Mme Michèle ANDRE, rapporteure spéciale

LE PROGRAMME 307 « ADMINISTRATION TERRITORIALE »

I. LE PROGRAMME 307 « ADMINISTRATION TERRITORIALE »

A. UN PROGRAMME CENTRÉ SUR LES MISSIONS DES PRÉFECTURES ET DES SOUS-PRÉFECTURES

Le programme 307 « Administration territoriale » recouvre l'ensemble des missions des préfectures, des sous-préfectures ainsi que des Hauts-commissariats et des représentations de l'Etat en outre-mer .

- L'action n° 1 « Coordination de la sécurité des personnes et des biens » correspond aux activités de sécurité publique et civile exercées par les préfectures et les sous-préfectures. Elle se situe donc, par certains aspects, à la limite de la mission « Sécurités ». Depuis 2013, cette action ne comporte plus que des dépenses de personnel .

- L'action n° 2 « Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres » s'applique aux activités de délivrance des cartes d'identité, des passeports, des cartes grises, des permis de conduire ainsi que de police des étrangers. Concernant la délivrance de titres fiables, le rôle des préfectures est combiné avec celui de l'ANTS, opérateur du présent programme.

- L'action n° 3 correspond au « Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales ».

- L'action n° 4 « Pilotage territorial des politiques gouvernementales » recouvre les moyens de la coordination des services de l'Etat et de la conduite de politiques spécifiques (ville, rénovation urbaine, logement, lutte contre les exclusions, développement durable, aménagement et attractivité du territoire...). Le décret n° 2010-146 du 16 février 2010 a désormais confié au préfet de région la responsabilité de l'exécution des politiques nationales et communautaires, sauf exception.

- L'action n° 5 « Animation et soutien du réseau » concerne les activités de soutien logistique des préfectures et des sous-préfectures (investissements immobiliers, dépenses informatiques, fonctionnement courant). Par ailleurs, les dépenses liées à la représentation de l'Etat outre-mer sont également imputées sur cette action.

Les crédits du programme « Administration territoriale » par action

+ 115,5 millions d'euros
Moyens mutualisés des administrations déconcentrées (mission « Direction de l'action du Gouvernement »)

+ 203,2 millions d'euros
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur (mission
« Administration générale et territoriale de l'Etat »)

+ 6,1 millions d'euros
Police nationale (mission « Sécurités »)

+ 4,1 millions d'euros
Entretien des bâtiments de l'Etat (mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »)

- 24,2 millions d'euros
Vie politique, cultuelle et associative (mission « Administration générale et territoriale de l'Etat »

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

L'action n° 2 « Réglementation générale, garantie de l'identité et de la nationalité et délivrance des titres » représente 42,1 % (après ventilation) des moyens du programme.

B. DES CRÉDITS DE PAIEMENT (CP) EN LÉGÈRE PROGRESSION : + 0,8 %

Hors fonds de concours, le présent programme comprend 1,727 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,726 milliard d'euros en CP, soit un budget en progression par rapport à 2013 : + 1,6 % pour les AE et + 0,8 % pour les CP .

Au sein de ce programme, les dépenses de personnel (titre 2) occupent une place prépondérante avec une enveloppe de 1,532 milliard d'euros de CP, soit + 1,2 % par rapport à 2013. L'augmentation de ces dépenses explique d'ailleurs à elle seule la légère hausse des crédits du programme, les dépenses de fonctionnement (titre 3) et d'investissement (titre 5) étant en baisse.

Les dépenses de fonctionnement enregistrent une diminution de 0,5 % et s'appuient désormais sur une enveloppe de 144,2 millions d'euros 2 ( * ) . Cette contraction des crédits de fonctionnement du programme « Administration territoriale » correspond notamment à la contribution de celui-ci à l'objectif de réduction des dépenses de fonctionnement fixé par le Gouvernement.

Parallèlement, les dépenses d'investissement reculent également (- 7,2 %) et s'établissent à 49,9 millions d'euros. Celles-ci relèvent à 92,8 % de l'action n° 5 « Animation et soutien du réseau ».

