M. le président. L'amendement n° 1448 rectifié, présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub et MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville, Kern, Longeot, Duffourg et Delahaye, est ainsi libellé :

Après l'article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Le titre IV du livre II du code de la sécurité́ sociale est ainsi modifié :

« TITRE IV

« RESSOURCES

« CHAPITRE UNIQUE

« Art. L. 240-1. – I. – La couverture de l'ensemble des dépenses afférentes aux prestations des branches famille et maladie mentionnées au titre III du présent livre est assurée par une micro-taxe sociale sur les mouvements des paiements scripturaux, collectée et perçue intégralement par les organismes mentionnés à l'article L. 225-1.

« II. – L'assiette de cette micro-taxe sociale inclut les paiements scripturaux et électroniques ;

« III. – Le taux de la micro-taxe sociale est fixé à 0,35 %. »

II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité́ sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à la micro-taxe sociale instituée par le présent article.

La parole est à Mme Nadia Sollogoub.

Mme Nadia Sollogoub. L'amendement n° 1448 rectifié va dans le sens des deux précédents. Il vise à créer une taxe de 0,35 % sur les paiements scripturaux.

Une telle mesure permettrait de supprimer les cotisations sociales, patronales et salariales administrées aux branches assurance maladie, accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) et famille.

Ainsi, les entreprises retrouveraient des marges de manœuvre pour offrir des évolutions salariales et mieux répondre aux enjeux de pouvoir d'achat.

Cette proposition vise également à permettre aux entreprises employeuses de main-d'œuvre de retrouver de la compétitivité, notamment face à leurs concurrents internationaux.

Michel Canévet insiste sur l'ensemble de ces éléments, y compris sur les évolutions technologiques évoquées précédemment, qui menacent l'emploi et nous obligent à réfléchir à une autre manière de financer notre protection sociale.

Il nous engage finalement à être audacieux pour sortir notre pays d'un système de charges salariales trop élevées, tout en nous donnant les moyens de conserver une protection sociale couvrant nos besoins, en particulier pour la branche famille qui nécessite, au vu de la natalité actuelle, des mesures nouvelles d'accompagnement qu'il faudra bien financer.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Notre collègue Michel Canévet pose les bonnes questions : comment financer la sécurité sociale ? Sommes-nous satisfaits du modèle actuel ?

Nous le disons tous : ce modèle est sans doute obsolète.

Cependant, devons-nous le réformer au détour d'un amendement ? Non, sans doute ! Cela impliquerait de supprimer tout ce que nous avons voté dans ce PLFSS et toutes les modifications à venir.

En effet, cette microtaxe rapporterait tout de même 400 milliards d'euros ! Nous ne serions donc plus en déficit : cela serait formidable. Cette proposition, plus qu'audacieuse, est finalement miraculeuse !

Cependant, Michel Canévet pose une question pertinente. Devons-nous encore faire reposer le financement de la sécurité sociale sur le travail ?

C'est un débat que nous devons inscrire à l'ordre du jour. Pour autant, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements : cela ne surprendra sans doute pas leur auteur, qui avait déjà proposé d'inscrire ce modèle de financement dans le PLFSS l'an dernier.

Par ailleurs, si nous mettions en place un tel système, nous signerions le retour de l'argent liquide ! En effet, que feraient les gens pour éviter cette microtaxe ? Ils paieraient en espèces ! Une telle mesure me paraît donc difficile à mettre en œuvre. Avis défavorable, donc.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je rejoins les propos de la rapporteure générale. Je remercie M. Canévet d'avoir déposé ces amendements, car ils contribuent à lancer le débat public. Les mois à venir seront marqués par l'approche d'échéances importantes. J'espère que le débat sur le financement de notre modèle de protection sociale y aura pleinement sa place.

Toutefois, j'émets un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ces amendements sont en effet prospectifs.

Cependant, le ministre du travail ne pourrait-il pas solliciter certains des nombreux hauts fonctionnaires de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) ou de l'inspection générale des finances (IGF) pour commencer à travailler sur cette question ?

C'est en effet un sujet de fond qui mérite que nous nous y consacrions à un moment plus propice que lors des débats sur le PLFSS !

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Posons-nous les bonnes questions ! Si celle-ci en est une, la réponse est assez effarante…

Je le rappelle une fois encore, les cotisations sociales sont du salaire ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Le jour où vous l'aurez compris…

Vous appelez à retirer des cotisations sociales. Mais les supprimer, en particulier les cotisations salariales, qui sont finalement du salaire socialisé, cela revient à réduire le salaire total !

