Mardi 9 avril 2013

- Présidence de M. Daniel Raoul, président -

Réforme de la politique agricole commune - Audition de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

La commission procède à l'audition de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, sur la réforme de la politique agricole commune.

M. Daniel Raoul, président. - Nous sommes heureux de vous accueillir une nouvelle fois, Monsieur le ministre pour vous entendre sur la réforme de la politique agricole commune (PAC) pour les années 2014-2020.

En mai 2010, notre commission a créé un groupe de travail commun avec celle des affaires européennes pour suivre ce dossier très important pour l'avenir de notre agriculture, dont les deux coprésidents sont Bernadette Bourzai et Gérard César. Ce groupe de travail présentera demain à la commission des affaires européennes une proposition de résolution que nous examinerons à la mi-mai.

La réforme de la PAC est, pour la première fois, soumise au processus de codécision, en application du traité de Lisbonne. Pouvez-vous nous dire où nous en sommes depuis le dépôt par la Commission européenne en octobre 2011 du paquet législatif consacré à la PAC ? La Commission ayant présenté un projet de cadre financier pluriannuel (CFP) en juin 2011, le Conseil européen des 7 et 8 février 2013 s'est accordé sur son contenu, puis le Parlement européen et le Conseil des ministres se sont respectivement prononcés les 13 et 19 mars. L'accord général sur la future PAC pourrait intervenir en juin. Quel en sera le cadre financier, législatif et règlementaire ? Des avancées sont-elles encore possibles ?

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. - A chaque fois que vous m'invitez, j'essaye de répondre présent, car j'estime de mon devoir de ministre d'informer la représentation nationale.

Un mot sur l'affaire de la viande de cheval : j'ai rencontré il y a trois semaines avec la ministre de l'environnement le commissaire européen, qui a accepté de présenter le rapport de la Commission européenne dès septembre, ce qui me convient. Un chapitre devrait être consacré à la traçabilité des viandes dans les plats préparés. Le premier courrier de ce commissaire va plutôt dans le bon sens.

La PAC a connu un tournant important puisque, pour la première fois, le trilogue - Commission européenne, Conseil des ministres et Parlement européen - se prononcera sur une réforme définitive. Deux instances ont déjà donné leur position : le Parlement européen le 13 mars et le Conseil des ministres le 19 mars.

Le premier débat que j'ai porté concerne le nouvel équilibre à trouver entre production végétale et animale afin d'assurer la viabilité économique de cette dernière. A l'heure actuelle, des éleveurs de vaches laitières ou de vache à viande arrêtent leur activité pour des raisons structurelles et pas seulement conjoncturelles. Nous devons parvenir, au moyen de divers outils, à stopper cette tendance pour maintenir la diversité de notre agriculture.

Bruxelles a voulu imposer la convergence des aides, en mettant fin aux droits à paiement unique (DPU) basés sur des références historiques encore en vigueur dans sept pays, pour instaurer partout les droits à paiement de base (DPB) d'ici à 2020. En clair, nous serions passés dans certaines zones de 400 euros à l'hectare à 290 ou 295 euros sur tout le territoire. Pour les départements qui sont en-dessous de ce seuil, comme la Lozère, l'effet de la convergence aurait été bénéfique ; pour les autres, il aurait été extrêmement déstabilisant, notamment dans le Grand Ouest et pour la polyculture élevage.

Avec la convergence totale, les agriculteurs auraient adapté leurs productions aux évolutions du marché - c'est d'ailleurs ce que les nôtres ont commencé à faire en délaissant l'élevage pour se consacrer aux céréales, au prix plus élevé. Si nous n'avions pas réagi, les productions en Europe se seraient spécialisées en fonction des avantages comparatifs, la France devenant un grand producteur céréalier, mais abandonnant la production animale à d'autres pays, notamment ceux qui ont choisi une production animale de type industriel, comme l'Europe du nord et l'Allemagne. Voilà pourquoi nous avons refusé la convergence totale, pour conserver nos spécificités régionales.

Depuis les décisions de 2003 sur le découplage, et le bilan de santé qui prévoyait encore 100 % de découplage, le revirement est impressionnant, puisque nous en revenons à plus de couplage des aides autorisé pour les productions animales, contre l'avis de pays qui ont industrialisé leur élevage - « I hate coupling » a affirmé mon homologue danoise lors du dernier Conseil des ministres. La Commission européenne a proposé de coupler 10 % des aides versées dans le cadre du premier pilier. Le Parlement européen a proposé 15 %, et j'ai obtenu qu'on remonte ce taux à 12 % au Conseil. La bataille au sein du trilogue consistera à trouver un point moyen entre 12 et 15 %. Revenir à la logique de couplage est historique : l'élevage restera une production agricole et non pas industrielle. Et nous venons de signer avec 14 pays une déclaration pour réaffirmer notre attachement à ce principe.

Autre outil à notre disposition : la surprime pour les 50 premiers hectares, sur lesquels le plus d'actifs agricoles sont concentrés dans les exploitations et qui pratiquent le plus souvent la polyculture-élevage ou l'élevage. Cela constitue donc un moyen de redistribution.

Notre axe stratégique est d'assurer la pérennité de l'élevage en termes économiques. Nous devons compenser la faible rentabilité capitalistique et la moindre productivité du travail dans l'élevage pour éviter qu'il ne disparaisse de notre pays. Aussi avons-nous été plutôt satisfaits des accords qui ont mis en minorité les pays qui avaient découplé leurs aides, comme l'Allemagne. Avec l'Irlande, l'Espagne, l'Italie, l'Europe centrale et, surtout, la Pologne, nous avons pour faire entendre la voix de la France une majorité que je ne cesse de renforcer.

Le verdissement des aides du premier pilier, qui représente 30 % de celles-ci, prend en compte trois critères : la rotation des cultures, le maintien de prairies permanentes et les surfaces d'intérêt écologique. Nous avons défendu le maintien des 30 %, parce que nous avons besoin d'une politique environnementale européenne cohérente, pour éviter des distorsions de concurrence entre pays de l'Union. Du fait de réelles réticences de certains pays, nous avons accepté de passer les surfaces d'intérêt écologique de 7 à 5 % de la surface de l'exploitation. La proposition du Parlement européen d'instaurer des seuils progressifs n'a pas été retenue par le Conseil. Les 30 % seront-ils forfaitaires, en sus de la convergence des aides, ou s'appliqueront-ils à chaque exploitation de manière proportionnelle? La question reste ouverte, d'autant que les pays qui nous soutiennent préfèrent la proportionnelle, tandis que le Parlement européen et la Commission souhaitent le forfait. Pour nous, les deux systèmes ont à peu près les mêmes conséquences.

