Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Rappel au Règlement

Loi de finances pour 2008 (Deuxième partie - Suite)

Enseignement scolaire

Orateurs inscrits

Examen des crédits

Mission d'information (Nominations)

Loi de finances pour 2008 (Deuxième partie - Suite)

Sécurité

Orateurs inscrits

Examen des crédits

Article rattaché

Administration générale et territoriale de l'Etat

Collectivités territoriales

Orateurs inscrits

Examen des crédits

Articles rattachés

Sécurité civile

Orateurs inscrits

Examen des crédits

Articles rattachés




SÉANCE

du mercredi 5 décembre 2007

36e séance de la session ordinaire 2007-2008

présidence de M. Philippe Richert,vice-président

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Rappel au Règlement

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous souhaitions poursuivre ce matin, avec un amendement sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire », le débat que nous avons eu en première partie sur l'article 89 de la loi d'août 2004 relative aux responsabilités locales. La commission des finances a préféré placer notre amendement parmi les articles non rattachés : nous le déplorons, car le financement de l'enseignement privé sous contrat est une question très importante, en particulier pour les petites communes. Notre débat y perd en intérêt !

M. le président.  - Je vous donne acte de votre rappel au Règlement.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - La commission des finances, effectivement, a préféré rattacher cet amendement à la mission « Relations de l'Etat avec les collectivités territoriales », plutôt qu'à celle de l'« Enseignement scolaire ». Nous poursuivrons donc le débat lundi, avec les articles non rattachés : j'espère qu'il apportera des réponses équitables !

Loi de finances pour 2008 (Deuxième partie - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.

Enseignement scolaire

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Orateurs inscrits

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La commission des finances approuve votre budget, monsieur le ministre, parce qu'il est intéressant, au diapason des attentes nouvelles de nos concitoyens pour un enseignement scolaire de qualité. Le journal Le Monde d'hier, titrait sur la difficulté de notre pays à tenir son rang sur la réussite scolaire, au regard du classement de l'OCDE.

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Il ne vaut rien !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Monsieur Mélenchon, je crois pour ma part qu'un pays a plus de chance de réussir en se rapprochant des autres, qu'en continuant à raisonner avec des références valables pour lui seul... Les analyses comparatives, donc, montrent que nous n'avons pas comblé notre retard pour l'acquisition des savoirs de base. L'approche qualitative a été initiée par M. Fillon en 2005, avec les parcours personnalisés de réussite éducative (PPRE) : la réussite individuelle prenait enfin le pas sur la seule évaluation par les moyens budgétaires. Ce virage suivait un important travail de réflexion, avec les audits réalisés sous l'impulsion de M. Copé, qui avaient eu une approche très concrète de l'éducation nationale. Votre ministère s'est, depuis, engagé tout entier dans la revue générale des politiques publiques, et il a fait conduire des travaux plus thématiques, tels que ceux de la commission Pochard sur la revalorisation de la fonction enseignante, en conservant cet objectif central : donner à chacun de nos jeunes compatriotes, le plus de chances de réussir à l'école.

Votre politique a déjà commencé à porter ses fruits. J'y vois un signe dans l'effort en direction des élèves les plus en difficulté, qui représente 1,1 milliard de crédits, de même que pour les handicapés et les primo-arrivants.

Nous apprécions également la tonalité de votre action au ministère : l'expérience vous donne la modestie de celui qui sait qu'on ne peut pas tout faire, et vous y ajoutez un grand pragmatisme, encore trop rare dans notre pays où nous savons à propos de tout, lancer des querelles idéologiques. Sur la carte scolaire, par exemple, plutôt que de sacrifier à une approche théorique, vous avez su tenir compte des réalités de terrain et arrondir les angles. Le nombre de dérogations augmente, mais elles restent très marginales ; vous avez privé la presse du marronnier de la carte scolaire, en acceptant que les familles qui le souhaitent obtiennent des dérogations...

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Les riches !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - ... tout en préservant un système, qui doit évoluer mais qui donne encore satisfaction en particulier dans le monde rural.

Même chose pour la reconquête du temps scolaire : sans céder aux sirènes de l'idéologie, vous avez décidé, tranquillement, que le samedi ne serait plus scolarisé dans le primaire, mais aussi que les heures ainsi dégagées iraient à d'autres activités scolaires et de soutien.

La reconquête du merveilleux mois de juin - où l'on ne faisait rien- est bienvenue : sur l'année, cela représente 10 % de capacité d'enseignement en plus. Les études surveillées, engagement du Président de la République, seront mises en oeuvre entre 2008 et 2011 : vous commencez par l'éducation soutenue pour les élèves en difficulté, grâce à quelques recrutements, des heures supplémentaires et le soutien aux associations spécialisées. Ce changement tranquille ne provoque aucune guerre de religion.

Les effectifs se réduisent de façon spectaculaire : 11 000 postes de moins. Il est vrai que votre administration à elle seule représente près de la moitié de la fonction publique, même si son périmètre a changé puisque vous avez perdu l'enseignement supérieur et la recherche ainsi que les TOS. La commission des finances apprécie que l'évolution n'affecte en rien le taux d'encadrement des élèves par les adultes, grâce, là encore, aux heures supplémentaires.

Les indicateurs de performance concernant l'efficacité de la dépense scolaire ont le mérite d'exister mais faute de séries longues, les comparaisons dans le temps ne sont pas possibles ; nous n'avons pas non plus le détail par type d'enseignement et par région, c'est une lacune à combler. De même, les comparaisons avec les autres pays européens, nos concurrents, seraient nécessaires.

La particularité française est la richesse de l'offre scolaire : dans le primaire, les élèves sont présents à l'école plus de neuf cent cinquante heures contre huit cents en moyenne européenne. L'écart est plus grand encore dans le secondaire. Et ce, pour des résultats moyens ou médiocres. Je souligne que les tableaux sur l'encadrement scolaire sont illisibles. La moyenne masque les réalités.

Monsieur le Ministre, je déplore que votre budget soit sollicité pour d'autres politiques que l'éducation : accueil des primo-arrivants, qui relève de M. Hortefeux, accueil à la maternelle, pour des motifs de politique familiale... Nous avons du reste commandé à la Cour des comptes une étude sur la place de l'école maternelle. Enfin, l'accueil des enfants handicapés devrait être budgétairement aidé par le ministère de la solidarité.

Nous présenterons trois amendements qui sont l'occasion d'interroger le ministre sur ses intentions. D'abord, sur le partenariat avec les collectivités locales en ce qui concerne les frais d'internat et la demi-pension. Le deuxième amendement porte sur la gestion des vacataires : souplesse n'est pas opacité ! Enfin, pour tenir compte des conclusions de la commission Pochard sur la revalorisation de la fonction enseignante, vous avez constitué une provision -mais uniquement pour l'enseignement secondaire...

Nous voulons veiller à une bonne éducation nationale, pour une France forte, intelligente et réactive dans la mondialisation. (Applaudissements à droite)

présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.  - L'éducation est la première priorité nationale, est-il écrit en introduction du code de l'éducation. Le budget pour 2008, avec 59,6 milliards d'euros, en hausse de plus de 2 %, le prouve bien. La moitié des agents de la fonction publique, un cinquième du budget... Il faut des résultats !

Vous avez des objectifs clairs et je vous en félicite. Le premier est de diviser par trois l'échec scolaire lourd en trois ans. Pour cela, il faudra bien sûr infléchir notre politique de l'éducation. Vous avez assoupli -prélude à une suppression- la carte scolaire et les trois quarts des demandes ont pu être satisfaites sans perturber l'équilibre. Encore faut-il que chaque établissement ait un projet, qui soit plus qu'un simple instrument de justification administrative et budgétaire. Vous prévoyez aussi la généralisation de l'accompagnement - gratuit- après la classe, pour chaque enfant ayant besoin de soutien scolaire. Mais cette réforme ne pourra se faire sans une bonne coopération avec les collectivités locales, en raison des coûts indirects. Où en est ce dossier ?

D'ores et déjà, pour mieux prendre en compte les besoins individuels des élèves, l'encadrement dans les établissements a été renforcé : six mille assistants d'éducation recrutés, cent soixante-six auxiliaires de vie, des infirmières scolaires -mais si trois cents postes sont créés, n'oubliez pas que ceux ouverts les années passées n'ont pas pu être pourvus, faute de candidats...

Il est dommage que la solution proposée par le Sénat en 2004 n'ait pas été retenue...

Le renforcement de l'encadrement dans les établissements se fera à moyens quasi constants, grâce à de nouveaux efforts pour optimiser la gestion des services, tout en tenant compte des impératifs éducatifs : c'est seulement un enseignant sur trois qui ne sera pas remplacé, contre un agent sur deux dans les services administratifs et dans la plupart des autres missions. Au total, ce sont 11 200 postes qui ne seront pas renouvelés, dont 1 000 emplois administratifs.

Ces suppressions se feront à offre éducative inchangée, grâce à une gestion plus rationnelle des remplacements, à la réduction des surnombres, ainsi qu'à la prise en compte des évolutions démographiques : les écoliers sont plus nombreux, 700 postes sont créés dans le primaire ; le nombre de collégiens et de lycéens diminue, 1 500 postes ne seront pas renouvelés dans le secondaire. Enfin, 3 500 emplois seront transformés en heures supplémentaires afin de soutenir le pouvoir d'achat des professeurs : 146 millions seront consacrés à la création de nouvelles heures supplémentaires, d'autant plus attractives qu'elles bénéficieront des exonérations fiscales et sociales prévues par la loi Tepa. Mais cela ne suffira pas à revaloriser dans leur ensemble les carrières enseignantes. Ce budget prévoit une provision de 41 millions pour anticiper les conclusions de la commission Pochard mais cela ne représente jamais que 42 euros par enseignant.

Comment comptez-vous relancer la bivalence et le dispositif « seconde carrière » qui ne concerne encore que dix enseignants ? La revalorisation doit concerner également les chefs d'établissements, qui doivent être formés et rémunérés à la hauteur des responsabilités qui leur sont confiées. Ils sont les pièces maîtresses de notre système éducatif ; c'est par eux qu'il faut commencer. Les crédits inscrits permettront de financer en année pleine la hausse de 25 % votée par le Sénat pour 2007.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis. - La mission « Enseignement scolaire » réunit les crédits de l'éducation nationale et ceux de l'enseignement technique agricole. Au-delà de sa valeur symbolique, ce regroupement devait permettre de préserver l'enseignement agricole des annulations de crédits décidées en cours d'année et destinées à financer les mesures exceptionnelles qui suivent telle ou telle calamité naturelle. Des engagements ont été pris en ce sens. Ils n'ont pas été tenus puisque plus de 10 millions de crédits de paiement du programme « Enseignement technique agricole » ont été annulés afin, cette fois, d'abonder les lignes budgétaires ouvertes après le passage du cyclone Dean en Martinique et en Guadeloupe. De tels plans sont nécessaires et je n'en conteste ni le principe, ni même le financement par voie de prélèvement sur tous les programmes du budget général. Mais l'exigence de solidarité doit aussi s'accompagner du souci de l'équité et ces prélèvements devraient être proportionnés à l'importance de chaque programme au sein de la mission. Quand je vois que le budget de l'enseignement agricole, qui n'était que de 1,5 milliard, a contribué à hauteur de 10 millions à ces annulations alors que le programme « Enseignement scolaire public du second degré », qui représentait plus de 28 milliards, n'a pas été touché par ces annulations, je ne peux qu'avoir le sentiment que l'effort n'a pas été équitablement réparti. Je vous demande donc instamment de vous assurer qu'il en ira désormais autrement et je souhaite que des assurances claires nous soient apportées. Pourrez-vous transmettre cette demande au ministre de l'agriculture ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. - Il n'est pas là.

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis.  - Le budget de l'enseignement agricole n'est pas assez élevé pour supporter une nouvelle série d'annulations en cours d'exécution. Il s'élèvera en effet à 1,26 milliard, contre 1,28 milliard en 2007, soit une baisse de 1,08 %. Celle-ci s'explique avant tout par la poursuite de la décentralisation, avec un millier de transferts de TOS au 1er janvier 2008, ainsi que par l'effet en année pleine des suppressions effectuées en 2007. La règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux sera assouplie pour les enseignants, dont deux sur trois seront maintenus. Dans un contexte de vigilance budgétaire renforcée, il a donc été tenu compte des singularités de l'enseignement agricole et je m'en réjouis.

Au total, ce sont 106 équivalents temps plein travaillé qui devraient être supprimés en 2008, dont 25 de professeur. L'impact sur les établissements restera donc mesuré d'autant plus que l'Assemblée nationale a adopté un amendement annulant l'effet en année pleine des réductions de postes dans l'enseignement privé du temps plein. Ce projet de budget témoigne du souci de respecter les engagements pris à l'endroit des établissements privés : la subvention destinée au rythme approprié est en progression, à hauteur d'un peu moins de 4 millions, tandis que celle consacrée au temps plein augmente de 2 millions.

Certaines questions attendent encore un règlement durable ; comme les reports de charge et la revalorisation de la base de calcul de la subvention du temps plein, dont il faudra tenir compte en 2009. Au-delà de ce budget 2008 satisfaisant, c'est en effet vers 2009 qu'il faut regarder. Les acteurs de l'enseignement agricole nourrissent depuis presque deux ans de grands espoirs : en 2006, toute une série de rapports ont été publiés, qui témoignaient un intérêt grandissant pour cette voie d'enseignement méconnue et contribuait à la reconnaissance de ses résultats exceptionnels. Cette année encore, l'enseignement agricole a été évoqué à plusieurs reprises comme un modèle au cours des auditions menées par la commission dite Pochard. Ces espoirs ne peuvent être tous déçus. L'année 2008 doit être largement consacrée à l'élaboration d'un nouveau projet et d'une nouvelle ambition pour l'enseignement agricole. La contrainte budgétaire, qui se traduira par une baisse de la dotation globale horaire de 2 %, requiert une nouvelle stratégie pour absorber ces réductions de moyens sans compromettre pour autant l'excellence pédagogique de l'enseignement agricole.

Je forme enfin le voeu que l'on ne revienne pas en seconde délibération sur les travaux que nous allons mener aujourd'hui, comme cela s'est produit à l'Assemblée nationale il y a quelques jours. C'est dans cet esprit de vigilance, mais aussi de confiance dans votre volonté, monsieur le ministre, de garantir pleinement l'avenir de l'enseignement agricole, que la commission a décidé de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin rapporteur pour avis.  - J'aborderai pour ma part la question de l'enseignement professionnel, en mettant l'accent sur sa nécessaire revalorisation.

Les filières professionnelles restent prisonnières de l'image surannée qui prévaut encore alors même qu'elle n'a plus rien à voir avec la réalité. Les lycées professionnels ne sont pas ces LEP que certains qualifiaient de « parking à chômeurs » il y a vingt ans. Ce sont des établissements modernes, dotés d'équipements de pointe, délivrant un enseignement de grande qualité et permettant aux élèves d'espérer une bonne insertion professionnelle, voire de poursuivre des études supérieures avec des chances sérieuses de réussite s'ils sont bien orientés : le taux de réussite à la licence des bacheliers professionnels est à peu près le même que celui des titulaires d'un bac technologique. L'enseignement professionnel n'a pas pour seule vocation l'insertion à court terme ; il peut élever le niveau de qualification de la population, rendu nécessaire par les évolutions technologiques. Mais il faut pour cela transformer les mentalités et cesser de n'orienter vers ces filières que les élèves jugés incapables de poursuivre dans l'enseignement général.

Pour que les filières professionnelles apparaissent à tout élève comme un choix digne d'intérêt, la création des parcours de découverte des métiers et des formations apparaît comme une première étape à saluer. Il faudra aussi des moyens, notamment en personnel qualifié et formé pour assurer ces missions d'information et d'orientation. Pourtant, les réductions de postes de conseillers d'orientation psychologues se poursuivent, alors même qu'ils sont recrutés pour assurer ces missions. Ce choix est difficilement compréhensible : si les professeurs connaissent les filières, ils ne sont pas particulièrement qualifiés pour parler des métiers et du monde professionnel.

Au-delà de la question de l'orientation, essentielle, il reste bien des choses à faire pour revaloriser l'enseignement professionnel. Je pense notamment au manque de perspective de carrière des professeurs de lycée professionnel et des contractuels, nombreux dans ces établissements. L'offre de diplômes et de formations doit également être rénovée.

Vous prévoyez de faire progresser le baccalauréat professionnel en trois ans. Cela peut avoir un sens dans certaines filières, où le BEP et le CAP ne suffisent plus à garantir une insertion rapide, comme pour les métiers de la comptabilité. Mais là où le BEP et le CAP jouent encore un rôle majeur, pourquoi les mettre en péril ? Ces diplômes constituent souvent la première étape d'une reprise de confiance.

Les syndicats d'enseignants s'en inquiètent et, en début de semaine, ils vous ont demandé de les recevoir en urgence. Les premières expérimentations montrent que beaucoup d'élèves arrêtent leur scolarité durant la préparation d'un bac en trois ans et sortent alors de l'école sans qualification. Bref, la généralisation du baccalauréat professionnel en trois ans est prématurée, puisque aucune certification intermédiaire n'est prévue. Tout cela fait craindre qu'une stratégie globale de revalorisation de l'enseignement professionnel fasse encore défaut. Cette stratégie passe également par une bonne gestion des moyens. Or, lors de son audition par notre commission, le ministre a été incapable d'évaluer l'impact des suppressions d'emplois sur l'enseignement professionnel. Je regrette également le manque de lisibilité des évolutions constatées dans le programme « Enseignement scolaire public du second degré », notamment pour l'apprentissage, la formation continue et la VAE.

Je rappelle que, quelles que soient les marges de manoeuvre laissées en exécution, le budget voté par le Parlement n'a pas valeur de blanc-seing.

Il faudrait clarifier la présentation d'un programme qui représente à lui seul plus de 28 milliards.

Compte tenu de ces observations, je ne voterai pas, à titre personnel, les crédits de cette mission pour lesquels la commission des affaires culturelles a toutefois donné un avis favorable. (Applaudissements à gauche)

M. André Vallet. - Cette mission bénéficie des crédits et des effectifs les plus importants du budget général de l'État : 21,8 % des crédits de paiement et 46,3 % des emplois de fonctionnaires, soit 1 022 641 temps pleins. L'urgence n'est pas de donner toujours plus mais d'utiliser mieux les moyens et compétences de l'éducation nationale. C'est parce que ce budget semble aller dans ce sens, qu'il institue une nouvelle conjonction entre responsabilité de l'État et responsabilité locale, qu'il semble, au moins partiellement, renoncer à une gestion centralisée et anonyme, que je l'approuverai... tout en vous demandant quelques éclaircissements.

J'ai approuvé votre prédécesseur lorsqu'il a condamné la méthode globale qui provoque des difficultés précoces chez les 20 % d'enfants qui arrivent en sixième sans savoir lire ou comprendre un texte. Énorme proportion !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Ce n'est pas vrai !

M. André Vallet. - Il faut diminuer ce très mauvais chiffre en appliquant une méthode`qui soit à la portée de tous, une méthode qui a fait ses preuves. En êtes vous convaincu, monsieur le ministre ?

A l'école primaire, vous venez de supprimer les cours du samedi matin. Le Président de la République souhaite une heure de sport supplémentaire. Une heure sera affectée à l'enseignement d'une langue étrangère. Quelle sera alors la nouvelle répartition horaire de l'école primaire ?

Trop d'élèves arrivés qui ne maîtrisent pas les fondamentaux sont dès le départ noyés dans le collège unique où le système actuel de passage les amène automatiquement, malgré leurs carences, en classe de troisième quel que soit leur niveau réel, ce qui est la cause de leur échec scolaire. L'extrême hétérogénéité des classes de collège les rend ingérables ! Le moule unique impose le même enseignement à tous sans tenir compte des goûts, aptitudes, rythmes d'apprentissage ou environnement socioculturel de chaque élève, voire des désirs de la famille. L'égalité des chances connaît, au collège plus qu'ailleurs, sa caricature, l'égalitarisme qui applique à tous des pédagogies identiques et qui conduit dès lors, inéluctablement, à l'échec et à l'exclusion. Cette illusoire égalité des chances a son revers antidémocratique : par sa complexité le système scolaire devient opaque pour le citoyen ignorant les astuces réservées aux seuls initiés, lesquels peuvent bénéficier à plein des divers moyens de contourner la règle commune. Êtes-vous favorable à une réforme du collège unique ?

Peut-on espérer la restauration des cours de morale et d'instruction civique tels que nous les connaissions dans l'école « d'autrefois » ? Dans l'esprit de ses fondateurs l'école républicaine devait instruire mais aussi enseigner le savoir vivre collectif. Nous avons trop légèrement oublié cette dimension, d'autant que l'essor de conceptions antiautoritaires et parfois libertaires a accru la défiance à l'égard des pédagogies directives. N'est-on pas allé trop loin dans la pédagogie purement critique ? Un esprit « post soixante-huitard » mal placé...

M. Jean-Luc Mélenchon. - Vous avez lu ça dans Le Journal de Mickey ?

M. André Vallet. - ...a fait oublier à trop de maîtres que leur rôle ne se limite pas à dispenser des connaissances ponctuelles et que l'école doit former à la citoyenneté. Morale et instruction civique peuvent y contribuer.

Nous sommes incapables d'éclairer les choix des jeunes vers des voies de formation qui ne soient pas des impasses. C'est l'ensemble du processus d'orientation qui est en cause car c'est par lui que se fait, pour partie, la distinction entre les milieux sociaux. Le maquis que constitue notre système scolaire aux yeux de bien des élèves et de bien des parents, l'ignorance dont font preuve trop de professeurs de l'enseignement général pour la vie économique des entreprises imposent de revoir notre système d'information et d'orientation et, cela, dès le collège.

Qu'en est-il enfin d'une plus grande autonomie des établissements et d'une réforme de la nomination des chefs d'établissement ? Pouvons-nous nous attendre, en ces domaines, à quelques initiatives ?

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Oh, la, la...

M. André Vallet. - Le Président de la République va-t-il en 2008 empêcher le mammouth d'accumuler de la mauvaise graisse ? (Applaudissements à droite)

M. Yannick Bodin. - Compte tenu de l'actualité, à savoir la démonstration malheureusement éclatante que la crise des banlieues persiste et même s'aggrave, je souhaite rappeler le coeur de la mission de l'école de la République : l'égalité des chances pour tous les élèves. Plus les inégalités sociales se creusent, plus cette mission se complique ! Encore faudrait-il utiliser les outils qui permettent de lutter contre la ghettoïsation et la paupérisation de certains quartiers. Or, vos choix budgétaires et politiques accélèrent le processus de fracture sociale.

Je commencerai par la suppression de la carte scolaire. Votre majorité accorde une dérogation aux élèves des zones d'éducation prioritaire (ZEP), notamment aux titulaires de la mention très bien au brevet. Leur ambition sera désormais claire : gagner leur ticket pour changer d'établissement. Or l'« ambition réussite » de ces jeunes ne doit pas se résumer à partir de leur collège ou de leur cité. Vous invoquez la liberté de choix des parents, le mérite, la volonté de l'enfant. Mais la liberté de choix produit bel et bien de l'inégalité. Les enfants des familles initiées et quelques bons élèves boursiers vont rejoindre les établissements de « bonne réputation ». Quand les demandes seront trop nombreuses, ce sera la sélection, et, pour la plupart, l'affectation dans le lycée de leur zone d'origine. Vous allez accentuer la coupure sociale par le regroupement des meilleurs et la ghettoïsation définitive des plus défavorisés. Ce qu'il faut, si vous voulez revenir sur la carte scolaire, c'est au contraire plus de mixité sociale. Il faut aussi davantage d'encadrants dans les collèges « ambition réussite ».

A côté de ce faux « libre choix » qui va concentrer tous les problèmes dans certains établissements déjà sous haute tension, vous décidez de supprimer, 11 200 emplois pour la seule année 2008. Le nombre moyen d'élèves en classe de mathématique, à l'âge de 15 ans, est de 27 en France, contre 18 à 24 dans les autres pays d'Europe. Votre choix politique de supprimer des postes interdira à l'école de réduire les inégalités sociales, d'autant que les crédits d'action sociale du programme « Vie de l'élève » diminuent de 16,4 %  et que ceux destinés aux associations ne retrouvent même pas leur niveau de 2006.

Il faut accompagner les élèves qui en ont le plus besoin. Vous vous en remettez au volontariat. Or, ne sont volontaires que les élèves qui ont le moins besoin de soutien. Il faut un encadrement et un tutorat pour tous les élèves en difficulté, ce qui exige la présence de plus nombreux adultes, sinon ces heures seront considérées par certains élèves comme des heures de colle.

Ce n'est vraiment pas le moment de supprimer des postes. On ne peut qu'approuver des dispositifs qui font de l'école son propre recours au grand dam des officines privées.

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Et oui !

M. Yannick Bodin.  - Je crois savoir que vous êtes d'accord. Il est cependant problématique de laisser les collectivités territoriales sans compensation : il faut une vaste logistique pour le transport des élèves à des horaires différents et une nouvelle organisation du travail des personnels TOS mais ce nouveau transfert de compétences ne s'accompagne pas d'un transfert de recettes.

S'agissant des ambition-réussite, on peut améliorer l'articulation entre le secondaire et les meilleures filières afin que les élèves soient choisis en fonction de leurs résultats et non selon leur établissement et leur milieu d'origine.

J'ai été le rapporteur de la mission d'information du Sénat sur la diversité sociale des élites que présidait M. Legendre. Les classes préparatoires sont l'un des moteurs du système de reproduction des élites. Leur accès n'apparaît pas démocratique, les chiffres indiquent une nette régression des élèves issus des milieux défavorisés, leur proportion revenant de 29 à 10 %. Vous connaissez nos propositions pour lutter contre la dégradation de la mixité sociale. Les prendrez-vous en compte ? Il faudrait aussi évoquer les pôles d'excellence.

Nous ne pouvons cautionner une baisse des moyens (1,2 % en euros constants) accompagnée d'un aveu de renoncement dans un contexte de libéralisation de l'école. Nous serons contraints de voter contre. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Claude Carle.  - Un sujet aussi important que l'enseignement scolaire doit être abordé avec philosophie. Je placerai donc mon intervention sous le patronage de Socrate...

M. Ivan Renar.  - Il faut se méfier des Grecs...

M. Jean-Claude Carle.  - « Le savoir est la seule matière qui s'accroît quand on la partage ». La France a fait sien cet aphorisme avec l'école gratuite et obligatoire et l'effort de la collectivité nationale ne s'est jamais démenti : votre ministère est le premier employeur, avec un million de personnes pour accueillir douze millions d'élèves ; le budget, qui s'élève à 59 milliards, représente 4,1 % du P.I.B., ce qui nous situe au-dessus de la moyenne de l'OCDE, 3,8 %. Grâce à cet investissement, de plus en plus d'élèves atteignent le bac -nous en sommes aujourd'hui à 81 %.

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Il est bon de le rappeler.

M. Jean-Claude Carle.  - Cependant, nombre d'élèves rencontrent des difficultés : ils sont trop nombreux à redoubler et les disparités tiennent souvent au milieu socio-professionnel de leurs parents -autant de freins à l'égalité des chances, cet objectif ambitieux qui est aussi, dans notre tradition républicaine, un impératif.

Chacun s'accorde sur le constat de la crise mais il faut dépasser le simplisme et admettre que ce ne sont pas les moyens qui manquent mais les résultats. Plus judicieusement employés, les moyens donneraient de meilleurs résultats. Un jeune sur trois entre au collège sans maîtriser les savoirs fondamentaux ; cent soixante mille élèves sortent chaque année du système éducatif sans diplôme ni formation ; la première porte que poussera un jeune sur cinq sera celle de l'ANPE, un enfant d'ouvrier a quatre fois moins de chances de quitter l'école sans diplôme qu'un enfant de cadre mais dix-sept fois moins d'entrer dans une grande école.

Nous avons des capacités exceptionnelles mais elles sont mal employées et nos longues plages d'enseignement manquent d'efficacité. Il nous faut repenser notre organisation pour que l'école accomplisse sa mission. Eduquer les jeunes, c'est, comme l'a écrit le Président de la République, chercher à concilier le mouvement qui pousse à aider chaque enfant à trouver sa voie et celui qui conduit à lui inculquer ce qu'on croit juste. Le budget a été conçu pour répondre à cette exigence, grâce à l'accompagnement éducatif, à la scolarisation des handicapés et à la mise en oeuvre de la loi de 2005.

L'an prochain onze mille deux cents départs à la retraite ne seront pas remplacés, ce qui fait pousser à certains des cris d'orfraie mais cette diminution de 1 % doit être rapportée aux évolutions démographiques : diminution de 3,3 % du nombre des élèves et augmentation de 4,5 % de celui des enseignants. Le projet de loi de finances soutient les enseignants et leur propose une nouvelle façon d'exercer leur métier en sollicitant des heures supplémentaires défiscalisées et exonérées de charges sociales. Ils pourront ainsi accroître leur pouvoir d'achat. Cette dynamique vertueuse leur permettra de s'investir dans des missions nouvelles et d'offrir de nouveaux services aux élèves qui doivent tous avoir les mêmes chances de réussite. L'encadrement sera renforcé.

Nous souscrivons pleinement à ces mesures et aux moyens nouveaux pour la scolarisation des handicapés : dix mille enfants seront concernés et vous voulez créer deux mille unités pédagogiques d'intégration d'ici 2010.

Je veux rendre hommage à l'enseignement agricole, qui contribue à donner à chacun sa chance. Je salue l'initiative de M. Censi qui a permis d'abonder les crédits à l'enseignement agricole privé, qu'on utilise chaque année comme variable d'ajustement. Pouvez-vous nous confirmer le déblocage de 4 millions en 2007 et nous assurer qu'il n'y aura pas de gels de crédits ? Où en est la négociation avec l'enseignement agricole ? Je me réjouis que les crédits pour les maisons familiales rurales soient en cohérence avec les engagements de l'Etat. Les moyens seront-ils bien disponibles ? Je veux enfin rendre hommage à Mme Férat pour son excellent rapport. (Applaudissements à droite et au centre)

Je vous remercie d'avoir tenu compte des amendements votés par le Sénat l'an dernier à l'initiative de M. Richert en revalorisant les bourses de 2 %, sans oublier les bourses d'adaptation ni les exonérations de frais de pension non plus que la prime à l'internat. La revalorisation des aides aux collèges sera assurée.

Le transfert des personnels TOS est une autre réussite à notre actif. D'autres réformes pourraient aboutir au même consensus. Suivant la recommandation de la mission d'information sur les dispositifs de formation professionnelle, le plan régional de développement des formations professionnelles pourrait devenir obligatoire, de sorte que les partenaires soient engagés par leur signature.

Lors de la grève du 20 novembre, vous avez rappelé que vous comptiez assurer un service minimum à l'Education nationale.

L'accueil des enfants les jours de grève est un sujet de préoccupation majeure pour les parents. Qu'entend faire le Gouvernement ? On ne peut se contenter de fonctionnements qui ont fait la preuve de leur échec.

« Ce que nous devons faire, c'est poser les principes de l'éducation du XXIe siècle, qui ne peuvent pas se satisfaire des principes d'hier, et pas davantage de ceux d'avant-hier ». Ce budget répond à l'exigence posée par le Président de la République dans sa lettre aux éducateurs. Parce qu'il est innovant et ambitieux pour l'éducation nationale, le groupe UMP le votera ! (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - L'objectif affiché de ce budget est de rénover l'école et d'assurer la réussite de tous les élèves. Pour l'atteindre, encore faudrait-il s'attaquer aux racines de l'échec scolaire, ce qui suppose de dresser un diagnostic avec les acteurs concernés. Ce budget marqué par la réduction de la dépense publique et de nouveaux transferts de charges aux collectivités territoriales et au privé, prépare le démantèlement du service public et laïc de l'éducation. En fait, vous voulez imposer « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde », selon la formule consacrée par la stratégie de Lisbonne. Tout un programme : celui du Medef !

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.  - Vous le croyez vraiment ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - À la vision utilitaire de l'éducation inspirée du rapport Jouyet-Lévy, qui veut tirer des « profits supplémentaires » de l'immatériel et privilégie « l'employabilité », nous opposons celle d'une école destinée à transmettre des savoirs. Bref, nous ne pouvons voter ce budget.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles.  - Quel dommage !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Au reste, un enseignant sur deux a fait savoir qu'il s'y opposait le 20 novembre dernier.

M. Jacques Valade, président de la commission.  - Non !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Monsieur le ministre, à vos yeux, les 11 200 suppressions de postes ne sont qu'une goutte d'eau, sur un total de 1 200 000 enseignants, au prétexte que l'on peut faire faire mieux en donnant moins. Les éducateurs se plaignent pourtant du manque d'encadrement, conséquence de la suppression des 35 000 postes depuis 2003. Dans ce budget, collèges et lycée paient un très lourd tribut avec une réduction de 6 700 emplois, et l'augmentation annoncée des effectifs dans le premier degré est toute relative puisque, si l'on tient compte de la baisse des places au concours, le solde est seulement de 310 emplois.

Cette politique de sous-recrutement s'est traduite à la rentrée 2007 par un appel aux listes complémentaires quatre fois plus important qu'en 2006. L'académie d'Amiens a même été contrainte de convoquer de nouveau le jury, la liste complémentaire étant épuisée.

M. Xavier Darcos, ministre.  - C'est exact...

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - La situation des personnels administratifs n'est guère meilleure, avec mille postes supprimés cette année qui s'ajoutent aux deux mille de ces cinq dernières années. En outre, la notion de plafond d'emplois et la fongibilité asymétrique jouent le rôle négatif de compresseur d'effectifs.

On observe la même logique pour les crédits pédagogiques. Après la scolarisation des enfants âgés de 2 ans, c'est au tour de l'école maternelle, pourtant si importante pour la socialisation et la réussite de l'enfant en élémentaire, d'être sur la sellette. L'absence d'indicateur de performance en dit long sur vos priorités !

Quant aux dépenses de formation, elles diminuent dans le premier et second degrés. Pour s'attaquer aux racines de l'échec scolaire, nous avons pourtant besoin de personnels dont les compétences professionnelles ont été remises à jour. Aux enseignants qui demandent à travailler mieux et autrement, en prenant en compte les acquis de la recherche pédagogique, le Gouvernement répond par l'institutionnalisation des heures supplémentaires !

Ce budget ne prépare pas l'avenir. Avec les nouvelles mesures que sont les quinze jours de stage de remise à niveau et les deux heures de soutien après la classe, vous externalisez une fois de plus le traitement de l'échec sans vous attaquer aux racines du mal. La situation appelait pourtant une réaction plus ferme : chaque année, près de cent cinquante mille jeunes quittent le système éducatif sans formation alors que les métiers, avec l'explosion des savoirs et la révolution de l'information, requièrent toujours plus de qualification.

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Très bien !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Pour nous, l'école de l'égalité, de la justice et de la réussite pour tous doit répondre à un triple enjeu. D'abord, la justice sociale. Mais au lieu de créer un observatoire des scolarités chargé d'analyser les causes de l'échec scolaire -ce que nous suggérions dans une proposition de loi en 2005-, vous proposez de supprimer la carte scolaire, alors que notre demande d'observatoire de la scolarité, transcrite dans une proposition de loi de notre groupe, demeure d'actualité. Ensuite, il faut assurer un haut niveau de formation initiale et continue et une culture scolaire commune. Vous cherchez, au contraire, à réduire les savoirs enseignés, comme en témoigne la suppression des deux heures d'enseignement le samedi et de l'heure de sport en primaire. Enfin, il faut allouer des moyens suffisants à l'école. Mais la baisse des dépenses et les transferts de charge accentueront les inégalités entre territoires, ainsi que la différence de traitement entre enseignement public et privé, née l'application de l'article 89 de la loi du 13 août 2004 dont nous demandons l'abrogation.

L'école a besoin d'une véritable réforme et d'un renforcement de ses moyens. Je formule le voeu que s'engage un vaste débat public sur l'école ! (Applaudissements sur les bancs CRC et sur les bancs socialistes)

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Très bien !

M. Georges Mouly.  - Monsieur le ministre, nous sommes tous d'accord pour aider ceux qui en ont le plus besoin sans renoncer à la réussite de tous les élèves, et j'adhère aux trois priorités que vous avez définies.

Cela dit, je voudrais revenir sur l'enseignement agricole, dont il a été beaucoup question. Quelle est la réalité sur le terrain ? La dotation globale diminue de 3 % et les établissements manquent d'objectifs clairs. L'enseignement agricole doit être réactif, ce que la décentralisation facilite avec une gestion de proximité. Mais il représente un véritable atout, j'en ai la preuve dans mon département. Alors que le budget est contraint, l'enjeu est de maintenir le niveau de formation et l'identité de cet enseignement, en étroite collaboration avec les professions agricoles. Dans mon département, les établissements agricoles se tournent vers la multifonctionnalité, le développement des territoires ruraux et les services à la personne, en liaison avec le pôle d'excellence rural, sans oublier l'accueil des élèves handicapés et en difficulté.

