Aussi, une réduction des allègements généraux pour ces branches pourrait avoir pour principal effet non pas de susciter des hausses de salaire, mais de détruire des emplois.
La question de la revalorisation des minima de branche semble plutôt relever des négociations annuelles obligatoires (NAO). Une future loi Travail – je me tourne vers vous, monsieur le ministre – serait vraisemblablement un véhicule plus approprié qu’un PLFSS.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Madame la sénatrice, nous partageons votre préoccupation que toutes les branches pratiquent un bon niveau de rémunération. Comme l’a dit Mme la rapporteure générale, pour valoriser le travail, il est important de verser aux salariés des rémunérations justes, qui progressent tout au long de la carrière.
Toutefois, je ne suis pas favorable à la modalité que vous proposez, et je vais vous expliquer pourquoi. Comme il s’agit d’un mécanisme à deux étages, si je puis dire, il peut exister des cas de figure où une entreprise qui appliquerait des salaires corrects serait sanctionnée parce que la branche à laquelle elle appartient a défini des minima conventionnels inférieurs au Smic.
Ainsi, on en viendrait à pénaliser une entreprise vertueuse, ce qui est quelque peu paradoxal. Voilà un effet de bord auquel pourrait conduire l’adoption de cet amendement.
De plus, cela rendrait encore plus complexes des calculs qui le sont déjà, car il faudrait les effectuer par branche. Et je ne parle pas du cas des entreprises relevant de plusieurs conventions collectives…
Aussi, pour des questions de mise en pratique et pour éviter de potentiels effets de bord source d’iniquité, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour explication de vote.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. J’aurais aimé pouvoir voter cet amendement, mais cela m’est impossible pour les raisons que vient d’exposer M. le ministre.
En outre, il ne me semble pas possible, du point de vue juridique, de sanctionner une entreprise pour une pratique qui n’est pas de son fait, mais qui relève de la branche à laquelle elle appartient.
Si un amendement tendant au même objectif de conditionner des allègements de charges à des dynamiques salariales devait être déposé à l’avenir, peut-être faudrait-il s’inspirer de la loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail et pénaliser de 10 % les entreprises ou les branches qui n’engagent pas de négociations salariales.
En effet, la loi ne peut pas contraindre une entreprise ou une branche à faire aboutir des négociations et à se mettre d’accord : une négociation se fait entre deux parties. En revanche, le fait de ne pas mener de telles négociations pourrait être sanctionné.
Malheureusement, la disposition de 2008 a été suspendue au moment de la crise financière, mais elle me semble la seule voie juridiquement viable. Nous pourrions y réfléchir à nouveau. (M. le ministre acquiesce.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Sur l’esprit, nous sommes d’accord : il faudrait faire en sorte que les branches appliquent la loi. Lorsqu’elle était en fonction, Elisabeth Borne avait dit que son ministère conduirait une lutte déterminée pour faire appliquer la loi en donnant aux branches un temps de négociation à l’issue duquel elles devraient se mettre en règle.
J’en profite tout de même pour dire que certaines branches voient leurs accords soumis à l’agrément du ministère du travail. Je pense en particulier à la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile (BAD).
En effet, les employeurs et les organisations syndicales de cette branche ont signé en mars 2025 un avenant à sa convention collective, dit avenant 68, dont l’objet était de revaloriser les grilles salariales de six points pour porter le minimum conventionnel au-delà du Smic.
Je parle d’une branche qui n’a pas fait l’objet du Ségur de la santé et dont les grilles se retrouvent bien souvent immergées. Or le ministère du travail a notifié un refus d’agrément de cet avenant.
Je sais bien que des pressions existent. Je ne dirai pas de la part de qui, qu’importe, mais je comprends, monsieur le ministre, votre réticence à soutenir cet amendement…
En tout état de cause, des branches médico-sociales, comme celle de la BAD, dépendent de l’agrément du ministère et se voient souvent opposer un refus, ce qui les empêche de revaloriser leurs grilles salariales.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1672.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 1769, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le a du 3° du III de l’article L. 136-1-1 est abrogé ;
2° L’article L. 137-13 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au troisième alinéa, les mots : « L. 225-197-1 à L. 225-197-5, » sont supprimés ;
– le dernier alinéa est supprimé ;
b) A la première phrase du 2° du II, les mots : « L. 225-197-1 à L. 225-197-5 » sont supprimés.