La France souhaite également défendre les capacités de régulation de la PAC, notamment en cas de crise. Le rapport de Michel Dantin sur l'organisation commune des marchés (OCM) unique est extrêmement intéressant, notamment sur la régulation. Désormais, la France, qui a souvent été seule, dispose de l'appui du Parlement européen, ce qui renforcera sa position lorsque la négociation s'engagera dans le cadre du trilogue. L'OCM unique concerne aussi les quotas laitiers : la France n'en acceptera pas la suppression au 1er avril 2015 sans que soient instaurés des mécanismes évitant des crises à répétition. La Commission a accepté l'idée d'une réunion spécifique en septembre pour traiter de cette question à ma demande. Les Pays-Bas ont décidé d'augmenter de 20 % leur production laitière pour leurs exportations : en cas de crise, tout ce lait reviendrait sur le marché européen, provoquant un effondrement généralisé. Je m'exprimerai régulièrement sur ce sujet.

Sur les droits de plantation de la vigne, nous avons réussi à faire revenir l'Europe sur une décision prise en 2008. Le nouveau système s'appliquera en 2019 pour six ans : des droits à planter seront accordés, à raison d'une augmentation de surface de 1 % par an au maximum. Avec notre système d'autorisations, nous pourrons mieux gérer, rester en-deçà.

M. Roland Courteau. - Oui.

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Notre viticulture dispose donc d'un cadre clair pour les onze années à venir. Si elle représente le premier poste d'exportation de l'agro-alimentaire - 6 à 7 milliards d'euros -, son excédent s'accroît en valeur mais diminue en volume. Que la part de la France baisse alors que la consommation mondiale de vin augmente devrait nous inciter à nous poser des questions.

La question des quotas de sucre est technique. Plus vous les maintenez dans le temps plus il faut en ouvrir de nouveaux. Certains pays estiment qu'ils achètent leur sucre trop cher. Quoique sous présidence irlandaise, favorable aux quotas, le Conseil des ministres a décidé de continuer le système de quotas sucriers jusqu'en 2017 et de ne pas en ouvrir de nouveaux. Nous en saurons plus lors des discussions du trilogue car le Parlement européen défend une extension du système jusqu'en 2020.

S'agissant de l'enveloppe financière, en euros constants, nous avions 56,9 milliards sur la période précédente et nous serons, pour les années 2014 à 2020, à 56,3 milliards, soit un niveau quasi équivalent. Nous aurons moins sur le premier pilier, mais un milliard supplémentaire sur le deuxième ; l'enveloppe française est donc stabilisée.

Mme Bernadette Bourzai. - La semaine dernière, en audition devant nous, Alain Lamassoure, parlant du cadre financier pluriannuel 2014-2020, a mis en doute la capacité de la France à mobiliser ces quelque 56 milliards, soit 8 milliards par an. Il nous a en effet expliqué que pendant les discussions, Herman Van Rompuy avait fait passer au confessionnal chaque pays, sans doute pour faire des promesses à chacun, ce qui alimente les incertitudes sur les montants dont pourrait disposer la France. Pouvez-vous nous rassurer ?

Comment sauver l'élevage qui souffre d'une perte de compétitivité due, entre autres, au prix élevé des céréales ? Nous avons auditionné les quatre secteurs de production de viande ainsi que les producteurs de lait, tous nous ont confirmé leurs difficultés.

Pour le deuxième pilier, nos régions souhaitent pouvoir disposer de certaines des aides : comment gérer les crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), en laissant les régions adapter leurs politiques à leurs spécificités tout en évitant des distorsions de concurrence entre elles ?

M. Gérard César. - Quels moyens prévoyez-vous pour l'installation des jeunes agriculteurs ? J'aimerais également savoir si l'Europe continuera à prendre en charge une partie des assurances climatiques et sanitaires.

Le verdissement des aides ne doit pas empêcher les agriculteurs français d'être compétitifs face aux autres pays européens et surtout face à ceux qui, dans le monde, ne se préoccupent pas d'écologie.

A la suite de Bruno Le Maire, vous avez parfaitement travaillé sur les droits de plantation. Je vous en remercie de nouveau, non sans préciser qu'il conviendrait de laisser le soin à chaque bassin de production de gérer le 1 %. Enfin, où en sont les négociations entre les producteurs de lait et les industriels ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Je connais bien la position d'Alain Lamassoure, je préfère pour ma part garder le budget et avoir à garder le chèque britannique.

Dans la période précédente, le premier pilier français était doté de 48,9 milliards ; la Commission avait initialement proposé 47,8 milliards, nous avons obtenu 47,6 milliards. Pour le deuxième pilier, la Commission maintenait la dotation à 7,95 milliards. Comme nous avions choisi depuis des années de privilégier le premier pilier, les aides du deuxième pilier ramenées à l'hectare étaient en France de 40 à 42 euros quand elles se montaient à 300 euros en Italie. Face à la pression de la France, Herman Van Rompuy a préféré bloquer l'augmentation du premier pilier et favoriser le deuxième pilier en accordant, État par État, des augmentations d'enveloppe. C'est pourquoi nous sommes passés de 7,95 à 8,8 milliards sur ce deuxième, mais le budget global sera respecté.

En tant que ministre, je ne veux pas pénaliser la polyculture-élevage ; partant je suis obligé de jouer sur la production végétale pour donner à la production animale. La production laitière, qui a les DPU les plus élevés aujourd'hui, serait la plus pénalisée en cas de convergence à 100 %. Les vaches allaitantes continueront à bénéficier d'un soutien spécifique, puisque les aides aux bassins allaitants seront sanctuarisées dans le premier pilier. Pour éviter de trop dépenser, je suis obligé de privilégier les 50 premiers hectares. Ces transferts, qui ne sont pas encore arbitrés, seront de l'ordre de 500 à 600 millions, ce qui est loin d'être négligeable.

Nous avons eu hier une discussion houleuse avec la grande distribution, les producteurs de lait et les transformateurs. La France a un vrai problème : au Danemark, en Allemagne, aux Pays-Bas, le prix payé au producteur est plus élevé qu'en France. Malheureusement, chacun se renvoie la balle. Le droit de la concurrence ne m'autorisant pas à imposer un prix, je ne peux que pousser à la négociation. Deux propositions sont sur la table : la grande distribution, hors Leclerc et Système U, propose 2 centimes d'augmentation immédiate sur le lait de consommation, tandis que Leclerc et système U proposent une augmentation de 3 centimes sur le lait de transformation comme sur celui de consommation. La première se targue d'avoir consenti des efforts que n'ont pas réalisé les seconds, tandis que Leclerc et Système U veulent faire mieux que les autres... En outre, tout cela ne vaut que si les industriels répercutent la hausse sur les producteurs, d'où l'importance du médiateur et du rôle du Gouvernement pour impulser une dynamique positive.

Ensuite, au plan structurel je vais tout faire pour mettre en place un cadre contractuel : que tout le monde arrête de se bagarrer, et se mette autour de la table : voilà à quoi je travaille pour obtenir une vision partagée des différents acteurs des filières. Il faut modifier la loi de modernisation de l'économie (LME), puis la loi de modernisation agricole (LMA), pour intégrer les coûts de production et l'obligation de renégocier. Ces mesures majeures nous sortiront d'un système dont les producteurs sont les premières victimes.

M. Gérard César. - Et l'Observatoire des prix et des marges ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Il observe....