Tout cela en parfaite harmonie, mais la rentrée 2008 risque de mettre le feu aux poudres, avec la suppression de la classe de troisième dans ce lycée d'enseignement général et technologique agricole malgré la présence de 43 élèves, outre la suppression d'une classe de troisième dans un autre lycée. Plusieurs projets du conseil d'administration ne pourront se concrétiser. Le retour de 1 % de la dotation globale horaire comble pour l'essentiel le désengagement accru de l'université de Limoges envers la formation professionnelle, alors que celle-ci rend l'enseignement agricole supérieur du Limousin très attractif.

S'agissant de la scolarisation des élèves handicapés, les progrès sont réels, puisque 200 unités pédagogiques d'intégration (UPI) ont été créées, 2 000 autres étant prévues d'ici 2010. Aujourd'hui, 2 700 auxiliaires de vie scolaire interviennent auprès des élèves handicapés. Il est essentiel d'assurer la continuité des parcours de formation -indispensable à l'égalité des chances- notamment dans les lycées. Dans cette perspective, je regrette que l'enseignement agricole ne soit pas assez sollicité, en complément des établissements de l'éducation nationale, car un partenariat permettrait d'élargir la palette de formation proposée. Dans mon département, tous les partenaires ont organisé un dispositif innovant d'accompagnement des jeunes handicapés de seize à vingt ans pour favoriser leur intégration sociale et professionnelle. Mais il serait vain d'imaginer que l'on puisse faire l'économie de moyens d'accompagnement spécifiques à l'éducation nationale complétant les services spécialisés. C'est tout l'enjeu des postes d'assistants d'éducation et des emplois de vie scolaire. Il est temps de reconnaître le rôle primordial de ces véritables métiers, il importe aussi que les enseignants référents, chargé des projets personnalisés de scolarisation, soient suffisamment nombreux.

Le quatrième point de mon intervention portera sur l'incidence de l'organisation pédagogique pour les collectivités territoriales. Accompagnement éducatif, soutien scolaire et assouplissement de la carte scolaire sont légitimes, mais leurs conséquences pour l'accueil extrascolaire et les transports sont assumées par les collectivités territoriales. Comment articuler le temps hors de l'école avec le temps à l'école lorsque les annonces s'accompagnent de nombreuses modifications ? Une meilleure visibilité s'impose, ne serait-ce que pour l'organisation des transports.

L'orientation des jeunes vers l'apprentissage mérite que l'on s'y attarde. Les classes préparatoires à l'apprentissage sont prorogées jusqu'en juin 2008, alors qu'elles devaient être remplacées par le dispositif « apprentissage junior ». Je commencerai donc par un bilan de cette classe préparatoire dans mon département : 10 % des élèves rejoignent le lycée professionnel, quelques rares élèves retournent au collège et 90 % environ poursuivent dans la filière d'apprentissage. Le taux de rupture des contrats d'apprentissage n'atteint pas 5 %, contre 10 à 15 % dans le cas général. En outre, les élèves issus de la classe préparatoire, souvent difficiles ou turbulents lorsqu'ils étaient au collège, deviennent des apprentis modèles : les problèmes de comportement sont rares.

Sur ces bases, les responsables du centre de formation des apprentis ont élaboré un projet ambitieux, placé sous le double signe de l'innovation et de la flexibilité, destiné à transformer le CFA en établissement de référence sur le plan académique, apportant une plate-forme de projets de formation professionnelle.

Comme moi, vous êtes à l'écoute du terrain. Vous faisant entièrement confiance à la tête du ministère qui prépare l'avenir du pays, je voterai votre budget. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Marc Todeschini.  - Ne prenant en compte ni la justice sociale, ni les exigences d'efficacité et d'égalité, votre budget ne garantit ni la réussite scolaire, ni la cohésion sociale, ni la transmission d'un socle commun de connaissances, ni l'idéal républicain. Loin d'avoir pour ambition de donner à chacun la maîtrise de son destin, il empêche les élèves de se projeter dans l'avenir.

Avec 59 milliards d'euros, l'enseignement scolaire demeure le premier budget de la nation, mais ses crédits baissent de 1,2 % en euros constants. La réduction du programme « Vie de l'élève » est particulièrement alarmante. Alors que près de 40 000 emplois ont déjà disparu depuis 2003 à l'éducation nationale, 11 200 seront supprimés l'an prochain. C'est la moitié des suppressions dans toute la fonction publique ! L'extinction progressive du corps des maîtres d'internat et des surveillants d'externat, la réduction des agents de service, la pénurie d'assistantes sociales et de médecins scolaires rendent vain tout discours sur l'équipe pédagogique et la communauté éducative.

La médecine scolaire se trouve dans une situation désastreuse, alors que les apprentissages fondamentaux nécessitent la mobilisation de tous. Globalement, on prévoit quelque 10 000 élèves par médecin. Aucune création de postes d'assistante sociale ni de médecin scolaire n'est envisagée pour 2008. Ainsi, de nombreux établissements n'ont plus de médecin en titre. Or, certains enfants atteints de maladies chroniques comme le diabète, des allergies ou l'asthme, ont besoin de protocoles spécifiques afin d'éviter les drames que certains restaurants scolaires ont connus. Il est également indispensable de détecter au plus tôt les dyslexies et certains troubles organiques pour prévenir l'échec scolaire. Le bilan des 6 ans doit être réalisé partout afin d'évaluer les capacités langagières nécessaires aux apprentissages. Que dire enfin des enfants en danger au sein de la cellule familiale, de ceux ayant des conduites à risque ? Comme il n'y a toujours pas d'assistantes sociales dans le premier degré, le médecin scolaire est souvent sollicité pour des enfants dont la situation familiale est difficile. Renverrez-vous la médecine scolaire vers les praticiens de ville ou renforcerez-vous son efficacité au sein de la communauté éducative ?

J'en viens à l'enseignement privé et à la carte scolaire. Hélas ! Votre budget aggravera les conditions d'enseignement des enfants des catégories défavorisées, notamment avec des suppressions de postes plus nombreuses dans l'éducation nationale que dans l'enseignement privé financé par l'argent public. Vos priorités sont claires : il n'y a pas sur ce point de rupture avec vos prédécesseurs qui ont obligé les communes à financer la scolarisation dans l'école privée d'une autre commune. De même, la disparition de la carte scolaire favorisera une élite au détriment de la qualité pour tous, car l'absence de mixité sociale aggrave la ségrégation.

Je voudrais enfin évoquer la suppression de l'école le samedi matin. Vous présentez habilement cette mesure comme une redistribution des heures d'enseignement au profit des 15 % d'élèves en difficulté, mais cela ne trompe personne. Vous reconnaissez d'ailleurs que ce taux abstrait n'est pas constaté partout.

Au lieu de stigmatiser les enseignants, les élèves en difficulté et les parents des « orphelins de seize heures », au lieu de modifier les rythmes scolaires sans concertation après une campagne médiatique caricaturant les résultats de l'école républicaine, il serait préférable que les élèves en difficulté évoluent dans des classes à faibles effectifs avec une présence renforcée d'adultes compétents.

En outre, vous avez annoncé que les établissements resteraient ouverts le samedi matin. Qui en assumera la charge financière ? Les communes ? Les départements ? De nombreux élus locaux attendent votre réponse. (Applaudissements à gauche)

Mme Monique Papon. - À la veille de la dernière rentrée scolaire, le Haut conseil de l'éducation a présenté l'école primaire comme le maillon faible du système éducatif, avec quatre écoliers sur dix qui sortent de CM2 avec de graves lacunes en lecture, écriture et calcul.

Plus de six millions et demi d'enfants sont scolarisés dans nos écoles primaires. C'est dire l'ampleur de la tâche confiée à votre ministère pour instruire ces jeunes à une époque fondamentale de leur vie, car l'école primaire est souvent tenue pour responsable de l'échec des adolescents. La crise qu'elle traverse révèle combien elle est décisive pour la scolarité des élèves.

Il ne s'agit pas de fustiger les dérèglements du système ni d'en stigmatiser les acteurs, mais de mesurer l'efficacité des méthodes à l'aune des objectifs fixés. Pour en finir avec la logique d'échec, il convient d'identifier les dysfonctionnements et leurs causes.

Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir engagé une réflexion sans dogmatisme sur les problèmes de l'enseignement primaire, en vous fixant l'objectif ambitieux de ramener de 15 % à 5 % le nombre d'élèves en grande difficulté à l'entré en sixième d'ici à la fin de la législature. Pour l'atteindre, vous envisagez, en premier lieu, non pas une énième réforme des programmes, mais un recentrage, dans le respect des objectifs de la loi d'avril 2005. La maîtrise de la langue française, essentielle, est la raison d'être de l'enseignement primaire : nous ne pouvons plus, en cette matière, nous satisfaire de cultiver l'échec. Peut-être faudra-t-il laisser aux enseignants plus de liberté dans leurs méthodes pédagogiques.

Le socle commun de connaissances et de compétences doit devenir réalité à la rentrée 2008. Je m'interroge, puisque nous en sommes à sa définition, sur la formation des instituteurs. N'est-elle pas trop théorique ? Le savoir-faire en situation n'est-il pas un apprentissage aussi nécessaire que les autres ? Ne pourrait-on envisager de recenser et de retenir les bonnes pratiques et de valoriser les maîtres efficaces ? J'espère que la refonte des IUFM permettra de déceler de véritables vocations.

Vous entendez intervenir, en second lieu, en faveur des enfants en difficulté, grâce à un accompagnement pédagogique adapté, avec, pour corollaire, une simplification dans la description des programmes, pour en exclure tout jargon et aider les parents dans leur rôle éducatif, notamment pour les devoirs à la maison. Il n'y a pas de raison que seuls les enfants issus de milieux aisés puissent bénéficier d'un soutien scolaire.

M. Jean-Luc Mélenchon. - Très bien !

Mme Monique Papon. - Il s'agit d'un véritable contrat évolutif, en partenariat avec les enseignants. Je ne doute pas que les professeurs des écoles en comprendront l'intérêt.

Vous avez lancé, en novembre dernier, un plan d'équipement des écoles destiné à favoriser la maîtrise des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Pouvez-vous nous en dire plus, monsieur le ministre, sur les modalités de sa mise en oeuvre ?

La France vit une situation exceptionnelle : elle est un des rares pays de l'OCDE dont les effectifs du primaire s'accroîtront d'ici 2015. C'est une chance inouïe pour l'avenir. La réforme représente plus que jamais un enjeu essentiel : les parlementaires doivent y être pleinement associés. Je sais, monsieur le ministre, que nous pouvons compter sur votre volonté de donner au législateur le rôle éminent qui lui revient. (Applaudissements à droite, sur plusieurs bancs au centre et au banc des commissions)

M. Ivan Renar. - L'éducation nationale, pilier de la République, est déterminante pour assurer l'égalité des citoyens, mais elle est minée par le fléau de l'échec scolaire. L'efficacité de l'éducation artistique et culturelle dans la réussite des élèves n'est plus à démontrer. L'art apprend à apprendre et à relier les savoirs. Une pratique instrumentale régulière augmente les performances en mathématiques et en langues, le théâtre favorise la maîtrise du français et l'ouverture aux autres, et la fréquentation des artistes montre qu'il n'est pas de talent sans travail. Certes, les crédits consacrés à l'éducation artistique sont en augmentation, et je salue ce fait. Et comment ne pas souscrire aux propos du Président de la République estimant qu'un enseignement obligatoire d'histoire de l'art pourrait « constituer le support de cette éducation culturelle qui fait aujourd'hui si cruellement défaut à nos enfants » ? Je le prends au mot et souhaite que le plan d'action pour l'éducation artistique et culturelle que vous allez bientôt dévoiler, conjointement avec la ministre de la culture, en prenne acte.

Mais les enseignements artistiques sont trop longtemps restés en déshérence. L'art à l'école ne doit plus être optionnel ni reposer sur le volontarisme de quelques professeurs. L'éducation artistique et culturelle doit dorénavant relever d'une véritable politique nationale : c'est la condition pour n'en tenir personne à l'écart. Car, dans le combat pour la démocratisation culturelle, l'école joue un rôle déterminant. De la maternelle à l'université, elle est une pièce maîtresse dans le partage des savoirs, la libération de l'imaginaire, le développement de l'intelligence sensible et de la créativité dont chacun est porteur. Nous savons bien, qu'à diplôme égal, ce sont la culture générale et la capacité à symboliser le monde qui font la différence. La culture transmet un patrimoine qui ne se confond pas avec l'hérédité.

Dans un monde uniformisé par une culture marchande, de nouvelles exigences s'imposent : éducation à l'image, appropriation de l'art comme force de réflexion. L'éducation nationale se doit de former les jeunes, par l'histoire de l'art et l'initiation à l'art contemporain, à trier dans le flux d'information et d'images qui fait leur quotidien, à l'appréhender de façon critique, à comprendre le potentiel de manipulation que porte en elle toute représentation. Si les technologies sont aujourd'hui un passage obligé, la dimension humaine de leur appropriation doit primer sur la technique et la formation initiale et continue des enseignants en est le préalable incontournable

Alors que l'on déplore une désaffection pour les filières scientifiques, les crédits en faveur de la culture scientifique méritent d'être renforcés. Dans ce monde lézardé par les sectarismes, la lutte contre l'illettrisme scientifique est fondamentale. « Il n'y a pas de liberté pour l'ignorant » disait Condorcet.

M. Jean-Luc Mélenchon. - Très bien !

M. Ivan Renar. - Les sciences et les techniques sont aujourd'hui au coeur des grandes questions auxquelles sont confrontés nos concitoyens. Il n'est que de voir le rôle qu'elles jouent dans les grands débats de société -réchauffement climatique, avenir de l'énergie nucléaire, OGM, biotechnologies, nouvelles technologies de l'information et de la communication... Démocratiser l'accès à la culture scientifique, c'est conforter la démocratie, qui ne peut se soutenir, sauf à renoncer au progrès, à la raison, à l'avenir, que du partage du savoir entre citoyens éclairés. La France n'adhère-t-elle pas à l'objectif stratégique de Lisbonne visant à faire de l'Union Européenne l'économie de la connaissance la plus dynamique du monde d'ici 2010 ? Les moyens mis en oeuvre par votre Gouvernement sont loin, monsieur le ministre, d'être à la hauteur de cette ambition. Le groupe CRC ne peut approuver un budget qui ne relève pas ce défi incontournable du XXIe siècle. (Applaudissements à gauche)

Mme Nathalie Goulet. - Je limiterai mon propos à l'enseignement agricole, aux langues étrangères et à la question de l'intégration d'un enseignement religieux à l'école.

Le lycée agricole de Sées, monsieur le ministre, dispose d'un budget de fonctionnement de 6,6 millions et d'un budget d'investissement de 2,3 millions. Il gère 420 élèves et 275 personnes en formation continue. C'est un établissement remarquable. Mais remarquable aussi est le casse-tête que représente, pour son proviseur, la gestion de près de 200 contrats de travail : les contrats de droit privé de toutes natures y jouxtent des contrats de droit public sur et hors budget de l'établissement ; les contractuels d'enseignement régionaux gérés par la Draf y côtoient les titulaires de l'éducation nationale. Ne serait-il pas bon, monsieur le ministre, de songer, conformément à l'esprit de la Lolf, de mettre un terme à cette situation kafkaïenne ?

Nous sommes déjà en décembre, la convention de transfert des TOS n'est toujours pas régularisée entre votre ministère et le conseil régional de Basse-Normandie. Je sais que le règlement de la question est en cours, mais ne pénalisons pas plus longtemps un établissement qui a su réaliser une fusion exemplaire entre deux sites, celui d'Alençon et celui de Sées. Il serait bon que le proviseur ait une visibilité à deux ou trois ans, pour assurer la rentrée dans de bonnes conditions. Le temps n'est plus aux audits mais à l'action, et je vous invite à venir, avec M. Barnier, visiter ce lycée exemplaire, auquel M. Chirac avait rendu visite lors de l'épisode de la vache folle.

Dans les lycées agricoles, 20 % des enseignements seulement sont liés à l'agriculture. Les 80 % restants portent sur l'aide aux personnes en milieu rural, les nouvelles technologies, le développement durable... et le Grenelle de l'environnement a montré, s'il en était besoin, que les agriculteurs ne sont pas les ennemis de l'environnement. Je vous propose donc de changer la dénomination de ces établissement pour en faire des « lycées agricoles et de développement durable ». M. Borloo ne manque pas de moyens. Pourquoi vous priver de cette manne ?

J'en viens à l'enseignement des langues étrangères. Nos débats ont mis en relief les difficultés de notre pays à faire face à la mondialisation. Dans ce contexte, je voudrais vous dire mon attachement à l'enseignement des langues étrangères. Vous ne serez sans doute pas surpris si je mentionne, à titre d'exemple, le russe et l'arabe. Le ministère des Affaires étrangères consacre des sommes faramineuses à l'enseignement du français langue étrangère, dont l'usage, hélas, ne cesse de se réduire. Mais où est la réciprocité ? On nous présente le Louvre d'Abou Dhabi et l'antenne de la Sorbonne comme un pont entre les cultures : mais un pont ne doit-il pas permettre la traversée dans les deux sens ?

Or, le russe est appris par seulement 0,3 %, et l'arabe par seulement 0,1 % des élèves du second degré : comment sensibiliser davantage les jeunes et leurs parents à ces langues prétendument rares, pour ne pas rester en retard dans la formation linguistique ? Ma fille, élève de première au lycée Molière, y apprenait le russe jusqu'à ce que nous recevions, cette année, une lettre nous informant que cet enseignement était interrompu mais qu'il restait possible de le poursuivre avec le CNED : le russe est typiquement le genre de langue qui s'apprend par correspondance...

Compte tenu de nos relations avec des pays comme la Russie, le Golfe persique ou la Chine, dans un esprit de réciprocité, il faut « mettre le turbo » sur l'enseignement des langues, ou bien notre pays restera à la traîne de ceux où l'apprentissage des langues étrangères est davantage inscrit dans la culture ! Ne pratiquons pas la politique de l'autruche, car nous serons sinon balayés par les vents puissants du marché !

Je crois également que l'enseignement des religions à l'école serait utile à la cohésion nationale -je ne parle pas d'identité nationale, concept dont j'ai dit tout le mal que je pensais à M. Hortefeux... Après le 11 septembre, seule l'éducation peut battre en brèche la crainte de l'islam et l'ignorance : il faut rétablir un enseignement d'histoire des religions à l'école, comme l'ont décidé nos voisins allemands et comme cela se fait en Alsace et en Allemagne, où un manuel destiné aux classes élémentaires est en cours d'élaboration !

Je voulais parler également de l'école en milieu rural, un sujet qui mérite de longs développement : vu le temps qui m'est imparti, mieux vaut une minute de silence ! (Applaudissements sur quelques bancs socialistes)

M. David Assouline. - En campagne, M. Sarkozy avait annoncé que les enfants pourraient, lui Président de la République, faire leurs devoirs à l'école avec l'aide d'un adulte. Le Gouvernement nous a présenté depuis l'accompagnement éducatif hors temps scolaire. De quoi s'agit-il ? Les collégiens volontaires disposeront, après la classe et quatre jours par semaine, de deux heures consacrées, soit à l'aide aux devoirs, soit aux pratiques culturelles, artistiques et sportives. En somme, une seule réponse pour trois promesses électorales ! Les professeurs d'arts plastiques et d'éducation physique et sportive apprécieront, eux qui voient leurs horaires diminuer depuis 2002, leurs emplois être supprimés par centaines depuis la modification du décret du 25 mai 1950 relatif au service des maîtres d'EPS !

Le service est délégué à des associations, chargées d'animer les temps d'accompagnement éducatifs consacrés aux pratiques culturelles et sportives : n'est-ce pas dévaloriser l'engagement des enseignants ? Le Gouvernement a-t-il l'intention de sortir ces matières du temps scolaire, en les déléguant toujours plus à des organismes extérieurs ? Cette tendance est d'autant plus inquiétante, que le ministère de la culture subit des coupes sombres dans son budget : les actions favorisant l'accès à la culture voient leurs crédits reculer de 20 % !

D'un côté, le Gouvernement offre des milliards aux catégories les plus aisées, en baisses d'impôts qui ne serviront guère à l'économie du pays, de l'autre il restreint les actions d'éducation et de sensibilisation à la culture, pour économiser quelques millions !

Votre dispositif d'accompagnement éducatif est lacunaire dans sa mise en oeuvre même, faute d'une évaluation des besoins, et il est flou dans les objectifs. Vous commencez dès novembre dans les ZEP : les couvrirez-vous ? À poursuivre les trois objectifs que sont l'aide aux devoirs, l'éducation artistique et l'EPS, ne craignez-vous pas de n'en atteindre aucun ?

En 2005, M. Fillon avait annoncé 1 500 emplois d'assistants pédagogiques, voici que l'annonce passe à 6 000, dont 5 000 pour la rentrée 2008-2009. Une mesure en recouvre une autre, sans cohérence. À votre décharge, monsieur le ministre, la contrainte budgétaire est extrême : votre budget recule de 1,2 % par rapport au projet de loi de finances initiale pour 2007, alors que le nombre d'élèves augmente en premier cycle.

L'action « Pilotage et mise en oeuvre des politiques éducatives et de recherche », à 411 millions, n'atteint pas son niveau de 2006 : comment financerez-vous les interventions des associations dans le cadre de l'accompagnement éducatif ?

Les enseignants qui voient leurs collègues partir en retraite sans remplacement, seront mis à contribution, chacun étant sommé d'accepter la théologie présidentielle du « travailler plus pour gagner plus ». Les heures supplémentaires seront-elles payées 25 % de plus, comme vient de l'annoncer le chef de l'État pour les salariés ? Seront-elles volontaires ?

La lecture du bleu ne rassure guère : les 63 000 heures supplémentaires compenseraient le non-renouvellement de 3 500 postes d'enseignants du second degré, il ne resterait plus qu'à transformer les 6 000 postes annoncés d'assistants pédagogiques en 3 260 emplois qui existent déjà sous la forme de maîtres d'internat et de surveillants. De 2002 à 2006, les effectifs enseignants sont passés de 117 535 à 88 292, tandis qu'on demande à 57 000 assistants d'éducation de faire le travail de 51 000 maîtres d'internat et surveillants et de 56 000 aides-éducateurs.

Autrement dit, on voudrait nous faire croire que quelques milliers d'enseignants en heures supplémentaires et quelques centaines d'assistants d'éducation en contrats précaires suffiront au soutien scolaire qu'attendent des centaines de milliers de parents pour leurs enfants. Encore un mirage de la geste présidentielle, plutôt qu'une action publique résolue en faveur de la réussite éducative pour tous ! (Applaudissements à gauche)

M. Jacques Legendre. - Ce débat coïncide avec l'actualité, puisque nous avons appris hier que la France perdait des places dans le classement international de la réussite scolaire !

M. Jean-Marc Todeschini. - Caricature !

M. Jean-Luc Mélenchon. - Qui paie les enquêteurs ?

M. Jacques Legendre. - Nous consacrons toujours plus de moyens à l'éducation mais nos résultats baissent, nous devons, sans passions ni procès d'intention, examiner pourquoi. Nous vous savons gré, monsieur le ministre, de préférer les réponses concrètes aux débats passionnels.

Les enfants doivent maîtriser la langue française, sinon comment pourraient-ils réussir dans leurs études et dans la vie ?

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Le Président de la République ne brille pas dans ce domaine !

M. Jacques Legendre.  - Votre prédécesseur, monsieur le ministre, s'était interrogé sur la pertinence de la méthode globale : quel déchaînement de passions ! Mais peu importe la méthode, seul le résultat compte. La maîtrise du français est-elle toujours une priorité ?

M. Fillon avait fait des programmes de français le premier pilier du socle commun. Or les nouveaux programmes de l'école élémentaire sont bien éloignés de la lettre et de l'esprit de la loi d'avril 2005 et du décret et ne tiennent pas compte du rapport d'Alain Bantolila. Ces programmes ne pourraient-ils être un peu plus consistants et un peu plus exigeants ? Et quid de la culture littéraire, à laquelle vous êtes, je le sais, attaché ?

J'ai élaboré deux rapports sur l'apprentissage des langues étrangères : la commission les a l'un et l'autre approuvés à l'unanimité. La connaissance de l'anglais semble inéluctable. Mais pourquoi limiter le choix de la deuxième langue à l'espagnol ? Est-il acceptable que l'enseignement des autres langues périclite ? Il faut proposer l'allemand, langue de notre premier partenaire économique et politique, le russe, langue d'un grand pays et d'une grande culture, l'arabe, et pas seulement pour les jeunes d'origine maghrébine -quoique valoriser cette langue dans l'enseignement pourrait donner un avantage comparatif à des jeunes qui n'en ont guère... Ce serait une façon aussi de montrer que l'école de la République est le lieu de tous les apprentissages. Je rappelle que le Sénat avait voté l'intégration de cet enseignement dans le socle commun.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Jacques Legendre.  - Et le japonais, et le mandarin... Armons les jeunes pour affronter la mondialisation ! N'invoquons pas l'absence de demande, proposons, incitons !

Notre rapport sur les classes préparatoires a dénoncé le resserrement des classes sociales desquelles sont issus les élèves qui formeront l'élite de demain. Cela me semble très grave. Reprendrez-vous, monsieur le ministre, certaines de nos préconisations, comme les internats ? Elles ont été adoptées à l'unanimité par notre commission.

Je voterai ce projet de budget. ((Applaudissements au centre et à droite)

M Jean-Luc Mélenchon.  - Méfions-nous de la jubilation morbide à laquelle nous aimons céder en France, cessons un peu de dénigrer les performances de notre patrie !

M. Jacques Valade, président de la commission.  - Très bien !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - On peut égrener la longue litanie de nos échecs, mais la France est la sixième puissance économique du monde : où avons-nous trouvé les moyens de l'être ? D'autant que nous n'avons pas de richesses naturelles, sinon nos ressources humaines et intellectuelles.

N'avalons pas tout ce que les journaux proclament, ni toutes ces pseudo-études. Le Boston College, bien connu de tous... (sourires) décrit les défaillances de la France, alors que les États-Unis produisent deux fois moins de diplômés par cent mille habitants. Et comment un peuple ignorant, qui ne sait ni lire ni écrire, pourrait-il se hisser au rang que nous occupons ?

Je me rappelle de cette enquête de l'OCDE qui mentionnait, parmi les défauts qu'elle prêtait à notre système, l'incapacité des jeunes Français à exercer leur esprit critique face à un ordre reçu. Ces enquêteurs n'ont jamais rencontré un jeune Français ! (Rires)

Mme Nathalie Goulet.  - Ni un vieux !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Au lieu de prétendre à tout bout de champ que nous régressons, partons de nos succès, mettons plutôt notre énergie à nous demander comment aller plus loin. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Le niveau de qualification des jeunes Français s'est déjà considérablement élevé, le nombre de bacheliers a doublé en dix ans -il avait auparavant doublé... en quatre-vingt ans.

Dans l'enseignement professionnel, regardons nos forces. Lorsque nous avons eu pour objectif de doubler le nombre d'ingénieurs, nous y sommes parvenus ; nous avons quadruplé le nombre de titulaires de DESS et le nombre de licenciés. Ce ne sont pas là petits résultats ! Ceux qui nous critiquent sont positionnés sur un marché international, n'oublions pas qu'ils cherchent à attirer des étudiants qui paieront, quand nos institutions républicaines sont gratuites. La France est le pays qui compte en proportion de ses chercheurs le plus grand nombre d'étrangers : 25 % au CNRS, ce n'est pas rien !

La France, nous répète-t-on, doit devenir plus productive, elle est à la traîne, derrière l'Angleterre par exemple : mais le PIB de l'Angleterre est composé en partie d'éléments purement scripturaux, boursiers notamment !

Quoi qu'il en soit, puisque le Président de la République veut qu'il reste des usines en France, il nous faut former non seulement des ingénieurs et des cadres, mais aussi avoir une base productive hautement qualifiée, préparée aux métiers modernes. Or, dans l'enseignement professionnel, le compte n'y est pas ! Monsieur le Ministre de l'éducation nationale, vous êtes issus de la maison, vous en connaissez la grandeur, mais aussi les préjugés de caste qui sont si défavorables à l'enseignement professionnel. Pourtant, la moitié des jeunes Français suivent une filière technologique, professionnelle ou d'apprentissage. Et ils forment ensuite la masse vitale, la base de notre capacité productive.

Les travailleurs français sont ceux qui se sont le mieux adaptés au renouvellement des machines, et à des cycles de vie des machines de plus en plus courts avec l'informatique. Mieux que les Allemands ! Pourquoi sont-ils capables d'apprendre par eux-mêmes de nouveaux modes de fonctionnement, de nouvelles technologies ? Parce qu'ils ont reçu une formation initiale qui leur a donné cette faculté d'auto-adaptation.

Alors gardons-nous d'aller à la dernière mode, la dernière trouvaille d'une officine internationale, soyons plus sérieux sur ce sujet, car la France, ici, joue sa peau !

S'agissant de l'enseignement, il y a ceux qui n'y connaissent rien. Passons. Et il y a les têtes d'oeuf qui ont trouvé comment faire des économies : réduire, réduire, réduire encore les budgets et abandonner l'enseignement professionnel qui sera tout aussi bien pris en charge par le secteur privé. Faux !, car si l'apprentissage de certains métiers peut se faire par le geste, par l'observation du tour de main, dans beaucoup d'autres cas, aujourd'hui, un niveau élevé de connaissances techniques est indispensable. Nous avons besoin de titulaires de CAP, mais aussi et surtout de bac pro ! Monsieur le ministre, vous publiez des communiqués touchants pour expliquer que votre souci, en modifiant le cursus du baccalauréat professionnel, est d'améliorer l'accès à cette filière. Il n'en est rien ! Du reste, l'objectif de 80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat a commencé à être remis en cause lorsque nous sommes parvenus à peu près à ce pourcentage, s'agissant du baccalauréat général, mais dans la filière professionnelle le pourcentage n'est encore que de 60 % environ. Il y va pourtant de la promotion des jeunes des milieux populaires ! Pourquoi le cursus, dans cette filière, est-il plus long ? Parce qu'il y a les remises à niveau, parce que les jeunes doivent travailler, parce que nombre d'élèves sont déjà pères ou mères...

Regardez les statistiques ! Leur moyenne d'âge est plus élevée et il faut qu'ils mangent. Il faut donc leur donner les moyens matériels de poursuivre leurs études, pas de raccourcir le bac pro.

Monsieur le Ministre, vous avez été mal conseillé par les grands trouveurs de Bercy et par les grands penseurs de l'UIMM. Méfiez-vous des permanents des syndicats patronaux, qui n'ont pas travaillé depuis vingt ans et ont eu le temps de tout oublier des conditions concrètes de la vie en usine ! La trouvaille du bac pro en trois ans vient de gens qui sont les partisans acharnés d'un partage entre l'Éducation nationale, qui assurerait la formation générale, et l'entreprise qui se chargerait de la certification de compétence, cette idée anglo-saxonne. Le certificat de compétence, c'est le piquet qui tient à la gorge le travailleur : une qualification se négocie en convention collective ; un certificat de compétence à la durée du produit que vous savez fabriquer : cinq ans pour une pièce de voiture, sept ans pour une automobile !

Voilà pourquoi la question scolaire est toujours une question sociale.

Vouloir faire passer le bac professionnel en trois ans est une erreur. Quatre ans c'est déjà trop peu pour 20 % des élèves, qui ont besoin d'une cinquième année.

Je plaide pour le devenir de la jeunesse ouvrière de notre pays. Je plaide pour les travailleurs. Je plaide pour que notre pays soit une grande puissance industrielle ! (Applaudissements à gauche)

Mme Colette Mélot.  - La mission « Enseignement scolaire » est une des missions les plus importantes de l'État ; elle bénéficie d'un budget de 59,26 milliards pour scolariser plus de douze millions d'élèves. Depuis plusieurs décennies, le budget de l'Éducation nationale n'a cessé de croître ; il augmente plus rapidement que la richesse nationale. Mais cette importante évolution des moyens de l'école n'a pas toujours produit les effets escomptés pour assurer l'égalité des chances.

Ni l'origine sociale, ni l'appartenance à une minorité ne doivent déterminer la réussite scolaire des élèves. La réalité est tout autre : la proportion d'enfants d'ouvriers ou de jeunes issus des quartiers sensibles accédant aux grandes écoles reste faible.

Ce budget montre que l'on peut faire beaucoup mieux pour les élèves en difficulté, tout en réduisant le nombre d'enseignants, sans que les conditions de vie et de travail des enseignants et des élèves s'en trouvent affectées. Conformément à votre souci de résultats et de lutte contre l'échec scolaire, l'école va faire beaucoup plus pour les élèves en difficulté. La suppression des cours du samedi matin permettra de proposer une aide personnalisée aux élèves qui connaissent des difficultés. L'accompagnement éducatif, mis en place dans les collèges de l'éducation prioritaire, sera généralisé à l'ensemble des collèges et permettra aux élèves qui le souhaitent de bénéficier d'une aide pour leurs devoirs ou bien de pratiquer une activité culturelle, artistique ou sportive, quatre jours par semaine, pendant deux heures après les cours.

Les enseignants volontaires qui encadreront l'aide aux devoirs seront rémunérés en heures supplémentaires défiscalisées, conformément à la loi Tepa. Cette orientation traduit la volonté du Président de la République d'avoir des fonctionnaires mieux considérés et mieux payés : dans l'école de demain, les enseignants gagneront plus s'ils s'investissent davantage. Ces heures supplémentaires permettront de mieux suivre les élèves, de mieux les aider et de mieux les accompagner dans leur parcours scolaire.

Vous avez clairement exprimé, monsieur le ministre, votre volonté de recentrer le premier degré sur l'apprentissage et la maîtrise du français, laquelle conditionne tous les enseignements ultérieurs. L'apprentissage des langues étrangères, me paraît aujourd'hui fondamental ; la mondialisation des échanges et l'Europe à Vingt-sept en font une nécessité.

Une initiation à l'anglais est déjà dispensée à l'école primaire, c'est un premier pas ; une sensibilisation au multilinguisme dès l'école primaire en ayant recours aux nouvelles technologies mériterait réflexion.

Mme Nathalie Goulet.  - Action !

Mme Colette Mélot.  - Ne pourrait-on envisager qu'un collégien puisse être initié à deux langues étrangères dès l'entrée en classe de cinquième ? Mon expérience de professeur d'anglais, en collège prioritaire pendant dix ans, m'a conduite à penser que, faute d'un bain linguistique, une imprégnation quotidienne serait nécessaire pour progresser. Cette méthode est utilisée dans des pays voisins.

L'égalité des chances suppose une meilleure information des élèves sur leur orientation. Il faut en effet rompre avec une certaine méconnaissance du monde du travail et exposer clairement les débouchés qu'offre la voie professionnelle. Son déficit d'image est tel que l'on n'oriente vers elle qu'après un échec et par défaut. Je souscris entièrement à la création du parcours de découverte des métiers et des formations pour tous les collégiens.

Tous les parents doivent pouvoir inscrire leur enfant dans l'établissement de leur choix en fonction de ses ambitions et qualités. La priorité a été donnée aux élèves boursiers et handicapés dès juin 2007. Les premiers résultats de l'assouplissement de la carte scolaire sont encourageants et cette mesure n'a pas conduit à de fortes baisses d'effectifs dans les collèges ambition réussite.

Il convient, enfin, d'encourager le soutien individuel apporté aux élèves handicapés. Je me réjouis du recrutement de 2 700 AVS supplémentaires afin d'assurer à ces élèves les conditions d'accueil et d'apprentissage qui leur permettront de s'épanouir dans le cadre scolaire.

Le groupe UMP apportera tout son soutien à ce budget qui traduit fidèlement les engagements pris par le Président de la République. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Paul Virapoullé.  - L'Éducation nationale, dans les départements d'outre-mer, a réussi à faire avancer le progrès social et économique. En soixante-et-un ans, grâce au dévouement des enseignants et à l'action de l'État, le nombre d'illettrés a décru et davantage de jeunes accèdent à la dignité par le travail.