Autrefois, vous appeliez à une telle mesure au nom du coût du travail – c'est une justification que je relativise, car on ne parle jamais du coût du capital. Vous nous avez rabâché cet argument, pour justifier l'exonération des employeurs de cotisations sociales patronales, à hauteur de 70 milliards d'euros. Ce montant est donc pris en charge par l'État, au nom de ce fameux coût du travail !

Et désormais, c'est un problème, car le rapport entre les exonérations de cotisations fiscales et le total des recettes des régimes ne peut excéder 14 %. C'est inscrit dans la loi de programmation des finances publiques de 2021.

Désormais, on s'attaque aux cotisations salariales, au nom, cette fois, du pouvoir d'achat ! Pourtant, les cotisations salariales financent la sécurité sociale, et sont donc bien une forme de salaire socialisé !

Je ne sais pas ce que vous déciderez, mais n'invoquez pas le pouvoir d'achat pour le justifier. Votre seul motif possible, c'est la déflation salariale : les employeurs ne veulent pas modifier le partage de la valeur ajoutée entre capital et travail. Alors, ce qu'ils réclament, c'est la suppression des cotisations.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Je dois reconnaître qu'il est surprenant de proposer, au détour d'un amendement, une révolution de notre système de protection sociale, qui date tout de même de 1945 et dont le principe est d'être essentiellement financé par les cotisations.

Ces cotisations étaient l'unique source de financement de la sécurité sociale dans les années qui ont suivi sa création. Aujourd'hui, elles n'en représentent qu'à peine un peu plus de la moitié. Cependant, dans son principe, notre système est financé par les cotisations salariales et patronales.

Certes, notre sécurité sociale est aujourd'hui en déficit et chacun cherche des solutions. Mais Raymonde Poncet Monge l'a rappelé, et la Cour des comptes le confirme : nos difficultés sont, pour beaucoup, liées aux niches sociales et aux exonérations qui ont été accordées, ainsi qu'au Ségur, qui n'a pas été financé correctement. Sans toutes ces exonérations, il serait facile de retrouver les milliards d'euros qui manquent à l'équilibre du budget ! (Mme Pascale Gruny s'exclame.)

Aussi, avant de provoquer une révolution des fondements mêmes de notre sécurité sociale, qui reposent sur les principes du Conseil national de la Résistance (CNR) de 1945, nous devons d'abord revoir ces exonérations et ces niches.

Nous devrions approfondir le travail qu'ont élaboré Élisabeth Doineau et Raymonde Poncet Monge pour recenser l'ensemble des solutions susceptibles de remettre le financement de la sécurité sociale sur les bons rails.

Madame la ministre, vous avez annoncé un travail allant dans ce sens. Des échéances importantes arrivent dans quinze mois. C'est le moment de se poser la question du financement de notre protection sociale.

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Je veux simplement apporter une précision.

Depuis hier, ma collègue Raymonde Poncet Monge nous explique que le salaire net social doit tenir compte de l'ensemble des cotisations.

Je suis en désaccord avec elle sur un point : parmi toutes les cotisations, qu'elles soient patronales ou salariales, ce sont celles finançant les retraites qui occupent la place la plus importante. Or celles-ci ne peuvent pas être comptées dans notre salaire ou dans notre propre retraite, puisqu'elles financent la pension des retraités actuels. Elles ne peuvent donc pas être considérées comme un salaire. (Mme Raymonde Poncet Monge le conteste.)

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Madame Poumirol, vous parlez de révolution, mais Michel Canévet est tout sauf révolutionnaire.

Mme Cathy Apourceau-Poly. C'est sûr ! (Sourires.)

Mme Nadia Sollogoub. L'objet de cet amendement n'est pas de faire la lutte des classes. Le fait est que nous sommes dans une situation difficile – tout le monde le constate. Les paramètres sociaux changent, avec la baisse de la natalité, le vieillissement de la population, la mécanisation. Il s'agit tout simplement de trouver une solution pour donner un avenir à notre système social. (Mme. Cathy Apourceau-Poly proteste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1462 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1447 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1448 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avançons actuellement à une vitesse moyenne de quinze amendements par heure, contre vingt et un amendements par heure l'an dernier. Si nous voulons tenir les délais impartis, nous devons accélérer un peu. Je laisse bien sûr chacun d'entre vous prendre la parole, mais il serait appréciable que vous veilliez à raccourcir la durée de vos interventions.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous devons avoir le débat !

Mme Frédérique Puissat. Merci, monsieur le président !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 923, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 7 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section… ainsi rédigée :

« Section…

« Contribution exceptionnelle sur les fonds de pension

« Art. L. … – Les entreprises proposant à la vente les plans d'épargne retraite mentionnés à l'article L. 224-8 du code monétaire et financier sont redevables d'une contribution exceptionnelle.