Mme Sophie Primas. - Que dit-il ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. - La grande distribution en est satisfaite à ceci près qu'il ne donne pas la marge nette des industriels. Il doit contribuer à la transparence, jusqu'au bout. Les producteurs sont les derniers à être rémunérés lorsque les coûts de production augmentent, alors qu'ils subissent sans délai la hausse des prix des matières premières. La régulation s'impose, nous aurons ce débat, mais ce n'est pas le rôle de l'Observatoire.

Un accord entre le ministère de l'agriculture et les régions fixe clairement le cadre de la régionalisation des aides. La négociation du deuxième pilier est nationale, mais en coordination avec les régions, dont les présidents sont autorité de gestion. Au sein du cadre national, figurent l'ICHN (indemnité compensatoire de handicaps naturels) et la politique d'installation notamment. Si nous avons de la marge, on pourrait envisager du top up, c'est-à-dire de mettre un peu plus sur les premiers hectares au profit des jeunes qui s'installent.

L'agro-écologie, qui a fait l'objet hier d'un colloque organisé par Joël Labbé, doit être prise en compte de façon systémique : plutôt que d'une addition de mesures agro-environnementales (MAE) spécifiques, je suis partisan de MAE-systèmes. Nous devons répondre à l'enjeu environnemental par un système d'objectifs, au lieu d'être obsédé par les moyens. Faire comprendre aux agriculteurs que l'objectif est de réduire les pollutions, non de respecter des contraintes, voilà la dynamique que j'entends créer pour l'agro-écologie.

M. Roland Courteau. - Vos propos sur l'élevage reflètent bien la situation de mon département. Des éleveurs me faisaient part ce matin encore de leurs difficultés : augmentation des coûts des intrants alimentaires et énergétiques, revenus fluctuants, contraintes environnementales... Ils souhaitent un rééquilibrage dans les négociations commerciales afin de ramener vers eux de la valeur ajoutée. Ils demandent une généralisation de l'étiquetage de l'origine tant aux produits bruts qu'aux matières premières utilisées comme ingrédients, ainsi que des outils de gestion des aléas climatiques et sanitaires.

Je salue l'efficacité du travail accompli pour obtenir le rétablissement des droits de plantation : mission accomplie ! Mais, nous avons un problème de compétitivité. Si nous ne compensons pas par les exportations, nous serons confrontés à une nouvelle crise. Je suggère de réaliser un état des lieux, comme nous l'avions fait avec Gérard César en rédigeant un rapport sur l'avenir de la viticulture française.

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Je suis tout à fait favorable à ce que le Sénat organise une réunion ou un colloque avec FranceAgriMer et l'interprofession viticole. Je serai des vôtres.

M. Rémy Pointereau. - Les éleveurs du centre sud sont en détresse : il faut les dissuader, notamment les jeunes, de retourner leurs prairies, car la France va bientôt manquer de viande. Au-delà du prix plus avantageux des céréales, il s'agit aussi du mieux-vivre : un éleveur travaille 365 jours par an. L'inquiétude tient aussi à la gestion du deuxième pilier par les régions, qui ne sont pas toujours en phase avec la réalité...

M. Alain Le Vern. - Comment pouvez-vous dire des choses pareilles ?

M. Rémy Pointereau. - C'est vrai ! Au-delà de la convergence des aides au plan européen, il faut viser celle des normes, y compris pour la directive « Nitrates ». Il n'est pas normal que des molécules de désherbant ou d'insecticide soient interdites en France ou en Espagne  et autorisées en Hongrie, ou en Tchécoslovaquie. La convergence des aides doit également être poursuivie au niveau national. Les zones intermédiaires subissent la double peine...

M. Bruno Sido. - Tout à fait !

M. Rémy Pointereau. - ... avec des références historiques en rendement élevées. Nous devons absolument revoir cela en fonction des coûts de production. Enfin, il faut des filets de sécurité concernant le prix des céréales. Depuis 2008, les prix des céréales se tiennent, réjouissons-nous, mais n'oublions pas la situation catastrophique des années 2001 à 2007, où le prix était descendu à moins de 100 euros la tonne. Nous avons retrouvé un prix équivalent à celui de 1983 et nous restons exposés à des retournements en fonction de la production en Australie, aux États-Unis ou en Amérique du Sud.

Concernant le verdissement, 30 % de rotation me paraît raisonnable. Sauf pour des régions spécialisées comme les Landes, où l'on fait maïs sur maïs... Soyons attentifs aux spécificités des territoires !

Sur les trois dernières années d'utilisation, les résultats des Cipan (cultures intermédiaires pièges à nitrate) sont nuls, et elles ont coûté cher aux agriculteurs.

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Je vous donnerai des réponses là-dessus.

M. Marcel Deneux. - Je voudrais sinon vous féliciter...

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Si !

M. Marcel Deneux. - ...du moins souligner que vous connaissez bien vos dossiers dans cette procédure de négociation inhabituelle : c'est le premier trilogue.

Il est clair qu'il faut opérer un rééquilibrage entre élevage et productions végétales. Le débat est récurrent : le comité de Guéret avait été créé en 1952 parce que les productions animales n'étaient pas à l'aise dans la FNSEA. Quant au prix du lait, je me rappelle avoir participé en 1981 à un groupe de travail, autour de Catherine Lalumière - à l'époque, les préfets fixaient le prix du lait à la consommation. N'oublions que l'enjeu est aussi sociologique : quelles que soient les conditions du marché, quand une ferme a renoncé à la production animale, elle n'y revient pas.

La meilleure façon d'assurer un revenu équilibré aux producteurs de lait est de maîtriser les volumes de production. Puisque les quotas ne sont plus à la mode, élaborons un système de stockage ou d'amélioration des revenus. Dans une économie libérale débridée, il n'y a pas de revenu agricole possible, nous le constatons tous les cinq ans.

Vous négociez à vingt-sept, mais la mise en oeuvre est très variable sur le terrain. Faute de transparence, je n'arrive pas à connaître l'incidence des prix fixés sur le revenu des agriculteurs allemands. Sur les Vingt-Sept, dix au moins ont un système différent du nôtre ; dans quatre Länder, il est courant de facturer la TVA sans la reverser au gouvernement.

M. Gérard Le Cam. - J'approuve totalement les orientations que vous avez prises au niveau européen, même si l'on peut aller plus loin sur certains sujets. Le plafonnement est-il maintenu à 300 000 euros ? Sinon, quels mécanismes de dégressivité sont-ils prévus à l'intérieur de ce plafond ? Je soutiens l'aide privilégié aux cinquante premiers hectares. De quel ordre est la majoration envisagée ? Les top up sont une bonne idée, non seulement pour les jeunes agriculteurs qui s'installent, mais aussi pour les agriculteurs bio, qui ont souvent de petites surfaces.

La Bretagne s'attend à une baisse des aides. En cas de convergence totale, elles passeraient de 537 millions d'euros à 417 millions, d'après les chambres d'agriculture. Cela serait catastrophique...

M. Gérard César. - Oui !

M. Gérard Le Cam. - ...pour une région qui nourrit presque la moitié de la France, avec 20 % de la production laitière et 57 % pour celle du porc. Si la baisse affecte la production laitière, la plus pénible et la plus prenante, les effets seront désastreux, avec des abandons à la clé. Comment associer les ministères de l'agriculture et du redressement productif...

