MISSION « AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT »,
ET COMPTES SPÉCIAUX « PRÊTS À DES ETATS ÉTRANGERS » ET « ENGAGEMENTS EN FAVEUR DE LA FORÊT DANS LE CADRE DE LA LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE »
MM. Yvon Collin et Fabienne Keller, rapporteurs spéciaux

I. LA MISSION « AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT »

La mission « Aide publique au développement » constitue une mission interministérielle . Sa structure en trois programmes traduit la triple tutelle exercée sur la politique d'APD de notre pays par la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats du ministère des affaires étrangères, la direction générale du Trésor du ministère de l'économie et des finances et le secrétariat général à l'immigration et à l'intégration du ministère de l'intérieur.

Le programme 110 « Aide économique et financière au développement » est piloté par la direction générale du Trésor. Il retrace l'aide économique et financière multilatérale et bilatérale, principalement des versements à des banques et fonds multilatéraux, ainsi que les traitements de dettes des pays en développement.

Le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » est piloté par la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats. Il retrace l'essentiel des moyens du MAEE consacrés à l'APD et aux interventions dans les pays en situation de crise, soit des actions très variées de coopération bilatérale et multilatérale : activité du réseau de coopération et d'action culturelle et dotations des établissements culturels à autonomie financière, coopération en matière de recherche, subventions aux ONG, aide-projet de l'Agence française de développement (AFD) et du Fonds de solidarité prioritaire (FSP), contributions à certains fonds multilatéraux, aide alimentaire et humanitaire d'urgence...

Le programme 301 « Développement solidaire et migrations », enfin, est piloté par le secrétariat général à l'immigration et à l'intégration (SGII), rattaché au ministère de l'intérieur. Le programme 301 retrace le soutien apporté à des projets participant à une meilleure maîtrise des flux migratoires, dans le cadre d'« accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire », et à des projets portés par des migrants en faveur du développement de leurs pays d'origine.

Les trois programmes qui composent la mission sont de montants budgétaires très inégaux :

- le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » représente à lui seul 54 % des AE et 63 % des CP consommés en 2011 ;

- le programme 110 « Aide économique et financière au développement » correspond à 45,5 % des AE et 36 % des CP ;

- le programme 301 « Développement solidaire et migrations » représente une dépense marginale, inférieure à 1 % des AE et des CP de la mission.

A. LES OBSERVATIONS GÉNÉRALES SUR L'EXERCICE

1. Les données budgétaire globales : un résultat toujours éloigné de l'objectif visant à consacrer 0,7 % du revenu national brut à l'aide publique au développement
a) La France n'est plus que le quatrième donateur d'aide publique au développement

Avec 9,3 milliards d'euros d'aide publique au développement (APD) en 2011 selon les données de l'OCDE, la France a été le quatrième donateur mondial en volume, après les Etats-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Elle est en recul de deux places depuis 2009 .

Alors que l'ancien Président de la République avait réaffirmé l'engagement de notre pays de consacrer 0,7 % du revenu national brut (RNB) à l'aide au développement d'ici 2015, la dotation globale de l'APD (mission APD comprise) a diminué à 0,46 % du RNB . Elle s'élevait encore à 0,50 % du RNB en 2010, en dessous de l'objectif intermédiaire de 0,56 % du RNB qui avait été fixé pour cette année.

Les orientations de la politique d'aide publique au développement sont définies par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID). L'adoption en octobre 2010 du document-cadre de coopération au développement a permis de préciser ces orientations, dont on peut toutefois regretter qu'elles n'aient pas eu une traduction financière :

- la lutte contre la pauvreté et la réalisation des Objectifs du millénaire pour le Développement (OMD) ;

- la promotion des Biens publics mondiaux (BPM), qu'il s'agisse de la lutte contre le changement climatique, les maladies transmissibles ou la protection de la biodiversité ;

- la croissance économique dans ses trois dimensions : rythme, qualité et soutenabilité ;

- la stabilité et l'Etat de droit, comme facteurs de développement.

b) Une part mineure de l'APD française logée au sein de la mission

La mission « Aide publique au développement » ne regroupe qu'une partie de l'effort français en matière d'APD et ne donne pas une vision exhaustive de l'APD française, dont elle ne représente que 36 % des ressources.

La mission ne retrace pas les autres catégories de crédits qui participent à l'APD, notamment les crédits budgétaires, hors budget général, nécessaires au décaissement des prêts accordés aux conditions de l'APD et le coût budgétaire des annulations de dettes. Seule l'indemnisation des annulations de dettes supportées par l'Agence française de développement (AFD) est retracée dans la mission APD.