« Son taux est fixé à 10 %. Elle est assise sur l'ensemble des bénéfices réalisés en France par les entreprises mentionnées au premier alinéa ainsi que sur les bénéfices dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

« La contribution exceptionnelle sur les fonds de pension est affectée à la caisse mentionnée à l'article L. 222-1 du présent code. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, je vous remercie d'avoir fait ce rappel sur la durée des débats juste avant l'une de mes prises de parole...

Le présent amendement a pour objet la création d'une contribution exceptionnelle de 10 % sur les fonds de pension. Puisque tout le financement de notre système ne peut pas reposer sur le travail, nous proposons d'instaurer un prélèvement sur les fonds de pension, dont le produit serait affecté à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav).

À la fin de 2023, l'encours de l'épargne retraite est de presque 300 milliards d'euros, quand les « cotisations » qu'elle permet s'élèvent à près de 20 milliards. Malgré son faible poids par rapport au total de l'épargne financière, qu'il faudrait taxer d'ailleurs, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) lui a donné un essor.

L'épargne retraite continue de s'accroître, en dépit des vives critiques formulées par la Cour des comptes. Celle-ci souligne le coût élevé du dispositif pour les finances publiques : sans tenir compte de l'épargne retraite collective obligatoire, les déductions fiscales et sociales dont bénéficie l'épargne retraite sont estimées à plus de 1,8 milliard d'euros en 2022 – voilà une solution !

Ainsi, l'épargne retraite constitue une niche sociale et fiscale qui contribue à grever les comptes sociaux et les finances publiques, alors même que les fonds gérant les plans d'épargne retraite (PER) contribuent très peu au financement de l'économie, toujours selon la Cour des comptes – celle-ci n'est pourtant pas connue pour faire la lutte des classes. (Mme Cathy Apourceau-Poly approuve.)

Le présent amendement vise à corriger une telle distorsion, en instaurant une contribution de 10 % assise sur les bénéfices des entreprises proposant des plans d'épargne retraite.

M. le président. L'amendement n° 1148, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 7 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section… ainsi rédigée :

« Section …

« Contribution exceptionnelle sur les fonds de pension

« Art. L. … – Les entreprises proposant à la vente les plans d'épargne retraite mentionnés à l'article L. 224-8 du code monétaire et financier sont redevables d'une contribution exceptionnelle.

« Son taux est fixé à 5 %. Elle est assise sur l'ensemble des bénéfices réalisés en France par les entreprises mentionnées au premier alinéa ainsi que sur les bénéfices dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

« La contribution exceptionnelle sur les fonds de pension est affectée à la caisse mentionnée à l'article L. 222-1 du présent code. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Ce qui est intéressant, mes chers collègues, c'est qu'en voulant toujours faire payer les travailleuses et les travailleurs, vous reconnaissez que ce sont eux qui créent de la richesse.

Nous avançons que la richesse est aussi captée ailleurs, sans travail, en particulier par les rentes spéculatives. Tel est le cas des fonds de pension : ces placements produisent des rémunérations pour leurs détenteurs, mais aussi pour les sociétés qui les gèrent. Cet argent constitue une solution pour renflouer la Caisse nationale d'assurance vieillesse et mieux équilibrer notre régime de retraite.

Nous proposons donc de créer une contribution exceptionnelle sur les fonds de pension, qui permettrait de ne pas devoir mettre en œuvre un système de retraite par capitalisation, lequel nuirait à la solidarité nationale en individualisant encore davantage la retraite et en précarisant les retraités.

Nous ne voulons pas d'une France où celles et ceux qui ont subi l'existence d'un marché de l'emploi fragmenté, dégradé et dégradant, qui ont été mal payés, finissent leurs jours dans la misère tout en devant continuer de travailler, parce qu'ils n'ont rien pu capitaliser.

Vous allez dire à des personnes qui n'ont plus d'argent le 10 du mois qu'ils vont devoir capitaliser et mettre de côté pour leurs vieux jours ? Cela n'a pas de sens ! Une telle réforme reviendrait à détruire la sécurité sociale, qui continue de constituer l'un des ciments de notre République.

La contribution de 5 % sur les fonds de pension que nous proposons apporte une partie de la réponse à l'enjeu d'équilibrer le système sans pour autant réformer notre modèle de retraite. Une telle solution, audacieuse, est réellement miraculeuse, voire révolutionnaire. (Exclamations sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avec l'examen de ces amendements, nous commençons à aborder le sujet des retraites. Doit-il y avoir une part de capitalisation ? A priori, mes chers collègues, vous n'y êtes pas favorables, mais nous aurons l'occasion d'y revenir.