M. Jean-Paul Emorine. - Oh la !

M. Gérard Le Cam. - ...pour traiter des abattoirs et transformer davantage afin de préserver l'emploi dans le secteur agroalimentaire ? C'est une question essentielle pour la Bretagne.

M. Bruno Sido. - Rémy Pointerau a excellemment introduit le sujet. Les primes à l'hectare étaient considérées comme des compensations économiques. On donnait plus à ceux qui produisaient plus, et moins à ceux qui produisaient moins ; c'est la même chose avec les DPU, même si ils ont été découplés. La convergence des DPU est une bonne chose mais elle reste insuffisante. Des zones entières n'atteignent que 50 quintaux de rendement, alors que d'autres atteignent 100 quintaux, pour un coût de production inférieur.

M. Rémy Pointereau. - Tout à fait !

M. Bruno Sido. - Au sein de l'enveloppe française, il faut donner plus à ceux qui ont moins, et moins à ceux qui ont plus - et je ne suis pas socialiste.

M. Alain Le Vern. - Vous allez le devenir.

M. Bruno Sido. - Il y a quelques années, le prix de la tonne de blé atteignait 160 euros ; tout était réglé et, pour Michel Barnier, il n'y avait plus besoin de primes. Six mois plus tard, le prix de la tonne dégringolait à 90 euros... Voilà pourquoi je pose la question de la régulation. Quel industriel ou commerçant accepterait de travailler avec des prix variant du simple au double ? Quelles pistes de réflexion proposez-vous ?

M. Joël Labbé. - Votre présence hier au colloque agro-écologie a été très appréciée, et vos propos ont été entendus. Si l'on attend de voir, certains signes sont d'ores et déjà positifs : la prime aux cinquante premiers hectares, les MAE-système. Il me semble, en revanche, que la question des plafonnements est réglée, à deux voix près, dont celle du camarade Mélenchon. C'est fort dommage, notamment pour les petits paysans. Je rejoins Marcel Deneux sur le difficile retour à l'élevage après une transition vers les céréales : il y a urgence à agir.

M. Jean-Paul Emorine. - Le budget de l'Europe baisse de 30 milliards d'euros, celui de la PAC de 49 milliards, et on nous explique qu'en France, le niveau des aides va rester identique ! Comme les autres, nous subirons une réduction identique à celle de l'enveloppe, soit 12 %.

Concernant le premier pilier, vous méconnaissez le monde de l'élevage lorsque vous affirmez que les éleveurs peuvent passer à des cultures céréalières : l'éleveur ne peut pas retourner les prairies à sa guise.

Avec Bernadette Bourzai, nous préparons une proposition de résolution sur la convergence : pour nous, elle doit rester un objectif en 2020 et ne pas être limitée à 65 %. Il faut que la répartition des aides en faveur de l'élevage soit réalisée dans les six ou sept années à venir, faute de quoi les éleveurs d'ovins de montagne disparaîtront.

Je m'étais beaucoup interrogé sur la surprime des cinquante premiers hectares, compte-tenu notamment du désaccord exprimé par les organisations professionnelles. Après analyse, il semblerait qu'elle puisse aider le monde de l'élevage, dont les exploitations sont souvent composées d'exploitations individuelles ou de GAEC transparents.

Soyez attentifs aux droits de plantation. Un taux de 1 %, ce n'est pas considérable chez nous, mais à l'échelle européenne, c'est autre chose. Concrètement, l'équivalent du vignoble de la Bourgogne peut être planté tous les trois ou quatre ans. Si vous ne voulez pas avoir de mauvaise surprise dans dix ans, il serait plus prudent de revenir à 0,5 %.

M. Alain Bertrand. - Je suis satisfait du travail accompli par le ministre. Quoique les mensures environnementales gagnent en efficacité dans la répétition, elles doivent être territorialisées : la Bretagne n'est pas le Massif Central, qui n'est pas la montagne sèche du sud de la France.

Avec quatre millions de vaches, et 25 % de la production européenne, il faut continuer à chercher des marchés. Les opérateurs ne sont pas efficaces. Le ministre, qui a la chance d'avoir une balance commerciale favorable, devrait élaborer une stratégie pour faire plus et mieux. Il faut viser les pays du Maghreb, la Turquie, et une partie des pays européens : ceux qui s'enrichissent consommeront plus de viande.

Il est nécessaire d'améliorer le zonage de l'ICHN ; voilà un budget que l'on maîtrise. Un mot de sémantique encore : les agriculteurs et éleveurs pourraient interpréter le mot agro-écologie comme la menace de contraintes supplémentaires. Enfin, nous avons besoin de dates pour répondre aux questions qui nous sont adressées sur le calendrier de la convergence comme sur les DPU par production.

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Si on modifie la LME, c'est pour intégrer l'évolution des coûts de production dans l'obligation de négociation. Il faudra ensuite modifier aussi la LMA pour toucher les producteurs.

Nous sommes plutôt bien partis sur l'étiquetage, l'Europe a pris conscience de l'enjeu. Nous travaillons avec les filières bovine, porcine, et des volailles ; nous nous réunirons la semaine prochaine pour élaborer une stratégie. La filière bovine est venue me voir : j'ai réussi à débloquer 20 millions pour le lait et autant pour les bovins allaitants, dont 8 millions pour les jeunes bovins. Une contractualisation dans la filière bovine avait été évoquée, sous la responsabilité de l'interprofession. L'initiative a achoppé, en partie du fait de gros opérateurs de l'abattage, qui refusent toute contractualisation. Nous repartons à zéro, alors que nous devons structurer cette filière, avec un objectif viande bovine française (VBF), et un cahier des charges plus strict. Nous ferons de même pour la filière porcine (VPF), la volaille, la filière ovine... Malheureusement, nos filières sont inorganisées, refusent de se parler, et le ministre doit s'engager.

Il est nécessaire de construire avec les fonds européens un système mutualiste d'assurance récolte prenant en compte la solidarité et les systèmes fiscaux, notamment les déductions pour investissement (DPI) et pour aléas (DPA).

Nous voulons redistribuer sans pénaliser les zones intermédiaires. Les premières victimes de la convergence ne sont pas les zones céréalières, mais bien la polyculture-élevage. Tous les calculs le montrent, l'impact de la redistribution intervient jusqu'aux cent premiers hectares. Dans les zones intermédiaires céréalières, comme dans les autres, la redistribution se fait des plus grandes exploitations vers celles de taille moyenne. C'est là qu'intervient cet élément de critique : faire 50 quintaux dans les zones intermédiaires céréalières n'est pas la même chose que faire 80 et 100 à chaque fois. Cela fait partie des enjeux à traiter.

