Sommaire

Présidence de Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Modification de l'ordre du jour

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Défense

Organisation des travaux

Défense (suite)

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Défense (suite)

Article 68

PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli

vice-président

Mise au point au sujet de votes

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Médias, livre et industries culturelles

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public

Organisation des travaux

Médias, livre et industries culturelles (suite)

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (suite)

Après l'article 78

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert

vice-présidente

Mise au point au sujet d'un vote

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

Organisation des travaux

Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation (suite)

Engagements financiers de l'État

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

Organisation des travaux

Engagements financiers de l'État (suite)

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État(suite)

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux(suite)

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics(suite)

Remboursements et dégrèvements(suite)

engagements financiers de l'état

compte d'affectation spéciale : participations financières de l'état

compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics

remboursements et dégrèvements

Ordre du jour

Présidence de Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Modification de l'ordre du jour

Mme la présidente. Mes chers collègues, en raison de l'indisponibilité de M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de l'Europe, M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes, demande le retrait de l'ordre du jour du mardi 16 décembre du débat préalable au Conseil européen des 18 et 19 décembre.

Le ministre Benjamin Haddad sera auditionné par la commission des affaires européennes le mercredi 17 décembre à seize heures trente. Cette audition sera ouverte à l'ensemble des sénateurs.

Y a-t-il des observations ?

M. Rachid Temal. Oui, madame la présidente !

Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal.

M. Rachid Temal. Je comprends que les agendas des ministres soient chargés, mais une audition n'a tout de même pas la même valeur qu'un débat réunissant l'ensemble de notre assemblée en séance publique, quand bien même celui-ci n'a de débat que le nom – il ne donne d'ailleurs même pas lieu à un vote. La tenue d'un tel débat est le minimum syndical, si je puis dire !

Mme la présidente. Acte vous est donné de ces observations, mon cher collègue.

Y a-t-il d'autres observations ?…

Il en est ainsi décidé.

2

Après l'article 77 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Discussion générale (interruption de la discussion)

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport général n° 139, avis nos 140 à 145).

Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (suite)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Défense

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'examen du budget de la mission « Défense » revêt cette année un caractère particulier, en raison tant de l'ampleur de la hausse des crédits proposés que du contexte géopolitique et stratégique.

Non seulement la trajectoire de la loi du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (LPM) est respectée, mais l'effort initialement prévu, d'un montant de 3,2 milliards d'euros, est relevé de 3,5 milliards d'euros, ce qui porte les crédits à 57,1 milliards d'euros, soit une augmentation de 6,7 milliards d'euros.

Ce budget revêt un caractère particulier pour une autre raison encore. Je veux parler de la manière dont le Parlement est informé des éléments qui le constituent et invité à les examiner et à les voter.

Vous ne m'en voudrez donc pas, madame la ministre, que je vous fasse part de nos interrogations ou réserves quant à la méthode du Gouvernement et à la sincérité de ce budget, même si je vous donne acte que, sur sollicitation du président de la commission des finances et de son rapporteur général, que je remercie de leur soutien, nous avons reçu hier, mais hier seulement, des éléments de réponse indispensables à la bonne compréhension de cette « surmarche » de 3,5 milliards d'euros.

Je m'arrêterai sur quatre points de vigilance.

Premièrement, la majoration des crédits, que vous justifiez par la perspective d'un projet de loi d'actualisation de la LPM, est bienvenue. En examinant de plus près la note explicative que nous avons reçue hier, je constate que vous faites une masse globale de la marche initiale de 3,2 milliards d'euros et de la surmarche de 3,5 milliards d'euros.

Ces 6,7 milliards d'euros supplémentaires contribueront certes à accélérer l'effort de réarmement et à amorcer une évolution de la programmation, mais ils permettront surtout de corriger ce que je nomme la faute originelle de la LPM, laquelle prévoyait en effet des financements insuffisants au regard des ambitions affichées. Démonstration est faite que les alertes émises depuis trois ans par le Sénat étaient justifiées.

Deuxièmement, la fin de gestion 2025 conditionne la bonne exécution du budget de l'année en cours et la sincérité des crédits prévus pour 2026. Or, entre les crédits gelés, dégelés, reportés ou annulés et les abondements finançant les surcoûts liés à notre présence militaire sur le flanc oriental ou à l'aide à l'Ukraine, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on n'y voit pas très clair. C'est tout de même près d'un milliard d'euros qui est en jeu !

Ce montant doit naturellement être considéré au regard du report de charges, qui est passé de 3,8 milliards d'euros fin 2022 à 8 milliards d'euros fin 2024, soit 24 % des crédits hors charges de personnel. Qu'en sera-t-il fin 2025 ? La perspective annoncée d'un report de charges de 8,6 milliards d'euros fin 2026, qui exploserait tous les compteurs, n'est pas pour nous rassurer. Une telle perspective interroge en effet la sincérité budgétaire, mais elle menace aussi la solidité de la base industrielle et technologique de défense (BITD), portant un coup rude au concept d'économie de guerre introduit dans la LPM.

On ne peut à la fois afficher des ambitions en loi de finances initiale et bricoler, comme ce fut le cas cette année, une fin de gestion reposant systématiquement sur le financement des surcoûts par des annulations de crédits d'autres programmes ou par des reports de charges sur l'année suivante.

Troisièmement, à l'opacité budgétaire s'ajoute une opacité relative à l'état réel de nos forces. Madame la ministre, à qui ferez-vous croire que nos adversaires attendent la présentation des indicateurs budgétaires de disponibilité des matériels et d'activités pour connaître la réalité de l'état de nos armées et leur degré de préparation ?

Vous ne pouvez pas demander au Parlement de vous allouer davantage de moyens, et, dans le même temps, restreindre son information. Le fait que, avec d'autres collègues, j'ai personnellement accès à un certain nombre d'informations ne peut être considéré comme une réponse satisfaisante, puisque nous ne pouvons pas faire état desdites informations publiquement.

Plus le budget augmente, plus l'information du Parlement doit être complète et sincère. Vous ne pouvez pas, au moment où vous demandez aux Français de faire des efforts et où vous souhaitez les sensibiliser à l'état des menaces – en témoignent les déclarations du chef d'état-major des armées devant les maires de France ou encore le kit de survie –, cacher le degré de préparation au combat, sauf à accréditer la thèse selon laquelle ces indicateurs seraient mauvais.

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Quatrièmement, je ne trouve nulle trace, ni dans les présents crédits ni dans la note qui nous a été transmise hier, du service national volontaire, qui a fait l'objet d'une annonce récente du Président de la République. Quelle en est la traduction concrète dans le budget 2026 en termes d'infrastructures, d'encadrement ou de frais de fonctionnement, madame la ministre ?

En conclusion, madame la ministre, compte tenu de l'accentuation de la menace, nous adhérons à l'augmentation des crédits de la défense. Mais une augmentation ne fait pas une politique ! De ce point de vue, la réponse à la question que, avec votre prédécesseur devenu Premier ministre, vous avez posée hier aux députés – « Approuvez-vous le principe d'une augmentation du budget de la défense pour soutenir une montée en puissance plus rapide de nos forces armées dès 2026 ? » – ne saurait constituer un blanc-seing.

Pour être approuvé par le Parlement et compris par la population, l'effort de défense doit s'accompagner d'une véritable communication sur l'état des forces, notre capacité à les mobiliser et les objectifs quantitatifs et qualitatifs à atteindre.

Le Parlement est dans son rôle quand il contrôle l'action du Gouvernement : la défense n'échappe pas à ce principe constitutionnel et démocratique.

Présenter la menace sans la confronter à nos capacités de riposte, c'est prendre le risque de fonder l'effort demandé non pas sur l'adhésion raisonnée, qui serait de nature à rassembler la Nation autour de sa défense et de sa souveraineté, mais sur la peur, qui est bien souvent mauvaise conseillère.

En donnant un avis favorable au vote des crédits de la présente mission, nous faisons plus que souhaiter que vous déposiez au plus vite, devant le Parlement, une actualisation de la LPM, laquelle nous permettra de tracer une perspective crédible pour nos armées et de lever les non-dits de ce budget ; nous vous le demandons solennellement ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. Pascal Allizard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », qui rassemble les moyens dédiés au renseignement, à la prospective et à l'innovation de défense, connaîtra une hausse substantielle de ses crédits en 2026. Quelque 2,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,3 milliards d'euros en crédits de paiement sont en effet prévu, en hausse respectivement de 27 % et 10,5 %.

Les moyens consacrés à l'innovation atteindront 1,4 milliard d'euros, soit une augmentation de 127 millions d'euros par rapport à 2025. Cette progression permettra d'investir dans des domaines clefs – quantique, intelligence artificielle, hypersonique, robotique, spatial – et de financer des démonstrateurs aussi majeurs que le drone sous-marin océanique, les armes à énergie dirigée, ou encore l'avion spatial Vortex.

Au-delà de ces projets d'innovation planifiée, le retour d'expérience ukrainien nous a enseigné que l'innovation devait aussi plus que jamais s'inscrire dans le temps court. Cela suppose une subsidiarité accrue des crédits au profit des forces, une simplification du code de la commande publique, une adaptation du régime de responsabilité pénale des acheteurs publics et le recours aux architectures ouvertes pour intégrer rapidement de nouvelles technologies. Nous souhaitons que ces points figurent dans la prochaine actualisation de la LPM.

Les crédits du programme 144 visent également à soutenir une BITD innovante et résiliente. Or, en dépit de la LPM, les PME, qui portent souvent les innovations de rupture, demeurent sous-représentées dans les études menées en amont.

Nos alertes successives relatives à la frilosité des investisseurs privés commencent à produire des effets. Ces avancées au plan national contrastent toutefois avec la doctrine trop restrictive de la Banque européenne d'investissement (BEI), qui continue de refuser tout financement aux entreprises produisant armes et munitions. Il convient de lever rapidement ce frein, madame la ministre, car cela envoie un mauvais signal aux investisseurs.

Enfin, au-delà des questions de financement, il semblerait que les entreprises de la BITD se voient opposer des refus d'assurance de plus en plus nombreux. Il nous faudra suivre l'évolution de cet inquiétant phénomène avec une grande vigilance.

Pour conclure, les crédits du programme 144 nous paraissent à la hauteur des enjeux. Nous estimons en effet qu'ils donneront à nos forces armées les moyens d'anticiper, d'innover et de se préparer au durcissement du contexte stratégique mondial. Nous appelons donc à l'adoption de ces crédits. (M. Bruno Rojouan applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Au bénéfice des observations que je ferai sur le volet renseignement du programme 144, je souscris à l'avis favorable que mon collègue Pascal Allizard, que je remercie, vient d'émettre sur les crédits de la présente mission.

Les deux services que ce programme finance, la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD), relatent la permanence d'un haut niveau de conflictualité, du fait du durcissement des crises tous azimuts, de la réévaluation du risque de prolifération, mais aussi de la résurgence des foyers de menace terroriste.

Ces axes d'effort du renseignement confirment les constats déjà établis par la délégation parlementaire au renseignement, dont j'ai l'honneur d'être membre et qui est présidée par notre collègue Cédric Perrin, dans son rapport d'activité pour l'année 2023-2024. Nous y évoquions en effet les défis devant lesquels les leçons tirées des conflits au Sahel ou en Ukraine, les stratégies nucléaires agressives, le retour d'expérience des jeux Olympiques de Paris 2024, ou encore le développement des menaces hybrides placent le renseignement français.

Loin de renvoyer à une réalité lointaine et diffuse, les menaces hybrides sont bien concrètes, puisque chaque citoyen peut être atteint, dans son quotidien, par des manipulations de l'information ou pâtir de la paralysie d'entreprises ou de services publics, et ce sans aucune déclaration de guerre.

Sur le plan intérieur, la DRSD est chargée de la défense des emprises militaires et des entreprises stratégiques de notre industrie de défense. Il faut sensibiliser le tissu de sous-traitants de la BITD, notamment les TPE et PME au risque d'attaques cyber et de menaces hybrides, telles que les survols de drones et les sabotages que l'on observe en Pologne et dans les États baltes frontaliers de la Biélorussie et de la Russie.

Ce contexte explique que les crédits de paiement prévus pour 2026 augmentent de 13 %, pour s'établir à 579 millions d'euros, à raison de 549 millions d'euros pour la DGSE et de 30 millions d'euros pour la DRSD.

Au total, en incluant les crédits de personnel du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », ce sont près de 1,3 milliard d'euros qui seront consacrés à la DGSE et à la DRSD.

Une attention particulière doit être accordée à la fidélisation des membres civils de leur personnel, car ils ne bénéficient pas des mêmes garanties de carrière que les militaires.

Prévu par la loi de programmation militaire 2024-2030, cet effort en faveur du renseignement a été confirmé par la revue nationale stratégique 2025. En effet, préserver l'autonomie d'appréciation de notre pays et garantir sa souveraineté décisionnelle constitue un objectif stratégique. À l'heure où la stratégie nationale de sécurité américaine ne garantit plus ni le partage de renseignement ni même une vision commune du monde, c'est même une priorité.

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis. La France est maintenant le dernier pays de l'Union européenne à conserver une capacité autonome de renseignement. La crédibilité de notre dissuasion et la confiance que nous accordent nos partenaires et alliés dépendent de notre capacité à protéger cette exception française.

Mme la présidente. Il faut vraiment conclure !

Mme Gisèle Jourda, rapporteure pour avis. Au bénéfice de ces observations, je vous propose, mes chers collègues, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'adopter les crédits du programme 144 relatifs au renseignement. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Cédric Perrin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Olivier Cigolotti, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, depuis plusieurs années, la Nation consent des efforts considérables en faveur du renforcement de notre défense.

La progression des crédits de paiement du programme 178 « Préparation et emploi des forces », de près de 11 % en 2026 et de 50 % au cours des cinq dernières années, l'atteste.

Après des années durant lesquelles nous avons encaissé les dividendes de la paix, nous assistons donc à un vaste retour de balancier. Durant cette période rétrospectivement heureuse, nous avions, pour reprendre les mots de Raymond Aron, « oublié que l'histoire est tragique ».

Dans le contexte budgétaire actuel, cet effort doit être salué. La loi de programmation militaire a été complétée d'une surmarche de 3,5 milliards d'euros. Mme la ministre a par ailleurs annoncé que la LPM serait actualisée en début d'année 2026, ce qui, à la lumière des dernières déclarations américaines, mais aussi de l'agressivité russe, portée par un puissant courant impérialiste, se révèle de plus en plus nécessaire.

Les crédits alloués au programme 178 visent à relever ces défis. Hélas ! même avec plusieurs milliards d'euros, on ne saurait résoudre des années de sous-investissement d'un coup de baguette magique.

Les efforts consentis au profit du programme 178, cœur de la mission « Défense », si je puis dire, devront donc être menés avec constance. Il nous faut en effet créer les meilleures conditions d'entraînement des hommes et d'entretien des matériels afin de nous assurer que, le moment venu, nous serons prêts à mener des combats de haute intensité. De tels combats, que nous n'avons pas menés depuis des dizaines d'années, paraissent en effet redevenir la norme jusque sur notre continent.

Comme l'ont souligné les différents chefs d'état-major, les armées sont donc lancées dans une course contre la montre pour se tenir prêtes au choc. Elles ont ainsi mené une réflexion très structurée autour du maintien des équipements en condition opérationnelle, dont le coût représente un peu moins de la moitié des crédits du programme.

Le retour d'expérience du front ukrainien est en effet sans appel : la guerre moderne ressemble beaucoup à la guerre d'autrefois, mais elle est plus violente encore, avec des destructions de matériel et un champ de bataille dominé par des nuées de drones, où le moindre mouvement est immédiatement interprété à l'aide de l'intelligence artificielle. Telle est la nouvelle réalité.

Cette discussion budgétaire complexe ne doit pas nous faire perdre de vue l'essentiel : nous ne sommes pas les agresseurs, mais il nous faut honorer la promesse républicaine, la plus élémentaire depuis la bataille de Valmy, qu'est la défense de notre territoire et de nos intérêts stratégiques les plus vitaux.

Pour l'ensemble de ces raisons, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 178. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nicole Duranton applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Michelle Gréaume, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, au milieu de ce tourbillon guerrier, je tiens à rappeler qu'en dépit de la difficulté de cette mission, notre pays doit avant tout œuvrer à la paix et à la désescalade.

En tant que rapporteure pour avis, avec Olivier Cigolotti, des crédits du programme 178, je veux donc croire que les efforts budgétaires substantiels consentis en faveur des armées constituent moins une préparation à la guerre qu'une garantie de paix et de sécurité pour nos concitoyens sur notre territoire.

Les crédits destinés à la préparation opérationnelle des forces suivent en 2026 la trajectoire prévue par la LPM, ce qui doit permettre une montée en puissance progressive des forces terrestres, aériennes et navales. Nous devons à nos soldats les meilleures conditions possible, de sorte qu'ils soient en mesure de faire face le mieux possible aux défis de la haute intensité.

Des sujets d'inquiétude bien identifiés demeurent, en particulier la reconstitution des stocks de munitions nécessaires à l'entraînement. Comme l'a rappelé le chef d'état-major des armées devant notre commission, il faut en effet tirer à l'entraînement pour être prêt le jour du combat.

L'année 2026 devrait à ce titre se révéler riche d'enseignements, puisque l'exercice interarmées de très grande ampleur nommé Orion commencera en février. Cet exercice d'entraînement constituera également une démonstration de notre détermination face à nos grands compétiteurs, lesquels doivent parfaitement mesurer notre volonté de nous défendre contre toute attaque.

Les crédits du programme 178 sont également consacrés au bien-être des troupes et à la solidité de la préparation physique et morale des soldats.

Je tiens à ce titre à souligner la réorganisation du service de santé des armées (SSA), qui doit pivoter d'une logique de guerre lointaine, avec des pertes modérées, à une logique de guerre d'attrition, dont le front ukrainien offre, hélas ! chaque jour une illustration.

Souffrant d'un manque alarmant de médecins et d'infirmiers, le SSA est toutefois confronté aux mêmes défis que la médecine civile. En dépit des efforts engagés, la situation continue de se dégrader, puisque quelque 109 postes restent à pourvoir. Il faudra du temps pour revenir à un effectif satisfaisant, en ligne avec nos objectifs.

En tout état de cause, et même si j'estime qu'il nous faudra veiller avec une vigilance toute particulière à ce que ces crédits soient mis au service de la protection de la Nation, la commission a donc émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, les crédits inscrits au programme 212 « Soutien de la politique de la défense » pour le soutien aux armées, sur lesquels porte l'avis que Marie-Arlette Carlotti et moi avons élaboré, s'élèvent en 2026 à 25,8 milliards d'euros en autorisation d'engagement et à 25,6 milliards d'euros en crédits de paiement, respectivement en hausse de 4,6 % et de 3 %.

Ces crédits servent d'abord à assurer la remontée en puissance de notre format d'armée.

Je rappelle que les schémas d'emplois fortement négatifs appliqués entre 2021 et 2023 ont creusé, en trois ans, un écart de 6,3 unités entre les cibles de recrutement et les effectifs réels. En 2024 et en 2025, l'exécution des schémas d'emplois s'est améliorée, si bien que l'on peut accueillir avec une confiance raisonnable l'objectif de création de 834 équivalents temps plein (ETP) en 2026, objectif conforme à la trajectoire de la loi de programmation.

Je regrette toutefois qu'au regard de ce contexte la surmarche budgétaire de 3,5 milliards d'euros ne concerne pas le volet ressources humaines du budget des armées. Un des enjeux de l'actualisation de la loi de programmation sera – nous l'espérons – le desserrement de l'enveloppe des dépenses de titre 2, de manière à financer concomitamment une trajectoire réaliste et des mesures d'attractivité ambitieuses.

Sur ce dernier point, la politique du ministère a déjà porté des fruits. Le niveau de recrutement est correct et les indicateurs de fidélisation s'améliorent. Les réformes indemnitaires et indiciaires récentes n'y sont pas pour rien. La refonte de la grille des officiers, mise en paiement en 2026, en est le dernier volet, très attendu.

Ne tardons pas à effectuer une évaluation complète de ces réformes, car l'inflation et la progression du Smic pourraient rattraper les indices d'entrée de grille plus rapidement que prévu, et la fiscalisation de certaines primes limiter les ambitions de soutien au pouvoir d'achat.

Quant à l'intégration d'une partie des primes dans le calcul de la pension, promise par le plan « fidélisation 360 », elle est hélas ! encore reportée.

Les crédits alloués aux infrastructures dont dépendent les conditions de vie et de travail du personnel et des familles sont encore en augmentation, ce qui est nécessaire, car il s'agit de chantiers de longue haleine. Il nous faut poursuivre les efforts pour combler le décalage entre les moyens engagés et le ressenti des militaires sur le terrain.

Le nombre de logements domaniaux disponibles étant appelé à baisser en raison des chantiers de rénovation programmés, nous resterons attentifs aux conditions de logement et de relogement en 2026.

En tout état de cause, nous saluons l'amélioration du service rendu aux familles logées, ainsi que de l'accompagnement offert aux familles de militaires à l'occasion d'une mutation, de même que les efforts de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans les armées, qui ont fait l'objet d'un rapport d'inspection et d'un plan d'action ambitieux en 2024.

En conclusion, notre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de soutien aux armées du programme 212. (Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marie-Arlette Carlotti, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en cas d'affrontement majeur, nos 200 000 militaires ne pourront pas défendre le pays à eux seuls. Il faut de la masse combattante, disent les états-majors.

À la dégradation du contexte international s'ajoutent des problèmes démographiques, en particulier la baisse du nombre de naissances. Il nous faut donc réorganiser notre outil de défense pour nous orienter vers la construction d'une armée hybride : une armée de métier au statut conforté, des réservistes mieux intégrés et une cohésion nationale à renforcer.

Mon collègue Jean-Pierre Grand a rappelé les mesures de soutien aux militaires d'active qui, depuis quatre ans, ont été prises avec l'appui constant – je le souligne – de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.

J'insisterai pour ma part sur le nécessaire renforcement du lien armée-Nation.

Le premier instrument en est naturellement le renforcement de la réserve opérationnelle. La doctrine d'emploi des réservistes a été clarifiée, de sorte qu'ils sont désormais mieux intégrés à notre stratégie de défense. De meilleures pratiques de gestion ont de plus été mises en place.

En matière de recrutement, la tendance est encourageante, puisque les objectifs pour 2025 ont été dépassés dès le mois d'octobre et que les crédits destinés à la masse salariale des réservistes seront fortement revalorisés en 2026, pour atteindre 319 millions d'euros.

Afin de renforcer la résilience de la société, il convient également d'insuffler un esprit de défense à nos jeunes. L'année 2025 a vu la réforme de la Journée défense et citoyenneté (JDC), qui est devenue plus immersive, plus proche du quotidien des militaires et mieux orientée vers le recrutement potentiel.

Un lien numérique durable sera établi dès la JDC entre le ministère et la jeunesse ; il permettra, le moment venu, de solliciter les compétences nécessaires à la défense nationale.

Face à une menace potentielle, les armées ont besoin du soutien de la Nation. Il nous faut rompre avec l'idée que la guerre s'est éloignée et qu'elle ne nous concernerait plus. Nous devons parler aux Français de l'état du monde, des menaces hybrides, des risques dans l'espace et dans le cyberespace. Un grand débat national s'impose.

Dans les prochains mois, nos militaires engageront donc un débat avec la société civile. Entre une nécessaire mise en garde et des propos alarmistes, le chemin est toutefois étroit, si bien que la parole militaire doit être manipulée avec beaucoup de précautions.

Enfin, le Président de la République a proposé l'instauration d'un service militaire volontaire. Nombreux sont nos voisins qui ont tranché la question ou qui en débattent.

Le service militaire volontaire nous paraît souhaitable, dans la mesure où il contribuerait à renforcer le lien armée-Nation et offrirait aux jeunes citoyens l'opportunité de s'engager.

Afin d'éviter les écueils du service national universel (SNU), une telle initiative aurait toutefois dû être précédée d'une étude d'impact. En outre, cette annonce n'a pas été accompagnée de précisions quant aux modalités de financement de ce dispositif – je comprends que vos services estiment son coût à 116 millions d'euros, madame la ministre –, ce qui est très désagréable.

En tout état de cause, la préparation du prochain projet de loi de programmation militaire devra inclure le cadrage budgétaire précis de ce dispositif, ainsi que des éléments indiquant clairement son articulation. Nous allons donc y travailler.

Sachez toutefois que le financement du service militaire volontaire ne devra en aucun cas peser sur le soutien apporté aux militaires en activité ni sur l'amélioration des infrastructures des unités d'active.

La commission a néanmoins émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 212, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Cédric Perrin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le budget des armées que nous examinons aujourd'hui met en œuvre la LPM 2024-2030, avec les moyens supplémentaires qui découlent des fameuses marche et surmarche, pour un montant total de 6,7 milliards d'euros ; devraient progressivement s'y ajouter les 16 milliards d'euros empruntés par la France au titre du programme européen Safe (Security Action for Europe).

Cette hausse est d'autant plus attendue que la LPM avait été calculée au plus juste. Si, en ces temps de disette budgétaire, une telle augmentation peut paraître considérable, je rappelle toutefois que le budget de la défense de notre voisin allemand augmentera de près de 32 milliards d'euros en 2026, pour atteindre 108,2 milliards d'euros.

Cette disproportion croissante des moyens entre les deux rives du Rhin est particulièrement criante concernant l'équipement des forces. Alors que les crédits de paiement du programme 146 « Équipement des forces » devraient passer de 18,69 milliards à 22,88 milliards d'euros, en augmentation de 22,4 %, le budget d'équipement de l'armée allemande devrait atteindre l'an prochain 52 milliards d'euros, répartis entre 29 contrats d'achat d'équipement.

Pour réduire l'effet de cet écart de moyens, il serait bon de clarifier nos choix et ainsi de donner de la visibilité aux acteurs tant industriels que militaires, d'autant qu'il est évident que nous ne pourrons pas tout faire en même temps.

Nous savons que le moteur T-Rex du standard F5 du Rafale, le programme Stratus, le porte-avions de nouvelle génération, ainsi que le programme Frappe longue portée terrestre (FLP-T) nécessitent des investissements importants qui ne sont pas fléchés dans le projet de loi de finances pour 2026.

Par ailleurs, des acquisitions sont prévues, parmi lesquelles on trouve de nombreux objets structurants : une frégate de défense et d'intervention (FDI), deux avions Rafale, deux avions Saab GlobalEye suédois, quatre systèmes sol-air moyenne portée terrestre de nouvelle génération (SAMPT-NG), 350 véhicules blindés Serval, ainsi que de nombreux consommables – lots de bombes AASM (armement air-sol modulaire), missiles antichars, munitions téléopérées (MTO) et drones.

Toutefois, nous avons encore du mal à comprendre quels moyens sont affectés à tel ou tel programme d'armement, notamment concernant les crédits de marche et de surmarche. Cette inquiétude est partagée par plusieurs industriels que notre commission a auditionnés : ils ont été confrontés à des arrêts de paiement en début d'année 2025, à des reports de commandes, puis à l'allongement des délais de paiement.

Aujourd'hui, nombreux sont ceux qui constatent que le montant des crédits supplémentaires équivaut à celui des reports de charges, ce qui réduit à peu de chose les marges de manœuvre.

Dans ces conditions, madame la ministre, nous souhaiterions connaître les priorités du Gouvernement. Il nous semble en effet que la consultation des industriels sur l'actualisation de la LPM s'impose, alors même que les choix qui doivent être faits auront nécessairement des conséquences sur l'organisation de la BITD.

Une clarification des contrats permettrait aux industriels de s'engager plus sereinement, alors que certains d'entre eux sont actuellement obligés de financer sur leurs fonds propres le développement de nouveaux programmes, avec toute l'incertitude que cela représente en l'absence de commandes.

Madame la ministre, une large majorité vous a accordé sa confiance, hier, à l'Assemblée nationale, en apportant son soutien à la stratégie de défense nationale que vous avez présentée.

Si notre commission a adopté un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2026 du programme 146 et, plus largement, de la mission « Défense », nous considérons toutefois que des efforts doivent encore être accomplis en matière de prévisibilité, de dialogue et de priorisation. Nous espérons que les débats sur l'actualisation de LPM permettront d'avancer dans cette direction.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Hugues Saury, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir sur quelques-uns des grands programmes de ce budget.

Le lancement de la réalisation du standard F5 du Rafale est prévu en 2026, pour une date prévisionnelle de livraison du premier exemplaire en 2033. Il se pose toutefois un problème, que nous avions déjà relevé l'année dernière : la LPM ne prévoit pas de crédits pour le développement du nouveau moteur T-Rex de Safran. Si l'État a finalement contribué au financement des études en 2025, pour un peu plus de la moitié des sommes requises, le projet de loi de finances pour 2026 ne comporte pas, en l'état, de crédits à cette fin, alors que les besoins sont estimés à plusieurs dizaines de millions d'euros par le motoriste français. Un dialogue se poursuit avec l'industriel pour répartir la prise en charge de ce coût de sorte que les travaux puissent se poursuivre. Nous souhaitons vivement que ces échanges aboutissent et que nous avancions sur cet important dossier.

Le porte-avions nucléaire de nouvelle génération constitue un autre programme structurant. Le Gouvernement devrait décider, avant la fin de l'année, le lancement de sa construction, en notifiant aux industriels un premier marché portant sur l'ingénierie du bateau et la réalisation des chaudières nucléaires. Celui-ci laisserait ouvertes certaines options concernant les fonctionnalités, qui devraient être précisées dans un second marché attendu en 2028 ou 2029. Ce second marché permettrait, notamment, de doter le bâtiment d'un système de combat et d'équipements électroniques et numériques parmi les plus récents.

Nous devrons faire des choix stratégiques pour l'avenir ; il s'agit de maintenir certaines capacités, mais aussi de combler des manques devenus problématiques.

Citons à cet égard le programme Stratus, conduit par la France, le Royaume-Uni et l'Italie. La société industrielle a assuré une part importante du financement de celui-ci en 2025, et un dialogue est en cours avec la direction générale de l'armement (DGA) pour en déterminer l'équilibre économique. Ce programme est d'autant plus prioritaire qu'il constitue la pierre angulaire de la coopération en matière de défense entre la France et le Royaume-Uni, dans le cadre des accords de Lancaster House.

Citons également le système de combat aérien du futur (Scaf), qui n'a pas progressé comme il aurait fallu au cours de l'année 2025. Nous sommes en effet confrontés à un double blocage, industriel et politique, qui porte sur le rôle respectif des partenaires, mais aussi sur la possibilité d'exporter le futur avion. Nous verrons dans les prochaines semaines comment évoluera ce projet ; pour le prolonger, il faudra absolument que soient clarifiés de manière définitive les apports de chacun et la répartition des tâches. Une levée des obstacles politiques, pourtant identifiés comme des lignes rouges, est tout aussi indispensable.

Citons enfin la question des feux de profondeur. Une consultation est en cours pour développer une capacité souveraine ; un rendez-vous est prévu au printemps 2026 pour tester des démonstrateurs. Nous souhaitons que les tests du printemps prochain permettent d'établir clairement les performances et les coûts des différents systèmes qui auraient leurs partisans, afin qu'un choix éclairé soit réalisé.

Sous réserve de ces remarques, qui démontrent la persistance d'un certain flou, madame la ministre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 146 de la mission « Défense ».

Organisation des travaux

Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes et pour la bonne information de tous, je vous indique que dix-sept amendements sont à examiner sur cette mission.

La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures trente. Nous devrons donc terminer l'examen de cette mission à treize heures, afin de commencer celui de la mission « Médias, livre et industries culturelles » à quatorze heures trente.

Défense (suite)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Guillaume Gontard. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Gisèle Jourda applaudit également.)

M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, contrairement aux autres ministères, loin de gérer la pénurie, celui des armées présente un budget porté à plus de 57 milliards d'euros, en hausse de 13 %. En y adjoignant les pensions, c'est même une enveloppe de 66 milliards d'euros.

Le budget des armées est désormais supérieur au budget de l'éducation nationale. Le symbole est d'autant plus lourd que le Président de la République, pourtant le plus jeune de notre histoire, a comme aucun autre abandonné notre jeunesse.

Du tri infâme de Parcoursup à l'abandon à la dépression d'une entière classe d'âge pendant le confinement, en passant par la destruction méthodique du service civique, rien n'a été fait pour accompagner notre jeunesse, qui est la première victime de l'explosion des inégalités et la première inquiète face au monde bientôt invivable que nous lui laisserons – rien !

Pis encore, le seul avenir que dessine le Président de la République pour toute une génération, c'est l'injonction à la procréation pour produire des soldats : c'est la guerre, l'uniforme et la soumission à l'autorité !

Cette vision réactionnaire s'est traduite par la transformation du service national universel, dont personne ne voulait, en un service national volontaire, dont nous voyons encore mal l'utilité et l'articulation avec la réserve opérationnelle. Là-dessus, le chef d'état-major est venu jeter le trouble au sein de toute la Nation, en évoquant « la perte de nos enfants », dans un discours qu'un gradé de la Grande Muette ne devrait pas tenir en République. Que de maladresses !

Mais que l'on ne se méprenne pas : nous partageons sans réserve le constat alarmant dressé par le pouvoir exécutif et le commandement militaire.

Depuis 2022, les écologistes, quand bien même ils portent le pacifisme au cœur de leur histoire, n'ont eu de cesse d'affirmer qu'aucune paix ne pourra être atteinte dans un monde régi par le rapport de force entre les empires. Nous consentons à ce rapport de force pour préserver notre sécurité, nos valeurs et nos idéaux ; ce « nous » est naturellement un « nous » européen.

Notre soutien à l'Ukraine est et demeurera sans faille. Nous ne nous sommes pas opposés à la loi de programmation militaire ni à aucune de ses déclinaisons budgétaires.

Toutefois, si notre soutien ne peut pas être plus ferme, c'est bien de votre fait, madame la ministre. En effet, l'ambition du Gouvernement pour notre armée nous semble déraisonnable au regard de nos moyens ; son articulation européenne, insuffisante. Surtout, nous sommes de plus en plus consternés par votre facilité à décaisser des milliards d'euros pour nos armées en les retirant partout ailleurs, mais aussi à appeler à la mobilisation nationale, voire à invoquer l'économie de guerre, tout en refusant, avec un dogmatisme virant à l'absurde, de faire contribuer les plus aisés de nos compatriotes.

Cela est d'autant plus incompréhensible que nos milliardaires sont de plus en plus nombreux à aller se pavaner à la Maison-Blanche, qui n'est plus une alliée, ou à laisser libre cours, sur les antennes et les ondes en leur possession, au confusionnisme prorusse.

Cet élan patriotique auquel vous appelez le pays, les milliardaires ne peuvent pas et ne doivent pas l'ignorer. Ils doivent y consentir ou tomber les masques : contribuent-ils à la défense nationale, ou préparent-ils l'arrivée au pouvoir des marionnettes de Poutine que sont les élus du Rassemblement faussement national ? (M. Joshua Hochart s'exclame.)

Madame la ministre, sans cela, vous ne pourrez pas convaincre toutes les Françaises et tous les Français de l'urgence de la situation.

Vous ne pouvez pas demander au peuple de choisir entre la défense de nos derniers services publics et la réponse à une menace qui, aussi réelle soit-elle à nos yeux, est encore endiguée à 3 000 kilomètres d'ici, entre le Dniepr et le Donbass, par l'héroïsme ukrainien. C'est une faute devant l'histoire ! En 1914, l'Union sacrée a eu pour prix la création de l'impôt sur le revenu. Personne ne comprendrait que, face à une menace de même ampleur, notre réponse ne soit pas aussi ambitieuse.

Le temps me manque pour développer autant qu'il le mérite le dernier sujet que je veux aborder ; j'y reviendrai lundi prochain, lors du débat qui suivra la déclaration du Premier ministre sur la stratégie de défense nationale.

Au regard des menaces hybrides auxquelles l'Europe doit faire face, le fonctionnement ensiloté de notre cadre budgétaire et de nos politiques publiques est particulièrement handicapant. Pour reprendre l'image du psychologue Abraham Maslow, « il est tentant, si le seul outil dont vous disposez est un marteau, de tout considérer comme un clou ».

En aucune façon notre réponse ne peut être uniquement militaire. Notre dépendance aux hydrocarbures, à l'uranium, aux engrais azotés de l'ennemi risque de nous tuer aussi certainement que la seringue d'héroïne tuera le corps dans lequel elle est logée. Renforcer notre défense tout en sabrant les budgets de la transition énergétique et agricole et en restant inactifs face au démantèlement de notre appareil industriel est totalement vain.

Voilà quatre ans que nous interpellons inlassablement le Gouvernement à ce sujet ; encore une fois, madame la ministre, nous n'obtenons pas la moindre réponse de votre part, de sorte que nous serons obligés de nous abstenir sur les crédits de la mission « Défense », que nous ne pouvons dissocier du reste du budget. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avant d'aborder les crédits de la mission « Défense » pour 2026, je veux, tout simplement, saluer nos forces armées.

Les femmes et les hommes qui portent l'uniforme servent la France avec un courage, un sang-froid et une constance qui forcent le respect. Ils n'attendent aucunement des discours ; ils attendent que la Nation tienne ses engagements. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous voterons les crédits, en augmentation, de cette mission, car leur donner les moyens d'agir n'est pas une option, mais un devoir.

Cela dit, si notre soutien aux militaires est clair, notre inquiétude sur l'orientation de la politique extérieure l'est tout autant, madame la ministre. Depuis près de dix ans, la diplomatie française, réformée et même déconstruite par la Macronie, ne mène plus vraiment la danse ; elle suit le mouvement. Là où la France pesait, arbitrait et proposait, elle se contente désormais, trop souvent, d'accompagner la stratégie d'autres puissances ou de se faire le relais de la Commission européenne, qui ne devrait pas avoir voix au chapitre. Nous ne sommes plus acteurs de plein droit, mais spectateurs d'une diplomatie qui n'est pas la nôtre.

Cette évolution n'est pas neutre ; elle nous entraîne dans une posture de plus en plus va-t-en-guerre. Le candidat Macron disait en 2017, en s'adressant aux Français : « Mme Le Pen et ses amis seront réfugiés au château de Montretout, et ce sont vous et vos enfants qui iront faire la même guerre qui en a fait tomber tant et tant ». Aujourd'hui, c'est le même Président de la République qui laisse entendre qu'il faudra que nos enfants aillent sur le front. Sa logique d'alignement finit par supplanter celle de l'équilibre, qui a pourtant été la marque de notre pays.

Pendant que notre diplomatie s'efface, on nous explique qu'une défense européenne intégrée serait la panacée. Or, à force de vouloir mutualiser, harmoniser et fédéraliser, on finit par toucher à ce qui ne se partage pas : la décision d'engager nos forces, la maîtrise de nos moyens et la souveraineté de notre dissuasion nucléaire.

Le Rassemblement national n'est pas opposé à la coopération européenne, bien au contraire, mais nous refusons qu'elle se transforme en abandon silencieux de ce qui fait la singularité et la force de notre défense. La France ne peut pas déléguer la décision de la guerre et de la paix. Elle ne peut pas non plus laisser ses intérêts vitaux se dissoudre dans un compromis technocratique à vingt-sept.

Alors oui, nous voterons ce budget, parce qu'il soutient nos armées et leurs actions, mais nous resterons vigilants et même exigeants sur la trajectoire politique qui l'accompagne. En effet, au-delà des chiffres, nous restons attachés à une idée simple : les intérêts supérieurs de la Nation doivent prévaloir, toujours.

Mme la présidente. La parole est à M. André Guiol. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et SER.)

M. André Guiol. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la France navigue aujourd'hui dans une zone de grands fonds, dans une mer où les courants contraires se multiplient et où les vents sont capricieux. Lorsque la houle moutonne et que le vent adonne, on s'assure que le gouvernail répondra parfaitement.

Mes chers collègues, c'est avec le bon sens marin de l'anticipation que le groupe RDSE aborde l'examen des crédits de la mission « Défense ».

Le contexte stratégique actuel n'est plus celui d'un horizon lointain ; il est immédiat. L'invasion de l'Ukraine, la montée des tensions en Méditerranée, la prolifération des missiles hypersoniques, l'avènement des essais de drones et les attaques hybrides visant nos infrastructures font voler en éclats les certitudes qui ont accompagné l'après-guerre froide. La France doit décider si elle entend demeurer une puissance militaire crédible ou devenir une puissance spectatrice.

Le projet de loi de finances pour 2026 traduit clairement cette exigence. La hausse de crédits qui nous est proposée, d'un montant de 6,7 milliards d'euros, permet de maintenir un modèle militaire que la plupart de nos partenaires ne possèdent plus : une armée complète, capable d'opérer dans tous les champs et dans toute la gamme de conflits. La question est donc de savoir non pas si nous dépensons davantage, mais si nous dépensons assez pour conserver l'avantage.

Trois enjeux structurent ce débat.

Le premier est celui du temps. En effet, la conflictualité se durcit beaucoup plus vite que nos cycles capacitaires. Construire un sous-marin ou un système de défense aérienne, former un pilote ou constituer une réserve opérationnelle requiert des années. La menace, quant à elle, s'exprime en semaines ou en mois. Une hausse budgétaire sans accélération de son exécution ne change pas la réalité stratégique. Si nous voulons « gagner la guerre avant la guerre », il nous faut réduire les délais de décision, raccourcir les chaînes industrielles, accélérer l'instruction et améliorer encore la disponibilité des matériels.

Le deuxième enjeu est celui de la souveraineté technologique. L'Europe parle de défense commune, mais reste profondément fragmentée. Les programmes de coopération révèlent la coexistence d'intérêts divergents. L'Allemagne raisonne selon la doctrine d'une puissance industrielle terrestre ; la France, selon une tradition de projection et de dissuasion. Ce décalage n'est pas sans lien avec les retards du système de combat aérien du futur, le Scaf, ni avec l'incertitude qui entoure le projet du char européen.

Le problème n'est donc pas seulement technique, il est aussi stratégique : peut-on bâtir une souveraineté européenne lorsque les conceptions de l'usage de la force ne convergent pas ? La France ne peut renoncer ni à son autonomie ni à son industrie.

Le troisième enjeu est celui du format. Il importe non pas tant de savoir s'il nous faut un ou plusieurs porte-avions, mais de définir quels sont les risques et quelle est la stratégie. J'en profite pour rappeler que le coût de notre dette équivaut chaque année à celui de cinq porte-avions.

Dans un monde saturé de missiles hypersoniques et de brouillages électromagnétiques, la valeur d'un grand bâtiment ne réside pas seulement dans sa capacité à projeter une puissance autonome ; elle est aussi dans sa projection et dans son intégration dans un dispositif européen. Ces critères ne sont pas anecdotiques, mais conditionnent nos investissements, notre flotte d'escorte, nos infrastructures portuaires – on le constate, aujourd'hui, sur la base navale de Toulon – et, enfin, notre diplomatie de défense.

Dans cette perspective, le projet de loi de finances pour 2026 constitue un instrument essentiel et non un aboutissement. Les crédits annoncés permettront de consolider la dissuasion, d'améliorer la disponibilité des matériels et de renforcer les capacités aériennes, navales et terrestres. La responsabilité politique consiste, ici, à reconnaître que la sécurité va au-delà d'une simple traduction budgétaire.

Sans la protection militaire de nos territoires, sans la sécurité de l'espace, de nos mers et de nos réseaux numériques, ni l'éducation, ni la santé, ni la continuité économique ne peuvent être garanties.

Les membres du RDSE voteront les crédits de la mission « Défense », parce que l'abstention ou l'hésitation auraient un coût stratégique bien supérieur. Notre but n'est pas de préparer un conflit, mais d'empêcher son déclenchement. Là sera notre véritable victoire ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Cédric Perrin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Bonneau. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)

M. François Bonneau. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'examen du projet de loi de finances est certes un exercice complexe, cette année comme l'année dernière, mais les menaces qui s'accumulent envers la France et l'Europe sont beaucoup plus concrètes, et nous obligent à doter nos forces armées des moyens nécessaires pour protéger nos concitoyens.

Ce qui était encore un tabou il y a quelques années fait désormais l'objet d'une prise de conscience parfaite : la France doit être prête en cas de conflit armé. Ce conflit ne serait d'ailleurs que la continuité de la guerre informationnelle et cyber que mène le Kremlin, pour ne citer que lui, à notre encontre.

En regardant plus en détail ce que financent les programmes de la mission « Défense », nous ne pouvons que saluer la surmarche de 3,5 milliards d'euros qui se traduit dans ce projet de loi de finances. Elle vient renforcer nos besoins dans des domaines aussi cruciaux que nos stocks de munitions, nos capacités spatiales et de communication, la préparation opérationnelle des forces, mais aussi nos capacités en drones.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées avait appelé, dès 2021, au rattrapage du retard pris par la France en matière de drones. Ces conclusions, depuis lors vérifiées par les retours d'expérience de leur usage massif en Ukraine, doivent enfin être pleinement prises en compte.

Nous tenons aussi à souligner le manque de transparence autour des dépenses concrètes que permettra cette surmarche. En effet, nous ne parvenons pas à en connaître les contours. Ce manque de transparence se retrouve aussi sur la disponibilité des matériels et l'activité des forces.

Nous comprenons que toutes ces données ne puissent être rendues publiques. Néanmoins, des indicateurs nous permettant de les mesurer étaient présents jusqu'en 2023 dans la maquette de performance du programme 178 « Préparation et emploi des forces ». La suppression de ces indicateurs, qui nous permettaient d'évaluer concrètement l'efficacité de la dotation budgétaire que nous votons, est compréhensible, mais dommageable. Leur réapparition dans le prochain projet de loi de finances serait à étudier ; ainsi, le Parlement serait en mesure d'exercer pleinement sa mission de contrôle, surtout lorsqu'il vote des budgets en hausse.

