Mme Céline Brulin. La CSG n'est pas un impôt !

M. Olivier Henno. C'est la raison pour laquelle nous en sommes là. Aussi, nous voulons rompre avec cette pratique.

Nous devons d'abord réguler la dépense publique et faire des économies. Ensuite seulement, nous devons nous interroger sur la justice fiscale, un sujet qui est, je le répète, légitime. En revanche, si nous inversons l'ordre de nos préoccupations, nous retomberons dans les travers du passé, ceux qui ont mené le pays dans cette situation. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)

M. Patrick Kanner. C'est vraiment bien à droite !

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. D'où vient ce débat sur le rétablissement des comptes ? Qui est responsable de la dégradation des comptes du pays depuis maintenant huit ans ? Qui, madame la ministre ?

Mesdames, messieurs les sénateurs de la droite sénatoriale, c'est bien vous qui avez soutenu et validé les choix budgétaires de ces dernières années. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Quand on est responsable d'une dérive, d'un échec, on le reconnaît et, ensuite, on essaie de corriger le tir. C'est bien la moindre des choses. Et pourtant, vous vous obstinez ; vous vous acharnez encore et toujours sur les mêmes.

Vous nous donnez des leçons de cohérence, mais où est la cohérence quand, hier encore, vous prétendiez vouloir trouver des recettes supplémentaires tout en validant des options qui continuent à miter notre modèle de protection sociale avec des niches supplémentaires, encore et toujours, pour les plus aisés ? Vous poursuivez sur cette voie absolument mortifère.

Nous considérons, et nous allons même peut-être un peu plus loin que M. Lévrier, que c'est aux plus aisés de donner d'abord l'exemple avant de demander des efforts aux autres.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, le service public est le patrimoine des plus modestes. Ils souhaitent pouvoir vivre en bonne santé. Or, aujourd'hui, s'ils nous regardent, ils voient une droite sénatoriale qui cherche à fracturer le pays au lieu de le rassembler (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.), qui met à mal le consentement à l'impôt et la solidarité nationale. C'est très clair : vous rejetez ici le compromis auquel l'Assemblée nationale était parvenue. Après, vous voulez nous donner des leçons sur le sens des responsabilités et de l'équilibre. Comprenez que je m'interroge. (M. Laurent Somon proteste.)

Encore une fois, nos concitoyens, quelle que soit leur sensibilité politique, attendent de nous que nous fassions porter l'effort sur celles et ceux qui ont les moyens d'y contribuer. C'est le cas avec cette augmentation très modeste de la CSG sur le capital. Nous espérons que vous retrouverez la raison.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Ces discussions sont fort intéressantes, car nous nous rendons compte qu'il existe bien un débat de classes et un clivage droite-gauche. Martin Lévrier a fait des efforts depuis quelques semaines, et nous l'en remercions (M. Martin Lévrier s'esclaffe.). En tout cas, il y a un vrai débat.

Je suis contente, car nous avons parlé de la solidarité, qui est le principe central du système français de protection sociale. Pour nous, la CSG est moins efficace que les cotisations pour financer la sécurité sociale.

J'entends ce qui se dit, mais il y a tout de même 79 % des Français qui, aujourd'hui, demandent de la justice fiscale. Ce n'est pas rien. Par conséquent, quand nous vous proposons des mesures de justice fiscale, il me semble que nous sommes dans le vrai, dans le sens de ce que veulent les gens. Finalement, ils sont une minorité à ne pas vouloir de justice fiscale et sociale. Les gens du peuple, eux, ont bien compris qu'avec ce budget de la sécurité sociale ils allaient payer durement la note et que, comme d'habitude, les privilégiés de ce pays y échapperont.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. Madame la sénatrice, 82 % des Français ne veulent pas de hausses d'impôts et souhaitent une baisse des dépenses.

Mme Raymonde Poncet Monge. Les capitalistes !

M. Vincent Louault. C'est pourquoi il faut être ferme et continuer à avancer dans cette direction. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Par ailleurs, madame Lavarde, je comprends la logique de votre amendement, mais, d'un point de vue légistique, j'aimerais savoir si ce que nous voterons dans le cadre du PLF s'appliquera au PLFSS. Quelle est la règle ?

Mme Christine Lavarde. Il y a un transfert !