Dans les classes primaires, nous avons les mêmes difficultés qu'en métropole, accrues par le passage du créole au français, par la proximité du passé colonial et par la pauvreté des départements. Les banlieues aussi connaissent cela, avec en outre la coexistence de deux cents nationalités. Cette réalité me convainc que le moule unique doit être enterré : en voulant imposer la même chose à tout le monde, on laisse de côté 30 % des enfants. Le collège de la réussite est en train de porter ses fruits ; n'est-il pas possible d'expérimenter le collège de la vocation avec la coexistence de plusieurs sections ? Ainsi le jeune pourrait-il, dès la classe de quatrième, avoir un entretien susceptible de l'orienter vers un cursus différent du général. L'enseignement professionnel a mauvaise presse parce qu'on y va sur un échec si c'est voulu par le professeur principal, les parents et le jeune ; ce n'est plus un échec si c'est voulu ! La réforme Haby n'est plus adaptée aux réalités socio-économiques de notre temps : il faut passer du collège unique au collège diversifié.

Il faudrait aussi enseigner l'orientation dans les lycées et collèges. Les enfants vont à l'école et ne savent pas à quoi cela sert. « Faire un effort, à quoi bon ? Mes parents sont chômeurs, je serai au RMI... » À Saint-André, nous enseignons l'orientation et ça marche du feu de Dieu ; les enfants savent maintenant à quoi sert l'école. La motivation est le vecteur de la réussite scolaire.

Dès lors, les enfants qui y allaient en traînant les pieds, iront à l'école avec joie.

Voilà mes trois suggestions. Consacrer un effort plus important au primaire pour y limiter la casse ; un tiers d'échec, c'est inacceptable et c'est une perte sèche pour le pays. Autoriser l'expérimentation d'un collège à trois sections : enseignement général, apprentissage et enseignement professionnel. Autoriser les chefs d'établissements qui le souhaitent à enseigner l'orientation dès la sixième pour motiver les enfants et leur donner l'envie d'avoir leur place dans la société. (« Très bien ! » et applaudissements à droite et au centre).

M. André Lardeux.  - Ce budget ne pose guère de problèmes, vous disposez largement des moyens nécessaires ; ce sont les mauvaises performances de notre enseignement qui me préoccupent. Nos médiocres résultats en lecture, sciences, mathématiques confirment que l'Éducation nationale est une machine au rendement décroissant : les moyens augmentent tandis que les résultats régressent.

Face à cette difficulté, vous adoptez une démarche pragmatique et évitez les débats idéologiques sur la pédagogie ; et c'est très bien ainsi parce que l'Éducation nationale a une obligation de résultats.

Où en est la réforme des IUFM ? Les nouveaux enseignants échapperont-ils aux fumeuses injonctions pédagogiques qu'on a imposées par le passé ?

La semaine de quatre jours peut poser des problèmes aux familles les plus modestes. Il faut aussi évaluer son coût pour les départements et les communes avec les transports scolaires à maintenir sur six jours pour les lycées. Cette modification impose aussi de redéfinir les missions des enseignants, leurs services, leurs affectations, leurs rémunérations.

Il faudrait pousser plus loin la réforme de la carte scolaire et revoir le saupoudrage des moyens dans les ZEP que leur trop large extension empêche d'être efficaces.

L'enseignement privé est pénalisé par le maintien d'un parallélisme inadapté avec son homologue public. Pourquoi lui supprimer des postes alors que le nombre de ses élèves augmente ? Qu'est-ce qu'une liberté dont les moyens ne sont pas assurés ? Les résultats du privé sont supérieurs à ceux du public, alors que ses moyens sont inférieurs. Le maintien de ce monument de ringardise qu'est la loi Falloux est incompatible avec la Convention européenne des droits de l'homme. Là aussi la rupture est nécessaire.

Nonobstant ces quelques remarques, je voterai, bien entendu, ce budget. (Applaudissements à droite et au centre).

M. Alain Vasselle.  - Je concentrerai mon propos sur trois points afin de savoir jusqu'où le ministre est prêt à aller.

Je suis l'élu d'un canton rural qui a expérimenté depuis quinze ans déjà l'enseignement précoce des langues vivantes étrangères. Certes l'Éducation nationale l'a aujourd'hui généralisé à partir du CE2 et en prend en charge trois quarts d'heure par semaine, mais il faut aller plus loin et poursuivre l'expérimentation dès la maternelle comme l'a décidé, dans le département de l'Oise, le comité que je préside et qui suit cette expérimentation. Il est vrai que les départements frontaliers ont davantage de chance que nous de réussir. Nous avons néanmoins mis en place pour sept ans l'enseignement de l'allemand et de l'anglais. Pour ce faire, nous avons obtenu la signature d'une convention tripartite -Conseil général, Sivom de dix-sept communes, Éducation nationale. Il est indispensable que le ministère nous maintienne les moyens de mener cette expérience à son terme, c'est-à-dire jusqu'en 2008 pour l'allemand et jusqu'en 2009 pour l'anglais. Ne peut-on envisager que cette expérimentation, dont les résultats sont très encourageants, fasse l'objet d'une évaluation en vue d'une généralisation dans le département, voire sur l'ensemble du territoire national ? Ne pourrait-on pas aussi imaginer dans les écoles primaires des classes bilingues ou des classes européennes, comme cela existe au collège ? Ou est-ce encore trop tôt ? Pourtant, il en va de l'avenir de nos jeunes et les expériences étrangères montrent que c'est possible.

L'accompagnement éducatif après la classe semble connaître un vif succès car cette possibilité offerte aux collégiens de bénéficier d'activités encadrées entre 16 et 18 heures répond au souci des familles de respecter la vie professionnelle des parents tout en favorisant l'égalité des chances. Sa généralisation prévue dès la rentrée 2008 impose de consulter les collectivités locales : elles doivent être éclairées sur leur rôle dans cette réforme qui aura pour elles un coût, notamment de transport scolaire en milieu rural.

La scolarisation des enfants handicapés est une priorité pour le Président de la République. Votre Gouvernement est mobilisé et les mesures prises sont à la hauteur des engagements. Mais le cas particulier des autistes a été oublié. Pour accueillir les enfants handicapés, les enseignants bénéficient de l'aide d'auxiliaires de vie scolaire (AVS). Mais ceux-ci ne sont pas suffisamment formés pour suivre les enfants autistes, si bien que de nombreux parents sont contraints de confier l'accompagnement de leurs enfants à des Accompagnantes psycho-éducatives (APE) spécifiquement formées par des associations spécialisées. Or, si l'Éducation nationale accepte aujourd'hui le principe de l'accompagnement scolaire par ces APE, leur financement demeure à la charge exclusive des parents. Il y a là une iniquité entre parents d'handicapés. Le Gouvernement envisage-t-il de faire former les AVS à l'autisme et, en attendant, de faire participer l'Éducation nationale au financement de l'accompagnement par les AVE ? Je vous remercie des réponses que vous apporterez à mes questions. (Applaudissements à droite et au centre).

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.  - Je remercie M. Longuet et les rapporteurs pour avis.

L'enseignement agricole accueille 175 000 élèves, dont 60 % d'internes, dans 847 établissements publics et privés ; il représente 25 % du budget du ministère de l'agriculture et de la pêche et la moitié de nos 36 600 agents, auxquels je rends hommage.

Notre modèle éducatif est un modèle de la réussite. Il est au coeur de notre projet pour le monde agricole parce qu'il contribue à construire une nouvelle agriculture et à la vitalité de nos territoires ; il est en première ligne pour la nouvelle politique alimentaire et agricole de l'Europe.

Nous allons travailler dès début 2008 au cinquième schéma prévisionnel 2009-2014 pour l'enseignement agricole, qui donnera des perspectives aux établissements agricoles. Corrigé du transfert des TOS, le budget est en hausse de 1,3 %. La maîtrise des effectifs se poursuit dans le respect des trois familles qui composent l'enseignement agricole : enseignement public, enseignement privé et maisons familiales.

Nous poursuivons l'accueil des handicapés et l'ouverture sociale : 45 % des élèves sont issus de milieux modestes et 57 000 élèves reçoivent le soutien financier de l'État. Je veille, monsieur Carle, à ce que les moyens financiers soient équitablement répartis. Nous allons négocier avec le Conseil national de l'enseignement agricole pour revaloriser la subvention. Les moyens des maisons familiales augmentent de 3 %. Je me suis engagé à l'Assemblée nationale à réduire de 4 millions les reports de charges en 2007.

Mme Goulet a souligné la diversité des contrats gérés par les chefs d'établissement. J'ai demandé un état des lieux et l'on me fera des propositions.

Mon ministère entretient une coopération étroite avec l'éducation nationale, je travaille avec M. Darcos et les directeurs régionaux rencontreront bientôt les recteurs. L'enseignement agricole participe à la révision des politiques publiques et n'ignore pas la commission sur l'évolution du métier d'enseignant. Je serai très vigilant au maintien de la diversité des implantations de ses trois familles. (Vifs applaudissements à droite, au centre et sur quelques bancs socialistes)

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.  - Un débat s'est amorcé en première partie sur les conditions d'inscription dans l'enseignement privé d'une commune à l'autre. Depuis un certain article 23, lorsqu'une famille souhaite inscrire son enfant à l'école publique d'une autre commune, la commune de résidence peut faire la preuve qu'elle dispose des installations nécessaires à son accueil et s'opposer à la dérogation comme au paiement de la contribution appelée par la commune de scolarisation. Depuis certain amendement...

M. Alain Vasselle. - Charasse ! (Mouvements divers sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - ...les choses apparaissent dissymétriques pour le privé : la commune de résidence ne semble pas pouvoir faire la preuve qu'elle possède les équipements scolaires et périscolaires. Le ministre connaît la question, qu'on nous pose souvent. Les conditions d'application de cette mesure, enfin, ne semblent pas toujours égales. (Applaudissements à droite, au centre et sur certains bancs socialistes)

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - J'ai ce matin répondu à un rappel au règlement de Mme Gonthier-Maurin que la question ferait l'objet d'un débat de deuxième partie. Faut-il l'ouvrir à cette heure ?

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - En deuxième partie, il n'y aura que le ministre du budget.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Soit... mais je souhaite une réponse lapidaire.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale.  - Je remercie les rapporteurs de leur travail et tous les orateurs de la richesse de leurs interventions. J'ai entendu la question de M. Marini : l'Assemblée nationale a examiné la semaine dernière une proposition de loi qui revenait sur l'article 89 ; elle a été rejetée. Il ne m'appartient pas de revenir sur ce sujet.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Mais votre avis ?

M. Xavier Darcos, ministre. - Si une proposition de loi est déposée au Sénat, nous l'examinerons ; pour l'instant, nous sommes dans le cadre du budget.

Plusieurs d'entre vous ont appelé au pragmatisme et au concret. Je m'y efforcerai en évitant la rhétorique. Ce projet s'inscrit dans la maîtrise des dépenses publiques. Les derniers scrutins ont demandé au Président de la République, à son Gouvernement et à sa majorité, de contenir les effectifs. L'éducation nationale, qui est le premier employeur de l'État, s'est engagée dans cette démarche et prend sa part à raison de sa place dans la fonction publique. Loin de nous priver d'ambition, ce choix raisonnable et résolu nous contraint à améliorer les conditions de travail et de vie des enseignants et des élèves. Les non-remplacements n'obèrent pas les caractéristiques du système éducatif. L'informatisation et la dématérialisation permettent des gains importants en postes administratifs : la réorganisation permettra de ne pas en renouveler mille. La gestion administrative comporte des marges de modernisation, en particulier dans le système des remplacements ou dans certaines disciplines (que je ne veux pas stigmatiser) qui attirent peu - ou pas- d'élèves. On pourra économiser de la sorte 2 000 emplois, dont 340 dans le privé. La démographie scolaire a reculé de 3,3 % en quinze ans alors que le nombre des enseignants augmentait de 4,7 %. Cette décrue de poursuit dans le secondaire alors que nous devons ouvrir 840 postes d'enseignants dans le premier degré.

Les professeurs doivent exercer leur métier de manière différente. Ils augmenteront leur pouvoir d'achat grâce aux heures supplémentaires défiscalisées et exonérées de charges, qui nous permettront d'économiser 4 200 postes.

Les recrutements 2008 seront à la hauteur des besoins. Si nous limitons le nombre des stagiaires, nous recrutons 18 000 personnes. M. Bodin nous dit que ce n'est pas assez mais le calibrage des concours témoigne du contraire. De surcroît, Comme l'a bien dit M. Carle, ce qu'il faut, ce ne sont pas des moyens mais des résultats : 11 000 emplois représentent 0,8 % des effectifs. D'ailleurs, le mouvement de décentralisation des personnels techniques allège notre charge en emplois.

Nous ne renonçons pas à nos ambitions pour l'école. Les comparaisons internationales, que plusieurs d'entre vous ont évoquées, nous invitent à repenser notre système éducatif, lequel, avec une durée de scolarité et un temps passé à l'école chaque année très supérieurs, n'est pas plus efficace que les autres. MM. Todeschini et Mélenchon ont contesté le bien-fondé de ces comparaisons : objets d'une véritable campagne médiatique, elles seraient inspirées de la logique anglo-saxonne. Pour ma part, je me refuse au catastrophisme comme au déni. Ces statistiques, calculées selon les mêmes critères chaque année, soulignent la perte de compétitivité de notre système éducatif. On ne peut les ignorer ! (On approuve sur les bancs de la commission) D'autant que les évaluations réalisées par nos services vont dans le même sens. Ainsi, en matière d'apprentissage et de maîtrise du langage chez les enfants de dix ans, la France se situe en dessous de la moyenne européenne, soit à la sixième place, alors que la Finlande où les enfants sont scolarisés à l'âge de sept ans est première du classement !

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles.  - Juste !

M. Jean-Luc Mélenchon. - Peut-être, mais combien de femmes travaillent dans ce pays ?

M. Xavier Darcos, ministre.  - La structure sociale est effectivement différente et comparaison n'est pas raison... Mais tout de même, ne cassons pas le thermomètre au motif que la température monte ! (On approuve à droite)

Le suivi et l'encadrement personnalisé de l'élève, sur lequel beaucoup ont insisté, est une priorité de ce budget. Nous voulons aider ceux qui en ont le plus besoin et assurer la réussite de chacun. L'assouplissement de la carte scolaire, qui répondait à une demande des familles, participe de cet objectif. Ainsi, les jeunes filles issues de l'immigration auront la liberté de quitter leur milieu familial, social et religieux pour choisir un meilleur établissement. Cette réforme a été un succès : 13 500 demandes supplémentaires ont été déposées, dont 77 % ont été satisfaites. Elle a d'abord bénéficié aux élèves boursiers : dans l'académie de Paris, 82 % d'entre eux ont obtenu une dérogation.

M. David Assouline. - Et les autres ?

M. Xavier Darcos, ministre.  - Autre fait notable, nous avons conservé aux établissements qui perdent leurs élèves leurs moyens. Ainsi, les élèves, mieux encadrés, pourront renouer avec la réussite scolaire et rendre à leur établissement son attractivité perdue. Bien entendu, nous dresserons un bilan de cette expérience.

Concernant la scolarisation des enfants handicapés, chacun a reconnu l'effort consenti : 10 000 élèves supplémentaires ont bénéficié d'un soutien individuel à cette rentrée ; 2 700 auxiliaires de vie scolaire supplémentaires ont été recrutés cet été. Monsieur Vasselle, concernant la prise en charge de handicaps spécifiques comme l'autisme, discutons-en lors d'une prochaine rencontre au sein de la commission compétente.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles.  - Très volontiers !

M. Xavier Darcos, ministre.  - Par ailleurs, le mouvement de création d'unités pédagogiques d'intégrations se poursuit avec 200 entités nouvelles cette année. En bref, l'accueil des enfants handicapés à l'école s'améliore. Je n'oublie pas la question essentielle de la reconnaissance des AVS, notamment à travers la validation des acquis de l'expérience. Peut-être sera-t-il nécessaire d'instituer une filière spécialisée dans l'accompagnement des élèves jusqu'aux personnes dépendantes. Nous y travaillons avec M. Xavier Bertrand, ministre du travail, en nous appuyant, entre autres, sur les travaux du sénateur Paul Blanc.

Quelques mots sur l'accompagnement éducatif. Animé par la volonté de donner plus à ceux qui ont moins, nous avons mis en place ce dispositif dans les collèges d'éducation prioritaire. J'ai entendu les critiques de MM. Assouline et Renar et les observations de M. Lardeux. Certes, il s'agit de régler le problème des orphelins de seize heures en leur offrant des activités sportives et culturelles. Mais, l'essentiel est que cela fonctionne ! Pour preuve, 267 établissements, situés dans des zones non prioritaires, ont demandé à participer au dispositif de manière volontaire. Monsieur Assouline, rassurez-vous, les associations n'y perdront pas puisque 35 des 140 millions inscrits dans ce budget pour financer ce dispositif leur sont destinés et les 6 000 assistants pédagogiques ne proviennent pas du recyclage d'anciens dispositifs : ils ont été recrutés pour l'encadrement. Ce budget est donc qualitatif.

Concernant le transport scolaire évoqué par MM. Mouly et Vasselle, nous en discuterons avec les grandes associations d'élus.

La suppression de l'école le samedi matin a été sujette à controverse. Tout le monde a maintenant compris que cette mesure, conforme aux attentes des familles, permettra de libérer du temps pour soutenir les élèves en difficulté.

La reconquête du mois de juin est une revendication légitime. Si l'on fait le calcul, un élève de terminale peut avoir perdu un an de cours s'il était dans un établissement qui cessait les cours début juin.

J'en viens au plan primaire. Il n'est pas acceptable que 15 % des élèves de primaire soient en grande difficulté. M. Vallet propose donc de mettre l'accent sur l'apprentissage du code syllabique, Mme Papon sur la défense des programmes. Pour ma part, j'estime qu'il s'agit moins d'une question de méthode que de temps. Nous devons consacrer davantage d'heures aux enfants issus de familles défavorisées. Le déterminisme social joue à plein en matière scolaire. Selon une enquête récente, parmi les 18 % des élèves de sixième qui ont redoublé, on compte 26 % d'enfants d'ouvriers et 41 % d'enfants de Rmistes et de chômeurs ! C'est le rôle de l'école de la République que de corriger les effets du déterminisme social. (Approbations à droite)

Le sort des lycées professionnels a beaucoup occupé M. Mélenchon, fin connaisseur de la question, ainsi que Mme Gonthier-Maurin. Nous voulons que le bac pro soit préparé en trois ans, comme le bac général, afin de permettre aux élèves qui le souhaitent de poursuivre des études supérieures dans l'enseignement général. Nous n'avons nullement l'intention de casser un système où une année supplémentaire de cours permettait à des élèves, souvent plus en difficulté que dans la filière générale, de mieux se préparer au bac. Cette réforme ne serait en rien précipitée puisque, si la mesure était généralisée en 2009, elle concernerait le bac de 2013 ! On me dit que le bac professionnel en trois ans aura pour conséquence la suppression du BEP et du CAP. C'est faux ! L'élève pourra passer le BEP au terme de deux ans et chaque élève, conformément à la loi d'orientation, parviendra au moins à une qualification de niveau 5. On me dit que le bac professionnel en trois ans exclura du système éducatif certains jeunes. C'est faux ! Aujourd'hui, 39 sur 100 jeunes seulement se présentent à l'épreuve de bac professionnel. L'accompagnement personnalisé des élèves permettra de remédier à cette situation. On me dit que toutes les filières seront concernées de la même manière : c'est faux ! Il faut construire de nouveaux baccalauréats professionnels en trois ans dans toutes les disciplines. On me dit que la réforme dévalorisera le diplôme. C'est faux ! Les exigences seront maintenues.

On dit que je veux supprimer des sections professionnelles. C'est faux ! Au contraire, je veux des bac pro dans toutes les disciplines.

Cette réforme n'est pas brutale. C'est une expérimentation, que M. Mélenchon avait d'ailleurs envisagée en 2001. Elle sera mise en oeuvre sans précipitation : nous avons cinq ans pour la mener à bien.

Il est également inexact de prétendre que je souhaite pousser plus d'élèves vers l'apprentissage ; au contraire, je suis revenu sur le dispositif « apprentissage junior » !

De nombreux orateurs ont évoqué l'orientation, élément central de la réforme. Nous pourrons en parler lorsque j'aurai formulé des propositions, à la fin du premier semestre 2008.

J'ai retenu ce qui a été dit au sujet des langues rares et de l'enseignement précoce des langues vivantes, notamment avec l'introduction d'une deuxième langue vivante en classe de cinquième. Nous travaillons actuellement à développer l'enseignement des langues à l'école primaire.

Monsieur Virapoullé, nous utiliserons très volontiers en métropole ce qui peut être utile dans l'expérience du collège de la vocation à la Réunion.

Pour réussir, nous nous appuierons sur les enseignants car il n'y a pas de système sans eux. À cette fin, j'engagerai dès 2008 une action pour que soient mieux respectés, mieux valorisés et mieux rémunérés ceux qui restent quand les ministres passent. (Applaudissements à droite et au centre.)

Examen des crédits

Article 33

M. le président.  - Amendement n°II-131, présenté par le Gouvernement.

Modifier comme suit les crédits des programmes(en euros) :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

 

 

 

 

Vie de l'élèveDont Titre 2

 

149 742 199

149 742 199

 

149 742 199

149 742 199

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2

 

3 250 6663 099 267

 

3 250 6663 099 267

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

 

12 874 95212 848 072

 

12 874 95212 848 072

TOTAL

165 867 817

165 867 817

SOLDE

-165 867 817

-165 867 817

M. Xavier Darcos, ministre.  - Cet amendement ajuste le droit à compensation des régions et départements au titre de transfert de 5 137 TOS de l'éducation nationale et de 509 TOS de l'enseignement technique agricole, qui ont opté pour l'intégration ou un détachement dans la fonction publique territoriale en vertu de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Les intéressés pouvaient exercer leur droit d'option jusqu'au 31 août 2007, ce qui a empêché de prendre en compte leur transfert dans le projet initial.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - La commission n'a pu examiner l'amendement, mais elle aurait été favorable à cette disposition qui coule de source, puisqu'elle applique la loi du 13 août 2004.

À ce propos, je souhaite que le ministre nous communique un tableau indiquant la répartition des TOS transférés...

M. Jean-Claude Carle. - Très bien !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - ... afin que nous sachions comment ils sont gérés.

L'amendement n°II-131 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-22, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes(en euros) :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

 

24.000.000

0

 

24.000.000

0

Vie de l'élèveDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

24.000.000

 

24.000.000

SOLDE

-24.000.000

-24.000.000

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Cet amendement d'appel concerne la rémunération des vacations et les suppléances de personnel non enseignant inscrits sur le titre 2 du programme « enseignement public du second degré ».

Comment ces crédits sont-ils gérés ? L'exécution 2006 aboutit à 63,8 millions d'euros ; vous proposez de porter la dotation de 25 millions à 49. Les vacations apportent assurément une souplesse, mais nous aimerions quelques précisions.

M. Xavier Darcos, ministre.  - Ces crédits apportent une souplesse aux académies, qui peuvent aussi utiliser les heures supplémentaires. Nous ne savons pas à l'avance la solution choisie par les académies.

Je suggère de retirer l'amendement, car l'inscription proposée a pour seul but d'éviter certaines difficultés. Lorsque nous ferons le point sur l'exécution de ce budget, je vous communiquerai un tableau détaillé sur la ventilation de ces crédits

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - La commission souhaitait surtout avoir des explications, d'autant plus que vous voulez développer les heures supplémentaires, qui permettent aux enseignants de gagner plus en travaillant plus.

Puisque vous vous engagez à présenter des explications sur l'utilisation de ces crédits, je retire l'amendement.

L'amendement n°II-22 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-20, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes (en euros) :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

 

 

 

 

Vie de l'élèveDont Titre 2

 

8.000.000

0

 

8.000.000

0

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

  8.000.000

 

8.000.000 

SOLDE

-8.000.000

-8.000.000

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Ces crédits sont un héritage ancien : en 1926, le ministère de l'instruction publique a créé un chapitre « remise de principe » afin d'apporter un soutien financier aux familles nombreuses en allégeant les dépenses d'internat ou de demi-pension, sans condition de ressources. Il n'y avait alors pas d'allocations familiales, car les premières mesures sont intervenues presque dix ans plus tard.

Dans le sillage de la loi Fillon sur l'éducation nationale, nous avons également introduit une bourse indépendante des revenus.

M. Philippe Marini.  - Poincaré, Fillon, même combat !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Aujourd'hui, la France dispose d'une politique familiale généreuse.

En outre, le financement des internats et de la demi-pension a été transféré aux collectivités territoriales. Ainsi, des crédits d'État viennent en aide aux familles nombreuses en raison des tarifs pratiqués par les autorités territoriales dont la méconnaissance des besoins familiaux et suppléée par le budget général.

En pratique, de nombreuses communes prônent la gratuité de la cantine et les conseils généraux appliquent une politique tarifaire cohérente dans tout le département. Toutefois, le maintien de cette ligne budgétaire incite à la hausse des tarifs.

La commission aurait pu suggérer le transfert des crédits vers les budgets locaux. Elle s'en est abstenue, mais le Gouvernement a tout loisir pour le faire.

M. Philippe Marini.  - Très bien !

M. Xavier Darcos, ministre. - Cet amendement m'embarrasse. Cette aide, qui existe depuis 1963, permet aux familles de deux enfants et plus de bénéficier d'une réduction de tarif. Elle est indépendante du revenu. Je préférerais diligenter une mission d'inspection pour mettre les choses à plat, mais je m'en remets à la sagesse du Sénat bien que n'étant pas certain de l'effet de cet amendement sur l'opinion...

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - L'amendement n°II-131, quand le Gouvernement l'a présenté, était de conséquence puisque le Sénat l'avait en quelque sorte anticipé en votant l'article d'équilibre. Oserais-je dire que nous avons de même, en votant le budget des collectivités, anticipé sur cet amendement ? En première partie, nous avons longuement discuté des dotations aux collectivités. Nous nous sommes efforcés, avec le rapporteur général, de mettre en place un dispositif...

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il m'a coûté bien de la peine, monsieur le président !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - ...pour éviter le caractère trop abrasif de certaines variables d'ajustement. Nous avons arrêté un dispositif qui s'élève à 103 millions d'euros ; parmi eux figurent ces 8 millions. J'ajoute que cet amendement sera un argument supplémentaire pour que les collectivités assument toutes les conséquences du transfert de compétences.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Je remercie le président Arthuis de ce rappel. Si les collectivités doivent prendre ces frais en charge, la première partie de ce texte leur en donne les moyens. Elles ont l'argent du beurre, il ne leur reste plus qu'à l'étaler sur la tartine.

M. Xavier Darcos, ministre. - Métaphore filée !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Métaphore crémière !

L'amendement n°II-20 est adopté.

M. le président. - Amendement n°II-21, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.

Modifier comme suit les crédits des programmes (en euros) :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

22.000.000

22.000.000

 

22.000.000

22.000.000

 

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

 

22.000.000

22.000.000

 

22.000.000

22.000.000

Vie de l'élèveDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

  22.000.000

  22.000.000

  22.000.000

22.000.000 

SOLDE

0

0

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.  - Vous avez provisionné, monsieur le ministre, une somme destinée à permettre au Gouvernement de prendre en compte dès la rentrée prochaine les conclusions de la commission Pochard sur la revalorisation du métier d'enseignant, mais en l'affectant, sans doute par commodité, au seul budget de l'enseignement secondaire. Nous préférerions un partage de la somme avec le primaire, au prorata des effectifs, pour garantir que personne ne sera oublié.

M. Xavier Darcos, ministre. - Notre souci était d'éviter de préempter la décision en préaffectant ces crédits avant la remise de ses conclusions par la commission Pochard. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.

L'amendement n°II-21 est adopté.

Les crédits de la mission enseignement scolaire sont adoptés.

La séance est suspendue à 13 h 20.

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

La séance reprend à 15 h 35.

Mission d'information (Nominations)

M. le président. - L'ordre du jour appelle la nomination des membres de la mission d'information commune sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque. La liste des membres de cette mission, désignés à partir des propositions des groupes politiques pour les commissions des affaires sociales et des finances, a été affichée.

La présidence n'ayant reçu aucune opposition, sont déclarés membres de la mission : MM. Jean-Paul Amoudry, François Autain, Paul Blanc, Mme Claire-Lise Campion, MM. Auguste Cazalet, Bernard Cazeau, Jean-Pierre Demerliat, Mmes Sylvie Desmarescaux, Muguette Dini, M. Eric Doligé, Mme Bernadette Dupont, MM. Guy Fischer, Jean-Pierre Godefroy, Charles Guené, Claude Haut, Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. André Lardeux, Dominique Leclerc, Philippe Marini, Michel Mercier, Alain Milon, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Georges Mouly, Henri de Raincourt, Mme Michèle San Vicente-Baudrin, MM. François Trucy et Alain Vasselle.

Loi de finances pour 2008 (Deuxième partie - Suite)

M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.

Sécurité

M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité ».

Orateurs inscrits

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la commission des finances.  - La mission « Sécurité » constitue, depuis la mise en oeuvre de la Lolf, l'un des exemples les plus aboutis de travail interministériel. La création des groupes d'intervention régionaux (GIR), composés à parité de policiers et de gendarmes, représente probablement l'une des réussites les plus probantes sur le terrain. Les soutiens croisés police-gendarmerie sont de plus en plus fréquents, ainsi que la passation de marchés publics communs. Les progrès réalisés dans cette voie respectent les spécificités des deux forces.

La mission « Sécurité » est dotée de 15,9 milliards d'euros de crédits de paiement, en augmentation de 1,8 %. Les dépenses en personnel en représentent l'essentiel, avec 13,4 milliards d'euros, soit 84,6 % des crédits de paiement. Toutefois, les moyens supplémentaires ne se conçoivent que dans un souci de performance et d'efficacité. La baisse de la délinquance constitue certainement le premier objectif de la mission. En 2007, elle régresse de 1 à 2 %, en zone police comme en gendarmerie. Le nombre de crimes et délits a diminué de 50 250 entre 2005 et 2006, pour atteindre 3 725 588 faits constatés. Parallèlement, le taux d'élucidation a enregistré une progression sensible en 2006 pour atteindre 31,6 % en zone police et 41,4 % en gendarmerie.

Les récents épisodes de violences urbaines à Villiers-le-Bel rappellent toutefois l'importance d'une réflexion pragmatique sur la police de proximité. La police, qui s'est tenue longtemps à une vision trop dogmatique, a dû s'adapter pour mieux répondre aux attentes des populations et des élus, et surtout des maires. L'expérience a démontré que la police ne peut se confondre avec l'animation sociale ni se réduire à un îlotage passif, comme ce fut le cas jusqu'en 2002.

Le coût en personnel des escortes et des gardes de détenus par la police et la gendarmerie doit, cette année encore, être signalé. Celles-ci devraient être assurées par l'administration pénitentiaire ou lui être facturées.

La dimension internationale, via le Service de coopération technique internationale de police (SCTIP), est essentielle. Le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent un atout à valoriser dans le contexte international. La coopération dans ce domaine permet souvent de traiter certains problèmes en amont. Elle vise également à inciter des pays dont les méthodes de maintien de l'ordre sont d'une autre époque à suivre les pratiques des démocraties, ce qui améliore leur image et leurs relations internationales.

Le programme « Police nationale » comporte 8,4 milliards d'euros en crédits de paiement, en hausse de 2,3 %. La création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement s'est accompagnée du transfert des crédits relatifs à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière et à la rétention administrative vers le programme « Immigration et asile » de la nouvelle mission « Immigration, asile et intégration », dont les crédits sont de 65,4 millions d'euros. Le plafond d'emploi de ce programme est de 148 565 équivalents temps plein travaillé en 2008, soit une réduction de 1 253 emplois par rapport à 2007. Au regard des effectifs, le taux de réalisation de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (Lopsi) est satisfaisant. Il atteint 95,4 %, avec 6 200 emplois créés, dont 4 200 de fonctionnaires actifs. On constate une sur-réalisation de la Lopsi de 163 % pour les crédits de fonctionnement et d'équipement, et une sous-réalisation pour les dépenses d'investissement, pour lesquelles le taux de réalisation est de 80 %. Une enveloppe de 18,8 millions d'euros vise à couvrir les aspects indemnitaires de la réforme des corps et des carrières de la police nationale, et notamment à accompagner le passage des officiers à un régime de cadre. L'apurement du stock des heures supplémentaires, évalué à 5,2 millions d'heures, s'intègre dans la politique définie par le Président de la République. 47 % des officiers ont opté pour leur paiement, dans une limite de 100 heures en 2007 et 2008, plutôt que pour une récupération du temps de travail.

L'année 2008 sera marquée par la fusion de la Direction de la surveillance du territoire (DST) et de la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG) dans une Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Cette rationalisation est souhaitée depuis longtemps.

On ne peut qu'approuver le développement de la vidéosurveillance envisagé par le ministère de l'intérieur. Cette technologie, qui doit naturellement être déployée dans le respect des droits et des libertés individuelles, a joué un rôle majeur dans l'élucidation des attentats commis à Londres en 2005 et dans la réactivité des forces de police anglaises face à de tels risques.

Le programme « Gendarmerie nationale » comporte 7,4 milliards d'euros de crédits de paiement, en léger recul de 0,58 %. Le plafond d'emploi s'élève à 101 136 équivalents temps plein travaillé, en diminution de 965 emplois par rapport à 2007, conformément à la politique générale de maîtrise des dépenses de l'État. Si l'on s'interroge parfois sur le maintien du statut militaire de la gendarmerie, celui-ci n'est pas remis en cause et semble préserver son attractivité. Un équilibre relativement satisfaisant a été atteint entre les statuts de la police et de la gendarmerie, comme en témoigne le retour dans leur corps d'origine de six gendarmes sur les sept partis l'année dernière dans la police nationale.

Pour autant, il conviendra d'être vigilant sur la situation morale des gendarmes, en dégradation sensible en dépit des efforts budgétaires réalisés au cours des dernières années, ce qui s'explique certainement par leur disponibilité permanente.

Des logements de qualité contribuent à atténuer ces tensions.

La Lopsi a permis une remise à niveau, avec un taux de réalisation de 86,4 % en matière d'emplois. Le fonctionnement courant -dépenses d'informatique, uniformes, armes- a toutefois été privilégié au détriment de l'investissement : il a notamment fallu apurer des dettes relatives au paiement des loyers des casernes.

Le parc domanial particulièrement vétuste de la gendarmerie doit être remis à niveau. Le développement et la modernisation du parc sont financés par des partenariats public-privé, via des opérations sur bail emphytéotique administratif, ce qui induit toutefois un surcoût lié à la prime de l'opérateur privé.

Enfin, l'exercice des missions militaires hors du territoire pèse sur la disponibilité de la gendarmerie mobile : au 1er juillet 2007, cinq cent deux gendarmes mobiles étaient déployés en opérations extérieures, dont un escadron au Kosovo, pour un coût de 7,8 millions, et deux en République de Côte-d'Ivoire, pour 6,6 millions.

Considérant ce bilan plutôt satisfaisant, la commission des finances propose d'adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre).

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Ce budget de transition entre la Lopsi et la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite Loppsi 2, est sans doute le dernier budget de la gendarmerie nationale à être placé sous la responsabilité du ministre de la défense, le décret du 31 mai 2007 ayant confié conjointement aux ministres de l'intérieur et de la défense la définition et le suivi de ses moyens budgétaires.

Le budget pour 2008 est aussi un budget de consolidation de la Lopsi, dont il prolonge les grandes orientations, comme la réforme des corps et carrières ou le projet Acropol. Dans un contexte budgétaire contraint, il donne à la police et à la gendarmerie les moyens d'assumer leurs missions tout en les invitant à faire mieux à moyens quasi constants.

La mission « Sécurité » connaît une augmentation modérée de 1,8 %, l'essentiel de la hausse portant sur le programme « police nationale », avec toutefois une baisse de 1 253 emplois équivalent temps plein par rapport à 2007, portant essentiellement sur les adjoints de sécurité, catégorie qui a du mal à recruter. Madame le ministre, comptez-vous rendre ce dispositif plus attractif ? Combien d'adjoints de sécurité peut-on supprimer sans gêner le fonctionnement des services ?

La révision générale des politiques publiques devrait offrir de nouvelles pistes de réforme. Toutefois, il ne faut pas laisser les personnels trop longtemps dans l'incertitude, car les rumeurs permanentes sont déstabilisantes.

Ce budget, ainsi que les réformes annoncées dans le cadre de la future Loppsi 2, permettront de poursuivre la baisse de la délinquance pour la sixième année consécutive. Avec 3 725 588 faits constatés, 2006 marque un recul de 1,33 % ; au premier semestre 2007, la baisse atteint 2,53 %. En outre, la tendance s'infléchit pour les crimes et délits contre les personnes. Au seuil de la future LOPPSI 2, quels sont les nouveaux défis ?