Il faut aussi évoquer les reports de charges qui s'accumulent sur le budget du ministère des armées. À la fin de 2022, ils s'élevaient à 3,88 milliards d'euros ; à la fin de 2024, ils dépassaient les 8 milliards d'euros. Si cette hausse s'explique par l'inflation et le report de crédits, ou par son utilisation comme variable d'ajustement, il nous paraît important de lancer l'alerte sur ce sujet : en effet, cette dette pèse sur la soutenabilité des dépenses de la mission « Défense ». Les intérêts moratoires dus par le ministère des armées augmentent, imposant à notre BITD une prise de risque accrue pour innover, sans aucune garantie, à long ou court terme, de produire les matériels nécessaires, ce qui fragilise sa trésorerie.

Avant de conclure, je reviendrai sur deux sujets qui me semblent primordiaux.

En premier lieu, nous attendons l'actualisation de la loi de programmation militaire. Le texte voté en 2023 était déjà ambitieux, mais il convient désormais de revoir nos ambitions à la hausse. La dégradation continue des équilibres internationaux nous l'impose ; nous ne cesserons de le répéter : l'époque des dividendes de la paix est derrière nous, n'en déplaise à certains admirateurs du Kremlin, en France ou à l'étranger. Cette actualisation, nous l'attendions pour l'automne 2025 ; elle est repoussée au premier trimestre 2026. Nous ne pouvons qu'espérer qu'elle ne sera pas victime de l'instabilité chronique qui frappe le pays.

En second lieu, il est nécessaire d'avoir une vision prospective et stratégique pour nos équipements de demain. Nous devons investir dans les systèmes du futur et dans l'intelligence artificielle, tout en sortant d'une forme de conformisme qui nous conduit à renouveler des programmes dont l'intérêt est contestable. N'achetons pas sur étagère des matériels étrangers qui ne correspondraient pas à nos besoins ! Cette vision stratégique doit aussi nous inciter à arbitrer les questions de gouvernance des grands projets d'armement qui, pour l'instant, accumulent du retard.

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. François Bonneau. Face à l'ensemble de ces défis, pour reprendre les mots du général de Gaulle, « être inerte, c'est être battu ».

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand. (Mmes Marie-Arlette Carlotti et Gisèle Jourda applaudissent.)

M. Jean-Pierre Grand. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, un grand nombre de responsables politiques, de diplomates et de militaires nous alertent sur le retour de la force brute dans les relations internationales. Certains n'y voyaient qu'une hypothèse théorique, mais la réalité a balayé ces illusions. De l'Ukraine au Moyen-Orient, de la Méditerranée à l'Indo-Pacifique, nous assistons à une multiplication de signaux qui nous rappellent que la paix se maintient non pas par des déclarations, mais par la solidité de notre outil de défense.

La décision prise par les membres de l'Alliance atlantique, lors du sommet de La Haye, d'élever l'effort de défense à 3,5 % du PIB d'ici à 2035 n'est pas une posture politique, mais une nécessité. L'Europe est redevenue une zone dont la puissance militaire déterminera les grands équilibres du monde.

Le budget militaire de la France que nous examinons aujourd'hui y contribue par son changement de rythme et une hausse historique de ses crédits. Avec plus de 66 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de plus de 11 %, le budget militaire de notre Nation fait plus que respecter la trajectoire prévue : il l'accélère.

Cette accélération est rendue incontournable par l'intensité des conflits observés et par les ruptures technologiques, qui transforment les guerres et obligent notre défense à s'adapter. L'Europe est clairement menacée. Les multiples formes des agressions russes nous rappellent la permanence de cette menace. La France, seule puissance nucléaire de l'Union européenne, doit assumer son rôle particulier. Présente dans tous les milieux, qu'ils soient terrestre, maritime, aérien, spatial ou numérique, et sur tous les continents, la France dispose d'une particularité stratégique qui conforte sa singularité.

Nous avons donc le devoir de préparer nos forces, de moderniser nos capacités, d'assurer la protection de notre territoire, hexagonal et ultramarin, et de soutenir nos alliés.

Essentielle dans la prévention comme le règlement des conflits, notre diplomatie sera d'autant plus entendue et efficiente que nos forces militaires stratégiques seront redoutées.

C'est pourquoi je suis reconnaissant au chef d'état-major des armées (Cema) d'avoir réveillé les consciences populaires en s'adressant avec franchise à ceux qui les représentent le mieux aujourd'hui, les maires de France.

Le budget pour 2026 renforce nos équipements majeurs, soutient notre dissuasion et accélère des programmes que le conflit ukrainien a rendus essentiels, comme la production de munitions modernes et la généralisation des drones dans les unités.

Ce budget prend en considération les nouveaux champs de confrontation, que ce soit l'espace, le cyber, le renseignement ou les systèmes de commandement. Il consolide la montée en puissance de notre industrie de défense, sans laquelle tout effort militaire resterait théorique.

En outre, un outil de défense n'est rien sans les femmes et les hommes qui le servent. Pour la première fois depuis longtemps, les créations de postes prévues sont alignées sur ce qui a été programmé. Les mesures d'attractivité commencent à produire leurs effets. Les infrastructures d'hébergement et de soutien sont renforcées.

Il reste beaucoup à faire, notamment pour le logement ou l'accompagnement des familles, mais la direction prise est la bonne. Chaque soldat, marin ou aviateur doit se sentir soutenu et protégé par la Nation.

Une défense crédible repose aussi sur une société forte. La France n'est pas assez préservée de la montée des tentatives d'ingérence, de manipulation informationnelle ou d'opérations d'influence destinées à fracturer l'opinion ou à miner la confiance populaire dans nos institutions.

Le budget pour 2026 donne à nos services les moyens de mieux détecter et de combattre ces actions hostiles. Notre résilience dépend de la cohésion, de l'esprit civique, de la capacité de notre société à distinguer l'information fiable de la désinformation. Nous devons renforcer cette résistance intérieure et rester maîtres de nos choix.

L'augmentation du budget est salutaire, mais des interrogations subsistent, notamment sur la lisibilité de la surmarche ou sur la situation des reports de charges. Ce sont des questions légitimes, qui ne remettent toutefois pas en cause cette exigence fondamentale : le risque de guerre de haute intensité est bien là, et la France doit s'y adapter.

Ainsi, marqué par un effort important, le budget de la mission « Défense » est un investissement pour la France, pour notre sécurité et pour notre capacité à défendre nos intérêts économiques et nos valeurs universelles. Les dictateurs ont toujours théorisé leurs funestes projets : ne l'oublions pas, aujourd'hui moins que jamais.

Mes chers collègues, pour toutes ces raisons, et en particulier parce que ce budget renforce concrètement notre capacité à protéger la Nation, les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires voteront en faveur de l'adoption des crédits de la mission « Défense ». (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. Cédric Perrin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2026 restera dans les mémoires, à n'en pas douter, comme un exercice politique et institutionnel hors normes, mais notre pays y verra aussi un exercice de grammaire stratégique inédit, par lequel nous devons parvenir à faire concorder des temps budgétaire et militaire aujourd'hui largement désynchronisés.

En effet, c'est précisément au moment où nos finances sont au plus bas que nous devons fournir l'effort le plus résolu en matière de défense. C'est au moment où nous devons affronter les conséquences de décennies d'irresponsabilité budgétaire que la marche du monde nous astreint à restaurer des capacités militaires méthodiquement atrophiées au fil des ans.

La traduction financière de cette situation est abrupte : l'an prochain, les deux seuls postes de dépenses de l'État à connaître une hausse réellement significative seront la défense et le remboursement des intérêts de notre dette.

Naturellement, mon groupe et moi-même ne pouvons qu'être favorables à l'adoption des crédits supplémentaires proposés pour nos armées, tant ils sont nécessaires. Mais, dans le même temps, un tel niveau d'engagement de la Nation, dans un contexte budgétaire aussi dégradé, nous oblige : il doit plus que jamais nous conduire à démontrer à nos concitoyens le bien-fondé de chaque centime engagé.

À ce titre, je rappelle que les dépenses militaires sont parmi les dépenses publiques les plus performantes d'un point de vue économique.

En effet, investir un euro dans la défense, c'est gagner près de deux euros de PIB. C'est investir au profit de milliers d'entreprises, grandes ou petites, dont l'activité maille l'ensemble du territoire et fournit plus de 200 000 emplois. C'est investir dans le développement d'une recherche et dans le maintien de savoir-faire industriels qui irriguent tout notre tissu économique. En d'autres termes, investir dans la défense, c'est investir dans une croissance solide et de long terme.

Il s'agit, je l'affirme, d'une utilisation vertueuse des deniers publics, qui ne peut toutefois se suffire à elle-même. L'accès des entreprises de défense aux financements privés, en particulier bancaires, reste ainsi un sujet absolument central.

Mais, plus fondamentalement, il faut dire à nos concitoyens à quel point l'augmentation des crédits destinés à nos armées n'est pas un luxe, et encore moins une lubie. Au contraire, cela revient à regarder le monde tel qu'il est et, surtout, tel qu'il advient.

En effet, nul ne peut plus ignorer que notre monde bascule dans une nouvelle ère, marquée par le durcissement des confrontations et le recours désinhibé à la force. Sous l'effet conjugué des mutations économiques et technologiques, de l'effacement du réflexe multilatéral, des ambitions et des rivalités, les équilibres géopolitiques se redéfinissent avec une rapidité parfois déconcertante.

Dans ce contexte où logiques impériales et politiques de puissance façonnent de plus en plus l'ordre international, le premier défi qui se pose à la France et à ses partenaires européens réside, bien entendu, dans le retour de la guerre de haute intensité sur le continent et dans la poursuite de notre soutien à la résistance de l'Ukraine.

Depuis maintenant près de quatre ans, ce conflit a bouleversé toutes nos certitudes stratégiques et remis en cause tous les piliers de notre architecture de sécurité. Il a conduit la Russie à tester avec toujours plus de hardiesse nos réactions comme nos capacités, hier dans le cyberespace ou dans la sphère informationnelle, aujourd'hui avec le survol de nos espaces aériens par des avions militaires ou des drones, demain, peut-être, en se livrant à des provocations qui ne se limiteront plus aux seuls champs hybrides.

N'oublions pas, en effet, que la Russie a avant tout pour ambition de long terme de favoriser le retour aux sphères d'influence. Cette ambition repose sur le principe d'une vassalisation naturelle des faibles par les puissants. Inutile de préciser le rôle que Poutine et les siens attribuent à la Russie dans ce cadre, et celui qu'ils attribuent aux nations européennes…

Gardons à l'esprit que cette guerre a également servi de matrice au renforcement d'une alliance sino-russe qui, non contente de nous être ouvertement hostile, pourrait aboutir à une mise en concordance des appétits déclarés de Pékin en mer de Chine avec ceux de Moscou en Europe.

Or c'est précisément dans ce moment, sans doute le plus dangereux pour l'Europe depuis des décennies, que l'Alliance atlantique se fait la plus évanescente, entre menaces américaines de désengagement militaire et coups de boutoir politiques ou commerciaux portés aux pays du vieux continent. Nous ne pouvons fermer les yeux sur les nouvelles orientations politiques des États-Unis, exprimées avec brutalité dans leur stratégie nationale de sécurité parue il y a quelques jours.

Face à cet inquiétant tableau, nous n'avons d'autre choix que d'investir et d'innover pour nous tenir prêts à la guerre d'aujourd'hui, pour anticiper la guerre de demain. Ce qui se joue désormais, ce n'est pas simplement le rang de notre pays sur la scène internationale ou la défense d'intérêts plus ou moins lointains ; ce qui se joue aujourd'hui, c'est bien la sécurité des Français et la défense de notre liberté comme de notre souveraineté.

C'est pourquoi la trajectoire financière en nette hausse inscrite dans la dernière loi de programmation militaire était indispensable, même si – on ne peut que le constater aujourd'hui – elle demeure insuffisante.

En effet, lors de l'adoption de la LPM, puis lors de l'examen des projets de loi de finances qui ont suivi, nous avons été un certain nombre à expliquer que la programmation était insuffisamment dotée au regard des besoins qu'elle entendait satisfaire.

Je ne reviendrai pas sur les 13 milliards d'euros de crédits extrabudgétaires, qui sont en partie virtuels, comme nous le redoutions, mais l'exécution de la LPM a mis en exergue des limites qui vont au-delà de la chronique normale d'un début de programmation en croissance.

Entre le niveau réel de l'inflation, la charge croissante des restes à payer, le poids du lancement de grands programmes, ou encore les surcoûts imprévus de l'activité opérationnelle, d'importantes rigidités sont ainsi très vite apparues. Celles-ci se sont immédiatement traduites par une forte augmentation des reports de charge, une contrainte accrue sur les crédits consacrés à l'équipement des forces, et des commandes qui se sont fait désespérément attendre par nos industriels.

Les 6,7 milliards d'euros ajoutés au budget des armées l'an prochain permettront d'éloigner le risque de thrombose et de rétablir des marges de manœuvre qui apparaissaient de plus en plus minces : ils sont donc essentiels.

Mais un doute subsiste : s'agira-t-il, comme cela nous est présenté, d'un moyen d'accélérer et d'amplifier notre effort de réarmement, ou bien, plus modestement, de faire en sorte que la programmation budgétaire rattrape la programmation physique ?

Certes, ce projet de loi de finances permet des hausses de commandes. Elles sont réelles et importantes. Toutefois, il reste difficile de discerner les investissements qui relèvent de la trajectoire initiale de la LPM de ceux qui seront rendus possible l'année prochaine grâce à la surmarche budgétaire.

Or, madame la ministre, au vu des sommes engagées, une meilleure transparence est indispensable, autant pour accréditer la sincérité de la programmation que pour en renforcer l'acceptabilité.

En outre, malgré des déclarations au plus haut niveau concernant le nombre insuffisant de nos Rafales ou de nos frégates, je ne trouve pas, dans ce projet de loi de finances pour 2026, les premiers jalons vers l'élargissement du format de nos forces, dont nous savons qu'il demeure bien modeste au regard des enjeux.

Je salue cependant les efforts substantiels qui seront réalisés sur des segments dont les conflits récents ont montré le caractère fondamental : les drones, les munitions – notamment complexes et téléopérées –, la défense sol-air, ou encore les feux dans la profondeur.

À ce titre, l'augmentation, la diversification et la modernisation de nos capacités de frappe à distance sont effectivement d'une incontestable urgence. Mais permettez-moi de souligner que cette urgence ne doit pas nous conduire à la précipitation au moment de combler certains trous capacitaires, notamment concernant le remplacement du lance-roquettes unitaire. Dans ce domaine, suivons plutôt le sillon tracé par la LPM en cherchant une solution avant tout efficace et de préférence souveraine – comme le Sénat l'a demandé à plusieurs reprises.

Par ailleurs, l'indispensable « dronisation » de nos trois armées ne peut être dissociée de son corollaire défensif : je veux bien entendu parler de la lutte anti-drones, dont tout indique qu'elle doit devenir une priorité stratégique absolue. Ce domaine demeure néanmoins largement exploratoire ; les progrès à réaliser sont donc encore immenses. Ils ne sauraient se résumer à de simples slogans, annonçant par exemple la constitution de murs anti-drones qui n'ont absolument aucun sens…

Entendons-nous bien, la dimension européenne, puisque c'est bien d'elle qu'il s'agit, est fondamentale.

Dans son volet communautaire, qui ne cesse de s'étoffer, l'Europe doit bien sûr respecter scrupuleusement les souverainetés nationales, s'en tenir à un rôle de facilitatrice et ne pas chercher à exercer des compétences que les traités lui refusent explicitement.

En revanche, dans son volet intergouvernemental, elle peut nous permettre d'atteindre, dans certains segments, la masse, la cohérence ou la supériorité technologique indispensables pour l'emporter lors d'un affrontement majeur. Elle peut, au travers d'une préférence européenne qui reste à approfondir et à ancrer définitivement, nous permettre d'atteindre une autonomie stratégique toujours plus nécessaire.

Toutefois, la conduite de certains projets pour lesquels des sommes importantes sont mobilisées doit évoluer. Je pense bien sûr en premier lieu au système de combat aérien du futur (Scaf) et au système principal de combat terrestre (MGCS), qui sont aujourd'hui tombés dans l'ornière. Même si l'horizon de ces programmes devra, d'une manière ou d'une autre, être éclairci rapidement, ils illustrent en tout cas un impératif plus élevé, celui de repenser la méthode employée pour piloter les coopérations industrielles.

En tout état de cause, et en particulier depuis les récentes déclarations du Président de la République concernant le service national, les dotations de nos armées pour 2026 illustrent que la trajectoire financière de long terme devra être une nouvelle fois revue, puisque le service national volontaire reste à ce jour non financé. Au-delà des 6 milliards d'euros supplémentaires d'ores et déjà annoncés pour 2027, c'est donc bien une actualisation de la LPM qui devra être rapidement mise en chantier.

Il s'agit aussi d'être en cohérence avec le nouvel objectif fixé par l'Otan, celui de dépenses en matière de défense atteignant 3,5 % du PIB à l'horizon 2035. Naturellement, il s'agirait d'un nouvel effort absolument considérable. Je souhaiterais néanmoins le mettre en perspective avec les dépenses militaires réalisées durant une autre période particulièrement dangereuse pour notre continent, la guerre froide, au cours de laquelle les crédits ont globalement oscillé dans une fourchette allant de 3,5 % à 6 % du PIB.

Soulignons par ailleurs que les surcroîts d'investissements réalisés ou prévus par nombre d'autres nations, amies comme concurrentes, les placent à un niveau d'ambition comparable, voire supérieur à celui que nous évoquons.

Enfin, mes chers collègues, je ne saurais conclure mon propos sans évoquer les hommes et les femmes qui servent sous nos drapeaux, sans lesquels la puissance de nos armées se réduirait à une simple vue de l'esprit. En rejoignant nos forces, ils ont fait un choix grave, le plus noble qui soit. En conscience, ils ont accepté de risquer leur vie pour le service de la patrie.

À ceux de ses enfants qui se battent pour elle, la France se doit donc de toujours honorer sa promesse. Jamais elle ne tolérera une quelconque forme de légèreté vis-à-vis de leur engagement. Jamais elle ne pourra, comme le Kremlin le fait en Ukraine, considérer leur vie comme quantité négligeable ou réduire leur sacrifice à un simple instrument.

S'il doit demeurer indéfectible, le souci que nous avons de nos soldats ne peut nous conduire à ignorer ce qu'est la réalité de la guerre ou à blâmer ceux qui la connaissent et qui nous la rappellent.

Cette réalité, nous devons accepter que d'autres, demain, puissent chercher à nous l'imposer. Il faut donc nous y préparer, tant matériellement, en renforçant les moyens de nos armées, que moralement, en offrant à ceux qui le souhaitent – ils sont nombreux ! – un cadre adapté et pertinent pour s'engager et servir.

C'est ainsi que, dans le monde tel qu'il se dessine, nous demeurerons une puissance crédible et dissuasive, que nous demeurerons une nation libre et souveraine, que nous conjurerons le spectre de la guerre au lieu de le hâter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mmes Marie-Arlette Carlotti et Hélène Conway-Mouret applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton.

Mme Nicole Duranton. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes à un tournant de notre histoire : en témoignent la guerre en Ukraine, l'instabilité au Sahel, les conflits au Proche-Orient, la rivalité entre les grandes puissances, ou encore les actions de guerre hybride menées par la Russie sur notre propre continent, qui se traduisent par de la désinformation, des manipulations, des sabotages, ainsi que des survols de drones et des incursions aériennes.

Il nous faut regarder la réalité en face et réinvestir concrètement dans la défense de nos intérêts et la sécurité de notre pays.

Permettez-moi, avant d'aller plus loin, de saluer l'action remarquable de Sébastien Lecornu, alors ministre des armées, qui a su, avec détermination et clairvoyance, piloter ce réarmement historique. Sous son impulsion, la France a franchi un cap décisif : grâce à la mise en œuvre de la loi de programmation militaire, les crédits ont été préservés des coupes budgétaires et nos programmes d'armement ont été sécurisés. Les commandes atteignent des niveaux jamais égalés dans notre histoire récente. C'est le fruit d'un travail acharné et d'une vision stratégique assumée, travail poursuivi par notre nouvelle ministre des armées, Catherine Vautrin.

Il faut désormais un budget à la hauteur des enjeux qui nous attendent. Pendant des années, le budget de la défense était celui qui n'augmentait jamais.

Aujourd'hui, la menace est tout autour de nous : désinformation, cyberattaques, ingérences étrangères… Nous devons nous préparer pour y faire face : réarmer, produire nos munitions en masse, innover, former nos soldats, anticiper, renforcer la résilience de nos concitoyens et susciter, chez les plus jeunes, le patriotisme et l'esprit de défense !

C'est en ce sens que le Président de la République a annoncé, le 27 novembre dernier, le retour d'un service militaire volontaire, initiative que je salue vivement.

Le projet de loi de finances pour 2026 traduit très concrètement cette inflexion : la mission « Défense » voit ses crédits augmenter massivement, avec près de 7 milliards d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière.

Cette dynamique permet de tendre vers l'objectif fixé par le Président de la République : doubler le budget de la défense en une décennie. C'est un effort sans précédent depuis la fin de la guerre froide.

Comme l'ont rappelé les précédents orateurs, ce budget exceptionnel traduit des priorités claires.

La première, c'est l'équipement de nos forces. Nous allons enfin moderniser massivement notre armée de terre, avec des centaines de nouveaux blindés et des chars Leclerc rénovés, renforcer notre flotte aérienne avec de nouveaux Rafale et avions de transport, poursuivre la construction de nos sous-marins nucléaires et frégates. Les livraisons concrètes s'accélèrent, les commandes explosent. C'est un changement de rythme enfin perceptible, comme le soulignent nos rapporteurs.

La deuxième priorité, c'est la préparation opérationnelle de nos soldats. Nos forces doivent s'entraîner davantage, manœuvrer dans des conditions réalistes. Les crédits destinés à l'entraînement et à l'entretien des matériels progressent sensiblement. L'objectif est clair : passer d'une armée calibrée pour la paix à une armée préparée aux combats de haute intensité. Nos militaires doivent pouvoir compter sur du matériel disponible et des munitions en quantité suffisante. L'exercice Orion de 2026, le plus ambitieux depuis la fin de la guerre froide, témoignera de cette montée en puissance.

La troisième priorité, c'est l'innovation et le renseignement. Face aux drones, à l'intelligence artificielle, aux cyberattaques et aux menaces spatiales, nous devons investir massivement dans les technologies de rupture. Le budget de la recherche de défense bondit, permettant de financer des projets d'avenir : drones de combat, armes laser, satellites de surveillance, et bien d'autres capacités stratégiques. Parallèlement, nos services de renseignement voient leurs moyens considérablement renforcés pour faire face aux menaces hybrides et à la guerre économique et protéger notre industrie de défense.

La quatrième priorité, ce sont nos militaires et le lien avec la Nation. Recruter, fidéliser, former : voilà les maîtres mots. Les salaires et les primes augmentent, les conditions de vie s'améliorent, les logements sont rénovés, les familles de militaires sont mieux accompagnées lors des mutations. Surtout, nous reconstruisons une véritable armée de réserve : l'objectif est d'atteindre le ratio d'un réserviste pour deux militaires d'ici à 2035. C'est toute la Nation qui doit se préparer !

Cet effort budgétaire irrigue aussi directement notre tissu industriel. De la Bretagne à la Provence, de la Normandie au Grand Est, nos grandes entreprises et nos PME bénéficient de carnets de commandes pleins, et créent de ce fait des milliers d'emplois qualifiés dans nos territoires. C'est notre souveraineté industrielle et technologique que nous rebâtissons.

Le défi est certes colossal, mais il est à la hauteur d'une puissance militaire comme la nôtre.

Pour résumer, ces crédits de la mission « Défense » traduisent un effort budgétaire hors normes, à la hauteur des menaces auxquelles notre pays est confronté. Ce budget engage la France sur le temps long : il renforce nos capacités, soutient notre industrie, améliore la situation des personnels et permet de franchir une nouvelle étape dans les rapports entre la Nation et ses armées.

Notre responsabilité de législateur est triple : il importe à la fois de donner à nos armées les moyens dont elles ont besoin, de garantir la sécurité des Français, et de réaffirmer la place de la France parmi les grandes puissances militaires.

Comme l'a déclaré le chef d'état-major des armées, « il faut montrer que nous faisons cet effort, car si nous ne sommes pas capables de le faire maintenant, nous envoyons un nouveau signal de faiblesse. […] La détermination et la force morale de notre nation sont mises à l'épreuve. »

Dans cette perspective, les membres du groupe RDPI voteront en faveur de l'adoption des crédits de cette mission. Il y va de notre sécurité à tous ! Il y va de notre avenir et de celui de la France ! (M. François Patriat applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. André Guiol applaudit également.)

M. Rachid Temal. Mesdames les ministres, d'abord, permettez-moi de vous saluer au nom du Parlement, puisque c'est la première fois, ce matin au Sénat, que vous défendez le budget de vos ministères, l'Assemblée nationale vous ayant privé d'un premier examen de ces crédits… Soyez les bienvenues dans notre belle et bonne maison !

J'ai également une pensée pour les femmes et les hommes qui composent nos forces armées. Je rends hommage à leur engagement et à leur professionnalisme. Rappelons qu'ils protègent nos compatriotes, notre pays, nos valeurs, que ce soit dans l'Hexagone, dans les outre-mer, sous mandat tricolore, sous mandat de l'ONU, au titre de l'Union européenne ou dans la cadre de l'Otan – je pense à cet instant à la Roumanie, pays dans lequel nous sommes nation-cadre pour le compte de l'Alliance atlantique.

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le budget pour 2026 de la mission « Défense » est sans doute le premier d'un nouveau cycle. En effet, nous changeons de monde : nous connaissions autrefois les deux blocs, qui incarnaient une forme d'équilibre, puis est venue l'époque des dividendes de la paix, qui a désormais pris fin. Aujourd'hui, il faut le dire clairement et le garder à l'esprit : nous sommes à l'ère du retour des empires !

Dorénavant, la France et l'Europe sont seules. Elles doivent en prendre conscience et l'assumer. Elles doivent aussi agir en conséquence, sous peine de « sortir de l'histoire ». Tel est le défi auquel notre Nation est confrontée, mesdames les ministres.

L'année 2025 marque le début d'un cycle particulier. Permettez-moi de dresser un rapide bilan de cette année si particulière, à commencer par celui de la situation outre-Atlantique.

Je pense bien sûr à l'investiture du nouveau président des États-Unis d'Amérique, en janvier dernier.

Je pense aussi aux propos du vice-président américain, tenus dès le mois de février à Munich, lequel appelait non pas à détruire l'Europe, mais à changer les régimes européens, en faisant très clairement campagne pour des partis nationalistes, qu'ils agissent en France, en Allemagne, ou en Angleterre.

Enfin et surtout, je tiens à évoquer la nouvelle stratégie de sécurité nationale américaine, publiée il y a quelques jours : celle-ci reflète une nouvelle doctrine, très simple, qui consiste à réaffirmer un camp occidental, que les États-Unis veulent naturellement dominer de tous points de vue, notamment sur le plan civilisationnel, et dans lequel il faudrait réintégrer la Russie.

Comme je le disais, la France et l'Europe sont donc seules : on peut désormais imaginer que les États-Unis se retirent, totalement ou partiellement, ou à tout le moins que leur présence s'amoindrisse au sein de la défense européenne. Il faudra assumer cette nouvelle donne, à la fois financièrement et politiquement – j'y reviendrai tout à l'heure.

C'est aussi au cours de l'année 2025 que nous avons pu observer, encore une fois, le courage du président Zelensky, de ses forces armées et de son peuple, qui sont, je le souligne, attaqués pour la seconde fois par Vladimir Poutine. À toutes celles et tous ceux qui s'interrogent sur les raisons qui justifient que l'on poursuive le combat, je répondrai que c'est parce que le président russe ne cesse, depuis 1999 et son arrivée au pouvoir, d'attaquer les pays voisins de la Russie.

N'oublions pas non plus le chantage exercé par les Américains ces derniers mois : les États-Unis ont privé l'Ukraine d'armes et bloqué ses capacités de communication et d'information, ce qui l'a rendue aveugle aux attaques de drones ou de missiles. C'est aussi cela, la réalité de la politique américaine aujourd'hui !

Il ne serait pas inutile, mesdames les ministres, que nous rediscutions de l'accord de sécurité entre la France et l'Ukraine, enjeu central d'une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat et d'un vote, qui a eu lieu dans cet hémicycle il y a quelques mois. Si nous avons approuvé cette déclaration en grande pompe, nous n'avons plus eu de nouvelle de l'accord depuis lors. Il conviendrait de remettre ce sujet sur la table.

Il serait également important, comme l'a dit le rapporteur spécial, de reparler des moyens que nous consacrerons au soutien à l'Ukraine l'an prochain. En effet, d'après tous les spécialistes, la Russie sortira renforcée de ce conflit. Or elle sera toujours proche de nous, elle se situera toujours en Europe. Nous devons donc nous poser les bonnes questions. Il s'agit non pas de pactiser avec Poutine, mais d'envisager notre avenir. Après tout, comme se plaisait à le dire Napoléon, « on a la politique de sa géographie » !

Évoquons aussi la question chinoise. Le dernier voyage du Président de la République l'a bien montré : la Chine refuse de voir son soutien à la Russie remis en question. La Chine a aujourd'hui des visées impérialistes sur Taïwan, mais aussi sur l'Indo-Pacifique, zone où nous sommes présents et où vivent certains de nos compatriotes. Il faut bien avoir cette réalité à l'esprit. La Chine a fait de la Russie son nouvel allié, voire son nouveau vassal.

Je n'oublie évidemment pas les autres principaux conflits de cette année, parmi lesquels l'affrontement entre deux puissances nucléaires, l'Inde et le Pakistan, ou celui entre deux grandes puissances, l'une dotée de l'arme nucléaire, Israël, l'autre en passe de l'obtenir, l'Iran. Cette situation géopolitique pose quantité de problèmes.

Je ne m'étendrai pas davantage, mais je pourrais également évoquer les questions de la dronisation, du départ de la France du continent africain, de la situation au Moyen-Orient et de la guerre à Gaza, du dixième anniversaire des attentats terroristes de Charlie Hebdo, du Bataclan et du Stade de France, ainsi que de la guerre au Mali et au Sahel ; en France comme ailleurs, la menace terroriste ne faiblit pas.

Ce sont autant de formes de crise auxquelles il faut bien sûr ajouter le risque climatique. À cet égard, chacun sait bien que l'échec de la dernière COP conduira, demain, à de nouveaux différends autour de la question climatique – je pense évidemment à l'enjeu de l'accès à l'eau.

Voilà la réalité du monde, mes chers collègues.

Certes, il nous reste l'Otan… De ce point de vue, chacun s'est satisfait du consensus de La Haye : seraient portées à 3,5 % du PIB les dépenses militaires stricto sensu, avec 1,5 % supplémentaire pour les autres dépenses de sécurité, au sens large – chacun y mettra ce que bon lui semble…(Sourires.)

Mais soyons honnêtes : comment pourrions-nous accepter, comme il est indiqué dans la déclaration du sommet de La Haye, de lever les obstacles qui freinent la coopération entre industries de défense américaines et européennes ? Comment, dans le même temps, pourrions-nous continuer à affirmer qu'il nous faut développer une industrie européenne de la défense ? Ce sont autant des questions qu'il nous faut nous poser. En somme, oui à l'Otan, mais restons lucides !

Quant à la coopération européenne, comme d'autres l'ont dit avant moi, l'UE peut développer des dispositifs utiles en la matière ; cependant – disons-le franchement –, la défense doit continuer de relever de la compétence des États.

Le mois de juillet dernier a été marqué par la publication de la revue nationale stratégique, voulue par le Président de la République. Certes, nous avons entendu des annonces, mais, dans ce moment de bascule, notre salut tient davantage à notre capacité à relever un quadruple défi.

Il faut tout d'abord une volonté politique. Je crois que, dans l'ensemble, celle-ci existe, sauf au sein de certains partis qui ont plutôt tendance à regarder du côté de Moscou ou de Washington, et dans certains médias qui sont aujourd'hui des agents de propagande. À ce sujet, madame la ministre, je rappelle que Dominique de Legge et moi-même avons récemment commis un rapport au nom de la commission d'enquête sur les opérations d'influences étrangères : il serait temps que nous nous dotions d'une vraie politique nationale dans ce domaine.

Le deuxième effort doit être financier : celui-ci résultera notamment du débat budgétaire que nous avons ce matin. À ce propos, je sais bien que l'on parle d'une progression du budget de l'ordre de 6,7 milliards d'euros, mais l'honnêteté commande de dire que 3,5 milliards d'euros étaient déjà budgétisés. En réalité, la hausse n'est que de 3,2 milliards d'euros – c'est déjà beaucoup, mais il est bon de dire la vérité aux Français !

Il faut aussi une véritable volonté industrielle. En la matière, nous avons besoin d'une politique ambitieuse : passer des commandes ne suffira pas ; il sera nécessaire d'agir différemment, d'inventer de nouvelles manières de produire.

Enfin, le dernier défi qui se pose à nous est celui de la résilience. En la matière, il y a beaucoup à faire. Comment y associer les Français ? En vérité, il faut éviter de les affoler ; nous devons plutôt leur expliquer que nous sommes dans le camp de la paix. Aujourd'hui, la guerre et la violence sont en effet à chercher du côté du Kremlin ou de la Maison-Blanche. La France, elle, appartient bel et bien au camp de la paix. Comme nous y invitait Jean Jaurès, il faut être pour la paix tout en étant prêt pour gagner la guerre si la France est attaquée.

Mes chers collègues, revenons-en à ce budget. Comme cela a été rappelé, les crédits de la mission « Défense » sont en hausse ; c'est une bonne chose.

Mais la question qui se pose aujourd'hui est celle de l'architecture de notre défense, qu'il faut articuler différemment.

On a beaucoup évoqué le service national volontaire ces derniers jours. Il faudra s'interroger à la fois sur son financement et sur sa complémentarité avec les militaires professionnels et les réservistes. Il faudra permettre à ces volontaires de se rendre sur les théâtres d'opérations, notamment en Roumanie, faute de quoi il ne s'agira pas de véritables militaires. C'est un sujet qui me tient à cœur.

Au-delà de notre architecture de défense, des forces capacitaires de la France, du rôle de l'Otan et de l'Union européenne, notre devoir est de nouer des accords de partenariat avec certains pays du Sud. Ne nous laissons pas enfermer dans une logique où l'Occident serait contre le reste du monde. Nous n'y gagnerions rien.

Madame la ministre, nous souhaitons que le Parlement soit mieux associé à ces questions, en séance publique comme en commission, et que vous puissiez travailler en toute transparence avec l'ensemble des groupes politiques.

Les membres du groupe SER voteront en faveur de l'adoption de ces crédits, comme nous l'avons toujours fait. Je vous rappelle que nous avons très largement participé à la revue nationale stratégique et contribué à ce que la LPM soit bonifiée.

Aujourd'hui, nous voterons ce budget, tout en espérant qu'un débat sur la stratégie de défense de notre pays puisse s'engager par la suite. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. André Guiol et Olivier Cigolotti applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous procédons ce matin à l'examen des crédits de la mission « Défense ». Leur hausse inédite témoigne du basculement historique qui est à l'œuvre.

Avec 57 milliards d'euros, dont 14 milliards d'euros exclusivement dédiés à l'armement, ce budget pour 2026 croît encore de 6,7 milliards d'euros par rapport à 2025, soit une augmentation de 13 %.

Cette accélération du réarmement – 3,2 milliards d'euros prévus dans la LPM, auxquels le Président de la République a ajouté 3,5 milliards d'euros en juillet dernier – engage la France sur une trajectoire qui devrait, d'ici à 2030, la voir consacrer 100 milliards d'euros à sa défense chaque année.

Dans le même temps, on supprime 4 000 postes d'enseignants, on coupe dans les dotations de l'État aux collectivités locales, à hauteur de 7,6 milliards d'euros, et, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, on fait payer aux malades et aux plus vulnérables un impôt épouvantable de 3,6 milliards d'euros.

Pour faire avaler ce surarmement aux travailleurs, vous n'hésitez plus à créer un climat anxiogène, inédit pour notre jeunesse, avec des références au réarmement « accéléré ». Certains chefs militaires en appellent même à « accepter le risque de perdre des enfants »…

Ces discours ne garantissent pas la sécurité des Français : ils servent l'obsession guerrière d'Emmanuel Macron, car c'est son dernier moyen d'exister dans un pays qui le rejette !

Pourtant, cette stratégie militariste ne se fonde sur aucune rationalité stratégique. Les États européens membres de l'Otan dépensent trois fois plus pour leur défense que la Russie – 454 milliards de dollars contre 141 milliards en 2024. Ils disposent de quatre fois plus de navires de guerre, de trois fois plus de chars de combat, de véhicules blindés et d'artillerie que la Russie !

La position de notre groupe reste constante. Oui, la France a besoin d'une armée dissuasive, solide et compétente, mais elle ne doit servir qu'à la stricte défense de notre territoire national, de nos infrastructures et de nos populations.

Or ce budget organise un surarmement, dans une logique de projection extérieure et d'escalade permanente au-delà des besoins réels de défense du territoire. C'est cette dérive stratégique que nous dénonçons.

Les commandes ou livraisons prévues – avions A400M, porte-avions de nouvelle génération… – montrent que ce budget prépare une armée de haute intensité et de projections.

Dans le même temps, le volet humain ne représente que 3 % de la hausse totale. Le plan Fidélisation 360 reste symbolique, et plus de 80 % des crédits nouveaux bénéficient en réalité aux industriels et non aux militaires ou à leurs familles.

Relevons ensuite que les mots « désescalade » et « stabilisation » ont disparu des documents budgétaires, ce qui témoigne de ce basculement doctrinal. En effet, la doctrine française reposait depuis trente ans sur trois piliers : dissuasion, prévention, projection. Désormais, nous ne parlons plus que de réactivité, de puissance et de résilience. Notre pays ne cherche plus à éviter les conflits : il se prépare à les mener.

Notre opposition aux crédits de cette mission est renforcée par la hausse disproportionnée de la contribution française à l'Otan, de 10 % à 25 % selon les lignes, alors même que des faits de marchés truqués au sein de l'organisation sont documentés. Peut-on encore parler de courage, si la représentation nationale n'est plus capable de demander des comptes ? L'Europe parle d'autonomie stratégique, mais c'est une chimère !

Madame la ministre, à votre vision d'une France qui s'accroche à l'Otan, dépend des États-Unis et contribue aux profits du complexe militaro-financier, notre groupe oppose celle d'une France souveraine, libérée de l'Otan, s'appuyant sur la puissance publique et tournée vers la paix, l'innovation civile plutôt que militaire, et la justice sociale.

Nous voterons contre les crédits de cette mission et nous défendrons des amendements visant à améliorer la protection des femmes et des hommes qui incarnent nos armées. C'est leurs conditions de vie que nous proposerons en premier lieu d'améliorer. De même, nous plaiderons pour une meilleure prise en compte des enjeux de santé mentale et une revalorisation des moyens du service de santé des armées.

Je terminerai par une image simple. Une nation, c'est comme un arbre : il lui faut de la sève pour grandir, et des racines pour tenir. La sève, ce sont nos services publics, nos jeunes, nos travailleurs. Les racines, ce sont notre diplomatie et notre universalisme. Aujourd'hui, le budget de cette mission gonfle le tronc ; il alourdit les branches ; mais il assèche la sève et étouffe les racines.

Un arbre comme celui-là finit par casser. Nous voulons une France forte, une France qui construit la paix et donne des perspectives de fraternité à nos enfants ! (MM. Thierry Cozic et Mickaël Vallet applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cigolotti. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Arlette Carlotti applaudit également.)

M. Olivier Cigolotti. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, en complément de l'intervention de mon collègue François Bonneau, il me semble important de rappeler que l'année 2026 marque la troisième annuité de la loi de programmation militaire, dans un contexte géostratégique profondément déstabilisé par de nombreux conflits, notamment la guerre en Ukraine.

Les crédits de la mission « Défense » sont ceux qui enregistrent la plus forte progression dans le PLF 2026 ; la défense devient la première politique publique de l'État en autorisations d'engagement. Dans un contexte général où des efforts significatifs de redressement des finances publiques sont consentis, il convient de saluer cet effort important.

Comme le Président de la République l'a déjà précisé cet été, au moment de la publication de la revue nationale stratégique actualisée, nous sommes à un point de bascule : la permanence d'une menace russe aux frontières de l'Europe, le recours de plus en plus désinhibé à la force dans de nombreuses régions du monde, la remise en question de nos alliances historiques et la révolution technologique modifient en profondeur la logique du champ de bataille.

Le contexte géopolitique dégradé dans lequel nous évoluons oblige l'armée à se tenir prête, car elle pourrait être mobilisée à tout instant et endurer une violente guerre d'attrition. Aussi nos armées doivent-elles pouvoir s'appuyer sur une base industrielle et technologique de défense solide pour se fournir en équipements en nombre accru et d'une meilleure qualité.

Si notre BITD compte des groupes importants, qui ont permis à la France d'être le deuxième exportateur mondial d'armes en 2024, elle compte aussi quelque 4 500 petites et moyennes entreprises, qui produisent un chiffre d'affaires de 30 milliards d'euros. Ces entités manquent souvent de fonds propres et hésitent parfois à se tourner vers des solutions de financement extra-européennes au risque de perdre leur indépendance.

Le financement des entreprises de la BITD est un enjeu de souveraineté. Elles doivent être soutenues et protégées, car elles constituent un maillage essentiel pour notre défense comme pour nos territoires.

À ce titre, nous nous félicitons de la création du fonds Bpifrance Défense en octobre dernier. Madame la ministre, lever les obstacles au financement de la BITD doit constituer une priorité pour votre ministère.

Par ailleurs, il serait intéressant que la proposition de loi relative au financement des entreprises de la base industrielle et technologique de défense française de notre excellent collègue Pascal Allizard, qui a été votée au Sénat, soit examinée par l'Assemblée nationale.

Je m'associe à l'alerte de notre collègue Gisèle Jourda sur la baisse des moyens de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD). En effet, cet acteur majeur du renseignement et de la sécurité des entreprises voit ses effectifs passer de 1 691 équivalents temps plein (ETP) à 1 609, alors que nos entreprises ont plus que jamais besoin d'être protégées contre toutes sortes de menaces hybrides : cyberattaques, sabotages, ou encore prises de participation hostiles.

Si les grands groupes ont les moyens de lutter contre ces menaces, il nous faut préserver notre réseau de petites et de moyennes entreprises de la BITD. Elles ont besoin d'être accompagnées.

Enfin, comme le démontrent de nombreuses études économiques, les investissements de défense ne sont pas des coûts improductifs. Ils peuvent favoriser la croissance à court et moyen terme, mais aussi augmenter la productivité à long terme grâce aux technologies dites duales.

De plus, ces investissements sont une forme d'assurance contre les risques de déstabilisation, de terrorisme, voire de conflits, et contre les effets économiques qu'ils emportent. Voilà une raison de plus pour sanctuariser le budget de la défense ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC, Les Républicains et SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Catherine Vautrin, ministre des armées et des anciens combattants. Madame la présidente, messieurs les présidents de commission, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens avant tout à vous remercie de votre engagement sur la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2026.

Je tiens également à remercier la ministre déléguée Alice Rufo, qui représentera le Gouvernement dans cet hémicycle ce soir, lors de l'examen des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

Vous l'aurez compris, le cap de ce projet de budget dépasse largement nos sensibilités : il s'agit de la défense de la nation, de la protection des Français, de la préservation de notre liberté. Vous avez été très nombreux à brosser la situation stratégique internationale. Nous tirons la même conclusion : les dividendes de la paix appartiennent au passé.

Dans le contexte actuel, nous devons être au rendez-vous, car nos partenaires comme nos compétiteurs jaugent à la fois notre endurance, notre cohésion et notre crédibilité. Chaque jour, les nations réévaluent leur propre niveau d'exposition et de préparation.

Je dirai tout de suite un mot d'un moment qui a incontestablement constitué une bascule : le déclenchement, en 2022, de la guerre en Ukraine.

L'aide que nous apportons à ce pays s'élève à plus de 3 milliards d'euros. Elle prend la forme de cessions de matériel, d'aides à la formation, ou encore d'aide au maintien en condition opérationnelle, mais aussi d'un soutien politique et stratégique.

Nous avons également envoyé des soldats en mission sur le flanc oriental de l'Europe, dans le cadre des opérations Lynx et Aigle. Ces missions impliquent des surcoûts, qui ont été couverts en fin de gestion.

M. Temal a évoqué à l'instant l'accord de sécurité signé le 17 novembre dernier par le Président de la République et le Président Zelensky. Il porte sur l'équipement de l'Ukraine à court terme, mais aussi à plus longue échéance. En effet, nous souhaitons que lorsque, comme nous l'espérons tous, un accord de paix durable aura été signé, l'Ukraine soit en mesure d'assurer durablement sa protection.

Pour ce qui concerne l'Otan, la position du Gouvernement est très claire : nous disons oui à un pilier européen de l'Otan ! Pour le dire sans détour, en matière d'acquisition de matériel, au programme Purl (Priority Ukraine Requirements Lists), je préfère le programme « Curl » ; en d'autres termes, l'argent des Européens doit aller à la base industrielle et technologique de défense européenne. L'ensemble des pays de ce futur pilier européen doivent converger sur cette question importante.

Mme Catherine Vautrin, ministre. Par ailleurs, la France a refusé l'idée d'une BITD transatlantique. Ce n'est absolument pas concevable.

Le réarmement n'est pas une singularité française : c'est la norme dans tous les pays européens. Je vous épargne le catalogue, car je peux vous le dire en une phrase : tous les pays se réarment, en consentant des efforts financiers plus ou moins importants.

Les pays baltes, qui sont en première ligne au vu de leur voisinage, augmentent leur budget de défense, dans des proportions allant de 23 % à 38 %. Le voisin en question, la Russie, consacre 40 % de son budget à l'effort de guerre !

