppose qu’on ne peut pas récupérer la totalité des sommes fraudées par les professionnels de santé.
Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, les infirmières qui commettent des fraudes sont également concernées par cet article. Nous ne faisons preuve, me semble-t-il, d’aucune incohérence.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 171 rectifié bis, présenté par MM. Iacovelli, Théophile et Patriat, Mme Havet et M. Buis, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « tarification, » , sont insérés les mots : « de prescription, » ;
2° Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « articles » , est insérée la référence : « L. 160-8, » et, après la référence : « L. 162-1-7, », est insérée la référence : « L. 162-4, ».
La parole est à M. Xavier Iacovelli.