M. Vincent Louault. Très bien ! Dans ce cas, sachez que nous vous suivrons lors du PLF sur ce sujet technique très intéressant.

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

M. Laurent Somon. Je souhaite rebondir sur les propos de Mme Apourceau-Poly. Je suis d'accord avec elle, la CSG n'est pas la meilleure solution pour résoudre les problèmes de la sécurité sociale. Ce sont bien, comme vous l'avez dit, les cotisations sociales. Or celles-ci reposent essentiellement sur le travail : il faut donc favoriser les entreprises pour créer des emplois et être capable de prélever des cotisations sociales. (Protestations sur des travées des groupes GEST et SER.)

M. Grégory Blanc. Il faut revenir aux 39 heures…

M. Laurent Somon. J'ai aussi entendu dire que nous voulions développer des niches. Nous essayons surtout de développer nos entreprises pour qu'elles créent des emplois. Nous en reparlerons.

M. Guillaume Gontard. Si seulement cela marchait !

M. Laurent Somon. Encore une fois, essayons de soutenir nos entreprises et nos emplois.

M. Patrick Kanner. Là, ce sont les rentiers !

M. Grégory Blanc. Les entreprises ne paient pas la CSG !

M. Laurent Somon. Il y aura d'autres mesures dans le projet de loi de finances. Quand vous dites que les plus hauts revenus ne sont pas assez mis à contribution, je m'inscris en faux. Nous examinerons, dans le cadre du PLF, une mesure visant à pérenniser le dispositif de contribution des plus hauts revenus à la résorption du déficit national, qui concerne tant le budget général que celui de la sécurité sociale.

Ne dissocions pas systématiquement les deux textes. Ayons une vision globale et ne nous focalisons pas sur la CSG. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. Au premier semestre 2025, nous avons constaté quatre-vingts fermetures d'usines pour quarante-deux ouvertures. Sans revenir sur votre « plan de réindustrialisation », je veux simplement dire que, de mon point de vue, ce plan ne fonctionne pas bien... (Rires. – Mme Émilienne Poumirol applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vais répondre en priorité au président Raynal. En fait, nous voyons bien ce matin que le débat existe. Je suis la rapporteure générale de la commission des affaires sociales et je m'exprime donc au nom de la majorité sénatoriale, ne vous en déplaise.

M. Ouizille m'accuse de défendre le budget LR. Si j'étais caricaturale comme lui, je répondrais que je m'oppose à un budget PS, parce que c'est en réalité ce qui est ressorti de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme Laurence Rossignol. Pas exactement !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J'y insiste, si j'étais caricaturale, comme M. Ouizille l'a été.

M. Guillaume Gontard. Sauf que nous, nous n'avons pas besoin d'être caricaturaux.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si nous sortons des postures politiciennes, ce débat est beaucoup plus intéressant, car nous voyons ce que chacun pense de la réalité du financement de la sécurité sociale.

Nous avons eu l'occasion, avec Raymonde Poncet Monge, de travailler pendant de longues semaines sur les moyens de ramener la sécurité sociale à l'équilibre, en agissant sur les dépenses, sur les recettes et sur la quantité de travail.

Nous avons beaucoup réfléchi et nous avons présenté, dans notre rapport, une centaine de mesures chiffrées. C'est une première, qui doit permettre à tout un chacun de voir ce qu'il adviendrait si nous agissions sur telle recette, sur telle dépense ou si nous augmentions, par exemple, le nombre d'heures travaillées. Chacun est en mesure de choisir et c'est ce que nous nous efforçons de faire ce matin en essayant de trouver un chemin majoritaire.

De tout temps, nous avons fait le choix de ne pas soutenir cette proposition de hausse de la CSG. Aussi, la majorité sénatoriale n'est pas perdue ce matin, même si certains ont instillé du doute – n'est-ce pas, monsieur Lévrier ?

Je le comprends et je respecte la parole de Martin Lévrier comme je respecte la vôtre. C'est une possibilité qui est effectivement évoquée dans notre rapport de cet été. De la même façon, je respecte les propositions faites par nos collègues Christine Lavarde et Vincent Delahaye.

C'est vrai, un doute a été semé, mais c'est aussi toute la richesse de notre débat.