Il est fondamental que nous soyons d'accord pour affirmer que la stratégie de défense de notre pays est une compétence souveraine. La souveraineté de la Nation en dépend. La France a d'ailleurs fait des choix à cet égard, et elle est la seule à continuer de s'y tenir : je rappelle que la France est le seul pays européen à articuler une stratégie de dissuasion nucléaire, aussi bien aéroportée que navale, avec une stratégie de défense conventionnelle. Cette doctrine, dont le Président de la République est le garant, demeure inchangée depuis 1964 ; tous les exécutifs s'y sont tenus.

Rappelons aussi que notre pays est une grande puissance maritime. À ce titre, je veux réaffirmer l'importance de la protection de nos territoires ultramarins. Plusieurs mesures vous seront proposées à cet effet dans ce projet de loi de finances.

Vous êtes plusieurs à m'avoir interrogée sur nos grands projets ; certains ont mentionné le porte-avions de nouvelle génération. Concrètement, une puissance maritime doit être dotée d'un porte-avions. Il me semble important de le rappeler.

Vous le savez tous, notre pays a pris le chemin du réarmement depuis 2017. La loi de programmation militaire 2019-2025 avait une vocation de réparation. La LPM 2024-2030, qui a été conçue et défendue devant vous par celui qui est devenu Premier ministre, Sébastien Lecornu, et votée par le Parlement, a justement pour objet le réarmement.

Pourquoi cette stratégie ? Le général de Gaulle répondait déjà à cette question, à Saint-Cyr, en 1959 : « Le Gouvernement a pour raison d'être, à toute époque, la défense de l'indépendance et de l'intégrité du territoire. » Je crois, si vous me permettez cette familiarité, que cette phrase n'a pas pris une ride. Elle décrit le sens de notre engagement.

L'année 2026 sera la troisième année de mise en œuvre de la loi de programmation militaire en vigueur. La trajectoire de celle-ci a été actualisée et rehaussée à 413 milliards d'euros après que le Président de la République a pris acte, le 13 juillet dernier, de la situation internationale que vient de décrire M. Temal. C'est ce qui explique que nous proposions, dès cette année, une rallonge de 3,5 milliards d'euros.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire, mais je le répète devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs : oui, le Gouvernement présentera, dans les toutes premières semaines de l'exercice 2026, un texte pour détailler les surmarches. Cela nous donnera l'occasion de travailler ensemble sur ces sujets.

Ainsi, en additionnant budget initial et surmarche, nous aboutissons à un effort inédit de 6,7 milliards d'euros supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. Les crédits du programme 146 « Équipement des forces » sont ainsi portés à 22,9 milliards d'euros ; ceux du programme 178 « Préparation et emploi des forces », à 15,9 milliards d'euros ; ceux du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense », à 2,3 milliards d'euros ; enfin, ceux du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », à 16,1 milliards d'euros.

Notre première priorité est de consolider le socle de nos capacités militaires. Cela inclut l'entraînement de nos forces, la gestion des effectifs et le renforcement de nos soutiens logistiques, que vous avez été nombreux à évoquer. Olivier Cigolotti et Michelle Gréaume l'ont bien noté dans l'avis qu'ils ont présenté : les trois armées doivent « durcir les conditions d'entraînement des hommes afin de les préparer le mieux possible » à l'éventualité d'un conflit de haute intensité.

Notre deuxième priorité est de protéger nos forces et nos territoires, ce qui passe par le développement de notre défense sol-air, par la lutte contre les drones et la lutte anti-sous-marine, et par la protection face aux menaces nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC).

La troisième priorité est d'opérer une montée en puissance de nos capacités offensives. Cela implique d'assurer à nos forces un approvisionnement suffisant en munitions, tout en développant nos capacités de frappe dans la profondeur.

Vous avez été plusieurs à mentionner notre quatrième priorité : renforcer nos capacités de renseignement. C'est un élément clé de notre stratégie, qui suppose d'investir dans des drones d'observation et dans le spatial.

J'ajoute que nous passerons pour plus de 30 milliards d'euros de commandes en 2026, hors dissuasion, pour nos grands programmes. Madame la sénatrice Conway-Mouret, les frégates, les Rafale, les drones et les blindés ne sont en aucun cas négligés. L'acquisition de tels matériels constitue pour nous un objectif majeur.

Monsieur le rapporteur spécial, comme plusieurs de vos collègues, vous m'avez interrogée sur le niveau et le détail des surmarches et sur la gestion 2025. Je rappelle à cet égard que nous n'avons procédé à aucun gel, régulation ou annulation de crédits sur l'exercice 2025. Au contraire, nous avons exécuté 1 milliard d'euros de plus que le plafond fixé en loi de finances initiale.

Le report de charges est en baisse par rapport à l'exercice 2024, il se stabilise à 20 %, et c'est exactement la même lecture pour l'exercice 2026.

Vous avez été nombreux à insister sur le montant des commandes passées par la DGA. En 2025, celle-ci aura passé pour 40 milliards d'euros de commandes et aura acquitté 24 milliards d'euros cette même année.

Comme vous, je suis élue de terrain ; comme vous, je suis préoccupée par les délais de paiement. Ce sur quoi nous devons travailler ensemble, c'est à faire en sorte que ces investissements ruissellent, notamment en veillant à accompagner les sous-traitants. En effet, les entreprises qui traitent avec la DGA mettent en avant la capacité de paiement de celle-ci, mais les sous-traitants rencontrent plus de problèmes en la matière.

Je mesure comme vous l'importance de l'activité et de l'emploi dans nos territoires, dont vous êtes ici les représentants.

Les surmarches que j'ai mentionnées nous permettront d'exécuter davantage de crédits que prévu.

Grâce à elles, nous allons accroître nos capacités offensives, en commandant des milliers de munitions supplémentaires, ce qui est incontestablement le défi de l'année 2026. Nous allons également tripler les livraisons d'obus d'artillerie de 155 millimètres et doubler les livraisons de nos missiles de croisière.

Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, nous avons parfaitement en tête la question du successeur du lance-roquettes unitaire (LRU). J'ai déjà présidé un premier comité ministériel d'investissement sur le sujet.

Il n'est pas question de brader quoi que ce soit. Nous irons au terme des essais prévus pour garantir la préservation de notre souveraineté, selon les termes que nous nous sommes fixés. Nous ne prendrons pas de décision avant ce terme à tout le moins.

De la même manière, j'ai présidé un comité ministériel d'investissement sur les missiles balistiques terrestres, qui sont extrêmement importants pour renforcer notre protection conventionnelle.

Nous acquerrons également de nouveaux systèmes de défense sol-air et nous renforcerons nos moyens de lutte anti-drones, avec des kits de protection contre les drones, des munitions téléopérées pour le char Leclerc rénové, et des brouilleurs au profit de la marine.

En outre, les surmarches nous permettront de développer nos moyens de souveraineté : nous commanderons ainsi quatre satellites pour compléter notre observation spatiale, en complément des futurs satellites Iris2.

Nous allons également pouvoir renforcer notre réserve opérationnelle. Celle-ci comptait 40 000 contrats en 2024 ; l'objectif est d'atteindre 52 000 contrats en 2026. Vous le voyez, madame Carlotti, nous ne sacrifions en rien notre stratégie en la matière.

En ce qui concerne le nouveau service national, 3 000 jeunes y auront accès en 2026, pour un coût de 100 millions d'euros : 50 millions d'euros pour l'équipement, 40 millions d'euros pour les infrastructures et 10 millions d'euros pour les soldes des volontaires.

Le budget 2026-2030 en la matière est chiffré à 2,3 milliards, dont 1 milliard d'euros pour les infrastructures. En effet, nous devrons être en mesure d'accueillir les volontaires. Ces derniers suivront un mois de formation sur le territoire national, et passeront neuf mois à se rendre utiles dans les trois armées. À l'issue de ces dix mois, ils seront versés pour cinq ans dans la réserve opérationnelle.

Il s'agit donc d'une démarche extrêmement importante pour faire de notre armée une armée hybride. Armée active, réserve opérationnelle et service national : voilà l'architecture de nos armées pour les années à venir.

Mesdames, messieurs les sénateurs, au-delà de ces démarches, nous devons évidemment améliorer les conditions de vie des femmes et des hommes qui composent nos armées, après des décennies de baisses de crédits et de suppressions de postes.

En tant qu'élue locale, j'ai assisté, à une époque que je n'ai pas oubliée, aux suppressions de régiments et aux fermetures de bases militaires qui sont intervenues dans de nombreux territoires. Aujourd'hui, nous devons avoir le courage de reconnaître que les temps ont changé.

Comme l'a fait remarquer le rapporteur pour avis Jean-Pierre Grand, nous devons aller plus loin en matière de fidélisation. Ainsi, 159 millions d'euros y seront consacrés, au travers d'une augmentation de 7 % des crédits de soutien, de 10 % pour les bases de défense et de 13 % pour le commissariat des armées. Le logement est une question majeure, qui n'est pas réglée et sur laquelle je souhaite aller plus loin. Nous avons besoin de logements neufs et d'un véritable accompagnement.

Une enveloppe de 1,8 milliard d'euros sera dévolue au service de santé des armées, afin de développer les recrutements dans les écoles, mais aussi d'aligner les rémunérations sur celles de la fonction publique. Il s'agit d'un élément d'attractivité fondamental.

En ce qui concerne l'innovation, le ministère des armées travaille avec Bercy pour créer des ponts entre investissement public et investissements privés. Bpifrance propose ainsi un fonds Definvest et un fonds Innovation Défense. C'est ce qui permettra à notre base industrielle et technologique de défense de progresser.

Celle-ci représente 220 000 emplois et plus de 4 000 entreprises sur l'ensemble de nos territoires. Elle est un élément très important de notre indépendance. Nous avons été capables de relocaliser la production de poudre à canon sur notre territoire. Nous devons aller plus loin en accompagnant d'autres entreprises du secteur.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l'aurez compris, notre volonté est que la France, première armée d'Europe, soit considérée comme telle par le reste du continent, par nos alliés comme par nos compétiteurs. Ce budget n'est pas un budget de circonstances ; c'est un budget de responsabilité.

Les moyens supplémentaires que nous engageons impliquent une mobilisation totale de nos industriels pour relever nos ambitions en matière d'exportations. Il y va de notre souveraineté et de notre modèle de civilisation.

Mme la présidente. Je vous prie de conclure, madame la ministre.

Mme Catherine Vautrin, ministre. Pour nos soldats, auxquels je redis notre attachement, pour notre indépendance et pour la France, je vous demande d'approuver les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B.

Nous avons dix-sept amendements à examiner. Pour ce faire, nous avons jusqu'à treize heures. Je vous prie donc, mes chers collègues, de faire preuve de concision et de respecter le temps de parole qui vous est imparti.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Défense

93 078 480 008

66 725 476 236

Environnement et prospective de la politique de défense

2 753 690 638

2 293 659 614

Préparation et emploi des forces

17 314 435 277

15 919 288 057

Soutien de la politique de la défense

25 841 664 436

25 628 629 926

dont titre 2

23 831 227 901

23 831 227 901

Équipement des forces

47 168 689 657

22 883 898 639

Mme la présidente. L'amendement n° II-1736 rectifié bis, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet et MM. Delahaye, Menonville, Duffourg, Longeot, Mizzon et Maurey, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

1 700 000 000

 

1 700 000 000

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

 

1 700 000 000

 

1 700 000 000

SOLDE

- 1 700 000 000

- 1 700 000 000

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Je n'aurais eu aucun d'état d'âme à soutenir une très forte augmentation des crédits consacrés à la défense si la situation de nos comptes publics n'était pas aussi dégradée.

J'appelle l'attention de l'ensemble de notre assemblée sur la situation réelle de nos comptes publics, d'autant que nous avons décidé il y a deux ans, dans un contexte géopolitique que chacun connaissait, d'une trajectoire d'évolution des dépenses militaires pour les années 2024 à 2030.

À peine deux ans après, nous sommes appelés à revoir totalement la trajectoire prévue… Cela signifie que nous avons voté il y a deux ans, dans un contexte d'imprévisibilité totale, une loi de programmation militaire qui était largement sous-estimée. Cela pose tout de même un problème d'appréhension des enjeux !

Par ailleurs, nous parlons certes de sujets militaires, mais il est tout de même étonnant que les parlementaires que nous sommes votent, le doigt sur la couture du pantalon, ce que le chef a décidé, sans aucune concertation ! Il conviendrait que nous puissions remettre en cause certaines des orientations qui ont été prises, ou, à tout le moins, que nous en discutions.

Nous devons trouver le meilleur chemin pour concilier la situation très dégradée de nos comptes publics et les besoins de notre défense, que je ne conteste pas.

Dans cette optique, je propose de diminuer de 1,7 milliard d'euros les crédits de la mission, car je considère qu'un effort supplémentaire doit être consenti pour tenir compte de la réalité de nos comptes publics.

M. Christian Cambon. C'est irresponsable…

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Monsieur Canévet, vous souhaitez que le ministère des armées participe à l'effort de réduction de la dépense publique. Il se trouve qu'il le fait depuis soixante ans, et au-delà de vos espérances.

Je vous donnerai simplement quelques chiffres : en 1960, le budget de la défense représentait 5,43 % du PIB ; en 1980, ce chiffre était tombé à 3,18 % ; enfin, à l'heure actuelle, il est à peine au-dessus de 2 %. Si nous revenions au niveau de 1980 en pourcentage de PIB, nos dépenses militaires s'élèveraient à plus de 110 milliards d'euros.

Il me semble donc que le ministère a très largement contribué à la résorption de la dépense publique, et peut-être même trop, voire beaucoup trop !

Mme Jocelyne Guidez. Tout à fait !

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'ajoute que, dans le contexte actuel, les dépenses militaires de tous les autres pays augmentent. Entre 2022 et 2024, en euros constants, le budget de la défense française a augmenté de 10 %, celui de la Russie de 119 %, celui de la Pologne de 93 %, celui de l'Allemagne de 47 % et celui du Royaume-Uni de 14 %. Nous sommes donc, malheureusement, très en deçà de tous ces pays !

La commission émet donc un avis non pas défavorable, mais très défavorable sur cet amendement ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. André Guiol applaudit également.)

M. Roger Karoutchi. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Je partage complètement les arguments de M. le rapporteur spécial.

L'année prochaine sera la troisième année d'exécution de la LPM et, jusqu'à présent, les LPM ont toutes été respectées à l'euro près.

Entre 2009 et 2015, un régiment sur deux a été supprimé et 50 000 postes ont disparu. Le ministère dont j'ai la responsabilité a donc largement contribué aux efforts d'économies.

Le Gouvernement émet donc, lui aussi, un avis très défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Rachid Temal, pour explication de vote.

M. Rachid Temal. Tout d'abord, je tiens à saluer les propos de François Bonneau lors de la discussion générale. La cohabitation au sein de son groupe ne doit pas être simple tous les jours…

Dans le monde actuel, nous pouvons avoir peur des marchés ou de la Russie, mais, en tout état de cause, il serait regrettable de réaliser dans quelques années que nous ne sommes pas suffisamment armés contre un choc potentiel parce que les dépenses ne rentraient pas parfaitement dans le tableur Excel qu'on avait préparé…

Il faut retirer cet amendement ! Ce n'est pas à la hauteur du débat que nous avons eu. Chacun mesure la gravité de la situation internationale : ce n'est pas le moment de faire des économies de bout de chandelle. Sinon, il se pourrait que l'on sabre le champagne du côté du Kremlin. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour explication de vote.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Les membres du groupe Les Indépendants souscrivent totalement aux propos de M. le rapporteur spécial. Nous nous opposerons à cet amendement de Michel Canévet.

Mes chers collègues, si vis pacem, para bellum ! J'ai entendu des propos assez sidérants dans la discussion générale. J'ai l'impression que nous ne vivons pas tous sur la même planète…

Mme Michelle Gréaume. C'est clair !

Mme Vanina Paoli-Gagin. C'est très clair. Il faut lire les rapports de la CIA et les plans quinquennaux chinois.

Nous sommes un vieux peuple, avec une histoire séculaire. Réveillons-nous ! (MM. Claude Malhuret et Jean-Michel Arnaud applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.

M. Akli Mellouli. Je voudrais revenir sur l'expression que vous avez employée, madame Paoli-Gagin, quand vous avez dit à plusieurs collègues : « Nous ne vivons pas sur la même planète. »

On peut évidemment avoir des désaccords, par exemple sur la stratégie ou sur les enjeux. Ainsi, il a été question de souveraineté ; à cet égard, on devrait aussi aborder la question, ô combien essentielle, de la souveraineté alimentaire en cas de guerre, au regard de la dépendance de notre pays à des intrants et engrais extérieurs, ainsi qu'au gazole.

Mais avoir des désaccords n'implique pas forcément d'utiliser un tel vocabulaire vis-à-vis de ceux qui pensent différemment !

Sur le fond, les membres du groupe GEST voteront contre cet amendement. En effet, c'est sur la stratégie que nous voulons avoir un débat. Ce qui nous pose problème, ce n'est pas que les crédits de la défense augmentent ; c'est que, dans le même temps, ceux des affaires étrangères baissent. La diplomatie doit être le levier ; la défense n'est que l'outil.

Cela dit, la proposition de M. Canévet nous semble aller à l'encontre de la stratégie que nous sommes en train de développer pour mieux protéger notre territoire et nos populations.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.

Mme Michelle Gréaume. Les membres du groupe CRCE-K voteront pour cet amendement.

J'aimerais que l'on respecte les positions de chacun, de chaque groupe. Pour ma part, je ne critique pas celles des autres. On pourrait parler des marchés truqués à l'Otan, de l'argent détourné – je vous renvoie à un article de L'Express – pour construire des villas…

Mais merci de respecter les positions de tous les membres de notre assemblée !

M. Claude Malhuret. Il y a des positions qui ne sont pas respectables !

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, pour explication de vote.

M. Cédric Perrin. L'auteur de cet amendement est évidemment dans son bon droit ; il est même multirécidiviste en la matière…

Certes, si l'on s'en tient à un raisonnement d'expert-comptable, on peut regarder un tableau Excel et considérer que le rééquilibrage budgétaire passe par une baisse des crédits de la défense.

Mais les interventions des différents orateurs ont, me semble-t-il, clairement démontré que la défense avait déjà été largement mise à contribution.

Cette proposition ne me paraît donc pas aller dans le sens de l'histoire. J'invite chacun et chacun à relire les Mémoires de guerre du général de Gaulle, qui y écrivait notamment ceci : « L'aveuglement d'une nation qui refuse de voir monter la menace prépare toujours les défaites les plus lourdes. »

Je ne peux pas laisser dire que nous n'aurions pas discuté et que nous appliquerions les décisions du chef sans avoir jamais réfléchi aux conséquences de nos actes.

Nous sommes ici un certain nombre à siéger au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Notre quotidien, c'est d'auditionner des militaires, des responsables du ministère des armées, des chercheurs, des spécialistes de tel ou tel sujet. Or toutes nos auditions démontrent très clairement l'état de la menace à laquelle nous sommes potentiellement confrontés. Il suffit de relire la revue nationale stratégique pour comprendre que diminuer le budget des armées serait une ineptie totale.

Le sens de mon propos n'est pas de critiquer notre collègue, dont, encore une fois, je comprends la logique d'expert-comptable. Mais ce n'est absolument pas la logique qui s'impose à nous aujourd'hui.

Je ne voudrais pas que nous soyons demain mis en cause parce que nous n'aurions pas fait les bons choix aujourd'hui. Je ne voudrais pas que nous n'ayons plus que nos yeux pour pleurer le jour où – j'espère évidemment qu'il n'arrivera jamais – nous serions confrontés à des difficultés auxquelles nous n'aurions pas été préparés.

Je pense donc que cet amendement n'a pas lieu d'être. J'invite chacune et chacun à voter contre.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

MM. Rachid Temal et Christian Cambon. Retrait !

M. Michel Canévet. Je vous rassure, monsieur le président Perrin : je ne m'exprime pas du tout dans une « logique d'expert-comptable ».

Et si je suis un « multirécidiviste », c'est parce que la France a pris des engagements à l'échelon européen pour respecter une trajectoire de retour à l'équilibre de nos finances publiques.

M. Christian Cambon. Ça, c'est le travail de la commission des finances !

M. Michel Canévet. Je ne conteste absolument pas la nécessité d'un effort pour notre défense. Je demande simplement qu'il soit mesuré. Il faut avoir le courage de diminuer les dépenses publiques, afin de pouvoir respecter nos engagements auprès de l'Union européenne. (M. Patrick Kanner s'exclame.)

Je trouve toujours des gens très courageux pour augmenter les dépenses ; j'en trouve beaucoup moins pour soutenir les baisses que je propose.

M. Mickaël Vallet. On peut aussi augmenter les recettes !

M. Michel Canévet. Résultat, dans cinq ans, la charge des intérêts de la dette de la France sera peut-être tellement insoutenable que nous serons obligés de réduire l'ensemble de l'action publique, y compris dans le domaine, majeur pour l'avenir de notre pays, dont nous débattons aujourd'hui. Nous devons en avoir conscience !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1736 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-1729, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 800 000 000

 

800 000 000 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

800 000 000 

 

 800 000 000

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

 800 000 000

800 000 000 

 800 000 000

800 000 000 

SOLDE

 0

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Je tiens à préciser d'emblée que nos collègues députés ont formulé la même demande.

Nous tenons à rappeler l'importance que nous accordons à la réserve opérationnelle. En ce sens, nous avons accueilli sans opposition, mais avec une certaine circonspection, les annonces présidentielles de retour d'un service national volontaire. Nous percevons encore mal l'articulation de celui-ci avec les dispositifs existants, notamment la réserve opérationnelle – je note cependant que vous avez abordé ce point, madame la ministre.

Nous craignons que les financements mobilisés pour le service national volontaire n'obèrent les moyens de la réserve, déjà insuffisants à nos yeux. Alors que le nombre de réservistes doit doubler d'ici à 2030, les conditions faites aux 40 000 réservistes ne sont déjà pas satisfaisantes : équipement insuffisant, retards de paiement parfois considérables, etc. Nous sommes loin du compte.

La réserve doit être revalorisée symboliquement et financièrement, et son pilotage humain doit être amélioré, en termes notamment de qualité des entraînements, de débouchés proposés aux réservistes, ainsi que de souplesse et d'agilité pour améliorer la compatibilité entre les heures de service et la vie professionnelle et familiale.

Comme l'a montré l'excellent rapport de nos collègues députés Damien Girard et Thomas Gassilloud, la réserve est indispensable pour soulager nos militaires dans le cadre de la réponse à une menace hybride, qui peut notamment prendre la forme de cyberattaques paralysant nos infrastructures, pour faire face aux catastrophes naturelles et, plus largement, pour épauler la sécurité civile.

C'est bien le sens de cet amendement, qui tend à doter la réserve de 800 millions d'euros supplémentaires. Nous jugeons cela parfaitement absorbable, notamment via le redéploiement des crédits du service national universel (SNU) et de l'opération Sentinelle, que nous souhaitons voir évoluer.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. M. Gontard a raison de vouloir soutenir la réserve opérationnelle.

Néanmoins, pour ma part, je n'ai pas noté de difficultés particulières. La réserve opérationnelle est intégrée dans les objectifs de la LPM. Si, d'aventure, des problèmes apparaissaient, il serait toujours possible le rectifier le tir, notamment lors de l'actualisation que Mme la ministre nous a annoncée.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. J'irai dans le même sens que M. le rapporteur spécial.

Je le précise, le nombre de réservistes doit progresser de 4 400 pour atteindre 52 000 en 2026, et la norme d'activité – je connais votre attachement à cette question – va augmenter. En d'autres termes, nous allons proposer quarante-cinq jours par an par réserviste, ce qui est un élément non négligeable. Sur le titre 2, la dépense consacrée aux réservistes augmente de plus de 98 millions d'euros sur 2025 et 2026, passant de 220 millions à 318 millions d'euros, ce qui nous offre les moyens d'atteindre les objectifs.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l'avis serait défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1729.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-1730, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco, Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

 243 000 000

 

243 000 000 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

243 000 000 

 

243 000 000 

 

TOTAL

243 000 000 

243 000 000 

 243 000 000

 243 000 000

SOLDE

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Une partie de l'avenir de l'Europe se joue en Ukraine. Plus que jamais, l'Europe doit rester actrice de ce théâtre d'opérations, dont les visées impérialistes américaines et russes tentent de l'exclure.

Nous saluons l'initiative du Président de la République et des chefs de gouvernement allemand et britannique d'associer leurs forces à celles de Volodymyr Zelensky pour trouver une issue au conflit qui ne soit pas la capitulation honteuse proposée par Donald Trump.

À l'issue de cet échange, Emmanuel Macron a déclaré qu'Européens et Ukrainiens avaient beaucoup de cartes en main, entre l'aide financière à l'Ukraine et la résistance de l'armée ukrainienne aux forces russes.

Cet amendement vise justement à accroître notre aide à l'Ukraine, qui a beaucoup décliné depuis le mois de juillet ; on relève, chaque mois, une baisse moyenne de 57 % par rapport au premier trimestre 2025. Il s'agit d'envoyer un message fort à la dictature russe et à Donald Trump : la France ne faiblira pas ; l'Europe ne faiblira pas ; l'Ukraine n'est pas à vendre à la découpe !

Dans ce moment potentiellement décisif du conflit, notre soutien militaire – cession et acheminement d'armes, maintien en condition opérationnelle et formation de soldats – doit impérativement être préservé et même renforcé, qu'il s'agisse du fonds bilatéral de soutien à l'Ukraine ou de la contribution de la France au mécanisme de la facilité européenne pour la paix.

Tel est le sens de cet amendement, qui vise à renforcer ce soutien au moyen de près d'un quart de milliard d'euros supplémentaires.

Les règles organiques relatives aux lois de finances ne nous permettent malheureusement pas de gager cet amendement sur la mobilisation des avoirs russes gelés en France, mais c'est toujours notre demande la plus ferme, d'autant que cette perspective semble effrayer Vladimir Poutine. En effet, l'ambassadeur russe à Berlin a jugé utile de menacer directement l'Allemagne et le reste de l'Europe.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. M. Gontard a tout à fait raison de manifester son soutien à l'Ukraine.

Toutefois, sur un plan pratique et opérationnel, l'aide à ce pays prend plusieurs formes et ne se concentre pas sur un seul programme. Dès lors, d'un strict point de vue technique, le transfert de crédits proposé ne me paraît pas traduire correctement les objectifs de son auteur.

De surcroît, si nous devions aller un peu plus loin en la matière, cela ne pourrait se faire qu'en lien avec nos partenaires.

C'est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir déposé cet amendement.

À mon tour d'expliquer que l'aide à l'Ukraine s'est notamment traduite par de nombreuses cessions de matériels. De ce point de vue, nous arrivons en fin de procédure. Mais nous avons aussi beaucoup travaillé sur la formation, et nous continuons à former et à maintenir en condition opérationnelle les forces ukrainiennes.

En outre, comme vous le savez, le soutien à l'Ukraine est aussi un soutien politique et diplomatique. C'est tout le sens de l'action de la coalition des volontaires, d'une part, et des initiatives du G7, d'autre part. Il ne s'agit pas que d'une question budgétaire ; cela va beaucoup plus loin.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1730.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2031, présenté par M. Ouizille, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

50 000 000

 

50 000 000

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

50 000 000

 

50 000 000

 

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Alexandre Ouizille.

M. Alexandre Ouizille. Nous avons adopté une loi de programmation militaire ambitieuse. Nous allons encore la rehausser à la hauteur des périls.

La LPM finance la base industrielle et technologique de défense. Or cette dernière est très souvent considérée comme ne consistant qu'en une dizaine de grands groupes. En réalité, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, la BITD comporte plus de 4 500 acteurs qui jouent un rôle très important sur tous les territoires.

Vous avez d'ailleurs établi une doctrine pour ces acteurs, que vous avez appelée la « coopétition ». Vous avez indiqué qu'ils devaient être à la fois innovants et capables de participer à notre effort de défense. Ces acteurs sont essentiels pour le ministère des armées ; plus de 85 % des prestataires sont des TPE, des PME et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Cet amendement vise donc à créer un fonds pour leur permettre de s'inscrire dans cette dynamique de coopétition comme vous les y invitez. En effet, comme vous l'avez souligné, il y a des problèmes de retards de paiement. Or il est difficile de savoir comment on va innover et monter en puissance quand on a des difficultés de trésorerie. Il faut avancer en la matière pour donner sa pleine puissance à la LPM.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Indéniablement, il est toujours bon de payer ses dettes. C'est précisément l'une des raisons pour lesquelles je mène un combat pour limiter au maximum les reports de charges. Plutôt que de créer un fonds, payons nos dettes en temps et en heure !

Au demeurant, madame la ministre, nous avons voté ici, sur l'initiative de mon collègue Pascal Allizard, un excellent texte, qui attend d'être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Je ne doute qu'après l'intervention de M. Ouizille, vous allez tout faire pour qu'il le soit. (Sourires.)

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Encore une fois, le Gouvernement est extrêmement vigilant pour que les quelque 4 000 entreprises de la BITD reçoivent les paiements qui leur sont dus. Elles-mêmes mettent d'ailleurs en avant le bon lien qu'elles ont avec l'État, notamment en matière des conditions de paiement. Un travail important reste à mener en ce qui concerne la sous-traitance.

J'en viens à l'activité de financement. Depuis le « dialogue de place » lancé au mois de mars dernier, différents fonds ont été institués. Ainsi, le fonds Definvest permet d'intervenir auprès des start-up et des PME pour renforcer leur structure bilancielle ; c'est un point très important, notamment pour tous les acteurs de la production de drones. Le fonds French Tech Souveraineté permet d'avoir des participations stratégiques. Le prêt DEF'FI commence aussi à démarrer.

Vous le voyez, des réponses existent. Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.

Enfin, pour répondre à votre sollicitation, monsieur le rapporteur spécial, nous demanderons d'abord l'inscription à l'ordre du jour des travaux parlementaires le texte relatif aux surmarches. Nous examinerons ensuite avec M. le ministre chargé des relations avec le Parlement comment faire en sorte que le texte auquel vous faites référence soit examiné le plus tôt possible par l'Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.

M. Alexandre Ouizille. Je remercie M. le rapporteur spécial et Mme la ministre de leurs explications, et je retire mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° II-2031 est retiré.

L'amendement n° II-1102, présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

50 000 000

 

50 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

50 000 000

 

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Défendu !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Je ne pense pas qu'il soit raisonnable de diminuer les crédits du programme 146 « Équipement des forces », et il ne me paraît pas nécessaire d'abonder le programme 178 « Préparation et emploi des forces », qui est déjà correctement pourvu.

L'avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1102.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, afin de nous donner toutes les chances de terminer l'examen des crédits de cette mission à treize heures, en accord avec la commission des finances, et en application de la décision de la conférence des présidents, les durées d'intervention sont désormais fixées à une minute.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-2046, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

30 000 000

 

30 000 000

Préparation et emploi des forces

30 000 000

 

30 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Nous proposons de consacrer 30 millions d'euros au recrutement de 150 personnels médicaux et paramédicaux et à la modernisation des équipements dans les centres médicaux des armées.

Il s'agit d'un amendement de résilience sanitaire nationale. En effet, seulement 76 % des postes de médecins militaires sont pourvus et trois des huit hôpitaux d'instruction des armées sont en déficit chronique.

Mme la présidente. L'amendement n° II-2015, présenté par MM. Mellouli, Gontard, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

3 000 000

 

3 000 000

Préparation et emploi des forces

3 000 000

 

3 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Akli Mellouli.

M. Akli Mellouli. Cet amendement est un amendement de repli par rapport à celui qui vient d'être présenté par Mme Gréaume.

La LPM et les crédits prévus dans ce projet de loi de finances permettront de réduire un peu les retards pris en matière de santé, mais pas de les combler. Or les différents orateurs ont rappelé l'importance du sujet pour nos troupes et nos hommes. L'accompagnement et le soutien sont en effet essentiels, tant pour le moral que pour la qualité de vie et de service.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. De fait, le service de santé des armées n'échappe pas aux difficultés plus générales que connaissent tous les services de soins et les hôpitaux.

Pour autant, je dois à la vérité de dire qu'un effort significatif a été effectué dans le cadre de la LPM et qu'il est respecté, s'agissant tant des recrutements que de l'utilisation des crédits.

Il ne me semble donc pas indispensable d'abonder les crédits comme il est proposé dans ces deux amendements. J'invite donc leurs auteurs à les retirer, quitte à revenir sur cette question à l'occasion de l'actualisation de la LPM.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de ces deux amendements.

Comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, le Gouvernement est très attentif à cette question. Les crédits ont progressé de 1,8 milliard d'euros. Il y a une augmentation des recrutements dans les écoles et une hausse des revenus, avec un alignement sur le statut de la fonction publique hospitalière. En outre, on crée un hôpital de rôle 3 destiné à la stabilisation des blessés, ce qui est un élément absolument majeur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2046.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2015.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2052, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 5 000 000

 

  5 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

  5 000 000

 

  5 000 000

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

  5 000 000

  5 000 000

  5 000 000

 5 000 000 

SOLDE

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Cet amendement relève de la même logique que les deux précédents. La commission en demande donc le retrait.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2052.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2047, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

5 000 000  

 

  5 000 000 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 5 000 000 

 

5 000 000  

Équipement des forces

 

 

TOTAL

5 000 000  

5 000 000  

 5 000 000 

5 000 000  

SOLDE

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Nous proposons par cet amendement de consacrer 5 millions d'euros au financement du recrutement de psychologues cliniciens, au déploiement des cellules d'écoute dans les bases, aux formations à la détection précoce des signaux de détresse et à la coordination avec les structures civiles.

Cet amendement d'humanité et d'efficacité opérationnelle devrait transcender les clivages.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Le recrutement des psychologues relevant du service de santé des armées, je suis conduit à émettre le même avis sur cet amendement que sur les précédents : une demande de retrait.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Madame la sénatrice, la prise en charge médicale, paramédicale et préventive a constitué un axe majeur de nos efforts de ces dernières années. En témoignent des éléments aussi importants que la généralisation de la visite médicale de retour d'opérations extérieures (Opex), la poursuite de la formation aux premiers secours psychologiques en opération et le renforcement de la coopération avec le milieu civil.

Il faut continuer en ce sens ; je partage votre analyse, mais c'est bien ce que nous faisons. C'est pourquoi je me permets de vous demander le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2047.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2054 rectifié, présenté par M. Guiol, Mme N. Delattre, MM. Cabanel, Gold, Grosvalet, Fialaire et Masset, Mmes Guillotin et Briante Guillemont, MM. Bilhac et Daubet et Mmes Pantel et Jouve, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

12 000 000

 

12 000 000

Préparation et emploi des forces

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

12 000 000

 

12 000 000

 

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

12 000 000

12 000 000

12 000 000

12 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. André Guiol.

M. André Guiol. Au vu du temps qui nous reste, je dirai simplement qu'il est défendu, madame la présidente !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. La commission sollicite l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Cet amendement a pour objet le financement des travaux d'aménagement de la piste d'atterrissage de la base aérienne 367 de Cayenne. Il s'agit de répondre à une problématique reconnue sur la zone concernée.

Toutefois, d'un point de vue technique, les travaux ne peuvent pas être engagés dès 2026. Des actions de coordination avec différents opérateurs doivent encore être menées. Cette étape préalable permettra de calibrer le besoin à un niveau plus équilibré et de le valider.

J'ajoute que le projet concerné relève non du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », mais des programmes 146 et 178.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.

M. André Guiol. Je retire mon amendement !

Mme la présidente. L'amendement n° II-2054 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-2033, présenté par M. Ouizille, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

10 000 000

 

10 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

10 000 000

 

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Alexandre Ouizille.

M. Alexandre Ouizille. Cet amendement d'appel visait à susciter le débat sur notre marine nationale. Néanmoins, étant donné qu'il nous reste peu de temps pour en discuter aujourd'hui et que nous en aurons plus lors de l'examen de l'actualisation promise de la LPM, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° II-2033 est retiré.

L'amendement n° II-2048, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 10 000 000 

 10 000 000 

Préparation et emploi des forces

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 10 000 000

 10 000 000 

Équipement des forces

 

 

TOTAL

 10 000 000

 10 000 000

 10 000 000

 10 000 000

SOLDE

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Selon le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM), 25 % des logements domaniaux militaires sont insalubres ou dégradés : absence d'isolation, humidité persistante, réseaux non conformes, etc. Cela a des conséquences directes sur le moral, la fidélisation et la capacité opérationnelle des unités.

Plusieurs rapports parlementaires et travaux de l'inspection générale de l'administration (IGA) ont souligné cette vétusté, qui est souvent critique dans les zones rurales, les bases aériennes et les régiments de l'Est et du Sud-Ouest, touchant particulièrement les engagés sous contrat et leurs familles.

Nous proposons donc de consacrer 10 millions d'euros à la rénovation prioritaire de logements en garnison, ce qui témoignerait de la priorité accordée à la condition des personnels militaires, à plus forte raison avec l'instauration du service national volontaire.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'avais remis voilà quelque temps un rapport sur la situation du patrimoine immobilier du ministère. C'est peut-être l'occasion pour le Gouvernement de nous faire un rapide point sur la question. Je sollicite donc son avis.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Comme nous devons terminer l'examen des crédits de cette mission à treize heures, je centrerai mon propos sur trois points.

Premièrement, la convention qui a été signée avec Nové en 2022 va arriver à une première période de bilan.

Deuxièmement, Nové ne concerne que 20 % du logement. Nous devons travailler sur tous les sujets. C'est la raison pour laquelle j'ai d'ores et déjà pris attache, notamment, avec Action Logement, afin de regarder comment nous pouvions aller plus loin. En effet, il est extrêmement important – c'est même incontestablement un élément de fidélisation – pour nos forces de savoir que les familles sont correctement logées.

Troisièmement, nous avons un problème sur l'hébergement des célibataires géographiques, qui sont de plus en plus nombreux. À cet égard, les réponses ne sont pas satisfaisantes. C'est donc un chantier en devenir.

Je partage vos préoccupations, madame la sénatrice. Je vous demande à ce stade de retirer votre amendement, mais nous reviendrons évidemment sur le sujet, à la lumière de l'excellent rapport de M. le rapporteur spécial.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2048.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Discussion générale (suite)

3

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

Mme la présidente. Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer, dans la tribune d'honneur, une délégation de sénateurs polonais, conduite par M. Kazimierz Ujazdowski, président du groupe d'amitié Pologne-France de cette assemblée. Cette délégation est accompagnée par notre collègue Valérie Boyer, présidente du groupe d'amitié France-Pologne. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre, se lèvent.)

Cette visite d'étude permettra de renforcer la coopération franco-polonaise dans le contexte particulier du conflit en Ukraine. Ses travaux concerneront le domaine de la défense, mais aussi la justice et les échanges universitaires et culturels.

Après des entretiens à Paris, la délégation se rendra en Alsace – à Strasbourg, capitale de l'Europe, et à Colmar. Elle sera notamment reçue à la Cour européenne des droits de l'homme et au siège de l'Eurocorps.

Mes chers collègues, je souhaite, en notre nom à tous, la plus cordiale bienvenue à nos homologues du Sénat polonais, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Applaudissements.)

4

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Article 68 (début)

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances pour 2026.

Défense (suite)

ÉTAT B (suite)

Mme la présidente. Dans la suite de l'examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B, nous en sommes parvenus à l'amendement n° II-2049.

L'amendement n° II-2049, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 8 000 000

 

 8 000 000 

 

Équipement des forces

 

  8 000 000

 

 8 000 000 

TOTAL

  8 000 000

 8 000 000 

 8 000 000 

 8 000 000 

SOLDE

 0

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. D'une manière générale, lorsque des travaux sont effectués sur le patrimoine militaire, la dimension environnementale est prise en compte. Je demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2049.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2327 rectifié, présenté par M. Temal, Mmes G. Jourda et Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mme Carlotti, MM. Darras, P. Joly, Marie, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000 

 

5 000 000

 

5 000 000 

 

Équipement des forces

 

5 000 000

 

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Rachid Temal.

M. Rachid Temal. Il s'agit d'un amendement d'appel, déposé sur l'initiative de ma collègue Gisèle Jourda. Il nous faut protéger les emprises militaires et les entreprises stratégiques de notre BITD – c'est un enjeu d'actualité. Nous souhaitons à cette fin renforcer les crédits de la DRSD au sein du programme 212. Nous aurons ce débat plus en détail à l'occasion de l'actualisation de la LPM.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, mais il me pose tout de même un petit problème de principe. Il n'est jamais bon de prélever des crédits sur le programme 146 « Équipement des forces », qui est toujours mis à contribution. (M. Rachid Temal en convient.)

Pour cette seule raison, cher ami, je suis obligé de vous inviter à vous retirer l'amendement, alors que j'aimerais vraiment pouvoir vous donner satisfaction ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. J'ai bien entendu que nous aurions un débat sur le rôle et les missions de la DRSD, de la DGSE et de la direction du renseignement militaire (DRM). Donnons-nous donc rendez-vous pour ce débat ; en attendant, je ne doute pas que vous acceptiez de retirer cet amendement.

M. Rachid Temal. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° II-2327 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-1457 rectifié, présenté par MM. Le Gleut et Anglars, Mmes Bellurot et Berthet, MM. J.B. Blanc, Brisson, Bruyen et Delia, Mme Di Folco, MM. Frassa et Genet, Mme Gosselin, MM. Gremillet, Khalifé et H. Leroy, Mme Malet et MM. Meignen, Panunzi, Paul, Rietmann et Saury, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

5 000 000

 

5 000 000

 

Préparation et emploi des forces

 

5 000 000

 

5 000 000

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 

 

 

 

Équipement des forces

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000

5 000 000 

5 000 000

5 000 000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. Ronan Le Gleut.

M. Ronan Le Gleut. L'objet de cet amendement d'appel est de faciliter les travaux de recherche de l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) qui concernent spécifiquement l'équipement de nos forces et les armes de dissuasion ; il s'agit notamment de travaux portant sur les drones, sur les moyens de renseignement et de lutte contre les capacités spatiales adverses – images hyperspectrales, surveillance de la terre – et sur la cybersécurité, avec l'intelligence artificielle et la connectivité.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Le budget de l'Inria relève plutôt du programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » de la mission « Recherche et enseignement supérieur », mais rien n'interdit à cet organisme de répondre à des appels d'offres qui seraient lancés par le ministère des armées.

Je vous invite donc à retirer votre amendement, mon cher collègue.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Le ministère des armées sera évidemment ravi de travailler avec l'Inria, qui est un acteur majeur de la recherche dans notre pays.

Pour le reste, comme le budget de cet institut ne relève pas de mon ministère, je laisse le ministère chargé de la recherche gérer les aspects financiers et sollicite par conséquent le retrait de cet amendement.

M. Ronan Le Gleut. Je le retire !

Mme la présidente. L'amendement n° II-1457 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-2051, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 2 000 000

 

  2 000 000

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 2 000 000 

  2 000 000

Équipement des forces

 

 

TOTAL

 2 000 000

 2 000 000

 2 000 000

 2 000 000

SOLDE

 0

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. La tolérance zéro contre les violences sexistes et sexuelles n'est pas négociable, quelle que soit l'institution. Je sais que les armées veulent progresser sur le sujet.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Je confirme que les armées veulent faire des progrès sur le sujet et que cela commence à se traduire dans les faits. Pour autant, je ne suis pas certain qu'il faille modifier les imputations budgétaires à ce stade pour aller dans ce sens.

C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. En 2024, nous avons eu 400 signalements pour des faits de violences sexistes et sexuelles contre 226 en 2023 ; on compte la même année 256 saisines du procureur au titre de l'article 40 contre 50 en 2023, 190 plaintes judiciaires par la victime contre 104 en 2023 et 70 suspensions contre 4 en 2023.

Oui, clairement oui à la libération de la parole et à la vigilance du ministère ! Simplement, ce n'est pas un enjeu budgétaire. C'est la raison pour laquelle je vous remercie de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2051.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2050, présenté par Mme Gréaume, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense

 

 

 

 

Préparation et emploi des forces

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défense

dont titre 2

 1 000 000

 

 1 000 000 

 

Équipement des forces

 

  1 000 000

 

 1 000 000 

TOTAL

 1 000 000 

 1 000 000 

 1 000 000 

 1 000 000  

SOLDE

 0

 0

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique de Legge, rapporteur spécial. Ce sera une demande de retrait, pour les mêmes raisons que pour l'amendement précédent.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. Il est identique à celui de la commission, pour les mêmes raisons de fond.

Je précise qu'il existe dix-huit formations à l'égalité professionnelle au sein de l'académie des ressources humaines, où vingt et une formations à la prévention des violences sexistes et sexuelles sont également dispensées. Nous devons continuer dans la même logique.

Je vous remercie en tout cas, madame la sénatrice, de mettre en avant des faits qui sont totalement inacceptables.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2050.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je rappelle que la commission des finances est favorable à l'adoption de ces crédits.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J'appelle en discussion l'article 68, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Défense ».

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Article 68 (interruption de la discussion)

Article 68

Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validées les décisions de rejet des demandes tendant à obtenir le versement, au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2016 et le 19 avril 2023, de l'allocation spéciale prévue par le décret n° 89-755 du 18 octobre 1989 pour les ingénieurs civils de la défense ou de l'indemnité de fonctions techniques prévue par le décret n° 89-752 du 18 octobre 1989 pour les techniciens supérieurs d'études et de fabrications, en tant que leur légalité serait contestée au motif que les dispositions précitées n'ont été abrogées qu'à compter du 20 avril 2023.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 68.

(L'article 68 est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Défense ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures,

est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Didier Mandelli.)

PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article 68 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Discussion générale

5

Mise au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa.

M. Laurent Burgoa. Monsieur le président, hier, lors du scrutin n° 112 sur les amendements identiques nos II-25 et II-1284, mes collègues Elsa Schalck et Nadine Bellurot souhaitaient voter contre.

M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin concerné.

6

Article 68 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2026
Après l'article 78 (début)

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.

Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Médias, livre et industries culturelles

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » (et article additionnel après l'article 78) et du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public ».

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour débattre des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public ».