Les effectifs de la police et de la gendarmerie sont satisfaisants, et doivent désormais être employés au mieux. Outre le développement de la police scientifique et technique, il faut recentrer les policiers et les gendarmes sur le coeur des missions de sécurité, en recrutant plus de personnels administratifs et en réduisant le volume des tâches indues. Appliquons le principe prescripteur-payeur. La rémunération d'un policier actif occupant un emploi administratif, à grade équivalent, est 30 % supérieure à celle d'un administratif... Le budget pour 2008 prévoit sept cents recrutements de personnels administratifs, mais qui incluent des psychologues ou des infirmières. Quelles sont les prévisions de recrutement de personnels purement administratifs ? Combien de policiers actifs pourraient être redéployés sur le terrain ?

Depuis 2002, le métier des CRS et des gendarmes mobiles a beaucoup évolué, à tel point que le maintien de l'ordre public représente moins de la moitié de l'activité des CRS. Faut-il réduire les forces mobiles, renforcer le rapprochement entre CRS et gendarmes mobiles ? Pour de petites manifestations sur la voie publique, le nombre d'hommes déployés est souvent excessif. La création d'une vingtaine de compagnies d'intervention à compétence zonale pourrait aboutir à prélever des personnels des CRS. Comment cette réforme sera-t-elle mise en oeuvre ? Quelles pistes de rapprochement sont envisagées, notamment pour mutualiser les matériels ? Enfin, comment comptez-vous maîtriser les coûts d'hébergement des forces mobiles ?

La commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Faure, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Le budget de la gendarmerie pour 2008 est marqué par une légère diminution des autorisations d'engagement ; les dépenses de personnel et de fonctionnement progressent légèrement, tandis que les crédits d'investissement reculent de 30 %. Les objectifs de la Lopsi ne seront que partiellement atteints, avec un taux de réalisation inférieur à celui de la police nationale. Les 728 millions de crédits de paiement alloués auront permis de réaliser plusieurs programmes d'investissement, comme l'achat de nouvelles tenues et de pistolets automatiques ou le remplacement des hélicoptères, mais l'acquisition de nouveaux véhicules blindés est une nouvelle fois reportée, de même que l'achat de fusils mitrailleurs et de caméras thermiques.

En matière de rémunération, le Haut comité d'évaluation de la condition militaire a relevé un décalage récurrent et une différence de traitement entre gendarmes et policiers, pourtant amenés à faire le même métier. Enfin, l'état général des casernes de la gendarmerie demeure préoccupant, et pèse sur les conditions de travail et la qualité de vie des militaires, et donc sur leur moral. Dans ce contexte, la proposition de M. Mongin de supprimer huit à dix mille emplois de policiers et de gendarmes et de dissoudre de la moitié des brigades de gendarmerie a provoqué un certain émoi. Que pensez-vous de ces suggestions, madame le ministre ?

La police et la gendarmerie ont développé de nombreuses synergies, notamment via les groupes d'intervention régionaux. Depuis 2002, la gendarmerie est placée auprès du ministre de l'intérieur pour l'exercice des missions de sécurité intérieure et, depuis mai 2007, la définition de l'utilisation des moyens budgétaires relève de la responsabilité conjointe des ministères de la défense et de l'intérieur. La mutualisation des moyens doit toutefois être améliorée. Alors que la gendarmerie dispose du réseau de radiocommunication Rubis, la police nationale développe son propre réseau Acropol, or ces deux réseaux, qui ont coûté environ 600 millions, ne sont pas directement interopérables...

Ce rapprochement ne signifie pas qu'il faille fusionner les deux forces, auxquelles nous sommes très attachés. En sa qualité de force de police à statut militaire, la gendarmerie apporte ainsi une contribution significative aux Opex, notamment dans le contact avec les populations.

Dans son intervention du 29 novembre devant les policiers et les gendarmes, le Président de la République a fixé de nouvelles orientations en matière de sécurité intérieure. Il a notamment annoncé le rattachement prochain de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, tout en conservant son statut militaire, ce qui a été apprécié. Une loi relative à la gendarmerie devrait être présentée au Parlement avant la fin du premier semestre 2008. Compte tenu de l'importance de la gendarmerie, qui assure la sécurité de 50 % de la population et de 95 % du territoire national, la commission des affaires étrangères et de la défense a décidé de constituer un groupe de travail pour réfléchir à l'organisation et aux missions de cette arme. Ce groupe de travail, que j'ai l'honneur de présider, a commencé à procéder à des auditions et il devrait effectuer prochainement plusieurs déplacements auprès des brigades de gendarmerie, l'objectif étant de présenter un rapport d'information avant la fin du premier semestre afin que nos propositions puissent vous être utiles dans la préparation du texte sur la gendarmerie.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements à droite)

M. André Rouvière.  - Dans un temps trop court, je vais évoquer les problèmes de sécurité ainsi que la situation de la gendarmerie.

Vous affirmez, madame la ministre, que l'insécurité régresse : ce n'est pas le sentiment de la population. Le décalage s'accroit entre vos statistiques, votre satisfaction, et le vécu dans les banlieues et ailleurs. Malgré les affirmations du Président de la République, le tout répressif est un échec. Pire, il forge le sentiment de haine vis-à-vis des forces de l'ordre qui, désormais, subissent des tirs d'armes à feu, escalade que je condamne...

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - C'est déjà ça...

M. André Rouvière. - ...mais que je constate. Aujourd'hui, la répression ne suffit pas à assurer la sécurité. Il nous faut donc rétablir le lien de confiance entre les forces de l'ordre et les jeunes.

Depuis la suppression du service militaire, il n'y a plus de lieu de formation du citoyen. Il serait donc indispensable de mettre en place un service civique obligatoire, ce qui n'exclut pas la présence permanente des forces de l'ordre sur le terrain. Une relation de confiance complèterait utilement les actions répressives.

Les promesses de M. Sarkozy et ce budget ne suffiront pas à gommer le réel malaise de la gendarmerie. Certes, je me réjouis que la commission des affaires étrangères ait créé un groupe de travail sur la gendarmerie dont le budget est en baisse alors que les prix des carburants et des logements augmente et que le matériel vétuste ne peut être remplacé. La Lopsi, adoptée en 2002, ne sera pas respectée.

A ce budget insuffisant s'ajoutent des interrogations sur le rapprochement entre la gendarmerie et la police car il manque de clarté et de précision. Il n'y aura pas de fusion, mais où s'arrêtera le rapprochement ? S'il reste partiel, il sera source de difficultés en multipliant les comparaisons entre la situation des uns et des autres. Pourquoi ne pas avoir harmonisé le matériel et les équipements tout en conservant la situation actuelle ? La place de la gendarmerie ne sera pas facile à trouver tant vis-à-vis des armées que de la police. Nous souhaiterions donc avoir plus de précisions sur ce rapprochement programmé. J'espère que vous n'aurez pas les mêmes réticences que pour le bilan d'étape des communautés de brigades que je vous ai demandé à plusieurs reprises depuis plus de deux ans. J'ai enfin obtenu hier le rapport d'octobre 2007 mais ce n'était pas celui que je vous demandais. C'est d'ailleurs votre successeur qui l'a transmis à la commission. Je ne comprends pas ce refus d'informer le Parlement. Si le Gouvernement cache la vérité aux parlementaires, comment leur demander de lui accorder leur confiance ?

Pour cette raison, et pour d'autres, nous ne voterons pas cette mission. (Applaudissements à gauche)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Il fallait commencer par là plutôt que de dire des contrevérités !

M. Hugues Portelli. - Le budget de la sécurité s'accroit de 1,8 %, ce dont nous nous félicitons. La mission « sécurité » comprend les programmes « police nationale » dont les crédits augmentent de 2,3 % et « gendarmerie nationale » dont les crédits sont en léger recul de 0,58 %.

L'importante hausse du budget de la justice lui permet de rattraper un retard historique et de lui donner une efficacité sans laquelle celle de la police serait inutile. Il est en effet primordial que tous les maillons de la chaîne pénale fonctionnent correctement ce qui passe par plus de moyens pour les tribunaux, les magistrats et les greffes.

Ce budget doit également permettre de réaliser vos quatre grandes priorités, madame le ministre : consolidation de la baisse de la délinquance générale, intensification de la lutte contre le terrorisme, accroissement de la sécurité routière, lutte contre le travail illégal et l'immigration clandestine.

L'effort constant entrepris dans la lutte contre la délinquance a porté ses fruits car elle a encore reculé. En 2006, le taux d'élucidation global a progressé de 31,61 % en zone police et de 41,47 % en zone gendarmerie. Ces progrès ne doivent pas masquer les difficultés persistantes, notamment l'accroissement des violences contre les personnes ou des dégradations contre les biens en zones urbaines, qui perturbent énormément la tranquillité publique et nourrissent le sentiment d'insécurité des habitants des périphéries urbaines.

En 2008, vous regrouperez les forces de police et de gendarmerie. Cette mutualisation des services ne peut être que bénéfique. En outre, dans la perspective de la présidence française de l'Union européenne, la gendarmerie française s'est fortement impliquée dans la collaboration policière européenne et internationale avec, notamment, la coopération Schengen, la coopération transfrontalière et l'Office européen de police Europol. A l'aube d'une éventuelle communautarisation de la politique de sécurité, la gendarmerie nationale pourrait être une référence et nous tenons à lui rendre hommage.

S'agissant du cadre de la révision générale des politiques publiques annoncée par le Chef de l'État, ce budget respecte l'esprit de la Lopsi tout en maîtrisant les dépenses publiques.

Les crédits affectés au personnel représentent 84,6 % du total, ce qui traduit l'attention que le Gouvernement accorde à ses services. En ce qui concerne la qualification des personnels et la récompense de la performance individuelle et collective, le Gouvernement respecte la quatrième tranche du protocole du 17 juin 2004 relatif aux corps et carrières de la police. Afin de permettre aux policiers et aux gendarmes de se recentrer sur la sécurité et le maintien de l'ordre, ce budget prévoit d'augmenter le nombre de personnels administratifs chargés des tâches de soutien technique et de gestion quotidienne.

La sécurité est un enjeu fondamental. Elle n'est pas une idéologie, comme ont pu le dire des irresponsables politiques. Le Président de la République a rappelé le 29 novembre que « la sécurité a été de tout temps un enjeu fondamental pour l'équilibre de nos sociétés » et qu'il faut la placer « au premier rang des préoccupations de rétablissement de l'autorité de l'État » afin de garantir le respect des principes républicains et de rétablir la paix sociale. L'insécurité est un drame qui touche d'ailleurs davantage les Français les plus défavorisés, ceux qui vivent dans les quartiers populaires et qui sont souvent condamnés à y rester.

Dans certaines agglomérations, et notamment dans le Val-d'Oise, la situation est parfois explosive. Pour autant, rien n'est irréversible. Si la fermeté la plus totale est impérative en matière d'ordre public, car tirer sur des policiers, agresser des personnes vulnérables, ou encore incendier des véhicules ou des bâtiments publics, ne saurait être toléré et encore moins excusé, une réponse plus adaptée aux réalités du terrain doit être apportée. Ainsi, pourquoi ne pas revoir les conditions d'attribution de la prime de fidélisation, aujourd'hui saupoudrée dans les différents services ? S'il leur est difficile d'habiter dans une ville où ils exercent leur métier en raison des pressions auxquelles ils sont souvent confrontés, ne pourrait-on pas inciter les policiers, par des constructions de bâtiments plus importantes et l'attribution de places de crèche supplémentaires, à résider au niveau de la circonscription ou de l'intercommunalité dans le ressort de laquelle ils travaillent ?

De même, l'effort demandé à tous les fonctionnaires en matière de retraite ou de durée du travail effectif doit concerner tous les corps de métier, y compris la police et la gendarmerie. Il serait hautement souhaitable que la durée hebdomadaire du travail y soit appliquée strictement. Les sous-effectifs structurels dans de nombreux commissariats sont souvent aggravés par un absentéisme légal dont les motifs sont les plus divers, à commencer par les décharges syndicales. Il est d'ailleurs regrettable que les polices municipales aient souvent hérité de ce travers qui pèse lourdement sur la qualité du service public de sécurité, notamment en fin de semaine.

Le budget de la mission « Sécurité » est conforme aux engagements pris par le Chef de l'État, son Gouvernement et sa majorité. Le groupe UMP le votera avec détermination et il vous fait confiance pour rendre encore plus efficace le travail de la police et de la gendarmerie et faire respecter l'ordre républicain sur l'ensemble du territoire national. (Applaudissements à droite)

Mme Éliane Assassi. - Cette mission traduit bien la politique du tout sécuritaire, éloignée de toute réflexion sur les causes et de toute prévention de la délinquance ! L'actualité démontre que cette politique n'est pas efficace : combien faudra-t-il de blessés et de morts, à Villiers-le-Bel comme lors des émeutes d'il y a deux ans, pour que vous le reconnaissiez ? (Exclamations indignées à droite)

M. Henri de Raincourt. - Un peu de retenue !

Mme Éliane Assassi. - Malgré toutes les promesses faites en 2005, rien n'a changé dans les quartiers « sensibles » : en matière de sécurité, d'éducation, de transports, la situation des populations est la même qu'alors, le taux de chômage y est toujours deux fois plus élevé que la moyenne. Tous les voyants sont au rouge : précarité, chômage, misère, violence, économie parallèle...

Après le plan Borloo qui tient toujours du mirage, on nous annonce un « plan banlieues » requalifié de « plan anti-glandouille » par la secrétaire d'État, qui, à défaut de parler depuis les événements à Villiers-le-Bel, veut classer les quartiers populaires avec des petites pastilles de couleurs...

Les caisses de l'État sont vides : où prendre l'argent, sinon là où il est ? Or, la dotation de solidarité urbaine perd 30 millions dans cette loi de finances, quand M. Borloo annonçait une hausse de 120 millions par an jusqu'en 2009 !

Nous avons besoin de plus d'État, pour plus de régulation, le Gouvernement va dans le sens inverse. Votre prédécesseur, madame la ministre, a passé cinq ans à ressasser les mêmes slogans sécuritaires, pour quels résultats ? Il a fait voter des lois toujours plus répressives, il a provoqué les jeunes des cités, il a multiplié les cadeaux fiscaux à ses amis du grand patronat, au détriment des caisses de l'État, mais a-t-il fait autre chose ? La droite récolte aujourd'hui ce qu'elle a semé : accentuation de la fracture sociale, multiplication des lois répressives, hausse des injustices, stigmatisation des jeunes, en particulier ceux issus de l'immigration et vivant dans les cités, discriminations à leur égard, provocations en tout genre !

Alors que M. Sarkozy s'est toujours vanté de faire reculer la délinquance, l'Office national de la délinquance montre que les statistiques du ministère sont imparfaites et qu'on ne tient aucun compte des violences au sein de la famille.

Malgré l'échec de l'arsenal législatif installé depuis 2002, nous allons bientôt légiférer encore sur la rétention de sûreté, comme s'il n'y avait pas d'autre solution que l'enfermement à vie ! Vous devez l'admettre : vous avez échoué contre la délinquance et la récidive !

Au lendemain des émeutes de 2005, tout le monde, y compris à l'UMP, était pour rétablir la police de proximité, vous-même, madame la ministre, parliez d'une police « localisée » ou « territorialisée ». Rien n'est venu depuis, les relations entre la population et la police se sont encore détériorées ! Nous déplorons la logique de confrontation entre la police et les jeunes, il est temps de passer d'une police d'ordre au service de l'État, à une police au service du citoyen, car elle est un service public qui garantit la liberté de chaque citoyen !

Je suis profondément indignée de la prime offerte par la police pour les témoignages dans l'affaire de Villiers-le-Bel. Le témoignage sous X est instauré depuis 2002, pourquoi ajouter une prime à la délation, qui risque de mettre de l'huile sur le feu et de multiplier les témoignages « bidons » ? Le respect de règles déontologiques est dans l'intérêt du citoyen et des policiers !

Vous prévoyez de redéployer des effectifs de CRS dans des compagnies zonales de sécurité, où est la nouveauté ? Quant à la vidéo surveillance ou aux drones, ils ne sauraient remplacer la présence humaine ! Vous voulez tripler le nombre de caméras sur la voie publique, vous pourriez commencer par évaluer leur efficacité !

M. Éric Doligé. - Elles fonctionnent très bien !

Mme Éliane Assassi. - Le programme d'installation coûterait 5 à 6 milliards, l'État prélèverait 800 000 euros au Fonds interministériel de prévention de la délinquance : où allez-vous trouver les financements ?

Mme Gisèle Printz. - Les communes !

Mme Éliane Assassi. - Madame la ministre, les discours sécuritaires ne suffisent plus, la répression est inefficace sur des jeunes qui n'ont plus rien à perdre. L'État doit plutôt donner des signes d'espoir à cette jeunesse dont l'avenir est sombre, proposer des solutions pour l'éducation, la formation, le travail. « Travailler plus pour gagner plus » ? Mais ils n'ont pas de travail ! Il faut rétablir un climat de confiance et de justice !

Le malaise est profond au sein même de la police et de la gendarmerie : heures supplémentaires non payées, problème de passage au statut de cadre des officiers de police; hausse de la charge de travail, baisse du niveau de vie, conditions de casernement difficiles... S'y ajoute la réticence exprimée vis-à-vis du rôle que le Gouvernement fait jouer aux forces de l'ordre dans la traque aux étrangers sans papiers !

Quelques mots, enfin, sur les pistolets « Taser », dont vous voulez équiper les policiers municipaux. Aux États-Unis et au Canada, ces armes sont à l'origine de plusieurs dizaines de décès, le comité de l'ONU contre la torture estime que la douleur aiguë provoquée par ces armes, constitue une « forme de torture » ! (Exclamations à droite)

M. Christian Cambon.  - Et les balles réelles tirées à Villiers-le-Bel sur les policiers ?

Mme Éliane Assassi. - Ce comité a recommandé de ne pas utiliser de telles armes : madame la ministre, quelle suite comptez-vous donner à une telle recommandation ? (Mêmes mouvements)

Le groupe CRC votera contre ce budget ! (Applaudissements à gauche)

M. Éric Doligé. - Tant mieux ! (Exclamations à gauche)

M. Robert Bret. - La droite est réactionnaire, ce n'est pas d'aujourd'hui !

M. Charles Gautier. - En juin 2002, devenant ministre de l'intérieur, M. Sarkozy nous expliquait combien la gauche avait été laxiste, faible et naïve en matière de sécurité et comment, lui, il résoudrait tout en un temps record avec des méthodes fortes. Devenu Président de la République, il continue d'expliquer aux Français comment il faut agir : la situation, pourtant, est loin d'avoir changé !

Pour 2007, les chiffres établissent une baisse de la délinquance de voie publique de 1,3 %, et une évolution plutôt inquiétante des crimes et délits contre les personnes. La Cour des comptes observe, cependant, que l'état 4001 ne fournit qu'une mesure partielle et hétérogène de la délinquance et que les catégories ne sont pas informées de la même manière par tous les services de police et de gendarmerie.

Chaque année, je dénonce les choix politiques depuis 2002, chaque année la violence dans nos banlieues s'accroît. La semaine dernière, à Villiers-le-Bel, des jeunes gens ont même tiré à balles réelles sur les forces de l'ordre.

Madame la ministre, vous soulignez la nécessité d'investissements, pour doter nos forces de l'ordre d'outils modernes. Les caméras de vidéosurveillance ont certes des qualités, elles sont utiles, mais elles n'empêchent pas le fossé de se creuser entre les habitants de certains quartiers et les forces de l'ordre. Depuis 2002, vous avez brisé net le lien rétabli grâce à la police de proximité. Vous me répondrez encore que la police n'est pas faite pour jouer au foot avec les jeunes de banlieue ! Mais cette réponse vous sert surtout à nier que la police de proximité avait humanisé les liens entre la police et les quartiers, qu'elle avait donné à l'État et à ses représentants, un visage humain !

Les nouvelles répartitions des effectifs de police ne privilégient pas les quartiers qui en ont le plus besoin. Au contraire ! Lorsque s'y produit un nouvel événement, vous y envoyez les CRS, qui n'en connaissent ni le terrain ni les habitants. De cette manière, vous creusez encore le fossé entre les plus faibles et l'État. L'escalade des violences depuis 2002 montre bien l'échec de votre politique de sécurité, et même le danger que cette politique fait courir : aux quartiers riches, les rondes policières nocturnes ; aux pauvres, les CRS.

Loin de moi l'idée de jeter le discrédit sur les compagnies républicaines de sécurité ou les gendarmes mobiles. Ils remplissent toujours de façon efficace et courageuse leur mission de maintien de l'ordre public. Mais la réorientation de leurs missions vers la lutte contre la délinquance et contre l'insécurité semble douteuse. C'est une mesure de gestion des effectifs destinée à réaliser des économies d'échelle. Ces forces mobiles sont devenues des forces d'appoint pérennes, et non plus ponctuelles, aux unités de base de la police et de la gendarmerie. La dernière expérience est un échec. À Villiers-le-Bel, ils ont fait l'objet d'un véritable traquenard et ont dû se replier pour protéger leur matériel contre le vol !

Au vu des résultats et de la tension permanente qui règne dans les quartiers difficiles, le débat sur le format et la formation des forces mobiles apparaît d'actualité : l'intervention des forces mobiles dans ces conditions ne poserait-elle pas plus de problèmes qu'elle n'est censée en résoudre ?

Ces violences sont le résultat des inégalités qui s'accroissent, et vous refusez d'y répondre. Vous préférez dépenser en investissement plutôt qu'en présence humaine et supprimez 1 253 emplois de policier. Et la frénésie législative continue. Après les lois contre la récidive, l'immigration et pour la prévention de la délinquance, le Gouvernement annonce encore un projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale. Toutes mesures qui ne sont que d'affichage. Certaines ne sont même pas effectives, faute de décret d'application. Vous annoncez une loi post-Lopsi, alors même que les objectifs de celle-ci ne sont pas atteints.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - C'est faux.

M. Charles Gautier.  - Vous promettez la mise en place de nouvelles technologies permettant de « démultiplier l'efficacité de la présence sur la voie publique, de réduire les délais moyens d'intervention ». Permettez-moi d'être sceptique. Je ne conteste pas l'efficacité de la vidéosurveillance en termes de prévention de la délinquance ou d'élucidation des actes commis, mais il faut quelqu'un pour regarder les écrans de contrôle !

Les objectifs de la Lopsi ne sont pas atteints non plus en ce qui concerne les tâches indues. Policiers et gendarmes continuent d'effectuer des tâches d'assistance pénitentiaire, d'éloignement des personnes en situation irrégulière, ou d'administration.

Vous l'aurez compris, nous sommes très fermement opposés à vos choix politiques et budgétaires. Les faits sont d'ailleurs là pour nous conforter dans nos propos. (Applaudissements à gauche)

M. Marc Laménie.  - Je rends hommage aux policiers et gendarmes, qui tous les jours, assurent la tranquillité publique et la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements à droite) Comme vous le soulignez avec force, madame la ministre, « la sécurité est la première préoccupation des Français, elle est un droit de l'Homme, qui conditionne tous les autres ».

Votre budget montre que la sécurité reste une priorité de l'action gouvernementale puisque près de 16 milliards sont destinés à la mission « Sécurité ». La répartition équilibrée entre les programmes « police nationale » et « gendarmerie nationale » montre votre volonté de ne pas faire de différences entre ces deux corps. La création, en 2002, des groupes d'intervention régionaux (GIR) prouve que policiers et gendarmes travaillent en partenariat étroit. Le bilan qui peut en être tiré est tout à fait positif.

Ce budget est le premier après l'exécution de la Lopsi du 29 août 2002. On ne peut que se réjouir de son bilan très satisfaisant. Elle a refondé les principes régissant l'organisation de la sécurité intérieure sur le territoire national. Les objectifs fixés ont été quasiment atteints, les taux de réalisation des créations d'emplois sont de l'ordre de 95,4 % pour la police nationale et de 86,4 % dans la gendarmerie. Les moyens alloués à la sécurité se sont concrétisés sur le terrain par une réussite incontestable sur le plan de la lutte contre la délinquance. Les indicateurs de performance font état d'une baisse sensible de toutes les formes de délinquance, d'une amélioration des taux d'élucidation, et d'une diminution du nombre de blessés et de tués sur la route. Entre 2002 et 2006, la délinquance a diminué de 9,6 %.

Ces chiffres ne sont pas le fruit du hasard mais bel et bien le résultat de la politique efficace et courageuse engagée par le précédent gouvernement et qui se poursuit grâce à votre ferme détermination, madame la ministre. Depuis votre prise de fonctions, ce mouvement s'est, en effet, poursuivi et même amplifié. En septembre 2007, les faits constatés par les services de police et de gendarmerie ont baissé d'environ 7,65 % par rapport à ceux de septembre 2006. Le taux d'élucidation était de 36,2 % en septembre 2007, soit une hausse de près de 10 points en cinq ans.

Ce budget doit consolider les résultats de la Lopsi I et amorcer les évolutions envisagées dans le cadre de la Loppsi II. C'est donc un budget intermédiaire. Les objectifs quantitatifs ayant été remplis, il est légitime qu'ils cèdent désormais place à des objectifs plus qualitatifs dans le cadre de la Loppsi II. Nous nous réjouissons de la présentation prochaine de cette nouvelle loi d'orientation et de programmation qui mettra l'accent sur la modernisation, la mutualisation et le management.

Ce budget est bon car il vous donne les moyens de mettre en oeuvre l'ambition affichée lors de votre prise de fonctions, madame la ministre : doter la France d'un grand ministère moderne de la sécurité intérieure. Un milliard ira à la modernisation de nos systèmes de sécurité, soit un doublement des moyens actuels. L'UMP se félicite du recours intensif aux nouvelles technologies qui renforcera l'efficacité des forces de sécurité face aux performances croissantes des criminels. La délinquance change de nature et les forces de police et de gendarmerie doivent s'adapter à ses formes nouvelles, voire anticiper les défis.

Nous nous félicitons du développement accéléré de la vidéosurveillance qui apporte une pierre supplémentaire à un édifice majeur pour la sécurité de nos concitoyens. Son efficacité pour améliorer de façon significative la sécurité quotidienne n'est plus à démontrer. Des expériences étrangères l'ont largement prouvé, notamment au Royaume-Uni. Des expériences locales en France le montrent quotidiennement. L'opinion publique y est prête, d'autant plus que de nombreux progrès ont été accomplis pour protéger la vie privée. C'est pourquoi nous approuvons votre objectif de tripler en deux ans le nombre de caméras de vidéosurveillance sur la voie publique.

Nous nous félicitons également des efforts engagés pour poursuivre la modernisation de la police technique et scientifique qui constitue l'une de vos priorités. Les fichiers automatisés des empreintes digitales et des empreintes génétiques ont largement prouvé leur utilité. Ils doivent être adaptés à l'accroissement considérable du volume de données.

Autre ambition de ce budget : le regroupement des moyens humains qui agissent pour la protection des Français et le renforcement des coopérations entre la police et la gendarmerie. Le travail en commun de la police et de la gendarmerie nationale doit s'approfondir afin de mieux s'adapter aux nouveaux enjeux de la délinquance. Pour des raisons d'efficacité mais aussi de bonne utilisation de l'argent public, des synergies doivent être recherchées, dans le respect des spécificités de ces deux corps.

Les nombreuses rumeurs qui courent sur la fermeture de brigades de gendarmerie, pourtant organisées en communautés de brigades, sèment l'inquiétude parmi les gendarmes et les élus. Sont-elles fondées et quelles sont vos propositions pour une répartition plus claire des tâches de la gendarmerie et de la police ?

Votre budget est un bon budget, attentif à la formation, au déroulement des carrières et au recentrage sur les tâches qui ne peuvent être assurées que par des hommes en uniforme. Leur dévouement et leur courage assurent notre sécurité. Reste que trop d'entre eux sont affectés à des tâches administratives qui les détournent de leur vraie mission alors que les récents événements dans le Val-d'Oise montrent qu'il faut renforcer leur présence sur le terrain. S'il leur revient d'interpeller et de mettre les délinquants à la disposition de la justice, ils ont également une mission de prévention.

M. André Rouvière. - Très bien !

M. Marc Laménie. - Le groupe UMP votera les crédits de la mission sécurité. (Applaudissements sur les bancs de l'UMP)

M. Philippe Madrelle. - Le budget de la gendarmerie n'échappe pas à la règle d'une forte contrainte. Il recherche un équilibre entre deux priorités, le maintien de l'effort pour la sécurité et la réduction du déficit budgétaire. Hélas !, la réalité est toute autre et nous sommes en pleine année de transition budgétaire entre une Lopsi qui s'achève et une autre qui se prépare, si bien que les autorisations d'engagement régressent de 2,52 % et les crédits de paiement de 0,58 %. Il n'y a pas de quoi pavoiser, d'autant que les effectifs diminuent car les 475 emplois prévus par la Lopsi sont contrebalancés par autant de départs en retraite non remplacés.

L'éditorialiste et philosophe Jean-Claude Gillebaud l'a souligné, « une société qui croit pouvoir régler les problèmes en évacuant l'humain, devient folle ». L'assassinat récent d'une jeune femme dans un train en plein jour en apporte une tragique confirmation. Les concours aux collectivités diminuent...

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - Ce n'est pas ce budget !

M. Philippe Madrelle. - Je persiste à souhaiter avec André Rouvière la création d'une mission d'information sur le malaise de la gendarmerie car cela intéresse tous les élus. Les gendarmes ne peuvent accepter le décalage croissant avec la police et l'affaire ne tient pas seulement à la grille indiciaire : ils se demandent comment assurer leurs missions à l'avenir.

Après les déclarations de M. Sarkozy sur le projet de rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, nous nous interrogeons sur la possible coexistence au sein d'une même force de personnel sous deux statuts différents. Les gendarmes sont attachés au leur, sera-t--il préservé ? La mutualisation des moyens risque de faire disparaître leur singularité. Si vous cherchez une force de sécurité de proximité, vous l'avez déjà, et c'est la gendarmerie. Il ne faudrait donc pas que de mutualisation en regroupements, on déshabille Pierre pour habiller Paul.

Le redéploiement annoncé ne prélude-t-il pas à des fermetures de gendarmeries et n'êtes-vous pas plus à la recherche d'économie que d'une amélioration de la sécurité ?

Je veux rendre hommage à ceux qui accomplissent sur le terrain des missions chaque jour plus dangereuses. Ce budget n'est pas à la hauteur du malaise qui s'exprime et le groupe socialiste ne le votera pas. (Applaudissements à gauche)

M. Christian Cambon.  - (Marques de satisfaction à droite) Le président de la République a placé au premier rang de ses priorités la restauration de l'autorité de l'État, d'un État qui assure la sécurité de tous et au premier chef des plus faibles. La sécurité est une des valeurs de la République. Police et gendarmerie sont les garants des principes républicains, de la liberté, de la paix publique et de l'ordre. J'en veux pour exemple le comportement admirable des policiers à Villiers-le-Bel. Malgré les violentes agressions -jusqu'à des tirs à balles réelles !-, ils ont fait honneur à la République. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Ce budget établit un équilibre entre le maintien de l'effort entrepris avec la Lopsi et la maîtrise des dépenses et la réduction des déficits. Vous nous avez expliqué vos priorités : accroître la sécurité, réaffirmer l'autorité et l'impartialité de l'État, rétablir le lien de confiance entre les citoyens, l'État et les collectivités locales. Nous approuvons vos objectifs : réduction de la délinquance de 5 %, et de 10 % pour la délinquance de voie publique ; augmentation de 40 % du taux d'élucidation. Celle-ci est une façon de rendre justice aux victimes et un élément fort de dissuasion.

S'il faut tenir ces objectifs ambitieux, nous devons aussi adapter les moyens aux nouveaux comportements, moderniser, mutualiser les moyens et reconnaître le travail accompli. Un milliard sera consacré à la modernisation des outils et au développement de la vidéo-protection. Je me félicite à mon tour de cette décision car l'expérience de ma commune me permet de rassurer Mme Assassi : nous avons eu des résultats spectaculaires tant en taux d'élucidation qu'en termes de dissuasion.

Les GIR généralisent la coopération entre les services de l'État pour frapper plus efficacement au coeur de l'économie souterraine et les trafiquants. Les résultats sont là mais il faut passer à une autre étape en repensant les modes d'organisation en fonction des agglomérations et des plaques urbaines. La seule coopération ne suffit plus en région parisienne car il n'y a pas de frontière entre Paris et la banlieue et que les délinquants sont très mobiles. Il faut donc aboutir à une organisation plus intégrée de Paris et de la petite couronne.

Nous partageons vos propositions pour de meilleures performances mais je souhaite relayer l'inquiétude de nombreux élus sur l'avenir de la gendarmerie : vous savez que beaucoup de rumeurs circulent. Le Val-de-Marne avait un bon maillage de gendarmeries bien intégrées et efficaces ; nous avons dû nous résoudre à en voir partir et l'on comprend mal que de nombreux gendarmes soient affectés à des tâches administratives ou de police judiciaire. Prendrez-vous des initiatives pour les réaffecter au travail de terrain dans lequel ils excellent ?

Police et gendarmerie ont chacune leur histoire, leurs succès et leurs drames, bref ce qui soude une identité. Il n'y aura pas de fusion a assuré le Président de la République mais il faut renforcer les coopérations et développer la mutualisation. Vous avez souhaité poursuivre l'actualisation de la carte territoriale et développer la polyvalence des forces. Quelles seront les grandes lignes de la future loi sur la gendarmerie nationale qui devrait assurer l'unicité de commandement des deux forces ?

Ce budget ambitieux et courageux répond concrètement à la demande de sécurité des Français, demande qu'ils ont exprimée clairement lors des élections présidentielles. Madame la ministre, vous pouvez compter sur le soutien du groupe UMP pour vous accompagner dans les réformes à venir. Nos concitoyens doivent jouir du droit essentiel de vivre en sécurité ! (Applaudissements sur les bancs UMP).

M. Henri de Raincourt.  - Quel talent !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je remercie chacun des orateurs d'avoir étudié ce budget dont l'importance n'est plus à démontrer avec les événements survenus à Villiers-le-Bel ces derniers jours. La sécurité, c'est la première des libertés, car elle conditionne toutes les autres libertés. La sécurité, c'est une chaîne : famille, école, collectivités, justice, associations y concourent. Pour autant, madame Assassi, il ne faut pas tout mélanger !

M. Henri de Raincourt.  - Juste !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - A chacun sa compétence, à chacun sa responsabilité. La mienne est de lutter contre la délinquance. N'en déplaise à certains, nous avons accompli des progrès très substantiels depuis 2002 (On approuve à droite). Bien sûr, celui ou celle qui vient de se faire voler son sac ou de se faire agresser ne se sent pas davantage en sécurité qu'hier. Mais les résultats sont là : la délinquance, en augmentation entre 1997 et 2002, recule. Ce mouvement se poursuit : de mai à octobre, la délinquance générale a diminué de 3,57 % et celle de voie publique de 7,49 % Le taux d'élucidation, si important pour les victimes, est passé de moins de 25 % en 2001 à 34,3 % en 2006. Je vous annonce qu'il a passé la barre des 39 % en octobre !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Ces résultats sont mesurés avec des indicateurs inchangés -j'y insiste. Pour autant, l'action contre la délinquance doit continuer d'être soutenue, car les Français les plus fragiles sont les premières victimes des violences. Ces violences se rappellent trop souvent à nous.

Violences urbaines, avec les événements de Villiers-le-Bel ne sont nullement le fruit de notre politique (On le conteste vivement sur les bancs socialistes.)

Mme Éliane Assassi.  - C'est faux !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Nous avons réglé le problème en quarante-huit heures, ce qui n'a pas été le cas des violences urbaines survenues à la Courneuve suite à un décès accidentel et à Pau en 2000...

Mme Éliane Assassi.  - Et le social ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - ... ou encore celles de 2001 à la Défense, Nice et Strasbourg où les jeunes, en novembre, avaient organisé une véritable chasse aux policiers ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Éliane Assassi.  - Que voulez-vous montrer avec cette énumération... ?

M. Charles Gautier.  - ...dans laquelle ne figurent pas les émeutes de 2005 !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Madame Assassi, ces faits montrent clairement que nous ne créons pas les violences. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Violences à l'égard des policiers et des sapeurs-pompiers. D'ailleurs, il est scandaleux que des pompiers dont la tâche est de secourir les victimes soient agressés. Et l'on ne peut pas dire que ces agressions sont la conséquence des prétendues mauvaises relations que la police entretient avec les jeunes ! (On approuve à droite.) Qu'il me soit permis de leur rendre une nouvelle fois hommage. Ils ont fait preuve d'une grande maîtrise de soi face à des individus qui n'hésitaient pas à leur tirer dessus à quelques mètres de distance (Applaudissements sur les bancs UMP). Aux policiers et pompiers blessés que je recevrai bientôt, comme je l'ai fait pour les deux personnes agressées pour avoir témoigné devant les magistrats, je dirai notre reconnaissance. Durant les événements, je me suis rendue à cinq reprises à Villiers-le-Bel, de jour comme de nuit. A chaque fois, les habitants m'ont dit combien ils étaient heureux que la police soit là. Dans les quartiers, ce que désirent 99 % des habitants, c'est d'abord la tranquillité et la sécurité !