D'aucuns regrettent que la suppression de l'article nous empêche de discuter des amendements suivants. Comme je vous l'ai dit depuis le départ, cette sécurité sociale est si mal en point qu'il faudrait tout remettre à plat. Pouvons-nous le faire dans ce PLFSS d'une grande complexité, qui nous est parvenu si tard ? Très honnêtement, il me semble que c'était tout de même très compliqué cette année, encore plus que les précédentes.

Pour autant, nous étions tentés par l'amendement n° 1627 rectifié bis de notre collègue Christine Lavarde, parce qu'il remet de la justice entre les travailleurs, qu'ils soient transfrontaliers ou non. Si j'ai bien compris, tout le monde n'est pas traité aujourd'hui de la même façon et il s'agirait de rétablir une forme de justice.

La difficulté, c'est que le vote de cet amendement aggraverait encore le déficit du PLFSS de 17 milliards d'euros. L'image serait terrible, même si Mme Lavarde accompagne sa proposition d'une promesse de recette supplémentaire qui serait votée dans le cadre du PLF.

En tout cas, vous déciderez en votre âme et conscience, mes chers collègues.

Mme Laurence Rossignol. J'espère bien !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cependant, en tant que rapporteure générale, je ne peux évidemment pas soutenir une proposition qui dégrade encore le déficit de la sécurité sociale.

M. Patrick Kanner. Augmenter les recettes ! Un peu de cohérence !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ces chiffres étant posés, mes chers collègues, je vous laisse bien évidemment toute liberté de choix.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Pour ce qui concerne les amendements de suppression de l'augmentation du taux de CSG sur les revenus du capital, vous avez eu un débat assez complet sur lequel je ne reviendrai pas pour ne pas donner l'impression de tourner en rond.

Vous avez tous des visions très légitimes, avec des arguments pour et des arguments contre cette hausse. J'ai également entendu des questionnements sur la légitimité même de la CSG, mais ce débat est d'une nature quelque peu différente.

Je préfère revenir rapidement sur les amendements proposés par M. le sénateur Delahaye et Mme la sénatrice Lavarde.

Monsieur Delahaye, ce que vous proposez est au fond une bascule de financement, car votre amendement est également lié à une hausse de la TVA.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je préfère le préciser, sans quoi nous n'aurions pas une vision complète de votre proposition.

Honnêtement, c'est une proposition très intéressante. Aujourd'hui, vous l'avez dit, la majorité du financement qui n'est pas déjà fiscalisé via un transfert de l'État vers la sécurité sociale reste en grande partie constituée de cotisations. Or, M. Somon l'a dit, les cotisations salariales et patronales sont, encore aujourd'hui, trop lourdes. (Mme la rapporteure de la commission des affaires sociales acquiesce.) Elles découragent les entreprises d'investir, parce qu'elles grèvent leur compétitivité ; elles découragent les Français de travailler, parce qu'elles pèsent très lourd sur la feuille de paie.

Nous devons donc réfléchir à une bascule. Comment toutes les richesses, et non pas seulement le travail, peuvent-elles contribuer à nous protéger des différents risques sociaux ? De nombreux économistes proposent une telle bascule.

Pour ma part, j'y vois aussi un enjeu générationnel. Il y a aujourd'hui 30 millions d'actifs dans le pays, qui, à eux seuls, portent la solidarité nationale pour des politiques publiques qui s'appliquent aux 70 millions de Français. Ce n'est pas seulement un enjeu de génération ; il ne faut pas opposer les actifs et les retraités – le sujet n'est pas là.

La question est de savoir comment l'ensemble des richesses – revenus de remplacement, revenus du travail, revenus du capital – peut davantage contribuer, de sorte que les actifs, via les cotisations, ne soient plus les seuls à supporter le financement de la protection sociale.

Je tiens à rappeler également que les cotisations patronales en France représentent 10 points de PIB, contre 8 points en moyenne dans la zone euro et 6 ou 7 points en Allemagne. Cela pèse très lourd. Nous parlons toujours des cotisations sociales salariales, mais nous oublions souvent dans nos débats leur versant patronal.

Votre proposition a donc beaucoup de mérite. Je répète cependant qu'elle ne « tient debout », d'un point de vue budgétaire, que parce qu'elle s'accompagne d'un mouvement sur la TVA.