Je commencerai mon propos par les crédits de la mission, qui s'élèvent à 707,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 690,2 millions d'euros en crédits de paiement, soit respectivement une diminution de 2,8 % et de 4,1 % par rapport à 2025.

Une grande part de cette diminution est absorbée par le soutien aux radios locales. Le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), qui aide 750 radios associatives non commerciales, bénéficiait en 2024 de 35 millions d'euros.

La baisse prévue devait être encore plus sévère que celle qui a été envisagée en 2025, avant le vote par notre assemblée d'une rallonge, conservée dans le texte final de la loi de finances pour 2025. Mais par un prompt renfort, près d'une quinzaine d'amendements visent à accroître les crédits du FSER en arrivant au port, pour des montants compris entre 2,3 millions et 18 millions d'euros.

Je pense que nous sommes tous ici très attachés au soutien aux radios locales, mais, à cet instant, je ne voudrais pas préempter le débat à venir sur ce point. Je crois d'ailleurs, madame la ministre, que vous êtes parfaitement consciente des enjeux.

Au-delà des radios, la moitié des crédits de la mission est fléchée vers le soutien à la presse écrite. Les aides à la presse diminuent de 6 % par rapport à 2025 dans la proposition du Gouvernement. L'essentiel de cette diminution devrait porter sur les aides à la modernisation des diffuseurs de presse, tandis que les aides à la distribution augmentent.

Madame la ministre, cela n'est malheureusement pas à la hauteur de la nécessaire remise à plat totale des aides à la presse ; cette remise à plat, chère à Michel Laugier, est nécessaire au vu de la transformation du secteur.

En outre, la présente mission finance l'Agence France-Presse (AFP) à hauteur de 143 millions d'euros en 2025. L'AFP a connu une situation financière très difficile au cours des dernières années. Les choses se sont quelque peu améliorées, mais cette agence a été particulièrement fragilisée cette année. De surcroît, elle doit faire face à la transformation numérique, en particulier au développement de l'intelligence artificielle (IA).

En conséquence, l'AFP a engagé un plan d'économies de 12 millions d'euros cet été, auquel l'autorité de tutelle et le Parlement devront être particulièrement vigilants.

La mission contient également une partie des crédits de l'État en faveur du livre et de la lecture. Pour 2026, l'enveloppe destinée à la Bibliothèque nationale de France (BNF) s'établit à 248,2 millions d'euros en crédits de paiement.

La BNF devrait cependant faire face à de très grandes difficultés en matière d'investissement au cours des prochaines années. En effet, le coût global de la rénovation complète de son emprise principale, devenu vétuste, est évalué entre 500 millions et 600 millions d'euros. Cela a de quoi nous interroger, sachant que ce bâtiment n'est vieux que de trente ans.

Enfin, deux autres opérateurs sont rattachés à la mission : le Centre national de la musique (CNM) et le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC).

Concernant le premier, la baisse de sa dotation budgétaire est compensée par le dynamisme de ses deux taxes affectées. Le rendement de la taxe streaming, adoptée sur l'initiative de notre commission il y a deux ans, a dépassé le plafond prévu pour atteindre 20 millions d'euros.

Quant au CNC, il est financé non par des crédits budgétaires, mais par des taxes affectées. Son budget a évolué de manière quasiment incontrôlée au cours des dernières années. En effet, en dix ans, les recettes du CNC ont augmenté de 25 %, ce qui lui offre 168 millions d'euros supplémentaires. En parallèle, sur la même période, la dépense fiscale a augmenté de 275 % pour le crédit d'impôt audiovisuel et de 108 % pour le crédit d'impôt cinéma.

Enfin, les dépenses consenties au titre du fonds de soutien au CNC devraient atteindre 810,3 millions d'euros en 2026, soit 16 % de plus qu'en 2019.

L'inspection générale des finances (IGF) a déjà proposé plusieurs pistes de maîtrise des aides au cinéma. Aucune d'elles ne devrait prospérer dans l'immédiat, mais il est toujours permis de penser, madame la ministre, que ces propositions nourriront des réformes futures.

J'en viens au financement de l'audiovisuel public. Nous avons finalement adopté, en fin d'année dernière, la loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public. Celle-ci a modifié la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) de manière à permettre aux sociétés d'audiovisuel public de bénéficier de l'affectation d'un montant d'impôt d'État.

En d'autres termes, cela a pérennisé le système antérieur d'une affectation de TVA. Considérant qu'une baisse des crédits de l'audiovisuel public était légitime afin d'assurer la participation de celui-ci à l'assainissement de la situation budgétaire nationale, le Sénat a adopté, l'année dernière, un amendement visant à opérer une réduction de crédits de 80 millions d'euros.

Le montant prévu pour 2026 serait inférieur de 1,8 % au montant accordé en 2025, ce qui représente une nouvelle baisse de 70 millions d'euros. Le Sénat a validé ce montant d'économies en adoptant, en première partie, l'article 36 de ce projet de loi de finances sans modification.

France Télévisions devrait ainsi supporter 65 millions des 70 millions d'euros demandés en 2026.

Nous avons tous entendu parler du récent rapport de la Cour des comptes sur France Télévisions et des constats alarmants qui y figurent sur la situation financière de l'entreprise.

Mes chers collègues, la seule piste d'économies durables est celle d'une réorganisation générale de l'audiovisuel public français !

Nous connaissons tous ici le parcours pour le moins sinueux de la réforme de l'audiovisuel que vous défendez, madame la ministre, à partir d'une initiative de notre assemblée. Je demeure persuadé que cette réforme est impérative pour permettre à l'audiovisuel public de faire enfin face aux défis actuels.

Pour l'ensemble de ces raisons, la commission des finances est favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme je ne dispose que de trois minutes pour m'exprimer, je ne perdrai pas de temps et commencerai par lever un suspense insoutenable (Sourires.) : la commission des affaires étrangères est favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'audiovisuel public extérieur.

Cela dit, je peux exprimer mon mécontentement, madame la ministre, ou plus précisément mon sentiment mitigé vis-à-vis de ces crédits.

D'un côté, je me réjouis que France Médias Monde se voie octroyer 8 millions à 9 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière.

De l'autre, je suis mécontent de voir que le budget alloué à TV5 Monde reste parfaitement stable, à hauteur de 84 millions d'euros.

Pour rappel, l'audiovisuel public extérieur est sous la double tutelle du ministère de la culture et du ministère des affaires étrangères. Nombre de personnes que nous avons entendues en commission n'ont cessé de nous dire qu'une guerre informationnelle était livrée à la France et que nous devions nous défendre.

Or j'observe que des pays comme la Russie, la Turquie et la Chine accordent à leur audiovisuel public extérieur des crédits très supérieurs aux nôtres. Au total, TV5 Monde et France Médias Monde reçoivent un peu moins de 400 millions d'euros, soit environ 10 % à 15 % des budgets alloués par la Chine ou la Russie.

Comment peut-on nous demander de mener cette guerre informationnelle et d'être présents en Afrique, en Asie et en Amérique latine via l'audiovisuel public extérieur, si l'on ne nous donne pas les moyens d'accomplir ces efforts ?

Je vous le dis d'emblée, madame la ministre : je ne voudrais pas, comme l'année dernière ou celle d'avant, qu'on déshabille France Télévisions de 1 million ou 2 millions d'euros, alors que ce groupe accuse déjà une baisse de crédits, pour rehausser le budget de France Médias Monde.

En revanche, je souhaite que soit engagée une véritable réforme de l'audiovisuel public extérieur. Un accord doit être trouvé entre les deux ministères de tutelle pour que l'on puisse, grâce à l'octroi de crédits supplémentaires, mener cette guerre informationnelle avec un appareil extérieur puissant. Je n'exclue pas que cet effort repose sur les crédits du ministère des affaires étrangères.

France Médias Monde est menacée, si nous n'y prenons garde, de fermer son antenne espagnole située à Bogota. En outre, l'État refuse à TV5 Monde la rénovation de ses studios ; cela ne coûterait que 10 millions d'euros, mais cette somme manque à la chaîne.

On voit bien qu'on nous demande de faire beaucoup pour l'audiovisuel public extérieur avec des moyens trop limités, dans un contexte de compétition et de concurrence.

C'est la raison pour laquelle la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées appelle à une vraie réforme de l'audiovisuel public extérieur. Il faudrait sans doute procéder à un regroupement des médias et lancer une étude sur des modes de financement différents, de sorte que l'audiovisuel public extérieur demeure puissant et puisse même se renforcer face à nos concurrents.

Par ailleurs, j'ai dit aux présidentes de France Médias Monde et de TV5 Monde qu'un peu plus de contrôle déontologique ne nuirait pas.

Je reconnais qu'un tel contrôle est difficile à mener pour France Médias Monde, qui propose ses programmes en trente langues différentes. Toutefois, je déplore les dérapages qui sont survenus, malgré l'action des directions de deux chaînes. Bref, je vous fais confiance, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Mireille Jouve, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après la présentation de la trajectoire budgétaire de France Médias Monde et de TV5 Monde par mon collègue rapporteur pour avis Roger Karoutchi, permettez-moi de revenir sur la situation de chacune de ces entreprises.

France Médias Monde est confrontée tout d'abord à un problème de financement de sa stratégie numérique. Le programme 848 « Programme incitatif de transformation », qui devait y contribuer à hauteur de 3 millions d'euros en 2026, est certes maintenu, mais il ne bénéficie d'aucune hausse de crédits. Il lui faudrait pourtant 5 millions d'euros supplémentaires d'ici à 2028.

En outre, la suspension des crédits de l'audiovisuel public américain, décidée par l'administration Trump, pourrait avoir des incidences sur une centaine de radios africaines partenaires de Radio France Internationale (RFI).

En réponse, France Médias Monde et la Deutsche Welle (DW) ont élaboré un « bouclier informationnel » pour développer des programmes de substitution aux programmes américains.

Enfin, France Médias Monde envisage de développer son hub à Bucarest afin de diffuser des programmes en moldave et de déployer des offres en arménien, en géorgien et en russe.

Quant à TV5 Monde, cette chaîne met en œuvre son plan stratégique pour les années 2025-2028, avec pour priorité une hyperdistribution ciblée et un renouvellement de ses programmes.

En outre, elle réussit à développer ses audiences en Afrique du Nord, grâce à la réception par satellite, et renforce ses liens avec le Maroc, qui pourrait envisager une adhésion. Elle est toutefois encore confrontée à des coupures de signal dans certains pays, comme le Mali et le Burkina Faso.

C'est dans ce contexte que se pose la question de l'élargissement de sa gouvernance à plusieurs pays africains. Depuis 2024, les échanges se sont intensifiés avec le Bénin, le Cameroun, le Congo, la Côte d'Ivoire, le Gabon, la République démocratique du Congo (RDC) et le Sénégal.

À contre-courant de cet élargissement, TV5 Monde est confrontée, en Europe, au risque de départ de la Suisse. En effet, le Conseil fédéral a décidé, le 19 septembre 2025, de la fin de la contribution suisse à TV5 Monde à compter de 2029.

Cela priverait la chaîne de 8 millions d'euros et réduirait de 11 % les programmes d'antenne et de 21 % les programmes disponibles sur plateforme. Ce précédent serait de nature à fragiliser le modèle de la chaîne internationale francophone.

En conclusion, le pire a sans doute été évité pour 2026 concernant les moyens de l'audiovisuel public extérieur, mais nous sommes loin de disposer, à l'avenir, de toutes les garanties nécessaires.

Comme Roger Karoutchi, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 844, 847 et 848, tout en indiquant qu'un sursaut reste indispensable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette année encore, les perspectives économiques de la presse sont plutôt sombres. Certes, l'année 2024 a été marquée par un freinage de la baisse des ventes, du fait notamment des jeux Olympiques et de l'actualité politique.

Mais la réalité est brutale : en vingt ans, les recettes que la presse tire des ventes ont diminué de moitié ; celles qu'elle tire de la publicité, des deux tiers. L'équilibre économique de la presse, garant de sa liberté, est donc menacé. Le papier, qui reste rentable, se vend de moins en moins, tandis que le numérique se développe, mais rapporte peu.

S'y ajoute une crise de l'information journalistique, concurrencée par des formes de communication numériques de plus en plus diverses et, parfois, par la désinformation.

Face à cette situation, les aides publiques restent indispensables. Or le PLF 2026 prévoit une diminution globale de 5,8 % des crédits destinés à la presse.

Au-delà des chiffres, la question est de savoir si la ventilation des aides favorise l'adaptation de la presse à ce contexte hostile. Ce n'est que partiellement le cas.

Certes, une réforme de l'aide à la distribution est engagée, ce dont nous nous félicitons. Elle passe par la fin de l'aide directe fléchée vers France Messagerie, entreprise dont les résultats confortables nous interrogent.

Surtout, un contrat de modernisation de la distribution, encourageant des mutualisations, a été proposé ; il s'accompagnerait d'un élargissement des bénéficiaires de l'aide à la distribution.

Cependant, dans ce contexte, le sort du fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) est inquiétant. Alors qu'il constitue le seul outil transformatif de la presse, le PLF 2026 l'ampute de 20 %. La commission défendra donc un amendement visant à rétablir ses crédits.

L'Agence France-Presse, après avoir retrouvé son équilibre, traverse une nouvelle crise. Elle a perdu beaucoup de financements à la suite d'une conjonction d'événements défavorables, dont des ruptures brutales de contrats avec l'administration américaine et Meta. Dans ces conditions, elle est contrainte d'engager un nouveau plan d'économies.

L'année 2026 sera cruciale pour ce fleuron français de l'information. C'est la raison pour laquelle nous devons être très attentifs à la réussite de ce plan.

Enfin, la presse doit affronter deux chantiers numériques majeurs, à commencer par la négociation de nouveaux accords sur les droits voisins avec les plateformes, qui se révèle extrêmement difficile dans le contexte politique américain actuel. Ces entreprises n'attribuent spontanément aucune valeur au contenu des éditeurs ; les tribunaux les y obligeront peut-être avec le temps, mais il faut pouvoir agir rapidement.

Deuxième chantier : l'intelligence artificielle, qui dépouille de leurs contenus les éditeurs de presse. Des avancées, au besoin législatives, sont nécessaires pour y remédier : la commission de la culture et le Sénat dans sa globalité y prendront leur part.

Je veux en conclusion souligner la nécessité de préserver les crédits du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale. Les radios associatives sont essentielles à la démocratie ; on le ressent plus encore à l'approche des municipales.

Voilà pourquoi la commission de la culture a déposé un amendement visant à rétablir ces crédits au niveau de 2025. Sous le bénéfice de ces observations, elle est favorable à l'adoption des crédits de la presse pour l'année 2026.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Mme Mireille Jouve applaudit.)

M. Jérémy Bacchi, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après une année 2024 marquée par de grands succès français en salles, l'année 2025 s'achève sur une forte baisse de la fréquentation des cinémas. En effet, depuis le 1er janvier 2025, on n'a comptabilisé que 135 millions d'entrées, soit 16 % de moins qu'en 2024, ce qui traduit le taux de fréquentation le plus bas de ces vingt-cinq dernières années.

Deux éléments plaident pour l'hypothèse d'un simple trou d'air. D'une part, on note l'absence de blockbusters américains, conséquence différée de la grève des scénaristes d'Hollywood. D'autre part, côté français, aucune locomotive comparable aux succès majeurs de 2024 – je pense à Un p'tit truc en plus et au Comte de Monte-Cristo – n'a été produite en 2025.

Dans une hypothèse pessimiste, il faut tenir compte de tendances plus structurelles, comme le basculement durable du public vers les plateformes ou une prudence accrue envers les dépenses de loisirs.

La baisse de fréquentation des cinémas affecte durement les exploitants, qui étaient déjà confrontés à une hausse de charges et sont souvent endettés.

Le CNC a réagi par une augmentation de 5 millions d'euros du soutien à l'exploitation et par une avance accordée à plus de 70 petits exploitants. Cette opération a été rendue possible par la bonne santé financière de l'institution, qui ne sera pas affectée par la nouvelle ponction de 50 millions d'euros prévue dans le PLF.

Toutefois, la récurrence de ce prélèvement pourrait donner des arguments aux plateformes américaines soumises aux taxes affectées, qui aimeraient peut-être déstabiliser notre système.

Par ailleurs, j'appelle votre attention sur l'amendement relatif à la taxe sur la publicité adopté par le Sénat en première partie, qui aura pour conséquence de réduire les ressources du CNC dès 2026 et risque de produire des effets indésirables en matière d'optimisation fiscale.

En revanche, nous nous félicitons que les amendements tendant à prolonger le crédit d'impôt international aient été adoptés par notre assemblée, car cet outil a prouvé son efficacité.

Enfin, quatre sujets d'actualité seront à suivre attentivement en 2026.

Je pense en premier lieu au rachat partiel d'UGC par Canal+. On peut y voir un signal positif pour l'exploitation. Cependant, nous devons veiller, de manière générale, à ce qu'une concentration accrue n'aboutisse pas à une réduction de la diversité artistique, notamment pour les films dits « du milieu ».

Deuxièmement, la chronologie des médias est contestée devant le Conseil d'État par Netflix et Amazon, qui souhaitent avancer leurs fenêtres d'exploitation à douze mois. Espérons qu'un compromis soit trouvé pour préserver l'équilibre économique de toute la filière.

Troisièmement, la formation obligatoire des équipes de tournage aux violences sexuelles et sexistes est effective depuis le 1er février 2025 et conditionne désormais l'accès aux aides du CNC. Il s'agit d'une évolution positive, dont l'efficacité devra être évaluée à moyen terme.

Quatrièmement, face aux difficultés actuelles du cinéma d'animation français, le CNC a révisé le décret relatif aux services de médias audiovisuels à la demande (Smad), pour créer une obligation de financement des films d'animation.

En pleine période d'évaluation à Bruxelles de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA), il sera capital, madame la ministre, de soutenir avec force dès 2026 ce texte auprès des institutions européennes, car il prévoit un mécanisme vertueux de financement de la création audiovisuelle.

Compte tenu de ces éléments, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du cinéma pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les industries culturelles ont globalement retrouvé leur chiffre d'affaires d'avant-crise, mais la situation est en réalité contrastée selon les secteurs.

La presse, le cinéma et la radio restent en retrait par rapport à 2019. En revanche, les vidéos progressent fortement, grâce aux plateformes américaines. La musique enregistrée, quant à elle, prospère grâce au streaming. Enfin, le jeu vidéo, bien que dominant sur le plan du chiffre d'affaires, enregistre un léger recul. Il s'agit toutefois d'un secteur où la France reste très bien positionnée à l'échelle mondiale, notamment grâce à son crédit d'impôt.

Participant à l'effort de maîtrise des déficits, les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » sont en baisse de 2,1 %. Premier opérateur du programme par son budget, la BNF est confrontée à l'obsolescence et à la dégradation du site François-Mitterrand, qui fête ses trente ans cette année.

L'enveloppe pour conduire les travaux indispensables a été chiffrée à 600 millions d'euros. Force est de constater que les crédits inscrits au PLF ne sont pas de cet ordre de grandeur, madame la ministre !

Ainsi, quel plan d'investissement envisagez-vous pour faire face à ce défi ? Pourra-t-on éviter la fermeture du site si l'on veut réaliser ces travaux avant 2030 ?

J'en viens à la question du financement du CNM, qui, six ans après sa création, prend aujourd'hui toute sa place. Le PLF 2026 prévoit une bascule de la dotation de l'État, qui se trouve réduite de 26 millions à 20 millions d'euros, tandis que le plafond des deux taxes affectées est rehaussé de 8 millions d'euros.

Cette opération permet de maintenir le volume global des ressources du CNM, tout en limitant l'écrêtement par l'État, ce dont nous nous félicitons. Toutefois, des questions se posent sur le champ de compétences de l'opérateur, en lien avec la baisse de la dotation. Des réflexions sont-elles engagées sur ce sujet, madame la ministre ?

Enfin, je voudrais souligner que le monde de l'édition est particulièrement préoccupé par l'IA générative. Un recours en justice a été formé contre Meta pour l'utilisation d'une base de données de près de 200 000 livres piratés : des milliers de faux livres sont ainsi écrits par des IA et vendus à vil prix sur des plateformes bien connues.

Dans ce contexte, les éditeurs réclament une plus grande transparence de la part des plateformes, pour pouvoir mieux exercer leurs droits à l'échelon européen. Les choses n'évoluent pas nécessairement dans le sens que nous souhaiterions. Aussi le Sénat devra-t-il être particulièrement vigilant sur ce point au cours de l'année qui vient.

En conclusion, les crédits budgétaires du programme 334 pour 2026 contribuent à l'effort de modération des finances publiques, tout en tenant compte des grands défis du secteur.

Les opérateurs pourront poursuivre leur rôle d'animation et de soutien ; s'y adjoindront des initiatives ministérielles pertinentes dans le domaine de la ruralité et de la lecture pour la jeunesse.

Nous nous félicitons à cet égard du déblocage de 7 millions d'euros pour la Maison du dessin de presse, dont l'ouverture est confirmée pour 2027 – nous vous en remercions, madame la ministre.

Compte tenu de ces éléments, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » pour 2026.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Laure Darcos applaudit également.)

M. Cédric Vial, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui un moment de vérité pour notre audiovisuel public.

Derrière les chiffres et les tableaux budgétaires, c'est une question de cohérence, de responsabilité et de vision qui se pose à nous : quelle place, quel rôle et surtout quel avenir donnons-nous à un service public audiovisuel qui se trouve à la croisée des chemins ?

Dans une société traversée par les tensions, la rapidité de la circulation de l'information et, parfois, sa déformation, l'audiovisuel public reste un référentiel commun indispensable.

La Cour des comptes l'a rappelé dans son rapport de septembre 2025, tout en soulignant la fragilité du modèle économique de France Télévisions et la lenteur des transformations attendues. L'inspection générale des finances appelait déjà, en 2024, à une véritable culture de l'efficience. Ces constats demeurent plus que jamais d'actualité.

Les crédits qui nous sont soumis traduisent un effort significatif. En effet, après une coupe de 78 millions d'euros en 2025, une nouvelle baisse de 71 millions intervient en 2026.

À cet égard, voici la première idée forte que je souhaite défendre : l'audiovisuel doit participer à la maîtrise de la dépense publique, mais il ne peut plus subir de coupes imprévues en cours d'année.

Grâce à la loi portant réforme du financement de l'audiovisuel public, que notre Haute Assemblée a adoptée et dont j'ai eu l'honneur d'être l'auteur, les crédits que nous examinons aujourd'hui sont désormais définitifs. Ainsi, aucune coupe infrabudgétaire ne pourra venir déstabiliser les entreprises du secteur : c'est un progrès majeur pour la sécurité, la sincérité et la responsabilité.

La deuxième idée forte que je veux exprimer est tout aussi essentielle : les économies doivent reposer d'abord sur des réformes structurelles et non sur les programmes. Or, faute d'avoir anticipé certaines évolutions, France Télévisions envisagerait un plan d'économies qui pourrait peser très fortement sur la création des programmes de flux audiovisuels ou de cinéma.

Comme le rappelait Malraux, « la culture ne s'hérite pas, elle se conquiert ».

M. Cédric Vial, rapporteur pour avis. Nous ne pouvons accepter que les économies se fassent essentiellement au détriment de ceux qui la créent. Puisque les programmes, la création, l'information et la culture sont la raison d'être de l'audiovisuel public, ce n'est pas sur eux que doit porter l'essentiel de l'effort.

M. Cédric Vial. Les réformes structurelles – qu'il s'agisse de moderniser le cadre social, de rapprocher les réseaux de France 3 et de France Bleu, ou de renforcer les synergies entre opérateurs – doivent désormais s'accélérer et être menées avec détermination.

Enfin, troisième idée forte : l'État doit retrouver la main, fixer un cap et définir un périmètre clair. Depuis 2019, la réforme de la gouvernance est annoncée sans jamais aboutir. Les contrats d'objectifs et de moyens (COM) manquent toujours.

Cette absence de cap fragilise les décisions des entreprises publiques, qui avancent sans visibilité sur leur organisation future ou le périmètre attendu de leurs missions. Il faudra, tôt ou tard, redéfinir les priorités et le périmètre de l'audiovisuel public. Ce débat devra être assumé lucidement et collectivement.

Pour reprendre la pensée de Paul Valéry (Ah ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.),…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Que de références !

M. Cédric Vial. … le problème de notre temps est non pas l'absence de solutions, mais l'absence de direction. Mes chers collègues, il est temps de redonner, collectivement, cette direction.

L'audiovisuel public doit contribuer, comme tout service public, à l'effort national, mais il doit le faire en s'appuyant sur trois principes : la vérité budgétaire, la priorité aux réformes structurelles et le retour d'une vision stratégique de l'État.

Parce que ces crédits pour 2026 traduisent un effort à la fois important et maîtrisé, parce qu'ils offrent, enfin, une stabilité de financement indispensable et parce qu'ils doivent inciter les entreprises publiques à engager les transformations attendues, la commission de la culture se montre favorable à leur adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Organisation des travaux

M. le président. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour votre bonne information, que 41 amendements sont à examiner sur cette mission.

La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quinze. Compte tenu de l'organisation de la journée, nous pourrions prévoir trente minutes de discussion supplémentaire, ce qui nous ferait terminer son examen aux alentours de dix-sept heures quinze, heure à laquelle il nous faudrait passer à l'examen de la mission « Santé ».

Si nous ne pouvions y parvenir, conformément à l'organisation de nos travaux arrêtée par la conférence des présidents, et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission serait reportée à la fin des missions appelées en discussion cette semaine.

En outre, la conférence des présidents, réunie mercredi 3 décembre, a décidé que, lorsque le nombre d'amendements déposés ne paraît pas pouvoir garantir leur examen serein dans les délais impartis, les temps de parole seraient fixés, sur proposition de la commission des finances, à une minute.

Concernant la présente mission, le nombre d'amendements déposés, rapporté à la durée dont nous disposons aujourd'hui, nous conduit à observer un rythme d'examen, élevé, de 38 amendements par heure.

Aussi, afin de nous donner toutes les chances de terminer aujourd'hui l'examen de cette mission, les durées d'intervention seront fixées, en application de la décision de la conférence des présidents, à une minute.

Médias, livre et industries culturelles (suite)

Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public (suite)

M. le président. Dans la suite de notre discussion, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Monsieur le rapporteur spécial, je prends votre remarque sur notre proposition de prélever les crédits sur l'AME comme un trait d'humour. Il ne vous aura évidemment pas échappé que nous avons invité le Gouvernement à lever le gage. Vous connaissez comme nous les contraintes liées aux amendements que nous déposons sur les missions.

Pour ma part, je connais votre sens de l'humour... (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1683.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-377 rectifié ter, présenté par MM. Théophile, Rambaud et Buis, Mme Phinera-Horth, M. Mohamed Soilihi, Mme Nadille, MM. Iacovelli et Buval, Mme Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

5 000 000

 

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile vise à renforcer les moyens consacrés au réseau Maisons des femmes, qui est aujourd'hui l'un des derniers remparts pour des milliers de victimes de violences conjugales.

Les chiffres sont glaçants : 272 400 victimes en 2024 et déjà 89 féminicides conjugaux au 26 novembre 2025, soit une femme tuée tous les quatre jours. Pourtant, sur le terrain, les structures sont saturées, sous-financées et trop peu nombreuses. Les victimes se heurtent à un manque de places, à un manque de personnel formé et parfois même à l'impossibilité d'être accueillies en urgence, alors qu'il s'agit d'un risque vital.

Par cet amendement, nous proposons d'ajouter 5 millions d'euros au programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », pour renforcer le réseau Maisons des femmes et garantir un accompagnement médical, psychologique, social et juridique digne de ce nom.

Il ne s'agit pas d'un luxe : c'est une nécessité absolue, celle de protéger des vies, de prévenir des drames et d'éviter que des femmes en danger ne soient replongées dans l'insécurité par manque de moyens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement vise à allouer 5 millions d'euros au réseau Maisons des femmes, qui est une association importante œuvrant pour une cause qui ne l'est pas moins. Toutefois, son financement me paraît relever davantage de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » que de la mission « Santé ».

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'appeler notre attention sur ces maisons d'accueil pour les femmes victimes de violences.

Notre pays compte environ 120 Maisons des femmes. Un budget pérenne de 18,7 millions d'euros, inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, est alloué à ce réseau.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un défavorable.

M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-377 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Martin Lévrier. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-377 rectifié ter est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1228 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000

 

5 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

5 000 000

 

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis.

M. le président. L'amendement n° II-1235 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

2 000 000

 

2 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

2 000 000

 

2 000 000

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Martin Lévrier. Ces deux amendements ont pour objet les maisons sport-santé (MSS), qui sont devenues un outil majeur de prévention. Depuis 2020, 872 000 personnes y ont déjà été accompagnées dans le cadre de la lutte contre le diabète, l'obésité, le cancer ou les maladies cardiovasculaires.

Pourtant, le modèle économique de ces structures est aujourd'hui fragilisé, faute de financement pérenne. Les équipes sont en contrat à durée déterminée (CDD) et il existe des disparités régionales très marquées.

L'amendement n° II-1228 rectifié bis vise à créer une dotation « socle » nationale permettant de financer un coordinateur, un système d'information sécurisé et un fonctionnement stable pour chaque MSS. Pour garantir un accès équitable à la prévention, l'investissement demandé est de 5 millions d'euros, soit environ 9 000 euros par établissement.

L'amendement n° II-1235 rectifié bis vise quant à lui à soutenir les publics les plus éloignés de la prévention, comme les personnes âgées isolées, les populations précaires, les habitants des zones rurales, insulaires ou enclavées, les personnes en situation de handicap ou les jeunes en décrochage. Alors que ce sont eux qui cumulent le plus de facteurs de risque, ils bénéficient le moins des dispositifs existants.

Les maisons sport-santé veulent agir davantage auprès de ces publics, mais elles manquent de moyens pour organiser des actions d'« aller vers », pour intervenir dans les structures sociales ou médico-sociales ou pour couvrir de vastes territoires mal desservis.

Il convient donc d'augmenter de 2 millions d'euros les crédits permettant de financer ces actions ciblées.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Le financement des maisons sport-santé relève aussi bien de l'État que des collectivités territoriales.

Le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative abonde de 6,5 millions d'euros le budget du dispositif et les agences régionales de santé le font également via le fonds d'intervention régionale (FIR), pour un montant de 10 millions d'euros.

D'une part, le financement du FIR relève de la sécurité sociale et non de la mission « Santé » ; d'autre part, le financement par l'État des maisons sport-santé est déjà passé de 9,3 millions d'euros en 2024 à 16,5 millions d'euros en 2025, soit un effort non négligeable en période budgétaire contrainte.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Lévrier, les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis sont-ils maintenus ?

M. Martin Lévrier. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos II-1228 rectifié bis et II-1235 rectifié bis sont retirés.

L'amendement n° II-1234 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Rambaud, Buis et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

3 000 000

 

3 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

3 000 000

 

3 000 000

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Depuis 2016, l'activité physique sur ordonnance est un outil reconnu au service des personnes souffrant de maladies chroniques. Toutefois, faute de financement, les bilans médicaux nécessaires – un bilan initial, un autre après trois mois et un dernier après six mois – sont réalisés de manière très inégale selon les territoires, ce qui crée une rupture d'égalité dans l'accès à la prévention.

Cet amendement vise à allouer 3 millions d'euros pour financer ces bilans de manière homogène dans toutes les maisons sport-santé. Plus de 210 000 usagers sont concernés chaque année et l'activité physique adaptée peut réduire jusqu'à 30 % le risque de complications.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Comme je l'ai indiqué précédemment, le financement des maisons sport-santé ne relève pas de la mission « Santé ». De plus, il a été significativement augmenté entre 2024 et 2025. Par ailleurs, la normalisation de trois bilans associés à l'activité physique adaptée paraît relever davantage d'une réglementation à mettre en œuvre que d'une problématique budgétaire.

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Le Gouvernement soutient les maisons sport-santé tout comme le développement de l'activité physique adaptée, notamment au travers des parcours coordonnés renforcés et de l'« Article 51 », dispositif qui permet de financer cette politique. Nous poursuivrons dans cette voie.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1234 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Martin Lévrier. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-1234 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° II-2072 rectifié, présenté par MM. P. Joly, Bourgi et Uzenat, Mmes Harribey, Linkenheld, Poumirol et Le Houerou, MM. Ros, Fichet, M. Weber et Tissot, Mme Bélim, MM. Temal, Chaillou, Pla et Ziane et Mme Matray, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

2 000 000

 

2 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

2 000 000

 

2 000 000

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement de Patrice Joly a pour objet les difficultés de transport que rencontrent les patients résidant dans des déserts médicaux. Pour consulter leur médecin généraliste, ils doivent aller relativement loin de leur domicile.

Nous proposons donc que le transport soit pris en charge, sur le modèle de ce qui est prévu pour les patients en affection de longue durée (ALD), mais à titre expérimental et dans trois régions qui seraient définies par les agences régionales de santé (ARS).

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Une telle proposition relève plutôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) que de la mission « Santé ».

Mme Émilienne Poumirol. On a déposé le même amendement lors du PLFSS !

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Par ailleurs, d'autres solutions ont été mises en œuvre pour lutter plus structurellement contre les déserts médicaux, elles me paraissent préférables. En particulier, la loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation, que notre assemblée a adoptée au mois de juin dernier, me semble une réponse plus appropriée à ces difficultés.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Nous essayons de faire des petits pas pour avancer dans la lutte contre les déserts médicaux. Toutefois, depuis des années, nous voyons bien que les départements très dotés le sont de plus en plus et que les départements sous-dotés sont de plus en plus des déserts médicaux. Certains départements sont littéralement des déserts médicaux : c'est le cas de la Nièvre, le département de Patrice Joly .

Cette solution est donc proposée pour tenter de pallier les difficultés que rencontrent les patients dans ce secteur : ils doivent parcourir des kilomètres ne serait-ce que pour consulter un médecin généraliste.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement est pertinent. Certaines personnes en ALD ont perdu leur médecin généraliste, mais le nouveau qu'elles ont trouvé est très éloigné de leur domicile et elles rencontrent des difficultés pour se rendre à son cabinet, le transport n'est pas pris en charge dans ce cas.

Il s'agit donc d'un amendement d'appel, qui ne peut sans doute pas être financé dans le cadre de cette mission. Cependant, en milieu rural, certaines personnes ont des difficultés à se rendre chez le médecin, car il n'y a pas de transport en commun. Le problème peut donc se poser.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2072 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1425 rectifié bis, présenté par Mme Schillinger, MM. Lévrier, Buis et Rambaud, Mmes Cazebonne et Nadille et MM. Mohamed Soilihi, Iacovelli, Rohfritsch et Patient, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds pour la santé

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

 

 

 

Protection maladie

 

100 000

 

100 000

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

Fonds pour la santé

100 000

 

 

100 000

TOTAL

100 000

100 000

100 000

100 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Cet amendement a été déposé par Patricia Schillinger, dont chacun connaît l'engagement contre la précarité menstruelle et pour briser le tabou qui entoure les règles.

Sa proposition est au croisement de trois combats : l'égalité entre les femmes et les hommes, la reconnaissance des réalités vécues par les femmes au travail et le soutien que le Sénat doit aux collectivités territoriales.

Plusieurs d'entre elles ont voulu instaurer un congé menstruel ou gynécologique pour leurs agentes. Toutes ces décisions ont été annulées, faute de base légale. La circulaire du 21 mai 2025 a davantage encore verrouillé cette possibilité.

Pourtant, les besoins sont évidents. Une femme sur deux souffre de douleurs menstruelles graves, 14 % des salariées s'absentent régulièrement et la grande majorité des femmes ménopausées subissent des symptômes qui affectent leur quotidien. Ne pas reconnaître cette situation, c'est renvoyer les femmes vers l'arrêt maladie, les jours de carence ou la souffrance au travail. C'est une discrimination.

Par cet amendement, nous ne rendons rien obligatoire. Il s'agit simplement de permettre aux collectivités territoriales volontaires de délivrer des autorisations spéciales d'absence en cas de menstruation incapacitante ou de symptômes liés à la ménopause, en toute sécurité juridique. Pour cela, nous proposons un transfert purement formel de 100 000 euros vers un fonds dédié, pour lequel nous demandons la levée du gage.

Cet amendement vise à favoriser un outil de liberté locale, de santé publique et d'égalité. Je vous invite à l'adopter, mes chers collègues.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Mon cher collègue, il me semble que la difficulté légale que vous évoquez pour la mise en œuvre de ces autorisations d'absence était liée à l'absence de texte juridique en ce sens, difficulté levée a priori par une circulaire récente. Il ne s'agit donc pas tout à fait d'une problématique de nature financière.

Par ailleurs, une telle disposition a vocation à être financée par les collectivités territoriales qui font le choix de la mettre en œuvre, et non par le budget de l'État.

C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Monsieur le sénateur, je suis d'autant plus sensible au sujet que vous évoquez que, dans le rapport sur la ménopause que j'ai remis au gouvernement en fonction lorsque j'étais députée, j'ai proposé qu'un tel congé soit expérimenté afin d'en évaluer les effets. De mon point de vue, c'est la formation des managers à ce type de situation qui est susceptible d'éviter aux femmes d'être en arrêt maladie.

Néanmoins, il faudrait pouvoir le vérifier dans le cadre d'une expérimentation. Bien évidemment, les ressources humaines des collectivités territoriales ne relèvent pas du périmètre de la mission « Santé ».

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; sinon, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1425 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Martin Lévrier. Je souhaite faire une brève remarque avant de retirer cet amendement (Protestations sur des travées du groupe SER.) – à moins que je ne le maintienne, convaincu par nos collègues socialistes.

Quoi qu'il en soit, j'insiste sur le fait qu'une circulaire n'a pas de valeur juridique. Il faut donc rester très prudent.

Je maintiens donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. Je veux prolonger le débat que notre collègue a ouvert en défendant cet amendement.

Non seulement la circulaire n'a pas de valeur juridique, mais, à supposer qu'elle soit appliquée et respectée par les préfets, elle n'aurait également aucune force contraignante pour les tribunaux administratifs. Vous le savez, les collectivités territoriales qui ont tenté de mettre en œuvre un tel dispositif ont été censurées soit par les préfectures, soit par les tribunaux administratifs.

C'est la raison pour laquelle il nous faut aller plus loin, madame la ministre, même si ce n'est pas aujourd'hui. Il faut vraiment que vous nous aidiez, car de nombreuses femmes vivent et subissent une souffrance réelle dans un silence absolu. Cela mérite que nous puissions y consacrer un peu de temps et, surtout, que nous aboutissions à la mise en œuvre de propositions concrètes.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. L'amendement de Patricia Schillinger a l'avantage de rouvrir le débat au Sénat.

Je rappelle que nous avons examiné la proposition de loi visant à améliorer et garantir la santé et le bien-être des femmes au travail, en 2024. Nous savons donc à peu près ce qu'il faudrait faire. Il faut, premièrement, autoriser les certificats médicaux pour une durée d'un ou deux ans ; deuxièmement, supprimer le jour de carence pour les salariées du privé ; troisièmement, autoriser les collectivités locales qui le souhaitent à mettre en place ce dispositif.

Madame la ministre, je sais que vous n'êtes pas seulement sensible au sujet, mais que vous êtes aussi engagée. Nous attendons de vous que vous nous apportiez des solutions pour assouplir les règles qui pèsent à la fois sur les femmes travaillant dans les collectivités locales et sur les salariées du secteur privé.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1425 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1685, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

20 000 000

 

20 000 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

20 000 000

 

20 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Par cet amendement, nous proposons la création d'un fonds national de prévention de l'usage récréatif – selon le terme consacré – du protoxyde d'azote, doté de 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour 2026.

Il serait trop long de rappeler tous les drames qui se sont produits, ces derniers temps, à la suite de l'utilisation du protoxyde d'azote, ainsi que les nombreuses alertes que lancent les hôpitaux comme les Samu (services d'aide médicale urgente) sur une explosion des cas d'intoxication et sur les conséquences de cette consommation. Il est temps d'agir.

Des initiatives parlementaires ont été prises, plusieurs propositions de loi visant à enrayer ce phénomène ont notamment été déposées. Toutefois, le travail de prévention reste indispensable.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue, sans nier l'importance de cette question – c'est même tout le contraire –, il me semble que l'enjeu relève davantage d'une bonne application de la loi de 2021 tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote, qui interdit la vente de ces produits aux mineurs.

Par ailleurs, les crédits dédiés à la prévention sont déjà en hausse de 18 % dans ce projet de budget. Certains pourraient être réalloués à la prévention contre le protoxyde d'azote.

En raison des contraintes qui pèsent sur les finances publiques, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous connaissez les difficultés que nous rencontrons.

Nous avons tous, autour de nous, des jeunes à qui nous devons rappeler qu'il s'agit d'une drogue dangereuse, qui peut entraîner des paralysies à vie. Souvent, les jeunes que je rencontre me disent qu'ils consomment du protoxyde d'azote « juste pour rire ». Non ! Le protoxyde d'azote fait rire cinq minutes, mais il peut rendre handicapé à vie.

Le sujet mérite donc notre attention à tous. Ce produit est encadré, vous le savez, et sa vente est interdite aux mineurs. Il existe déjà des mesures de prévention ou des campagnes de sensibilisation, avec par exemple le slogan « Le proto, c'est trop risqué d'en rire ». L'ARS Île-de-France a également ouvert un site parlons-proto.fr, à mon sens, très bien fait, où vous pourrez trouver l'ensemble des recommandations sur ce produit.

Enfin, je rappelle que le fonds de lutte contre les addictions représente 130 millions d'euros. C'est dans ce cadre qu'il faut poursuivre nos efforts pour la santé de nos jeunes, en travaillant sur la prévention, notamment sur le protoxyde d'azote, mais aussi sur d'autres enjeux.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.

M. Michel Masset. Nous voterons cet amendement, car il est nécessaire et urgent d'apporter une réponse à ce problème.

Je rappelle que la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d'azote d'Ahmed Laouedj a été adoptée au Sénat au mois de mars dernier et attend toujours d'être examinée à l'Assemblée nationale. Je ne comprends pas pourquoi le délai est si long, d'autant que la proposition de loi visant à restreindre la vente de protoxyde d'azote aux seuls professionnels et à renforcer les actions de prévention sur les consommations détournées, issue de l'Assemblée nationale, est également en attente d'examen par le Sénat.

Que fait-on ? Pourquoi n'avançons-nous pas sur ces textes ?

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Les élus du groupe GEST sont favorables à cet amendement, car il va de soi que la prévention est indispensable.

Toutefois, au-delà de la prévention, une mesure dont l'effet serait majeur consisterait tout simplement à interdire la vente du protoxyde d'azote aux particuliers, ce qui est tout à fait faisable. C'est d'ailleurs l'objet du texte qui a été adopté à l'Assemblée nationale, mais cette proposition de loi n'est toujours pas inscrite à l'ordre du jour des travaux du Sénat – je ne comprends pas pourquoi.

Certes, on pourra toujours acheter du protoxyde d'azote sur internet, mais cette interdiction de vente représenterait une difficulté d'accès supplémentaire, notamment pour les mineurs. Il est donc très important qu'une telle mesure puisse entrer en vigueur rapidement, car, pour l'instant, il est possible d'acheter du protoxyde d'azote dans n'importe quel supermarché.

L'enjeu en matière de santé publique est suffisamment important pour qu'il prime sur la liberté de vente.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Sur toutes les travées, nous sommes d'accord : il y a urgence à agir et à interdire le protoxyde d'azote. Il ne se passe pas une semaine sans qu'un fait divers dramatique nous rappelle les dangers de ce produit et les dégâts qu'il provoque – sans parler de tous les cas dont on ne parle pas. À cela s'ajoutent les paralysies mentionnées par Mme la ministre.

Il est grand temps d'interdire ce produit en ne le réservant qu'à l'usage médical. Si un tel usage existe, cela n'empêche pas d'interdire la vente du protoxyde d'azote dans tout autre cadre.

Les propositions de loi se multiplient, issues de tous les groupes politiques. Un texte a été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Il est temps, madame la ministre, que vous présentiez un projet de loi, afin d'aboutir à des solutions rapidement efficaces.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1685.

(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du  RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1092 n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-2056, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. - Créer le programme :

Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles

II. -En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

3 000 000

3 000 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Prévention du virus de l'immunodéficience humaine et des infections sexuellement transmissibles

3 000 000

3 000 000

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. À force de coups de rabot, nous sommes en train de défaire silencieusement ce que plusieurs dizaines d'années de mobilisation ont construit.

Les associations de lutte contre le VIH voient leurs financements amputés, leurs postes supprimés et leurs actions menacées. Quand AIDES, la première organisation française de lutte contre le VIH, est contrainte d'ouvrir un plan de suppression de postes, c'est toute l'hypocrisie de ce gouvernement qui fait surface.

Car, oui, c'est un choix politique de ne pas financer ce type d'association. C'est décider que la prévention, le dépistage, l'accès à la PrEP (prophylaxie pré-exposition) et la réduction des risques peuvent attendre. L'épidémie, elle, n'attend pas. On dénombre 3 400 nouvelles contaminations chaque année ; ce chiffre stagne, tandis que les inégalités de santé se creusent, touchant les publics les plus exposés, que seules les associations parviennent à atteindre dans ce dernier kilomètre où l'État n'est pas : travailleuses du sexe, migrants…

Nous avons pourtant les outils pour mettre fin à l'épidémie. Ce qui manque aujourd'hui, ce ne sont pas les solutions, ce sont les moyens et, surtout, le courage politique.

Par conséquent, cet amendement vise à augmenter de 3 millions d'euros les crédits consacrés à la prévention et à garantir un niveau de subvention stable a minima pour les associations.

Une France sans sida n'est pas qu'un vain slogan, c'est un objectif à portée de main. Madame la ministre, je dirai même que cela est entre vos mains : n'y renoncez pas !