M. Charles Gautier.  - C'est une évidence...

Mme Éliane Assassi.  - Peut-être, mais vous faites le contraire de ce qu'il faudrait !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Violences sexuelles aussi. Mes pensées vont naturellement à cette jeune fille tuée sauvagement dans le RER par un pervers récidiviste.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Pourquoi était-il dehors ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Violences accompagnant un vol. Qui a oublié ce convoyeur de fonds abattu porte de Bagnolet il y a une semaine ?

Mme Éliane Assassi.  - C'est récurrent à Paris !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Violences intrafamiliales, avec le drame quotidien des femmes et enfants battus contre lequel nous devons redoubler d'efforts.

Violences terroristes qui menacent notre démocratie. Nous en avons eu, hélas, un exemple ces jours derniers avec le meurtre de deux gardes civils espagnols à Capbreton.

Ces violences rappellent malheureusement chaque jour que la sécurité est une responsabilité majeure des gouvernants. La France a besoin d'un grand ministère moderne de la sécurité intérieure. Je veux le construire en mettant des moyens performants au service de l'efficacité des hommes.

Dans la course à la modernité qui oppose délinquants et criminels aux forces de l'ordre, je veux que gendarmes et policiers disposent des outils, de demain et d'après-demain. Depuis mon arrivée au ministère, l'adaptation aux technologies du futur est une priorité avec 1 milliard d'investissement. 12 millions sont consacrés au regroupement, trop longtemps retardé, des laboratoires de police technique et scientifique en Ile-de-France. La technologie des fichiers automatisés des empreintes digitales et des empreintes génétiques sera adaptée à l'accroissement considérable du volume de données traitées.

J'ai également lancé un plan d'action d'envergure sur la vidéoprotection dont l'efficacité n'est plus à démontrer ! Selon une enquête récente, elle fait baisser de 40 % la délinquance.

M. Christian Cambon.  - C'est évident !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Pourquoi faudrait-il en priver nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs UMP ; protestations à gauche)

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.  - Il n'y a aucune raison !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - En la matière, notre retard est considérable. Mon objectif est de tripler le nombre de caméras sur la voie publique en deux ans et de permettre aux communes et institutions qui le souhaitent de se raccorder au commissariat et à la gendarmerie. Des crédits ont été dégagés à cette fin dans le précédent budget, celui-ci ainsi que la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. La vidéoprotection permet d'intervenir de manière plus précoce, d'élucider plus rapidement les affaires -nous le devons aux victimes- et, enfin, elle est fortement dissuasive.

M. Philippe Madrelle.  - Et la présence humaine ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Parce que policiers et gendarmes sont désormais pris pour cibles, nous devons améliorer les matériels de protection et généraliser les armes non létales. Les dotations consacrées aux lanceurs de 40, lesquels donnent un rayon de riposte large aux forces de l'ordre, et aux pistolets à impulsion électrique, qui évitent l'emploi d'arme à feu, vont augmenter très sensiblement. Pour vous répondre, madame Assassi, (Mme Éliane Assassi montre des signes d'agacement), l'utilisation de ces armes non létales a permis de réduire d'un tiers l'usage des armes à feu dans la gendarmerie, ce qui représente un avantage considérable. Je les développerai donc, que cela plaise ou non (applaudissements sur les bancs UMP) pour éviter des morts inutiles !

Les centres d'information et de commandement seront modernisés à partir de six départements l'an prochain. La première version d'Ariane sera généralisée sur le territoire, Acropol sera implanté outre-mer. Je précise que le système Rubis, créé avant Acropol, est techniquement analogue. Par ailleurs, Ariane fonctionne aussi en milieu rural.

Ce budget permettra la surveillance aérienne de grands rassemblements, au moyen de drones, moins coûteux que les hélicoptères.

L'anticipation est indispensable pour que la sécurité s'adapte rapidement à la délinquance. C'est pourquoi j'ai doté le ministère de l'intérieur d'une direction de la prospective et de la réflexion stratégique en liaison avec les universités et les instituts de recherche afin que nous ayons toujours une longueur d'avance sur les délinquants.

À l'ère de la mondialisation, la délinquance est de plus en plus transfrontalière, ce qui exige une approche internationale. C'est pourquoi la présidence française de l'Union européenne me donnera l'occasion de faire avancer l'Europe de la sécurité que j'appelle de mes voeux, comme je l'ai fait dans d'autres fonctions pour l'Europe de la défense. Je souhaite par exemple une formation partagée des cadres policiers, l'échange de renseignements, l'harmonisation des matériels et de la réglementation. Au-delà de l'Europe, nous pouvons promouvoir nos marques d'excellence dans le respect des personnes. Voilà pour la technologie de pointe que nous devons à tous ceux qui veillent chaque jour sur notre sécurité.

Vous avez beaucoup parlé des rapports entre policiers et gendarmes. Ma conviction est que nous devons avoir deux forces de police à statuts différents. (On approuve à droite.) Je défendrai toujours cette opinion avec vigueur ! Mais l'efficacité des missions passe avant la spécificité des structures. C'est tout l'enjeu de la mutualisation. Il faut donc améliorer la répartition des missions.

Le premier domaine concerné est le renseignement. J'ai créé la direction centrale du renseignement intérieur pour rationaliser à la fois le contre-espionnage, la contre-ingérence, le contre-terrorisme, la protection du patrimoine et la maîtrise des contestations potentiellement violentes. Cette action s'appuiera sur une structure centrale forte et un maillage territorial fin.

La réorganisation territoriale de la police est en cours. On a beaucoup évoqué la police de proximité. Je préfère mentionner la territorialité, car l'expression « police de proximité » a été utilisée dans d'autres contextes et à d'autres fins. Pour que policiers et gendarmes soient présents sur le terrain, nous avons créé 2 000 postes depuis 2002, alors qu'auparavant leur nombre tendait à diminuer. (On le confirme à droite) Mais la territorialité n'empêche pas la meilleure utilisation des moyens humains : des caméras permettant d'intervenir sans délai sont plus utiles qu'une garde statique surveillant dans un rayon de 100 mètres. En fait, nous avons besoin de trois niveaux : des gens présents sur place, des personnes plus mobiles et des CRS. Chacun peut être utilisé en fonction de son savoir-faire, de son implantation et de sa capacité de mouvement.

Selon la direction générale de la police nationale, il est souhaitable d'avoir une vingtaine d'unités de sécurisation, comptant 60 à 100 policiers selon les cas. Elles seraient installées dans les départements où les besoins sont récurrents, mais avec une compétence territoriale plus large. Je souhaite créer trois unités dès 2008, mais il n'est pas question de dissoudre les CRS, dont l'évolution s'accompagnera d'une réflexion sur l'implantation des unités, car elles n'ont pas vocation à garder, par exemple, les centres de rétention administrative.

M. Christian Cambon. - C'est vrai.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - J'ai redéfini la coopération au sein de la région parisienne. À Villiers-le-Bel, la compagnie de sécurisation de la préfecture de police a été employée avec l'efficacité que chacun a pu mesurer.

M. de Montesquiou a souligné que les groupes d'intervention régionaux (GIR) constituaient des moyens efficaces pour combattre les trafics locaux. En ce domaine, je veux renforcer aussi la coopération avec le fisc et la douane.

La mutualisation des moyens de la police et la gendarmerie trace la troisième voie d'une meilleure efficacité. Elle est facilitée par mes nouvelles attributions, même si gendarmerie et police ont chacune leur culture propre. Je le répète et le répéterai autant qu'il le faudra ! Nul ne remet en cause cette dualité. Si ma parole ne suffit pas, je rappelle que cette position a été confirmée par le Président de la République ! (Très bien ! à droite)

Le redéploiement territorial de la police et de la gendarmerie aboutit à un résultat cohérent, même si certains ont ressenti un regret compréhensible lors du départ. Il n'est pas question de procéder à un génocide des brigades de gendarmerie !

M. Rémy Pointereau. - Bonne nouvelle !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Des bruits sortent, on ne sait comment. Mais sur le terrain, on connaît la réalité, toujours plus forte que la technocratie ou l'imagination débridée ! (On se gausse sur les bancs socialistes)

La future loi sur la gendarmerie réaffirmera son statut militaire et le commandement opérationnel par le ministère de l'intérieur, ce qui est logique. Elle définira les moyens d'investissement, de logistique et de fonctionnement. J'ai rassuré les gendarmes quant à la parité de traitement avec les policiers. Je pense que toute inquiétude a disparu, mais un groupe de travail vérifiera que l'équité est réelle, car les conditions de travail sont très différentes.

Donnant la priorité au renforcement opérationnel, je me réjouis que les responsables de la police et la gendarmerie aient proposé des formes de mutualisation extrêmement intéressantes portant sur les marchés publics, l'entretien et la réparation des véhicules ou l'utilisation commune du matériel très coûteux rarement utilisé. Ainsi, certains engins spécifiques au maintien de l'ordre seront utilisés indifféremment par les CRS ou les gendarmes mobiles.

Comme il est normal, le parc automobile des forces mobiles sera entretenu dans l'atelier de la police à Limoges.

Le recrutement et la formation s'enrichiront d'un échange sur les pratiques actuelles, notamment pour les personnels de soutien. Le futur centre de formation des agents techniques et administratifs de Lognes sera ouvert aux collaborateurs des deux directions générales, de même que certaines formations spécialisées : plongeurs, équipes cynophiles ou formation au maintien de l'ordre. Des stages communs aux CRS et aux gendarmes mobiles sont à l'étude.

Cet effort de mutualisation concerne également le soutien opérationnel, comme en témoigne le très important chantier de regroupement des fichiers de police criminelle dans l'application Ariane.

Ces moyens nouveaux sont au service de l'efficacité des personnels. La qualité des femmes et des hommes qui la servent constitue le premier atout de la police. Nous avons besoin d'eux. Je vous déconseille, à ce sujet, de prêter l'oreille à certains chiffres sans fondement, donnés à droite et à gauche dans des cadres non autorisés.

L'optimisation des effectifs passe par le recentrage de chacun sur son coeur de métier. Les policiers et les gendarmes n'ont pas à effectuer des tâches administratives. Pour répondre à M. Courtois, je vais relancer un plan de recrutement dès 2008 : 700 postes de personnel administratif, technique et scientifique seront créés dans la police nationale, dont 475 administratifs. Ces évolutions seront amplifiées par la nouvelle loi d'orientation, pour laquelle nous prévoyons la création de 5 000 postes administratifs, scientifiques et techniques. Cela renforcera l'intérêt et l'efficacité de ces métiers.

Je ne peux laisser dire que nous ne faisons rien pour que les policiers ne soient pas mieux utilisés pour remplir leur mission. Ainsi, le Président de la République s'est engagé à ce que les escortes et les transfèrements soient refacturés à la justice. Une révision complète des modalités de transfèrement est prévue.

Les renforts de personnels administratifs sont d'autant plus importants que le nombre d'adjoints de sécurité a beaucoup baissé ces dernières années, du fait notamment de difficultés de recrutement. Ce recrutement doit cependant se poursuivre, comme le souhaite M. Courtois, car ces postes donnent à des jeunes issus de milieux assez défavorisés la possibilité de passer dans de meilleures conditions les concours pour devenir gardien de la paix.

Si la règle du non-remplacement des agents partant à la retraite a été respectée, il n'y a eu aucune suppression d'emplois de gardien de la paix dans la police nationale, monsieur Madrelle. Le retour des économies ainsi dégagées doit être plus important qu'à l'habitude afin de profiter directement au personnel. Je tiens à ce que la vie professionnelle comme la vie personnelle des agents permette de reconnaître la qualité du travail accompli.

Pour cette raison, je porte une attention particulière à la formation et au déroulement des carrières. Il faut renforcer la formation, initiale et permanente, qui permet une promotion professionnelle et sociale. Pour tenir compte des difficultés du terrain, de nouveaux logements seront réservés en Région parisienne en 2008, ainsi que des places de crèche supplémentaires.

La fidélisation est une des problématiques majeures en Ile-de-France. Un groupe de travail, dont la dernière réunion a eu lieu ce matin, m'a fait des propositions que je vous soumettrai prochainement. C'est ainsi que nous répondrons aux attentes de ces personnels.

Ces chantiers importants sont le gage d'une police moderne, efficace, proche des citoyens et ouverte aux problématiques du futur. Je sais pouvoir compter sur vous pour donner aux policiers et aux gendarmes les moyens nécessaires à leur action au profit des Français et au bénéfice de la France. (Vifs applaudissements à droite et au centre.)

Examen des crédits

Article 33

Les crédits de la mission sont adoptés.

Article rattaché

Article 48 octies

Les opérations de construction liées aux besoins de la gendarmerie nationale, dont le principe a été approuvé avant le 31 décembre 2007 par décision du ministre de la défense, peuvent faire l'objet d'un bail emphytéotique administratif, dans les conditions prévues à l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales, jusqu'au 31 décembre 2008.

M. le président.  - Amendement n°II-161, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi cet article :

I - Après les mots :

de la gendarmerie nationale

insérer les mots :

et de la police nationale

II - Remplacer les mots :

du ministre de la défense

par les mots :

des ministres compétents

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Il s'agit d'étendre à la police le dispositif de bail emphytéotique administratif qui permet d'accélérer la reconstruction des locaux professionnels de la gendarmerie, et qui a donné des résultats très positifs. Les commissariats, notamment, pourraient ainsi en bénéficier.

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.  - Avis favorable. La police tirerait profit de ce dispositif.

M. Henri de Raincourt.  - Je suis favorable à l'amendement du Gouvernement, mais le bail emphytéotique pose un problème car il ne permet pas de récupérer la TVA. La question mérite d'être examinée, car cela risque de freiner la réalisation de certains projets.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Nous avons saisi les ministères des finances et du budget pour qu'ils trouvent une solution à ce problème que connaissent bien les élus locaux.

L'amendement n°II-161 est adopté.

L'article 48 octies, modifié, est adopté.

Administration générale et territoriale de l'Etat

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat ».

Orateurs inscrits

M. Henri de Raincourt, rapporteur de la commission des finances.  - La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » bénéficie de 2,656 milliards d'euros de crédits de paiement, en hausse de 3 %. Deux innovations majeures la caractérisent pour 2008. D'une part, elle s'enrichit d'un programme dédié à l'expérimentation du progiciel de gestion intégrée Chorus au sein de l'administration territoriale. D'autre part, le programme « administration territoriale » s'étend désormais à l'outre-mer.

Les crédits de paiement du programme « administration territoriale » enregistrent une hausse substantielle de 5,7 % et s'élèvent à 1,657 milliard d'euros. Il convient de relever le rôle grandissant de l'Agence nationale des titres sécurisés, chargée des passeports électronique et biométrique, de la carte nationale d'identité, du système d'immatriculation à vie des véhicules et du permis de conduire.

En outre, dans un contexte de modernisation de l'administration territoriale, de réorganisation du contrôle de légalité et de dématérialisation des titres, il faut s'interroger sur les frais de fonctionnement des sous-préfectures, qui pèsent sur les crédits de ce programme. Des redécoupages d'arrondissements ont déjà eu lieu afin de mieux répartir la charge de travail entre les services préfectoraux au sein d'un même département. Par ailleurs, il ressort de l'audition du responsable de programme qu'une réflexion est en cours au sein du ministère. Toutefois, la reconfiguration de la carte des sous-préfectures ne devra être envisagée que dans le respect de la dimension humaine et des besoins des territoires.

Le programme « administration territoriale : expérimentations Chorus » concerne deux régions (la Haute-Normandie et les Pays-de-Loire) et comprend 105,3 millions d'euros en crédits de paiement. Fin octobre 2007, le Comité d'orientation stratégique a décidé de reporter le démarrage de l'expérimentation au début de 2009.

Les autorisations d'engagement du programme « vie politique, cultuelle et associative », soit 361,7 millions d'euros pour 2008, et ses crédits de paiement, du même montant, diminuent de 33,7 %. Cette baisse tient essentiellement au calendrier électoral chargé en 2008. Le coût des élections sera d'environ 177 millions d'euros.

Le coût moyen par électeur est de 4,54 euros pour les présidentielles, 3,72 euros pour les législatives, 3,48 pour les cantonales, 2,92 pour le référendum de 2005, 2,84 pour les municipales et, modestement, de 0,14 euros pour les sénatoriales. (On s'en félicite à droite). Le mode de financement public de l'activité politique contribue fortement, en dépit de la règle du 1 %, à un gonflement artificiel et parfois bucolique du nombre des partis et groupements politiques.

Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » s'appuie sur une enveloppe budgétaire quasi stable de 532,5 millions. Le contentieux indemnitaire opposant l'État à certaines communes sur les charges de gestion liées à la délivrance des cartes nationales d'identité et des passeports a déjà coûté 6,8 millions à l'État. Comment comptez-vous résoudre cet épineux problème, dont l'impact financier est estimé entre 185 et 451 millions ?

Sous ces réserves, la commission des finances propose au Sénat d'adopter ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)

M. le président. - Pourquoi les élections cantonales coûtent-elles plus cher que les municipales, alors qu'on ne renouvelle que la moitié des cantons ?

M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial.  - J'ai cité le coût par électeur.

M. Jean-Pierre Sueur. - On voit qu'on a affaire à un spécialiste...

M. José Balarello, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Cette mission est dotée de 2,656 milliards, en hausse de 3 % par rapport à 2007. Vous trouverez dans mon rapport le détail des crédits. Le programme « administration territoriale » prévoit de nombreuses mesures de modernisation des administrations préfectorales Un nouvel objectif souligne désormais le rôle de coordination interministérielle du préfet, comme le souhaitait notre commission.

Plus de 60 % du budget de la mission sont affectés aux préfectures, qui pourront expérimenter la réorganisation des services de l'État, comme dans le Lot. L'objectif est d'aller vers un État plus efficace et plus économe, l'ensemble des services étant placés sous l'autorité du préfet, qui dispose désormais d'une enveloppe globale.

L'activité essentielle des préfectures demeure la délivrance des titres et la garantie de l'identité : en 2006, plus de 24 millions de titres ont été délivrés, avec des délais de traitement raccourcis. Pourriez-vous, madame la ministre, nous préciser le calendrier de mise en place de L'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), créée par le décret du 22 février 2007 ? Reste à finaliser le projet Ines qui insérera les données biométriques sur les cartes nationales d'identité ; les petites communes pourront-elles délivrer ces titres ? Le système d'immatriculation à vie des véhicules, contre la fraude et les vols, est estimé à 8,7 millions d'euros et devrait démarrer le 1er janvier 2009, après accord avec les professionnels de l'automobile. Pouvez-vous nous en préciser le calendrier ?

Le nombre d'actes transmis aux préfectures pour contrôle de la légalité a diminué de 27 % entre 2005 et 2006, et la transmission électronique des actes se développe. Il faut par ailleurs absolument améliorer la formation juridique des fonctionnaires chargés du contrôle de la légalité, dont certains n'ont jamais fait de droit !

Le programme « vie politique, cultuelle et associative » traite des crédits affectés, d'une part, aux partis politiques au titre de l'aide publique, d'autre part aux élections qui se dérouleront en 2008 : 259 formations politiques ont déposé des comptes certifiés.

Les crédits de l'action « vie des cultes » diminuent de 4 %, conséquence de la baisse des effectifs du personnel des cultes. La France est le pays européen qui compte le plus de Musulmans, de Juifs et de Bouddhistes, outre les Hindouistes de la Réunion. La commission présidée par le Professeur Jean-Pierre Machelon a été chargée de réfléchir à une adaptation de notre droit des cultes, notamment pour faciliter la construction de nouveaux lieux de culte sans recourir à des financements étrangers. Pouvez-vous nous éclairer sur le calendrier et le sens des mesures qui pourraient être retenues ?

Enfin, les crédits consacrés à la vie associative permettront la simplification du fonctionnement des associations et le financement du projet Waldec, répertoire national des 800 000 associations existantes. Quels sont vos objectifs pour ces chantiers, leur coût et leur calendrier ?

S'agissant du programme « conduite et pilotage des politiques de l'Intérieur », je n'insisterai que sur les erreurs commises en matière de gestion immobilière : loyers trop chers, ventes à bas prix et rachat du même bien à un prix très supérieur, délais anormalement longs pour formaliser les ventes. L'État aurait intérêt à s'adresser à quelques notaires et professionnels de l'immobilier, comme je l'ai déjà suggéré à Mme Lagarde...

Enfin, l'augmentation des activités contentieuses est due essentiellement aux recours relatifs aux retraits de permis de conduire à la suite des contrôles automatiques.

La commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Dans les cinq minutes qui me sont imparties, je me contenterai de poser quatre questions. (On s'en réjouit à droite)

Ma première question porte sur les effectifs des préfectures et sous-préfectures. Dans la continuité des précédents exercices, le budget pour 2008 se traduit par une réduction de 493 emplois équivalents temps plein. Or les charges pesant sur les préfectures s'alourdissent : les fonctionnaires sont en butte à l'accumulation des documents d'orientation et autres plans d'action stratégiques de l'État, les préfets doivent appliquer les lois sur le handicap, la cohésion sociale ou encore le droit au logement et faire face à la multiplication d'agences et d'organismes spécifiques. Davantage de charges et moins de personnel : peut-on continuer ainsi ?

Ma deuxième question porte sur le programme expérimental Chorus. Le 22 novembre, Les Échos titraient : « Bercy annule l'appel d'offres sur le déploiement du progiciel Chorus ». Selon l'Agence pour l'information financière de l'État, ce deuxième recul serait dû à l'impact des grandes réformes de l'État à l'étude, dont la mutualisation des services budgétaires et comptables. Certains observateurs, sceptiques, l'attribuent plutôt à un retard du pilote fonctionnel. Les crédits que vous demandez pour la mise en oeuvre de Chorus en Haute-Normandie et dans les Pays de Loire seront-ils consommés en 2008 ? Le programme est-il toujours d'actualité ?

Ma troisième question porte sur l'Agence nationale des titres sécurisés dont l'importance va croissant pour des raisons évidentes de besoins sécurisés et d'application des normes européennes. Or, certaines entreprises, qui ont un énorme potentiel dans ce domaine, vont mal, très mal, comme l'usine Gémalto qui va fermer à la fin de l'année. L'Agence nationale des titres sécurisés ne pourrait-elle pas relancer cette activité ? Alors que nous avons beaucoup d'atouts, il serait dommage de voir notre potentiel dilapidé et ce n'est pas M. Doligé qui me démentira.

Je souhaite, enfin, vous interroger sur les sinistrés de la sècheresse de 2003. Le budget d'indemnisation a été confié aux préfectures en 2006, mais la dotation est insuffisante et il y a eu de grandes inégalités de traitement entre les départements et, en leur sein même, dans la répartition des indemnisations. Les associations de sinistrés nous le rappellent régulièrement. Quid, aussi, du rapport demandé par Mme Boutin, alors rapporteur à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif au droit opposable au logement, sur l'indemnisation des sinistrés ? A Mme Bricq, vous avez indiqué le 6 novembre que ce rapport serait communiqué au Parlement avant le 1er décembre. Comme il ne vous a pas échappé que nous étions le 5 décembre, pourriez-vous nous le communiquer ? Les associations concernées ont rencontré notre président, M. Poncelet, qui a beaucoup insisté auprès de notre rapporteur général pour qu'il dépose un amendement afin d'abonder la dotation prévue en 2006. Malheureusement, cet amendement n'a pas été présenté lors de la première partie de la loi de finances. Seriez-vous disposée à le prendre en compte si nous vous le soumettions lors de l'examen de la loi de finances rectificative ? (Applaudissements à gauche)

M. Yann Gaillard. - Je souhaite m'interroger pendant quelques instants sur la notion même de l'État dont nous parlons tant.

Jacques Donnedieu de Vabres, le père de notre précédent ministre de la culture, a écrit dans un ancien et excellent Que sais-je ? : « L'État moderne ressemble au cercle de Pascal dont le centre est partout et la circonférence nulle part. Il n'y a pas de problème politique en soi, il n'y a que des problèmes d'organisation sociale dont l'opinion s'empare et auxquelles elle subordonne l'exercice du gouvernement. Selon les époques et les mouvements d'opinion, on voit tour à tour la justice, l'église, l'enseignement, l'industrie lourde, les transports, resserrer ou détendre leur rapports avec l'État. L'entretien des cathédrales, la culture des fleurs, la production des parfums ou les dessins de mode sont ou peuvent être des services publics, aidés au nom de l'intérêt général ». Rien à voir entre cette conception opérationnelle et utilitariste de l'État, exposée avec un scepticisme élégant en 1954, et le cri d'alarme passionné poussé par Michel Debré, sept ans auparavant, dans son célèbre livre La mort de l'État républicain : « Notre État est incohérent. Notre État est ruineux. Notre État est inefficace. Notre État est inhumain. Avons-nous même un État ? »

Aujourd'hui, l'exécutif et le législatif oeuvrent dans le cadre de la Lolf et de la révision générale des politiques publiques. Nous ne sommes pas au lendemain de la guerre de 1870, comme Ernest Renan cherchant dans une Réforme intellectuelle et morale le nécessaire redressement. Nous n'avons pas à construire une Vème République, puisqu'elle existe et que nous la servons. Plus modestement, plus difficilement peut-être, il s'agit, après la fin des années trop faciles, de réparer, comme dans un chantier archéologique, les dégâts qui enlaidissent le domaine de cette « pauvre petite fille riche » qu'est devenue la France.

Dans ce chantier multiforme, nos rapporteurs d'aujourd'hui et M. Paul Girod, la semaine dernière, dégagent des points nodaux. A la question angoissée, et sans doute excessive, même à l'époque où Michel Debré la formulait, ils répondent : « Oui, nous avons un État, mais il mérite d'être mieux géré ». Mais cet État, comme l'avait bien noté Jacques Donnedieu de Vabres, ne saurait se désintéresser d'aucune activité, d'aucun sujet, dont brusquement s'entiche l'opinion. Une seule différence avec les années cinquante : ce n'est pas l'extension des services publics qui répond aujourd'hui à cette inquiétude, mais bien plutôt l'inverse, non pas forcément la privatisation, mais plutôt l'emprunt d'un modèle entrepreneurial, inspiré des expériences étrangères.

L'État traditionnel recule et l'interrogation sur le rôle et la pérennité de nos sous-préfectures présage peut-être une réforme qui, si elle était mise en oeuvre, ne serait pas moins lourde dans nos département que celle de la justice. Tout aussi frappante, plus encore peut-être dans l'ordre du symbole, est la réflexion de notre collège Paul Girod, sur le compte spécial « gestion du patrimoine immobilier de l'État ». La distinction entre l'État propriétaire et les administrations occupantes ouvre une brèche déroutante dans les habitudes. La transformation des services des domaines en une entité France Domaine et la création du Conseil de l'immobilier de l'État modifieront en profondeur le visage de notre administration. De telles novations ne vont pas sans risques, comme le montre l'affaire de l'Imprimerie nationale. Je ne vous cacherai pas ma mélancolie quand j'apprends que tel hôtel prestigieux a été vendu à une société étrangère ou à une ambassade.

Sans doute mon jugement est-il altéré en raison de ma trop longue carrière au service de ce qui s'appelait la haute fonction publique. Je souhaite donc que la réforme de l'État et de ses services publics continue, sans ternir ce reflet lumineux qui accompagne le service de l'État. Après tout, en tant que parlementaires, nous sommes également à son service.

Mais je me veux rassuré quand j'entends le Chef de l'État dire, le 20 septembre, devant la meilleure administration de l'État, et je ne parle pas de l'ENA mais de l'IRA (sourires) : « En France le service public ce n'est pas seulement une profession, ce n'est pas seulement un métier, c'est une vocation (...). Dans le développement, le non-marchand est aussi important que le marchand, la qualité aussi décisive que la quantité, l'immatériel aussi crucial que le matériel ». (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Pour la première fois, la commission des finances de l'Assemblée nationale a établi un classement national en matière de délai de traitement des documents administratifs, en 2006, en relevant des écarts très importants. Pour obtenir une carte nationale d'identité il faut un peu plus d'un jour dans le Territoire de Belfort et plus de 37 jours en Seine-Saint-Denis. Pour le passeport électronique, si le délai moyen de traitement des demandes n'excède pas une journée dans une douzaine de départements, les habitants des Pyrénées-Orientales doivent patienter 23 jours. De plus, les dotations attribuées à chaque département enregistrent des variations importantes : la préfecture du Nord et celle du Pas-de-Calais sont respectivement dotées de 16,63 euros et de 17,14 euros par habitant ; celles de Lozère et de Corse du Sud disposent de 77,43 euros et de 79,47 euros.

En outre, il règne une certaine opacité dans l'affectation des budgets. Les crédits votés par le Parlement dans le cadre de la mission « Administration territoriale de l'État » qui recouvre l'ensemble des missions des préfectures et des sous-préfectures ont été utilisés dans leur quasi-totalité, mais les montants consommés sont tous très éloignés des dotations initiales. Malgré le déni de M. Guéant -ancien directeur de cabinet de M. Sarkozy au ministère de l'intérieur et actuel secrétaire général de l'Elysée- les parlementaires ont le droit de connaître la manière dont sont affectés les budgets qu'ils ont votés.

Alors même que la réorganisation de la carte judiciaire suscite une polémique sans précédent, se dessine une réorganisation du réseau des sous-préfectures. Le grand chantier de la revue générale des politiques publiques lancé par le Président de la République risque bien, à terme, de faire disparaître un nombre important de sous-préfectures. En somme, après la carte judiciaire, nous allons assister au resserrement des postes de gendarmerie et de commissariats puis, demain, des sous-préfectures. La note s'alourdit singulièrement pour des collectivités locales déjà désertées par les agences de la Banque de France, les tribunaux, les bureaux de poste, les services de la sécurité sociale et les agences d'EDF. Une fermeture de sous-préfecture pénalise à la fois les élus locaux et les usagers. Pourtant, l'intervention de la sous-préfecture est utile dans de nombreux domaines : territoires ruraux fragiles, environnement, risques de toute nature.

Peut-être, madame la ministre, nous apporterez-vous quelques réponses ?

(Applaudissements à gauche)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Ce budget tient compte du changement de périmètre de mon ministère, suite à la création du ministère de l'immigration, de l'identité nationale et du codéveloppement et au rattachement de la compétence de l'outre-mer : mes services se sont rapprochés de ceux de M. Hortefeux pour régler le détail de la gestion du personnel par convention.

S'agissant de la délivrance de titres sécurisés, j'installerai dès le 17 décembre, l'Agence nationale des titres sécurisés à Charenton, laquelle délivrera le passeport biométrique, puis les nouvelles cartes d'identité et cartes grises. Monsieur Sueur, je suis prête à prendre une initiative en direction des entreprises qui travailleront dans ce domaine important : c'est aussi une question d'intelligence économique. Sur le contentieux indemnitaire, je cherche une solution qui offre une base légale aux prestations des communes.

Ce budget contribue aussi à l'exercice de la vie démocratique de notre pays. Vous serez saisi, après les municipales, du redécoupage de la carte électorale. Les dépenses électorales ont fortement progressé, dépassant de 65 millions l'enveloppe prévue. Le nombre de votants a augmenté, mais la raison principale est manifestement le coût élevé -trop élevé- de certaines prestations obligées d'acheminement. J'ai saisi mon collègue de l'économie, pour que la direction de la concurrence examine les suites éventuelles à donner.

S'agissant des machines à voter, j'ai réuni un groupe de travail qui doit me faire des propositions le 15 décembre, en lien avec l'association des maires de France et le Conseil d'Etat.

Face à des collectivités territoriales fortes et bien ancrées, l'Etat doit parler d'une seule voix, exprimer son autorité légitime, objective. Il doit également savoir conseiller les collectivités qui en ont le plus besoin : le préfet est le patron des services territoriaux de l'Etat, à l'écoute de ses interlocuteurs.

La carte des arrondissements ne saurait dépendre seulement de la démographie : des ajustements sont certainement nécessaires, mais la présence de l'Etat est plus utile dans les territoires ruraux ou les vallées de montagne, que dans les territoires urbains denses où les services publics sont déjà présents.

Sans attendre les décisions du Président de la République et les conclusions du comité de modernisation, ce budget innove à plus d'un titre. Nous expérimentons le rapprochement départemental des crédits de fonctionnement des services déconcentrés, pour mutualiser les moyens et éviter les doublons. Nous régionalisons les budgets opérationnels partout sauf en Ile-de-France : cette réforme ambitieuse doit être partagée par tous, à tous les échelons administratifs. Les engagements de mes prédécesseurs seront respectés, s'agissant de la requalification des emplois, de la fusion des corps et de la revalorisation des régimes indemnitaires. La formation juridique doit être ouverte à tous, parce que c'est utile à tous les échelons de préfecture, -je le dis d'autant plus tranquillement que je suis juriste de formation !

Tout en ne renouvelant pas un départ sur deux à la retraite, je respecte le taux de progression de la masse salariale. Je ne crois pas que la diminution du nombre de fonctionnaires d'État se traduise mécaniquement par un transfert de charges aux collectivités locales. L'usage des nouvelles technologies de l'information, la dématérialisation des procédures, évite aux agents des tâches de faible intérêt. Nous examinons très en détail l'évolution des tâches et nous tiendrons compte des suggestions des agents pour améliorer le service, telles qu'elles ressortent de questionnaires par lesquels chacun a été interrogé.

S'agissant des cultes, je ne souhaite pas rouvrir le débat sur la loi de 1905.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Très bien !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Nous étudions les propositions de la commission Machelon. Une partie d'entre elles trouvera à s'appliquer dès l'an prochain.

Sur la sécheresse de 2003, je plaide coupable : j'avais promis que tout serait réglé le 1er décembre et le retard n'a pas encore été totalement rattrapé, il ne devrait l'être que la semaine prochaine. (Sourires)

M. Jean-Pierre Sueur.  - S'il l'est effectivement la semaine prochaine, c'est bien.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - J'ai obtenu l'accord de Bercy et le collectif devrait permettre un règlement début 2008.

Les crédits que je vous demande d'adopter correspondent aux besoins de la mission. Ils répondent au professionnalisme et à l'engagement du personnel, que je salue car c'est lui qui permet à l'État d'exercer ses responsabilités sur tout le territoire. (Applaudissements à droite et au centre)

Les crédits de la mission sont adoptés.

Collectivités territoriales

M. le Président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ainsi que les articles 48 à 48 septies et le compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».

Orateurs inscrits

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Nous avons déjà beaucoup parlé des relations entre l'État et les collectivités territoriales en première partie. Notre discussion fut alors longue et fouillée, plus que ne pourra l'être celle sur une mission qui ne représente que 3 % des dotations de l'État aux collectivités territoriales : 2,2 milliards sur 70. Faut-il vraiment la maintenir ? Outre que les prélèvements sur recettes apportent une meilleure garantie aux collectivités territoriales, le fonctionnement de la mission pose des problèmes d'orthodoxie « lolfienne », dès lors que, sur ces 2,2 milliards, il n'y a guère que 576 millions qui dépendent de notre vote d'aujourd'hui. Le reste est fixé et réparti par la loi.

Je propose donc de supprimer cette mission et de faire en sorte que ses crédits soient intégrés dans un programme de la mission que M. de Raincourt a si brillamment présentée. Ne craignez rien pour le rapporteur spécial, il se trouverait un nouveau rôle. (Sourires)

M. Adrien Gouteyron.  - Il rebondit toujours ! (Sourires)

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Il y a bien d'autres sujets à aborder. Le Gouvernement a décidé que les crédits destinés aux collectivités territoriales devaient respecter comme ceux de l'État, la règle générale de non augmentation en volume. Voici donc par quoi on pourrait utilement remplacer cette mission : par un contrôle des dépenses des collectivités territoriales décidées par l'État. La direction de la sécurité civile décide allègrement pour toutes les collectivités territoriales : quatre-vingt-douze mesures en trois ans ! Et s'il n'y avait que cela ! Mais c'est aussi le ministère de l'éducation nationale ou celui des affaires sociales qui décident tous les jours pour nous. Bientôt les minima sociaux vont être revalorisés : nous le saurons en lisant le Journal officiel le 1er janvier.

Qu'on nous demande de la discipline budgétaire, fort bien, pourvu que nous puissions décider nous-mêmes de nos dépenses. Mais les ministres qui ne dépensent plus pour l'État dépensent pour nous.