Nous aurons sûrement ce débat dans le cadre du projet de loi de finances. Avec mes équipes, nous avons de nombreuses propositions qui peuvent permettre de réformer la TVA sans nuire aux ménages modestes. Je serai ravie, le moment venu, de les préciser.

Le PLFSS 2026 n'est pas le bon véhicule législatif, mais le sujet sera certainement mis en avant lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2027. Les services de Bercy ont travaillé sur beaucoup de scénarios, à la demande, d'ailleurs, de nombreux parlementaires, pour éclairer les réflexions. Je le répète, je serai ravie d'y revenir.

Madame Lavarde, votre amendement m'inspire plusieurs réactions.

D'abord, je connais bien le sujet des frontaliers, car j'ai été ministre des affaires européennes, en charge des relations transfrontalières. C'est un sujet très complexe, qui concerne près d'un million de nos concitoyens et qui soulève des problèmes d'équité fiscale dans les territoires concernés. Il faut aborder ce débat avec beaucoup de rigueur, en gardant à l'esprit que les systèmes fiscaux européens créent beaucoup de difficultés dans tous les territoires transfrontaliers.

À mon sens, nous aurions beaucoup à gagner à ce que la Commission européenne nous aide à gérer ce sujet de manière beaucoup plus harmonisée, les négociations bilatérales étant extrêmement inflammables et plus ou moins couronnées de succès.

Il y a aussi des conséquences sur les collectivités locales, vous le savez, qui doivent porter, souvent seules, les coûts induits – garde d'enfants, logement, infrastructures, protection sociale des retraités, etc. –, sans avoir le bénéfice des financements. C'est donc un sujet très lourd qu'il faut regarder dans sa globalité.

Ensuite, vous proposez également une bascule. Pourquoi pas ? Simplement, il faut bien voir que cette proposition tend à fiscaliser davantage le financement de la sécurité sociale. Il y aurait donc un transfert supplémentaire de 17 milliards d'euros. Songez-y, madame Poncet Monge…

C'est donc un choix beaucoup plus politique et profond que la seule portée de votre amendement qui, sur le sujet des frontaliers, peut très bien s'entendre sous réserve de tous les ajustements qu'il requiert pour éviter les contentieux.

J'en reviens, et je terminerai sur ce point, aux propos du sénateur Delahaye : comment voulons-nous financer demain la protection sociale ? Si vous votiez l'amendement de Mme Lavarde, le résultat serait très simple : la sécurité sociale serait davantage financée par l'impôt sur le revenu que par les cotisations sur le travail et le capital, même assorties d'un taux homogène. Tout cela peut s'entendre et doit être porté au débat.

Je le dis souvent aux députés, il y a des choses que nous ferons en 2027 plutôt qu'en 2026. Sur le principe, rien ne s'oppose fondamentalement à la mise en œuvre d'une telle bascule. Ce sont cependant des choix très politiques qui doivent être discutés dans le cadre des grands débats qui précéderont l'élection présidentielle de 2027.

Je voulais simplement vous indiquer la position du Gouvernement sur les propositions que vous faites.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 523 rectifié bis, 595, 1093 rectifié bis et 1506 rectifié ter.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, de la commission des affaires sociales et, l'autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ? …

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 208
Contre 133

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l'article 6 bis est supprimé, et les amendements nos 1627 rectifié bis, 139 rectifié quater, 1645 rectifié et 1144, ainsi que les amendements identiques nos 1145, 1489 et 1644 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 6 bis (nouveau) (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026
Article 8 octies (nouveau)

Après l'article 6 bis (précédemment réservé)

M. le président. L'amendement n° 133 rectifié quinquies, présenté par M. Fargeot, Mme Vermeillet, MM. Maurey et Dhersin, Mme Perrot, MM. Chasseing, Houpert et Menonville, Mmes Patru et Housseau, M. Cambier, Mme Lermytte, M. A. Marc, Mme Jacquemet et MM. Bleunven et Levi, est ainsi libellé :

Après l'article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1°, le taux : « 6,2 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % » ;

2° Au 2°, le taux : « 8,3 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % ».

La parole est à M. Daniel Fargeot.