Le prix des céréales nécessite une gouvernance à l'échelle mondiale : c'est notre objectif, avec la mise en oeuvre des accords passés dans le cadre du G20 négociés par le précédent gouvernement. Nous travaillons en outre avec la FAO, avec l'ensemble des ministres de l'agriculture. La première réunion, à l'initiative de la France, a réuni 32 ministres, la prochaine en réunira davantage, car ce sont les conditions mondiales de la production qui déterminent les prix. L'année dernière, c'est la sécheresse aux États-Unis qui a fait flamber les prix. Cette année, le prix du lait répercutera la sécheresse en Nouvelle-Zélande. La tension sur le marché des protéines végétales est encore très forte. Nous avons en outre l'avantage d'avoir une plage de capacité de production beaucoup plus longue que d'autres. L'Europe centrale, avec l'Ukraine, ne pourra jamais faire qu'une récolte. Notre climat nous offre plus de possibilités.

Les Cipan ont été conçues dans l'idée qu'il fallait couvrir les sols l'hiver, pour que l'azote minéralisé ne finisse pas dans la rivière. Or, en travaillant un sol après récolte, surtout dans le sud-ouest où il fait chaud, on n'obtient que de la poussière. Je propose donc de semer des plantes qui vont se livrer concurrence : la céréale poussera la première, puis la seconde, qui aura été semée en même temps. Le sol n'aura plus à être travaillé et il sera couvert. Voilà comment j'entends faire évoluer les Cipan.

M. Rémy Pointereau. - Si ça se passe bien.

M. Daniel Dubois. - Un rêve...

M. Stéphane Le Foll, ministre. - Si vous étiez venus avec moi au SIMA (Salon mondial des fournisseurs de l'agriculture et de l'élevage), vous auriez constaté que la grande évolution à venir, ce sont ces semis sans labour, conservant les sols, et avec la faculté de semer six à sept plantes en même temps, avec des mélanges. Voilà la révolution de demain.

Évoquant la Bretagne, Gérard Le Cam m'interroge sur le redressement productif. Tout l'enjeu de la méthanisation est l'investissement qu'elle implique : nous allons promouvoir un objectif d'azote total. Fertiliser avec l'azote organique en excédent évitera à la Bretagne d'en importer deux fois - mieux vaut acheter du soja et fertiliser avec le lisier.

Le plafonnement, refusé par certains pays européens, est un vrai serpent de mer. La dégressivité des aides constitue un outil de redistribution qui a l'avantage d'être de notre ressort. Nous n'aurions un impact équivalent que grâce à un plafonnement à 50 000 euros, avec les effets de seuil que cela implique.

Mme Sophie Primas. - Il y en a un aussi avec les 50 premiers hectares.

M. Stéphane Le Foll, ministre. - La déclaration annuelle et la transparence des GAEC facilitent la gestion.

Il faut mettre en oeuvre une régulation à l'échelle mondiale. Limiter la volatilité des prix implique que la spéculation n'amplifie pas les mouvements, d'où les limites de prise de position dans la loi sur les réformes bancaires. On a certes besoin de couverture sur le marché à terme, encore faut-il que la spéculation ne représente pas dix à vingt fois le marché physique.

Marcel Deneux a raison, une fois qu'on a arrêté l'élevage, on n'y revient pas : il faut du temps pour recréer le savoir-faire et les équipements. Il y a, Jean-Paul Emorine, un risque concernant le retournement des prairies permanentes ; ceux qui pensent échapper ainsi aux critères de verdissement ne doivent pas se leurrer : la base de référence est l'année 2012. Dites-leur surtout d'arrêter !

La Commission proposait 2,5 % pour l'augmentation des droits de plantation des vignes. Nous avons arraché un accord à 1 %. Si j'avais demandé 0,5 %, j'aurais été isolé. Avec 1 %, l'Italie a été à mes côtés et l'Espagne, qui nous a rejoints, ne voulait pas de 0,5 %. A nous de voir comment paramétrer les autorisations - Gérard César a souhaité une subsidiarité par bassin.

Nous mettons en place la stratégie d'exportation que souhaite Alain Bertrand. L'interprofession bovine se rend en Algérie. La Turquie avait bloqué ses importations après avoir abattu énormément de vaches de réforme. Ces marchés sont importants pour nous, nous devons y être présents. Les exportations ont été momentanément bloquées. L'Algérie, le Maghreb sont en effet des marchés sur lesquels nous devons être présents.

Enfin, la règle de l'ICHN est nationale et l'application régionale.

M. Daniel Raoul, président. - Nous vous remercions, et apprécions votre précision et la maîtrise des dossiers dont vous faites preuve.

Nomination d'un rapporteur

M. Jean-Jacques Lasserre est désigné rapporteur sur la proposition de résolution européenne contenue dans le rapport n° 461 (2012-2013), adopté par la commission des affaires européennes, tendant à la création d'un droit européen pour le consommateur à la maîtrise et à la parfaite connaissance de son alimentation.

Mercredi 10 avril 2013

- Présidence commune de MM. Daniel Raoul, président et de Simon Sutour, président de la commission des Affaires européennes -

Audition de M. Benoît Battistelli, président de l'Office européen des brevets

La commission procède à l'audition, en commun avec la commission des Affaires européennes, de M. Benoît Battistelli, président de l'Office européen des brevets.

M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - Je souhaite la bienvenue aux membres de la commission des affaires économiques et à son président, ainsi qu'à M. Battistelli, président de l'OEB, qui va nous parler de la fin d'un feuilleton qui dure des décennies : celui du brevet unitaire européen. Ce dossier est particulièrement important pour les entreprises européennes, et surtout pour les PME : le brevet unitaire protégera la propriété intellectuelle européenne à un coût moindre, ce qui accroîtra notre compétitivité. Comment fonctionnera-t-il et comment les difficultés qu'ont suscitées jusqu'au bout l'Italie et l'Espagne seront-elles réglées ?

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Je me félicite de cette audition commune organisée à l'initiative de la commission des affaires européennes. Il est important de faire le point sur l'accord obtenu, par voie de la coopération renforcée, sur la création d'un nouveau brevet unitaire, après quarante ans de combat. Quel sera le rôle de votre Office ? L'absence de l'Italie et de l'Espagne du dispositif sera-t-elle un handicap ? Surtout, quels seront les avantages pour les entreprises françaises ?

M. Benoît Battistelli, président de l'Office européen des brevets (OEB). - L'OEB est une organisation intergouvernementale, et non une agence de l'Union européenne. Elle rassemble 38 États membres, une grande Europe allant de l'Islande à la Turquie, de la Finlande à Chypre et comprenant six cent millions d'habitants, soit autant que les États-Unis, le Japon et la Corée réunis.

La capacité d'innovation européenne constitue l'un des principaux atouts pour sortir de la crise financière. Le brevet, instrument juridique protégeant et valorisant l'investissement, doit donc figurer parmi les priorités. L'OEB, créé par la convention sur le brevet européen en 1973, est un outil intégré et très performant : il forme un système régional grâce auquel les entreprises peuvent obtenir, sur la base d'une seule demande, la protection de leurs inventions dans quarante pays d'Europe. Il offre ainsi une procédure uniforme et centralisée de recherche et d'examen des demandes de brevets présentant un niveau de qualité cohérent. Cela rend la protection plus simple, moins chère et plus attrayante pour les déposants, qu'ils viennent d'Europe ou du reste du monde.