Préserver la DGF ? On peut le comprendre -mais l'an prochain ? On est au bout d'un système qui devra être repensé.

Avec les amendements qu'il a déposé, le Sénat -tâche ingrate mais courageuse- veut mettre un peu d'équité dans les sacrifices demandés, afin que les avantages des uns ne soient pas préservés quand les autres sont mis à contribution.

L'article 48 ? Soit, pour peu que vous ajoutiez les régions. Elles ne sont pas touchées et cela ne coûtera donc rien, mais cet ajout est souhaitable pour l'image de cette disposition. La dotation prévue doit être financée par un prélèvement sur le DCTP. Il n'y aura bientôt plus rien ; il faudra alors voir comment faire.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Ensemble !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - La commission propose donc l'adoption de ces crédits.

Le compte spécial représente, avec 80 milliards, la plus grosse mission de ce budget. La commission m'a chargé de le contrôler. Mon rapport vient d'être rendu. J'y constate que ce compte spécial est une bonne affaire pour l'État, qui y gagne 1 milliard. Quant aux autres dégrèvements, c'est Bercy qui les a décidés, pas nous ! A lui d'en supporter les conséquences. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Après le débat du 27 novembre, je puis me concentrer sur la place des concours financiers aux collectivités locales. Ils n'ont pas encore trouvé une architecture adéquate, les trois quarts des concours passant par des prélèvements sur recettes, inscrits en première partie. Cette mission est revenue de 3 à 2,2 milliards car la dotation départementale d'équipement des collèges et la dotation régionale d'équipement scolaire deviennent des prélèvements sur recettes. La mission ne représentant plus que 3 % des dotations de l'État aux collectivités, et l'évolution de 78 % de leur montant échappant à l'État, M. Mercier a proposé sa suppression, qui sera l'aboutissement logique de cette évolution.

A la veille de la présidence française de l'Union européenne, je veux souligner l'impact des normes communautaires sur le fonctionnement de nos collectivités. Leurs relations avec les sociétés d'économie mixte ont été affectées par la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes. Si la loi du 21 juillet 2005 a modifié le droit interne, la Cour de Luxembourg a affirmé le 18 janvier qu'une convention d'aménagement est un marché de travaux publics.

S'agissant de la mutualisation des moyens au sein des EPCI, la Commission a adressé à la France le 27 juin un avis motivé l'invitant à respecter la directive marché. La France a réaffirmé sa position mais l'impact des directives justifie qu'on associe les collectivités à l'élaboration des normes. Qu'envisagez-vous à cet effet ? Le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités, est appelé à jouer un rôle à cet égard et c'est l'un des aspects du suivi des affaires européennes que met en oeuvre notre commission, conformément aux recommandations de MM. Gélard et Peyronnet.

L'intervention économique des collectivités territoriales se développe depuis 2004. La Cour des comptes évoque la difficulté de les estimer et un manque de coordination. Les communes et les régions ont un rôle spécifique à jouer dans la création du cadre économique favorable aux entreprises. Envisagez-vous de revoir les dispositifs d'intervention des collectivités pour en renforcer la cohérence ? (Applaudissements à droite)

M. Jean Puech, président de l'Observatoire de la décentralisation.  - Il faut comparer les 2,2 milliards de cette mission aux 73 milliards de dotations de l'État aux collectivités territoriales. Elle comprend la DGE des départements, la DGD des départements et des régions, la DDR des communes et de leurs groupements, ainsi que des aides exceptionnelles, certaines de ces dotations seulement étant inclues dans l'enveloppe normée. Enfin la DDEC, qui était intégrée à la mission, sera financée par un prélèvement direct.

Les enjeux sont ailleurs, dans les relations entre les collectivités locales et l'État. En 2006, un collègue rappelait que l'année précédente, l'endettement de l'État s'était accru de 49 milliards d'euros et que l'État avait investi 8 milliards, alors que les collectivités locales avaient vu leur dette majorée de 5 milliards, -dix fois moins- et leur investissement porté à 39 milliards -cinq fois plus. Et de conclure que l'État s'endettait pour ses dépenses courantes tandis que les collectivités locales autofinançaient leurs investissements. Cette tendance n'a fait que s'accentuer : les collectivités locales ne sont donc pas responsables de l'augmentation de la dette publique.

On lit pourtant de plus en plus de commentaires, d'observations des chambres régionales et de la Cour des comptes laissant entendre le contraire et certains se complaisent à les diffuser.

Chacun reconnaît la dégradation des finances publiques depuis trois décennies -on a pu parler de faillite de l'État. (Mme la ministre marque qu'elle serait plus nuancée) Vous faites la moue quand je le dis, mais quand c'est le Premier ministre ? Les finances de l'État sont dans un état catastrophique qui appelle, selon le Premier ministre, une thérapie de choc. Quand nous le disons, cela ne passe pas, mais quand il le dit, il a raison. (M. Nogrix applaudit)

Dans ce contexte, qu'attendre des collectivités locales ? Elles sont tenues de voter leur budget en équilibre : pour elles la vertu budgétaire est une obligation. Leurs dépenses ? Elles font ce qu'elles peuvent et elles le font assez bien.

Ce graphique montre la dette globale de notre pays. (L'orateur présente un grand tableau en couleurs) En orange, en bas, on voit la dette des collectivités locales entre 1982 et 2006 : en pourcentage du PIB, elle n'est pas étale, elle baisse. Mais durant la même période, celle de l'État a explosé, et cela par-delà les majorités politiques. La dette de la sécurité sociale, elle, reste médiocre.

Je ne dis pas que certains sont meilleurs que d'autres mais qu'il faut faire converger les moyens car je sens monter les critiques, et encore à l'instant avec l'exemple des zones d'activités. Peut-être que vu de Paris, il faut que tout soit uniforme mais chez moi, on sait que la France est diversité et l'on ne veut pas être traité suivant une norme uniforme.

Investissement, emploi, action sociale, le niveau territorial est devenu incontournable et nos compatriotes se tournent vers lui.

Actuellement, en plus des 90 % des investissements publics, en raison des transferts de compétences, près de 90 % des dépenses d'aide sociale -telles que le RMI- sont aujourd'hui gérées par les collectivités territoriales, à commencer par les départements.

Est-il besoin, après les nouveaux événements dans nos banlieues, de souligner le rôle déterminant que jouent les élus locaux dans les politiques tendant à éviter les explosions sociales ? C'est à l'échelon des collectivités locales, et plus particulièrement des communes, que ces élus effectuent au quotidien un lent travail de raccommodage du tissu social. Nous devons donc éviter de déstabiliser les collectivités locales alors qu'elles se trouvent confrontées à de telles difficultés.

L'État doit se réformer, ce qui passe d'abord par la mise en oeuvre réelle de la décentralisation. Cela ne sera possible que si les mentalités changent en profondeur et si l'on crée un véritable statut de l'élu, adapté aux nouvelles responsabilités découlant des transferts de compétences.

En tout état de cause, les collectivités locales devront être associées au processus. Sans dialogue, les projets de réforme resteront lettre morte. Je me félicite donc de la convocation par le Premier ministre de la Conférence nationale des exécutifs publics, qui permettra de rappeler aux représentants des collectivités territoriales que la réforme de l'État est aussi leur affaire.

Tant d'annonces ont provoqué tant de déceptions qu'il il n'est plus possible aujourd'hui de dire et de ne pas faire. Madame la Ministre, nous sommes nombreux à vous faire confiance. À vous de ne pas nous décevoir. Nous sommes à vos côtés pour relever le défi, afin de faire gagner la France, France d'en haut et France d'en bas rassemblées. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Éric Doligé. - Si selon M. Mercier, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est quasi virtuelle l'occasion nous est donnée d'évoquer les relations financières entre État et collectivités.

Aujourd'hui, ces relations manquent de transparence ; parfois même, elles ne sont pas saines. Madame la ministre, vous avez proposé que les dépenses des collectivités locales ne croissent pas plus vite que celles de l'État, ce qui laisse entendre que la gestion de ces collectivités manque de vertu. Certes, leurs dépenses en pourcentage croissent plus vite que le PIB, mais c'est sans compter avec les nombreux transferts de compétences intervenus depuis 1983. Depuis cette date, la part des dépenses des collectivités dans le PIB n'est passée que de 8,7 à 9,7 %. Les dépenses de fonctionnement pèsent lourd dans leur budget, en raison de la progression de la masse salariale, qui dépend d'ailleurs de l'État. Enfin, les conseils généraux comptent pour 65 % du total, ce qui s'explique par le transfert de postes dont les charges augmentent.

L'État se substitue de plus en plus au contribuable local par le biais de dégrèvements et d'exonérations qui pèsent lourdement sur le budget des collectivités, qui ne sont jamais consultées sur ces mesures. Par exemple, pour les services départementaux d'incendie et de secours, le transfert de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, qui est une taxe dynamique, devait permettre d'atténuer l'effet de la diminution de la DGF ; aujourd'hui, l'écart est de 29 millions d'euros par an.

Autre exemple : je vous mets au défi, madame la ministre, d'obtenir une estimation fiable du coût du conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement, le Caue, qui varie du simple au double selon les départements. Pour toutes ces raisons, les conseils généraux doivent être associés aux décisions de l'État, au niveau central comme au niveau déconcentré. La concertation permettra d'éviter les dérapages de notre société suradministrée qui se traduisent par des charges insupportables pour les collectivités.

Le Premier ministre plaide en ce sens lorsqu'il écrit à Alain Lambert, le 3 septembre dernier, que les relations entre l'État et les collectivités locales doivent être l'un des axes transversaux qui feront l'objet d'un examen attentif dans le cadre de la revue générale de politiques publiques. Le partage des compétences entre l'État et les différents échelons conduit en effet à un enchevêtrement et à des redondances nuisant à la transparence et à l'efficacité de l'action publique et contribuent à la déresponsabilisation des acteurs. Ces relations se caractérisent également par des processus déséquilibrés, elles ne sont donc pas organisées pour tenir compte de la solidarité indispensable à un pilotage efficace des finances publiques.

M. Fillon a confié à Jacques Attali, Alain Lambert et Édouard Balladur une réflexion sur le sujet. Je proposerai quant à moi une piste, les sénateurs étant bien placés pour traiter des collectivités locales. En vue de désenchevêtrer les compétences -condition de l'efficacité et de la transparence-, certains proposent de supprimer un niveau ; d'autres, de mettre un terme à la compétence générale. Les compétences exclusives, depuis la décentralisation, présentent l'avantage d'être claires, mais l'État continue d'être partout par le biais des normes qu'il édicte. Sorti par la porte de la loi, il rentre par la fenêtre de la circulaire... Il faut aller plus loin dans les compétences exclusives. Les contrats de plan entre l'État et la région sont devenus un moyen de pression.

Je prendrai l'exemple des lycées. Le transfert des TOS aux régions devait répondre à un objectif de proximité, alors que la région est un échelon de mission pas de proximité. Nous devrions donc réfléchir au transfert des lycées aux départements.

Je propose de distinguer entre compétences actives et compétences passives. Les compétences actives concerneraient les domaines où les collectivités locales partagent avec un partenaire la maîtrise des évolutions. C'est le cas par exemple de l'économie ou de l'aménagement du territoire. Les compétences passives, au contraire, ne seraient exercées que par un seul acteur sur un grand espace : je pense au sport ou à la culture.

L'essentiel est que chaque compétence soit exercée au niveau adéquat avec le minimum de superpositions.

Je propose également que les régions soient dotées de véritables missions de niveau supérieur : la santé, l'université, l'environnement, outre une capacité d'intervention sur la cohérence des voies de communication. Les régions doivent acquérir une taille supérieure, avec des élus issus des collectivités. De son côté, l'État doit réduire la voilure afin d'établir de véritables relations avec les collectivités territoriales. Ainsi, notre compétitivité sera renouvelée.

Or, j'ai l'impression que l'État fonctionnarise sans cesse les collectivités territoriales par les dotations financières qu'il maîtrise. La révision du contrat de croissance et de solidarité en contrat de stabilité montre qu'une décision en apparence minime peut mettre une collectivité en difficulté. Telles sont les quelques idées, un peu éloignées du sujet, que je voulais exprimer à propos d'une mission particulière. Cela dit, je voterai avec plaisir ce budget conforme aux orientations de la commission des finances. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Jacqueline Gourault. - Le rapporteur spécial souhaite fort justement supprimer à terme cette mission qui a peu d'impact sur les dotations des collectivités. J'ajoute que certaines évolutions confortent ce souhait. Ainsi, M. Puech a rappelé qu'à partir de 2008 la dotation départementale d'équipement des collèges et lycées passerait des dépenses aux prélèvements sur recettes. Il serait bon de clarifier les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales, ce qui empêcherait, par exemple, de dire qu'une telle transformation tend à diminuer en apparence les recettes de l'État.

Plusieurs orateurs ont rappelé que le Sénat avait voté l'article 12 de la loi de finances qui remplace le contrat de croissance et de solidarité par le contrat de stabilité. Nous comprenons que les collectivités participent à l'effort national, mais dans un cadre clair. M. Puech a rappelé que les collectivités territoriales ne représentent que 10 % de l'endettement du pays, alors qu'elles assurent 70 % des dépenses d'équipements public. C'est énorme ! Les collectivités territoriales empruntent, elles, pour investir.

Lorsque nous avions discuté le projet de loi de finances pour 2006, je m'étais élevée contre l'abaissement de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti. Certains collègues m'avaient vivement reproché de ne pas soutenir les agriculteurs, qui n'avaient pourtant rien demandé !

M. Thierry Repentin. - C'est vrai !

Mme Jacqueline Gourault. - Aujourd'hui, nous devons nous battre pour obtenir une compensation pour les départements après celle accordée aux communes à l'Assemblée nationale. Quand on lance des idées comme cette réduction, il faut être prudent. Nous ne sommes pas hostiles à toute mesure de ce type, mais nous gérons les collectivités territoriales et je souscris à l'analyse de mon président, Michel Mercier, quant aux dépenses imposées par l'État.

Je terminerai en évoquant la décentralisation, dont les communes subissent certaines conséquences par ricochet.

Ainsi, le transfert des DDE vers les départements oblige les communes à assumer certaines missions historiques des DDE, que nous appelions « les ponts et chaussées ». Je pense à la voirie communale et aux permis de construire. Les conséquences financières ne sont pas négligeables pour les communes, sans parler des difficultés que rencontrent les petites quand elles doivent mobiliser des compétences techniques. Et l'intercommunalité, quand elle existe, subit elle aussi la décentralisation.

Dans mon département, le préfet a expliqué que l'État ne surveillerait plus ce que nous appelons « les levées de la Loire », puisque le personnel des DDE qui assurait ce service avait été transféré au département. Et mon conseil général répond qu'il ne peut tout faire, si bien que les communes ligériennes sont mises à contribution, au moins dans l'agglomération blésoise, supposée riche. Encore un transfert insidieux de charges !

Outre la réforme fiscale, dont la nécessité est universellement reconnue, nous avons besoin de réponses claires à la question « qui fait quoi ? ». Nous avons besoin d'un État fort, recentré sur ses missions régaliennes et la péréquation, la sécurité, les fonctions républicaines, mais nous devons aussi savoir ce qui incombe aux collectivités territoriales. Je viens d'entendre les propositions audacieuses de M. Doligé. Tout à l'heure, j'ai lu une note sur les missions économiques des collectivités territoriales. C'est à y perdre son latin, et y perdre aussi bien des deniers publics ! Définir des missions claires pour tous les intervenants rétablirait, entre les collectivités territoriales et l'État, une confiance qui est, il faut le dire, aujourd'hui quelque peu émoussée. (Applaudissements au centre et à droite)

La séance est suspendue à 19 heures 25.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Le 22 novembre, le Premier ministre a légitimé la nouvelle politique en direction des collectivités locales en expliquant que celles-ci devaient participer à l'effort de maîtrise des dépenses publiques. L'enveloppe de cette mission, en réalité, fait les frais des 15 milliards de cadeaux fiscaux de cet été.

Le fragile abri qu'était le contrat de solidarité et de croissance est remis unilatéralement en cause par l'État ; la dotation 2008 évoluera en fonction de la seule inflation attendue, soit 1,6 %. Il est inadmissible qu'elle régresse alors que les dépenses des collectivités locales augmentent fortement du fait de transferts de compétences non compensés. La présentation de la réforme du contrat de solidarité et de croissance est d'ailleurs doublement faussée. D'abord par une tromperie sur le périmètre de l'enveloppe, qui comprend des dotations qui n'y figuraient pas jusqu'ici -à périmètre constant, la progression n'est plus que de 0,7 % en 2007... Ensuite, la hausse des prix réels subie par les collectivités a atteint 3,9 % entre les premiers trimestres 2006 et 2007 : l'évolution réelle serait ainsi de - 3,2 % en 2008...

Le contrat de solidarité et de croissance est remplacé par un contrat d'austérité -un contrat qui n'en a d'ailleurs que le nom, puisqu'il est imposé aux collectivités locales. Il y a là une violation du principe de compensation intégrale des transferts de compétences affirmé à l'article 72-2 de la Constitution.

Pour tenter de minimiser les effets catastrophiques de cette réforme pour les finances locales, le Gouvernement insiste sur le maintien, pour la seule DGF, de l'ancienne indexation ; c'est un trompe-l'oeil, car cela revient à donner d'une main, via la DGF, ce qu'on reprend de l'autre, via la réduction de l'enveloppe normée.

A terme, les conséquences seront catastrophiques pour les citoyens ; les collectivités locales seront contraintes de réduire leurs efforts. Leurs dépenses d'investissement ont déjà progressé à un rythme moins soutenu en 2006, 7,1 %, qu'en 2005, 8,3 %. L'autofinancement ne suffit plus, le recours à l'emprunt se développe. En dernier ressort, si elles veulent investir, elles devront augmenter la fiscalité locale, celle des ménages exclusivement, déjà aux limites de la rupture, car la taxe professionnelle a été plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée -le Medef veut même descendre à 3 %. La baisse des impôts, tel était l'argument de campagne de la majorité : on sait ce qu'il en est, des cadeaux fiscaux aux plus aisés d'un côté et de l'autre des collectivités contraintes d'augmenter la fiscalité des ménages.

Ce budget fait supporter aux collectivités locales les choix désastreux de l'État. Leurs services vont en pâtir : nous pouvons redouter que cela serve de prétexte au Gouvernement pour justifier la délégation au privé de pans entiers du service public local. On sait pourtant que les collectivités, qui concourent à hauteur de 70 % à l'investissement public, contribuent au maintien de près de 850 000 emplois dans le secteur privé et associatif.

Nous ne pouvons voter ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je me suis posé une question en quelque sorte préjudicielle : le Gouvernement a-t-il une politique des collectivités locales ? Je n'ai senti, dans les très nombreuses interventions du Président de la République de ces derniers mois, aucune volonté de donner un nouveau souffle à la décentralisation. Mais peut-être ai-je mal écouté ...

M. Adrien Gouteyron. - C'est possible !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je n'ai rien perçu non plus dans les propos du Premier ministre. J'ai étudié avec soin les conclusions du Grenelle de l'environnement, qui concernent tellement les collectivités locales ; elles ne sont mentionnées qu'une fois, lorsqu'il s'agit d'autoriser les communes à établir des péages urbains.

Or je suis convaincu que nous avons besoin d'une nouvelle étape de la décentralisation. Nous sommes allés à Versailles pour inscrire dans la Constitution le principe de l'autonomie des collectivités locales ; qu'est-ce qui a changé de concret pour les élus locaux ? La péréquation est de même devenue principe constitutionnel : quels progrès ont-ils été faits ?

La fiscalité locale ... Tout le monde a manqué de courage, gouvernements de droite comme gouvernements de gauche ...

M. Éric Doligé. - Surtout de gauche !

M. Jean-Pierre Sueur. - ... pour la réformer. Nous savons tous pourtant que les valeurs locatives sont calculées sur la base de critères vieux de trente ou quarante ans.

M. Paul Girod. - C'est un gouvernement de gauche qui a fait voter une loi pour réviser les bases de la taxe d'habitation. Sans la mettre en application.

M. Jean-Pierre Sueur. - M. Charasse y avait beaucoup travaillé. Mais le regretté Pierre Bérégovoy, alors Premier ministre, avait estimé -il n'était pas le seul- que l'opinion n'y était pas prête.

M. Paul Girod. - La majorité de droite du Sénat l'avait votée.

M. Jean-Pierre Sueur. - C'est vrai, mais vous avez eu tellement d'occasions depuis !

M. Paul Girod. - Vous aussi !

M. Jean-Pierre Sueur. - Sans doute, nous avons renoncé collectivement. L'occasion se représentera-t-elle ? On hésite toujours, parce qu'il y a toujours des élections : il faut donc s'y prendre au début d'une législature ...

M. Paul Girod. - C'est vrai pour toutes les réformes !

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'en viens aux dotations. Je m'inquiète comme beaucoup de l'écart croissant entre l'enveloppe normée, indexée sur l'inflation, et la DGF, indexée sur l'inflation plus la moitié de la progression du PIB.

Madame le ministre, comment pensez-vous maintenir ce dispositif ? M. Mercier a été tout à fait éloquent sur ce sujet. Il est impossible de préserver une enveloppe normée indexée sur l'inflation contenant une DGF, d'un montant important, indexée, elle, sur l'inflation et 50 % de la progression du PIB. Je crains que le système ne porte en germe l'indexation de la DGF sur la seule inflation. Si tel était le cas, cela posera un réel problème à un certain nombre d'élus locaux.

Il faut aussi réfléchir à la logique du dispositif des dotations de compensation. Tous les gouvernements se sont montrés très imaginatifs pour créer des dotations de compensation. Au début, c'est magnifique : la main sur le coeur, les ministres assurent que l'ajustement se fera à l'euro près. Le temps passe, et la compensation n'est pas au rendez-vous.

Il serait utile de retracer l'histoire de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) -je suis sûr que les éminents esprits de la Direction générale des collectivités locales seraient à même de le faire (sourires.)- censée compenser les réductions de taxe professionnelle décidées par de nombreux gouvernements. Cette dotation est devenue une variable d'ajustement : une fois les additions faites, on regarde le solde et on le met dans la DCTP ! Il en résulte une baisse de 22 %. On peut dire à certaines collectivités que les dotations progressent et, éventuellement, que la DSU augmente, mais tous calculs faits, les collectivités réalisent qu'avec une DCTP en diminution de 22 %, l'Etat reprend d'une main largement plus qu'il ne donne de l'autre...

Il est indispensable de réformer en profondeur la fiscalité locale, ainsi que les dotations de l'Etat aux collectivités locales. L'édifice est complexe et difficilement compréhensible -sauf peut-être pour les éminents esprits de la DGCL... Si l'on s'en tient à la seule DGF, ce système n'est pas péréquateur. Cela relève de la logique même de la dotation forfaitaire, à laquelle de nombreux élus tiennent cependant, qui n'est pas péréquatrice puisque le principe est de donner autant que l'année précédente, dans les limites de l'épure et des évolutions générales.

Parmi les trois éléments qui composent la dotation dite de péréquation, la dotation d'intercommunalité pose beaucoup de problèmes. Celle-ci augmente, mais il ne suffit pas d'être dans une logique d'intercommunalité pour être riche ou pauvre. Les deux cas existent. La place prise par la dotation d'intercommunalité, qui n'est péréquatrice que marginalement, aboutit quasi mécaniquement à ce que les dotations de développement rural et la dotation de solidarité urbaine (DSU) ne constituent plus qu'un reliquat une fois les obligations des dotations forfaitaire et d'intercommunalité satisfaites.

Quant à la dotation de développement rural ou la dotation de solidarité rurale, si elle est bénéfique aux 32 000 très petites communes, l'éparpillement des crédits est tel que sa dimension péréquatrice est très faible.

M. Thierry Repentin.  - Eh oui !

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Repentin est expert en la matière ! Il ne manquera pas de nous expliquer le triste sort de la DSU si tel ou tel amendement était adopté ou si le texte était voté en l'état...

Madame le ministre, nous ne pouvons en rester là ; il faut engager une réforme du dispositif qui ne privilégie pas l'acquis mais donne toute sa place à la solidarité. Je regrette que la proposition de loi présentée par François Marc n'ait pas été adoptée. Si elle n'allait pas assez loin dans le sens de la péréquation, rien n'empêche la majorité du Sénat d'en proposer une autre, plus satisfaisante.

Chaque fois qu'il y a des événements douloureux, tels ceux qui ont eu lieu en banlieue récemment, tout le monde s'accorde à dire qu'il faut donner davantage de moyens aux quartiers et aux villes en difficulté. Or chacun sait également que les ressources ne sont pas proportionnelles aux charges des communes. Les financements doivent être accrus et mieux répartis. Cela suppose un changement de la fiscalité, de l'autonomie locale, de la péréquation et de la dotation puisque l'Etat est le premier contribuable des collectivités locales.

Madame le ministre, allez-vous lancer ces réformes avec tout le souffle, la détermination et l'enthousiasme nécessaires ? (Applaudissements sur les bancs socialistes.)

M. Philippe Dallier.  - Je vais me livrer à un exercice périlleux : à la fois rassurer M. Sueur sur l'évolution de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et convaincre Mme le ministre de faire un effort supplémentaire en faveur de cette dotation. (Rires et applaudissements à droite.) On jugera aux résultats : attendez avant d'applaudir !

L'examen de cette mission me donne l'occasion de revenir sur la réduction de l'augmentation de la DSU. Il ne s'agit pas d'une diminution de la dotation, comme l'affirment certains élus qui oublient d'adopter l'attitude responsable qui sied aux élus de la République sur un sujet aussi sensible. Ce budget 2008 limite l'augmentation de cette dotation à environ 90 millions d'euros, soit 10 % de moins que l'an passé. Et pourtant, lors de l'examen du plan de cohésion sociale, fin 2004, les ministres Jean-Louis Borloo et Marc-Philippe Daubresse ont proposé, défendu, voire « vendu » au Parlement, au bon sens du terme, le doublement de la DSU en cinq ans, de 600 millions à 1,2 milliard d'euros, soit une augmentation de 120 millions d'euros par an. Le cas des villes les plus emblématiques de la politique de la ville a alors souvent été évoqué ainsi que les sommes importantes dont elles allaient ainsi bénéficier.

Les comptes rendus de nos séances nous le rappellent. Le 27 octobre 2004, Jean-Louis Borloo nous a dit : « Nous faisons un effort majeur avec le doublement de la DSU, et un fléchage précis pour que ces villes qui supportent de lourdes charges socio-urbaines, ces villes où vivent beaucoup de familles très nombreuses, parfois en perte de repères, reçoivent plus de moyens que les autres, plus vite, pendant cinq ans. » Le 4 novembre 2004, Marc-Philippe Daubresse affirmait avoir « trouvé le moyen d'obtenir un effet multiplicateur tout en assurant la pérennité du dispositif, puisque nous garantissons, pour les cinq années à venir, une visibilité financière à nos communes : celles-ci pourront, enfin, connaître le montant de DSU sur lequel elles pourront compter [...]. Notre système permet de garantir les montants sur une période de cinq ans. » C'était net, clair, frappé au coin du bon sens, et répondait à l'attente des élus locaux concernés.

Equité, pérennité, visibilité, tels étaient les principes de cette réforme, réaffirmés à de nombreuses reprises. Il y avait bien un engagement fort de l'Etat, et pas seulement une vague promesse, quant au doublement de la DSU. Quelle alternative s'offre aujourd'hui à nous ? Tenir l'engagement moral de l'Etat vis-à-vis des collectivités les plus en difficulté ou bien nous retrancher derrière la disposition limitant la hausse de la DSU si la progression de la DGF est inférieure à 500 millions d'euros ? D'ailleurs, la disposition qui nous pose problème aujourd'hui fut introduite par voie d'amendement parce que certains craignaient des temps plus difficiles en matière de dotations. Au cours du débat, Marc-Philippe Daubresse nous avait rassurés en nous rappelant que, sur les dix années précédant 2004, la DGF avait progressé de 2,3 % et que le plancher des 500 millions d'euros ne créerait pas de difficultés. C'était sans compter l'impact d'une forte régularisation négative de la DGF.

Aujourd'hui, nous sommes contraints de choisir entre l'esprit de la loi et la rigueur du texte. Jusqu'au débat sur le financement des collectivités locales du 27 novembre dernier, j'espérais qu'une solution serait trouvée. Bien que notre rapporteur général ait tenté de résoudre la quadrature du cercle de la limitation à 1,6 % de la progression de l'enveloppe normée et de ses conséquences sur les variables d'ajustement, nous ne pouvions trouver les moyens nécessaires au respect de l'engagement moral de l'Etat. La balle est donc maintenant dans le camp du Gouvernement. Le manque à recevoir se chiffrera à deux ou trois cents mille euros pour les communes les plus pénalisées. Certains penseront peut-être que ce n'est pas grand-chose en pourcentage de leur DSU, mais c'est une somme importante, en valeur absolue, pour des villes de 30 000 à 50 000 habitants supportant de lourdes charges sociales. Quelle confiance ces collectivités pourraient-elles alors avoir en la parole de l'Etat qui les a engagées dans de très lourds projets de rénovation urbaine sans leur donner les moyens promis ? Le nécessaire pacte de confiance entre l'Etat et les collectivités locales est en jeu. C'est pourquoi, madame le ministre, je fais appel à la ténacité qui vous caractérise pour décrocher l'arbitrage qui nous permettrait de revenir à la progression annuelle de 120 millions d'euros.

Il nous faut toutefois envisager que la clause de limitation de la progression de la DSU s'applique et corriger les effets pervers de ce texte, pourtant adopté à l'unanimité, qui risque de pénaliser les villes les plus pauvres.

M. Thierry Repentin. - Pas si nous trouvons 30 millions !

M. Philippe Dallier. - Je défendrai un amendement dans ce sens, ainsi qu'un amendement de repli, cosigné avec M. Pierre André, qui prolonge jusqu'en 2010 la garantie de progression de la DSU.

Je sais la difficulté que représente le bouclage du budget, mais la DSU et les crédits de la politique de la ville ne peuvent pas servir de variable d'ajustement ! (M. Repentin approuve ; applaudissements à droite)

M. Thierry Repentin. - Particularité de cette mission, l'État n'est maître de la répartition que de 25 % de ses crédits. En réalité, ce n'est pas une mais plusieurs missions et actions, disséminées dans toute la loi de finances, qui déterminent les relations entre l'État et les collectivités territoriales. Or, plusieurs décisions récentes, prises sans concertation, plongeront nombre de collectivités dans le rouge. Je reviendrai dans la discussion des amendements sur la baisse annoncée de la progression de la DSU, en contradiction avec le mécanisme prévu par la loi Borloo, les annonces gouvernementales et surtout avec la situation des banlieues...

Votre Gouvernement manifeste à l'égard des collectivités une défiance bien contraire à l'idée que je me fais du pacte républicain. L'article 60 du projet de loi de finances augmente ainsi les cotisations salariales des collectivités pour abonder le Fonds national d'allocations logement, en faisant l'impasse sur les négociations pourtant promises par M. Copé l'an dernier. Cette nouvelle taxe, qui intervient après le transfert des agents des DDE et des personnels TOS, n'a fait l'objet d'aucune évaluation. Elle coûterait pourtant 65 millions aux collectivités dès l'an prochain.

La dotation départementale d'équipement des collèges et la dotation régionale d'équipement scolaire seront dorénavant soumises à la norme d'évolution « zéro volume ». Vous avez même accepté l'amendement de la commission des finances qui d'indexe leur évolution sur la seule inflation, ce qui entraînera pour 2008 une perte de 13 millions pour les collectivités concernées ! Pensez-vous ces mesures de nature à renforcer la confiance mutuelle entre l'État et les collectivités ?

Cette confiance s'effrite aussi à cause des attitudes locales des services déconcentrés, notamment envers les collectivités trop modestes pour assurer seules leurs missions en matière d'administration du droit des sols ou de maîtrise foncière, et qui peinent à obtenir l'aide de la DDE, malgré le rappel de ses obligations légales. Nous interpellons régulièrement le Gouvernement sur ces transferts de charges déguisés, cette défausse permanente.

C'est dans le budget de l'État que se trouvent les racines du mal : moins de personnels, moins de moyens d'intervention, moins de disponibilité... Je comprends votre tentation de rogner sur ces dépenses, qui semblent bien cachées, mais qui fondent la crédibilité de l'État sur les territoires ! Ainsi, dans l'action « soutien aux collectivités locales dans le cadre des contrats de projet 2007-2013 », l'État engage 12,29 millions pour répondre à la crise du logement de la région capitale -mais n'inscrit aucun crédit de paiement ! S'agissant du « soutien aux politiques locales foncières, de planification et d'aménagement », l'État, qui faisait déjà peu, ne fera plus rien du tout ! Le budget des agences d'urbanisme, financées à 90 % par les collectivités, n'augmente qu'en apparence, la dotation globale ayant baissé de 10 % en 2007 et quatre nouvelles agences étant prévues pour 2008...

Mme Boutin aura beau s'époumoner pour affirmer à qui veut l'entendre que l'État fera respecter la loi SRU et que les maires bâtisseurs seront encouragés, le bleu budgétaire nous éclaire sur la stratégie réelle de l'État : mettre les territoires en concurrence avant d'arrêter la répartition des crédits... Voilà qui rappelle « l'organisation de le concurrence », illustrée par la dizaine d'appels à projets lancés depuis 2002 par la Diact, dont l'un a mobilisé pendant trois mois, dans l'urgence, les équipes d'une cinquantaine d'agglomérations, avant d'être purement et simplement suspendu, sans raison. N'est-ce pas là encore une marque de défiance, voire de mépris ?

Je ne sais s'il faut souhaiter, comme M. Mercier, la fin de cette mission ; mais sans révolution en la matière, les inégalités continueront de se creuser sur nos territoires ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.  - (Applaudissements à droite) Je souhaite une relation de confiance entre l'État et les collectivités locales. Parce que je suis moi-même à la fois élue locale et membre du Gouvernement, je sais qu'elle suppose un partenariat de confiance affirmé, un effort de solidarité confirmé, la garantie d'une meilleure visibilité pour les collectivités. Les collectivités n'aggravent pas la dette globale, je vous en donne acte, monsieur Puech. Mais elles génèrent aussi des dépenses pour l'État : ce que l'État donne aux collectivités territoriales représente un quart du budget ! Nous avons tous intérêt à éviter les présentations simplistes et démagogiques : mettre sur pied un partenariat nouveau, c'est se dire la vérité.

M. Doligé souhaite agir à livre ouvert : cela a toujours été ma démarche. Il est dans l'intérêt du Parlement comme du Gouvernement de regarder, avec réalisme, comment les budgets sont consommés. Je suis d'accord pour étudier tous les chiffres avec votre commission des finances.

C'est dans cet esprit que le Gouvernement a mis en place la Conférence nationale des exécutifs, qui réunira les trois principales associations d'élus locaux pour préparer l'élaboration des textes, notamment communautaires, ayant un impact sur les collectivités territoriales. Un point d'actualité sera systématiquement inscrit à son ordre du jour. Dans la même logique, j'ai proposé de créer auprès du Comité des finances locales une commission chargée de suivre tous les textes d'origine gouvernementale qui peuvent avoir des conséquences financières pour les collectivités.

C'est ainsi que l'on mettra fin aux dérives de ces dernières années. En outre, il est évident que certaines normes ont accru les charges des collectivités.

Le partenariat de confiance se manifestera également dans le fait que l'État tiendra ses engagements sur la décentralisation. Constitutionnellement, les transferts de compétences doivent être compensés par des transferts de financement qui sont calculés en fonction de ce que l'État déboursait auparavant. Il est vrai que les compétences entraînent souvent, ensuite, des besoins de financement supplémentaires : c'est tout le problème. Le Gouvernement a cependant proposé des mesures qui démontrent sa volonté de soutenir les collectivités. Nous avons déposé la semaine dernière un amendement pour corriger les fractions de TIPP et la taxe sur les conventions d'assurance afin de tenir compte le plus rapidement possible des choix des agents ayant tardivement opté pour la fonction publique territoriale. Dans le même esprit, je proposerai un amendement pour augmenter la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du fait des dernières données disponibles sur les transferts des personnels fondés sur le volontariat des collectivités, notamment en ce qui concerne les monuments historiques.

Si nous voulons instaurer un partenariat de confiance, il faut dépasser les malentendus qui marquent depuis trop longtemps les relations entre l'État et les collectivités.

M. Mercier estime que l'État gagne 1 milliard en gérant le compte d'avances. Je ne veux pas entrer dans ce débat d'experts mais je crois que nous sommes parvenus à un équilibre. Les collectivités sont dans leur ensemble satisfaites de l'avance que leur fait l'État en versant la fiscalité locale par douzièmes, en contrepartie du dépôt des fonds libres au Trésor.