II. – Le I entre en vigueur au 1er janvier 2026.
III.- La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement devrait plaire à notre rapporteure générale, puisqu’il a pour objet de dégager des recettes nouvelles.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cela commence bien !
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement, soutenu par l’ensemble des groupes de gauche du Sénat, vise à soumettre les attributions d’actions gratuites aux cotisations sociales, de la même manière que les salaires classiques.
En effet, à l’heure actuelle, ces attributions d’actions gratuites échappent aux contributions sociales. Pourtant, elles concernent principalement les revenus les plus élevés : selon le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), 1,6 milliard d’euros d’actions ont été distribués l’année dernière à 145 salariés, qui perçoivent donc entre 2 millions et 3 millions d’euros par an.
De fait, les attributions d’actions gratuites représentent des sommes colossales pour les salariés les plus riches. Nous proposons donc que ces compléments de salaire soient tout simplement intégrés à l’assiette des cotisations sociales, comme le sont les salaires classiques, car les cotisations doivent concerner tous les types de revenu.
De cette manière, nous voulons soumettre ces attributions aux cotisations sociales, afin que les plus riches contribuent réellement au financement de la sécurité sociale et, par la même occasion, financent la suspension de la réforme des retraites, dont nous parlerons ultérieurement. En effet, l’effort ne doit pas échoir aux assurés, aux retraités ou à ceux qui payent leur complémentaire santé, comme y conduiraient les mesures que vous avez précédemment rétablies.
Cette disposition permet de rétablir l’équité entre les différentes formes de rémunération : les salariés et les dirigeants qui reçoivent des actions bénéficient d’un avantage patrimonial comparable à un salaire ; il est donc juste qu’ils contribuent, comme tous les autres salariés, au financement de notre modèle social en matière de santé, de retraite et de protection sociale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chère collègue, votre propos a très bien commencé : nous devons trouver des recettes pour remplir les caisses de la sécurité sociale, c’est une réalité. À cet égard, je salue très sincèrement votre travail en vue d’en trouver de nouvelles. Au reste, nous soutiendrons ultérieurement l’un de vos amendements, dont c’est précisément l’objet.
L’amendement que nous examinons vise à inclure les attributions d’actions gratuites dans l’assiette des cotisations sociales. Nous en avons déjà parlé l’an dernier, mais je tiens à y revenir, car le dispositif n’est pas le même que celui qui avait été proposé.
Les attributions d’actions gratuites sont exemptées de cotisations patronales de sécurité sociale. En contrepartie, elles sont soumises à une contribution patronale, qui dépend d’un régime spécifique. Sur l’initiative du Sénat, le taux de cette contribution a été porté de 20 % à 30 % par la LFSS pour 2025, ce qui a dégagé un gain de 500 millions d’euros.
Pour ce qui concerne les salariés – ce sur quoi porte votre amendement –, ces attributions ne sont soumises à la CSG et à la CRDS que sur les gains d’acquisition au-delà de 300 000 euros. En outre, les salariés payent une contribution de 10 % au moment de la cession sur la fraction de la plus-value d’acquisition.
Je trouve votre amendement intéressant, mais, parmi vos propositions pour dégager des recettes nouvelles, je lui préfère l’amendement n° 1678.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Cet amendement répond à l’objectif de trouver des recettes. En effet, s’il est bon de faire des économies, il est intéressant de débattre de telles pistes, en se demandant si elles sont bien ajustées.
Le fait d’attribuer des rémunérations élevées et d’instaurer des mécanismes dynamiques peut avoir des vertus. Par exemple, cela permet à des start-up de fidéliser leurs salariés. Le principe même d’attribution d’actions gratuites peut être sain dans l’optique de partager la valeur créée par une entreprise.