M. le président. L'amendement n° II-1452 rectifié, présenté par Mme Imbert, MM. Lefèvre, D. Laurent, Sol et Pointereau, Mme Aeschlimann, MM. Somon et Panunzi, Mmes V. Boyer et Petrus, M. Bruyen, Mmes Berthet, Ventalon et Deseyne, MM. Anglars, Rietmann et Belin, Mme Richer, MM. Saury et H. Leroy, Mme Demas, MM. Brisson et E. Blanc, Mme Micouleau, M. Gremillet, Mme Bellamy, MM. Piednoir et Margueritte, Mmes Gruny et Josende et MM. Grosperrin, Rapin, Pernot et Milon, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

3 000 000

 

3 000 000

 

Protection maladie

 

3 000 000

 

3 000 000

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Laurent Somon.

M. Laurent Somon. Cet amendement, qui s'inscrit la même veine que le précédent, vise à augmenter, à hauteur de 3 millions d'euros, les crédits en faveur de la prévention du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST), en prélevant sur le programme 183 « Protection maladie » pour abonder l'action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Ma chère collègue Souyris, vous parlez de « coups de rabot », mais il n'y en a pas sur les actions de prévention, cette année. Au contraire, le budget qui leur est alloué augmente de 18 %. Ainsi, près de 10 millions d'euros sont prévus pour les actions du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », lequel finance la prévention du VIH et des IST.

J'estime donc que l'amendement n° II-2056 est satisfait, même s'il vise à aller au-delà de l'augmentation des crédits de 18% prévue, en les augmentant à hauteur de 3 millions d'euros.

La commission demande donc le retrait de ces deux amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2056.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1452 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1957 rectifié, présenté par Mme Romagny, MM. Cambier et Chasseing, Mme Aeschlimann et M. Buis, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

5 000 000 

 

5 000 000 

 

Protection maladie

 

5 000 000 

 

5 000 000 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

TOTAL

5 000 000 

5 000 000 

5 000 000 

5 000 000 

SOLDE

 0

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1957 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2061, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. - Créer le programme :

Ordonnance verte

II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

2 100 000 

  2 100 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Ordonnance verte

2 100 000

2 100 000

TOTAL

2 100 000

2 100 000 

2 100 000 

2 100 000 

SOLDE

0

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Hier, une étude révélait les effets de l'exposition au bisphénol S (BPS), présent dans les plastiques, sur l'apparition de troubles du comportement chez les bébés. Elle nous rappelle que nous avons plus que jamais besoin d'une politique ambitieuse de santé environnementale pour lutter contre les perturbateurs endocriniens.

Mes chers collègues, connaissez-vous la Fédération française des trucs qui marchent ? Elle labellise des démarches innovantes mises en place par les collectivités territoriales. J'ai un truc qui marche à leur proposer : les ordonnances vertes.

En effet, la ville de Strasbourg a mis en place ce dispositif qui permet aux femmes enceintes d'obtenir un panier de fruits et légumes bio chaque semaine pendant vingt-huit semaines. Il s'agit ainsi de les sensibiliser aux risques liés aux perturbateurs endocriniens pendant la période cruciale des mille premiers jours de l'enfant.

Cette action est essentielle pour alerter sur les risques sanitaires des perturbateurs endocriniens pour l'enfant, mais aussi pour la fertilité – ceux-ci sont en effet responsables du déclin de plus de 50 % de la concentration spermatique et entraînent chez les femmes une puberté précoce.

À l'heure où le Président de la République appelle au réarmement démographique, nous devons faire de la lutte contre l'infertilité et contre les perturbateurs endocriniens une priorité. Aussi, nous proposons d'expérimenter dans trois départements le dispositif strasbourgeois de l'ordonnance verte.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Une ordonnance verte, pourquoi pas ?

Les autorités sanitaires devraient être consultées, car elles sont les plus qualifiées pour évaluer l'impact réel d'une telle mesure sur la santé. Il leur appartient de décider si, oui ou non, la sécurité sociale doit rembourser ce type de prescription.

En tout cas, il ne me semble pas qu'il nous appartienne de décider si une telle initiative doit figurer dans la mission « Santé ».

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2061.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1681, présenté par Mmes Cukierman, Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :

I.- Créer le programme :

Fonds de lutte contre l'ice en Polynésie française

II.- En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

2 094 000

 

2 094 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

Fonds de lutte contre l'ice en Polynésie française

2 094 000

 

2 094 000

 

TOTAL

2 094 000

2 094 000

2 094 000

2 094 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Le Gouvernement français s'est engagé auprès du gouvernement polynésien à contribuer au renforcement des moyens de l'Office anti-stupéfiants (Ofast) et à créer un centre de désintoxication.

Cet amendement vise à concrétiser cet engagement au moment où la consommation d'ice, une méthamphétamine, c'est-à-dire une drogue de synthèse extrêmement dangereuse, est de plus en plus répandue en Polynésie française. Face à des réseaux de trafic qui intensifient leur action et ciblent notamment les plus jeunes, avec des conséquences terribles, il est temps d'agir.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1681.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-2060, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. - Créer le programme :

Prévention du chemsex

II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

  300 000

300 000 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Prévention du chemsex

300 000 

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. La stratégie nationale sur le chemsex, demandée par les acteurs sur le terrain, sera intégrée dans la prochaine feuille de route de la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030. C'est une promesse qui date et j'espère qu'elle sera enfin tenue, car il faut déployer une véritable politique de prévention, de réduction des risques et d'accompagnement.

Les besoins sont clairs : mieux outiller les professionnels, assurer une présence dans les lieux de consommation, renforcer les réseaux locaux et pérenniser les dispositifs expérimentés, comme l'Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré – Chemsex (Arpa-Chemsex), qui ont déjà démontré leur efficacité dans plusieurs grandes villes.

Enfin, nous manquons aujourd'hui cruellement de données pour comprendre les trajectoires des usagers, évaluer les interventions et anticiper les risques liés aux nouvelles substances.

Cet amendement d'appel vise à alerter sur la nécessité de passer à l'action.

Qu'en est-il du projet Arpa-Chemsex ? D'autres villes vont-elles entrer dans le dispositif ? Développons l'analyse de produits. Obligeons les applications de rencontres à diffuser des messages de prévention. Mettons en place le système du « bon samaritain », pour que le bon réflexe soit d'appeler les secours.

Madame la ministre, prenons ce sujet à bras-le-corps, sans tabou ni morale envers les pratiquants du chemsex. Réduction des risques, lutte contre les addictions, lutte contre l'homophobie, santé communautaire : nous avons besoin d'une approche globale. Les outils sont là, il faut désormais s'atteler à cette tâche.

M. le président. L'amendement n° II-2055 rectifié bis, présenté par Mme Linkenheld, MM. Jomier, Gillé, Bourgi et M. Weber, Mme de La Gontrie, M. Omar Oili, Mmes Bélim, Poumirol, Brossel, Le Houerou et Canalès, MM. P. Joly, Roiron, Tissot, Cozic, Chaillou et Temal et Mme Matray, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

300 000

 

300 000

 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

300 000

 

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Hussein Bourgi.

M. Hussein Bourgi. Cet amendement, déposé sur l'initiative d'Audrey Linkenheld et cosigné par plusieurs membres du groupe SER, porte sur un sujet tabou, puisqu'il touche à l'intime et à la sexualité. Il s'agit d'un véritable fléau qui cause des dégâts de tous ordres – personnel, sanitaire, etc.

Certaines personnes pensent pouvoir prolonger ou améliorer leurs performances sexuelles en consommant des produits, produits qui, malheureusement, les exposent à des maladies sexuellement transmissibles, voire provoquent parfois des arrêts cardiaques. C'est ainsi que des morts s'accumulent semaine après semaine.

Ce sujet reste tabou, disais-je. En cet instant, je tiens à rendre hommage à Jean-Luc Romero-Michel, l'un des rares témoins de ce fléau à en avoir parlé – il a vécu ce drame intimement, dans son couple, puisque son compagnon en est mort – pour alerter sur le danger qu'il représente.

Madame la ministre, il ne suffit plus de déplorer et de compter les morts les uns après les autres. Il faut agir ! C'est le sens de cet amendement par lequel nous vous proposons tout simplement de financer une campagne de prévention contre ce qu'est le chemsex, à savoir une drogue, et, comme toutes les drogues, le chemsex tue !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Mes chers collègues, je comprends bien qu'il soit nécessaire de mener des campagnes de prévention contre le chemsex, mais je considère que le niveau des crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » est suffisant pour financer des actions de cette nature. Il n'y a pas lieu, selon moi, de prévoir un abondement supplémentaire.

La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, monsieur le sénateur, sachez tout d'abord que nous travaillons actuellement au développement du projet Accompagnement en réseau pluridisciplinaire amélioré – Chemsex (Arpa-Chemsex).

Par ailleurs, la feuille de route 2026-2030 de la stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030 comportera des actions ciblées sur ce sujet. Je précise à cet égard que j'ai demandé au professeur Amine Benyamina de formuler des recommandations opérationnelles sur le parcours, la prévention et les innovations thérapeutiques, ce qui va dans le sens que vous souhaitez.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2060.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2055 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2058, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme : 

Plan de déploiement de la réduction des risques en zones rurales

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

  300 000

300 000 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Plan de déploiement de la réduction des risques en zones rurales

300 000 

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Nous partons d'un constat simple : nos territoires ruraux, qui couvent 70 % de la superficie du pays, restent les grands oubliés en matière de réduction des risques.

Alors que l'accès aux substances psychoactives y est comparable à celui des villes, l'accès aux soins, lui, ne l'est pas : éloignement, déserts médicaux, rareté des transports, tout concourt à aggraver les usages problématiques et à rompre les parcours de soins.

Nous le savons, les équipes de terrain innovent déjà : unités mobiles, antennes délocalisées, maraudes, télémédecine. Elles prouvent chaque jour que l'« aller vers » fonctionne. Toutefois, faute de moyens, ces actions restent trop sporadiques, trop fragiles, trop isolées.

Ce que nous proposons aujourd'hui, c'est de donner enfin à ces initiatives toute l'ampleur qu'elles méritent. Il s'agit de structurer une véritable politique nationale de réduction des risques en zone rurale, de renforcer la présence des dispositifs existants, de soutenir les innovations adaptées à l'éloignement géographique, de mieux former les professionnels et de mieux coordonner les acteurs locaux.

Pour conclure, je rappelle que la commission des affaires sociales a publié cette année un rapport d'information sur les dangers des opioïdes en France : le dispositif de mon amendement résulte des préconisations de la mission, dont j'étais l'une des rapporteures.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je tiens simplement à souligner que ces centres sont importants à nos yeux. La preuve en est que l'assurance maladie leur a consacré 564 millions d'euros en 2024.

Je comprends donc tout l'intérêt de votre demande, madame la sénatrice. Néanmoins, les financements existent et il convient tout bonnement de faire bon usage des crédits consacrés aux centres de soins, d'accompagnement ou de réduction des risques.

Aussi, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2058.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2059, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme : 

Lutte contre le tabagisme aux abords d'établissements scolaires

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

  300 000

300 000 

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Lutte contre le tabagisme aux abords d'établissements scolaires

300 000 

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. La consommation de tabac tue 75 000 personnes en France chaque année, soit plus de 200 décès par jour. Depuis le 1er juillet dernier, fumer aux abords des établissements scolaires, des bibliothèques, des établissements et dans les parcs est interdit. C'est une bonne nouvelle.

Force est toutefois de constater que cette obligation n'est absolument pas respectée. Surtout, il manque des mesures de prévention qui permettraient d'en finir avec cette mauvaise image de jeunes fumant ou vapotant devant les collèges et les lycées. En effet, il est encore aujourd'hui trop fréquent de voir des jeunes fumer et vapoter devant leur établissement scolaire, avant ou après les cours, pendant les récréations.

Ce phénomène participe d'une normalisation du tabagisme que nous combattons. Fumer ou vapoter devient un truc « cool », qui permet aux jeunes d'entrer dans la communauté. C'est un drame : 90 % des jeunes adultes commencent à fumer avant 18 ans.

C'est pourquoi nous proposons de financer, à hauteur de 300 000 euros, des actions de sensibilisation, la mise en place de l'interdiction effective et la « dénormalisation » du tabagisme, ainsi que des campagnes d'affichage ou des aménagements légers visant à réduire l'exposition des jeunes au tabac.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2059.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2030, présenté par Mmes de Marco et Souyris, MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Poncet Monge et Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

20 000 000

 

20 000 000

 

Protection maladie

 

20 000 000

 

20 000 000

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. Plusieurs études ont montré que la réalisation d'un scanner thoracique à faible dose chez les sujets à risque permettait la détection de tumeurs pulmonaires primitives et réduisait le risque de décès par cancer du poumon. Après un suivi de dix ans, on observe ainsi une diminution de la mortalité de 26 % chez les hommes et de 40 % chez les femmes.

Au mois de décembre 2022, le Conseil européen a incité tous les États membres à lancer des programmes pilotes ; plusieurs pays européens ont d'ores et déjà mis en œuvre un dépistage systématique. La même année, la Haute Autorité de santé (HAS) a préconisé la mise en place d'un programme pilote sur le territoire.

Pourtant, les subventions de l'Institut national du cancer (Inca) sont en baisse constante depuis 2022. Si le budget de l'Inca a augmenté de 9,6 millions d'euros en 2026, cela ne résulte que d'une mesure de périmètre au sein de la feuille de route 2021-2025 de la stratégie décennale de lutte contre les cancers. Aujourd'hui, alors que le cancer broncho-pulmonaire demeure la première cause de mortalité par cancer, avec 33 000 décès en 2018, il est temps de généraliser ce dépistage précoce.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je suis très attentive aux résultats des études qui sont en cours sur le sujet. J'espère que nous pourrons avancer rapidement sur cette question.

Cependant, les études n'ayant pas encore abouti, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2030.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1682, présenté par Mmes Cukierman, Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

10 000 000

 

10 000 000

 

Protection maladie

 

10 000 000

 

10 000 000

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1682.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2070 rectifié, présenté par Mmes de La Provôté, Sollogoub, Billon et Guidez, MM. Pointereau, Dhersin, Kern et Courtial, Mme V. Boyer, M. P. Martin, Mme Gacquerre, M. Chauvet, Mme Saint-Pé, MM. Mizzon et Bonneau, Mmes Romagny, Loisier et Vermeillet, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Naturel et Hingray, Mme Antoine, M. Omar Oili, Mme Lermytte, MM. V. Louault, Roux et Chasseing, Mme L. Darcos et MM. Temal et Chevalier, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Financer Santé publique France

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

 

4 200 000

 

4 200 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

Financer Santé publique France

4 200 000

 

4 200 000

 

TOTAL

4 200 000

4 200 000

4 200 000

4 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Sonia de La Provôté.

Mme Sonia de La Provôté. À la suite du vote de la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers, le projet de loi de finances pour 2026 a prévu une hausse des crédits de l'Inca de l'ordre de 9,5 millions d'euros, dont une part – 4,2 millions d'euros – est censée compenser la recentralisation de registres locaux Francim. Par ailleurs, lors de l'examen de la mission « Recherche et enseignement supérieur », un amendement d'Anne Souyris, qui vise à accroître encore davantage les crédits de l'institut en vue de financer la constitution de ce même registre national des cancers, a été voté à l'unanimité.

Je précise que l'amendement que je présente ne vise pas à mettre en péril le financement de l'Institut national du cancer et sa capacité à mettre en place ce registre national. Reste que, en l'état actuel des connaissances, il faudra cinq bonnes années pour que l'on dispose enfin d'outils pleinement opérationnels et fiables – et encore, peut-être suis-je un peu trop optimiste…

Dès lors, il n'est pas possible de se passer des données de qualité des registres académiques du réseau Francim, qui couvrent 24 % de la population, sur lesquelles reposent les statistiques nationales en matière de cancérologie. Ces données sont utilisées par des équipes aguerries pour assurer le suivi des patients, de façon exhaustive et qualitative. J'ajoute que le réseau Francim héberge aussi le registre national des cancers pédiatriques.

Je propose donc simplement de reverser à Santé publique France les 4,2 millions d'euros qui devaient être perçus par l'Inca, et ce afin de ne pas fragiliser le fonctionnement des registres locaux et du registre national des cancers pédiatriques, qui sont fondamentaux en l'état actuel de nos connaissances et au vu du temps dont nous aurons besoin pour constituer le registre national. Ils resteront sûrement cruciaux pendant encore de nombreuses années.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. J'entends évidemment les arguments de notre collègue Sonia de La Provôté, laquelle connaît très bien ce sujet, puisqu'elle est à l'origine de la proposition de loi visant à mettre en place un registre national des cancers, adoptée à l'unanimité.

Comme je l'ai dit, le projet de loi de finances pour 2026 prévoyait déjà de rehausser les crédits de l'Inca de 9,5 millions d'euros en 2026 ; des crédits supplémentaires ont été votés par le Sénat dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », cela vient d'être rappelé.

J'estime qu'il s'agit d'un montant significatif en vue de la constitution d'un registre national. Cependant, je n'étais pas informé de ce prélèvement de 4,2 millions d'euros au titre du recentrage de la tenue des registres locaux.

C'est la raison pour laquelle la commission demande l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. En réalité, il n'est question ici que d'une recentralisation des financements actuels au niveau de l'Inca (Marques de dénégation de Mme Sonia de La Provôté.), en contrepartie du transfert de la gestion des registres locaux existants vers l'institut, tout cela en vue de l'élaboration du futur registre national des cancers. J'ajoute que l'Inca devra, de toute façon, redistribuer ces crédits à l'échelon local.

Le Gouvernement demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour explication de vote.

Mme Sonia de La Provôté. Très honnêtement, il ne me semble absolument pas nécessaire de transférer ces crédits vers l'Inca. Préserver le mode de financement actuel des registres Francim contribuerait à sécuriser les registres locaux et le registre national des cancers pédiatriques – j'y insiste ! Cela permettrait aussi de rassurer les équipes, qui sont des équipes compétentes, dont on ne saurait se passer, et dont l'Inca lui-même ne saurait se passer pour constituer le registre national des cancers.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Chacun aura compris en écoutant Mme de La Provôté que cette question est très technique.

Notre collègue, que je remercie, maîtrise parfaitement son sujet : je vous propose par conséquent de voter son amendement. Si l'on veut véritablement respecter l'esprit de la loi – à cet égard, je tiens aussi à remercier Anne Souyris, qui a contribué à mettre en avant ce dossier –, il convient d'avancer sur ce sujet.

Aussi, je voterai cet amendement de Sonia de La Provôté. (Murmures d'approbation sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. Max Brisson. Comme nous tous !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Le groupe SER soutiendra cet amendement, tant l'intérêt de son dispositif n'est plus à démontrer.

Si je puis me permettre, tout le monde devrait le voter !

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Je soutiens également cet amendement.

Nous avons déjà voté l'année dernière en faveur d'un registre national. Le recentrage des registres Francim sur l'Inca a posé un véritable problème, parce que cela s'apparentait davantage à un échantillonnage qu'à un registre géré localement et, de fait, véritablement représentatif de l'ensemble des territoires.

Cet amendement a pour objet de garantir la représentativité territoriale du registre des cancers.

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

M. Laurent Somon. Devant la nécessité – je dirais même l'urgence – de voter une telle disposition, nous soutiendrons l'amendement de Mme de La Provôté.

M. Olivier Rietmann. Bien évidemment !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Ma tâche ne sera pas facile…

Recentraliser la gestion des registres à l'échelon national reviendra à recentraliser pas seulement les données de santé, mais aussi les données environnementales. On a réellement besoin de cette centralisation aujourd'hui. Que se passera-t-il, selon vous, si l'on retire ces crédits à l'Inca ?

Mme Sonia de La Provôté. Il reste de quoi faire ! Et puis, nous avons voté l'amendement de Mme Souyris !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2070 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1645 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et MM. Roux et V. Louault, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

10 000 000

 

10 000 000

 

Protection maladie

 

10 000 000

 

10 000 000

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

 

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Guylène Pantel.

Mme Guylène Pantel. Cet amendement vise à répondre à une injustice sanitaire qui touche aujourd'hui des centaines de patientes et de patients exposés à l'acétate de cyprotérone, ainsi qu'à d'autres progestatifs de synthèse. Depuis plusieurs années, des liens scientifiques ont établi que l'utilisation prolongée de ces traitements, notamment à forte dose, multipliait significativement le risque de développer un méningiome, une tumeur cérébrale qui peut avoir des conséquences graves et durables.

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a pris des mesures d'encadrement dès 2018, mais, pour les personnes déjà touchées, rien n'a été prévu. Aujourd'hui encore, des victimes sont laissées seules face à leurs complications médicales, sans procédure d'indemnisation équitable.

Cet amendement tend donc à mettre en place un dispositif amiable d'indemnisation pour les victimes. N'oublions pas que nous avons su créer des dispositifs similaires pour les victimes du Mediator et de la Dépakine.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Je tiens à insister sur l'importance du sujet qu'abordent nos collègues du groupe RDSE.

Nous avons été sollicités par de nombreuses patientes qui ont subi les effets néfastes de ces traitements, à l'instar des victimes de l'Androcur ou de l'acétate de cyprotérone.

Il y a un problème avéré d'effets secondaires chez ces patientes, avec des conséquences qui peuvent être graves. Le principe d'une indemnisation des victimes sur le modèle de celui de la Dépakine me paraît très intéressant.

C'est pourquoi nous demandons au Gouvernement de regarder de près ce dossier.

M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Nous sommes très favorables à cette procédure d'indemnisation, mais c'est amendement est gagé sur les dépenses de l'aide médicale de l'État (AME).

Si le Gouvernement s'engage à lever ce gage, nous voterons l'amendement ; à défaut, nous nous abstiendrons.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je confirme que le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1645 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-1978 rectifié quater, présenté par MM. Théophile, Buis, Buval, Rambaud et Lemoyne, Mme Phinera-Horth, MM. Patient et Mohamed Soilihi, Mme Nadille et MM. Rohfritsch et Lévrier, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

500 000

 

500 000

 

Protection maladie

 

500 000 

 

500 000 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

TOTAL

500 000

500 000

500 000

500 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile est frappé au coin du bon sens. Il est simplement proposé d'étendre à l'ensemble des Antillais vivant aujourd'hui dans l'Hexagone la gratuité intégrale des tests de dépistage du chlordécone.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de l'amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Lévrier, l'amendement n° II-1978 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Martin Lévrier. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1978 rectifié quater.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-2062, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme : 

Surveillance sanitaire de l'acide trifluoroacétique

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

dont titre 2

200 000

200 000

Protection maladie

 

 

 

 

Reversement à la sécurité sociale des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR)

 

 

Surveillance sanitaire de l'acide trifluoroacétique

200 000

200 000

TOTAL

200 000

200 000

200 000

200 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a révélé la semaine dernière que l'eau potable était contaminée par l'acide trifluoroacétique, le TFA, une substance perfluoroalkylée et polyfluoroalkylée (PFAS) toxique, ce que confirment les conclusions du réseau européen d'action contre les pesticides (Pesticide Action Network) et de l'association Générations futures.

Pourtant, les normes sanitaires sont toujours insuffisantes et le TFA n'est toujours pas soumis à un cadre réglementaire contraignant. Madame la ministre, allez-vous enfin considérer le TFA comme un métabolite pertinent et protéger notre santé ?

Nous appelons à renforcer la surveillance sanitaire du TFA. Ce dispositif permettrait à toutes les agences et régies publiques de l'eau de surveiller sa présence dans l'eau destinée à la consommation humaine. Antoinette Guhl a mis en lumière les scandales sanitaires autour de l'eau en bouteille. Finissons-en avec l'omerta qui persiste sur la pollution de l'eau.

Enfin, je profite de l'occasion pour saluer le travail de l'Anses. L'agence fait face à de nombreuses attaques, qui nous rappellent les méthodes des mouvements anti-science que l'on voit se développer aux États-Unis. La mise en cause de son indépendance et le sort réservé à son directeur général sont autant de signaux qui nous inquiètent : sans l'Anses, pas de politique de santé publique et de santé environnementale.

Gardons-nous de répandre le chaos dans la gestion des crises sanitaires en supprimant des agences essentielles pour la vie de la Nation. L'Anses trouvera toujours les écologistes à ses côtés !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Votre demande est satisfaite, madame la sénatrice.

Vous le savez, nous nous préoccupons de la question des PFAS. En application de la loi du 27 février 2025 visant à protéger la population des risques liés aux substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, dite loi Thierry, et en nous fondant sur les résultats de la campagne exploratoire menée par l'Anses, qui caractérise la présence ubiquitaire du TFA sur le territoire national, nous allons publier un décret qui ajoutera le TFA et le 6:2 FTSA (Fluorotelomer sulfonic acid) à la liste des vingt PFAS de la directive européenne du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, qui sont à surveiller dans le cadre de notre contrôle sanitaire.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Nous sommes nous aussi extrêmement inquiets des résultats des études récentes sur la qualité de l'eau. Je me trouvais mardi dans mon département : les résultats des analyses de l'eau qui viennent d'être publiées nous ont fait dresser les cheveux sur la tête !

Nous voterons bien sûr cet amendement. Surtout, nous souhaitons exprimer tout notre soutien à l'Anses, pour le rôle majeur qu'elle joue en matière de santé publique. Cette agence est absolument indispensable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-2062.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Santé », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

M. le président. J'appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Santé ».

Après l'article 78

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-29 est présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° II-1413 est présenté par Mme Lassarade, au nom de la commission des affaires sociales.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 78

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le huitième alinéa de l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° La fin de la première phrase est ainsi rédigée : « d'urgence à un accord préalable du service du contrôle médical mentionné à l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale » ;

2° La deuxième phrase est supprimée ;

3° Après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée « Le service compétent s'assure que l'absence de réalisation de ces prestations n'est pas susceptible d'avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l'état de santé de la personne. »

4° A la dernière phrase, les mots : « , le délai d'ancienneté » sont supprimés.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° II-29.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d'adapter le régime de prise en charge des frais relatifs à des prestations programmées non urgentes dans le cadre de l'aide médicale de l'État (AME), adaptation qui implique la suppression du délai d'ancienneté de neuf mois actuellement requis. Ce dispositif permet à la commission des finances de justifier la baisse de 200 millions d'euros de crédits que le Sénat a votée tout à l'heure sur son initiative et sur celle de la commission des affaires sociales.

M. le président. La parole est à Mme Gruny, au nom de la commission des affaires sociales, pour présenter l'amendement n° II-1413.

Mme Pascale Gruny, au nom de la commission des affaires sociales. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-29 et II-1413.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 114 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l'adoption 197
Contre 118

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 78.

L'amendement n° II-380 rectifié bis, présenté par MM. Théophile, Buis, Rambaud et Buval, Mme Phinera-Horth, MM. Mohamed Soilihi et Iacovelli, Mmes Nadille et Schillinger et M. Lévrier, est ainsi libellé :

Après l'article 78

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement actualise, dans le cadre du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2027, les indicateurs relatifs aux investissements immobiliers hospitaliers, en y intégrant une trajectoire pluriannuelle 2026-2030 spécifique aux établissements de santé situés dans les territoires ultramarins.

Cette trajectoire précise, pour chaque territoire, les besoins identifiés, les priorités d'intervention, ainsi que la programmation financière prévisionnelle associée.

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Cet amendement de Dominique Théophile vise à corriger une lacune persistante, celle de l'absence totale de programmation pluriannuelle des investissements hospitaliers dans les territoires ultramarins.

Les rapports récents de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), ainsi que celui de la Cour des comptes montrent que les hôpitaux ultramarins figurent parmi les plus fragiles du pays, avec des bâtiments vieillissants, des déficits structurels et une incapacité à financer les rénovations indispensables.

Il paraît donc essentiel d'actualiser les indicateurs du projet annuel de performances, en intégrant une trajectoire claire pour ces territoires sur la période 2026-2030. Il s'agit d'identifier les besoins, de prioriser les interventions et d'apporter, enfin, de la visibilité financière aux établissements concernés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Vous soulevez deux difficultés, monsieur le sénateur.

La première tient à la pluriannualité des investissements.

J'ai déjà précisé à cet égard que, dans les prochaines semaines, je serai en mesure d'annoncer le montant des investissements hospitaliers pour les dix ans à venir, et ce afin que les équipes puissent se réunir autour d'un projet sur le temps long – c'est évidemment très important.

La seconde tient à la situation particulière des territoires ultramarins.

Ces territoires ne sont pas oubliés. Je rappelle que les dépenses d'investissement s'élèvent à 7,5 milliards d'euros au total, dont 700 millions d'euros versés récemment pour financer le nouveau centre hospitalier universitaire (CHU) Guadeloupe.

Aussi, le Gouvernement demande le retrait de l'amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Madame la ministre, votre engagement vaut vote. Par conséquent, je retire l'amendement n° II-380 rectifié bis.

M. le président. L'amendement n° II-380 rectifié bis est retiré.

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Santé ».

Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq,

est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)

PRÉSIDENCE DE Mme Sylvie Robert

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

7

Mise au point au sujet d'un vote

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.

Mme Marie-Claude Lermytte. Madame la présidente, lors du scrutin public n° 112 sur les amendements identiques nos II-24 et n° II-1284 à l'article 76 du projet de loi de finances pour 2026, Pierre-Jean Verzelen souhaitait s'abstenir.

Mme la présidente. Acte est donné de votre mise au point, chère collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.

8

Loi de finances pour 2026

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale.

Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde parte du projet de loi de finances, des différentes missions.

Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi qu'au banc des commissions.)

M. Marc Laménie, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de remercier la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Jocelyne Guidez, de son travail, ainsi que les commissaires et fonctionnaires des deux commissions saisies.

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » change cette année de nom : elle s'appelle désormais « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Je partage bien sûr avec l'ensemble de mes collègues – malgré l'ambiance quelque peu familiale, ce soir (Sourires.) – la conviction que nous sommes tous concernés par le devoir de mémoire. Ce changement de nom s'effectue à périmètre constant et n'emporte pas de conséquences budgétaires.

Comme chaque année, ces crédits continuent de diminuer, pour des raisons démographiques. Toutefois, l'année 2026 se démarque par l'ampleur de leur baisse : ils diminuent de 120 millions d'euros entre 2025 et 2026 pour s'établir à 1,73 milliard d'euros. Cela touche principalement le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », qui regroupe 95 % des crédits de la mission.

Par ailleurs, les dépenses fiscales rattachées à la mission s'élèvent à 563 millions d'euros. Elles relèvent d'une action de solidarité, incluant notamment la demi-part fiscale pour les anciens combattants et leurs conjoints survivants.

Cette année encore, la baisse des crédits est la conséquence de la baisse de la population des bénéficiaires de l'allocation de reconnaissance du combattant comme de la pension militaire d'invalidité (PMI). Ces deux pensions, qui représentent une enveloppe de 1,08 milliard d'euros, sont versées respectivement aux titulaires de la carte du combattant et aux militaires et anciens militaires souffrant d'une invalidité du fait de leur engagement.

À la baisse des populations de bénéficiaires s'ajoute, en 2026, une non-revalorisation des pensions. Le reste des crédits de la mission, à l'exception de ceux qui sont réservés aux liens armées-jeunesse, sont en baisse.

Les crédits consacrés au devoir de mémoire diminuent pour atteindre 8 millions d'euros. Cette baisse était prévisible, puisque les deux années précédentes marquaient le quatre-vingtième anniversaire des événements de 1944 et de 1945 et avaient donc fait l'objet d'une programmation mémorielle forte.

Les crédits d'entretien du patrimoine mémoriel sont stables et s'établissent à 16,2 millions d'euros. Toutefois, j'alerte sur le fait que ces derniers ont été annulés à hauteur de 8 millions d'euros en 2024 – c'est-à-dire de moitié – et devraient l'être à hauteur de 4,4 millions d'euros en 2025. De tels niveaux d'annulation ne permettent pas de réaliser à temps tous les travaux que nécessite le patrimoine mémoriel de pierre de la France.

Je tiens à saluer l'association Le Souvenir français, qui entretient et restaure des tombes militaires, son président général Serge Barcellini, ainsi que tous ses relais locaux et internationaux. Il s'agit d'un partenaire important, qui organise notamment la journée nationale des anciens combattants, le 1er ou 2 novembre de l'année.

L'effort en faveur des rapatriés recule de 5,3 millions d'euros pour la première fois depuis 2022. C'est dû à une forte baisse des crédits du dispositif de réparation prévu par la loi du 23 février 2022, qui indemnise les rapatriés du préjudice qu'ils ont subi en étant accueillis sur le territoire national dans des camps ou des hameaux de forestage. Je propose de rétablir ces crédits à leur niveau de 2025.

Les crédits relatifs aux liens armées-jeunesse prévus en 2026 sont d'un même montant qu'en 2025 et visent à généraliser la Journée défense et citoyenneté (JDC) nouvelle génération, qui est recentrée sur sa dimension militaire et au cours de laquelle doivent notamment être organisés une cérémonie des couleurs, un tir sportif au laser, des jeux de rôle, un forum des métiers et une immersion en réalité virtuelle. Ils doivent également financer le nouveau service militaire volontaire.

Enfin, la mission comporte trois opérateurs principaux : l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), dont vous connaissez le maillage territorial, l'Institution nationale des invalides (INI) et l'Ordre de la Libération. Si j'ai régulièrement appelé à la vigilance sur la soutenabilité des efforts qui leur étaient demandés, je dois aujourd'hui alerter sur leur situation.

Si elle est stable, la subvention pour charges de service public de l'ONaCVG n'a pas été revalorisée pour tenir compte des augmentations de charges liées notamment à la revalorisation de la rémunération publique. Sa trésorerie a également été ponctionnée.

L'Institution nationale des invalides mérite aussi respect et reconnaissance. Par ailleurs, elle est toujours en train de réaliser d'importants travaux immobiliers, démarrés en 2021, comprenant la rénovation de la quasi-totalité de ses bâtiments.

Avant de conclure, je tiens à rendre hommage aux bénévoles et aux porte-drapeaux qui œuvrent au sein des associations patriotiques et de mémoire et entretiennent le lien avec nos militaires et toutes nos forces de sécurité.

Mes chers collègues, je vous invite à voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en préambule, permettez-moi de me réjouir du nouvel intitulé de la mission budgétaire pour 2026.

Nous avons remporté une longue bataille sémantique pour faire adopter les termes « monde combattant ». Il ne reste plus au ministère des armées et des anciens combattants qu'à suivre le même chemin…

Les crédits de la mission diminuent de 6,27 % par rapport à 2025 et s'établissent à 1,7 milliard d'euros. Comme chaque année, ce repli s'explique par la diminution continue du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité et des autres prestations versées aux combattants.

Pour comprendre cette baisse, il faut aussi noter l'absence de revalorisation du point de PMI pour 2026. Comme vous le savez, ce point est indexé sur l'évolution de la rémunération des fonctionnaires civils de l'État, plus précisément sur l'évolution de l'indice de traitement brut sur une période de référence. Le Gouvernement se retranche pourtant derrière la stabilité de l'indice pour ne pas faire évoluer le point de PMI, alors même que l'inflation prévisionnelle pour 2025 est de 1,1 %.

L'absence de toute revalorisation ne saurait être considérée comme juste et être acceptée par le monde combattant, alors que le gel général des pensions et des allocations sociales a finalement été rejeté par l'Assemblée nationale. Le Gouvernement doit entendre les conséquences qu'emporterait un tel gel et accepter de prendre une mesure dérogatoire, comme il a pu le faire par le passé.

Je rappelle que le point de PMI fixe également le montant de l'allocation de reconnaissance du combattant, qui s'élève à 835,64 euros par an.

Nous relevons par ailleurs une baisse significative de 17,2 % de l'enveloppe consacrée à l'action sociale de l'ONaCVG, qui finance les missions de solidarité envers le monde combattant et les victimes de guerre.

En outre, la commission regrette la diminution des crédits alloués à la politique mémorielle, qui ne s'explique pas uniquement par la fin du cycle commémoratif des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire. L'ONaCVG accusera ainsi une baisse de 0,8 million d'euros, répartie entre les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.

Nous avons tout de même trouvé un motif de satisfaction dans ce budget : les crédits consacrés aux liens armées-jeunesse sont préservés. Je me réjouis particulièrement que les moyens alloués au service militaire volontaire demeurent stables. En effet, les jeunes de 18 à 25 ans qui en profitent sont souvent en difficulté.

Le taux d'insertion professionnelle à l'issue de ce service militaire volontaire étant de 86 %, il convient de continuer de soutenir ce dispositif.

De même, les crédits consacrés à la Journée défense et citoyenneté sont maintenus, ce qui permettra de poursuivre le déploiement de sa nouvelle génération davantage militarisée.

Pour conclure, afin de ne pas priver le monde combattant d'un budget, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Michel Masset applaudit également.)

Organisation des travaux

Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour votre parfaite information, qu'il y a treize amendements à examiner sur cette mission.

La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à une heure trente. Nous devrons donc achever l'examen des crédits de la mission aux alentours de vingt-trois heures.

Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation (suite)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale, mais aussi celui de l'explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nadia Sollogoub. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quelle satisfaction que d'étudier cette année, enfin, le budget du « monde combattant » ! L'intitulé de cette mission inscrit au présent les liens entre la France et ceux qui la défendent.

Ce titre élargi englobe les pensions militaires et d'invalidité, les dispositifs de réhabilitation des blessés psychiques, mais aussi les actions mémorielles et, plus globalement, le lien armées-Nation.

Toutefois, au-delà de cette satisfaction sémantique, force est de constater que les crédits de cette mission sont globalement en diminution, ce qui, à bien des égards, n'est pas un bon signal. S'il est naturel que le volume des pensions s'allège au fil du temps, la non-revalorisation du point de PMI n'est en revanche pas acceptable.

En effet, alors que l'Assemblée nationale a rejeté le gel des pensions de retraite pour la population générale, il serait tout bonnement indigne de demander un tel effort au monde combattant.

En ce qui concerne la politique de mémoire, la seule fin du cycle lié au quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire ne suffit pas à justifier une baisse des crédits aussi importante. L'ONaCVG devrait ainsi perdre 0,8 million d'euros de sa subvention sur les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.

Madame la ministre, vous êtes ici devant une assemblée d'élus locaux, notamment de nombreux anciens maires ou adjoints, ruraux ou urbains, qui n'ont jamais économisé ni leur temps ni les deniers qui leur étaient confiés pour organiser des cérémonies mémorielles ou entretenir des lieux de mémoire.

À vrai dire, nous ne comprenons pas cette logique comptable. Elle n'est pas dans notre ADN. Il ne fait aucun doute que le retrait de l'État sur ces missions sera compensé par les budgets communaux et associatifs.

J'ai une pensée particulière pour l'équipe nivernaise du Souvenir français, qui recense les tombes des soldats morts pour la France dans chaque cimetière du département, nettoie, gratte, rénove, restaure et sort parfois certains d'entre eux de l'oubli. Ces bénévoles fouillent les archives départementales et organisent des cérémonies particulièrement émouvantes.

Comme le dit leur président, ils le font « pour qu'aucun de ces gars ne soit oublié ». C'est une belle mission, mais est-ce vraiment à eux de l'assumer ? Certes, ce formidable travail, réalisé avec cœur dans un cadre associatif ou municipal, ne coûte rien à l'État, mais je me demande si ce glissement – pour ne pas dire ce transfert – de compétence ne serait pas un aveu de faiblesse.

En revanche, les crédits à destination de la jeunesse sont maintenus, dans la volonté de faire monter en puissance le dispositif du service militaire volontaire.

Dans le contexte géopolitique international que nous connaissons, force est de repenser à ces mots de Simone Weil : « Le malheur contraint à reconnaître comme réel ce que l'on ne croit pas possible. » Si chacun de nous refuse au plus profond de son être d'imaginer un retour aux armes, c'est pourtant bien une logique de réarmement qui sous-tend ce projet de finances – et c'est compréhensible.

Pour ces raisons, le groupe Union Centriste votera les crédits de cette mission.

Je profite de cette occasion, madame la ministre, pour vous livrer un autre message. Je préside le groupe d'amitié France-Ukraine. Depuis le 24 février 2022, je partage de loin avec les députés de la Rada, les associations, et, plus largement, avec tous ceux qui sont devenus mes amis, un quotidien violent et guerrier, avec tout ce que cela comporte de drames et de larmes.

Au printemps 2025, une délégation de députés d'Ukraine est venue à Paris. Le groupe d'amitié l'a reçue et a organisé des événements que nos homologues avaient sollicités : rencontres sur le thème de la santé, de la coopération technique, de l'énergie et de l'armement, mais aussi, et c'est un point central, des échanges sur la prise en charge psychologique des vétérans.

Nous avons reçu un accueil inoubliable de Patricia Mirallès dans votre ministère et avons eu avec elle un échange très riche. Les maisons Athos ont été présentées à la délégation, ainsi que les différents dispositifs de prise en charge des blessures invisibles pour tous les traumatisés de guerre.

Nos amis ukrainiens nous l'ont largement affirmé : la question du retour à la vie civile est centrale. Pourtant, elle est souvent laissée dans l'ombre. Le ministère des vétérans est l'un des plus importants ministères ukrainiens et porte une charge énorme.

La question des anciens combattants n'est pas un sujet mineur, dont le budget serait en voie d'extinction ; voilà le message que je souhaite vous adresser aujourd'hui, madame la ministre.

Parce que le danger est désormais largement identifié et que l'heure est à la remilitarisation, j'alerte sur le fait que notre politique nationale doit rehausser à due proportion les moyens dévolus au soutien humain au monde combattant.

Nous désirons ardemment la paix et nous préparons la guerre ; il faut en convenir. Le monde combattant change de visage, de structuration, de mission, car, pour reprendre les mots de Winston Churchill : « Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu'il ne nous prenne par la gorge. » (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Émilienne Poumirol et M. Hussein Bourgi applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la différence entre la Nation et le peuple, c'est que la Nation dépasse le peuple. Elle est à la fois celui d'hier, d'aujourd'hui et de demain ; elle est le lien entre les générations qui se succèdent.

Ce lien passe par la mémoire. Comme le disait Primo Levi, « cela s'est passé, donc cela peut se reproduire ». Chaque jour, l'actualité nous le rappelle, en Ukraine, à l'extrémité de l'Europe, au Moyen-Orient ou ailleurs. Nous constatons que la paix n'est malheureusement jamais acquise.

Dans un passé pas si lointain, notre pays a connu la guerre sur son sol. Des femmes et des hommes se sont battus pour la paix, pour la France et pour les valeurs fondamentales de notre Nation, que nous défendons toujours à l'heure actuelle.

La mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » est là pour les honorer. C'est notre devoir à tous de ne jamais oublier ce que nous leur devons. Ce que nous sommes, les valeurs que nous partageons et notre liberté ne doivent pas être tenus pour acquis. « La plus belle sépulture, c'est la mémoire des hommes », disait André Malraux.

Comme l'année dernière, les crédits de la mission sont en baisse, essentiellement en raison de la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité et des autres prestations. Ces versements représentent en effet 95 % des crédits.

Je salue le changement de dénomination de la mission. Les termes « anciens combattants » ne reflétaient pas la réalité de la situation actuelle. La mission n'a pas seulement vocation à soutenir des vétérans de la Seconde Guerre mondiale, d'Algérie, de Tunisie ou du Maroc. Des militaires continuent de donner leur vie dans des opérations extérieures. Cette mission les concerne, eux et leurs familles, ce qu'occultait en partie son ancien intitulé.

En effet, l'engagement militaire – et ses risques corollaires – ne s'est pas arrêté avec les conflits que j'ai cités. Il est encore bien présent. Notre devoir mémoriel doit également porter sur ces générations plus récentes du monde combattant.

Nous leur devons également le meilleur accompagnement possible. À ce titre, nous saluons la consolidation du dispositif de réhabilitation psychosociale Athos, qui inclut la création d'établissements consacrés à l'accompagnement des militaires blessés psychiques.

En 2026 est prévu un gel du point de PMI, qui sert de base de calcul des pensions et des allocations. Il est impératif que le montant de ces prestations reste digne et équitable. À cet égard, une augmentation identique à celle des retraites aurait pu être prévue.

Indépendamment de la baisse du nombre de bénéficiaires des prestations, nous souhaitons que cette mission conserve toute l'attention et les moyens qu'elle mérite, compte tenu de sa portée symbolique et sociale.

La mémoire et le lien avec la Nation sont des valeurs transversales. Elles dépassent le simple cadre budgétaire : elles touchent à l'éducation citoyenne, à la transmission et à la cohésion sociale. Aussi pouvons-nous regretter la baisse des crédits destinés aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts, qui doivent rester des lieux de commémoration, de rassemblement, de transmission et d'éducation pour les plus jeunes.

En conclusion, je remercie l'excellent rapporteur spécial Marc Laménie de son travail et de son engagement sur cette mission depuis maintenant plus de dix ans, ainsi que de son investissement en faveur des anciens combattants dans son département.

Le groupe Les Indépendants votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi qu'au banc des commissions. – M. Laurent Somon applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pascale Gruny. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Cette mission incarne la solidarité de la Nation envers nos militaires et le monde combattant, en raison de leur engagement et de leurs sacrifices au service de la France.

Nous ne saurions mener les discussions budgétaires sans penser à ces femmes et ces hommes avec infiniment de gratitude.

Je salue à mon tour le changement de nom de la mission, qui en rend l'objet plus lisible. Cette nouvelle dénomination reconnaît plus clairement les combattants encore en activité, qu'ils soient revenus d'Afghanistan, du Sahel ou du Levant. Il s'agit d'un pas symbolique important pour rappeler que l'on peut toujours servir son pays après son engagement miliaire.

Il convient de souligner la baisse des crédits alloués aux allocations en faveur du monde combattant : pension militaire d'invalidité et allocation de reconnaissance du combattant. Cette baisse s'explique principalement par la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires, mais elle résulte également de l'absence de revalorisation des dispositifs malgré l'inflation.

En effet, la stagnation du point de PMI constitue un motif de préoccupation dans le monde combattant, car la valeur de ce point, qui est indexé depuis 2005 sur le traitement brut figurant dans la grille indiciaire de la fonction publique, n'a pas suivi le rythme de l'inflation.