Les pères-fondateurs de l'OEB estimaient que 30 000 dépôts annuels seraient le signe d'un beau succès. Ce chiffre a été dépassé en six ans, et les dépôts n'ont cessé d'augmenter depuis pour atteindre en 2012 le chiffre record de 257 750, en hausse de 5,2 % par rapport à 2011. C'est que l'OEB a acquis une réputation d'excellence parmi les offices de brevets. Nous examinons les demandes avec une telle rigueur, que nos brevets sont considérés comme les plus sûrs au monde. Pour atteindre ce niveau d'excellence, l'OEB s'est doté de moyens humains et techniques. Il compte 7 000 employés, ce qui en fait la deuxième institution publique européenne, après la Commission ; ses 4 100 ingénieurs scientifiques hautement spécialisés et tous trilingues couvrent l'ensemble des champs technologiques. Leurs rapports examinent la validité des demandes de brevet, en relevant toute antériorité de nature à affecter le caractère nouveau de l'invention présentée. Potentiellement dépourvu de limites spatiales et temporelles, ce travail est lourd et complexe. L'OEB est le seul organisme au monde capable de le conduire en six mois.

Ses outils de recherches sont devenus des standards mondiaux : EPOQUE est utilisé par quarante offices nationaux, comme en Chine, au Brésil, en Australie, ou au Canada, ainsi que dans la plupart des pays européens. Son outil de classification des brevets et de la littérature technologique vient d'être adopté par l'Office américain des brevets, et a donné naissance le 1er janvier 2013 au système Classification coopérative des brevets (CPC), commun à l'OEB et à l'Office américain. Avec ses 250 000 catégories, c'est l'outil le plus fin du monde, qui a fait de l'Europe le leader en la matière. La Chine, avec qui l'OEB coopère depuis trente ans, s'est appuyée sur le système européen pour développer ses propres outils, ce qui aide considérablement nos entreprises qui y investissent.

L'OEB a une forte dimension internationale : 62 % des brevets qu'il délivre le sont à des Etats non membres. Ses premiers clients sont les Etats-Unis (25 % des brevets), devant le Japon (20 %). Le premier client européen est l'Allemagne, avec 14 % des brevets. Suivent la Chine avec 7 %, la Corée du Sud avec 5,6 % et la France, pour moins de 5 %. Il y a deux ans, la Chine et la France étaient au même niveau. La demande de brevets est en hausse en 2012 : de 10 % en Asie, de 5,6 % aux États-Unis, et de 2,3 % en Europe, ce qui est assez positif pour être signalé. La demande de brevets avait baissé de 7 % en 2009, sous l'effet de la crise, avant de repartir en 2010, et de retrouver en 2012 le niveau de 2008.

Si ce système est efficace, pourquoi le changer ? Le système européen était en réalité bancal, car pour chaque brevet délivré par l'OEB, une démarche de validation devait être effectuée dans chaque Etat membre. Les brevets nationaux forment en quelque sorte un bouquet, mais chacun a sa vie propre : les contentieux qui peuvent survenir ici ou là font courir à l'entreprise qui les possède le risque d'une importante perte de temps et d'argent, sans parler des possibles divergences d'interprétation des juridictions nationales. C'est pourquoi la question d'un brevet unitaire est sur la table depuis quarante ans. Deux règlements du 20 janvier 2013 lui ont donné naissance, en application d'une décision de décembre 2012. Ce brevet unitaire, délivré à l'issue d'une unique démarche par l'OEB, sera directement applicable dans vingt-cinq États membres.

L'Espagne et l'Italie s'y sont en effet longtemps opposées pour des raisons linguistiques. Depuis sa création en 1973, à une époque où l'Espagne ne faisait pas partie de l'Union européenne, les langues de travail de l'OEB sont l'anglais, l'allemand et le français, langues de 80 % des brevets déposés. Depuis 2010, l'Espagne conteste le statut du français et de l'allemand, et l'Italie, la Pologne, et la Suède à sa suite. Malgré leur opposition, le statu quo a été décidé : le système a fait ses preuves, les entreprises s'y sont habituées, et le coût d'une traduction en trois langues seulement reste acceptable. Voilà pourquoi, le brevet de l'Union européenne a été, après le divorce international, le second exemple de coopération renforcée.

Pour la création de la juridiction unifiée, il a fallu innover et passer par le droit international : un traité a été signé en février 2013. Paris accueillera l'instance centrale de la Cour européenne des brevets (CEB), Londres et Munich deux chambres spécialisées. Des chambres décentralisées concilieront la technicité des contentieux avec la proximité des justiciables. Le brevet unitaire sera mis en oeuvre lorsque la CEB sera effectivement créée, c'est-à-dire lorsque le traité sera ratifié par treize des États parties dont l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France.

Pour maintenir son influence en matière de droit de la propriété intellectuelle, notre pays a tout intérêt à ratifier ce traité en premier. Certaines questions sont en effet restées en suspens : c'est le cas des règles procédurales, qu'un groupe préparatoire examine en ce moment. La France a une carte à jouer. Elle a été leader dans la création de l'OEB, comme elle l'a été dans cette matière depuis la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle de 1883. Une grande partie de la doctrine du droit des brevets procède de la réflexion française. C'est la raison pour laquelle Paris accueillera la chambre centrale de la CEB.

L'Allemagne ne fera rien avant les élections générales de l'automne, ce qui laisserait envisager une ratification au milieu de l'année prochaine. Quant au Royaume-Uni, situé quelque part entre l'Europe et le reste du monde, son attitude est imprévisible. Il serait donc opportun que le Sénat intervienne auprès du gouvernement pour accélérer la ratification du traité. Politiquement, le sujet fait consensus. Le brevet unitaire réduira en outre d'environ 70 % les coûts que supportent les entreprises. Les principaux bénéficiaires en seront les PME, les centres de recherche et les universités, c'est à dire des structures moins bien protégées en Europe qu'elles pourraient l'être.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Nos entreprises ont en effet tout à y gagner. Il serait bon, monsieur le Président de la commission des affaires européennes, que nous nous rapprochions, pour soutenir cette rectification.

M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - Absolument.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - L'installation du siège de la CEB à Paris est une bonne nouvelle. Vous y avez sans aucun doute été pour quelque chose.

Quelle différence y a-t-il entre l'OEB et l'Office communautaire des variétés végétales, qui siège à Angers ? Celui-ci protège tout autant la propriété intellectuelle.

M. Benoît Battistelli. - Le certificat d'obtention végétale (COV) n'est pas un brevet, c'est un outil industriel très spécifique et limité à ce domaine. A l'inverse, un brevet peut concerner n'importe quel domaine technologique. De plus, l'Office communautaire des variétés végétales est une agence communautaire, tandis que l'OEB est une organisation internationale créée par traité, qui a une gouvernance et un budget propres. Les ressources de ce dernier ne proviennent que des entreprises qui sollicitent ses services. Elles représentent environ 2 milliards d'euros. L'OEB ne reçoit pas un centime d'argent public, quel qu'il soit.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Je fais partie de ceux qui pensent, à l'inverse de M. Le Cam par exemple, que le COV constitue un important progrès dans la protection contre la brevetabilité du vivant. La France a largement oeuvré pour sa création.