Cette action comprend l'intégralité des crédits affectés au programme national d'équipement (PNE) finançant les opérations immobilières de l'« Etat propriétaire ». A lui seul, le PNE représentera 37,8 millions d'euros de CP en 2014. Il doit permettre la restructuration, la construction et la mise aux normes du parc immobilier préfectoral.

Suite à la consultation référendaire de la population le 29 mars 2009 , Mayotte est devenue, le 31 mars 2011, le cent-unième département français 3 ( * ) . Votre rapporteure spéciale souligne qu'une telle départementalisation, synonyme d'un rapprochement avec le droit commun de la République, comporte des incidences financières concernant, notamment, la mise à niveau du cadastre et de l'état civil à Mayotte .

C. L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS : 550 EMPLOIS ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN (ETP) SUPPRIMÉS

Les dépenses de personnel sont en hausse malgré une nouvelle réduction des emplois au sein du programme : 550 emplois équivalents temps plein (ETP) sont supprimés .

En tenant compte des effets en année pleine des précédentes suppressions en 2013 et de divers transferts, le plafond d'emplois du programme passe à 27 438 emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT) , soit une réduction de 318 ETPT.

En 2014, les transferts d'emplois concerneront notamment la prise en charge par le présent programme de 103 ETPT supplémentaires en provenance du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » . L'activité de ces personnels relevant de l'administration centrale est en effet directement liée aux missions des préfectures.

Lors de son audition par votre rapporteure spéciale, Didier Lallement 4 ( * ) , responsable du programme « Administration territoriale » et secrétaire général du ministère de l'intérieur, a indiqué qu' il est espéré de la constitution de « plateformes » l'absorption de ces suppressions d'emplois .

Visant au regroupement de certains moyens dans un chef-lieu (de département ou de région), ces « plateformes » concernent depuis 2013 les opérations « Chorus » . Par ailleurs, trois régions (la Franche-Comté, la Lorraine et la Picardie) expérimentent des « plateformes » de naturalisation 5 ( * ) . Enfin, une réflexion est en cours sur la création de « plateformes » de fabrication des passeports 6 ( * ) .

Dans ce contexte de réduction continue des effectifs du programme « Administration territoriale » 7 ( * ) , votre rapporteure spéciale rappelle l'importance du maintien de la qualité du service public au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » : les réductions de personnel ne doivent pas s'opérer au détriment des citoyens ni des élus (notamment dans le cadre du contrôle de légalité et du conseil).

Face à l'évolution des métiers au sein des préfectures et des sous-préfectures, votre rapporteure spéciale insiste sur l'importance devant être attachée à la gestion des ressources humaines . Celle-ci doit permettre d'accompagner les agents confrontés à de nouvelles demandes, de leur offrir des perspectives de carrière suffisamment motivantes et d'encourager la mobilité.

Le recours accru aux nouvelles technologies permet assurément de libérer les personnels des préfectures et des sous-préfectures d'un certain nombre de tâches ingrates. Mais le facteur clef de la réussite dans la conduite des changements en cours et à venir au sein de cette administration de mission réside néanmoins dans la qualité des hommes et des femmes au service de l'intérêt général et des usagers. De cette qualité dépend celle du service rendu.

Votre rapporteure spéciale souligne donc le caractère essentiel d'une gestion qualitative des ressources humaines, reposant sur une approche individualisée des compétences des agents et le renforcement des compétences collectives au sein des services.

D. QUEL AVENIR POUR LES PRÉFECTURES ET LES SOUS-PRÉFECTURES ?

Au cours des dernières années, l'environnement et les conditions de travail des préfectures et des sous-préfectures ont connu de profondes mutations sous l'effet conjugué de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et de la réorganisation de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE) .

Pour des développements plus complets, votre rapporteure spéciale renvoie à son récent rapport d'information « Les préfectures à l'heure de la réorganisation de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE) » 8 ( * ) . Elle souhaite néanmoins revenir ici sur cette réflexion d'ensemble.

Les préfectures et les sous-préfectures ont dû intégrer plusieurs facteurs majeurs de changement, transformant leur organisation et leur façon d'agir. Dans le même temps, leurs missions fondamentales tenant à la sécurité des populations, à la représentation territoriale de l'Etat, au contrôle de légalité et au droit des étrangers ont aussi profondément évolué.