Pour les agents du secteur public, le PER Préfon-Retraite existe, et je n'ai pas le sentiment qu'ils s'en plaignent.

Mme Monique Lubin. Cela n'a rien à voir !

Mme Cathy Apourceau-Poly. Ce n'est pas cela qui les aide !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. À titre personnel, je trouve le système plutôt vertueux. Nous aurons ce débat plus tard, mais en attendant, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Le PER est très populaire : 11 millions de personnes en détiennent, pour un encours total de 119 milliards d'euros. La moitié des titulaires d'un PER sont imposables ; ils représentent 16 % des ménages. L'outil est donc très apprécié de nos concitoyens.

Pour les mêmes éléments que ceux que Mme la rapporteure générale a avancés, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le problème du système par capitalisation, c'est qu'il ne résout pas le rapport démographique : quel que soit le système de retraite, ce seront toujours les actifs qui paieront pour les pensionnés. La situation ne changera pas, quel que soit le système retenu.

Le problème, mes chers collègues, c'est qu'alors que vous ne voulez pas augmenter les cotisations retraite – effectivement, c'est ce que je propose –, vous voulez laisser aux employeurs la possibilité de recourir à la capitalisation. Or il faut bien que ces sommes soient soumises à une cotisation : le grand problème, c'est qu'elles en sont aujourd'hui exonérées. L'État perd chaque année 2 milliards d'euros en raison de cette niche sociale !

Non seulement les retraites par capitalisation se superposent aux retraites par répartition, sous prétexte que celles-ci sont insuffisantes, mais l'État soutient ces fonds, au détriment du système par répartition. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée proteste.)

Mme Anne-Marie Nédélec. Cela n'est pas lié !

Mme Raymonde Poncet Monge. En effet, le marché de la retraite intéresse les marchés financiers. Mais la capitalisation fait perdre de l'argent à l'État et à la sécurité sociale – et cela coûte 2 milliards, lisez le rapport de la Cour des comptes !

Ne demandons pas à l'État et à la sécurité sociale de payer le coût de la capitalisation. Que ces sommes soient plutôt soumises à une juste contribution.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 923.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1148.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1025, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 7 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section… ainsi rédigée :

« Section…

« Contribution exceptionnelle sur les dividendes

« Art. L. 137-… – Est instituée une contribution exceptionnelle sur les dividendes définis aux articles L. 232-10 à L. 232-20 du code de commerce.

« Son taux est fixé à 10 %. Elle est assise sur l'ensemble des bénéfices réalisés en France par les entreprises mentionnées au premier alinéa ainsi que sur les bénéfices dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

« La contribution exceptionnelle sur les dividendes est affectée à la caisse mentionnée à l'article L. 222-1 du présent code. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Tout ne peut pas reposer sur le salaire : pour préserver le pouvoir d'achat, il faut trouver d'autres sources de cotisation.

En voici une : les entreprises du CAC40 ont réalisé près de 135 milliards d'euros de bénéfice, ce qui a permis la distribution de 72 milliards d'euros de dividendes et de 26 milliards d'euros en rachats d'action – je n'y reviens pas.

Dans le même temps, les comptes publics, grevés par une attrition des recettes, affichent un déficit public de 5,8 % du PIB ; mes chers collègues, vous connaissez déjà le montant du déficit des comptes sociaux.

Or le point est documenté : ce sont les baisses de prélèvements obligatoires des entreprises qui expliquent en partie l'augmentation du déficit. Selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la politique de l'offre en cours depuis 2017 a « conduit à une diminution de 2,5 points de PIB du niveau de prélèvement obligatoire ».

Cette baisse a principalement favorisé les entreprises puisque, en ce qui concerne les comptes sociaux, si la baisse des cotisations salariales, qui représente 0,6 point de PIB, a été compensée par une hausse parallèle de 0,9 point de la contribution sociale généralisée (CSG), rien n'a contrebalancé la baisse des cotisations patronales, pesant 1,1 point de PIB.

Par cette baisse des recettes, la France se distingue d'autres pays d'Europe où l'augmentation des dépenses à la suite de la crise du covid est compensée par une hausse des recettes – celle-là même, mes chers collègues, que vous vous refusez d'entreprendre.

Ainsi, dans un souci de correction de la trajectoire des recettes et d'équité dans l'effort de rétablissement des comptes publics, le présent amendement vise à instaurer une taxation des 100 milliards d'euros de dividendes distribués, dont le produit serait affecté à la branche vieillesse.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Défavorable.