M. Daniel Fargeot. Il est indispensable que la réduction du déficit de la sécurité sociale passe par la maîtrise des dépenses, mais aussi par l'équité. Mme la rapporteure générale connaît mes convictions en la matière.

Par cet amendement, je souhaite mettre fin à une injustice majeure. La CSG a été créée par Michel Rocard en 1991 pour répartir justement la charge des dépenses sociales. Mais où est la juste répartition quand, en percevant 2 000 euros brut, un salarié cotise 180 euros et un demandeur d'emploi ou une personne en arrêt de travail 122 euros ? J'aimerais que l'on m'explique les raisons de ce déséquilibre.

Je vous propose de trouver de nouvelles recettes pour réduire le déficit, en fixant un même taux de CSG pour les revenus de remplacement et les revenus d'activité. Le taux de CSG applicable aux revenus de remplacement, actuellement de 6,20 %, s'élèverait à 9,20 %, soit un ajustement de trois points. C'est une mesure d'équité sociale et fiscale.

Dans notre situation budgétaire, nous ne pouvons pas accepter sérieusement que les revenus de remplacement contribuent moins aux dépenses sociales que les revenus du travail. Eh oui, mes chers collègues, la droite sociale parle aussi de solidarité !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à porter à 9,2 %, soit le taux applicable aux revenus d'activité, d'une part, le taux de CSG de droit commun applicable aux allocations chômage et aux indemnités journalières, qui est actuellement de 6,2 %, et, d'autre part, le taux de droit commun applicable aux pensions de retraite et d'invalidité, qui est actuellement de 8,3 %.

Précisons que le seul fait de porter de 8,3 % à 9,2 % le taux applicable aux pensions de retraite rapporterait 1,8 milliard d'euros. C'est une proposition qui mérite d'être versée au débat au même titre que d'autres.

Toutefois, la commission est convenue qu'il était inenvisageable d'alourdir excessivement les prélèvements obligatoires, en particulier par des hausses de taux.

L'avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. L'harmonisation proposée rapporterait 2,7 milliards d'euros. L'un des amendements devenus sans objet de par la suppression de l'article 6 bis aurait abouti à un résultat financier similaire, mais avec une tout autre cible.

Cet amendement-ci vise les retraités, qui bénéficient actuellement d'un taux maximal de CSG de 8,3 %, mais aussi l'ensemble des revenus de remplacement.

Concernant ces derniers, vous n'ignorez pas que le Gouvernement propose, dans le cadre du projet de loi de finances que vous aurez bientôt à examiner, d'améliorer l'équité fiscale, en particulier par une homogénéité accrue de la fiscalité applicable aux indemnités journalières. Aujourd'hui, la fiscalité diffère suivant que le bénéficiaire de ces indemnités est en simple arrêt maladie, pris en charge au titre de la branche AT-MP (accidents du travail et maladies professionnelles), ou encore atteint d'une affection de longue durée (ALD). Vous pouvez avoir la même maladie à un instant t, mais selon sa classification entre ces trois catégories, vos indemnités seront soumises à une fiscalité différente !

Le Gouvernement s'est donc concentré sur une recherche d'harmonisation fiscale, alors que vous proposez une harmonisation sociale. Nous n'avons pas fait ce choix, considérant que le gel des pensions et des prestations pour l'année 2026 constituait déjà un effort substantiel pour les ménages, notamment de retraités, qui seraient affectés par votre proposition.

Bien des propositions peuvent être discutées. Simplement, il faut que nous examinions l'impact cumulé des mesures adoptées sur tel ou tel ménage type. Au vu des choix du Gouvernement et de ceux que vous, parlementaires, avez faits jusqu'à présent, je ne peux donc qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Cela étant dit, ce que vous proposez, tout comme la proposition d'harmonisation que M. Delahaye a faite précédemment, peut tout à fait être inscrit au débat dans la perspective de l'élection présidentielle, car ce serait une vraie refonte du financement de la sécurité sociale. Seulement, cette discussion doit se tenir dans un cadre beaucoup plus global que celui que permet l'examen d'amendements. Ces 2,7 milliards d'euros supplémentaires seraient sans doute bienvenus pour nos finances sociales, mais ce serait un choc assez important pour notre pays et pour des ménages qui ne s'y attendent pas.