Le contrôle de légalité est désormais concentré dans les préfectures 9 ( * ) . A cet égard, votre rapporteure spéciale souligne que cette nouvelle stratégie de contrôle de légalité , recentré sur les actes les plus sensibles et à fort enjeu 10 ( * ) , comporte toutefois le risque d'un accroissement de l'insécurité juridique, avec à la clef un coût social élevé. En effet, les maires ont vu leurs responsabilités s'accroître dans certains domaines (tels que celui de l'instruction des permis de construire, par exemple) et peuvent dès lors se retrouver confrontés à de grandes difficultés si un contrôle suffisant en amont n'est pas opéré.

De même, le ministère de l'intérieur a engagé une modernisation des procédures de délivrance des titres gérés par les directions de la réglementation et des libertés publiques (DRLP) : système d'immatriculation des véhicules (SIV), passeports biométriques, titres de séjour (avec la nouvelle version d'AGDREF) et permis de conduire (FAETON 11 ( * ) ).

Ces évolutions consacrent une modification de la répartition des rôles de la préfecture et de la sous-préfecture . Les fonctions d'instruction et de contrôle des demandes de titres d'identité et de transport, comme l'exercice du contrôle de légalité, sont progressivement centralisés en préfecture. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013, le ministère de l'intérieur a toutefois précisé à votre rapporteure spéciale qu'« au regard des volumes de titres traités ou de la technicité acquise, les missions liées aux titres pourront être maintenues dans les sous-préfectures pour lesquelles cela aura été jugé pertinent au terme d'une analyse multicritères » 12 ( * ) .

Le déploiement progressif des nouveaux procédés de production de titres vise en outre à permettre d'alléger la charge des préfectures dans le domaine de la production de masse et de redéployer des effectifs sur les tâches relevant de la lutte contre la fraude .

Comme beaucoup d'élus 13 ( * ) , votre rapporteure spéciale s'interroge toutefois sur l'avenir de la représentation territoriale de l'Etat . En particulier, quel rôle les sous-préfectures, confrontées à la réduction de leurs personnels de catégorie A, peuvent-elles désormais jouer ? Faut-il aller vers la suppression ou la fusion de certaines d'entre elles ?

Le 9 septembre 2013, Manuel Valls, ministre de l'intérieur, a confié aux préfets des régions Alsace et Lorraine une « mission d'expérimentation sur la rénovation du réseau des sous-préfectures » 14 ( * ) . Menée dans les deux départements alsaciens (Bas-Rhin et Haut-Rhin) et en Moselle, cette mission consistera à expérimenter des « ajustements de la carte des sous-préfectures nécessaires pour que chaque arrondissement corresponde bien à un bassin de vie sur lequel une demande d'Etat s'exprime ». Les préfets pourront alors « proposer des fusions ou des redécoupages d'arrondissements ou suggérer le regroupement de services infra-départementaux au sein de maisons de l'Etat ».

Votre rapporteure spéciale sera attentive aux conclusions de cette expérimentation. Elle rappelle la nécessité de tenir compte de la spécificité des territoires, qu'ils soient urbains, péri-urbains, ruraux, montagnards ou littoraux .

E. L'AGENCE NATIONALE DES TITRES SÉCURISÉS (ANTS)

1. Les projets conduits par l'agence

En 2007, le programme « Administration territoriale » a connu une modification substantielle de son périmètre avec la création de l'ANTS 15 ( * ) .

L'objectif poursuivi est de donner à la France les moyens d'être au meilleur niveau mondial dans l'emploi des nouvelles technologies pour la production de titres sécurisés, de développer les synergies entre les administrations pour une meilleure maîtrise des coûts et de mutualiser les achats d'équipements nécessaires à l'exploitation des titres.

Etablissement public administratif (EPA), l'ANTS a la qualité d' opérateur du programme . Sa mission vise à répondre aux besoins des administrations de l'Etat en matière de titres sécurisés. Elle recouvrait initialement les passeports électronique et biométrique, le certificat d'immatriculation des véhicules, le titre de séjour électronique, la carte nationale d'identité électronique (CNIe) et le visa biométrique.