En revanche, la mission comprend des crédits qui ne participent pas à l'APD selon les critères définis par le Comité d'Aide au Développement (CAD) : ce sont en particulier les crédits afférents à la francophonie (programme 209), dès lors qu'ils ne bénéficient pas à des pays en développement, inscrits sur la liste établie par l'OCDE, la bonification des prêts outre-mer et les dépenses engagées au titre du sarcophage de la centrale nucléaire de Tchernobyl.

c) Des taux de consommation satisfaisants

En loi de finances initiale pour 2011 (LFI 2011), les crédits de la mission APD s'élevaient à 4,575 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), et à 3,334 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).

Les crédits consommés en 2011 ont atteint 5,031 milliards d'euros en AE et 3,297 milliards d'euros en CP , soit des taux de consommation respectivement de 110 % en AE et 99 % en CP.

Par rapport à l'exercice 2010, les crédits consommés en 2011 ont baissé de 7 % en CP et augmenté de 61 % en AE, ce qui reflète le calendrier de reconstitution des dotations aux banques multilatérales de développement et aux fonds multilatéraux. De manière générale, les engagements internationaux de la France se traduisent par une part élevée des dépenses obligatoires ou inéluctables , réduisant d'autant les marges de manoeuvre budgétaires du Gouvernement.

En vue d'améliorer la visibilité de ces engagements internationaux, la Cour des comptes recommande de développer des outils annuels de prévision sur les montants des contributions à verser 30 ( * ) .

Crédits consommés en 2011 de la mission « Aide publique au développement »

(en millions d'euros)

LFI 2011

Consommation 2011

Programmes

AE

(% de la mission)

CP

(% de la mission)

AE

(% de la mission)

CP

(% de la mission)

Titre 2

ETPT

110 - « Aide économique

et financière au développement »

2 492

(54,4 %)

1 170

(35,1 %)

2 289

(45,5 %)

1 183

(35,9 %)

0

0

209 - « Solidarité à l'égard

des pays en développement »

2 053

(44,9 %)

2 134

(64,0 %)

2 724

(54,1 %)

2 087

(63,3 %)

215*

2 386*

301 - « Migrations et développement solidaire »

30

(0,7 %)

30

(0,9 %)

19

(0,4 %)

28

(0,8 %)

0

0

Total mission APD

4 575

3 334

5 032

3 297

221

2 544

* En exécution.

Source : RAP de la mission « Aide publique au développement » annexé au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour 2011

d) Une part toujours prépondérante de l'aide multilatérale

La dépense multilatérale reste davantage prépondérante pour les deux programmes 209 et 110 . Toutefois, un rééquilibrage s'est opéré en 2011 sur le programme 209 où l'aide bilatérale a progressé de 12 % en AE et 14 % en CP, alors que l'aide multilatérale relevant de ce programme a diminué de 20 % en AE et augmenté de 1 % en CP.

La baisse des aides multilatérales concerne principalement la francophonie et les contributions volontaires aux Nations Unies. Ce rééquilibrage est toutefois en partie optique, puisque la hausse de la part de l'aide bilatérale traduit la budgétisation des dons-projets de l'Agence française de développement (AFD). L'aide bilatérale doit être privilégiée, dans la mesure où elle apporte une plus grande visibilité à l'APD française.

e) L'analyse des crédits par titre

Les programmes 110, 209 et 301 se caractérisent par la part prépondérante des dépenses d'intervention (titre 6) qui représentent 96 % des dépenses de la mission.

En cours de gestion 2011, des crédits ont été transférés du titre 6 au titre 7 (opérations financières), à hauteur de 1,9 milliard d'euros en AE et de 514 millions d'euros en CP. Ce transfert a été bienvenu au regard de la nature des ces crédits, consistant en des contributions aux fonds multilatéraux pour l'octroi de prêts et de dons.

Les dépenses de personnel (titre 2), concentrées sur le seul programme 209, ont quant à elles été limitées à 215 millions d'euros , traduisant une non-réalisation du plafond d'emplois ( 2 386 ETPT , soit - 131 ETPT par rapport au plafond d'emplois 2011 ). Mais cette différence s'explique principalement par des mesures de transfert et la correction d'une erreur technique (à hauteur de 19 ETPT).


* 30 Cour des comptes, analyses de l'exécution du budget de l'Etat par missions et programmes - exercice 2011 - Mission « Aide publique au développement ».

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