M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Mon cher collègue, pour reprendre votre terminologie, il ne serait vraiment pas convenable de ne pas taxer les revenus du capital à la même hauteur que les revenus du travail et les revenus de remplacement !

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le revenu de remplacement, par définition, vient remplacer le revenu du travail, mais il ne le fait pas intégralement.

Le problème est que l'on oublie l'histoire de la CSG. Celle-ci, quand elle porte sur les revenus d'activité, a remplacé des cotisations maladie et des cotisations chômage ; on a fait de ces prélèvements un impôt. On peut en penser ce qu'on veut, nous n'allons pas refaire aujourd'hui le débat sur le principe de la CSG, qui a au moins eu le mérite d'élargir l'assiette du prélèvement. Simplement, dans ces conditions, sur quel fondement les retraités pourraient-ils être soumis à la cotisation chômage ?

Le problème, c'est que, de réforme en réforme, on ne sait plus de quoi l'on parle. On ouvre tous les débats. Ainsi, Mme la ministre, qui a la chance de ne pas avoir un temps de parole limité à deux minutes, a ouvert le débat sur la TVA sociale. Mais celle-ci existe déjà ! La compensation par l'État des allégements de cotisation étant assurée par l'allocation à cette fin d'une fraction de la TVA, on a déjà la TVA sociale. Le problème est que la TVA est un impôt antiredistributif. Or, quand on est de gauche, on essaie d'éviter des mesures de ce type, parce qu'on est pour la réduction des inégalités. Cela justifiait d'ailleurs notre soutien à l'article 6 bis, qui tendait à réduire les inégalités de patrimoine.

M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour explication de vote.

M. Daniel Fargeot. Madame la ministre, je tiens à répondre aux arguments que vous avez opposés à mon amendement.

Celui-ci ne vise pas seulement les pensions de retraite ; tous les revenus de remplacement sont également concernés. Je ne comprends absolument pas l'absence actuelle de cohérence entre les taux de CSG de 6,2 % et de 9,2 %. Il me paraîtrait tout à fait naturel de les unifier.

Une personne indemnisée pour un accident du travail perçoit 100 % de son salaire ; en arrêt maladie, on n'en touche qu'une fraction, éventuellement augmentée par l'assurance complémentaire. Il serait bien naturel d'unifier les taux applicables à ces différentes situations ; ce serait une forme d'équité sociale.

Quant à l'équité fiscale, je suis assez d'accord avec vous. Seulement, je veux rappeler que, sur la CSG, 2,4 points sur les 9,2 points du taux ordinaire sont réintégrés dans l'assiette de l'impôt sur le revenu, ainsi que la CRDS, soit 0,5 point supplémentaire : pour 2,9 % du revenu, on paie de l'impôt sur l'impôt ! Je proposerai donc, lors de l'examen du PLF, que ces 2,9 points soient déductibles de l'impôt sur le revenu. J'espère que nous parviendrons ensuite à trouver un consensus pour l'unification des taux de CSG.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Mon cher collègue, je disais tout à l'heure que je ne vous comprenais pas, que je ne voyais pas quelle était votre ligne, votre cohérence. Maintenant, tout cela s'éclaircit !

Vous avez voté la suppression de l'article 6 bis, qui devait rapporter, si l'on peut dire, 2,6 milliards d'euros ; vous vous dites donc qu'il faut trouver l'argent ailleurs, et où allez-vous le chercher ? Vous voulez faire peser 3 points supplémentaires de CSG sur ceux qui sont en arrêt de travail, pour cause de maladie ou d'incapacité, comme si leur situation était facile à vivre. Pour vous, c'est cela l'équité sociale et fiscale !

Je comprends où vous voulez en venir, mais nous n'avons pas du tout la même vision de la société ni la même approche de la meilleure manière de préserver notre système social.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 133 rectifié quinquies.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1521, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L'article L. 135-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les recettes de l'assurance maladie sont par ailleurs constituées d'une fraction du produit de la contribution sociale mentionnée au I de l'article L. 136-7-1 à concurrence d'un montant correspondant à l'application d'un taux de 3 % à l'assiette de cette contribution. » ;

2° Au 3° du I de l'article L. 136-8, le taux : « 7,2 % » est remplacé par le taux : « 10,2 % ».

La parole est à Mme Anne Souyris.