N° 41

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 octobre 2003

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi relatif aux responsabilités locales ,

Par M. Michel MERCIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.

Voir les numéros :

Sénat : 4 , 31 , 32 , 33 et 34 (2003-2004)

Collectivités territoriales.

Pages

EXPOSÉ GENERAL

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi constitue un élément central de « l'acte II » de la décentralisation . Pas moins de sept lois doivent participer à cette nouvelle étape, ainsi que l'a rappelé M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales, à l'occasion de son audition par votre commission des lois, le 14 octobre dernier : la loi constitutionnelle, les trois lois organiques (respectivement relatives à l'expérimentation, au référendum local et aux finances locales), le présent projet de loi relatif aux responsabilités locales, les deux lois de finances pour 2004 et 2005 devant « parachever » l'ensemble. Il convient, pour être complet, d'ajouter à cette énumération le projet de loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, actuellement en cours de navette entre les deux assemblée, après une première lecture au Sénat.

Le champ de l'avis de votre commission des finances est restreint, dès lors que les dispositions financières figurant dans le présent projet de loi sont limitées : la compensation financière des transferts de compétences prévus par celui-ci figurera dans le projet de loi de finances initiale pour 2005. En effet, le II de l'article 88 du présent projet de loi dispose que « la compensation financière des transferts de compétences s'opère, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature, dans des conditions fixées par la loi de finances ». Par ailleurs, l'article 126 dispose que « les dispositions de la présente loi sont applicables, sous réserve de l'entrée en vigueur des dispositions relevant de la loi de finances et sauf disposition particulière de la présente loi, à compter du 1 er janvier 2005 ». Il convient en effet de souligner qu' il ne revient pas à la loi ordinaire de déterminer les conditions d'affectation d'une ressource établie au profit de l'Etat : l'article 36 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances dispose que « l'affectation, totale ou partielle, à une autre personne morale d'une ressource établie au profit de l'Etat ne peut résulter que d'une disposition de loi de finances ». C'est la raison pour laquelle la détermination des modalités de compensation des transferts de compétences proposés par le présent projet de loi est soumise à une disposition préalable contenue dans une loi de finances.

Compte tenu de cette configuration, votre commission des finances a décidé de ne se saisir que de 12 articles, d'importance inégale. Il s'agit des articles 2, 18, 19, 88, 89, 92, 93, 103, 104, 123, 124 et 125.

I. DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES CONFORMES AUX PRÉCONISATIONS DE LA MISSION SÉNATORIALE D'INFORMATION SUR LA DÉCENTRALISATION

Le présent projet de loi constitue en quelque sorte « la colonne vertébrale » de cet acte II de la décentralisation, puisqu'il modifie de manière substantielle la répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales. Ainsi que l'indique son exposé des motifs, il constitue « une exigence pour rétablir la légitimité même de l'action publique qui est si souvent contestée aujourd'hui (...) en transférant aux collectivités territoriales les compétences qu'elles paraissent le mieux à même de prendre en charge ».

A. LES PROPOSITIONS DE LA MISSION SÉNATORIALE D'INFORMATION DE 2000

L'exposé des motifs du présent projet de loi indique que celui-ci « donnera aussi une traduction aux réflexions menées au cours des dernières années, notamment dans le cadre de la commission pour l'avenir de la décentralisation, qui fut présidée par Pierre Mauroy, et du rapport établi par Michel Mercier au nom de la mission sénatoriale d'information sur la décentralisation ».

Il convient de rappeler que cette mission d'information de 2000 avait, dans ses recommandations, proposé une liste des compétences dont le transfert paraissait souhaitable, soit de l'Etat vers les collectivités territoriales, soit, de manière plus exceptionnelle, de ces dernières vers l'Etat.

Les transferts de compétences proposés par la mission d'information sénatoriale de 2000

Pour « retrouver l'esprit de la décentralisation », la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation et de proposer les améliorations de nature à faciliter l'exercice des compétences locales, dont votre rapporteur pour avis était rapporteur, avait notamment préconisé, « considérant que l'enchevêtrement des compétences est un facteur de confusion des responsabilités et nuit à la lisibilité de l'action publique,

« considérant que la clarification est un objectif incontesté qui doit être poursuivi, entre deux logiques opposées, celle des blocs de compétences, qui a montré ses limites, et celle du « tout contrat », séduisante mais génératrice d'incertitude ,

« ? de rationaliser dans la mesure du possible la répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités locales, conformément à la vocation principale des différents niveaux de collectivité et en tenant compte des évolutions observées .

« Toute nouvelle décentralisation de compétence devrait être subordonnée à trois conditions :

- une compensation juste et évolutive des charges transférées ;

- une liberté réelle d'organisation ;

- l'expérimentation sur la base du volontariat, qui garantit l'adhésion et préserve l'avenir.

« ? de clarifier les règles du jeu pour l'exercice en partenariat des compétences partagées

« Pour les compétences partagées avec l'Etat, la mission appelle de ses voeux le rééquilibrage d'un partenariat trop inégal. Elle souhaite que le non-respect de ses engagements par l'Etat fasse l'objet de sanctions financières.

« Pour les compétences partagées entre collectivités locales, la mission préconise de promouvoir en droit et en fait la collectivité chef de file, tant pour la mise en oeuvre et le suivi des contrats d'objectifs cofinancés que pour le pilotage des champs de l'action publique dans lesquels plusieurs collectivités interviennent chacune à leur niveau.

« ? pour clarifier les responsabilités dans le sens d'une décentralisation renforcée, la mission suggère notamment :

- de transférer les constructions universitaires à la région ;

- de confier à chaque collectivité la gestion des personnels administratifs des établissements d'enseignement qui entrent dans son domaine de compétences ;

- de confier aux régions la totalité de la responsabilité de la formation professionnelle ;

- de transférer la construction et l'entretien des routes nationales aux départements, l'Etat gardant les autoroutes ;

- de transférer à l'Etat les actions départementales de prévention sanitaire ;

- de répartir les actions en faveur des handicapés par fonctions et non par établissements : l'hébergement au département, le travail à l'Etat, les soins à l'assurance-maladie ;

- d'engager une réflexion pour mettre fin à la cogestion du RMI par l'Etat et le département, en favorisant une plus grande décentralisation ;

- de reconnaître explicitement aux collectivités locales, et en particulier, aux communes, la responsabilité des établissements d'enseignement artistique, qu'elles assument déjà, en associant à cette compétence un financement approprié ;

- d'associer les collectivités locales à l'inventaire, l'Etat conservant la responsabilité de la conservation du patrimoine ;

- d'ouvrir droit à l'expérimentation pour placer une police territoriale de proximité sous l'autorité des maires ;

- de confier aux départements l'organisation des services d'incendie et de secours ».

Source : « Pour une république territoriale - l'unité dans la diversité » Jean-Paul Delevoye, président, Michel Mercier, rapporteur, rapport n° 447, 1999-2000, pages 21-23

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