VI. DÉBATS SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE (SÉANCE DU MERCREDI 30 NOVEMBRE 2011)

Article 57

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-256, présenté par M. Patriat et les membres du groupe socialiste, apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts Rattaché, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« À compter de 2012, le montant de la dotation forfaitaire de chaque région et de la collectivité territoriale de Corse est égal au montant perçu l'année précédente. »

II. - Alinéas 24 et 30

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Il a beaucoup été question des communes et des départements depuis le début de l'examen de cette mission et des articles rattachés, mais on a peu évoqué les régions. Pourtant, elles aussi sont concernées par la péréquation, tant horizontale que verticale, ce qui entraîne d'ailleurs des difficultés pour nombre d'entre elles.

En effet, les régions ont pâti de la tentative du Gouvernement de ponctionner les territoires de 200 millions d'euros supplémentaires pour participer à l'effort de réduction du déficit des comptes publics.

Le projet de loi de finances pour 2012, dans sa version initiale, prévoyait une augmentation de 13 millions d'euros de la dotation de péréquation des régions afin de garantir à ces dernières que leur dotation ne diminuerait pas en 2012. Cet engagement nous avait été annoncé en commission des finances par le rapporteur général de l'Assemblée nationale. Or, à l'occasion de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a supprimé la majoration de la DGF et gelé, pour l'année 2012, les montants de la dotation forfaitaire et de la dotation de péréquation perçues par les régions.

Une fois encore, le Gouvernement a décidé de s'attaquer aux mesures de solidarité financière. En effet, à la suite de ces modifications adoptées à l'Assemblée nationale, les six nouvelles régions qui devaient bénéficier de la péréquation en 2012, grâce à la réforme des modalités de sa répartition, ne le pourront pas. La réforme, pourtant acceptée par les régions, a donc été reportée à 2013.

La sagesse du Sénat, qui s'est exprimée en suivant la proposition de Mme la rapporteur générale, a permis de revenir, à l'article 6 du projet de loi de finances, sur la ponction globale de 200 millions d'euros imposée aux collectivités territoriales.

Nous avons déjà pu exposer à de nombreuses reprises nos arguments pour refuser toute nouvelle contribution des collectivités. Celles-ci ont en effet déjà pleinement participé à l'effort de réduction des déficits publics puisque, en 2010, leur besoin de financement a diminué, passant de 0,3 % à 0,1 % du PIB.

Par cohérence avec le rétablissement de la majoration de 13 millions d'euros de la DGF des régions en 2012, nous proposons de rendre pleinement applicables, dès l'année prochaine, les nouvelles modalités de péréquation en supprimant les alinéas 24 et 30 de cet article. Cette mesure est identique à celle qu'ont proposée les rapporteurs spéciaux avec l'amendement n° II-52.

De même, nous proposons, pour les années à venir, de préserver la dotation forfaitaire actuellement perçue par les régions. Je rappelle que celles-ci ont perdu toute autonomie fiscale puisque la seule décision qui leur revient aujourd'hui concerne les cartes grises, qui représentent 9 % de leurs ressources. En d'autres termes, 91 % de leurs ressources échappent à leur décision ! Non seulement elles ne peuvent plus décider de rien, mais elles se voient imposer des transferts de charges, notamment celles qui concernent l'innovation, et qui sont en hausse.

La péréquation horizontale, entre collectivités locales, se substitue à la péréquation verticale abondée par l'État. Cette situation n'est plus acceptable, alors même qu'au 1 er janvier 2013 entrera en vigueur un nouveau dispositif de péréquation horizontale, le fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, auquel devront contribuer les régions les plus riches. En outre, la notion de « régions les plus riches » ne correspond pas toujours à la réalité.

C'est pourquoi nous proposons d'adopter ici le principe selon lequel toute progression des dotations de péréquation doit être financée par un abondement du budget de l'État, et non par une ponction sur les collectivités locales.

M. le président. L'amendement n° II-52, présenté par MM. Marc et Jarlier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 9

1° Première phrase

Remplacer les mots :

Le montant

par les mots :

À compter de 2012, le montant

2° Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

II. - Alinéas 24 et 30

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. François Marc, rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° II-256.

M. François Marc, rapporteur spécial. Dans sa formulation comme dans sa motivation, l'amendement n° II-52 est très proche de l'amendement n° II-256.

Nous nous inscrivons dans la logique que nous avons déjà exposée à plusieurs reprises, à savoir refuser la contribution supplémentaire de 200 millions d'euros que l'Assemblée nationale a adoptée. Nous sommes donc dans le droit-fil des positions arrêtées par la commission des finances en première partie du projet de loi de finances pour 2012.

Ainsi, sur ce sujet, nous réintroduisons le texte dans sa version initiale, celui que le Gouvernement a adopté avant de le soumettre à l'Assemblée nationale.

Cependant, nous n'interdisons pas au comité des finances locales de mettre en oeuvre son dispositif d'arbitrage.

Par conséquent, la commission demande le retrait de l'amendement n° II-256 au bénéfice de l'amendement n° II-52.

M. le président. Monsieur Patriat, l'amendement n° II-256 est-il maintenu ?

M. François Patriat. Non, monsieur le président, je retire cet amendement puisque son objet est largement pris en compte par l'amendement de la commission.

M. le président. L'amendement n° II-256 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-52 ?

M. Philippe Richert, ministre. Vous le savez, le Gouvernement n'a pas la même stratégie que la majorité du Sénat, qui a introduit de nouveaux prélèvements, pour un montant de 26 milliards à 28 milliards d'euros.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C'est un peu par hasard ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Richert, ministre. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je voterai cet amendement.

On demande aux collectivités territoriales de consentir des efforts. Pourtant, elles ne sont pas responsables de l'endettement public ; elles n'y ont contribué en rien et n'ont jamais participé aux décisions qui ont conduit, ces dernières années, à l'explosion de la dette. En outre, leur endettement est assis sur des recettes pérennes.

Par conséquent, leur demander un effort pour des défaillances qu'elles n'ont pas commises me semble un peu exagéré !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-52.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 57, modifié.

(L'article 57 est adopté.)