La réforme de la fiscalité locale, dont je fais une priorité, devra également permettre d'apporter davantage de lisibilité aux contribuables et de responsabilité aux élus locaux dans la fixation de l'impôt. M. Sueur m'a dit qu'aucun ministre n'avait osé une réforme fiscale depuis quarante ans. C'est sans doute que vous attendiez une femme ! (Rires et applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je ne demande qu'à voir !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Il s'agit d'arbitrer entre des intérêts divergents.

Je ne sais s'il faut, ou non, supprimer la mission « Relations avec les collectivités territoriales » qui reflète l'effort de solidarité de l'État envers les collectivités les plus défavorisées. Le contrat de stabilité évoluera en fonction de l'inflation, comme pour l'État. Les dépenses en faveur des collectivités représentent un quart du budget de l'État, madame Mathon-Poinat : il est donc normal que les collectivités subissent le même régime, à l'exception de celles qui sont en difficulté.

Les collectivités les plus défavorisées bénéficieront en effet du maintien de la progression de la DGF en dépit de l'enveloppe normée. En tant qu'élue locale, je sais que si l'on diminue une partie des ressources trois mois avant un nouveau budget, la situation devient ingérable. J'ai obtenu cette décision pour 2008, monsieur Sueur, mais pour 2009, je ne puis vous répondre. Dès le début de l'année prochaine, le Gouvernement travaillera avec les élus locaux sur l'indexation de ces dotations. Ce sera un des objectifs de la Conférence nationale des exécutifs.

La DSU réservée aux collectivités les plus défavorisées progressera au moins de 90 millions, ce qui permettra à la dotation de dépasser le cap du milliard. Je sais très bien que le montant de la DSU préoccupe les maires qui ont des quartiers difficiles. M. Dallier estime que cette augmentation est insuffisante. Le Comité des finances locales, au sein duquel le Sénat est représenté, peut aller au-delà de la progression minimale, s'il le souhaite. En outre, le projet de loi de finances rectificative augmentera la DGF de 41 millions supplémentaires dont le CFL décidera l'affectation en février.

Voici quelques chiffres, qui montrent l'effort important de l'État en faveur des communes en grande difficulté : entre 2004 et 2007, la DSU perçue par Villiers-le-Bel a doublé.

M. Thierry Repentin.  - Ce n'était pas suffisant !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - On peut parler de 2002 si vous le souhaitez. La ville de Sarcelles bénéficiait de moins de 4 millions en 2004 et de plus de 14 millions trois ans plus tard. Cet effort ne sera pas interrompu l'an prochain.

Je sais bien que l'on peut toujours faire mieux, mais ceux qui le prétendent sont en général ceux qui ne votent pas les budgets... On ne peut pas à la fois demander des économies et davantage de crédits. Votre amendement sur la garantie attribuée à certaines communes retient toute mon attention, monsieur Dallier. (Exclamations sur les bancs socialistes)

Mais il faut aussi tenir compte des petites communes et des communes rurales. La croissance de la DGF rendra possible un effort soutenu en leur faveur, grâce à l'augmentation de 9,5 % de la DSR. Cette dotation, comme la dotation de fonctionnement minimale (DFM) des départements, prend notamment en compte la situation des communes et départements de montagne qui bénéficieront ainsi d'une majoration de leur DGF.

Les dotations d'équipement, incluses dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales » augmenteront de +2,6 %, soit le taux d'investissement des administrations publiques. C'est un effort conséquent de l'État en faveur de l'investissement des collectivités rurales.

Enfin, au titre de la solidarité, j'essaye de prendre en compte la réalité du terrain avec le fonds pour les collectivités victimes de catastrophe naturelle. Ce fonds, destiné à la réparation des dégâts causés sur les biens non assurables des collectivités, est doté de 20 millions pour répondre aux sinistres localisés ou d'ampleur limitée.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Et il est prélevé sur la DCTP !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Bien entendu, au titre de la solidarité nationale, l'État continue d'assurer toutes ses responsabilités. Si des tempêtes comme celles de 1999 devaient se reproduire, l'État sera toujours là pour aider les communes sinistrées.

La visibilité est essentielle pour les collectivités comme pour nos concitoyens. M. Mercier propose de supprimer cette mission parce qu'elle serait redondante avec le débat sur les collectivités locales qui a lieu en première partie de la loi de finances. Il est vrai que j'ai parfois le sentiment de me répéter et que cette mission ne retrace qu'une faible partie de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités. Néanmoins, conserver une mission spécifique pour les collectivités territoriales dans le budget de l'État me paraît utile : il est plus lisible pour un non-spécialiste d'identifier ainsi les crédits que l'État consacre aux collectivités.

Au-delà de cet aspect strictement budgétaire, les Français veulent comprendre l'action publique.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - C'est vrai !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Monsieur Sueur, 78 % des Français ne souhaitent pas, comme l'a démontré un sondage réalisé à l'occasion de la réunion des maires de France, une nouvelle étape de la décentralisation. Ils veulent une pause pour savoir qui fait quoi. Le rapport que M. Lambert a établi dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, et qui sera remis vendredi au Premier ministre, a été l'occasion pour tous les acteurs concernés de débattre de façon constructive et de proposer des pistes pour clarifier les compétences de chaque collectivité. Donner aux collectivités plus de visibilité suppose également que l'État prenne mieux en compte l'impact de sa réglementation, d'où la mise en place de la commission consultative sur l'évaluation des normes, créé au sein du CFL.

Comme l'a souligné le récent rapport de la Cour des comptes sur Les aides des collectivités territoriales au développement économique, les dispositifs d'aides sont bien complexes et certains d'entre nous voudraient bien simplifier les compétences entre les régions et les départements. Mais si une région n'est pas très active en matière économique, faudra-t-il que le département ne soutienne pas ses entreprises ? Soyons donc lucides : les choses ne sont pas si simples. Refusons une approche technocratique tranchant à la hache dans les compétences.

J'ai essayé de répondre à vos questions ; n'hésitez pas à me demander par écrit des précisions, si vous le souhaitez.

Je souhaite que les relations entre l'État et les collectivités puissent être marquées par une confiance réciproque, une solidarité envers les collectivités en difficulté et une lisibilité accrue pour le citoyen. Voila quels sont mes objectifs et ceux du Gouvernement. (Applaudissements à droite)

Examen des crédits

Article additionnel

M. le Président. - Amendement n°II-138, présenté par M. Martin.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - A compter du 1er janvier 2008, il est opéré une réfaction sur la dotation générale de décentralisation de la région Picardie et un abondement à due concurrence de la dotation générale de décentralisation du département de la Somme, à hauteur de 441 718 euros en valeur 2007, indexés sur le taux de la dotation globale de fonctionnement pour 2008, au titre du transfert de propriété de la région au département, intervenu le 1er novembre 2006 en application du dernier alinéa du III de l'article 32 de la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, des voies navigables dont les compétences d'aménagement et d'exploitation avaient été transférées à la région par le décret n°92-648 du 8 juillet 1992, pris en application de l'article 5 de la loi n°83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État.

II -  La perte de recettes pour les régions est compensée à due concurrence par le prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation des exonérations relatives à la fiscalité locale.

III. - La perte de recettes pour l'État du fait de l'abondement de dotation globale de fonctionnement des régions est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement n°II-137, présenté par M. Martin.

Modifier comme suit les crédits des programmes (en euros) :

Concours financiers aux régions :

AE réduire de 450 917

CP réduire de 450 917

Concours financiers aux départements :

AE majorer de 450 917

CP majorer de 450 917

L'amendement n°II-138 doit être examiné avant le n°II-137 qui en tire la conséquence financière. M. le rapporteur pour avis va les présenter.

M. Michel Mercier, rapporteur pour avis.  - Ces amendements proposent une simple clarification des compétences, entre la région picarde et le département de la Somme, lequel, devenu propriétaire du canal de la Somme, obtiendra le versement direct de la dotation générale de décentralisation. C'est sans conséquence sur le montant de celle-ci.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Ces amendements proposent une vraie clarification qui est budgétairement neutre. J'en souhaite l'adoption après suppression du gage.

L'amendement n°II-138 rectifié est adopté, ainsi que le n°II-137.

M. le Président. - Amendement n°II-132, présenté par le Gouvernement.

Modifier comme suit les crédits des programmes (en euros) :

Concours financiers aux communes et groupements de communes :

AE + 162.930

CP + 162.930

Concours financiers aux départements

AE + 4.604.030

CP + 4.604.030

Concours financiers aux régions :

AE + 18.950.900

CP + 18.950.900

Concours spécifiques et administration :

AE + 1.011.708

CP + 1.011.708

TOTAL

AE 24.729.568

CP 24.729.568

SOLDE

AE +24.729.568

CP +24.729.568

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Il s'agit là de quatre ajustements techniques. Le premier concerne l'ouverture de 18,8 millions sur la dotation générale de décentralisation des régions d'outre-mer inscrite au programme 121, au titre du droit à compensation des transferts de compétences intervenant en 2008 dans le cadre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Il s'agit essentiellement de la compensation du transfert des personnels ouvriers et techniciens de service de l'éducation nationale et des agents du ministère de l'équipement. Ce montant est gagé par l'annulation des crédits correspondants sur les programmes des ministères qui supportaient jusqu'à présent la dépense transférée. Les transferts de compétence qui intéressent les régions d'outre-mer sont compensés via un abondement de leur DGD et non, comme c'est le cas des régions de métropole, par transfert de TIPP, cette taxe n'étant pas en vigueur sur ces territoires

Le deuxième ajustement ouvre 987 631 euros gagés par l'annulation du même montant en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 175 de la mission Culture, au titre de divers transferts de crédits d'entretien et de fonctionnement des monuments historiques au bénéfice de divers niveaux de collectivités territoriales.

En troisième lieu, sont ouverts, sur le programme 120 près de 3,9 millions au titre du transfert aux collectivités territoriales d'agents de l'équipement qui étaient auparavant mis à leur disposition dans le cadre des lois du 11 octobre 1985 et du 2 décembre 1992. Ce mouvement est gagé par l'annulation des crédits correspondants sur le budget du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

Enfin, l'amendement ouvre 1 million sur le programme 122, au titre du transfert des ports maritimes, en application des articles 30 et 121 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Ce mouvement est gagé par l'annulation des crédits correspondants sur le budget du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Favorable : c'est la stricte application du droit de la décentralisation.

L'amendement n°II-132 est adopté.

Les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sont adoptés.

Les crédits du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales » sont adoptés.

Articles rattachés

Article 48

Le chapitre III du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L'intitulé est ainsi rédigé : « Dotation globale de fonctionnement et autres dotations » ;

2° Il est inséré une section 1, intitulée : « Dotation globale de fonctionnement », comprenant les articles L. 1613-1 à L. 1613-5 ;

3° Il est ajouté une section 2 ainsi rédigée :

« Section 2

« Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles

« Art. L. 1613-6. - Il est institué un fonds de solidarité en faveur des communes de métropole et de leurs groupements ainsi que des départements de métropole afin de contribuer à la réparation des dégâts causés à leurs biens par des événements climatiques ou géologiques graves.

« Ce fonds est doté de 20 millions d'euros par an, prélevés sur la dotation instituée au IV de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986). Ce montant évolue chaque année, à compter de 2009, comme la dotation globale de fonctionnement.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. Il précise notamment la nature des biens pris en compte, les règles relatives à la nature et au montant des dégâts éligibles aux aides du fonds et aux critères d'attribution de ces aides ainsi que les différents taux de subvention applicables. »

M. Jacques Blanc. - Cet article pose un problème sur lequel je reviens régulièrement au risque de lasser.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Non, non, nous aussi sommes pour l'aplanissement des montagnes ! (Sourires)

M. Jacques Blanc. - Lorsque, il y a trois ans, on a remplacé le potentiel fiscal par le potentiel financier, on n'a pas fait de projection. La commission présidée par M. Jean François-Poncet avait posé la question sans obtenir de réponse. Alors j'interpelle la commission et le Gouvernement...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Surtout le Gouvernement !

M. Jacques Blanc. - ... sur ce qui s'est passé depuis. Évidemment, l'élu de la Lozère que je suis serait mal venu de se plaindre. Vous me rappelleriez...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - ... l'importance de vos dotations.

M. Jacques Blanc. - Est-il logique d'ajouter au potentiel fiscal la dotation attribuée pour prendre en compte la gestion de l'espace ? Nul ne peut nier que nous avons des missions particulières qui ont un coût particulier. N'est-il pas l'heure de se demander si cela n'a pas des conséquences inaperçues ?

Je remercie en tout cas le président de la commission qui, quand il s'est agi de compenser l'exonération de la taxe sur le foncier non bâti, a accepté mon sous-amendement pour qu'on n'applique pas cette notion de potentiel financier aux budgets de ces départements.

Je ne défends pas que la montagne.

M. Éric Doligé. - Mais non ! (Sourires)

M. Thierry Repentin. - Pourtant, elle le mérite.

M. Jacques Blanc. - Mais aussi tous les acteurs du développement durable. Car la montagne...

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - ... est en haut. (On s'amuse)

M. Jacques Blanc. - ... apporte une respiration à l'ensemble du pays.

M. le Président. - Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur le rapporteur spécial ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Non. C'est parfait. Attendons l'année prochaine.

M. le Président. - Amendement n°II-123, présenté par M. Massion et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Sueur. - Je remercie madame la ministre pour son propos sur l'indemnisation de la sécheresse de 2003. Je ne puis, hélas, poursuivre sur le même ton quand je vois la suppression que contient cet article. L'intention en est certes généreuse mais la DCTP est en fâcheuse posture puisqu'on l'a amputée de 200 millions.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Nous avons corrigé cela.

M. Jean-Pierre Sueur. - On va affecter 20 millions aux catastrophes naturelles. Si l'État les avait abondés, nous eussions été satisfaits ; mais on continue à ratiboiser cette malheureuse DCTP. Les choses eussent pu s'arrêter là mais j'ai regardé le programme 122 « aide exceptionnelle aux collectivités territoriales ».

Quelle ne fut pas ma surprise ! Il revient de 127,5 à 2,9 millions : vous réduisez les crédits de 124,6 millions.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Cela va s'arranger...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je serais fort étonné que quelqu'un votât l'article en l'état.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial. - Nous restons sur la réserve.

M. le président.  - Amendement n°II-12, présenté par M. Mercier, au nom de la commission des finances.

A. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales, après les mots :

départements de métropole

insérer les mots :

et des régions de métropole

B. - Pour compenser la perte de recettes éventuelle résultant, pour les communes, du A ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II. La perte de recettes éventuelle, pour les communes, résultant du bénéfice, par les régions, du fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles, est compensée par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement des communes.

La perte de recettes éventuelle pour l'Etat résultant du paragraphe précédent est compensée par la majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

C. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I. -

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Il est bon que les régions entrent dans le champ d'application de cet article même si cela reste purement théorique.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il n'y a pas de sous !

M. le président.  - Amendement n°II-120 rectifié bis, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC.

I. - Remplacer le deuxième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ce fonds est doté de 200 millions d'euros prélevés sur le produit de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance définie à l'article 991 du code général des impôts.

« Ce montant évolue chaque année, à compter de 2009, comme la dotation globale de fonctionnement. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

Les pertes de recettes résultant pour l'État de la modification du 3° de l'article L. 1613-6 du présent code sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Marie-France Beaufils.  - L'article partait de bonnes intentions, mais que de défauts ! Premièrement, il est anecdotique, ses 20 millions ne sont pas à la hauteur des besoins. Et si un cyclone frappait un département d'outre-mer ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - C'est déjà couvert.

Mme Marie-France Beaufils.  - Vous me direz si j'ai fait une erreur d'analyse mais je ne crois pas me tromper en citant un glissement de terrain en métropole dans un département de montagne...

M. Thierry Repentin.  - Ha !

Mme Marie-France Beaufils.  - Comment prendre en charge les travaux sur le réseau routier ? Or nous avons connu des situations difficiles comme en 2003. La faiblesse du fonds le fragilise.

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs est doté de 50 millions et le dernier collectif prévoit 218,5 millions pour indemniser les victimes de la sècheresse 2003. Le fonds devrait avoir des moyens suffisamment amples pour faire face à de telles situations.

Nous ne pouvons être d'accord pour qu'on sollicite la DCTP qui sert décidément à tout. Elle est déconnectée des bases imposables qu'elle est censée compenser : aller plus loin serait la faire mourir. L'allègement des bases imposables prive les collectivités de 6 milliards de ressources et elles doivent se contenter d'une compensation transformée en variable d'ajustement et qui ne s'élève qu'à 801 800 000 euros. Comment financer des travaux d'investissement avec des ressources de fonctionnement ? Il est bien préférable de solliciter la taxe sur les compagnies d'assurances, en partie partagée par l'Etat et les collectivités locales

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-123 pour les raisons qu'on a bien comprises. (M. Sueur s'étonne) Même avis sur l'amendement n°II-120 rectifié bis.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-123. La création du fonds n'empêchera pas la solidarité nationale de continuer à s'exercer : il s'agit d'indemniser de petites catastrophes qui n'étaient pas couvertes jusqu'ici par les procédures habituelles, qui demeurent.

Je ne vois aucun inconvénient à inclure les régions comme le demande l'amendement n°II-12, même si leur patrimoine est peu concerné ; en revanche, mieux vaut lever le gage.

M. le président.  - Ce sera donc l'amendement n°II-12 rectifié.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - L'amendement n°II-120 rectifié bis décuplerait le montant du fonds, ce qui serait disproportionné. Les cyclones comme la sécheresse restent couverts par les procédures actuelles : vous pourriez retirer votre amendement ; à défaut, j'y serais défavorable.

Mme Marie-France Beaufils.  - Je ne le retire pas car, si j'ai bien entendu vos explications -je vous écoute, contrairement à certains sur les bancs environnants...

M. Paul Girod.  - Ce n'est pas gentil pour les socialistes ! (Rires)

Mme Marie-France Beaufils.  - J'avais en commission posé la question de l'estimation de 20 millions, rien ne permettant de la déterminer. Puis il y a le financement sur la DCTP : la taxe sur les assurances serait préférable.

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'ai bien entendu la réponse de Mme la ministre mais quid des crédits inscrits au programme 122 ? Est-on revenu de 127,5 à 2,9 millions et où sont passés les 124,6 millions disparus ?

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - J'ai essayé de vous le dire : vous aurez votre réponse lorsque le Sénat votera sur le budget.

L'amendement n°II-123 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-12 est adopté.

L'amendement n°II-120 rectifié n'est pas adopté.

L'article 48, modifié, est adopté.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - J'appelle nos collègues à plus de concision dans la présentation de leurs amendements car il est 23 heures et nous devons encore examiner 14 amendements sur cette mission avant d'aborder la mission « Sécurité civile ». Or la Conférence des présidents a décidé que la discussion d'une mission ne pouvait commencer après minuit !

L'article 48 bis est adopté, ainsi que les articles 48 ter, 48 quater, 48 quinquies et 48 sexties

Article 48 septies

I. - La dotation globale de fonctionnement reversée à la collectivité territoriale et aux communes de Saint-Pierre-et-Miquelon prend en compte les contraintes spécifiques et les charges structurelles supportées par ces collectivités.

II. - Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport examinant la situation financière de la collectivité territoriale et des communes de Saint-Pierre-et-Miquelon et les conséquences des charges structurelles découlant de leur situation spécifique sur la détermination du montant des dotations de l'État.

M. le président. - Amendement n°II-134 rectifié, présenté par M. Detcheverry.

Dans le II de cet article, remplacer les mots :

six mois

par les mots :

trois mois

M. Denis Detcheverry. - La situation financière des collectivités locales de Saint-Pierre-et-Miquelon est grave. Leurs élus souhaitent donc que soit accélérée la réalisation du rapport examinant cette situation, ainsi que les conséquences des charges structurelles découlant de leur situation spécifique sur la détermination du montant des dotations de l'État.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Je comprends le souhait de notre collègue. Nous suivrons l'avis du Gouvernement.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Il est normal que les élus puissent être informés plus rapidement et je donnerai instruction en ce sens. Avis favorable.

L'amendement n°II-134 rectifié est adopté.

L'article 48 septies, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président. - Amendement n°II-142, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2008, le montant de la dotation globale de fonctionnement des communes est augmenté de 30 millions d'euros. »

II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Thierry Repentin. - L'évolution de la DSU met en lumière les inégalités existant entre, d'un côté, les communes urbaines aisées, et de l'autre les communes défavorisées, qui concentrent les difficultés, à l'image des inégalités entre les Français. Une faible activité a pour conséquence de faibles ressources fiscales, ce qui a pour effet d'accroître les difficultés des habitants. C'est pour mettre un terme à ce douloureux effet de boule de neige que la DSU, fruit d'un consensus républicain, a été créée.

Voilà qu'aujourd'hui le Gouvernement rompt ce consensus et s'asseoit sur les règles de répartition, qui prévoyaient une augmentation à concurrence de 120 millions ou une augmentation de 24 % de la DGF des communes. Le 25 septembre dernier, madame la ministre, vous annonciez une augmentation de la DGF de 463 millions ; la règle de 24 % aurait signifié une augmentation de 111 millions ; or, vous proposez 90 millions. Les engagements de la loi de cohésion sociale de 2005 ne sont pas au rendez-vous. La capacité d'intervention des communes les moins riches s'en trouvera encore diminuée. Avec la décentralisation, vous aviez posé les principes de l'autonomie des collectivités et de la péréquation. Aujourd'hui, le premier de ces principes étouffe le second car l'autonomie a créé des poches de richesse dans lesquelles certaines collectivités n'ont aucune intention de contribuer à l'effort commun en faveur des plus défavorisées. Le principe de péréquation ne connaît donc aucune traduction réelle.

Rien ne permet d'affirmer que la situation des banlieues s'est améliorée depuis 2005 ; au contraire, la désespérance y reste complète. Il ne suffit pas de multiplier les rapports sur la politique de la ville : les collectivités concernées ont besoin d'équipements publics et d'améliorations sociales. En cohérence avec les engagements pris, l'amendement vise donc à augmenter le montant de la DGF de 30 millions d'euros pour que la DSU croisse elle aussi de 120 millions d'euros. Il faut écarter le spectre d'un nouvel embrasement des banlieues

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Si cet amendement est adopté, il aura pour conséquence d'entraîner la baisse d'autres dotations, telles que la DCTP, ce que stigmatisait tout à l'heure M. Sueur ! Avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - La loi prévoit que le Comité des finances locales peut décider d'augmenter la DSU au-delà de la limite fixée : c'est donc à lui de décider. Avis défavorable.

M. Thierry Repentin. - Madame la ministre, j'en conclus que vous ne voyez pas l'intérêt d'augmenter la DSU...

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Je viens de dire qu'il était possible de le faire !

M. Thierry Repentin. - Je suis curieux de savoir ce qu'en pense la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Elle nous le dira vendredi.

M. Thierry Repentin. - À la fin du mois de janvier, elle doit annoncer les mesures de son plan Marshall des banlieues, alors que nous aurons déjà voté le budget. Autant dire que ses marges financières seront inexistantes et que sa politique devra être menée à fonds constants, par redéploiements. Elle risque de ne pas apprécier « à donf », pour employer son langage !

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Le groupe CRC est favorable à cet amendement. Les quartiers sensibles connaissent de grandes difficultés et vous les privez de la capacité d'intervention que permettrait une augmentation de la DSU. Cette augmentation était prévue, dans une certaine mesure, mais aujourd'hui vous jugez que ce n'est plus possible pour des raisons d'encadrement budgétaire plus strict.

Vous oubliez que les collectivités territoriales contribuent à la création de richesses alors que si l'État connaît des difficultés, les mesures fiscales prises cet été n'y sont pas pour rien !

Nous demandons une réflexion plus approfondie sur la péréquation. Dans ce but, le groupe CRC propose une révision de la base de la taxe professionnelle et la taxation à hauteur de 0,3 % des actifs financiers. Il existe également une autre possibilité pour augmenter le montant de la DSU, qui consiste à lui affecter une part de la taxe professionnelle versée dans le budget de l'État, soit 2,5 milliards.

M. Philippe Dallier. - J'aimerais que nous trouvions les 30 millions, mais on ne peut laisser dire n'importe quoi. monsieur Repentin, vous savez que les financements de l'Agence nationale de rénovation urbaine (Anru) ont été distribués aux maires de toutes les sensibilités politiques. Aucun n'a prétendu qu'ils ne représentaient rien. Je connais bien Claude Dilain, le maire de Clichy-sous-Bois. J'éprouve le plus grand respect pour lui, car, comme je le lui ai dit, je n'échangerais pour rien au monde ma place avec la sienne. Mais j'ai été surpris de l'entendre dire que rien n'avait été fait depuis 2005, car la DSU de sa commune sera passée de 1,9 million en 2004 à 8 l'année prochaine !

Malheureusement, nous ne pourrons atteindre notre but sans mettre à bas le château de cartes péniblement construit lors de la séance du 27.

L'amendement n°II-142 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°II-140 rectifié, présenté par MM. Pierre André et Dallier.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 2334-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2010, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale prévue à l'article L. 2334-15 est portée à1,2 milliard d'euros par un prélèvement prioritaire de la dotation globale de fonctionnement. »

M. Philippe Dallier. - D'après le plan de cohésion sociale, la DSU aurait dû atteindre 1 200 millions en 2008 contre 600 initialement. Cet objectif ne sera sans doute pas atteint même en 2009. Je propose donc de repousser le délai jusqu'en 2010.

J'ai rectifié l'amendement pour leur rendre plus explicite.

M. le président. - Amendement n°II-143, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 2334-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2010, la progression de la dotation globale de fonctionnement des communes et de leurs groupements est affectée en priorité, à hauteur de 24 % de l'accroissement constaté, à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale prévue à l'article L. 2334-15. »

M. Thierry Repentin.  - Il manquera cette année 30 millions au pacte républicain, mais les communes ne doivent pas être pénalisées.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Les deux amendements reviennent au même, puisqu'ils tendent à repousser jusqu'en 2010 une disposition temporaire applicables à la DSU.

Nous pourrions tous communier dans cette intention sympathique, mais sans effet en 2008. Faut-il ce soir engager les relations entre l'État et les collectivités territoriales à l'horizon de deux ans ?

Un double retrait m'éviterait de formuler un avis défavorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - L'objet des amendements est légitime. Toutefois, il est bon de dresser le bilan du dispositif avant de le proroger. Il faudrait associer le Comité des finances locales à l'évaluation. Je propose de revoir cette question en 2009, lorsque la loi de cohésion sociale arrivera à son terme.

M. Philippe Dallier.  - Il ne sera pas dit que je n'aurai pas tout essayé ! Un parlementaire de la majorité doit bien sûr être solidaire du Gouvernement, mais il doit aussi tirer la sonnette d'alarme.

Je regrette que cette majorité prenne un risque politique disproportionné à l'enjeu modeste de mon amendement, que je retire la mort dans l'âme. Il ne me semblait pas excessif d'annoncer que la DSU augmenterait de 30 ou 60 millions en 2010. C'est pourquoi j'espérais faire adopter cette disposition. Mais à l'impossible nul n'est tenu.

L'amendement n°II-140 rectifié est retiré.

M. Thierry Repentin. - M. Dallier a raison lorsqu'il évoque le risque politique pris en ne s'engageant pas à trouver 30 millions d'euros à l'échéance 2010, car 1 700 communes s'attendaient à ce que la DSU augmente de 120 millions.

M. Dallier a retiré son amendement, car il espère en faire adopter un autre. Mais un tiens vaut mieux que deux tu l'auras.

L'amendement n°II-143 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°II-125, présenté par Mme Printz et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 2334-16 du code général des collectivités territoriales est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« 3° Les communes dont la population est inférieure à 5 000 habitants, dont une partie de la population est située en zone urbaine sensible et qui font partie d'une agglomération de plus de 5 000 habitants. »

«  Les dispositions du 3° entrent en application le 1er janvier 2008. »

M. Jean-Pierre Sueur. - Ainsi, 16 communes comptant moins de 5 000 habitants pourraient bénéficier de la DSU.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Ces communes sont exclues de la DSU bien qu'elles soient situées en zone urbaine, car elles sont éligibles à la DSR. Un amendement identique a été présenté l'an dernier lorsque nous avons examiné la même mission, mais il a été retiré.

L'enveloppe de la DSU étant normée, cet amendement réduirait la dotation versée aux autres communes concernées par le dispositif ou nous obligerait à en faire sortir certaines.

Mieux vaudrait s'assurer que les inconvénients de cette disposition ne l'emportent pas sur ses avantages...

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - En effet, les communes concernées pourraient bénéficier d'autres instruments dédiés à la politique de la ville.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous ne souhaitons pas aggraver le triste état de la DSU.

L'amendement n°II-125 est retiré.

M. le président. - Amendement n°II-135, présenté par MM. Dallier et P. André.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 2334-18-2 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour l'année 2008, ce dernier taux est égal à la prévision d'évolution des prix à la consommation (hors tabac). »

II. - Dans le dernier alinéa du même article, les mots : « 2005 à 2009 » sont remplacés par les mots : « 2005 à 2007, et pour l'année 2009 ».

M. Philippe Dallier. - Les maires des grandes villes ont obtenu que la DSU augmente au minimum de 5 % pour tous, avec une hausse accrue pour les communes éprouvant les plus grandes difficultés. Mais cette garantie fonctionne que la hausse globale atteigne ou non 120 millions. Par suite, une progression moindre pénalise les villes les plus pauvres.

Pour les communes les moins en difficulté, mon amendement n'aura pas de conséquences importantes ; celles qui bénéficient le plus de la DSU y gagneront 100 000 à 150 000 euros au lieu d'en perdre 200 000 à 300 000.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Cet amendement ...

M. Thierry Repentin, rapporteur spécial.  - Qui gère la pénurie !

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - ... est d'équité. Il mérite d'être soutenu.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Je partage le souci de M. Dallier de renforcer la péréquation. Une garantie est apportée à toutes les communes, les plus démunies d'entre elles seront mieux servies. Avis favorable.

M. Thierry Repentin.  - L'amendement oblige les communes qui ont anticipé dans leurs plans d'investissement une dotation d'État en progression garantie de 5 % à revoir leurs projections financières. Pour certaines, ce sera facile. M. Puech n'aura à expliquer les choses qu'aux maires de Millau et de Rodez ; M. Paul Girod, aux édiles de Villers-Cotterêts, Tergnier et Château-Thierry. Il sera facile à Mme la ministre de donner les mêmes explications aux maires de Bayonne, d'Orthez ou de Pau -et même à certain candidat à la mairie de cette ville, qui a voté la progression garantie à 5 %- que la solidarité nationale, finalement, ne joue plus. M. Gérard Larcher, dans les Yvelines, devra expliquer à quelques élus, sans doute peu nombreux, que des dizaines de milliers d'euros se sont évaporés.

Mais comment les choses se passeront-elles dans de grands départements urbains, comme celui du rapporteur spécial, à Villeurbanne, à Tarare, à Meyzieu ? Les marges y sont-elles si importantes, monsieur le président ?

M. le président.  - Certes non !

M. Thierry Repentin.  - Mme la ministre chargée de la ville devra expliquer à plus de trois cent quatre vingts communes que l'amendement est opportun ....

Dans mon département, deux communes sont concernées, Albertville et Aix-les-Bains ; j'aurais plaisir à voter l'amendement, leurs maires ne m'apporteront jamais leur soutien...

La République s'est engagée, la loi a fixé les règles du jeu ; on ne peut les modifier en cours de route. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Voilà une intervention qui fait mal !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Mais non !

Mme Marie-France Beaufils.  - N'ayons pas une vision manichéenne de la DSU en distinguant entre communes plus riches ou plus pauvres. Il est de communes éligibles à la DSU dont la DCTP régresse. Que se passera-t-il pour elles ? S'il y a des aménagements à apporter, mieux vaut s'intéresser aux critères de mise en oeuvre de la DSU : certaines communes en bénéficient sans même avoir l'obligation de construire 20 % de logements sociaux.

L'amendement n°II-135 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-117 rectifié, présenté par MM. Leroy, César, Houel, Detcheverry, Fournier, Laménie, Milon, Dufaut et Cambon et Mmes Mélot et Procaccia.

Après l'article 48 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - I. - L'augmentation de la dotation d'aménagement résultant, pour 2007, de la deuxième phrase du onzième alinéa de l'article L. 2334-7 est prélevée, pour 2008 au profit des communes répondant cumulativement aux critères suivants :

« - La dotation forfaitaire, le montant cumulé de la dotation de solidarité urbaine, de la dotation de solidarité rurale et de la dotation nationale de péréquation et le complément de garantie sont chacun inférieur par habitant à 70 % de la moyenne des communes de leur strate démographique ;

« - Le potentiel financier par habitant et le revenu par habitant sont, chacun, inférieurs à la moyenne de leur strate démographique ;

« - L'effort fiscal est supérieur à la moyenne de la strate démographique.

« II. - Le prélèvement mentionné au I est réparti proportionnellement à la population des communes concernées.

« III. - A compter de 2009, ce montant évolue comme la dotation d'aménagement. »

M. Marc Laménie.  - Cet amendement tend à mieux cibler, pour l'attribution de la DGF, les communes à faible DSU, faible DSR, faible dotation spéciale de péréquation, faible potentiel financier mais à fort effort fiscal.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Depuis dix jours, le Sénat a essayé de préserver le système actuel et de garantir la progression de la DGF. Il lui a fallu procéder à des ponctions diverses, dans des conditions parfois périlleuses. On ne peut y revenir, surtout, l'enveloppe étant fermée, sans en mesurer les conséquences.

L'amendement n°II-117 rectifié est retiré.

L'amendement n°II-76 rectifié n'est pas soutenu.

M. le président.  - Amendement n°II-86 rectifié bis, présenté par MM. J. Blanc, Faure, Amoudry et Vial, Mme Payet et MM. Cazalet, Bailly, Alduy, J. Boyer, Carle, Bernard-Reymond, Juilhard, Fournier, Grillot et Ginésy.

Après l'article 48, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales est complétée par les mots : « et, pour les communes de montagne, hors la majoration de la dotation proportionnelle à la superficie prévue au cinquième alinéa (2°) du même article ».

II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jacques Blanc.  - J'ai défendu tout à l'heure cet amendement d'appel. On a reconnu la spécificité des communes de montagne, mais on les pénalise en incluant la hausse des dotations dans leur potentiel financier. Il faut analyser objectivement ce qui s'est passé ces trois dernières années. Je fais pour cela confiance à la commission des finances.

M. Thierry Repentin.  - Une confiance aveugle !

L'amendement n°II-86 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°II-75 rectifié n'est pas soutenu.

M. le président.  - Amendement n°II-87 rectifié bis, présenté par MM. J. Blanc, Faure, Amoudry et Vial, Mme Payet et MM. Cazalet, Bailly, Alduy, J. Boyer, Carle, Bernard-Reymond, Juilhard, Fournier et Grillot.

Après l'article 48, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 2334-22 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Dans le troisième alinéa (1°) et le cinquième alinéa (3°), le pourcentage : « 30 % » est remplacé par le pourcentage : « 25 % ».

2° Après le sixième alinéa (4°), il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 5° Pour 10 % de son montant, proportionnellement à la superficie du territoire communal protégée en application des articles L. 332-2, L. 341-2, L. 411-1 ou L. 414-1 du code de l'environnement, ou faisant partie du domaine relevant du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. »

II. - La perte de recette pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jacques Blanc.  - Autre amendement d'appel. L'expérience faite avec les communes au coeur du parc des Cévennes est positive ; il faut aussi s'intéresser à celles situées par exemple dans les zones relevant de Natura 2000, qui ont de lourdes charges pour entretenir des espaces exceptionnels.

L'amendement n°II-87 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-121 rectifié, présenté par Mme Beaufils et les membres du groupe CRC.

Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le VI de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Afin de favoriser des projets intéressant plusieurs communes, regroupées sous forme de syndicat intercommunal à vocation unique dont le périmètre d'intervention peut concerner plusieurs communautés d'agglomération ou de communes, le dispositif de fonds de concours peut être étendu aux syndicats intercommunaux. La répartition de ces financements s'effectue au prorata du nombre d'habitants concernés par chaque structure.

« Le montant total des fonds de concours ne peut excéder la part de financement assurée, hors subvention, par le bénéficiaire du fonds de concours. »

Mme Marie-France Beaufils.  - Nous proposons de donner un peu plus de souplesse aux élus intéressés par un projet qui excède les compétences exercées par l'EPCI dont leur commune est membre.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Les syndicats sans fiscalité propre bénéficient des apports de leurs communes membres ; rien n'empêche que celles-ci apportent plus qu'il est nécessaire à l'équilibre du budget. L'amendement est inutile.