Aussi, avant d’instaurer une fiscalité lourde et directe sur ce type de rémunération, il me semble nécessaire de réfléchir plus avant aux modalités pour ce faire.
Mme Émilienne Poumirol. Il faut qu’on le retravaille !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Il convient en effet de poursuivre la réflexion.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. Victorin Lurel. C’est un amendement de bon sens !
Mme la présidente. L’amendement n° 1553 rectifié, présenté par MM. Mérillou, Ziane, Stanzione et Chaillou, Mmes Bélim et Monier, MM. Jomier, Temal et Roiron, Mme Harribey, M. Pla, Mme S. Robert, MM. Uzenat, Omar Oili et Michau et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II bis de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est ainsi rétabli :
« II bis. – S’ajoute à la contribution prévue au I, indépendamment de l’option exercée par l’employeur mentionnée au même I, une contribution additionnelle de 40 %, à la charge de l’employeur, sur les rentes excédant trois fois le plafond annuel défini à l’article L. 241-3 du présent code. »
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à majorer la contribution sur les retraites chapeaux et, ce faisant, à réintroduire un peu de justice dans notre système.
Alors que la retraite moyenne est de 1 500 euros, certaines rentes supplémentaires atteignent des montants indécents, tout en bénéficiant d’un traitement fiscal privilégié. Nous proposons une contribution additionnelle de 40 %, calibrée pour résister au contrôle constitutionnel, afin que ceux qui perçoivent des retraites très élevées contribuent à hauteur de leurs moyens.
Il convient de cesser de récompenser le caractère excessif de telles rémunérations. Il s’agit d’une mesure de responsabilité, d’équité et de cohérence. Il est absolument indispensable que ceux qui perçoivent les revenus les plus élevés soient davantage mis à contribution.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement, c’est bien normal, revient chaque année, et je remercie notre collègue de l’avoir présenté, dans l’optique de trouver de nouvelles recettes.
Il vise à renforcer la taxation des retraites chapeaux, en instaurant une contribution additionnelle de 40 %.
Je le rappelle, les retraites chapeaux sont des rentes viagères versées par les entreprises à certains salariés. Ce dispositif est actuellement exonéré de cotisations sociales et de la CSG.
Il est regrettable que le rendement de votre amendement ne soit pas chiffré.
Comme les années précédentes, la commission est opposée à un renforcement de la taxation des retraites chapeaux.
Bien que les sommes concernées soient importantes, je rappelle qu’en 2012, d’après l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale des affaires sociales (Igas), 84 % des 205 000 bénéficiaires d’une retraite chapeau percevaient une rente annuelle d’un montant inférieur à 5 000 euros. Il convient tout de même de le signaler.
Par ailleurs, l’objet suggère une probable inconstitutionnalité. En effet, il indique qu’en 2015, une contribution de 45 % avait été censurée par le Conseil constitutionnel, qui jugeait le taux trop élevé. On peut se demander si ramener ce taux à 40 % susciterait davantage d’indulgence de la part du Conseil constitutionnel.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Je partage les arguments de la rapporteure générale.
J’ajoute que la censure du Conseil constitutionnel se fondait non seulement sur l’aspect confiscatoire de la mesure, mais aussi sur le fait qu’elle risquait de provoquer des effets de seuil.
Nous pensons que la fixation d’un taux de 40 % crée un effet de seuil similaire, et émettons donc des doutes sur le caractère constitutionnel de cette disposition.
Compte tenu de cette incertitude juridique, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 1153 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 1670 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux quatrième, cinquième, huitième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le montant : « 24 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € ».
La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 1153.
M. Gérard Lahellec. Il s’agit là aussi d’un amendement visant à augmenter la taxation des retraites chapeaux des chefs de très grande entreprise, qui bénéficient d’une exonération de cotisations sociales et de CSG sur des rémunérations dispendieuses.