Malgré les revalorisations ponctuelles, notamment en 2022 et 2023, le pouvoir d'achat des pensionnés s'est érodé de manière significative depuis 2005. Je me joins donc à l'appel lancé au Gouvernement par la rapporteure pour avis Jocelyne Guidez : un coup de pouce doit être envisagé sur le point de PMI. La baisse du nombre d'allocataires doit aussi permettre de revaloriser les allocations pour soutenir le monde combattant.

Concernant les moyens accordés aux opérateurs, je m'inquiète de la dégradation de la santé financière de l'Office national des combattants et des victimes de guerre, au sein duquel j'ai l'honneur de représenter notre assemblée. Si la baisse de sa subvention pour charges de service public s'explique par la fin du pilotage budgétaire du dispositif d'aide aux militaires blessés psychiques Athos, force est de constater que cette subvention reste quasi stable depuis 2021, alors que ses coûts de fonctionnement augmentent.

L'ONaCVG est ainsi forcé de recourir à des contrats à durée limitée et ne peut pas recruter à hauteur du plafond d'emploi autorisé en loi de finances.

Surtout, la trésorerie de l'office, qui a été longtemps excédentaire, s'est asséchée après avoir été ponctionnée à plusieurs reprises en loi de finances. Son niveau est désormais inférieur à un mois de fonctionnement courant.

Cette situation est déplorable, tout comme l'est la baisse de 5 millions d'euros de sa subvention d'action spéciale, qui sert à financer des actions de solidarité comme le maintien à domicile, l'aide à la réinsertion professionnelle ou encore le soutien aux ressortissants en Ehpad. Rappelons qu'en milieu rural l'ONaCVG est parfois le seul contact de personnes en grande difficulté !

La préservation des moyens consacrés aux liens armées-jeunesse demeure l'une des seules satisfactions de ce budget. Les crédits consacrés à la Journée défense et citoyenneté sont en effet quasiment au même niveau qu'en 2025, après une forte hausse entre 2024 et 2025.

La JDC est désormais recentrée sur sa dimension militaire. Si elle permet toujours de détecter les jeunes en situation d'illettrisme, je regrette, comme notre rapporteur spécial Marc Laménie, qu'elle ne comporte plus aucun module de sensibilisation des jeunes à divers enjeux comme l'enseignement de la mémoire.

En effet, s'il y a bien un sujet sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est l'importance cruciale de la transmission. À chacune des cérémonies patriotiques auxquelles je participe, à chacun de mes déplacements dans les écoles, je constate l'impact décisif de l'enseignement de la mémoire, surtout lorsqu'il est illustré par des souvenirs personnels et des histoires de famille, dont nous avons tous des exemples. Pour mieux comprendre le passé et prendre conscience des enjeux actuels, nos enfants ont besoin d'exemples concrets.

Aussi ne puis-je que regretter la baisse de 22 % des crédits affectés à la politique de mémoire. Cette baisse importante est injustifiable ! Même en neutralisant les baisses liées à la fin du cycle du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, elle se répercutera sur les enveloppes destinées aux actions mémorielles, à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts.

À l'heure où le Président de la République veut ranimer la flamme du patriotisme et du lien de la Nation avec son armée, ce choix est pour le moins incohérent…

Malgré ces réserves, le groupe Les Républicains votera pour les crédits de cette mission. L'instabilité politique actuelle ne doit en aucun cas fragiliser notre politique de solidarité en faveur du monde combattant.

Nous le devons à la France. Nous le devons à tous ceux qui, un jour, se sont sacrifiés ou battus pour elle ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Solanges Nadille. (Applaudissement au banc des commissions – M. Michel Masset, Mmes Émilienne Poumirol et Sophie Primas applaudissent.)

Mme Solanges Nadille. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » revêt une importance symbolique majeure.

Elle porte sur l'effort de solidarité nationale à l'égard des militaires, des combattants, des victimes civiles de guerre et de leurs conjoints survivants. Elle traduit notre reconnaissance envers l'engagement et le sacrifice de ces femmes et de ces hommes qui ont servi la France.

Surtout, cette mission finance notre politique de mémoire et permet de préserver notre patrimoine culturel et mémoriel. Elle est un vecteur essentiel de cohésion et de résilience de la Nation, en particulier dans un contexte géopolitique dégradé.

Sur ce point, la diminution des crédits sur l'activité mémorielle s'explique avant tout par la fin du cycle des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, qui a représenté un effort important en 2024.

Le changement de dénomination de la mission dans le projet de loi de finances pour 2026 n'est pas anodin : c'est un moyen d'affirmer que le monde combattant appartient au présent. Il désigne autant les générations du feu, les anciens combattants d'Algérie, du Maroc et de Tunisie, que les générations actuelles revenues récemment d'opérations extérieures en Afghanistan, au Sahel ou au Levant.

S'établissant à environ 1,7 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits de la mission diminuent d'environ 6 % par rapport à 2025.

Ces diminutions s'expliquent essentiellement par l'évolution de la démographie des bénéficiaires des pensions. Elles résultent notamment de l'érosion du nombre de ressortissants de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre.

Le programme 169, qui concentre une très large majorité des crédits de la mission, traduit des orientations stratégiques essentielles.

Je pense en premier lieu à l'accompagnement des harkis, qui est l'un des points majeurs de la mission. Ce projet de loi de finances préserve le déploiement du dispositif prévu par la loi du 23 février 2022 leur ouvrant droit à réparation.

Depuis 2022, l'action en faveur des harkis et des autres supplétifs et rapatriés a fait l'objet d'un renforcement exceptionnel, qui s'est poursuivi jusqu'en 2025. L'année 2026 devrait marquer la fin de cette progression. Nous resterons vigilants quant à la poursuite de la valorisation de la mémoire des harkis, dans la continuité de l'effort engagé ces dernières années.

Je pense en second lieu à la consolidation du dispositif de réhabilitation psychosociale Athos. Il représente un soutien essentiel pour les blessés militaires psychiques, qui peuvent bénéficier d'un accompagnement adapté.

Dans ce même programme, les pensions militaires d'invalidité et l'allocation de reconnaissance du combattant sont les dispositifs qui concentrent le plus de crédits.

Nous avons tous rappelé notre attachement à ces allocations, qui doivent être préservées.

Cette année, la valeur du point de pension militaire d'invalidité demeure stable. Des amendements que nous examinerons tout à l'heure ont pour objet d'augmenter les crédits à hauteur de l'inflation en 2025, laquelle est estimée à 1 %. Nous en débattrons.

Enfin, cette mission comporte des dispositions en faveur de la jeunesse, dont les crédits sont stabilisés.

Parmi ces dispositifs, la Journée défense et citoyenneté a évolué cette année, avec un format nouvelle génération, qui vise à renforcer le lien entre les jeunes et les militaires. Elle contribue notamment à renforcer l'attractivité des métiers des armées. Le service militaire volontaire joue également un rôle essentiel pour améliorer l'accueil des jeunes en situation de précarité sociale.

Mes chers collègues, cette mission est essentielle à la reconnaissance et à l'indemnisation de ceux qui ont servi la France avec courage et dévouement.

En responsabilité, le groupe RDPI votera en faveur des crédits de la mission. (Applaudissements au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Émilienne Poumirol. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en préambule de l'examen de cette mission, je tiens à redire l'immense respect du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain envers l'ensemble des acteurs du monde combattant d'hier et d'aujourd'hui.

Comme l'an dernier, la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » voit ses crédits diminuer. Pour autant, la question de la reconnaissance mémorielle reste centrale et doit être défendue. Elle est l'un des fondements du vivre ensemble dans notre pays.

Les crédits alloués pour l'année 2026 au titre de cette mission diminuent de 6,3 %. Si elle est principalement due à la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires, cette baisse affecte également certaines enveloppes.

Tout d'abord, et je sais que c'est un point de vue partagé dans cet hémicycle, nous regrettons l'absence de revalorisation suffisante du point de PMI au regard de l'inflation. Nous constatons même une baisse des crédits finançant les pensions militaires d'invalidité de 6,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. Pourtant, la baisse du nombre d'allocataires aurait pu et même dû permettre de soutenir le monde des combattants via des revalorisations.

Cela a déjà été souligné, le mode de calcul de la PMI, qui est basé sur l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique d'État, a conduit à une stagnation de ce montant du fait du gel du point d'indice des fonctionnaires, et ce en dépit de l'inflation constatée.

Nous ne pouvons que regretter cet écart entre l'évolution de l'inflation et celle du point de PMI. En effet, il nous paraît indispensable de préserver le pouvoir d'achat de ces retraités, dont les pensions sont déjà très faibles. Nous demandons donc une revalorisation au Gouvernement.

Le projet de budget pour 2026 consacre également une diminution importante – 5 millions d'euros – de la subvention d'action sociale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG). Celle-ci sert pourtant à soutenir des actions de solidarité envers le monde combattant et les victimes de guerre.

Cette diminution est notamment liée à la fin de la mesure Pupilles majeurs, qui a été introduite en 2024 et qui bénéficiait à 120 000 pupilles de la Nation.

Là encore, nous déplorons la décision du Gouvernement de ne pas soutenir de telles actions sociales. Comme l'a souligné Mme la rapporteure pour avis, le nombre de ressortissants en grande difficulté a tendance à augmenter, en particulier « en raison des besoins grandissants de la troisième génération du feu, et notamment des veuves isolées, et des besoins plus spécifiques des générations des Opex ».

Nous notons de la même manière la diminution de 4,3 % des crédits alloués au financement des aides versées aux harkis et aux rapatriés.

Les crédits alloués au droit à la réparation en faveur des harkis et des autres personnes rapatriées d'Algérie, en application de la loi du 23 février 2022, enregistrent une baisse de 16 %. Il apparaît ainsi que le budget consacré, en particulier, à l'instruction des dossiers de demande de réparation par l'ONaCVG et leur présentation à la Commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation, qui avait alors été installée, est insuffisant pour traiter l'ensemble des 12 600 demandes non traitées et qui devraient être acceptées. Nous appelons donc le Gouvernement à augmenter les crédits alloués pour que chacun, en particulier les harkis, puisse bénéficier au plus vite de l'indemnisation qui lui est due.

Comme les années précédentes, nous demanderons l'adoption d'un amendement visant à assurer l'indemnisation de dix-huit supplétifs de statut civil de droit commun de la guerre d'Algérie qui se sont vu refuser l'allocation de reconnaissance du combattant.

Nous proposerons aussi par voie d'amendement de mettre fin aux disparités existantes et d'élargir la rente viagère de 700 euros par mois qui est accordée aux veuves d'anciens supplétifs à toutes les veuves, sans tenir compte de la date du décès de leur mari, dans un souci d'équité et d'équilibre.

Enfin, ce projet de loi de finances réduit les crédits alloués à la politique de mémoire. Si une partie de cette diminution s'explique évidemment par la fin de la mission commémorative du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire, le budget de l'ONaCVG sera néanmoins amputé de 800 000 euros pour ses actions mémorielles, son soutien à l'entretien du patrimoine et à la rénovation des monuments aux morts. Nous ne pouvons que déplorer cette décision du Gouvernement, dans un temps où notre mémoire doit plus que jamais être transmise et soutenue.

Le projet de loi de finances pour 2026 établit une nouvelle sous-action consolidant les financements destinés aux maisons Athos. Ainsi, une sixième maison est en cours d'installation dans le Haut-Rhin. J'ai assisté à l'inauguration par Mme Mirallès de la cinquième maison dans le Lauragais, dans un petit village situé à dix kilomètres de chez moi. Il s'agit d'un établissement remarquable.

Si nous saluons évidemment ces avancées pour les maisons Athos, qui accompagnent les blessés psychologiques et leurs familles, nous alertons sur la trop faible progression des financements, qui met en péril les capacités de recrutement pérennes de ces structures.

Enfin, nous prenons note de la stabilisation des crédits consacrés aux liens armées-jeunesse, notamment du fait de la généralisation de la Journée défense et citoyenneté « nouvelle génération ». Cette journée sera plus immersive, afin de susciter davantage de vocations pour les carrières militaires. Elle sera mise en place à partir du 1er janvier 2026.

Conscient de l'importance de ce budget pour le monde combattant, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera toutefois pour l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi qu'au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de cette mission pour 2026 s'inscrit dans une évolution lexicale et politique inquiétante. L'intitulé de la mission, dont les premiers termes étaient auparavant « Anciens combattants », commence désormais par « Monde combattant ».

Ce changement reflète la place plus importante accordée aux générations Opex au détriment des anciennes générations du feu.

Les anciens combattants sont pourtant toujours en vie et subissent toujours le gel du point de la pension militaire d'invalidité et l'absence de revalorisation de l'allocation de reconnaissance du combattant.

Ce changement révèle, selon nous, une évolution de la politique de défense de notre pays qui prépare les mentalités au retour des conflits armés sur notre sol.

Lorsque le chef d'état-major des armées affirme que l'armée française doit se préparer à un choc d'ici trois ou quatre ans face à la Russie, il participe à ce discours aux accents bellicistes. Lorsque le même dit : « Si notre pays flanche parce qu'il n'est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, parce qu'il faut dire les choses, de souffrir économiquement parce que les priorités iront à de la production défense, alors, on est en risque », nous passons un cap dans la rhétorique guerrière.

Jamais nous n'accepterons de perdre des enfants dans des conflits fabriqués par le capitalisme, qui cherche dans l'économie de guerre à dégager des profits qu'il n'arrive plus à accumuler dans la financiarisation de l'économie ! Nous refuserons toujours que nos enfants meurent pour défendre les intérêts financiers d'une poignée de puissants ! L'expérience l'a montré, ce sont toujours les enfants des ouvriers et des employés qui sont envoyés sur la ligne de front, tandis que les enfants des milliardaires jouent à la guerre sur leurs écrans de télévision !

L'intitulé de cette mission budgétaire se termine par les termes « mémoire et liens avec la Nation ». Il faut croire que la transmission des horreurs des conflits armés aux jeunes générations est moins importante pour le Gouvernement, qui veut effacer les monuments aux morts dans nos communes pour y inscrire les noms de nos enfants.

En bon soldat de l'Otan, le Président de la République a annoncé pour l'été 2026 un nouveau service national militaire. Encore volontaire, celui pourra devenir obligatoire demain en cas de situation exceptionnelle. Nos jeunes pourront suivre pendant dix mois une formation militaire gracieusement rémunérée 800 euros par mois.

Bientôt, ils pourront rejoindre leurs voisins allemands, qui, pour l'instant, ont échappé au retour de la conscription obligatoire. Le gouvernement allemand a maintenu son ambition de bâtir l'armée conventionnelle la plus puissante d'Europe pour contrer la menace russe et compenser le désengagement du bouclier américain.

Le modèle européen Erasmus s'est largement fissuré au profit de la concurrence de l'armée la plus imposante et la plus moderne. Vos discours atlantistes nous ont conduits de L'Auberge espagnole à Voyage au bout de l'enfer.

Le 7 mars 1895, dans son discours à la Chambre des députés, Jean Jaurès déclarait : « Toujours votre société violente et chaotique, même quand elle veut la paix, même quand elle est à l'état d'apparent repos, porte en elle la guerre comme la nuée dormante porte l'orage. Messieurs, il n'y a qu'un moyen d'abolir enfin la guerre entre les peuples, c'est d'abolir la guerre entre les individus, c'est d'abolir la guerre économique, c'est de substituer à la lutte universelle pour la vie, qui aboutit à la lutte universelle sur les champs de bataille, un régime de concorde sociale et d'unité. »

Nous refusons la vision impérialiste engagée dans ce projet de loi de finances pour 2026.

Par conséquent, nous voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Thierry Cozic applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année, la présente mission voit ses crédits diminuer.

Pour 2026, la baisse est tout de même de 6,46 %. Cette évolution s'explique seulement en partie par la disparition d'anciens combattants, de bénéficiaires des pensions militaires d'invalidité ou de victimes de spoliation ou de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale en raison de leur âge avancé. Elle tient aussi à la fin de la branche commémorative.

Cette disparition des anciens combattants et résistants, mais aussi des victimes de guerre et de leurs contemporains, qui ont toutes et tous été touchés de près ou de loin, pose l'évidente question de la transmission de la mémoire.

Comme beaucoup d'entre vous, mes chers collègues, j'ai eu l'honneur de pouvoir échanger avec des résistants et des anciens combattants lors de cérémonies officielles ou dans le cadre scolaire. Ces échanges sont toujours marquants, car ils nous rappellent le prix douloureux de la liberté. Malheureusement, ces occasions se font désormais rares.

En parallèle, nous assistons au grand retour des discours belliqueux promus par l'extrême droite. Par le biais de ses accointances avec certains régimes autoritaires et ses politiques impérialistes, celle-ci prépare les guerres de demain. Par ailleurs, la cohésion sociale de notre société se réduit de manière préoccupante avec la prolifération de propos et actes racistes, antisémites et négationnistes.

Dans ce contexte très inquiétant, le devoir de mémoire est plus important que jamais. Je regrette donc vivement le choix du Gouvernement de réduire de plus de 23 % le budget de la sous-action « Mémoire et patrimoine mémoriel », qui remplit justement cette fonction. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à accorder 3 millions d'euros supplémentaires à cette branche du budget. Je vous invite vivement à le voter, mes chers collègues.

En cette année du quatre-vingtième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, la tentative de suppression du jour férié commémorant cette victoire contre l'occupant nazi par le Premier ministre François Bayrou était déjà un affront total à cette mémoire ! Si je me réjouis que cette folie n'ait pas abouti, diminuer le budget de la mémoire d'une telle ampleur serait également un très mauvais signal.

Permettez-moi également de regretter la transmission parfois très partiale de cette mémoire. Ainsi, alors que 57 % des Français estimaient en 1945 que l'URSS était la nation ayant le plus contribué à la défaite du Troisième Reich, contre 20 % pour les États-Unis et 12 % pour la Grande-Bretagne, ces proportions se sont inversées depuis. Si la contribution évidente des États-Unis, notamment par le débarquement de Normandie, est largement transmise, c'est beaucoup moins le cas de celle de l'URSS, qui a pourtant perdu 20 millions de personnes durant la Seconde Guerre mondiale.

De même, la transmission des guerres coloniales, notamment d'Indochine et d'Algérie, reste encore trop faible. Alors que des représentations caricaturales de cette mémoire inondent le débat public et que l'enjeu mémoriel reste central dans nos relations avec l'Algérie, la réalité de ces guerres doit être enseignée à toutes les Françaises et tous les Français.

Le sang versé par de nombreux colonisés, comme les tirailleurs sénégalais, ou par les francs-tireurs et partisans - main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI) n'a pas moins de valeur que celui des autres résistants ou soldats français. Leur contribution à la libération de la France doit être connue du plus grand nombre. Inscrire cette mémoire dans le roman national est d'autant plus important que cela permettrait de développer un plus fort sentiment d'appartenance à la Nation chez des milliers de jeunes Français héritiers de cette mémoire.

Pour conclure, le groupe GEST votera les crédits de cette mission, mais sera très attentif à ce que la politique mémorielle ne soit pas sacrifiée sur l'autel de l'austérité. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. le rapporteur spécial applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chaque année, les générations qui ont connu les conflits du XXe siècle disparaissent.

Cette réalité entraîne mécaniquement une baisse du nombre de bénéficiaires de la mission consacrée aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la Nation.

Toutefois, cette diminution ne doit pas nous conduire à effacer la reconnaissance nationale qui est due à ceux qui ont défendu notre pays. Cette mission n'est pas qu'un soutien financier. Elle est la concrétisation d'une obligation morale de la Nation envers ses anciens combattants et leurs familles, mais également envers les générations futures.

Je tiens à saluer le renforcement du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

De plus, la progression des crédits dédiés aux harkis répond à la nécessité d'honorer certaines décisions de justice, restées trop longtemps insatisfaites. Il faudra aller plus loin.

En effet, cette mémoire n'est pas juste un concept abstrait. Dans nos territoires, elle se vit au quotidien, notamment en Lot-et-Garonne. Je pense évidemment aux camps de Bias et de Sainte-Livrade-sur-Lot, qui ont accueilli plus d'un millier de Français d'Indochine à partir de 1956. Ce sont des familles entières, des couples et des veuves de Français qui fuyaient la guerre et pour lesquels la France représentait un refuge. Ces lieux ont ensuite accueilli, à partir de 1962, des familles de harkis en transit. Leur histoire fait désormais partie intégrante de celle du Lot-et-Garonne.

À Sainte-Livrade-sur-Lot, qui reste aujourd'hui l'un des derniers sites historiques, la mémoire des Français d'Indochine est encore très présente et continue d'être transmise. Elle fait partie de l'histoire de notre département, de notre pays et elle mérite pleinement sa place dans la politique mémorielle nationale. Une proposition de loi a d'ailleurs été déposée sur ce thème et il serait légitime que le Sénat puisse l'examiner dans les meilleurs délais.

Je tiens également à saluer le travail de nos communes. Aucune d'entre elles ne manque les commémorations en mémoire de nos anciens combattants. Tout comme nos écoles ! Je pense notamment au concours de la Résistance organisé par l'Association nationale des anciens combattants de la résistance (Anacr) dans les collèges et les lycées, qu'il faut, là aussi, accompagner. Ce concours gagnerait à être généralisé ; il se déroule principalement dans le Sud-Ouest. Je regrette d'ailleurs qu'il ne soit pas imposé dans les programmes scolaires aujourd'hui.

Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale » connaît aussi une baisse du nombre de bénéficiaires.

Malgré cette baisse, l'État doit continuer d'assurer une réparation complète et traiter les derniers dossiers en cours en matière de restitution des biens spoliés. La loi du 22 juillet 2023 relative à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 a permis de faciliter cette démarche. Les moyens prévus pour 2026 permettront de suivre ce travail jusqu'à son terme.

Ce programme finance également l'indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ou d'actes de barbarie. Là encore, madame la ministre, votre administration ne doit laisser aucun ayant droit sans réponse, il lui faut respecter la promesse mémorielle de la Nation envers ces personnes.

Cette mission est donc bien plus qu'une simple addition de crédits. Elle illustre une histoire nationale et le devoir que nous avons envers les anciens combattants, leurs familles, mais aussi les générations futures.

Le groupe RDSE, fidèle à son engagement envers la mémoire combattante et les valeurs républicaines, votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements au banc des commissions. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons a cette particularité d'unir le passé et l'avenir : le monde des combattants, mais aussi celui des jeunes, avec les liens armées-jeunesse, que l'actualité remet au centre.

Il ne s'agit donc pas seulement d'une mission de témoignage pour ceux qui ont combattu pour notre pays. Elle est aussi une mission de mémoire, de transmission et une mission qui rappelle la nécessaire cohésion des citoyens dans un monde redevenu incertain et instable. Elle regroupe donc beaucoup d'enjeux. Outre le passé et l'avenir, c'est aussi le présent qui est impliqué.

La particularité de cette mission est de subir une baisse de la quasi-totalité de ses crédits, par exemple en raison de l'attrition d'une population, comme c'est le cas des crédits pour les allocations viagères. Les autres crédits, en effet, stagnent ou diminuent.

Je salue mon collègue des Ardennes Marc Laménie, rapporteur spécial des crédits de cette mission. Notre département, les Ardennes, est une terre qui a connu le feu et qui est intimement concernée par tous les programmes de la mission.

Cette mission a évidemment pour objet les engagements que nous honorons, comme ceux envers les harkis, les autres supplétifs et les rapatriés.

Les crédits sont en baisse par rapport à 2025. Ainsi, la loi du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis et les autres personnes rapatriées d'Algérie peut être fragilisée dans son application. C'est un point sur lequel nous devons rester vigilants. Je salue l'amendement du rapporteur spécial visant à réabonder à hauteur du niveau de l'année dernière les crédits consacrés à l'indemnisation des harkis. La parole donnée doit être respectée.

Je regrette cependant que les supplétifs de statut civil de droit commun ne bénéficient pas de l'allocation de reconnaissance du combattant pour des raisons contentieuses. Cette injustice doit être réparée sans plus tarder !

La baisse des crédits de la politique de la mémoire est aussi à suivre avec beaucoup d'attention. Ceux-ci ont connu un pic en 2024 en raison de la commémoration du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire qui l'avaient entourée.

Les annulations, dont le niveau est préoccupant, comme l'a souligné le rapporteur spécial, posent des problèmes pour la réalisation des travaux d'entretien et fragilisent ainsi notre patrimoine mémoriel. En effet, nous devons rester attentifs aux nécropoles et carrés militaires.

Notre patrimoine mémoriel doit être entretenu, car les dégradations qui ne sont pas réparées à temps peuvent évidemment coûter plus cher à terme. J'appelle l'attention de Mme la ministre sur la nécessaire protection de nos lieux de mémoire. Je peux en témoigner dans les Ardennes.

Je salue au passage tous les bénévoles des associations qui participent à la vie de ces lieux de mémoire. Leur engagement doit être honoré, car ils donnent de leur temps et de leur énergie.

On note enfin la stabilité des crédits de la Journée défense et citoyenneté et du service militaire volontaire. Dans le contexte actuel, ces institutions sont appelées à jouer un rôle, notamment avec ce récent appel au renforcement du service militaire volontaire. Beaucoup de questions sont posées. La guerre en Ukraine s'invite indirectement dans l'examen de cette mission. Songeons aussi à toute cette instabilité géopolitique.

Comment réévaluer la Journée défense et citoyenneté à l'aune de l'inévitable remilitarisation de l'Europe ? Comment faciliter ce service militaire volontaire, appelé à prendre de l'ampleur ?

Enfin, dans la cohésion de la Nation, la Journée défense et citoyenneté a permis de détecter des situations d'illettrisme, preuve ce dispositif a une utilité. Comment, dans une journée, continuer à détecter ce qui fait défaut à notre cohésion ? Voilà un aspect qui pourrait être renforcé.

Quelles peuvent être donc les pistes pour une Journée défense et citoyenneté qui serait peut-être appelée à être encore refondue ? Il y a donc matière à réflexion en raison des évolutions actuelles.

Enfin, nous restons préoccupés par l'ONaCVG. La subvention pour charges de service public n'a pas été revalorisée, ce qui compromet les capacités de l'Office à recruter à hauteur de son plafond d'emplois autorisé en loi de finances. Il faut aussi faciliter les missions de cet établissement. Là aussi, nous devons garantir la bonne application d'une loi que nous avons votée en 2022.

Malgré certaines craintes, le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu'au banc des commissions. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Alice Rufo, ministre déléguée auprès de la ministre des armées et des anciens combattants. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à saluer l'exceptionnelle promotion du Bleuet de cette année. Je connais votre engagement en la matière et je vous en remercie.

Voilà quatre-vingts ans, au mois de juin 1945, le général Leclerc faisait ses adieux à la 2e division blindée en recommandant de conserver dans le temps de paix qui s'ouvrait alors ce qu'il appelait un « patriotisme agissant ». Les interventions qui se sont succédé ce soir ont, me semble-t-il, fait écho à cette exigence d'un « patriotisme agissant ».

Oui, il s'agit bien de « patriotisme », car l'objectif est de développer l'esprit de défense de notre Nation, dans un moment où – cela a également été souligné – les dangers s'accumulent.

Oui, ce patriotisme est « agissant » : reconnaître ce que nous devons à ceux qui se sont battus pour nous, c'est regarder non pas vers le passé, mais vers l'avenir.

Madame la sénatrice Sollogoub, vous avez évoqué l'Ukraine. J'ai récemment rencontré la ministre ukrainienne des vétérans et lui ai exprimé mon soutien. Preuve que ce devoir de reconnaissance est à la fois très actuel et très concret, l'Ukraine doit d'ores et déjà gérer la situation de ses vétérans ; cela fait intégralement partie de l'effort de guerre. Nous devons y être attentifs, car cela nous dit aussi quelque chose des réalités du temps présent.

Ce « patriotisme agissant », c'est celui du monde combattant, qui, s'il n'est pas présent dans l'hémicycle aujourd'hui, est bien à nos côtés. Plusieurs orateurs y ont fait référence.

Je tiens à saluer l'engagement et le savoir de ces hommes et de ces femmes. Je parle en connaissance de cause, puisqu'ils m'ont déjà beaucoup appris depuis mon entrée en fonction, et ils continuent de le faire. J'ai aussi beaucoup appris à vos côtés, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, et j'ai vraiment l'intention de coconstruire mon action avec vous.

En effet, cette mission a évidemment un caractère particulier. Ce n'est pas une mission budgétaire comme les autres. Elle revêt une dimension morale, puisqu'elle relève d'un devoir. Toucher à un euro de cette mission, c'est toucher à une partie de nous-mêmes, de notre pays, de ce que la Nation doit à celles et ceux qui se sont battus pour lui.

Ainsi que cela a été évoqué, la mission est marquée cette année par un changement sémantique. Elle s'intitule désormais « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ». Ce changement est emblématique de la dynamique que je viens de décrire.

Madame la rapporteure pour avis, je crois que tout le monde sait ici combien ce nouveau nom vous doit. Je vous félicite donc de ce succès, qui a déjà été annoncé par le changement de nom de l'Office.

Non, madame la sénatrice Apourceau-Poly, cette évolution lexicale ne s'inscrit pas dans une perspective belliciste. Au contraire ! Il s'agit bien de reconnaître la quatrième génération du feu, celle qui s'est battue pour nous dans les opérations extérieures. Nous voulons que la génération des anciens combattants et, plus généralement, l'ensemble du monde combattant se projettent vers l'avenir. Pour en avoir beaucoup parlé avec les représentants des associations, je sais qu'ils y sont tout à fait prêts. Ce travail de mémoire et de transmission, auquel vous êtes nombreuses et nombreux à avoir fait référence, nous le leur devons. C'est important pour notre pays.

Malgré ce qui a pu être dit, les grands équilibres de ce budget sont préservés. Certes, on note une baisse, mais vous en connaissez les motifs.

Cela s'explique d'abord par l'érosion du nombre de ressortissants de l'ONaCVG – évidemment, il s'agit d'une perspective triste –, qui devrait passer de 1,6 million actuellement à environ 550 000 en une vingtaine d'années, soit une baisse annuelle moyenne de 6 % à 7 %, d'après nos calculs. Nos évaluations s'appuient sur des éléments tangibles.

Par ailleurs, ne nous racontons pas d'histoires, le contexte budgétaire est quelque peu contraint. Il n'y a pas de raison que cette mission ne contribue pas aussi à l'effort budgétaire de toute la Nation.

Je tiens à rendre hommage à ma prédécesseure, qui a construit largement les grands équilibres de ce budget et qui s'est battue à vos côtés pour les protéger.

Je pense à la reconnaissance des combattants, de leurs proches et des victimes civiles de guerre, à la réparation des sacrifices consentis et à la valorisation du patrimoine mémoriel et culturel, qui nourrit la conscience que la France a d'elle-même.

S'il y a bien une baisse de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025 – je viens d'en donner des éléments d'explication –, je rappelle que les principaux postes budgétaires sont préservés.

Ainsi, 617 millions d'euros sont prévus pour les pensions militaires d'invalidité, 464 millions d'euros sont consacrés à l'allocation de reconnaissance du combattant. Celle-ci exprime depuis la Grande Guerre la reconnaissance de la Nation envers ceux qui ont combattu et qui ont survécu.

Le point de PMI a été largement évoqué. Permettez-moi de vous dire ce que je pense sincèrement – c'est selon moi la meilleure manière d'ouvrir le débat.

Une règle d'indexation a été fixée en 2022. Elle a été discutée de manière tripartite entre le gouvernement de l'époque, les associations du monde combattant et les parlementaires.

La règle d'indexation s'appuie sur le point d'indice des agents de la fonction publique, lequel n'évolue pas. Plusieurs d'entre vous, notamment Mme Poumirol, ont évoqué la question de l'inflation et exprimé leurs inquiétudes sur ce sujet.

C'est la raison pour laquelle, comme je l'ai annoncé lors de mon audition par la commission des affaires sociales, nous publierons, au début de l'année 2026, un rapport mesurant l'écart entre le point de PMI et l'inflation. Je sais que le dépôt du précédent rapport a pris du retard, ce qui ne simplifie pas la tâche.

Avant que nous ne passions à l'examen des amendements, je précise que le Gouvernement ne lèvera aucun gage : les crédits que vous souhaitez allouer à une ligne budgétaire devront être ponctionnés sur une autre. Sur ce sujet, j'en appelle à la responsabilité collective.

J'entends la préoccupation du monde combattant concernant l'inflation, que vous relayez très justement ici. Quelle que soit l'issue de nos débats ce soir, gardons-nous de transformer un dispositif d'indexation qui s'est révélé positif à cause d'une situation ponctuelle.

Gardons à l'esprit que la PMI est non pas une pension de retraite, mais une allocation qui témoigne de la reconnaissance de l'État. Au-delà de la situation budgétaire et des débats que nous avons cette année, veillons à préserver la solidité de ce dispositif.

Bref, je continuerai à travailler avec vous sur la question de l'inflation.

J'en viens à la poursuite du plan Blessés 2023-2027. Plusieurs d'entre vous ont souligné l'importance du dispositif Athos. J'ai mesuré à quel point celui-ci était essentiel et méritait nos efforts pour être consolidé, lorsque j'ai visité des maisons Athos à Bordeaux et à Toulon. Je me rendrai d'ailleurs demain à Colmar, pour inaugurer la sixième maison.

Notez que 80 % des 120 mesures du plan Blessés sont déjà appliquées. Je vous appelle à voter les crédits de la mission, qui permettront de mettre en œuvre ce plan jusqu'au bout.

Le budget met également l'accent l'Institution nationale des invalides (INI), à laquelle nous tenons tous ici. La subvention pour charges de service public (SCSP) qui lui est versée est stable, dans la mesure où elle s'élève à 14,4 millions d'euros.

En outre, sachez qu'un nouvel effort de 7,5 millions d'euros sera fait en matière d'investissement pour la réalisation de travaux de mise aux normes et l'acquisition de logiciels.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tous rendu hommage à l'ONaCVG. Je me joins à vous et salue le travail qui a été accompli par sa directrice générale.

Le projet de loi de finances pour 2026 préserve les moyens en effectifs et en subventions de fonctionnement de cet établissement. En outre, des investissements sont maintenus pour rénover le logiciel de traitement des dossiers et de paiement des allocations.

L'évolution du nombre de ressortissants de l'ONaCVG conduit à une contraction de l'enveloppe consacrée à l'action sociale. Cependant, je vous indique avoir demandé le maintien de la commission instituée en 2024 et en 2025 pour conforter l'aide aux pupilles de la Nation qui ont atteint l'âge de la majorité. Celle-ci pourra ainsi continuer à accompagner les individus concernés, dossier par dossier, et allouer une aide en complément du soutien mis en place à l'échelon départemental.

En 2026, l'ONaCVG bénéficiera d'un nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP). J'espère que vous vous engagerez tous dans la réflexion qui sera ouverte sur ce sujet, car nous aurons besoin de vos recommandations et de votre appui.

Ce contrat permettra notamment d'anticiper la nécessaire adaptation de l'Office à l'évolution du nombre de ressortissants et à leur répartition géographique.

Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la ministre déléguée.

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. L'action en faveur des harkis reste majeure. Elle est donc complètement maintenue et soutenue.

Enfin, les crédits consacrés à l'activité mémorielle sont réduits, en raison de la fin des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire. Il n'empêche que j'ai bien entendu vos remarques sur la nécessité de restaurer les monuments aux morts. Je veillerai personnellement à ce que des actions soient entreprises en ce sens. (Applaudissements au banc des commissions.)

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

1 730 919 618

1 738 300 118

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

1 652 495 770

1 659 876 270

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

78 423 848

78 423 848

dont titre 2

1 508 987

1 508 987

Mme la présidente. L'amendement n° II-1737 rectifié, présenté par MM. Canévet, Cambier, Delahaye et Maurey, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

 

20 000 000

 

20 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

20 000 000

 

20 000 000

SOLDE

- 20 000 000

- 20 000 000

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Cet amendement, comme ceux que j'ai déposés sur l'ensemble des missions de ce projet de loi de finances, vise à appeler l'attention de notre assemblée sur le fait que les dépenses publiques ont tendance à s'envoler et qu'il convient de les maîtriser au mieux.

En l'occurrence, cet amendement a un objet modeste, puisqu'il s'agit de réduire de 20 millions d'euros le montant des crédits de cette mission. Les économies escomptées permettront de ne pas dégrader davantage nos finances publiques qui, comme chacun le sait ici, ne se portent pas très bien.

Il est nécessaire que vous votiez cet amendement, mes chers collègues, si nous voulons commencer à réduire nos dépenses publiques.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Avant de donner l'avis de la commission sur chacun de ces amendements, je tenais, madame la ministre, mes chers collègues, à vous remercier sincèrement de vos témoignages, empreints de cœur et de passion.

Nous pouvons comprendre le coup de rabot de 5 % proposé par M. Canévet via cet amendement, même s'il paraît un peu dur.

Cependant, compte tenu des enjeux de cette mission – je pense notamment à l'entretien de la mémoire au travers de multiples sites, comme les nécropoles –, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Cette mission budgétaire est une dette, au sens moral du terme.

Certes, il n'existe certes pas d'argent magique, mais il n'y a pas non plus d'économies magiques.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Michel Canévet fait preuve de constance : mission après mission, il demande des diminutions de crédits. À l'évidence, il ne voit comme solution à la situation actuelle de notre pays qu'une réduction drastique des dépenses.

Comme pour la mission « Santé », dont nous venons d'achever l'examen, ce serait une erreur de diminuer les crédits dont nous discutons maintenant. Ces derniers sont en effet essentiels pour entretenir la mémoire non seulement des anciens combattants, mais aussi celle des combattants d'aujourd'hui, qui servent notre pays dans le cadre des opérations extérieures (Opex).

Le lien armées-Nation est important et il faut le conserver.

Je regrette, monsieur Canévet, que votre position se réduise à exiger des coupes budgétaires. Vous n'avez jamais suivi les propositions du groupe SER pour trouver des recettes, considérant qu'elles étaient toujours excessives en ce qu'elles frappaient des individus aux revenus importants.

Bref, je trouve votre attitude très dogmatique, cher collègue !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. On ne juge pas les résultats d'une mission uniquement à l'aune de l'augmentation de ses crédits. Je crois qu'il est temps, dans notre pays, de remettre en cause un certain nombre de politiques publiques, si nous voulons réduire le déficit, dont le montant devrait s'élever à 124 milliards d'euros pour le budget de l'État. C'est considérable ! Il est temps que chacun d'entre nous prenne enfin la mesure de la situation réelle des comptes publics ! (M. Jean-Jacques Panunzi acquiesce.)

Dès lors que nous ne sommes pas capables de trouver les recettes permettant de financer ce budget, nous devons arrêter d'imposer nos concitoyens qui en ont déjà ras-le-bol, comme le révèlent toutes les enquêtes d'opinion.

Ce sont bien nos concitoyens eux-mêmes qui nous demandent de réduire significativement les dépenses publiques : là encore, regardez les enquêtes d'opinion à ce sujet ! (Mme Émilienne Poumirol proteste.)

Si nous ne réduisons pas la dépense, nous échouerons à répondre à l'attente de nos concitoyens. Ne vous étonnez pas, dans ce cas, du résultat des urnes !

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. Je peux affirmer sans trop me tromper que, si les Françaises et les Français nous demandent de faire des économies, ce n'est certainement pas sur le budget des anciens combattants. J'en veux pour preuve le respect et la gratitude qu'ils témoignent à ces derniers, chaque fois qu'ils en ont l'occasion.

Certes, il faut faire des économies, mais, de grâce, pas sur ce budget-là, d'autant que celui-ci n'est pas le plus important de la République.

Monsieur Canévet, il est faux de dire que nous n'avons pas trouvé de recettes : nous n'avons cessé de faire des propositions en ce sens. Malheureusement, à de nombreuses reprises, la majorité sénatoriale ne nous a pas suivis. (Mme Pascale Gruny et M. Michel Canévet s'exclament.)

C'est la raison pour laquelle je nous invite toutes et tous à raison garder et, surtout, à ne pas essayer de mégoter sur le dos des anciens combattants et des associations mémorielles et patriotiques.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Avançons, chers collègues !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1737 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2036 rectifié bis, présenté par MM. Fernique, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme Drexler, MM. Dossus et Gontard, Mmes Guhl et Herzog, MM. Jadot, Kern et Klinger, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Schalck, Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

30 012 920

30 012 920

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale

30 012 920

30 012 920

TOTAL

30 012 920

30 012 920

30 012 920

30 012 920

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Depuis le 11 novembre dernier, il y a tout juste un mois, une plaque a été installée aux Invalides pour rendre hommage aux Alsaciens et aux Mosellans qui furent incorporés de force dans l'armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale.

Ces 130 000 hommes, âgés de 17 à 36 ans, furent contraints de porter les armes sous un uniforme qu'ils détestaient ; 40 000 d'entre eux ne sont jamais revenus, ce qui, pour les seuls départements d'Alsace et de Moselle, représente 18 % de la totalité des militaires Français morts durant cette guerre.

Cette plaque redonne de la dignité à ceux auxquels on a imposé le statut de traîtres. Pendant les décennies qui suivirent la guerre, les survivants et leurs proches ont vécu avec cet opprobre. Bien peu, parmi leurs compatriotes, ont eu conscience du manquement dont les départements évoqués ont été victimes.

Ce manquement s'est d'abord traduit par l'abandon de l'État face à l'annexion, de fait, de ces territoires en 1940. Cette injustice s'est prolongée parce que des décennies ont passé avant qu'il soit admis qu'il s'était bien agi d'une annexion, et non d'une occupation. C'est de cette annexion qu'a résulté le crime de masse qu'a été l'incorporation de force de nos soldats dans l'armée allemande.

Leurs orphelins – ces enfants privés de père, qui sont encore plus de 3 000 aujourd'hui et qui sont évidemment très âgés – n'ont bénéficié d'aucune aide financière en reconnaissance de leurs souffrances, contrairement à ce que prévoient les décrets de 2000 et de 2004 qui ont reconnu les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie.

Cet amendement est défendu au nom du groupe GEST, mais j'appelle votre attention sur le fait qu'il a été cosigné Elsa Schalck, Sabine Drexler, Christine Herzog et Christian Klinger.

Nous proposons de faire un geste concret envers les orphelins des incorporés de force, victimes d'un manquement national après un crime de masse si spécifique.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Nous comprenons le sens de cet amendement pour les départements d'Alsace et de Moselle, d'autant qu'il a été cosigné par presque tous les sénateurs de ces territoires.

Malgré tout le respect qu'elle a pour une telle demande, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je vous remercie de nous permettre de rappeler le devoir de mémoire que nous avons vis-à-vis des incorporés de force dans l'armée allemande. J'irai demain leur rendre hommage au mémorial Alsace-Moselle, à Schirmeck, dans la continuité de l'inauguration, par le Président de la République, le 11 novembre dernier, de la plaque qui leur est dédiée aux Invalides.

J'ajoute que le ministère soutient la recherche historique sur ce sujet, qui sera déclinée dans les manuels scolaires. Je suis à votre disposition pour en discuter.

À cet égard, Monsieur le sénateur, vous pouvez être assuré de la reconnaissance de la France vis-à-vis des incorporés de force.

Les orphelins concernés sont des ressortissants de l'ONaCVG. À ce titre, ils sont traités de manière égale avec les autres orphelins des individus morts pour la France en combattant.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.

M. Jacques Fernique. L'apprentissage de cette mémoire constitue une avancée, qu'il faut approfondir. En effet, les victimes civiles, comme les victimes combattantes, dont le nombre est sans commune mesure dans les départements que j'ai cités, attestent d'un héritage mémoriel régional spécifique terriblement douloureux, qui a été trop longtemps dissocié de la mémoire nationale.

Le Président de la République s'est engagé à ce que l'éducation nationale remédie à ce problème.

Je considère qu'il n'est pas juste d'assimiler le drame et les douleurs de l'Alsace et de la Moselle à ce qu'ont vécu, aussi durement, tous les autres Français.

En décrétant, dans les années qui ont suivi la guerre, que les incorporés de force étaient morts pour la France, comme les autres soldats, on a d'une certaine manière alimenté une forme de déni des crimes de masse spécifiques qu'ils ont subis, au mépris du droit international le plus élémentaire.

Voilà pourquoi nous avons une dette particulière à l'égard de ces orphelins. Le geste proposé serait un acte de dignité pour toute la Nation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sabine Drexler, pour explication de vote.

Mme Sabine Drexler. Cet amendement vise à répondre à une exigence de justice qui a été longtemps différée. La République a su, par le passé, reconnaître et réparer d'autres souffrances qui sont nées de l'histoire et a admis que des situations exceptionnelles imposaient des réparations exceptionnelles.

Pour les orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle, cette reconnaissance ne s'est jamais accompagnée d'une véritable réparation.

Jacques Fernique l'a rappelé, ces orphelins sont encore 3 500 aujourd'hui. Si leur douleur a été entendue – en témoigne l'installation récente d'une plaque aux Invalides –, elle n'a jamais été indemnisée, alors que leur situation est parfaitement comparable à celle d'autres orphelins qui ont reçu une compensation.

Cet amendement ne crée pas un précédent, il vise seulement à mettre fin à une inégalité de traitement, à rétablir une équité que la République a su accorder ailleurs.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2036 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-1992, présenté par Mmes Monier, Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

 

4 000 000

 

4 000 000

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

4 000 000

 

4 000 000

 

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

 0

 0

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale » regroupe aujourd'hui trois dispositifs essentiels visant à réparer, autant qu'il est possible de le faire, les injustices subies par les victimes de la barbarie nazie et leur famille.

Ces dispositifs indemnisent les victimes de spoliations antisémites, les orphelins de parents qui ont subi des persécutions antisémites ou des actes de barbarie.

Cependant, une inégalité demeure : depuis le décret du 27 juillet 2004, les orphelins de résistants morts fusillés peuvent être indemnisés, tandis que ceux dont les parents sont tombés au combat les armes à la main, en luttant contre le nazisme, ne le peuvent pas.