L'amendement n°II-121 rectifié est retiré.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-121 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-52, présenté par M. Pastor et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. Après l'article 48 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le I de l'article L. 1618-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° De provisions pour suivi post exploitation d'une installation de stockage de déchets non dangereux. »

II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. En conséquence, après l'article 48 septies, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

Avances aux collectivités territoriales

M. Jean-Marc Pastor.  - La gestion des centres d'enfouissement et des lieux de traitement des déchets non dangereux par des opérateurs privés ou des collectivités locales, impose la constitution de provisions pour faire face à d'éventuels problèmes survenant après la fin de l'exploitation. Un opérateur privé peut placer ces fonds durant la durée de l'exploitation, soit pendant quinze à trente ans, mais pas une collectivité locale.

Le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), établissement public industriel et commercial, a créé un fonds pour le démantèlement des centrales nucléaires, dont l'argent est placé. Le ministère du budget permet aussi aux collectivités de placer des masses financières, sous certaines conditions. Des représentants de la Caisse des dépôts et consignations nous ont dit qu'ils étaient prêts à recevoir ces fonds contre une rémunération minimale qui éviterait leur dépréciation.

L'amendement est gagé, mais l'opération n'occasionnerait aucun prélèvement financier sur le budget de l'Etat.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial.  - Il s'agit d'une vraie question, qui rejoint mon rapport sur les rapports de l'Etat et des collectivités locales. Mme le ministre a dit que les communes étaient très satisfaites des services du Trésor public, ce qui est de moins en moins vrai car les impôts, souvent mensualisés, assurent des rentrées d'argent régulières. Il est pratique pour certaines communes de déposer leurs fonds au Trésor public, mais elles sont de plus en plus nombreuses à choisir un autre mode de gestion pour placer leurs disponibilités à un meilleur taux.

Je propose que la commission des finances étudie cette question, qui mérite réflexion. Si M. Pastor retire son amendement, nous pourrions présenter pour le prochain budget une étude d'ensemble sur les rapports de trésorerie entre l'Etat et les collectivités locales afin d'assurer la neutralité de la règle. Actuellement, selon le mode de gestion choisi, les fonds peuvent être placés ou pas.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre.  - Dans l'état actuel des choses, je suis défavorable à cet amendement. Le Gouvernement ne souhaite pas accroître le nombre de dérogations à l'obligation de dépôt des fonds des collectivités locales auprès du Trésor public. En contrepartie, l'Etat garantit le montant des impôts votés quel qu'en soit le recouvrement, et il anticipe le versement des produits de la fiscalité locale par des avances mensuelles non rémunérées. Les fonds provisionnés dans ce cadre restent disponibles et peuvent être utilisés pour des dépenses d'investissement. La situation actuelle est satisfaisante, mais je n'exclus pas une réflexion sur ce sujet, comme le souhaite M. Mercier.

M. Jean-Marc Pastor.  - Seuls 13 % de l'ensemble des sites sont concernés. Les fonds placés au Trésor public ne sont certes pas bloqués, mais, pour une bonne gestion des collectivités locales, il est préférable qu'ils soient disponibles en cas de difficulté. Si les fonds sont utilisés pour des investissements, les futurs utilisateurs de nouveaux sites devront payer pour le traitement des déchets et pour les exploitants précédents.

J'apprécie la proposition de la commission d'étudier le sujet, mais Mme le ministre, défavorable sur le principe, ne s'y étant pas associée, je maintiens l'amendement.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - La commission des finances est prête à étudier la question avec M. Pastor. Il serait donc dommage que le Sénat émette un vote défavorable sur cet amendement. Je m'associe à M. Mercier pour demander le retrait de cet amendement.

M. Jean-Marc Pastor.  - Je remercie le président de la commission de confirmer l'engagement pris par M. Mercier de mener une réflexion, à laquelle je souhaite participer, sur ce problème.

L'amendement n°II-52 est retiré.

Sécurité civile

M. le président.  - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».

Orateurs inscrits

M. Claude Haut, rapporteur de la commission des finances.  - La sécurité civile est la politique menée par l'Etat pour protéger nos concitoyens contre toutes les formes de risques, naturels ou d'origine criminelle, qui se multiplient actuellement.

Je tiens à saluer le travail remarquable des personnels - sapeurs-pompiers, militaires, secouristes, démineurs- sur tous les types d'interventions. Je voudrais également signaler la qualité du document de politique transversale qui nous montre que la politique de sécurité civile implique d'autres missions de l'Etat, et surtout les collectivités territoriales. La question de la mise en place d'une mission interministérielle se pose toujours, même si j'estime qu'un rapprochement avec la prévention des risques serait plus adapté.

Les crédits de cette mission sont une source de préoccupation. Ma première remarque porte sur l'articulation entre les responsabilités de l'Etat et celles des collectivités territoriales dans l'organisation de cette politique.

Le budget primitif des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) dépasse 5 milliards d'euros pour 2007, à comparer aux 418 millions d'euros de la mission « Sécurité civile » et aux 900 millions de la politique transversale de sécurité civile. L'augmentation est de presque 20 % par rapport à 2006 et de près de 40 % comparée au même compte pour 2004. Or, les départements seuls sont chargés des dépenses nouvelles. Cette augmentation doit être mise en parallèle avec la diminution de 2,2 % des crédits de la mission. De nombreuses décisions, qui pèsent sur le budget des SDIS, sont prises au niveau national (retraites, régimes indemnitaires, etc.). De plus, 64 % de l'activité des sapeurs-pompiers concerne les secours à la personne, hors cas d'incendie. L'activité des SDIS recoupe donc celle des services médicaux d'urgence, service public national à la charge de l'Etat qui n'a pas à s'en désengager.

Enfin, l'Etat est censé participer, au travers du Fonds d'aide à l'investissement (FAI), aux dépenses des SDIS. Or, l'avenir du FAI est lui aussi préoccupant. Ses crédits diminuent encore : de 65,85 millions d'euros en 2006, ils sont passés à 38 millions en 2007 et 28 millions cette année. La réforme du FAI ne doit pas conduire au désengagement de l'Etat du financement des investissements des SDIS et plus largement de la politique de sécurité civile.

Ma deuxième remarque concerne l'évolution des crédits. Pour le programme « intervention des services opérationnels », la hausse exceptionnelle des autorisations d'engagement résulte exclusivement du renouvellement d'un contrat de maintenance des avions de la sécurité civile. Après avoir attiré l'attention de votre commission sur les sur-budgétisations récurrentes des dépenses de personnel du programme, je signale l'effort de rationalisation qui les fait davantage correspondre, cette année, aux besoins réels.

En revanche, je souhaiterais attirer votre attention sur deux sous-budgétisations patentes dans le programme « coordination des moyens de secours ». D'une part, la prévision de crédits pour les colonnes de renfort est de 1,7 million d'euros, soit plus de cinq fois moins que leur coût moyen durant les cinq dernières années. Plus flagrante encore est la sous-budgétisation des secours d'extrême urgence, puisque seuls 100 000 euros sont prévus alors que la moyenne des cinq dernières années s'établit à 26 millions d'euros par an. Ces dépenses sont par nature imprévisibles, mais cela ne devrait pas conduire à autant les sous-estimer.

Enfin, la performance de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers d'Aix-en-Provence semble bien éloignée des ambitions affichées lors de son installation.

Si je réserve ma position personnelle dans l'attente des réponses du ministre, la commission des finances vous propose d'adopter ces crédits.

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - (Applaudissements sur les bancs UMP). Tout d'abord, je veux rendre hommage à tous les personnels de la sécurité civile qui risquent leur vie pour sauver celles des autres. Je pense tout particulièrement à ceux qui ont été blessés ou sont décédés, comme les deux jeunes sapeurs-pompiers qui ont trouvé la mort dans l'effondrement d'un immeuble parisien, et aux victimes des tremblements de terre en Martinique et en Guadeloupe.

D'abord, un motif de satisfaction : je salue la parution des décrets d'application des articles 6 et 7 de la loi de modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004. Quid désormais d'un décret listant les projets d'intérêt commun susceptibles d'être financés par le FAI ?

A présent, un souhait, d'ailleurs largement partagé : celui d'une mission budgétaire interministérielle de la sécurité civile.

M. Paul Girod.  - Très bien !

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis.  - M. Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, en reconnaissait la nécessité, pour avoir une vision cohérente des crédits que l'État consacre à la sécurité civile.

Les problèmes dans l'organisation du secours à la personne, dus à une mésentente ou une collaboration insuffisante entre le SAMU, les SDIS et les ambulanciers, sont aggravés par la carence de la permanence des soins par les médecins de ville : la demande de soins augmente tandis que la démographie médicale s'effondre.

Les acteurs privés empiètent sur les missions d'urgence et la coordination entre les ministères de la santé et de l'intérieur est insuffisante. Il faut rendre plus complémentaires les schémas régionaux d'organisation sanitaire et les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques. Madame le ministre, sous quelle forme et à quelle échéance sera menée la réflexion interministérielle indispensable sur ce sujet, en associant les élus ? La question de la permanence des soins des médecins de ville y sera-t-elle intégrée ?

La loi de modernisation de la sécurité civile s'est fixé comme objectif une meilleure sensibilisation de la population aux risques et un apprentissage de la conduite à tenir en cas de crise. Si je me félicite du développement des réserves communales, l'obligation de formation scolaire n'est toujours pas effective, le dispositif prévu par le ministère de l'éducation nationale étant particulièrement complexe.

Je vous invite, madame le ministre, à vous inspirer de l'opération « collégiens, citoyens de demain », instituée dans le Haut-Rhin en 2006 à l'initiative des sapeurs-pompiers, qui consiste en des interventions dans les collèges et des exercices interactifs, et dont le succès a entraîné la pérennisation.

Enfin, si la protection civile n'est pas une matière communautaire, la mutualisation des moyens est particulièrement utile face à des catastrophes de grande ampleur : en 2005, la France a proposé la création de la Force d'Intervention Rapide Européenne (FIRE) ; à l'été 2006, l'Espagne, l'Italie, le Portugal et la France ont décidé de travailler ensemble en cas d'inondations, de feux, de tremblements de terre ; la Grèce envisage de les rejoindre.

La France veut développer cette force d'intervention européenne lors de sa présidence de l'Union. Quels moyens seront mis en oeuvre ? La France pourra-t-elle faire des propositions concrètes en temps utiles ?

La commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Éliane Assassi.  - Le budget de la sécurité civile reste bien modique : les effectifs tombent à 2 563 équivalents temps plein travaillés pour 2008, contre 2 598 en 2007, et les crédits de paiement reculent de 2,2 %. Cette baisse est à comparer avec les dépenses des SDIS, dont le budget pour 2007 dépasse 5 milliards, soit une hausse de 20 % par rapport à 2006 et une hausse cumulée de près de 40 % par rapport à 2004, alors que les effectifs des sapeurs-pompiers n'ont augmenté que de 0,8 % en 2005 et 2,6 % en 2006.

Ce budget occulte le rôle financier des collectivités territoriales, alors que la contribution des départements au financement des SDIS augmente chaque année : 48,7 % en 2005, 51,1 % en 2006 et 52,1 % en 2007 ; celle des communes et des EPCI s'élève quant à elle à 44,1 % en 2007. Quant à la suppression des contributions communales, initialement prévue pour le 1er janvier 2006, puis pour le 1er janvier 2008, elle est désormais reportée au 1er janvier 2010...

L'État se décharge de ses compétences sur les collectivités territoriales, sans compensation adéquate, conséquence de la loi de 1996 que nous n'avions pas votée, estimant que l'État doit assurer ses missions régaliennes de sécurité civile sur tout le territoire : c'est une question d'égalité des citoyens devant le service public. Il est temps de mettre un terme à la situation où l'État décide et les collectivités payent.

Alors que l'État devait participer, au travers du FAI, aux dépenses des SDIS, les autorisations de paiement prévues pour ce fonds n'ont cessé de diminuer : 67 millions pour 2006, 37,5 pour 2007 et 28 pour 2008 !

Les actions des SDIS concernent pour 64 % les secours à la personne, hors incendie, proportion à mettre en relation avec l'insuffisance de la présence médicale dans certains territoires, notamment en milieu rural. Les services médicaux d'urgence sont de la responsabilité de l'État ; on ne saurait faire supporter aux SDIS des missions qui relèvent de l'assurance-maladie. Il faut répondre au problème de la démographie médicale sans remettre en cause le principe de la gratuité des secours

Les propos de M. Ginesta, rapporteur spécial pour l'Assemblée nationale, qui font écho au discours de Nicolas Sarkozy le 29 septembre dernier au Congrès national des sapeurs-pompiers...

M. Éric Doligé.  - Le Président de la République !

Mme Éliane Assassi.  - ...ne présagent rien de bon : maîtrise des coûts, pause dans les dépenses avec un regroupement des casernes -comme pour les tribunaux- et baisse des recrutements. Le Gouvernement donne beaucoup de leçons, alors que notre politique de sécurité civile est essentiellement prise en charge par les collectivités.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a minoré en seconde délibération de 200 000 euros les dépenses de personnel du programme « coordination des moyens de secours », pour gager les ouvertures de crédits au profit de la dotation « Présidence de la République » de la mission « Pouvoirs publics », et de 3,2 millions les programmes « intervention des services opérationnels » et « coordination des moyens de secours ».

Les crédits de la présente mission étaient déjà bien modiques ; après son passage à l'Assemblée, il n'en reste pas grand-chose. Le groupe CRC votera contre.

M. Georges Othily. - Les phénomènes naturels, notamment du fait du réchauffement climatique, constituent des menaces qui ne cesseront de croître pour les populations civiles au cours des années à venir. Comment prévenir et combattre ces nouveaux risques ? La baisse, même minime, des crédits de la mission «Sécurité civile» doit être rapportée à l'augmentation bien supérieure des dépenses des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis). Si ces dépenses n'entrent pas strictement dans le champ de la mission « Sécurité civile », leur montant très élevé fait des Sdis les acteurs principaux de la lutte contre les incendies. La part la plus importante des crédits de la mission concerne la modernisation des matériels d'intervention sur les risques naturels, technologiques et terroristes, et je m'en réjouis. Ce budget prévoit des crédits pour renforcer ceux des Sdis dans leur lutte contre les catastrophes naturelles et le secours aux personnes, tout en améliorant la sécurité des sapeurs-pompiers grâce à l'acquisition de nouvelles tenues de protection et de robots d'intervention sur site suspect.

Cependant, les efforts financiers les plus importants sont effectués par les collectivités territoriales car les Sdis assurent l'essentiel des missions de secours. Le coût de ces services a été de 4,2 milliards en 2006 et de plus de 5 milliards cette année. La participation financière des départements représente 53 % du total, contre 47 % pour celle des communes et des EPCI. Ces efforts considérables pèsent lourdement sur les budgets de certaines collectivités. C'est le cas notamment pour les communes de Guyane qui peinent à verser leur contribution au budget du Sdis. Malgré les efforts et la bonne volonté des conseils municipaux concernés, le Sdis connait d'importants problèmes de trésorerie et cette situation ne pourra qu'empirer dans les années à venir. En effet, la loi de 2004 de modernisation de la sécurité civile prévoit qu'à compter du 1er janvier 2010, les contributions obligatoires des communes seront remplacées par un dégrèvement à due concurrence de la dotation forfaitaire versée par l'État aux communes, d'où un prélèvement annuel sur les ressources fiscales de plus de 4 000 communes. Non seulement cette évolution fera disparaître le lien de proximité entre les maires et les sapeurs-pompiers de leurs communes, mais elle entraînera de grandes difficultés financières pour de nombreuses communes et donc pour les Sdis qu'elles financent en partie.

Ces communes n'entendent pas se soustraire à leurs obligations mais la plupart d'entre elles ne parviennent déjà pas à s'y soumettre. Il faudra donc clarifier le financement des Sdis afin d'assainir leurs budgets.

Le fonds d'aide à l'investissement spécifique (FAI), créé par la loi de finances pour 2003, était destiné à accompagner le financement d'opérations prioritaires ou d'intérêt commun des Sdis. Aujourd'hui, ses crédits baissent de près de 10 millions. Cette diminution, constante depuis plusieurs années, ne doit pas conduire l'État à se désengager des investissements des Sdis, établissements publics autonomes qui sont les premiers acteurs de la lutte contre les incendies. À l'heure où de dramatiques incendies ont embrasé le Péloponnèse, le Portugal et la Californie, provoquant l'évacuation de centaines de milliers d'habitants, il est impératif de renforcer notre sécurité civile, qui devra affronter les conséquences encore inconnues des bouleversements climatiques.

Si, conformément au principe de subsidiarité, la protection civile relève de la compétence des États, l'Union européenne s'est néanmoins préoccupée de les coordonner. Je me réjouis qu'un inventaire complet des moyens en hommes et en matériels dont dispose chaque pays, comprenant notamment l'identification des moyens exportables, soit lancé au printemps. Les systèmes seront plus rapidement opérationnels. Nous répondrons ainsi à la résolution du Parlement européen du 4 septembre 2007 demandant la « création d'une force européenne qui sera en mesure de réagir immédiatement en cas d'urgence ».

A l'heure où la France va prendre la présidence de l'Union européenne, pouvez-vous nous confirmer cette dimension européenne de la sécurité civile ? La mission « Sécurité civile » est essentielle, car prévenir les dangers, secourir, protéger et sauver les victimes, font partie des fondements de notre société. Grâce à des efforts budgétaires importants et continus, la sécurité civile de notre pays s'est considérablement modernisée. Mais la route est encore longue. L'État doit protéger la population. C'est dans cet espoir, que la majorité du groupe RDSE votera les crédits de cette mission. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Claude Peyronnet.  - A l'égard des sapeurs-pompiers, comme dans beaucoup d'autres domaines, il y a les discours et les actes.

Les discours, ce sont les bonnes paroles adressées aux pompiers à l'occasion de leurs congrès, ce sont les annonces d'amélioration de la situation trop souvent financée par d'autres, ce sont les discours émouvants aux obsèques de tel ou tel d'entre eux tombés dans l'exercice d'une mission dangereuse et auxquels, bien sûr, nous nous associons.

Et puis, il y a la réalité, en particulier financière. Ce budget n'est pas bon. Les crédits d'État baissent de 2,5 %. Chaque sapeur-pompier devra prendre conscience de cet écart entre les bonnes paroles et les faits, ou plutôt, comprendre que les bonnes paroles se traduisent surtout par une charge toujours croissante sur les collectivités : il y a ceux qui les prononcent et qui imposent des mesures pour améliorer la situation et ceux qui payent, c'est-à-dire les collectivités au premier rang desquelles les départements.

Un sujet irrite les pompiers et les collectivités : le secours à personnes, qui a fait l'objet du débat central au Congrès des sapeurs pompiers de Clermont-Ferrand. Les dysfonctionnements opérationnels entre les Sdis, le Samu, le Smur et les ambulances privées ont été au coeur des discussions. Et le sujet est d'importance, car ce qui est en cause, c'est la sécurité sanitaire de nos concitoyens, en particulier en zone rurale, soit la majeure partie du territoire.

Va-t-on enfin reconnaître que les secours de sécurité civile font partie de la chaîne sanitaire ? Il faut résoudre ce problème au plus vite car la situation s'est dégradée et la sécurité des personnes n'est plus assurée dans les meilleures conditions sur certaines parties du territoire. Oui, les services d'incendie et de secours font partie intégrantes de la chaîne sanitaire, leur défaillance serait catastrophique. Ils sont compétents, bien équipés, harmonieusement répartis sur tous les départements, ce qui est un gage de l'efficacité. Il est grand temps de concrétiser cette reconnaissance par des conventions claires entre les Sdis et les hôpitaux.

Parallèlement à cet aspect fonctionnel, se pose une question financière. Les Sdis ne refusent pas d'intervenir au delà de leur mission, y compris à domicile, mais ils veulent que ces actions qu'ils peuvent seuls effectuer dans de bonnes conditions, soient rémunérées de façon raisonnable. Actuellement en cas de carence, les Sdis perçoivent 105 euros pour un coût réel de 500 euros. II faut commencer par doubler le remboursement. Plus grave encore, les autres interventions à domicile par appel direct ne sont pas du tout rémunérées. Zéro, pas un sou ! II est scandaleux que l'action sanitaire, partie intégrante de la politique nationale de santé, soit ainsi financée par le contribuable local.

Le Gouvernement a mis en place, la semaine dernière, le comité tripartite sur le secours à personnes et pour la première fois on s'interroge sur « la rémunération des interventions réalisées par les Sdis à la demande des Samu et en dehors de leur mission ».

C'est bien ! Mais nous attendons tous des solutions rapides, faute de quoi les Sdis enverront les factures aux hôpitaux et ce sont les tribunaux qui trancheront. (Applaudissements à gauche. M. Haut applaudit aussi)

M. Paul Girod. - Le groupe UMP votera cette mission, tout en faisant sienne les observations de nos rapporteurs, notamment en ce qui concerne les rémunérations et les retraites des sapeurs pompiers et les grilles d'encadrement qui laissent les présidents de conseils généraux perplexes.

Je déplore que le budget de la sécurité et de la sécurité civile ait été scindé en deux missions. Ce matin, nous avons examiné la mission « Sécurité » et ce soir, nous voila devant la mission « Sécurité civile ». Nous aurions pu enchaîner les deux car elles sont complémentaires.

Les périls sont globaux et mettent en cause les services de secours, de sécurité et les hôpitaux : il convient donc de dépasser le cadre un peu étroit de ces deux missions.

Un livre blanc sur la défense et la sécurité est en cours de rédaction. Je voudrais que les dimensions de la sécurité civile et de la défense civile soient suffisamment prises en compte. Or, j'ai le sentiment que ce livre est beaucoup plus axé sur la défense militaire.

Notre rapporteur pour avis a parlé de l'implication de la population dans cette affaire. La loi de modernisation de la sécurité civile prévoyait que l'éducation nationale se préoccuperait de cette question. Je puis vous assurer que c'est encore loin d'être perceptible sur le terrain !

Où en est cette collaboration interministérielle qui devait animer la réflexion sur la défense de notre pays ?

A ma connaissance, un seul grand exercice à été conduit : le plan contre la pandémie grippale. Or, les collectivités territoriales n'ont pas participé à l'élaboration de ce plan et elles ont été assez largement tenues à l'écart. Il faudra donc renforcer l'implication de tous les acteurs.

Je souhaiterais aussi que l'on revoie le système d'alerte de la population. Il existe dans certaines grandes villes des sirènes, mais qui en connaît le langage ? Si elles se mettaient à sonner en pleine nuit, il y a fort à parier que nos concitoyens croiraient qu'une rave party commence. En matière de sécurité civile, il y a donc beaucoup à faire pour que la population réagisse correctement. Trop souvent, les exercices ne réunissent pas tous les professionnels concernés.

Les exercices ne sont pas assez interprofessionnels, j'entends avec les gendarmes, les policiers, les hospitaliers, les pompiers, et ce qui est intéressant, c'est d'étudier ce qui ne marche pas et d'en tirer les leçons.

La recherche ? Dans beaucoup de domaines, recherche de sécurité civile et recherche de défense sont complémentaires. Il faudra de plus en plus en tenir compte.

Je conclurai sur une question : qu'envisage-t-on pendant la présidence française pour faire prospérer le rapport Barnier ? La sécurité civile est une mission essentielle qui doit se développer avec la collaboration de tous. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Yvon Collin. - Ce budget a la particularité de ne pas regrouper l'ensemble des concours publics affectés à la sécurité civile. Plus de 50 % des crédits de l'État ne sont en effet pas compris dans le périmètre de cette mission. C'est pourquoi Mme la ministre me pardonnera de faire un hors-sujet, somme toute relatif, en évoquant essentiellement les Sdis.

De la lutte contre les incendies à la lutte contre les risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques, mission plus récente et devenue tout aussi prioritaire depuis la menace du terrorisme, la sécurité civile est un enjeu capital qui nécessite des moyens importants. Ce projet de loi de finances est-il en mesure de les procurer ? Avec 418 millions pour 2008 contre 427 ouverts en loi de finances pour 2007, ce budget est en baisse de 2,2 %, ce que je regrette alors que les charges vont continuer de croître, en raison notamment du changement climatique. Il est vrai que ce budget ne reflète pas toute la politique de sécurité qui coûte globalement à l'État 900 millions.

Depuis plusieurs années, les parlementaires souhaitent que soit donnée une dimension interministérielle à la sécurité civile pour rendre plus cohérente l'intervention de l'État. Nous aurions ainsi une meilleure visibilité au plan budgétaire, grâce à laquelle on éviterait des dysfonctionnements comme ceux que l'on a remarqués dans les secours à la personne. Comme le répète le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, le secours à la personne se trouve dans une situation alarmante. Le vieillissement de la population conjugué à la désertification médicale accroît la demande de secours, alors que l'offre souffre d'un manque de coordination entre les différents acteurs du secours. Nous avons tous eu l'écho d'une concurrence entre le Samu, les sapeurs-pompiers et les ambulanciers privés. Une redéfinition interministérielle de la mission améliorerait la synergie des différentes compétences.

En attendant, les Sdis mobilisent d'importants moyens financiers, avec 5 milliards pour 2007, soit une hausse de 40 % par rapport à 2004. Ce n'est pas sans conséquence sur les finances départementales et donc sur nos concitoyens, dont la contribution à la sécurité est de 82 euros par personne et par an. Cette évolution traduit un désengagement de l'État : ce qu'il ne fait pas est fait par les départements, qui doivent de plus en plus assumer le financement du développement et de la modernisation des Sdis.

L'évolution du Fonds d'aide à l'investissement, institué par la loi de finances pour 2003, en témoigne. Ce fonds a reçu 65 millions dans la loi de finances initiales pour 2006. En 2008, il sera doté de 28 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Si l'on ajoute 10 millions de reports de crédits et 10 millions pour le programme Antarès, on arrive à 48 millions, soit une baisse de 25 % depuis deux ans. Si nous comprenons la nécessité de réagir aux remarques formulées par la Cour des comptes, nous sommes nombreux à déplorer le désengagement de l'État des dépenses d'investissement. Plutôt que baisser les crédits au prétexte de leur sous-consommation, il faudrait simplifier les procédures. En attendant, les collectivités locales se retrouvent au pied du mur. Ce qui est regrettable, d'autant qu'elles doivent conserver des marges de manoeuvre afin de poursuivre l'amélioration du statut des sapeurs-pompiers.

Les efforts engagés ces dernières années doivent continuer. Il faut mieux reconnaître la dangerosité et la pénibilité de la profession, et mieux gérer les fins de carrière. Par leur dévouement, leur courage, leur sang-froid et leur professionnalisme, les sapeurs-pompiers sont exemplaires. C'est pourquoi l'État doit donner l'exemple avec un budget qui donne réellement aux soldats du feu les moyens d'exercer leurs missions. C'est le message qu'ils avaient fait passer lors des manifestations de 2006. Je me fais leur modeste porte-parole en 2007. (Applaudissements à gauche)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. - Votre présence à cette heure tardive est révélatrice de l'attention que vous portez aux pompiers et à la sécurité civile.

Mon premier objectif en la matière est de renforcer les moyens de l'État pour assumer ses obligations de protection de nos concitoyens. Il convient de marquer la reconnaissance que nous devons à ceux et celles qui servent dans les différents corps de pompiers. Pour avoir assisté toute la nuit, il y a quinze jours, au drame du XIXe arrondissement, lors duquel j'ai vu les pompiers lutter pour arracher leurs camarades au garage incendié, je sais ce que cette mission exige de compétence, de dévouement et de courage. Nous leur rendons hommage.

En matière de sécurité civile, l'État n'est pas le seul acteur mais son rôle, direct ou indirect, est majeur. Vous avez raison, monsieur Girod, d'insister sur le lien avec la sécurité et la défense. Mais si certaines préoccupations sont reprises dans le Livre blanc sur la sécurité en préparation, nous devons nous projeter dans l'avenir. C'est la fonction de la direction de la prospective et des affaires stratégiques, à qui j'ai confié la rédaction d'un Livre blanc spécifique sur la sécurité civile.

Ce budget comporte plusieurs avancées : le déploiement du réseau Antarès en trois ans, avec un financement lissé sur neuf ; la modernisation du matériel d'intervention, avec une troisième chaîne de décontamination ; les investissements immobiliers, centrés sur des sites opérationnels, à Lyon, Metz et Chalons en Champagne.

L'État n'oublie pas le Fonds d'aide à l'investissement des SDIS mais regardons la réalité en face ! Les crédits ont beaucoup fluctué depuis 2003, mais leur consommation est insuffisante. À quoi sert d'inscrire des crédits qui ne seront pas consommés ? Aux 28 millions, il faut ajouter les 10 affectés à Antarès et les 10 reportés. On approche ainsi les 50 millions pour les SDIS, monsieur Collin ! Il faut adapter les moyens aux besoins et aux capacités de consommation. À ce jour, 76 % seulement des crédits délégués ont été consommés ; on compte 35 millions d'écart entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement !

Le Fonds est en cours de réforme, et il en a grand besoin. Le projet de décret est en cours d'élaboration et, au terme de la concertation interministérielle il devrait être publié au premier semestre après avis formel du Conseil national.

Sur l'alerte, qu'il faut moderniser, M. Girod a raison, un rapport a été rendu par l'inspection générale de l'administration dans l'été 2005. Des expérimentations ont été décidées dans le Haut-Rhin.

J'attends un dossier complet à la mi-décembre : votre intervention, monsieur Girod, est donc particulièrement heureuse.

Pour coordonner les acteurs de la sécurité civile, l'État doit mettre au service des élus locaux des outils de pilotage qui soient de nature à réduire les disparités entre départements. Je m'y emploie avec la Conférence nationale des SDIS.

M. Othily a parlé du cas particulier de l'outre-mer ; nous le prenons en compte et le Président de la République m'a donné jusqu'à fin 2008 pour faire aboutir une concertation sur la contribution aux Sdis, les contingents communaux et le prélèvement sur la DGF. Cette concertation s'appuie sur des études techniques mettant en particulier en évidence la spécificité guyanaise. La Conférence nationale des Sdis a acté les grandes lignes de la réforme du FAI et le décret en cours de finalisation répondra à cette préoccupation. Afin d'aider les collectivités guyanaises, je m'apprête à les autoriser à financer leurs investissements par des recettes de fonctionnement. (M. le président de la commission manifeste de l'étonnement.)

Pour légitime que soit la prise en compte du coût des interventions, l'État doit aussi et d'abord en assurer la bonne coordination. Le 29 septembre, le Président de la République m'a demandé d'y veiller et, pour rapprocher les « rouges » et les « blancs », nous avons avec Mme Bachelot installé un comité quadripartite car l'hétérogénéité des situations et des moyens des services d'urgence appelait un véritable travail. La tâche principale de ce comité est de définir un référentiel qui assure un partage clair des compétences, améliore l'efficacité de la prise en charge et optimise l'échelon central comme le niveau régional. Une recommandation relative aux interconnexions sera également formulée.

La prise en charge sera graduée dans un esprit de qualité des soins grâce au référentiel dont nous disposerons en février 2008. Le remboursement des interventions des Sdis à la demande des Samu en dehors de leurs missions propres sera étudié. Le rapport d'étape sera rendu en février et le climat de la réunion m'a semblé de bon augure. Vous le voyez, monsieur Peyronnet, je n'en reste ni aux intentions, ni aux bonnes paroles, j'agis, vite, et je suis persuadée que nous aurons des solutions rapides grâce à la bonne volonté de chacun.

L'enjeu des années à venir est de pérenniser l'engagement des volontaires, qui représentent 84 % des effectifs des Sdis, en partenariat avec leurs employeurs. Le plan d'action signé en 2006 y encourage. J'ai signé le premier engagement ministériel autorisant tous les agents de mon ministère -curieusement, cela n'avait pas encore été fait- de poursuivre leur volontariat dans le respect de leur vie professionnelle.

Il faut aussi conforter le rôle européen et international de la France en matière de sécurité, Mme Troendle a raison. L'Union européenne est un acteur majeur à l'échelle mondiale dans le domaine de la sécurité et de la protection civiles. Elle est intervenue cet été en Italie et en Grèce, elle pourrait intervenir ailleurs, monsieur Othily.

Le renforcement de l'organisation des moyens sera l'un des objectifs de la présidence française. J'ai déjà obtenu un consensus pour que, dans les prochains mois, nous ayons un recollement des capacités de chacun, un état des personnels et des matériels que l'Union est susceptible de projeter à l'extérieur. L'été 2007 a constitué un véritable test. A partir de ce recensement, je noterai les lacunes à l'échelle européenne et déterminerai les modalités pour les combler et pour planifier des opérations rapidement en cas de besoin. Nous pourrons ainsi améliorer de manière considérable les capacités d'action de l'Europe et son image.

Répondre à l'exigence de lisibilité, c'est aussi poursuivre une logique de coproduction de la sécurité civile avec les collectivités locales, conformément à la loi de 2004. Nous pouvons aller plus loin dans l'association de tous. C'est le plan Opale, monsieur Girod.

Ce budget porte bien la marque de la volonté concrète de l'État d'assurer, face aux risques, une configuration optimale de tous les intervenants. C'est son devoir et celui de chacun d'entre nous, c'est aussi ce que les Français attendent. (Applaudissements à droite et au centre)

Examen des crédits

Article 33

Les crédits de la mission sont adoptés.

Articles rattachés

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°II-111, présenté par M. Doligé.

Après l'article 48 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le conseil d'administration de l'Ecole nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers est renouvelé dans les six mois suivant le renouvellement triennal des conseils généraux. Un décret en Conseil d'Etat fixe la composition du conseil d'administration.

II. - Le mandat des membres du conseil d'administration de l'École Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers en cours au moment de la publication de la présente loi est prorogé jusqu'au 16 septembre 2008.

M. Éric Doligé.  - Une petite difficulté m'amènera sans doute à retirer cet amendement, mais auparavant, je voudrai, monsieur le Président, madame la Ministre, dire que, par respect, je n'appelle pas plus le Président de la République Nicolas Sarkozy que je ne m'adresse au président de séance en le nommant Guy Fischer.

Madame la ministre, donc, les patrons et les financeurs des Sdis sont les conseils généraux, les collectivités locales. Je ne voudrais donc pas qu'à travers le comité sur les urgences médicales, les pompiers décident de ce qui est bon sans que les présidents de conseils généraux aient été associés. Il convient aussi de revoir le financement des Sdis car on ne peut pas continuer à rechercher de petits arrangements. Des sources de financement sont là -la santé, les assurances, les sociétés d'autoroute-, qui nous éviteraient de longs et délicats débats.

J'ai cru comprendre que mon amendement risquait de rencontrer des blocages au Conseil constitutionnel. Je le retire, tout en regrettant que nous ne puissions jamais aller au fond des choses !

L'amendement n°II-111 est retiré.

Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 6 décembre 2007, à 10 heures.

La séance est levée à 1 heure.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 6 décembre 2007

Séance publique

À 10 HEURES, À 15 HEURES ET LE SOIR

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (n° 90, 2007-2008).

Rapport (n° 91, 2007-2008) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

Examen des missions :

Développement et régulation économiques (+ articles 42 et 43)

M. Éric Doligé, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 9) ;

MM. Pierre Hérisson et Gérard Cornu, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 93, tome II).

Pilotage de l'économie française

M. Marc Massion, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 19) ;

Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 93, tome IX).

Écologie, développement et aménagement durables (+ article 44)

Budget annexe : contrôle et exploitation aériens

Compte spécial : contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

MM. Alain Lambert, Jean-Pierre Masseret, Gérard Miquel et Mme Fabienne Keller, rapporteurs spéciaux (rapport n° 91, annexe n° 11) ;

M. Yvon Collin, rapporteur spécial (Contrôle et exploitation aériens - rapport n° 91, annexe n° 11) ;

M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 92, tome IV) ;

M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 93, tome III) ;

MM. Charles Revet, Roland Courteau et Jean-François Le Grand, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (Contrôle et exploitation aériens - avis n° 93, tome III) ;

M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques (Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route - avis n° 93, tome III).

Politique des territoires

M. Roger Besse, rapporteur spécial (rapport n° 91, annexe n° 20) ;

MM. Jean-Paul Alduy et Dominique Mortemousque, rapporteurs pour avis de la commission des affaires économiques (avis n° 93, tome V).

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- MM. Joël Bourdin et Yvon Collin, un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification sur la coordination des politiques économiques en Europe ;

- M. Philippe Marini, un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans les domaines économique et financier (n° 97, 2007-2008) ;

- M. Gérard Cornu, un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, pour le développement de la concurrence au service des consommateurs (n° 109, 2007-2008).