Mme Raymonde Poncet Monge. Pour les riches !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1025.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1749 rectifié, présenté par Mmes Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 11 septies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé une cotisation sur les dividendes des établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ainsi que des établissements et services mentionnés au chapitre IV du titre II du livre III de la deuxième partie du code de la santé publique. Le taux de cette contribution est fixé à 15 %. Elle est reversée intégralement à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

La contribution est assise sur l'ensemble des dividendes réalisés dans les entreprises mentionnées au premier alinéa, réalisés en France ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions.

Un décret fixe la date et les modalités d'application du présent article.

La parole est à Mme Marion Canalès.

Mme Marion Canalès. Hier, la majorité sénatoriale a souhaité supprimer l'augmentation de 1,4 point de la CSG sur le capital proposée par l'Assemblée nationale, qui apportait pourtant 2,8 milliards d'euros de recettes.

Cet amendement a pour objet de proposer une recette qui soit, à la fois, juste socialement et efficace économiquement. Nous proposons d'instaurer une cotisation de 15 % sur les dividendes versés par les établissements privés à but lucratif qui accueillent les publics vulnérables dans notre pays – Ehpad, crèches, établissements d'accueil de personnes en situation de handicap.

Certains groupes surfinanciarisés, qui ont recours à des fonds de pension – je ne parle pas de tous les groupes privés – ont fait de la fragilité humaine un terrain de rentabilité. Leur demander une surcotisation semble d'autant moins hallucinant que ces établissements bénéficient de financements publics de la part de l'État comme des collectivités, ainsi que de financements des familles, qui contribuent à leur fonctionnement par les sommes – parfois plusieurs milliers d'euros par mois – qu'elles versent aux établissements pour l'accueil de leurs enfants ou de leurs personnes âgées.

Nous demandons à ces groupes de contribuer à la solidarité nationale, en prélevant 15 % des dividendes – du gras ! – qu'ils reversent à leurs actionnaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous le disons tous, les dérives doivent être dénoncées.

Toutefois, tous les établissements, et non pas les seuls établissements médicosociaux à but lucratif, peuvent connaître des dérives aboutissant à de possibles maltraitances. Il faut faire attention à ne pas stigmatiser un secteur.

Vous proposez de créer une nouvelle cotisation. Or la situation est actuellement très difficile pour tous les établissements médicosociaux. Faisons attention à ne pas les étrangler en créant de nouvelles taxes ! De nombreuses communes sont bien heureuses de disposer de tels établissements sur leur territoire.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, il faut en effet être attentif au risque de financiarisation des établissements médicosociaux.

Le Gouvernement a renforcé la transparence en la matière, en publiant un décret demandant aux Ehpad de tenir une comptabilité analytique, ce qui permet de mieux étudier leurs financements.

En outre, un décret du 8 septembre dernier impose aux crèches de transmettre aux caisses d'allocation familiales (CAF) tous leurs documents comptables, ce qui permettra d'être bien plus vigilants.

Le Gouvernement surveille la question, mais il émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Est-il besoin de rappeler le scandale d'Orpea, ou celui des crèches, dénoncés dans les livres de Victor Castanet ? Le constat est clair : nous ne disons pas que tous les établissements privés sont des fraudeurs, mais il y a tout de même une financiarisation extrême des Ehpad et des crèches.

Des fonds de pension étrangers financent ces groupes d'établissements d'accueil des personnes vulnérables, sans autre but que d'y trouver matière à rendement. Les premières phrases du rapport de l'Igas sur Orpea en témoignent, ces fonds de pension n'ont qu'un but lucratif et de rendement.

Ces scandales, nous les connaissons. Plusieurs travaux ont été réalisés depuis : le Sénat a notamment mené une mission d'information sur le contrôle des crèches et ses éventuelles défaillances, qui a conclu à la nécessité de renforcer ce contrôle. Nous avons en particulier recommandé de permettre à la Cour des comptes de vérifier plus facilement le financement de ces groupes bien souvent multisite, ce qui implique des procédures juridiques souvent très complexes. La Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) surveille du mieux qu'elle peut des groupes tels que La Maison bleue et People&Baby.

Nous proposons de taxer ceux qui font des profits sur les plus vulnérables, les enfants et les personnes âgées. Certes, madame la rapporteure générale, les maltraitances n'ont pas lieu dans les seuls établissements privés à but très lucratif, malheureusement. Mais certains groupes les érigent en système ! Cela mérite d'instaurer une cotisation sur les profits qu'ils réalisent au détriment de nos enfants et de nos personnes âgées.