Pourtant, la cause du décès est identique, puisqu'il s'agit d'un sacrifice pour la liberté et contre la barbarie.

Cet amendement vise donc à réparer cette injustice en créant un quatrième dispositif d'indemnisation réservé aux orphelins de résistants morts au combat.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. La commission sollicite l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le Gouvernement est très attaché au périmètre actuel d'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie et de la Shoah, vis-à-vis desquels l'État français a reconnu sa part de responsabilité.

Ce dispositif doit garder sa particularité. C'est bien le caractère hors norme de la barbarie nazie et la complicité du régime de Vichy qui est à l'origine de cette indemnisation réservée aux enfants dont les parents résistants, martyrs ou ayant fait l'objet de persécutions antisémites ou raciales sont décédés en déportation ou ont été exécutés.

Cela n'enlève absolument rien à la reconnaissance que la France porte aux résistants morts au combat, qui bénéficient, ainsi que leurs descendants, de toutes les dispositions relatives aux personnes qui sont mortes pour la France en combattant.

Ainsi, ils sont considérés comme des combattants volontaires de la Résistance. Leur situation est la même que ceux qui sont morts dans les forces françaises libres.

Les orphelins, quel que soit leur âge, sont ressortissants de l'ONaCVG et peuvent bénéficier, à ce titre, de l'assistance de cet établissement. Les orphelins de résistants morts au combat sont donc traités d'égal à égal avec tous les autres orphelins d'individus morts pour la France.

Il n'y a donc pas de raison de leur accorder des droits différents, même si nous reconnaissons, bien évidemment, leur souffrance et la dette qui leur est due.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1992.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-20, présenté par M. Laménie, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

12 000 000

 

12 000 000

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

12 000 000

 

12 000 000

TOTAL

12 000 000

12 000 000

12 000 000

12 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Cet amendement vise à rétablir à 12 millions d'euros les crédits consacrés à la mise en œuvre du dispositif de reconnaissance des harkis prévu par la loi du 23 février 2022. 

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Je partage l'attention que vous portez à la mémoire des harkis, monsieur le rapporteur spécial.

Le budget pour l'année 2025 a été doté de 70 millions d'euros pour payer les conséquences de la décision Tamazount et autres c. France rendue par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).

Le projet de loi de finances pour 2026 ouvre donc 58,8 millions d'euros au titre du droit à réparation et tient compte de l'élargissement à 37 nouveaux sites de la liste des sites ouvrant droit à réparation, pour un coût estimé à 8 millions d'euros.

J'ajoute que le dispositif sera maintenu jusqu'en 2027, ce qui permettra à la CNIH (commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, les autres personnes rapatriées d'Algérie anciennement de statut civil de droit local et les membres de leurs familles) de procéder à d'éventuels ajouts à la liste des sites ouvrant droit à réparation, qui feront l'objet de paiements en 2027, le temps que les dossiers soient constitués.

De ce point de vue, le budget pour 2026 répond aux besoins estimés, sachant que la loi de finances de fin de gestion pour 2025 nous a permis de prendre de l'avance. À ce jour, 30 000 dossiers ont été traités, soit la majorité de ceux qui étaient concernés par le dispositif.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-20.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-1995, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

6 000 000

 

6 000 000

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

6 000 000

 

6 000 000

TOTAL

6 000 000

6 000 000

6 000 000

6 000 000

SOLDE

 0

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement va dans le même sens que celui qui vient d'être présenté, en ce qu'il vise, de manière simple et juste, à accorder une allocation viagère à toutes les veuves de harkis, sans distinction liée à la date du décès du conjoint.

Aujourd'hui, si le mari est décédé avant 2016, la veuve perçoit 40 % de moins que s'il est mort après 2016. Nous demandons de mettre fin à cette disparité incompréhensible.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Nous avons déjà évoqué cette situation l'an dernier. Cette demande est depuis satisfaite.

En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le ministère des armées, qui était favorable à cette régularisation, a obtenu, via la loi de finances initiale pour 2024, la modification de l'article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

Ainsi, à compter du 1er janvier 2004, les rentes des veuves de harkis sont alignées au meilleur montant, indépendamment des choix faits antérieurement.

Cet amendement étant satisfait, le Gouvernement en demande le retrait.

Mme la présidente. Madame Poumirol, l'amendement n° II-1995 est-il maintenu ?

Mme Émilienne Poumirol. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° II-1995 est retiré.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° II-1731 rectifié est présenté par Mmes Micouleau, Richer, Bonfanti-Dossat, Belrhiti, Berthet et V. Boyer, M. Cambon, Mme de Cidrac, M. Delia, Mme Di Folco, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mmes Malet et Nédélec et MM. Panunzi, Piednoir, Pointereau, Rietmann et Sol.

L'amendement n° II-1994 est présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° II-2037 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cukierman et Brulin, M. Savoldelli et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

75 510

 

75 510

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

75 510

 

75 510

TOTAL

75 510

75 510

75 510

75 510

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Else Joseph, pour présenter l'amendement n° II-1731 rectifié.

Mme Else Joseph. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l'amendement n° II-1994.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement, que nous déposons systématiquement chaque année, concerne les membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun, qui ne sont plus que dix-huit aujourd'hui.

Puisque plusieurs décisions ont été rendues et que le Conseil constitutionnel, en 2016, a censuré l'article 52 de la loi du 18 décembre 2016, il nous paraît juste d'accorder l'indemnité unique de 4 195 euros prévue par la loi de programmation militaire (LPM), afin de solder définitivement cette injustice.

Pour rappel, seules dix-huit personnes sont encore en vie. Ainsi, le coût total de la mesure s'élèverait à 75 510 euros, ce qui n'aggraverait pas le déficit de la Nation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l'amendement n° II-2037.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à traiter la situation des veuves de rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun.

La loi de programmation militaire leur a attribué le versement d'une allocation unique de 4 195 euros, sous réserve que les conditions suivantes soient remplies : la personne concernée doit avoir déposé sa demande entre le 5 février 2011 et le 19 décembre 2013 et elle ne doit pas avoir engagé de procédures contentieuses après une réponse négative de l'administration ou après que celle-ci a gardé le silence.

Cela vient d'être rappelé, dix-huit personnes sont toujours en attente du versement de l'allocation unique. Cet amendement vise donc à réparer cette injustice et à clore ce dossier.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Il est vrai que nous évoquons cette question chaque année. L'ONaCVG a étudié le dossier et a pris contact avec l'ensemble des personnes intéressées.

C'est pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Le besoin des dix-huit personnes identifiées a été réévalué. Il a été établi qu'elles n'avaient pas formulé de demande spontanée d'accès au dispositif visé par ces amendements. Je vous confirme néanmoins que l'accompagnement individualisé sera maintenu.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Chaque année, on nous répond de manière itérative que le dossier sera réexaminé. En 2020, les membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun étaient au nombre de vingt-deux ; ils ne sont plus que dix-huit aujourd'hui. En continuant comme cela, nous n'aurons bientôt plus besoin d'indemniser personne !

Je suis très étonnée que vous ayez pu faire une enquête et que les personnes concernées aient indiqué n'avoir besoin de rien.

Je maintiens donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. Je saisis cette occasion de rendre hommage à l'ancienne ministre déléguée chargée de la mémoire et des anciens combattants, Patricia Mirallès, qui a défendu la loi du 23 février 2022.

Madame la ministre, je dois avouer être depuis lors très mal à l'aise quand nous débattons de ces amendements chaque année, et ce pour une raison simple.

En effet, lors de l'examen de ce texte, une distinction a été établie entre les harkis placés dans les centres de rétention et ceux qui étaient employés dans les hameaux de forestage. Il se trouve que mon département a hébergé ces deux types de lieu. À l'époque, certains rapatriés étaient donc déjà discriminés.

Je suis encore gêné d'entendre aujourd'hui que le montant de l'indemnité que perçoit une veuve dépend de la date de décès de son mari.

J'y insiste : je réprouve ces distinctions, ces discriminations – j'ose le terme – entre les forces supplétives, quel que soit leur statut. Nous parlons de dix-huit veuves qui vivent aujourd'hui avec une blessure ouverte, symbolique – comme celle que les guerres peuvent infliger –, et ressentent de l'injustice.

C'est la raison pour laquelle je vous lance cet appel, madame la ministre : n'attendons pas que ces dix-huit veuves meurent pour essayer de rétablir un peu de justice !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1731 rectifié, II-1994 et II-2037.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1993, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

6 500 000

 

6 500 000

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

6 500 000

 

6 500 000

TOTAL

6 500 000

6 500 000

6 500 000

6 500 000

SOLDE

 0

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à revaloriser le point de PMI. Je n'en dis pas plus : le sujet a été largement évoqué tout à l'heure et la ministre a en partie répondu à nos préoccupations.

Mme la présidente. L'amendement n° II-2038, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cukierman, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

6 172 755

6 172 755

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

6 172 755

6 172 755

TOTAL

6 172 755

6 172 755

6 172 755

6 172 755

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise, lui aussi, à revaloriser le point de PMI, afin de rattraper le retard pris depuis vingt ans vis-à-vis de l'inflation.

La ministre des armées a reconnu, devant l'Assemblée nationale, que l'écart entre le point de PMI actuel et son niveau théorique, s'il avait été indexé sur les prix à la consommation, n'a cessé de croître depuis 2005. Cela entraîne concrètement une perte de pouvoir d'achat de 10 points pour les pensionnés entre 2005 et 2025.

Ce gel des pensions est la conséquence non pas de l'année blanche annoncée par le Gouvernement sur les prestations sociales, mais de celle qui a été prévue pour les fonctionnaires, dont le point d'indice va encore rester bloqué cette année.

Cet amendement tend donc à augmenter les crédits de 1 %, pour tenir compte de l'inflation.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Le volet humain est essentiel et même prioritaire. Ces pensionnés méritent beaucoup de respect et de reconnaissance, comme nous l'avons rappelé.

Sur ces amendements, la commission sollicite l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Sincèrement, je n'ai pas de solution à proposer, dans la mesure où le gage ne sera pas levé.

Sur le rattrapage vis-à-vis de l'inflation, je m'engage devant vous à étudier cette question au cours du premier trimestre de l'année prochaine.

Par ailleurs, l'indexation sur le point d'indice de la fonction publique ayant été décidée, il convient à mon sens de ne pas changer de dispositif au seul motif qu'une difficulté survient.

En toute franchise, même si je comprends la situation qui est évoquée, je ne peux émettre un avis favorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1993.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2038.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-675 rectifié, présenté par MM. Longeot, Dhersin, E. Blanc et S. Demilly, Mmes Billon, Bourguignon et Jacquemet, MM. Menonville, Duffourg, Gremillet, P. Martin, Pillefer, Haye, Levi et J.M. Arnaud, Mmes Malet, Saint-Pé et Patru et M. Hingray, est ainsi libellé :

 Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

5 000 000

 

5 000 000

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.

M. Pierre-Antoine Levi. Cet amendement concerne les pupilles de la Nation.

Il a pour objet de rétablir la mesure Pupilles majeurs et, par conséquent, de prévoir une enveloppe de 5 millions d'euros sur l'action 03 du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

Ces crédits visent à compenser la baisse des moyens d'action sociale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) destinés aux pupilles de la Nation et aux orphelins de guerre majeurs.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Compte tenu du contexte national, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, je suis attachée à ce que l'ONaCVG soit particulièrement attentif à la situation des pupilles de la Nation, notamment à celle des orphelins majeurs.

C'est pourquoi, malgré la baisse du budget qui accompagne la diminution tendancielle, j'ai demandé que la commission mise en place soit maintenue. Ce n'est pas un maintien de façade, c'est un engagement de suivi de ma part.

La disparition d'une enveloppe ponctuelle fléchée n'est donc pas synonyme de désengagement. J'en ai avisé les associations concernées et je vous tiendrai régulièrement informés.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Levi, l'amendement n° II-675 rectifié est-il maintenu ?

M. Pierre-Antoine Levi. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° II-675 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-1727, présenté par MM. Gontard, Mellouli, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes de Marco, Ollivier, M. Vogel et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

3 000 000

 

 

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

3 000 000

 

3 000 000

TOTAL

3 000 000

3 000 000

3 000 000

3 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement n° II-1727 vise à mieux faire vivre la mémoire des guerres récentes impliquant la France, c'est-à-dire les deux guerres mondiales, la guerre d'Indochine et la guerre d'Algérie.

Il nous semble urgent de renforcer la transmission de la mémoire de ces conflits aux jeunes générations, notamment par l'organisation de projets mémoriels et culturels dans le cadre scolaire.

Cet amendement tend donc à doubler la dotation de la sous-action « Mémoire et patrimoine mémoriel » du programme 169, ce qui représente une augmentation de 3 millions d'euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Les actions de mémoire, de transmission et de pédagogie sont importantes. Leur lien avec l'éducation nationale a d'ailleurs été largement rappelé.

Toutefois, la commission demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. J'ai bien entendu la grande attention portée par cette assemblée à la mémoire.

Nous devons approfondir le travail avec le monde combattant et le ministère de l'éducation nationale sur le développement de ces actions mémorielles. J'en ai d'ailleurs discuté avec mon collègue Edouard Geffray, qui est très engagé sur ce sujet.

Les budgets des musées, qui ne relèvent pas de ce programme, contribuent beaucoup à l'action mémorielle et nous allons poursuivre en ce sens.

Évidemment, la fin des commémorations du quatre-vingtième anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire ne se résume pas à une baisse de budget. Elle sera aussi l'occasion de dresser le bilan d'une opération qui s'est très bien déroulée.

Je rencontrerai bientôt M. Philippe Étienne pour tirer les conclusions de la mission Libération qui lui a été confiée et mettre en œuvre des actions concrètes, qui ne sont pas nécessairement programmées budgétairement dans cette mission.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1727.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-411 rectifié ter, présenté par Mme Lermytte, MM. Wattebled, A. Marc, Pellevat, Grand et Laménie, Mme L. Darcos, M. Chasseing, Mme Bessin-Guérin, MM. Chevalier et Rochette, Mmes Saint-Pé, Nadille et Bellamy, M. Haye et Mme de Cidrac, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation

1

 

1

 

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

dont titre 2

 

1

 

1

TOTAL

1

1

1

1

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.

Mme Marie-Claude Lermytte. Cet amendement d'appel tend à ce que les militaires décédés accidentellement lors d'entraînements ou d'exercices à haute intensité puissent recevoir la mention « Mort pour le service de la Nation ».

Créée par la loi du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, cette mention rend hommage aux militaires tombés en service et ouvre des droits importants à leurs proches. Depuis le décret du 18 mars 2016, son attribution est toutefois restreinte au décès causé par l'acte volontaire d'un tiers.

Ainsi, de nombreux militaires morts en préparation opérationnelle ou en mission intérieure ne peuvent plus en bénéficier, alors qu'ils servaient dans des conditions comparables à celles du combat. Plusieurs estimations font état de près de 130 cas depuis cette évolution.

Afin d'ouvrir la réflexion sur un réexamen de ce périmètre, nous avons décidé d'inscrire symboliquement 1 euro sur l'action n° 03 « Reconnaissance envers le monde combattant » du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation ».

Ce montant est prélevé, pour des raisons de recevabilité, sur l'action n° 02 du programme 158, sans intention de réduire ses crédits pour autant.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Comme l'a rappelé Mme Lermytte, il s'agit d'un amendement d'appel. La commission en demande le retrait.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Alice Rufo, ministre déléguée. Comme vous le savez, trois mentions coexistent depuis 2021. J'en rappelle le cadre.

La mention « Mort pour la France » est dédiée aux décès survenus au feu, en temps de guerre ou au cours d'une opération extérieure.

La mention « Mort pour le service de la Nation » est attribuée lorsque le décès résulte de l'acte volontaire d'un tiers.

La mention « Mort pour le service de la République » peut être décernée en cas de décès survenu lors de missions présentant une dangerosité ou un risque particulier, notamment à l'occasion d'exercices militaires.

La nécessité de prendre en compte les décès survenus en préparation opérationnelle a d'ailleurs largement justifié la création de cette dernière mention.

Nous sommes très attachés à ce cadre et à la reconnaissance de la singularité de chacune de ces mentions.

Aussi, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. La mesure qui est ici proposée semble aller de soi.

Comme vous le savez, il existe pour les sapeurs-pompiers une distinction entre la mention « Mort au feu » et celle de « Mort en service commandé », qui s'applique aux décès accidentels survenus lors du trajet vers le lieu d'intervention.

Le parallélisme des formes pourrait parfaitement s'appliquer. C'est pourquoi je vous invite à voter cet amendement, mes chers collègues.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-411 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Engagements financiers de l'État

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

Remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements » du projet de loi de finances pour 2026.

La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le constat que je m'apprête à dresser devant vous n'est guère réjouissant : les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » sont appelés à devenir dans quelques années le premier poste du budget de l'État.

Pour 2026, ils représenteront encore le deuxième poste en crédits de paiement, après la mission « Enseignement scolaire », soit 60,4 milliards d'euros, et le troisième en autorisations d'engagement.

Si l'on déplore parfois l'insuffisance de crédits sur certaines missions, l'approche est ici malheureusement tout autre : ces crédits affichent une augmentation de plus de 4,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), sous l'effet de l'alourdissement de la charge de la dette de l'État dans un contexte d'endettement public historique et de remontée des taux d'intérêt souverains.

À la fin octobre 2025, l'encours de la dette négociable de l'État s'établissait à 2 760 milliards d'euros. Quant à la dette publique, elle s'élève à plus de 3 400 milliards d'euros à la fin du deuxième trimestre 2025, soit 115,6 % du PIB, en augmentation de plus de 110 milliards d'euros sur les seuls six premiers mois de l'année.

Je rappelle qu'avant la crise de 2008 – j'étais déjà membre de la commission des finances ! – nous étions au même niveau que l'Allemagne, c'est-à-dire à 60 % du PIB.

Je consacrerai l'essentiel de mon intervention à l'accroissement continu de la charge de la dette, avant d'aborder la question des appels en garantie de l'État, notamment des prêts garantis par l'État (PGE), avant de conclure mon propos en évoquant la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.

Comme je l'ai indiqué, la charge de la dette de l'État devrait atteindre en 2026 des niveaux records. Alors que le taux d'emprunt à court terme a évolué à la baisse dans la période récente, emportant peut-être un effet anesthésiant suivant l'assouplissement monétaire conduit par la Banque centrale européenne (BCE), les taux sont en effet repartis à la hausse depuis le début de l'année 2025.

Cette pentification des primes de terme s'explique notamment par les effets de relance budgétaire annoncée en Allemagne et par les besoins rehaussés des politiques publiques dans le monde, concernant notamment la défense dans la zone euro.

Les investisseurs anticipent désormais une hausse des besoins budgétaires des pays européens, qui se répercute sur les taux souverains à dix ans aussi bien des pays cœurs que des pays périphériques.

Le Gouvernement en tient compte puisque, selon ses prévisions, les taux à dix ans continueraient à augmenter pour s'élever à 3,7 % en 2025 et 3,8 % fin 2026. Nous sommes donc loin des taux zéro, voire des taux négatifs, qui ont agi comme l'anesthésiant des précédents gouvernements, monsieur le ministre.

Il convient de souligner la sensibilité de la charge de la dette au niveau des taux d'intérêt : d'après les estimations de l'Agence France Trésor, un choc de taux de 100 points de base – ce n'est pas grand-chose : 0,1 % – …

M. Michel Canévet. On y est !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. En effet !

… représenterait une hausse de ladite charge de plus de 3,2 milliards d'euros en un an, et de 33,5 milliards d'euros à neuf ans.

Nous venons d'examiner la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » où il était question de quelques dizaines de millions d'euros et les économies que nous pouvions réaliser de-ci de-là. Retenez simplement ce chiffre, mes chers collègues : 100 points de base, par exemple une augmentation de 3,6 % à 3,7 %, représentent à eux seuls 3,2 milliards d'euros en un an et plus de 33 milliards d'euros à l'horizon de neuf ans.

De fait, l'instabilité politique que nous subissons joue malheureusement un rôle déterminant dans l'appréciation de la qualité de la signature française. En particulier, les risques concernant la stabilité budgétaire ou la pérennité des politiques de réforme sont évidemment très suivis par nos investisseurs et par les agences de notation. J'ai à ce titre à l'esprit la question des retraites.

Au regard de ces éléments, l'Agence France Trésor prévoit que nous devrons emprunter cette année une somme record. En 2026, nous prévoyons 310 milliards d'euros d'emprunt au minimum, non seulement pour les émissions de nouvelle dette, mais aussi pour le rachat des dettes arrivant à échéance. La charge de la dette devrait donc s'affirmer très rapidement comme le premier poste du budget de l'État.

En 2026, en comptabilité budgétaire, la charge de la dette devrait atteindre 58 milliards d'euros, en croissance de plus de 4,5 milliards d'euros par rapport à la loi de finances pour 2025. En comptabilité générale, son montant devrait s'élever à 60,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 8 milliards d'euros par rapport à 2025.

Si l'on continue ainsi, la charge de la dette pourrait augmenter de 70 milliards d'euros en 2027, de 90 milliards d'euros en 2029. Nous devrions très rapidement, autour des années 2030, atteindre la barre des 100 milliards d'euros.

J'en viens maintenant aux crédits consacrés aux appels en garantie de l'État, dont le programme 114 retrace l'ensemble des dépenses budgétaires découlant de la mise en jeu des garanties octroyées par l'état des tiers. Ces crédits sont en baisse par rapport à la loi de finances pour 2025, ce qui constitue plutôt une bonne nouvelle.

Concernant les PGE, les crédits sont également presque stables, avec 5,7 milliards d'euros cumulés depuis 2020, et une prévision de 471 millions d'euros pour 2026.

J'en viens à la situation des comptes spéciaux rattachés à la mission.

Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » n'est pas doté de crédits pour 2026. Le compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » devrait quant à lui de nouveau dégager un excédent.

En conclusion, la commission des finances propose – j'allais dire avec regret, car il s'agit malheureusement d'une mission de constat – d'adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

Il n'existe guère d'amendements pour baisser ces crédits. Nous nous en réjouirions tous qu'il y en ait, car cela signifierait que nous serions enfin parvenus à une bonne situation budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Canévet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, je concentrerai mon propos sur l'appréciation de la commission des finances concernant les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Participations financières de l'État ».

Ce CAS constitue un instrument dérogatoire du droit budgétaire classique, dont la fonction est de retracer, en recettes et en dépenses, les sommes liées aux opérations que l'État réalise en sa qualité d'actionnaire.

Je commencerai par présenter une opération récente et majeure de l'État actionnaire, qui illustre son rôle non seulement pour entrer au capital d'entreprises stratégiques, mais également pour les accompagner dans leur développement et leur croissance.

Il s'agit de l'augmentation de capital annoncée en juin 2025 par l'opérateur satellitaire européen Eutelsat. En effet, cet opérateur de taille mondiale a procédé, en 2023, au rachat d'une entreprise pionnière dans les constellations de satellites en orbite basse, l'entreprise britannique OneWeb.

Depuis ce rachat, Eutelsat se trouve dans une situation caractérisée par une perspective de croissance importante grâce à sa double présence sur l'orbite géostationnaire, avec une flotte de trente-quatre satellites, et sur l'orbite basse grâce aux plus de 600 satellites de la constellation OneWeb.

Cependant, Eutelsat se trouvait, jusqu'à cet été, dans une situation financière complexe, étant donné son niveau d'endettement élevé et le besoin d'investissements substantiels, à hauteur de 4 milliards d'euros à échéance de 2029, auxquels l'entreprise fait face pour assurer le renouvellement des satellites de la constellation OneWeb.

Pour répondre à cette situation, l'État est intervenu pour accompagner, en tant qu'actionnaire, le plan stratégique d'Eutelsat, en participant à hauteur de 750 millions d'euros à une augmentation de capital atteignant un montant total de 1,5 milliard d'euros.

Pour en venir aux crédits qui vous sont proposés dans l'exercice 2026, j'organiserai mon propos autour des recettes prévisionnelles du compte, puis des prévisions de dépenses.

En premier lieu, s'agissant du volet des recettes, ma principale remarque concerne les importantes recettes de cessions prévues dans le texte déposé par le Gouvernement.

Le projet de loi de finances pour 2026 marque une rupture avec les dernières années, en prévoyant des recettes de cessions pour le compte d'affectation spéciale à hauteur de 3,2 milliards d'euros en 2026, soit quatre fois plus que les recettes prévues pour cette année, par exemple.

Nous serons évidemment attentifs aux décisions qui seront prises dans le courant de l'exercice 2026, non seulement pour vérifier que le quantum de recettes atteint la cible de 3,2 milliards d'euros, mais également pour déterminer si cette inflexion est conjoncturelle ou si elle s'inscrit dans un nouveau cycle pluriannuel de cessions d'actifs publics.

En second lieu, je formulerai une remarque sur l'une des rares opérations structurantes en dépenses qui ne soit pas, à ce stade, confidentielle pour l'Agence des participations de l'État (APE) : le rachat par l'État du département Advanced Computing du groupe Atos.

Alors qu'un contrat de cession a été finalisé en juillet 2025, la mise en œuvre de l'opération devrait intervenir au premier semestre de 2026 et mobilisera 400 millions d'euros de crédits du compte d'affectation spéciale.

Cet investissement permettra à l'État de préserver un actionnariat souverain pour une activité hautement stratégique : la division rachetée est en charge de la conception et de la fabrication de supercalculateurs dans l'usine du groupe Atos ; or cette usine d'Angers est aujourd'hui la seule en mesure de fabriquer de tels équipements qui soit détenue par un groupe européen.

Au regard de la mobilisation de ces supercalculateurs notamment pour assurer la crédibilité de notre dissuasion nucléaire, il n'est nul besoin d'insister sur le caractère stratégique de cette opération.

Telles sont les principales remarques formulées par la commission des finances sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». Je vous indique, sans surprise, que la commission des finances a rendu un avis favorable à leur adoption, afin de donner à l'État actionnaire les moyens de sa politique. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE et INDEP. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » occupe une place singulière dans notre budget, puisqu'elle est la plus importante en volume, s'élevant à plus de 145 milliards d'euros pour 2026. Ce montant s'inscrit en légère baisse, de 0,4 %, par rapport à la dernière estimation à date pour 2025.

Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État, qui concentrent l'essentiel des crédits de la mission, sont estimés à 141 milliards d'euros pour 2026, soit une diminution de 0,4 % par rapport à l'estimation révisée pour 2025.

Cette baisse apparente masque toutefois deux évolutions contradictoires : une réduction substantielle des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, tout juste atténuée par une hausse des autres remboursements, liés à la mécanique de l'impôt et à des politiques publiques.

La première évolution notable concerne donc les remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État, qui passent de 17,2 milliards d'euros en 2025 à 14,2 milliards d'euros en 2026. En pratique, il s'agit principalement du remboursement de sommes indûment perçues, dont le reflux en 2026 s'explique par la disparition de certaines dépenses importantes supportées en 2025.

Je signalerai ici la principale d'entre elles, qui porte sur des remboursements d'exit tax.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, un membre du présent Gouvernement, encore député à la fin de l'année 2023, a déposé un amendement d'apparence technique, lequel visait à permettre aux contribuables, qui ne pouvaient jusqu'alors obtenir le remboursement de l'exit tax qu'à concurrence de l'impôt sur le revenu, d'en bénéficier plus largement, y compris pour les titres cédés avant 2014.

Cet amendement, repris – par hasard ! – par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité – pas par hasard, cette fois ! –, a provoqué des remboursements cumulés de 2 milliards d'euros sur les années 2024 et 2025.

Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, j'estime que le Gouvernement avait la responsabilité de mieux informer le Parlement quant au coût anticipé d'une mesure aussi technique qu'onéreuse. Ce déficit d'information est d'autant plus dommageable qu'il fut ensuite aisé pour l'exécutif de dissimuler ces 2 milliards d'euros en exécution budgétaire, noyés dans les masses financières de la mission.

Les remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques devraient quant à eux progresser de 18,5 milliards d'euros en 2025 à 19,4 milliards d'euros en 2026, sous l'effet d'un recours croissant aux crédits d'impôt que nous avons questionnés ici et que nous continuerons d'interroger.

Les acomptes et avances sur restitutions d'impôt sur le revenu devraient connaître une progression dynamique en 2026, de l'ordre de 10 % par rapport aux dernières estimations pour 2025, après une hausse déjà soutenue de 8 % l'année précédente. Ils progressent notamment sous l'effet de la montée en charge du crédit d'impôt contemporain pour l'emploi d'un salarié à domicile, dont les crédits passent de 1,8 milliard d'euros en 2025 à 2,3 milliards d'euros en 2026.

Me fondant sur les derniers travaux de la Cour des comptes et du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), je m'interroge sur le périmètre d'un outil fiscal peu contrôlable, portant sur des dépenses non contraintes pour certains contribuables. Il convient de mettre en débat la nature des dépenses éligibles, le taux de prise en charge et le profil socioéconomique des bénéficiaires.

L'autre dispositif important, auquel vous savez que je prête une grande attention, est le crédit d'impôt recherche (CIR), qui continue de croître et qui est désormais projeté à plus de 8 milliards d'euros pour la période 2025-2026.

Je peux m'appuyer cette année sur les travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, qui a pointé plusieurs limites de ce dispositif, dont les grandes entreprises captent plus de 42 % des crédits, ainsi que le caractère très perfectible du rapport coût-efficacité du CIR.

Si, l'an passé, grâce à un amendement voté par la commission des finances, nous avons pu commencer à recentrer ce dispositif, il m'apparaît toujours indispensable d'engager une réforme du CIR. Celle-ci viserait a minima à établir une véritable différenciation par type d'entreprise et par secteur d'activité.

Alors que la commission d'enquête estime à 211 milliards d'euros le montant des aides publiques aux entreprises, ces aides devraient être assorties à la fois de conditions pour s'assurer de leur effectivité, en veillant à ce qu'elles stimulent bien la recherche réalisée en France, et de mécanismes de restitution en cas de manquement avéré, conformément aux recommandations formulées à l'unanimité par la commission d'enquête.

J'en viens enfin au programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », le second de cette mission.

Les crédits évalués pour 2026 s'élèvent à 4,6 milliards d'euros et sont stables. Ce programme a toutefois été vidé d'une grande partie de sa substance par la suppression de la taxe d'habitation et par la baisse des impôts de production. Nous le savons tous ici et nous le regrettons, avec sincérité ou non.

Les remboursements de taxe foncière ont presque doublé de 2018 à 2024. Ils se stabilisent autour de 2 milliards d'euros et constituent désormais la moitié des crédits du programme.

Quant aux remboursements de taxe d'habitation, ils auraient dû connaître une trajectoire à la baisse encore plus marquée, mais ils ont dû être largement revus à la hausse pour financer d'importants dégrèvements consécutifs à la mise en place de l'outil Gérer mes biens immobiliers (GMBI).

En guise de conclusion, je vous indique que, lors de l'examen de la mission par la commission, le 6 novembre dernier, celle-ci a proposé l'adoption de ces crédits. Je me vois donc contraint de vous recommander leur adoption.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que les années 2023 et 2024 avaient été marquées par d'importantes acquisitions dans le secteur de l'industrie de la défense, en 2025, l'Agence des participations de l'État (APE) a été particulièrement active dans le secteur du numérique.

Cette activité s'est traduite par la concrétisation de l'acquisition d'Alcatel Submarine Networks, leader de la fabrication, de la pose et de la maintenance de câbles sous-marins, et par l'entrée au capital d'Eutelsat, entreprise historique des télécommunications rendue stratégique par le développement de sa constellation satellitaire en orbite basse.

Je mentionne aussi le financement de l'acquisition par IN Groupe, l'ancienne Imprimerie nationale, d'une entreprise spécialisée dans la biométrie, en vue de créer un champion de rang mondial de l'identité physique et numérique.

L'APE prévoit de continuer, en 2026, à creuser le sillon de la souveraineté numérique en finalisant l'acquisition des activités Advanced Computing d'Atos, que le Sénat a appelée de ses vœux. Elle poursuivra également son soutien à l'aménagement et à la valorisation du foncier industriel, notamment dans les grands ports maritimes. Ce sont là des priorités en phase avec les secteurs d'intervention stratégiques identifiés par la commission des affaires économiques.

En ce qui concerne le volet des recettes, nous nous satisfaisons que, pour les opérations relevant du périmètre de l'APE, la part prévisionnelle des financements budgétaires ne soit plus que résiduelle. Le compte d'affectation spéciale (CAS) revient ainsi à son principe fondateur, qui est de financer l'ensemble des crédits de la mission par des produits de cession.

Pour ce faire, l'Agence des participations de l'État devra adopter une gestion plus dynamique de son portefeuille. Ainsi, les cessions d'actifs devraient atteindre en 2026 pas moins de 3,2 milliards d'euros, un niveau inédit depuis la période pré-covid.

Dans ce contexte, nous recommandons que l'APE développe une doctrine d'intervention plus robuste, notamment dans le secteur industriel, afin de concentrer ses interventions sur les entreprises présentant des risques systémiques. L'articulation avec Bpifrance devrait également être améliorée.

Il est en effet essentiel de préserver la capacité de l'État à investir avec agilité dans des entreprises de souveraineté, au gré de besoins qui pourraient être appelés à se multiplier dans un environnement économique et géopolitique de plus en plus instable.

Au total, la commission des finances soutient les priorités développées par l'État actionnaire et a donc donné un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Organisation des travaux

Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique que sept amendements ont été déposés sur cette mission.

La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures. Il nous faudra toutefois terminer l'examen de cette mission à minuit et demi, afin de pouvoir ouvrir la séance de demain matin, à neuf heures trente, pour la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026. Nous nous efforcerons de respecter cet horaire.

Engagements financiers de l'État (suite)

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État(suite)

Compte de concours financiers : Accords monétaires internationaux(suite)

Compte de concours financiers : Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics(suite)

Remboursements et dégrèvements(suite)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole de chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale, mais aussi celui de l'explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui les missions « Engagements financiers de l'État » et « Remboursements et dégrèvements », ainsi que le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

Je n'évoquerai que brièvement la mission « Remboursements et dégrèvements ». Sur plusieurs travées, des sénateurs s'interrogent sur le coût pour nos finances publiques du remboursement de nombreux dispositifs fiscaux. Ce questionnement sur l'évolution, entre autres, des nombreux crédits d'impôt, qui sont une spécificité française, est légitime.

Ces outils fiscaux ont généralement pour objet d'orienter l'action des contribuables vers des dépenses vertueuses ou souhaitables pour la collectivité. Je citerai le crédit d'impôt recherche pour les entreprises ou le crédit d'impôt services à la personne (Cisap) pour les particuliers.

Leur coût est, certes, élevé pour nos finances publiques. Toutefois, plutôt que de s'interroger sur leur légitimité, il convient de questionner leur raison d'être. Ces dispositifs se justifient, en partie, par le coût du travail et par le poids des impôts dans notre pays. Nos crédits d'impôt existent principalement pour compenser, aux particuliers et aux entreprises, les charges sociales et les impôts les plus élevés de l'OCDE.

Aussi, il nous paraît nécessaire de rappeler que nous ne pourrons évoquer la réduction des niches fiscales qu'une fois la charge fiscale baissée. Une baisse des impôts compensée par une baisse d'autant des niches fiscales nous semble indispensable.

Les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », soit 60 milliards d'euros en crédits de paiement, doivent, quant à eux, nous alerter. Ils retracent notamment les activités financières de l'État envers ses créanciers, au premier rang desquelles la gestion de notre dette.

Il nous faut, mes chers collègues, nous attarder sur le sujet de la dette et, surtout, de la charge de la dette.

Je l'ai dit, nos impôts sont beaucoup trop élevés, au point que nous ne pouvons pas espérer en lever de nouveaux sans annihiler leur rendement. En d'autres termes, nous n'avons plus d'autre choix que de baisser les dépenses. L'urgence première est de réduire le déficit public.

C'est ce déficit, alimenté par des dépenses supérieures à nos recettes, qui continue d'aggraver chaque année le montant total de la dette que nous faisons peser sur les générations qui viendront après nous.

La dette française explose et, avec elle, les taux auxquels l'État emprunte.

À ce jour, les taux d'emprunt de la France à dix ans sont plus élevés que ceux de tous nos voisins directs : l'Espagne, l'Italie, la Suisse, l'Allemagne et la Belgique, mais aussi l'Irlande, les Pays-Bas et le Portugal.

Un seul pays comparable de la zone euro emprunte à ce jour à des taux plus élevés, à savoir la Grèce, dont on connaît les turpitudes budgétaires depuis maintenant vingt ans. En août, pourtant, ce pays a pu emprunter à des taux inférieurs aux nôtres.

Le stock trop important de dette à refinancer et les taux d'emprunt désormais élevés nous conduisent à voir la charge de la dette s'aggraver. Nous parlons ici du seul paiement des intérêts de la dette, et non pas du remboursement de celle-ci.

En 2026, la charge de la dette serait de 58 milliards d'euros. Mes chers collègues, les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » que nous examinons constituent désormais le deuxième poste de dépenses du budget de l'État, après la mission « Enseignement scolaire ». Nous payons des intérêts supérieurs au budget que nous allouons aux armées.

L'évolution à la hausse de la charge de la dette n'est malheureusement pas terminée. Elle pourrait atteindre 72 milliards d'euros en 2027, peut-être même 92 milliards d'euros en 2029. Il m'a semblé que je devais vous citer ces chiffres non pas pour ajouter de l'anxiété dans cet examen budgétaire, mais pour nous encourager à agir.

Nous ne pouvons pas laisser ces mauvais présages se réaliser. Il nous faut, sans attendre 2027, réformer avec efficacité et détermination notre pays pour diminuer ses dépenses. En réduisant ainsi notre déficit, nous réduirons la dette nouvelle que l'État doit souscrire. Nous verrons enfin les taux d'emprunt baisser et, avec eux, la charge de la dette s'alléger dans les années à venir.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera les crédits de ces missions.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Séné. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc Séné. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que nous examinons le projet de loi de finances pour 2026, une évidence s'impose à nous comme à l'ensemble des Français : la dette, cette étrange banalité, accumulée depuis des décennies, est devenue notre première source de vulnérabilité.

Chaque année, elle occupe une place plus centrale dans notre équilibre budgétaire.

Chaque année, elle absorbe une part plus importante de nos marges de manœuvre.

Chaque année, elle repousse un peu plus nos investissements d'avenir les plus essentiels.

Les travaux menés par notre assemblée ne laissent aucun doute sur ce diagnostic : la charge de la dette atteint désormais un niveau qui transforme profondément notre action publique et ses capacités.

Il ne s'agit pas ici de stigmatiser l'endettement, car la dette n'est pas une finalité, c'est un outil. Bien utilisée, elle devient un accélérateur d'opportunités et un instrument de souveraineté. Mal pensée, elle forme un frein puissant, limitant notre liberté budgétaire, contraignant nos priorités, érodant notre crédibilité.

Le projet de loi de finances pour 2026 en donne une illustration saisissante. La charge de la dette s'élève à plus de 60 milliards d'euros en comptabilité générale. Cela représente une hausse de près de 7,5 % en un an.

Cette dépense n'est plus marginale. La charge de la dette rivalise désormais avec les grandes missions régaliennes et constitue le deuxième poste de crédits de paiement de l'État, juste derrière l'enseignement scolaire.

Si rien ne change, elle atteindra le seuil des 100 milliards d'euros au début de la prochaine décennie. C'est un montant vertigineux ! Cela représente davantage que l'ensemble de notre budget pour la justice, la sécurité, l'agriculture et l'enseignement supérieur réunis. C'est un niveau qui, une fois atteint, n'appellerait plus de simples ajustements, mais exigerait une réorientation profonde de notre stratégie financière.

Ce basculement est d'autant plus préoccupant que le programme de financement de l'État atteint un record historique.

En 2026, l'État devra émettre 310 milliards d'euros de dette à moyen et long termes. Cet effort exceptionnel s'explique par l'accumulation des déficits passés, mais aussi par l'environnement de taux, qui reste élevé.

Nous sommes plus sensibles que jamais à la variation des taux. Un choc d'un seul point entraînerait une augmentation immédiate de plusieurs milliards d'euros, et de plus de 30 milliards d'euros à horizon d'une décennie. C'est un risque que nous ne pouvons plus ignorer. Cet environnement rend plus visibles nos fragilités. Nous ne payons pas pour nos dettes passées, nous payons un manque de courage et une absence de réformes.

Une dette soutenable n'est pas uniquement une dette que l'on parvient à refinancer. C'est une dette adossée à une croissance solide, à des dépenses orientées vers l'investissement, et à un appareil public capable de se réformer. Aujourd'hui, cette cohérence n'est pas au rendez-vous.

Mes chers collègues, il ne s'agit ni de soutenir ou de condamner la dette ni de dramatiser la situation. L'enjeu est de retrouver une trajectoire crédible, lisible et compatible avec nos ambitions nationales. Pour y parvenir, trois orientations me semblent essentielles.

En premier lieu, il nous faut redonner une priorité claire à l'investissement productif. La dette doit bâtir la croissance de demain, et non pas compromettre la croissance d'aujourd'hui. Elle doit permettre l'amélioration de nos infrastructures, faciliter nos réformes et nos transitions, œuvrer pour l'aménagement du territoire. C'est un choix économique, mais c'est d'abord un choix politique.

En deuxième lieu, il convient d'engager une modernisation efficace de la dépense publique. La question n'est pas de savoir combien, mais pour quoi nous dépensons. La dynamique de dépenses est aujourd'hui trop forte au regard du rythme de croissance. Une rationalisation méthodique, ciblée et réaliste est indispensable. C'est cette trajectoire qui nous guide et que nous avons souhaité décrire au travers de l'ensemble de nos travaux budgétaires.

En troisième lieu, il faut renforcer la transparence et les outils de pilotage de la dette. Nous devons disposer d'indicateurs clairs sur la soutenabilité, d'hypothèses sincères sur les taux et d'une vision pluriannuelle qui dépasse les ajustements techniques. Nos dépenses publiques augmentent plus vite que notre budget depuis 2017 et il est désormais établi que plusieurs décisions budgétaires récentes ont souffert d'une gestion déficiente, parfois marquée par l'insincérité.

La dette n'est pas une fatalité. Elle ne devient un risque que lorsque nous la laissons choisir à notre place. Sa charge ne doit pas financer nos renoncements collectifs : si nous voulons préserver notre capacité à agir, il nous faut reprendre l'initiative. C'est une question de lucidité, une exigence de responsabilité ; c'est surtout un devoir envers les générations qui nous suivront. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Georges Patient. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir la mission « Remboursements et dégrèvements », d'une part, et la mission « Engagements financiers de l'État », d'autre part. Si elles ne financent aucune politique publique, ces missions ont néanmoins un impact prépondérant sur l'équilibre de nos finances.

Tout d'abord, la mission « Engagements financiers de l'État » connaît une progression spectaculaire : 60,4 milliards d'euros de crédits de paiement en 2026, en hausse de 7,49 %. Cette hausse est presque entièrement due à la charge de la dette, qui atteindra 58 milliards d'euros, soit 4,5 milliards d'euros de plus en un an. À politique inchangée, selon les projections de la commission des finances, elle pourrait atteindre 100 milliards d'euros d'ici à 2030 et pourrait alors devenir le premier poste budgétaire de l'État.

Ce constat est d'autant plus préoccupant que le programme de financement atteindra un niveau record en 2026 : 310 milliards d'euros, avec une dette de l'État déjà supérieure à 2 700 milliards d'euros. En d'autres termes, nous finançons chaque année davantage la dette passée et de moins en moins l'investissement futur.

Parallèlement, la mission « Remboursements et dégrèvements » révèle une autre dynamique, tout aussi préoccupante : la montée continue des dépenses fiscales, en particulier des crédits d'impôt.

En 2026, les remboursements et dégrèvements atteindront 145,4 milliards d'euros, pour l'essentiel sur les impôts d'État, soit 28 % des recettes fiscales brutes. En reprenant les budgets des années précédentes, on constate qu'en 2004 ce taux n'était que de 16 %, et de 22 % en 2014. Cela signifie que la part d'impôts à laquelle renonce l'État progresse de 6 points tous les dix ans.

Du côté des entreprises, le crédit d'impôt recherche (CIR) est, avec plus de 8 milliards d'euros par an, la première dépense fiscale de l'État. Son efficacité demeure insuffisamment démontrée : effet d'aubaine massif, concentration dans les grands groupes, impact limité sur l'effort de recherche et développement (R&D). Comme le recommande la commission d'enquête du Sénat sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants, nous devons renforcer la conditionnalité, cibler davantage les PME innovantes et mettre fin à une logique de guichet sans contrôle.

Du côté des particuliers, la dynamique du crédit d'impôt services à la personne (Cisap) – déjà 7,7 % à ce jour pour 2025 et 10 % prévus en 2026 – le rendra rapidement insoutenable pour le budget de l'État. Le rapport de la Cour des comptes de 2024 signalait que « parmi les 75 premiers centiles de revenu, le taux de recours aux services à la personne est inférieur à 10 %, alors qu'il est supérieur à 50 % parmi les 3 % de foyers les plus aisés ». Là encore, l'effet d'aubaine est important.

Ainsi, nous faisons face à un double phénomène : une charge de la dette qui dévore le budget de l'État, conséquence, entre autres, de renoncements en matière de recettes ; une dépense fiscale en expansion, souvent peu évaluée, dont l'efficacité économique et sociale est incertaine, mais qui réduit année après année la capacité de l'État à financer ses priorités. La combinaison des deux crée une contrainte budgétaire majeure : l'État remboursera plus de 200 milliards d'euros au total en 2026 en dettes, remboursements et dégrèvements, tout en réduisant sa capacité à agir.

Aussi, il nous faut ouvrir un débat lucide sur la pertinence, l'équité et l'efficacité des dispositifs fiscaux qui grèvent le budget, afin de redonner à l'État des marges de manœuvre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a près de cent ans, en 1932, ici même au Sénat, le ministre des finances Joseph Caillaux – un illustre Sarthois ! (Sourires.) – prononçait un discours passé sous les radars, quelques années après la crise économique de 1929.