M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - Un organisme qui ne demande pas d'argent public, c'est suffisamment rare pour être souligné. Je suggère que l'on suive le président Raoul sur la ratification, et que nous prenions ensemble une initiative.

M. Benoît Battistelli. - Non seulement l'Office ne reçoit pas d'argent public, mais il en rapporte aux États membres : 40 millions d'euros par an à la France, 130 millions d'euros à l'Allemagne.

M. Richard Yung. - Dans une vie antérieure, j'ai utilisé cet argument pour solliciter l'adhésion de Monaco à la convention qui a donné naissance à l'OEB. Je lisais l'incrédulité dans les yeux du ministre monégasque.

La CEB va trancher des litiges entre titulaires de droits de propriété intellectuelle. Se prononcera-t-elle également sur les modalités de délivrance des brevets, ou l'OEB conserve-t-il un système de chambre de recours ?

Vous avez passé un accord avec une grande entreprise américaine que nous commençons à chatouiller sur le plan fiscal pour établir une base de données de traductions. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

On vous soupçonne parfois d'avoir une conception extensive de la brevetabilité du vivant, et une politique limitée de contrôle et d'appel. Que répondez-vous à cette accusation ?

M. Alain Richard. - Le champ du droit de la propriété intellectuelle est extraordinairement intéressant, et parfois miné. Je salue les acquis de l'OEB et me félicite de la création d'une juridiction commune. Nos chefs de juridictions suprêmes sont sensibles à la capacité d'influence de notre système de droit. En outre, il y a là une opportunité en termes de ressources humaines, car il faut des magistrats de bon calibre pour trancher ce type de litige.

Les délais de ratification parfois ahurissants qui sont les nôtres sont liés à la capacité de production d'un unique bureau du Quai d'Orsay, perpétuellement encombré. Placer ce dossier au sommet de la pile impose de relancer le cabinet de M. Fabius.

M. Richard Yung. - Je l'ai interrogé hier : il y a un stock de 200 conventions...

M. Gérard Le Cam. - Lors de débats récents au Sénat, nous avons donné l'exemple de l'obtenteur Gautier, semencier de laitues notamment, pour montrer que si une variété est protégée par un COV, rien n'empêche qu'une partie de cette variété soit également protégée par un brevet, par exemple, sur un gène de résistance à un parasite contenu dans la variété sous COV. Confirmez-vous que le propriétaire d'un brevet peut demander, lors de la commercialisation de la semence, des droits au titre de son brevet ?

Les limites entre invention et découverte s'effacent peu à peu, notamment lorsqu'on accepte un brevet sur un gène natif, bien qu'il ne s'agisse que de la preuve expérimentale d'une réalité existante. En outre, de plus en plus de brevets sont déposés sans que la découverte avancée soit vérifiée dans ses effets. C'est le cas avec des dépôts de brevets sur des fonctions de gène présumées, et non réellement prouvées. Or de tels brevets peuvent contraindre les organismes de recherche à abandonner leurs travaux en raison des droits de propriété très élevés. Quelle analyse en faites-vous dans la perspective de l'élaboration d'un accord transatlantique de libre-échange ?

M. Jean Bizet. - L'OEB a réalisé un travail exceptionnel. L'approche transversale qui prévaut dans cette matière, sur laquelle je me suis penché dès la fin des années 1990, est tout à fait opportune. Je salue le travail de Richard Yung, et me félicite que droite et gauche soient ici sur la même ligne. Enfin, je veux remercier le président Poncelet et Laurent Wauquiez pour avoir fait avancer le dossier du brevet unitaire : le premier, quoique membre de l'Institut, a renoncé à l'usage exclusif du français, le second pour avoir soutenu ma proposition de lancer une coopération renforcée. Il ne faut pas se priver d'utiliser cette possibilité pour faire avancer les choses, ce que n'avait pas permis le dialogue que nous avions établi avec Mme Rossana Boldi, notre homologue au Sénat italien.

La Chine est le premier des pays émergents à profiter des bienfaits d'une bonne protection de la propriété intellectuelle. J'invite les pays européens, dont la France, à prêter la même attention à ces questions, sous peine de fragiliser leur tissu économique.

Le COV est un titre de propriété intellectuelle, comme le brevet, mais appliqué au végétal. Ce sont des outils complémentaires. Non assorti de droit de propriété, il n'interrompt pas la recherche, et c'est là son grand mérite. Le Royaume-Uni, qui avait tout ouvert, n'a plus de filière semencière. Pourriez-vous rentrer dans le détail de la brevetabilité du vivant ? Renforcer l'excellence de nos filières impose de réaffirmer que le vivant n'est pas brevetable.

Je voterai des deux mains un texte qui permettrait la ratification. La France doit rester pionnière.

M. Benoît Battistelli. - La CEB sera compétente en matière de contrefaçon, comme de validité des brevets délivrés. Ce dernier cas de figure est marginal, qui ne concerne qu'un brevet sur mille délivrés. Ce chiffre est vingt fois supérieur aux Etats-Unis. L'OEB conservera les mécanismes d'opposition et de recours qu'il offre déjà.

Un mot sur notre système de traduction, ou pattern translate. Pour délivrer un brevet, il faut d'abord s'assurer que l'invention est nouvelle, ce qui s'apprécie au regard non des seuls brevets déposés, mais de l'ensemble des connaissances existantes. Comme nous ne pouvons pas traduire des millions de pages, nous avons décidé d'utiliser les technologies de traduction automatique, et depuis que je suis à la tête de l'OEB, la meilleure existant sur le marché : celle de Google. Les algorithmes qu'utilise Google translate s'appuient sur des statistiques de traduction, ce qui rend sa base de données riche, variée et précise. Nous l'utilisons gratuitement, sans clause d'exclusivité, en échange d'une mise à disposition des dizaines de traduction que nous possédons en trois langues, réalisées par des professionnels.

M. Alain Richard. - Les deux versions ?

M. Benoît Battistelli. - Tout à fait. Disponible sur Internet, notre système couvre quatorze langues - chinois inclus depuis décembre 2012 -, vingt-huit à la fin 2014. Les traductions sont parfois linguistiquement étranges, mais restent utilisables par les ingénieurs. Nous sommes les seuls à offrir une telle qualité de service pour repérer dans un océan de documents les deux ou trois pages dont on a vraiment besoin.

La brevetabilité du vivant est le seul domaine dont les règles sont fixées par le législateur européen. Nous avons décidé d'appliquer la directive « Biotechnologies » de 1998, ainsi que l'interprétation qu'en fait la Cour de justice de l'Union européenne. Elle exclut notamment du champ des brevets les gènes humains, les animaux, les plantes. Je confirme que le COV est un titre de propriété intellectuelle complémentaire. Cela n'empêche pas qu'une fonction particulière fasse l'objet d'un brevet. Cela ne nuit pas à l'innovation, bien au contraire. On nous accuse de laxisme : l'OEB n'a pas validé le brevet de la société Myriad Genetics qui lui aurait assuré un monopole sur le dépistage du cancer du sein.

