ARTICLE 47 QUATER (DEVENU ARTICLE 94 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2012)
EXONÉRATION DE CFE POUR LES SPECTACLES MUSICAUX ET DE VARIÉTÉS

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE (3ÈME SÉANCE DU MARDI 15 NOVEMBRE 2011)

Article additionnel après l'article 47

Mme la présidente. L'amendement n° 418 présenté par M. Dell'Agnola, M. Martin-Lalande, Mme Roig et Mme Marland-Militello, est ainsi libellé :

Après l'article 47, insérer l'article suivant :

I. - Après le e) du 1° l'article 1464 A du code général des impôts, il est inséré un f) ainsi rédigé :

« f) Les spectacles musicaux et de variétés. ».

II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l'État, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour défendre l'amendement n° 418.

M. Richard Dell'Agnola. Cet amendement a pour objet de corriger certains effets négatifs de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises - la CVAE - et de rétablir l'égalité fiscale entre les acteurs du spectacle vivant. La réforme de la taxe professionnelle, devenue la contribution économique territoriale, s'est traduite par une lourde aggravation de la charge fiscale pesant sur les entreprises de production et de diffusion du spectacle vivant musical et de variétés dont le chiffre d'affaires est compris entre 500 000 euros et 7,6 millions d'euros, soit la majorité de la profession.

La CVAE taxe la valeur ajoutée de l'entreprise dès lors que son chiffre d'affaires est supérieur à 500 000 euros. Auparavant, seules les entreprises dépassant 7,6 millions d'euros de chiffre d'affaires étaient taxées sur la valeur ajoutée. Les entreprises du spectacle vivant musical et de variétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7,6 millions d'euros sont à peine trente sur un total de plus de 900. Autrement dit, la majorité d'entre elles paie pour la première fois une taxe assise sur la valeur ajoutée.

Or les producteurs de spectacles vivants musicaux et de variétés ont une masse salariale, et donc une valeur ajoutée élevée, représentant en moyenne 40 % de leur chiffre d'affaires. Au regard de leur réalité économique, ils sont désormais redevables d'une taxe particulièrement élevée. Pour les PME réalisant moins de 7,6 millions d'euros de chiffre d'affaires, l'augmentation liée à la CVAE devait être compensée par la disparition de la taxe sur les immobilisations. Seul le volet foncier de l'ancienne taxe professionnelle est en effet maintenu dans la nouvelle cotisation foncière des entreprises. Toutefois, les producteurs et les diffuseurs du spectacle vivant musical et de variétés n'ont pas d'immobilisations significatives au bilan - leur montant est inférieur à 5 % du total du bilan.

En revanche, certaines entreprises peuvent bénéficier d'une exonération de cotisation foncière des entreprises sur délibération des collectivités locales concernées. En vertu du code général des impôts, peuvent en effet bénéficier d'une telle exonération les entreprises du spectacle vivant qui relèvent des catégories suivantes : les théâtres nationaux ; les autres théâtres fixes ; les tournées théâtrales et les théâtres démontables exclusivement consacrés à des spectacles d'art dramatique, lyrique ou chorégraphique ; les concerts symphoniques et autres, les orchestres divers, les théâtres de marionnettes.

C'est pourquoi, dans un souci d'égalité de traitement fiscal entre les acteurs du spectacle vivant, le présent amendement propose d'inclure le spectacle vivant musical et de variété dans les activités culturelles que les collectivités peuvent faire bénéficier d'exonérations de CFE.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général, rapporteur . La commission n'a pas retenu cet amendement pour plusieurs raisons.

La première, c'est qu'à peine venons-nous de réformer la taxe professionnelle pour la remplacer par la cotisation économique territoriale, qu'on commence à proposer des exonérations ! Ainsi, M. Decool en a proposé une et M. Dell'Agnola en propose une autre. Il risque de se passer la même chose qu'avec feue la taxe professionnelle ou un autre impôt : à peine l'impôt créé, on le trouerait de toutes parts à coups d'exonérations.

Seconde raison : certes, l'exonération ne coûterait rien à l'État puisqu'elle est facultative, et la ministre serait tentée de l'accepter, mais cette mesure créerait une inégalité que sur le terrain on peut déjà prévoir, monsieur Dell'Agnola. La collectivité locale riche se permettra évidemment de voter l'exonération parce qu'elle en a les moyens, mais celle qui est pauvre ne pourra pas se passer de la recette. Il y aura donc une inégalité territoriale entre les riches qui pourront exonérer et se faire bien voir et les pauvres qui, malheureusement, doivent compter sur l'intégrité de leurs recettes.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Pour une fois, et chacun est témoin que c'est rare, le Gouvernement n'est pas du même avis que le rapporteur général. Plus exactement, il le suivrait volontiers s'il n'existait pas d'ores et déjà une liste pléthorique d'exonérations liées aux manifestations culturelles : les théâtres nationaux, les théâtres fixes, les tournées théâtrales, les théâtres démontables, les spectacles d'art dramatique, lyrique ou chorégraphique, les concerts symphoniques, les orchestres divers, ...

M. Michel Bouvard. Les théâtres de Guignol !

Mme Valérie Pécresse, ministre. ...les chorales, les théâtres de marionnettes,...

M. Michel Bouvard. Voilà !

Mme Valérie Pécresse, ministre. ...les cabarets artistiques, les cafés-concerts, les music-halls, les cirques, à l'exclusion des établissements où il est d'usage de consommer pendant les séances. Dès lors l'exclusion des spectacles vivants et des variétés de la liste des exonérations nous paraissait un oubli. Mais on peut aussi penser que l'on nous proposera l'année prochaine une forme de spectacle que l'on aura oublié l'année prochaine - les mimes peut-être.

Mais vu la liste des exonérations, une de plus ne me paraît pas choquant, sachant que les communes pourraient essayer de raccrocher les spectacles de variété à certains cas d'exonération déjà fixés dans la loi. Ce n'est pas un énorme sujet fiscal, et s'il s'était agi de refaire une liste, je vous aurai suivi, monsieur le rapporteur général. En l'état actuel, j'émets un avis favorable.

(L'amendement n° 418 est adopté.)