Cet amendement ne vise pas les 200 000 personnes qui percevaient en 2012 une retraite à prestations définies inférieure à 5 000 euros. J’apporte cette précision en écho à la remarque qui a été faite à l’instant. Nous ne ciblons que les 500 personnes qui perçoivent une pension annuelle supérieure au seuil de 300 000 euros et exonérée de cotisations.
À titre d’exemple, l’actuel président du conseil d’administration de L’Oréal pourrait prétendre à une retraite chapeau de 1,6 million d’euros par an, soit 88 fois la pension moyenne d’un Français ou d’une Française. Par conséquent, nous proposons de renforcer la taxation de ces retraites chapeaux, qui relèvent des articles 82 et 83 du code général des impôts.
S’il est vrai que le Conseil constitutionnel avait censuré, en 2012, une contribution établie à 21 %, il l’avait fait parce que s’appliquait alors l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Cette hypothèque ayant été levée par la suppression de l’ISF, nous pouvons trouver là une mesure de justice sociale et des recettes supplémentaires pour la sécurité sociale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1670.
Mme Annie Le Houerou. Nous voulons augmenter les recettes sans imposer les ménages aux revenus modestes, afin de rétablir l’équilibre du budget de la sécurité sociale et d’assurer des dépenses nouvelles pour les retraites, les hôpitaux, les Ehpad et les crèches. À cette fin, nous proposons d’intervenir sur les retraites chapeaux.
Environ 3 800 entreprises appliquent un tel dispositif, dont profitent plus de 200 000 salariés en France selon la Drees. Le rapport entre ces deux chiffres démontre que ce dispositif est principalement mobilisé par de grandes entreprises, ce qui crée un avantage comparatif par rapport au tissu français des TPE et PME.
Plus d’un bénéficiaire sur deux a plus de 70 ans, plus d’un tiers a plus de 80 ans, et ils disposent d’une rente moyenne de 5 900 euros par an. La moyenne serait donc de presque 500 euros par mois ; or deux tiers des rentes versées sont supérieures à 2 000 euros.
Lorsqu’il a quitté son poste de président d’Airbus en 2019, Tom Enders s’est vu attribuer une retraite chapeau annuelle d’un montant de 1,3 million d’euros. Dans son cas, cela s’ajoutait à des actions gratuites évaluées à l’époque à 7 millions d’euros, ainsi qu’à une indemnité de non-concurrence de 3,2 millions d’euros.
De même, en 2005, Pierre Richard, directeur général de Dexia, une banque en faillite, s’est vu attribuer 600 000 euros par an de retraite chapeau. Et je pourrais vous donner de nombreux autres exemples.
Il est évident que la limitation à 30 % de la rémunération annuelle n’est pas efficace pour lutter contre ces montants, qui bénéficient d’une fiscalité très avantageuse. En France, la somme totale des prestations de retraite chapeau s’élève à 700 millions d’euros pour l’année 2022.
Cet amendement vise donc à supprimer les avantages des retraites chapeaux pour les montants supérieurs à 10 000 euros annuels, et non plus 24 000 euros. C’est une mesure de justice.
Mme la présidente. L’amendement n° 929, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le huitième alinéa est ainsi modifié :
a) Le montant : « 600 € » est remplacé par le montant : « 1 000 € » ;
b) Le montant : « 24 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € » ;
2° Au neuvième alinéa, le montant : « 24 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je tiens tout de suite à préciser et le seuil et le taux que nous proposons.
Pour ce qui est du seuil, nous proposons 10 000 euros par mois : cela ne concerne donc pas ceux des 200 000 bénéficiaires qui perçoivent des retraites chapeaux dans la moyenne.
En ce qui concerne le taux, nous proposons d’instaurer une taxation à hauteur de 21 %, ce qui est tout simplement le taux normal du forfait social. Ce n’est donc en aucun cas confiscatoire, sauf à considérer que le forfait social l’est. Nous formulons donc une demande très modeste.