Depuis 2011, les attributions de l'ANTS ont été étendues à d'autres documents : le feuillet pour l'apposition d'un visa délivré par les autorités françaises compétentes aux titulaires d'un document de voyage non reconnu par la France, le titre de voyage délivré aux réfugiés et aux apatrides titulaires d'une carte de résident ou d'une carte de séjour, les cartes professionnelles des agents de l'Etat, le permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur, le permis de conduire et la carte nationale d'identité.

Le permis de conduire : FAETON en fonctionnement

Destinée à remplacer le système national du permis de conduire (SNPC), l'application FAETON vise à répondre aux impératifs fixés par la directive communautaire n° 2006/126/CE du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire . Le système gère l'ensemble des droits à conduire, depuis l'inscription en école de conduite jusqu'à la gestion des points du permis de conduire proprement dit.

Il vise à renforcer la sécurité routière et la lutte contre la fraude . Ainsi, en application de la directive européenne précitée du 20 décembre 2006, le format du titre est unifié et sécurisé, et les catégories de droits à conduire sont harmonisées. Les préfectures n'ont plus la charge de fabriquer le titre, celui-ci étant produit par l'Imprimerie nationale et adressé au domicile du bénéficiaire. Le permis de conduire devient renouvelable tous les quinze ans, sans contrôle médical ni épreuve de permis de conduire. Par ailleurs, l'ensemble des titres au format papier (soit plus de 30 millions de titres) devront être repris avant 2033.

Initialement, le déploiement de l'application devait avoir lieu le 19 janvier 2013. Il a toutefois été repoussé au 16 septembre 2013 pour tenir compte de difficultés techniques. Version adaptée du SNPC, FAETON 1 a permis la transition, en attendant l'entrée en vigueur d'une version améliorée (FAETON 2) en 2014.

Source : ministère de l'intérieur

Parmi les projets menés en 2014 par l'ANTS, votre rapporteure spéciale souhaite tout particulièrement relever l'expérimentation de la dématérialisation des actes d'état civil , pouvant être à l'origine d'importants gains de productivité pour les collectivités territoriales, de garanties supplémentaires contre la fraude, mais aussi peut-être d'une charge de travail accrue pour les personnels en mairie.

La lutte contre la fraude et l'usurpation d'identité : le projet COMEDEC

Conformément à l'article 4 de la loi n° 2012-410 du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité et au décret n° 2011-167 du 10 février 2011 instituant une procédure de vérification sécurisée des données à caractère personnel contenues dans les actes de l'état civil, le ministère de la justice, en lien étroit avec l'ANTS, a entrepris de développer une application de vérification dématérialisée des données d'état civil, dénommée COMEDEC.

Cette application a notamment pour objectif de permettre aux services de délivrance des titres de vérifier les données d'état civil fournies par le demandeur d'un passeport auprès de sa commune de naissance. Elle est actuellement en cours d'expérimentation : quarante-deux villes étaient raccordées en septembre 2013.

Cette expérimentation préfigure les mesures de sécurisation et de fiabilisation du processus de délivrance des titres d'identité et de voyage, telles que l'inspection générale de l'administration (IGA) les préconise dans un rapport de mai 2013 sur les suites de la loi précitée du 27 mars 2012 relative à la protection de l'identité. L'IGA recommande en effet le renforcement de la sécurisation de la chaîne de l'identité. Ceci implique notamment de rendre plus difficile la fraude portant sur les pièces nécessaires à l'obtention de titres d'identité et de voyage, notamment les actes de naissance .

Source : ministère de l'intérieur

Le projet relatif à la CNIe ne connaitra en revanche aucun développement en 2014 . A ce stade, aucun calendrier de déploiement n'a été arrêté pour ce nouveau (et hypothétique) document.

Pour faire face à ces missions, l'ANTS disposera en 2013 d'un plafond d'emplois inchangé à 118 ETP 16 ( * ) .

Jusqu'en 2013, ces effectifs étaient répartis entre les sites suivants : Levallois-Perret, Paris (rue du 4 septembre) et Charleville-Mézière (plateforme technique). En 2014, l'agence procèdera à un regroupement de ses agents (hors Charleville-Mézière) à Paris (Tour Montparnasse). Cette opération immobilière a reçu l'accord de France Domaine.