Face à la situation historique que nous traversons, j'aimerais vous en lire quelques lignes : « En ce mois d'avril 1932, m'adressant non pas seulement à mes contemporains mais à la postérité plus ou moins éloignée, je veux situer quelques considérations sur les problèmes économiques et politiques. Une crise presque sans précédent s'est abattue sur le monde. Je l'avais prévu et prédit l'avènement dès le mois d'août 1924. L'avènement de la tourmente fut retardé par les inflations monétaires que les gouvernements distribuèrent à l'envi. […] À ceux qui nous succéderont, peut-être les choses sembleront-elles plus simples, peut-être riront-ils de nos alarmes, peut-être des moyens plus efficaces de remédier aux maux dont souffre l'humanité auraient-ils été découverts ? »

Que pourrions-nous répondre à Joseph Caillaux ? Qu'avons-nous appris de son discours ? Rions-nous, aujourd'hui, de ses alarmes ? Ces questions, mes chers collègues, je vous les pose, car, malgré les avertissements du passé, nous paraissons condamnés à répéter les mêmes erreurs. L'histoire, au lieu de nous éclairer, ne semble servir qu'à nous aveugler.

Regardons la réalité en face. Notre dette atteint un niveau sans égal : 3 416 milliards d'euros. Jamais, au grand jamais, dans notre histoire nous n'avons connu un tel record !

Ce chiffre n'est pas tombé du ciel. Hier comme aujourd'hui, les procédés sont les mêmes. Depuis 2017, sous la présidence d'Emmanuel Macron, notre dette a augmenté de plus de 1 000 milliards d'euros. Sur cette somme vertigineuse, la Cour des comptes l'a elle-même rappelé, seuls 150 milliards d'euros relèvent de la crise sanitaire. Tout le reste – 850 milliards d'euros, excusez du peu – n'est que la conséquence de choix politiques, d'une même obstination, d'une même volonté, d'une gabegie.

Pendant ce temps, l'inflation, en allégeant le poids de la dette, sert une fois encore à retarder une crise économique qui pointe le bout de son nez, et ce sur le dos des Français, dont le pouvoir d'achat se réduit chaque jour un peu plus.

Cette fuite en avant à un coût : un coût indirect – à chaque emprunt supplémentaire, nous scellons notre souveraineté et notre destin dans les mains de nos créanciers – et un coût direct – cette année, 65 milliards d'euros ont été versés aux seuls intérêts de la dette, soit plus que le budget de l'enseignement supérieur. Ce chiffre devrait faire frémir tous ceux que préoccupe l'avenir de notre pays.

Ce n'est pas tout. Les projections pour 2026 annoncent encore 10 milliards d'euros supplémentaires. À ce rythme, c'est non plus la question du « si » qui se pose, mais bien celle du « quand ». La prochaine crise nous obligera à ouvrir les yeux.

Pourtant, le Gouvernement persiste dans une spirale qui nous mène droit dans le mur. L'an prochain, 310 milliards d'euros de dette seront levés – un nouveau record –,175 milliards d'euros étant destinés uniquement à rembourser des emprunts passés.

Nous continuons de rouler notre dette, comme un hamster dans sa roue, mais vers quel horizon ? Soyons clairs, cette stratégie n'a toujours servi qu'un seul objectif : repousser les conséquences de choix politiques à plus tard et au prix fort. Un prix que paieront les générations futures.

Oui, s'endetter à un coût. S'endetter alimente la concentration des richesses et du pouvoir économique dans les mains d'une minorité, au détriment de la majorité. Depuis 2017, les actionnaires ont vu leurs dividendes bondir de +114 %, quand le Smic, lui, n'a progressé que de 19 %. C'est peut-être cela la démocratie sous le macronisme : la solidarité entre riches.

Si encore cette politique produisait des résultats... Les chiffres parlent d'eux-mêmes : cette année, un taux de chômage de 7,6 %, une croissance à 0,7 %, 68 000 défaillances d'entreprises. Un triste record, que l'on aurait pu parfaitement éviter.

Pourtant, le budget que nous examinons aujourd'hui persiste dans la même logique : celle du profit quoi qu'il en coûte, qui privilégie toujours la rentabilité du court terme au détriment des investissements de long terme.

On nous dit que la dette est une promesse. Très bien. Quid alors des autres promesses faites depuis 2017 ? Celles qui ont été faites aux gilets jaunes alors que plus de 10 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté ? Celles qui ont été faites pendant la crise sanitaire quand un Français sur trois vit dans un désert médical ? Celles qui ont été faites en matière de logement alors que 4 millions de personnes souffrent de mal-logement ?

Si les promesses n'engagent que ceux qui y croient, faut-il en conclure que le paiement de la dette est, lui aussi, facultatif ? Permettez-moi de poser la question...

Le groupe socialiste ne sera jamais du côté de ceux qui se résignent. Oui, nous sommes prêts au compromis, mais jamais au prix d'une politique qui sacrifie l'avenir des Français à la logique froide et amorale de la dette.

Mes chers collègues, plus que jamais des choix s'imposent. Souhaitons-nous continuer dans cette fuite en avant de l'endettement, au risque de connaître une crise économique semblable à celle qu'ont connue nos aïeux, voire pire, ou sommes-nous enfin prêts à reprendre le contrôle de notre dette et de notre économie ?

Les cris d'alerte ne suffisent plus. Contrairement à ceux auxquels s'adressaient les avertissements de Joseph Caillaux en son temps, nous ne devons pas détourner le regard. Un grand débat sur la dette s'impose dès maintenant, avant qu'il ne soit trop tard. L'avenir n'est jamais une fatalité.

Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s'abstiendra sur la mission « Engagements financiers de l'État » et votera pour la mission « Remboursements et dégrèvements ». (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Barros.

M. Pierre Barros. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le premier poste de dépenses de l'État n'est ni l'éducation nationale ni même la charge de la dette : ce sont les remboursements et dégrèvements, qui atteindront 145 milliards d'euros en 2026. L'État consacre donc d'abord ses ressources non pas à l'action publique, mais à la compensation d'impôts qu'il a choisi de ne plus percevoir.

Chacun voit bien ici ce que cette situation révèle de notre modèle fiscal. On nous dit qu'il y a trop d'impôts. Je l'entends, mais il y a surtout trop de dégrèvements et trop peu de justice fiscale ! Le problème est assurément là.

On pourrait, bien sûr, évoquer la suppression de la taxe d'habitation, qui a définitivement arrimé les collectivités territoriales à une TVA affectée, contraire au principe même d'autonomie financière de ces collectivités. Permettez-moi plutôt de revenir sur l'exemple, rappelé avec justesse par le rapporteur spécial Pascal Savoldelli, de la réforme de l'exit tax, introduite discrètement fin 2023 par le ministre Mathieu Lefèvre, alors député, et validée par un 49.3.

Nous tenons là l'un des points les plus préoccupants pour notre mission de contrôle : aucune étude d'impact, aucun débat sincère et, au bout du compte, 2 milliards d'euros de remboursements supplémentaires chaque année au profit des contribuables les plus fortunés. C'est une anomalie démocratique, parce que le Parlement a été privé d'information. C'est aussi le parfait exemple de ce qu'est l'injustice fiscale. Une telle légèreté sur un sujet aussi stratégique doit forcément interroger.

Les crédits d'impôt ne dessinent pas un tableau plus lumineux. Même l'outrenoir de Pierre Soulages renvoie davantage de lumière !

Le crédit d'impôt services à la personne, le Cisap, poursuit une croissance sans frein et l'on continue d'accorder le crédit d'impôt recherche sans condition. Pourtant, ces masses financières considérables, estimées à 15 milliards d'euros, pourraient alimenter, par exemple, la création d'un service public de l'aide à domicile. Pour cette raison, nous défendrons la création d'un « jaune » budgétaire retraçant ces aides, conformément aux travaux de la commission d'enquête du Sénat sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants.

Un mot, enfin, sur la dette et l'État actionnaire.

Depuis 2017, ce sont 1 100 milliards d'euros de dettes supplémentaires qui ont été accumulées, 400 milliards d'euros rapportés à la croissance.

Cette année, la charge de la dette progressera encore de 4,2 milliards, soit +7,5 %, malgré l'assouplissement de la Banque centrale européenne (BCE). Dans ce contexte, les marchés avancent et l'État recule. Les grandes banques se ruent sur les adjudications de l'Agence France Trésor (AFT), profitant d'une rente à des taux qu'elles contribuent elles-mêmes à administrer via les agences de notation. Mes chers collègues, il est urgent de libérer l'État de cette idiosyncrasie des marchés, très antidémocratique et contraire à l'intérêt général.

S'agissant de l'État actionnaire, la situation n'est pas meilleure. Le Gouvernement persiste dans une logique de court terme : il a préféré procéder à cinq privatisations confidentielles, destinées à rapporter 3,2 milliards d'euros, plutôt que de solliciter une contribution accrue des grandes fortunes. C'est ainsi que le solde du compte d'affectation spéciale (CAS) atteindra son plus bas niveau depuis 2006. C'est une nouvelle preuve du recul de l'État stratège et de l'absence d'une doctrine claire.

Le cas Alcatel est révélateur. Après avoir validé la privatisation de l'entreprise en 2016, alors qu'il était ministre de l'économie, M. Emmanuel Macron prend conscience, dix ans plus tard, de l'enjeu stratégique de nationaliser Alcatel Submarine Networks (ASN). Nous payons aujourd'hui les renoncements d'hier.

Et que dire d'ArcelorMittal, dont la nationalisation, réclamée par les salariés, a été défendue ici même par la gauche lors de la dernière niche parlementaire du groupe CRCE-K ?

Là encore, si l'État n'agit pas, il se heurtera aux conséquences de son inconséquence. Il est temps que l'État retrouve doctrine, ambition et capacité d'intervention stratégique.

Voilà, mes chers collègues, ce que révèlent ces missions : des renoncements répétés, des avancées trop rares et une succession de capitulations face aux marchés financiers. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Yannick Jadot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ouvrirai mon propos sur la charge de la dette. En hausse de 7,5 %, elle atteindra 58 milliards d'euros en 2026. La remontée des taux alourdit particulièrement la facture : un point d'intérêt supplémentaire, c'est 3,2 milliards d'euros de charges en plus. C'est une situation évidemment préoccupante, que l'instabilité politique née de la dissolution a particulièrement aggravée.

Des travaux récents de l'Institut Avant-garde montrent cependant que la France a déjà connu, et surmonté, dans son histoire des niveaux d'endettement bien supérieurs à ceux d'aujourd'hui. Je rappelle surtout que la charge de la dette demeure, elle, contenue : 1,8 % du PIB en 2025, et 2 % en 2026. Pour mémoire, c'était 6,5 % en 1997, avant que la droite ne passe la main à la gauche qui, elle, a réduit le déficit. Il s'agit non pas de nier l'enjeu, mais de rappeler qu'il n'est pas insurmontable.

Le véritable problème des finances publiques n'est pas l'insoutenabilité de la dette. C'est bien, d'une part, la baisse non compensée de nos recettes publiques, portée par Emmanuel Macron, d'autre part, la complaisance délibérée vis-à-vis de l'évasion et de l'évitement fiscaux.

C'est ici que la mission « Remboursements et dégrèvements » éclaire nos débats : les remboursements et dégrèvements atteignent désormais 147 milliards d'euros, contre 113 milliards d'euros en 2017. Je rejoins le rapporteur spécial Savoldelli sur la dynamique des crédits d'impôt, sans contrôle et plutôt génératrice d'injustice fiscale que l'inverse.

Le crédit d'impôt services à la personne, le Cisap, en est devenu l'illustration la plus frappante : 2,3 milliards d'euros, contre 1,1 milliard d'euros en 2022. La Cour des comptes parle d'un « dispositif hétéroclite, faiblement efficace, socialement régressif et particulièrement coûteux pour la trésorerie de l'État », qui avance chaque année des sommes considérables. Les 3 % des foyers les plus aisés concentrent plus de 50 % du recours à ce crédit d'impôt. C'est socialement intenable et financièrement insoutenable !

Quant au crédit impôt recherche, le CIR, c'est un bel outil, mais aussi la première dépense fiscale, à hauteur de 8 milliards d'euros : il y manque toujours un meilleur ciblage et de véritables conditionnalités écologiques et sociales. Même le prix Nobel d'économie Philippe Aghion, auquel la droite se réfère souvent, formule de vives critiques à l'encontre de ce manque de conditionnalité.

Enfin, les 255 dépenses fiscales en faveur des entreprises rendent notre système illisible, en plus de coûter 43 milliards d'euros en 2023. Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) lui-même admet qu'il ne peut plus les évaluer sérieusement, car elles sont trop nombreuses, trop dispersées et trop opaques.

Mes chers collègues, notre pays n'a plus les moyens de sa politique fiscale actuelle.

À force d'amputer nos recettes au nom de la compétitivité ou de la simplification – selon les moments et les émetteurs –, nous avons réduit les marges d'action de l'État, tout en concentrant à l'extrême les richesses. Pis, les évaluations convergent pour dire que ces mesures ont trop rarement permis de soutenir l'investissement et l'emploi.

La question de la dette doit être sérieusement traitée. La dette ne doit pas être délibérément créée, puis cyniquement instrumentalisée, pour casser notre contrat social. Sur cette mission comme pour l'ensemble du budget de l'État, il est temps que l'intérêt général et la cohésion nationale priment de nouveau sur les intérêts privés. Il y va de notre pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Franck Montaugé applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au fond, la discussion commune sur ces deux missions et ces trois comptes d'affectation spéciale nous invite à évaluer l'efficacité de l'État en tant qu'emprunteur, investisseur et autorité fiscale. Ce triptyque conditionne directement notre souveraineté budgétaire, notre stabilité financière et notre capacité d'action dans un contexte international profondément déstabilisé.

En premier lieu, l'analyse de la mission « Engagements financiers de l'État » fait apparaître un constat clair : depuis 2017, la politique de l'offre – et la baisse non financée de 2,5 points de PIB des prélèvements obligatoires – a créé plus de fragilités qu'elle n'en a résolues.

L'activité reste inférieure de 5 points au tendanciel pré-covid, la dette a augmenté de 1 000 milliards d'euros et sa charge, estimée à 58 milliards d'euros en 2026, pourrait devenir la première dépense de l'États devant l'éducation, la défense ou la recherche. Dans le même temps, le sentiment de ras-le-bol fiscal persiste, voire s'intensifie, du côté des entreprises comme des ménages.

L'horizon est encore plus préoccupant : d'ici à 2029, le choc de refinancement, portant sur près de 900 milliards d'euros de dette, pourrait alourdir la charge de la dette de 1,2 point de PIB selon le FMI. Une telle évolution compliquera la stabilisation de nos finances publiques et conduira à la paralysie de notre politique économique, à un moment où l'avenir de notre croissance se situe à la croisée des chemins.

Dans ce contexte, le groupe RDSE considère que la maîtrise de nos finances publiques ne pourra pas être crédible sans une réflexion sincère et lucide sur le niveau et la répartition de nos prélèvements obligatoires.

La stratégie de l'État actionnaire mérite également toute notre attention. Si notre groupe salue les opérations en capital annoncées pour 2026, qui sont essentielles à notre souveraineté et qui représentent 3,6 milliards d'euros, il regrette l'absence persistante d'une doctrine claire et actualisée.

Pour rappel, la dernière doctrine remonte à 2017 et elle n'intègre pas les profondes mutations économiques de ces dernières années, lesquelles vont se poursuivre.

Pour notre groupe, une stratégie actionnariale moderne doit donc reposer sur trois principes structurants : la résilience, pour protéger nos intérêts stratégiques ; la performance, pour renforcer nos entreprises ; la responsabilité, pour inscrire durablement l'action de l'État dans l'intérêt général.

Enfin, parallèlement à cette nécessaire clarification, il incombe à l'État de restaurer la lisibilité du droit fiscal.

Malgré le léger recul des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », la complexité fiscale perdure et les restitutions augmentent chaque année depuis 2001. Le déploiement chaotique du dispositif Gérer mes biens immobiliers doit amener l'administration fiscale à mieux concevoir la modernisation des outils de déclaration fiscale, dans une logique d'acceptabilité de la norme fiscale pour le contribuable et d'efficience du recouvrement de l'impôt.

Tout en restant très attentif au point d'alerte que je viens d'évoquer, le groupe RDSE votera majoritairement les crédits des missions dont nous discutons. (M. Marc Laménie applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

M. Vincent Delahaye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous disposons d'une heure et demie pour débattre de 200 milliards d'euros de crédits ! C'est vraiment peu, d'autant que les missions que nous examinons soulèvent des questions fondamentales, telles que la dette et le soutien aux entreprises et à l'économie. Le temps dont nous disposons est trop court, mais nous allons faire avec.

Je commence par la dette. Nous avons assez souvent alerté sur ce sujet au sein de notre assemblée, davantage du côté droit de l'hémicycle que de l'autre d'ailleurs.

Lorsque les taux d'intérêt étaient bas, certains disaient que l'on pouvait s'endetter et faire du « quoi qu'il en coûte », ce qui a entraîné une très importante augmentation de la dette. À l'époque, nous avions prévenu que l'alignement des planètes dont nous bénéficiions ne durerait pas éternellement et que, lorsque la situation se retournerait, cela ferait mal ! C'est ce qui est en train d'arriver et ce n'est pas près de s'arrêter.

D'où provient cette dette ?

M. Cozic nous a fait un cours sur le sujet. La dette ne date pas d'hier. Sous la Vᵉ République, le dernier Président de la République à avoir réduit la dette par rapport à la richesse nationale fut Valéry Giscard d'Estaing.

M. Vincent Delahaye. À partir de François Mitterrand en 1981, tous les présidents de la République, sans exception, l'ont augmentée ! Je tiens à votre disposition les chiffres qui en témoignent.

Il est impératif de changer de recette. Il faut arrêter de continuer à augmenter les impôts, comme nous le faisons depuis des années, et commencer à diminuer les dépenses.

En 2025, la dépense publique aura augmenté de plus de 50 milliards d'euros, quand les impôts n'ont progressé que de 25 milliards d'euros – ce sont les seuls efforts que nous avons faits. Si nous sommes endettés, c'est parce que nous avons des déficits. Ceux-ci peuvent résulter d'un niveau important des dépenses ou d'un manque de recettes, mais ils s'expliquent surtout par le financement des retraites.

Le déficit caché du système de retraite nous coûte très cher. (M. Thomas Dossus s'exclame.) Il représente en effet la moitié du déficit public et, cela a été démontré, la moitié de la dette. Il faut traiter l'ensemble de ces sujets. Ce n'est pas en reportant la réforme des retraites de 2023 que nous y parviendrons.

Il est essentiel de changer de système et de perspective, et de s'attaquer enfin à la dépense publique, dans tous les domaines, de façon sérieuse et rigoureuse. Si nous ne le faisons pas nous-mêmes, on nous l'imposera de l'extérieur. Ce seront nos prêteurs qui nous obligeront à prendre des dispositions importantes, qui sont autrement plus douloureuses.

Nous allons bientôt en arriver à la situation où les intérêts de la dette seront le premier budget de l'État. C'est quasiment inéluctable ; je ne vois pas comment nous pourrions l'éviter. Albéric de Montgolfier a rapidement évoqué les prêts aux grandes entreprises. J'aurais souhaité avoir davantage de détails sur ce sujet.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Donnez-moi plus de temps !

M. Vincent Delahaye. Il est vrai qu'il ne lui restait que quelques secondes pour en parler.

Je considère que l'État devrait être plus actif sur ses participations. Dans un certain nombre de domaines, l'État ne doit pas rester actionnaire ; il doit au contraire vendre ses participations afin de disposer de davantage de moyens pour intervenir ailleurs. À cet égard, les 3 milliards d'euros de ventes évoquées sont, à mon sens, insuffisants.

Pascal Savoldelli a présenté les 145 milliards d'euros de la mission « Remboursements et dégrèvements » en cinq minutes – il est très brillant ! Si nous maintenons un tel niveau d'aides aux entreprises et de remboursements d'impôts allégés, c'est parce que notre fiscalité est beaucoup trop élevée.

M. Vincent Delahaye. Avec des impôts sur le capital et sur les entreprises moins importants, nous aurions moins d'aides ! Je suis favorable à la diminution de ces aides, mais, en contrepartie, il faut baisser les impôts. Je rappelle que notre pays a l'impôt sur le capital le plus élevé au monde. On ne peut donc pas se plaindre ensuite des difficultés rencontrées par les entreprises. Si Brandt est dans cette situation, c'est en raison des impôts imposés aux entreprises, qui ont des répercussions sur l'emploi et les salaires.

M. Vincent Delahaye. Aujourd'hui, pour augmenter les salaires et l'emploi, il faut abaisser la fiscalité. Parallèlement, nous aurons la possibilité de réduire un certain nombre de coûts et, par conséquent, de diminuer les budgets que nous examinons.

Je ne serai pas plus long, afin de garder du temps pour la discussion des amendements, qui, je l'espère, nous donnera l'occasion de revenir sur ces sujets. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. David Amiel, ministre délégué auprès de la ministre de l'action et des comptes publics, chargé de la fonction publique et de la réforme de l'État. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai bref, car beaucoup a déjà été dit.

Au titre des engagements de l'État, le projet de loi de finances soumis à votre examen tire les conséquences de l'alourdissement de la charge de la dette. Pour rebondir sur la comparaison historique faite par M. Jadot, j'ajouterai que la période actuelle se distingue par un stock de dette très élevé, comme le soulignent les études de l'Institut Avant-garde.

Certes, en comparaison historique, le service de la dette est moindre que celui qui a été observé à des époques où les taux d'intérêt étaient bien plus hauts. Cette situation montre néanmoins que nous sommes exposés à une remontée des taux, laquelle pourrait survenir si la situation financière internationale se dégradait ou qu'un choc géopolitique venait accroître l'incertitude et la tourmente sur les marchés financiers. Les marges de manœuvre que nous devons dégager sont celles qui permettront à la France de faire face à ces situations.

S'agissant des appels en garantie de l'État, cela a été rappelé, les crédits pour 2026 sont en baisse de 95 millions d'euros par rapport à 2025. Cette diminution correspond à l'évolution des prêts garantis par l'État.

J'en viens aux participations financières de l'État.

D'aucuns l'ont rappelé, nous enregistrons une augmentation des cessions, qui entraîne 3,2 milliards d'euros de recettes pour le CAS. Parallèlement sont menées des opérations structurantes, comme l'a souligné le rapporteur spécial Claude Raynal : rachat du département Advanced Computing d'Atos, poursuite des opérations dans les secteurs spatial et numérique, et j'en passe.

Cette capacité à faire tourner le portefeuille est importante. Je partage votre analyse, monsieur Delahaye : il faut aller plus loin. En effet, certains secteurs exigent une intervention publique, celle de l'État actionnaire. En la matière, nos principaux concurrents, qu'il s'agisse de la Chine ou des États-Unis, ne se gênent d'ailleurs pas. Il nous faut réinterroger en permanence la doctrine de l'État actionnaire, à l'aune des exigences de performance, de résilience, de responsabilité sociale et environnementale, et de défense de nos intérêts stratégiques.

Je ne m'attarderai pas sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Cela a été rappelé, les dépenses concernent principalement la fiscalité de l'État, avec 140,8 milliards d'euros en 2026, contre 4,6 milliards d'euros pour la fiscalité locale. Ces montants découlent largement des décisions prises dans le reste du projet de loi de finances, en particulier dans la première partie.

L'examen des amendements sera sans doute l'occasion d'approfondir les différents points que vous avez soulevés, mesdames, messieurs les sénateurs.

engagements financiers de l'état

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Engagements financiers de l'État

60 199 989 569

60 378 669 199

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

58 615 000 000

58 615 000 000

Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

790 362 961

790 362 961

Épargne

96 166 608

96 166 608

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs)

661 000 000

661 000 000

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

37 460 000

37 460 000

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

0

0

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

0

178 679 630

Mme la présidente. L'amendement n° II-2087, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Épargne

 

 

 

 

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

37 460 000

 

37 460 000

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

TOTAL

 

37 460 000

 

37 460 000

SOLDE

- 37 460 000

- 37 460 000

La parole est à M. le ministre délégué.

M. David Amiel, ministre délégué. Cet amendement vise à minorer les autorisations d'engagement et les crédits de paiement à hauteur de 37,46 millions d'euros sur le programme 336 « Dotation du Mécanisme européen de stabilité » (MES).

En effet, aucune contribution supplémentaire au capital du MES n'est attendue de la France en 2026.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, même si elle regrette que cela ne figure pas dans le projet de loi de finances initial. En effet, la décision du directeur général du MES date du 2 octobre dernier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2087.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2021, présenté par Mme G. Jourda, M. Temal, Mme Conway-Mouret, M. Vayssouze-Faure, Mme Carlotti, MM. Darras, P. Joly, Marie, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Fonds de garantie TPE-PME / BITD

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

 

 

 

 

Épargne

 

 

 

 

Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (crédits évaluatifs)

 

150 000

 

150 000

Dotation du Mécanisme européen de stabilité

 

 

 

 

Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

 

 

 

 

Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

 

 

 

 

Fonds de garantie TPE-PME / BITD

150 000

 

150 000

 

TOTAL

150 000

150 000

150 000

150 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Le groupe socialiste propose la création d'un fonds de garantie qui permettrait d'assurer la continuité industrielle, de soutenir la montée en gamme des TPE-PME, de sécuriser les contrats stratégiques et de renforcer l'autonomie stratégique française et européenne. Cet instrument serait doté de 150 000 euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Des dispositifs sont déjà en vigueur, notamment le dispositif spécifique de soutien à l'export et celui qui existe au sein de Bpifrance.

Je rappelle que nous avons voté une proposition de loi – elle émanait, me semble-t-il, de notre collègue Dominique de Legge – qui créait un fonds de garantie pour les PME.

En tout état de cause, au regard du montant retenu – 150 000 euros, j'estime qu'il s'agit plutôt d'un amendement d'appel. C'est la raison pour laquelle la commission en demande le retrait.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. David Amiel, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Cozic, l'amendement n° II-2021 est-il maintenu ?

M. Thierry Cozic. Oui, je maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2021.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

compte d'affectation spéciale : participations financières de l'état

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », figurant à l'état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Participations financières de l'État

5 421 152 655

5 421 152 655

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

5 421 152 655

5 421 152 655

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

0

0

Mme la présidente. L'amendement n° II-2150, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

 

37 460 000

 

37 460 000

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

 

 

 

 

TOTAL

 

37 460 000

 

37 460 000

SOLDE

- 37 460 000

- 37 460 000

La parole est à M. le ministre délégué.

M. David Amiel, ministre délégué. En cohérence avec l'amendement précédemment adopté sur le MES, il s'agit de procéder à l'annulation de 37,46 millions d'euros en raison de l'absence de demande d'augmentation du capital.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur cet amendement de coordination.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2150.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2039 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé et Temal, Mme Artigalas, M. Kanner, Mme Linkenheld, MM. Darras, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione et Tissot, Mme Narassiguin, MM. Ziane, Cardon, M. Weber et Ouizille, Mme Daniel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. - Créer le programme :

Nationalisation d'ArcelorMittal France

II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

 

1 000 000 000 

 

1 000 000 000 

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

 

 

 

 

Nationalisation d'ArcelorMittal France

1 000 000 000

1 000 000 000

TOTAL

 1 000 000 000

1 000 000 000 

1 000 000 000 

1 000 000 000 

SOLDE

 0

 0

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. ArcelorMittal, avec ses 15 400 salariés, est un acteur clé de la sidérurgie française.

Nous souhaitons que l'État agisse pour protéger ces emplois, tout en préservant la production d'acier en France et notre souveraineté nationale. En contrepartie des aides publiques apportées, l'État doit contraindre l'entreprise à cesser les délocalisations et les suppressions d'emplois.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est favorable à la nationalisation d'ArcelorMittal ou à sa mise sous tutelle.

Cet amendement d'appel à agir vise à abonder d'un milliard d'euros un nouveau programme intitulé « Nationalisation d'ArcelorMittal France », et à minorer du même montant l'action n° 01 du programme 731 « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État », pour respecter l'article 40 de la Constitution.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous l'avez dit, il s'agit d'un amendement d'appel : on ne saurait se lancer dans une nationalisation au détour du vote d'un amendement financier. Vous proposez de créer un programme au sein du compte d'affectation spéciale pour la nationalisation d'ArcelorMittal France ou sa mise sous tutelle.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, dépourvu d'effet contraignant sur le Gouvernement. Son adoption reviendrait à affirmer une position de principe, la création d'un programme n'obligeant nullement l'exécutif à y recourir. Cela n'aurait d'ailleurs de sens que dans la perspective d'une nationalisation.

Les crédits du CAS sont déjà suffisants : si l'État souhaitait acquérir des actions d'ArcelorMittal, il pourrait le faire. En revanche, une mise sous tutelle soulève des questions de financement, de déficit et de délai nécessaire et ne pourrait se faire par l'intermédiaire de ce compte.

Lors de l'examen de cet amendement, la commission a estimé que les problèmes d'ArcelorMittal ne sauraient être résolus par un changement de propriétaire, puisqu'ils sont liés à la crise de la sidérurgie. La question sous-jacente de votre amendement, que je pose à votre place au ministre, est la suivante : quelle est la vision du Gouvernement sur la façon de répondre à la crise de ce groupe ?

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. David Amiel, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

Nous avons déjà eu des débats spécifiques sur le cas d'ArcelorMittal et nous les poursuivons.

Je tiens à rappeler que la crise de la sidérurgie découle avant tout de la surproduction chinoise. C'est bien à ce problème que l'Europe entière se trouve confrontée. Du reste, la crise qui touche l'acier depuis plusieurs mois concerne désormais de très nombreux secteurs industriels, tout au long de la chaîne de valeur, depuis l'électroménager jusqu'aux drones ou aux produits technologiques les plus innovants.

C'est bien l'enjeu de la politique que nous défendons à l'échelon européen : celle de la préférence européenne. La Commission européenne a d'ailleurs présenté des propositions en matière de sidérurgie, au début du mois d'octobre dernier, qu'il faut soutenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Nous voterons cet amendement.

Cela a été rappelé, il s'agit d'un amendement d'appel. Il témoigne d'une honnêteté intellectuelle ; y figurent deux versants, que le rapporteur spécial a explicités : la mise sous tutelle et la nationalisation – la nationalisation partielle me paraît peu efficace.

Puisque nous avons une culture du débat et qu'une nouvelle méthode est mise en œuvre, pourquoi n'aurions-nous pas une discussion ici sur l'avenir de la souveraineté industrielle de l'acier français, en prenant en compte ArcelorMittal ?

Pourquoi ne pas faire en sorte que, sur l'initiative des groupes de gauche, mais aussi d'autres groupes, la proposition de loi visant à la nationalisation d'ArcelorMittal France afin de préserver la souveraineté industrielle de la France, adoptée à l'Assemblée nationale, soit inscrite à l'ordre du jour des travaux du Sénat ? Nous verrons alors ce que nous faisons finalement pour l'avenir de l'emploi chez ArcelorMittal, mais aussi pour la souveraineté industrielle de l'acier français.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2039 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-2022 rectifié, présenté par MM. Canévet et Delahaye, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Financement partiel de l'opération d'actionnariat salarié via une augmentation de capital au sein de la société EDF SA

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

 

2 000 000

 

2 000 000

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

 

 

 

 

Financement partiel de l'opération d'actionnariat salarié via une augmentation de capital au sein de la société EDF SA

2 000 000

 

2 000 000

 

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Cet amendement à un objet beaucoup plus modeste. Il vise à favoriser l'actionnariat salarié, auquel je suis particulièrement attaché afin que les salariés puissent bénéficier du partage de la valeur dans les entreprises, en l'espèce chez EDF.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Sans surprise, la commission demande le retrait de cet amendement.

J'apporterai toutefois quelques précisions.

Cet amendement est satisfait par l'état du droit. La récente loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Électricité de France d'un démembrement a modifié le code de l'énergie ainsi que le régime de propriété de la société Électricité de France.

Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 111-67 du code de l'énergie dispose expressément que la société anonyme EDF est détenue intégralement par l'État, sous réserve d'une fraction susceptible d'être détenue par ses salariés ou anciens salariés dans le cadre d'une opération d'actionnariat salarié. Cette possibilité est désormais clairement établie, alors que ce n'était pas le cas avant 2024.

Le droit actuel permet donc de réaliser cette opération. La décision du Gouvernement et du groupe EDF de réaliser ou non une telle opération relève de leur responsabilité, et non de notre débat budgétaire, qui est sans incidence sur la décision.

Si le Gouvernement décidait d'une telle opération, elle pourrait d'ailleurs avoir lieu sans modifier les crédits du CAS. À cet égard, je note que le texte déposé par le Gouvernement prévoit pour l'Agence des participations de l'État une enveloppe de plus de 10 millions d'euros consacrés aux frais de conseil juridique et financier liés aux opérations en capital. Il n'y a donc pas d'obstacle budgétaire à l'organisation d'une opération d'actionnariat salarié et à sa réalisation.

Vous me permettrez d'ajouter, mon cher collègue, que je vous imaginais plus libéral que cela, c'est-à-dire davantage enclin à laisser l'entreprise s'organiser avec ses actionnaires et ses salariés !

M. Olivier Rietmann. Il est taquin !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. David Amiel, ministre délégué. Avis défavorable.

M. Michel Canévet. Je retire cet amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L'amendement n° II-2022 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-1453, présenté par M. Jadot, Mme Senée, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mmes Guhl et de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

I. – Créer le programme :

Achat d'une action spécifique au capital de TotalEnergies

II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État

 

60

 

60

Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État

 

 

 

 

Achat d'une action spécifique au capital de TotalEnergies

60

 

60

 

TOTAL

60

60

60

60

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yannick Jadot.

M. Yannick Jadot. Mes chers collègues, vous vous souvenez sûrement que, l'an dernier, nous avons déjà eu un débat sur cet amendement d'appel visant à ce que l'État prenne une action spécifique chez TotalEnergies.

C'était la conclusion, votée à l'unanimité, de la commission d'enquête sur les moyens mobilisés et mobilisables par l'État pour assurer la prise en compte et le respect par le groupe TotalEnergies des obligations climatiques et des orientations de la politique étrangère de la France, donc certains de ses membres sont ce soir présents. Cet amendement a également été voté à une très large majorité, sinon à l'unanimité. Nous nous souvenons tous, émus, de Roger Karoutchi, qui avait été le président de la commission d'enquête, soutenant cet amendement.

Aujourd'hui, TotalEnergies est possédée majoritairement par des capitaux étrangers. Depuis le 8 décembre dernier, elle est autant cotée à New York qu'à Paris. Ce que nous craignions déjà il y a un an est donc en train d'advenir : un déplacement du capital, comme des activités, de TotalEnergies outre-Atlantique. Demain, le conseil d'administration peut décider que le siège social sera désormais à New York ou ailleurs, et non plus à Paris, en tout cas dans les Hauts-de-Seine.

La commission d'enquête avait donc souhaité que l'État puisse, au travers de cette action spécifique, intervenir au capital et dans les décisions stratégiques de cette entreprise qui fait partie de notre histoire – parfois pas forcément pour le meilleur.

Il s'agit, je le redis, d'un amendement d'appel, car nous avons déjà demandé l'année dernière au Gouvernement d'intégrer l'énergie dans les secteurs stratégiques qui peuvent faire l'objet d'une action spécifique.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. À titre personnel, je réfléchis à cette question depuis longtemps et il me semble nécessaire qu'elle soit examinée.

Reste que la proposition nous paraît inadaptée pour garantir la préservation des intérêts stratégiques du pays en lien avec l'activité – c'est l'argument qui fonde cette demande d'achat.

L'État a évidemment la possibilité de créer une action spécifique, mais ce droit est assez strictement encadré et dépend des entreprises et des secteurs concernés.

D'une part, l'article 31-1 de l'ordonnance du 20 août 2014 encadre strictement le périmètre des entreprises pouvant donner lieu à la création d'une action spécifique. TotalEnergies ne remplit pas aujourd'hui les conditions requises, puisque cette entreprise ne figure pas à l'annexe du décret du 9 septembre 2004 au 1er janvier 2018 et que Bpifrance ne possède pas 5 % de son capital.

D'autre part, l'ordonnance prévoit que les actions spécifiques ne peuvent intervenir que pour les activités militaires, ainsi que pour les activités relatives à l'ordre public, à la sécurité publique et aux intérêts de la défense nationale. Pour autant, cette définition n'exclut pas le domaine énergétique, puisque l'on considère que ce secteur entre dans le champ des activités stratégiques lorsqu'il s'agit d'activités essentielles pour garantir l'intégrité, la sécurité ou la continuité de l'approvisionnement en énergie.

Je note d'ailleurs, et vous l'avez bien sûr relevé aussi, que l'État dispose d'une action spécifique au capital d'Engie, par exemple, anciennement Gaz de France. Toutefois, la situation est totalement différente, la part de l'État étant passée de 80 % à 24 % du capital. Il y avait déjà une action très forte de l'État dans Engie, qui conservait, au travers de cette participation au capital, un contrôle. Dans ce cas, l'idée de l'action spécifique est de ne pas laisser vendre des activités qui apparaîtraient stratégiques à l'État au sein d'Engie.

Nous savons donc mettre en œuvre ce mécanisme dans certains cas. Dans le cas de TotalEnergies, cela ne correspondrait pas à un système réellement positif comme vous le souhaiteriez, c'est-à-dire qui permettrait de contrôler l'usage que fait cette entreprise de ses moyens, donc de piloter ses projets.

Cela permettrait d'éviter la vente d'actifs stratégiques de TotalEnergies. Il s'agit là d'une autre vision.

Il faut savoir que, malheureusement – heureusement pour l'entreprise –, l'action TotalEnergies est extrêmement chère aujourd'hui. Acquérir 5 % des actions, ce qui permettrait de disposer d'un droit de regard, comme vous le souhaitez, coûterait environ 6 milliards d'euros au budget de l'État.

Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter pour expliquer que cette solution n'est pour l'instant pas envisageable, sauf décision stratégique de l'État. Puisqu'il s'agit d'un amendement d'appel, nous allons maintenant écouter ce qu'en pense le ministre.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. David Amiel, ministre délégué. M. Raynal a souligné qu'il s'agissait d'un amendement d'appel, mais il a aussi rappelé l'ensemble des difficultés juridiques que soulève cette demande d'action spécifique : la jurisprudence européenne comme l'absence de cas comparables. Tous les éléments techniques nécessaires vous ont donc été fournis, monsieur le sénateur.

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.

M. Yannick Jadot. Je tiens à rappeler que le Sénat et ses services juridiques ont évalué cette option, laquelle constituait la principale recommandation de la commission d'enquête. Il importe que la position de notre assemblée s'inscrive dans une forme de continuité.

En substance, le compromis auquel la commission d'enquête est parvenue est un compromis de patriotisme industriel. C'est la raison pour laquelle il a recueilli l'unanimité en son sein et a été voté, il y a un an, à la quasi-unanimité sur ces travées.

J'y insiste, nous sommes face à un enjeu de patriotisme. Comme l'a rappelé Claude Raynal, cette démarche exige, à un moment donné, une action de l'État pour intégrer TotalEnergies dans le champ des entreprises susceptibles de faire l'objet d'une action spécifique.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.

M. Olivier Rietmann. Monsieur Jadot, je veux vous répondre en trois points.

D'abord, il faut arrêter avec cette histoire de déménagement de TotalEnergies ! Nous savons bien que le groupe est situé en France, qu'il est coté à l'Euronext à Paris et qu'il n'a aucune intention de transférer ses activités. Sa seule volonté est de capter des capitaux privés américains pour pouvoir se développer.

Ensuite, s'il était adopté, cet amendement produirait l'effet inverse de celui que vous escomptez, mon cher collègue. Nous adresserions le signal que l'État peut, à tout instant, utiliser la possibilité de prendre une action spécifique au sein d'un grand groupe, d'un fleuron national tel que TotalEnergies. Une telle initiative enverrait un message négatif dans un secteur hyperconcurrentiel, qui nuirait à la valorisation boursière de l'entreprise et l'exposerait au péril de prédateurs étrangers susceptibles de la racheter et de la délocaliser.

M. Yannick Jadot. C'est l'inverse !

M. Olivier Rietmann. Enfin, plusieurs d'entre nous ont en effet voté cet amendement l'année dernière. Churchill disait que ceux qui ne changent jamais d'avis ne feront jamais rien. Cette année, nous allons changer d'avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-1453.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », figurant à l'état D.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : accords monétaires internationaux

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l'état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Accords monétaires internationaux

0

0

Relations avec l'Union monétaire ouest-africaine

0

0

Relations avec l'Union monétaire d'Afrique centrale

0

0

Relations avec l'Union des Comores

0

0

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

compte de concours financiers : prêts et avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », figurant à l'état D.

ÉTAT D

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics

9 295 000 000

9 295 000 000

Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

9 000 000 000

9 000 000 000

Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

210 000 000

210 000 000

Prêts et avances à des services de l'État

30 000 000

30 000 000

Avances à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex

15 000 000

15 000 000

Prêts aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

0

0

Prêts destinés à soutenir Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0

0

Prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0

0

Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens

40 000 000

40 000 000

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Les crédits sont adoptés.)

remboursements et dégrèvements

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Remboursements et dégrèvements

145 463 361 429

145 463 361 429

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs)

140 845 361 429

140 845 361 429

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs)

4 618 000 000

4 618 000 000

Mme la présidente. L'amendement n° II-2086, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs)

70 998 687

70 998 687

Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs)

192 000 000

192 000 000

TOTAL

262 998 687

262 998 687

SOLDE

-262 998 687

-262 998 687

La parole est à M. le ministre délégué.

M. David Amiel, ministre délégué. Cet amendement vise simplement à tirer les conclusions de l'actualisation des prévisions réalisées dans le cadre du projet de loi de fin de gestion pour 2025. Il s'agit de réduire de 71 millions d'euros les crédits de paiement du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) » et ceux du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux (crédits évaluatifs) » de 192 millions d'euros.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° II-2334, présenté par Mme Lavarde et MM. Delahaye, Darnaud et Marseille, est ainsi libellé :

Amendement n° II-2086

Dans les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) » figurant dans l'amendement n° II-2086, remplacer les deux occurrences du montant :

70 998 687

par le montant :

1 930 190 220

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Ce sous-amendement vise à assurer la sincérité des crédits du programme « Remboursements et dégrèvements de l'État (crédits évaluatifs) » pour 2026. Nous demandons de retrancher 2 milliards d'euros de ce programme pour tenir compte de la suppression de la surtaxe d'impôt sur les sociétés votée par le Sénat.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° II-2334 et sur l'amendement n° II-2086 ?

M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial. La commission a émis un avis favorable sur l'amendement du Gouvernement.

En revanche, ce sous-amendement a été déposé à minuit vingt-quatre. Dans ces conditions, la commission n'a pas eu le temps de mener une expertise complète. Je ne doute pas que le Gouvernement pourra nous éclairer, puisque les auteurs du sous-amendement posent la question de la sincérité budgétaire. (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° II-2334 ?

M. David Amiel, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Je reprends un instant ma casquette de président de la commission des finances. Madame la présidente, lorsqu'un sous-amendement visant à minorer de 1,9 milliard d'euros les crédits est déposé de cette manière, la moindre des choses est de prendre un peu de temps pour l'examiner.

Le Gouvernement proposait une réduction de crédits de 70 millions d'euros ; pour leur part, nos collègues proposent une réduction de 1,9 milliard. Il me semble qu'il y a là un petit problème…

La commission n'a évidemment pas eu le temps d'examiner ce sous-amendement. Certes, je pourrais lui demander de se réunir,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Nous sommes à peine assez nombreux !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. … mais j'apprécierais surtout que ce sous-amendement soit retiré.

Mes chers collègues, je vous le dis très calmement : du point de vue de la commission des finances, il y a un problème de méthode, ce qui est d'autant moins acceptable que deux des signataires de ce sous-amendement sont membres de cette commission.

En outre, permettez-moi d'ajouter que proposer de modifier un amendement réduisant les crédits de 70 millions d'euros par un sous-amendement les réduisant de 2 milliards d'euros, c'est un peu n'importe quoi !

Enfin, nous savons très bien quel est l'objet de ce sous-amendement : il vise à rééquilibrer le solde final de manière factice, après que le Sénat a supprimé 8 milliards d'euros de recettes.

M. Thierry Cozic. Exactement !

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Soyons clairs : de telles méthodes ne sont ni sérieuses ni à la hauteur de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. David Amiel, ministre délégué. Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, d'apporter quelques éléments techniques au sujet de ce sous-amendement déposé il y a quelques minutes.

Les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » sont liés non pas au bénéfice fiscal de 2026, mais à celui de 2025, via le mécanisme d'acompte.

Par conséquent, quelles que soient les décisions du Parlement quant à l'imposition des sociétés en 2026, elles ne peuvent remettre en cause la sincérité de cette prévision.

C'est pour cette raison que le Gouvernement émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.

Mme la présidente. Monsieur Delahaye, le sous-amendement n° II-2334 est-il maintenu ?

M. Vincent Delahaye. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Des provocations, jusqu'au bout ! C'est n'importe quoi !

M. Thierry Cozic. Ce n'est pas sérieux !

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-2334.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 115 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 321
Pour l'adoption 187
Contre 134

Le Sénat a adopté.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Voilà qui fera un beau titre dans la presse : « le ridicule tue ».

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2086 rectifié, modifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

(Les crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».

9

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, vendredi 12 décembre 2025 :

À neuf heures quarante, l'après-midi, le soir et la nuit :

Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, de financement de la sécurité sociale pour 2026 (texte n° 193, 2025-2026) ;

Suite du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (texte n° 138, 2025-2026) :

Mission « Culture » ;

Mission « Justice » et article 78 ;

Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ;

Compte spécial « Développement agricole et rural ».

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 12 décembre 2025, à zéro heure quarante.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

JEAN-CYRIL MASSERON