Je tiens à souligner qu’il s’agit d’une rente. Certes, les bénéficiaires sont issus de grandes entreprises, mais celles-ci doivent payer leur pension pendant tout le reste de leur vie. Une personne percevant un salaire annuel de 2 millions d’euros qui profiterait du dispositif représenterait, pour son entreprise, un engagement de 6 millions d’euros. Il faut que vous soyez sensibles à la charge que représente, pour les entreprises, un tel engagement ! Il est temps d’alléger ces charges…
Nous visons en particulier les PDG des plus grandes entreprises du CAC 40, qui gagnent 117 fois plus que le salaire moyen de leurs salariés. Il est grand temps de revenir à quelque chose de raisonnable : un taux de 21 % et un seuil de 10 000 euros mensuels.
J’évoque l’engagement de l’entreprise sur un ton légèrement humoristique, mais les sommes sont très importantes. Il s’agit non pas seulement d’une gratification versée lors du départ de la personne concernée, mais d’un engagement jusqu’à son décès, qui peut atteindre, dans l’exemple que j’ai pris, 6 millions d’euros, en se fondant sur une espérance de vie moyenne de vingt ans, ce qui n’est pas excessif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je suis d’accord avec vous, chers collègues, ces amendements-là sont plus raisonnables.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce n’est pas méchant !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ils visent à renforcer la taxation des retraites chapeaux, en abaissant le seuil de la tranche supérieure de la contribution du bénéficiaire de 24 000 à 10 000 euros par mois.
Pour mémoire, cette contribution comprend une tranche taxée à 7 %, une tranche taxée à 14 % et une tranche taxée à 21 %. Il est donc question d’appliquer la tranche à 21 % à partir de 10 000 euros par mois au lieu de 24 000 euros par mois. Les retraites chapeaux sont des rentes viagères versées par les entreprises à certains salariés. Ce dispositif est actuellement exonéré de cotisations sociales et de CSG.
En revanche, le rendement de cette mesure n’est pas chiffré.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce n’est pas moi qui fais tourner les modèles !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pour tout vous dire, parmi toutes les propositions que vous faites, qui ne me choquent pas particulièrement, nous avons été davantage convaincus par l’amendement n° 1678 de Mme Le Houerou. Celui-ci affichant un rendement chiffré, il est plus facile de le voter.
La commission émet donc un avis défavorable sur les deux amendements identiques et sur l’amendement n° 929.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Que l’on ne s’y méprenne pas, je ne voudrais pas passer pour un défenseur acharné des retraites chapeaux.
Il convient toutefois de préciser que, si l’expression comprend le mot « retraite », il s’agit non pas d’une retraite à proprement parler, mais d’un élément de rémunération que les conseils d’administration décident d’attribuer à leurs dirigeants. Ce ne sont pas les caisses de retraite qui payent les retraites chapeaux.
Mme Raymonde Poncet Monge. Alors, taxons-les !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Elles sont déjà taxées, et c’est bien le problème. Si ce n’était pas le cas, vos amendements seraient peut-être recevables aux yeux du Conseil constitutionnel, qui se prononce sur le caractère confiscatoire de la taxation.
En effet, les taxes s’additionnent. Premièrement, les bénéficiaires payent un impôt sur le revenu élevé, puisqu’ils se situent dans les tranches supérieures. Deuxièmement, ils font l’objet de prélèvements sociaux. Troisièmement, ils devraient s’acquitter de cette contribution salariale de 21 %.
Si nous additionnons ces trois niveaux de taxation, nous aboutissons à une imposition de 75,34 %. Je crains que ce chiffre puisse être considéré comme confiscatoire.
Mme Sophie Primas. Voilà !
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Aussi, le caractère constitutionnel de ces amendements me semble douteux.
Je le redis, je ne défends pas bec et ongles le concept de retraite chapeau, mais, en l’état, je me dois d’émettre un avis défavorable sur ces deux amendements identiques et sur l’amendement n° 929.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1153 et 1670.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 903, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 137-15 est ainsi modifié :
a) Au 3°, les mots : « indemnités de licenciement, de mise à la retraite ainsi que de départ volontaire versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi et des » sont supprimés ;