L'OEB ne délivre que des brevets de qualité. C'est pourquoi sur deux demandes, une seule aboutit à un brevet. Sur la moitié restante, nous réduisons généralement le champ du brevet délivré. Un seul brevet est donc accordé sans modification substantielle pour quatre demandes. En matière de biotechnologies, la part des brevets délivrés n'est que d'un quart.

Monsieur le sénateur Richard, vous avez raison : Paris a un rôle à jouer dans la mise en oeuvre de la CEB. Il y a trois ou quatre ans, avait été créée au TGI de Paris une chambre spécialisée pour connaître des litiges relatifs au droit de la propriété intellectuelle sur l'ensemble du territoire, ce qui a constitué un vivier de magistrats compétents. Bien que la CEB soit européenne, le lieu a son importance. L'OEB a d'ailleurs son siège à Munich, comme l'office allemand, parce que l'Allemagne est la puissance dominante en Europe - elle pèse trois fois la France en matière de brevets. Une volonté politique peut modifier l'ordre au sein de la file des 200 conventions. Directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, j'ai d'ailleurs vu, lors de la ratification du protocole de Londres, que cela pouvait jouer en sens inverse...

Dans le système mondial des brevets, coexistent une conception européenne, qui a progressivement dépassé ses frontières, et une conception américaine. Selon cette dernière, un brevet est facilement délivré, à charge ensuite aux tribunaux de trancher les litiges. Nous combattons la reconnaissance mutuelle des brevets dans le cadre du dialogue transatlantique, car elle reviendrait à reconnaître sans autre forme d'examen des brevets accordés sur les végétaux ou au mépris d'appellations d'origine contrôlée par exemple.

M. Alain Richard. - Plusieurs milliards de dollars sont en jeu.

M. Benoît Battistelli. - L'économie française ne peut compter ni sur ses ressources naturelles, ni sur son coût du travail pour faire la différence dans la compétition mondiale, mais sur la valeur ajoutée. C'est pourquoi les marques, synonymes de créativité, de design, sont si importantes. L'innovation est la seule manière de maintenir des coûts élevés.

M. Joël Guerriau. - Le brevet unitaire est une formidable avancée. Peut-on imaginer demain un « brevet pour tous » au niveau mondial ? L'OEB a aujourd'hui une fonction de veille, de surveillance sur les tentations de contrefaçon. Fournissez-vous également un soutien juridique à ceux dont les intérêts sont menacés ?

Peut-on imaginer que l'OEB étende demain son périmètre géographique ? Une partie de l'Afrique parle français - avant que les Chinois s'y implantent.

M. Daniel Dubois. - Vous avez présenté les chiffres de la croissance de la demande de brevets. Pouvez-vous nous donner leur ventilation par pays ? Est-ce un indicateur avancé de leur situation économique ? Enfin, combien coûte le dépôt d'un brevet ?

M. Alain Bertrand. - Le brevet protège la créativité, la capacité d'exportation, et en définitive l'emploi. Protéger les droits de propriété intellectuelle, c'est défendre notre industrie, notre croissance, nos produits, bref la place de la France dans le monde. Sur la progression des brevets délivrés, les résultats de l'OEB, les perspectives de ratification, vous ne nous annoncez que des bonnes nouvelles. Ne serait-il pas opportun, et même urgent, de suggérer au président de la République et au ministre de l'économie la création, sur le modèle du vôtre, d'un office européen du commerce et de l'équité des échanges ? En attendant, nous subissons de plein fouet la concurrence des autres pays, car dans la mondialisation, la France se retrouve Gros-Jean comme devant.

M. Benoît Battistelli. - Le brevet mondial nécessiterait une législation mondiale. Tant que les États-Unis n'auront pas des règles similaires aux nôtres sur le vivant, cela restera un beau rêve. Il y a une Organisation mondiale de la propriété industrielle au sein de l'ONU, mais elle progresse à la vitesse du dialogue Nord-Sud... Modestes techniciens, nous nous contentons de promouvoir l'harmonisation des pratiques et des procédures. Nous collaborons avec les États-Unis, le Japon, la Chine et la Corée au sein d'IP5, qui représente 90 % des brevets mondiaux.

L'OEB n'a pas de compétence spécifique en matière de contrefaçon. Son rôle se limite à la délivrance des brevets. Un Observatoire de la contrefaçon, rattaché à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI), promeut la coopération des services douaniers. Nous avons en outre un rôle de diffusion de l'information relative à l'innovation technologique sur notre espace internet, où 80 millions de brevets sont consultables, et à travers notre politique de pattern awareness, à l'attention des entreprises, qui sont plus souvent tiers que détentrices de brevets. C'est la contrepartie nécessaire au monopole que confère l'innovation brevetée.

Nous coopérons avec l'Afrique, ainsi qu'avec le pourtour méditerranéen. Des accords de validation sont en cours, qui reconnaîtront dans le pays signataire la validité d'un brevet européen, en échange d'un soutien au développement de ses propres brevets. Un tel accord sera signé au Maroc dans quelques semaines, qui facilitera l'investissement à l'étranger. Nous discutons en outre avec la Tunisie. L'Afrique francophone de l'Ouest possède sa propre organisation de la propriété intellectuelle, regroupant seize Etats et avec laquelle nous travaillons en étroite collaboration.

En matière d'évolution respective des brevets dans les pays européens, la France occupe la deuxième position avec une croissance de 2 %, derrière l'Allemagne (3 %). La part du Royaume-Uni a beaucoup diminué, comme celle des Pays-Bas. Indicateur plus pertinent, le nombre de brevets par habitant place la Scandinavie en tête de peloton, suivie par la Suisse, l'Allemagne. Sur cet indicateur, la France joue en « deuxième division ».

Le coût moyen d'un dépôt de brevet européen se situe entre 25 000 et 30 000 euros, en y incluant la rémunération du conseiller en propriété intellectuelle.

Un brevet a pour premier objectif de susciter des dépenses d'investissement. En effet, les entreprises n'investissent dans la recherche et développement que dans la perspective d'en exploiter les résultats. Un cercle vertueux investissement-innovation-compétitivité-emploi s'enclenche ainsi. Nous remettons le prix de l'inventeur européen de l'année : celui-ci est récompensé non pas pour les brevets déposés, mais pour les performances économiques ainsi réalisées. La prochaine édition se tiendra à Amsterdam le 28 mai prochain. Sur les quinze candidats sélectionnés, deux sont Français.

La création d'un office européen du commerce n'est pas envisageable, car les Etats européens ne parviennent pas à s'accorder sur ces questions comme ils le font en matière de brevets. Vous m'incitez à solliciter le président de la République dans ce sens : bien que j'aie travaillé trente ans au ministère des finances, je n'ai plus de contact avec les institutions françaises depuis que j'ai été élu à la tête de l'OEB. Cela en dit long sur la capacité des autorités françaises à entretenir des relations avec leurs compatriotes à la tête des organisations internationales.

M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - C'est bien triste. Nous réfléchirons à la manière de prendre le relais. Je vous remercie.