Elle aura pour conséquence de réunir l'ANTS et l'agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) 17 ( * ) sur un même plateau . Conduite sous l'égide de l'inspection générale de l'administration (IGA), une réflexion est en cours sur une fusion entre ces deux agences.

2. Vers une insuffisance du fond de roulement à la fin de l'exercice 2014

Les dépenses inscrites au budget prévisionnel de l'agence pour 2014 sont estimées à 269,8 millions d'euros , soit une augmentation de 15 % par rapport au budget rectificatif de 2013. Cette augmentation est essentiellement liée à la mise en oeuvre retardée de FAETON. Par ailleurs, des surcoûts liés à la maintenance de l'application SIV et à l'acheminement des titres sont également à l'origine de cette augmentation.

Les recettes inscrites au budget prévisionnel de l'agence sont, pour leur part, évaluées à 193,8 millions d'euros , en diminution de 7,9 % par rapport à 2013. Cette diminution résulte de l'application de l'article 31 du présent projet de loi de finances fixant des plafonds pour 2014 s'agissant des taxes affectées aux opérateurs et à divers organismes chargés de missions de service public.

Le fonds de roulement de l'ANTS s'élève en 2013 à 50,7 millions d'euros . Votre rapporteure spéciale avait eu l'occasion de s'interroger sur le niveau excessif de ce fond de roulement en 2011 18 ( * ) et celui-ci est ainsi en diminution depuis 2012. En 2013, cette baisse résulte notamment de l'augmentation des dépenses afférentes à la mise en oeuvre de FAETON .

L'évolution du fond de roulement de l'ANTS

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

Variation du fond de roulement

- 41,4

- 23,2

Niveau du fond de roulement

115,3

73,9

50,7

Fond de roulement minimum
(quatre semaines)

18,3

16,6

Source : ANTS

Lors de son audition par votre rapporteure spéciale 19 ( * ) , Etienne Guépratte, directeur de l'ANTS, a indiqué que le niveau du fond de roulement en 2014 devrait être insuffisant pour couvrir l'ensemble des besoins de l'agence, en particulier le coût de production du permis de conduire . Ce coût est estimé à environ 16 euros par permis, soit une charge d'environ 40 millions d'euros en 2014. La situation financière de l'ANTS pourrait ainsi devenir préoccupante à partir du dernier trimestre de l'exercice à venir.

3. Un équilibre des ressources à redéfinir

Le budget de l'ANTS est majoritairement abondé par des ressources propres , liées aux taxes et aux redevances sur les titres d'identité ainsi qu'au SIV 20 ( * ) .

A cet égard, votre rapporteure spéciale souligne que les affectations de recettes ne doivent pas avoir pour objet, même si elles sont conformes à la LOLF (articles 2 et 36), de contourner l'objectif de maîtrise des dépenses mais au contraire d' optimiser l'utilisation des ressources budgétaires .

Les ressources de l'ANTS en 2013 et en 2014

(en millions d'euros)

Taxes et redevances

Base juridique

Produit attendu par l'établissement

Prévisions
2013

Prévisions
2014

Droit de timbre sur les passeports

Art. 953-1 du CGI

Art. 46 de la LFI 2007

107,5

96,75

Droit de timbre sur les titres de voyage biométrique délivrés aux réfugiés et apatrides

Art. 77 de la LFI 2011

1

0,9

Taxe perçue à l'occasion de la délivrance, du renouvellement, du duplicata ou du changement d'une carte de séjour

Art. 77 de la LFI 2011

15,1

13 ,59

Droit de timbre sur la carte nationale d'identité en cas de non présentation de l'ancienne carte lors de son renouvellement

Art. 126 bis du CGI

12,5

11,25

Droit de timbre sur les certificats d'immatriculation des véhicules

Art. 1628-0 bis du CGI

43

38,7

Redevance d'acheminement

Décret n° 2008-850 du 26 août 2008

26

26

Total

205,1

187,19

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

L'insuffisance du fond de roulement pour 2014 et ses conséquences sur l'équilibre financier de l'ANTS lors de l'exercice budgétaire à venir amènent à se poser la question du financement de cette agence . Plusieurs éléments de réflexion doivent être pris en compte.

Tout d'abord, votre rapporteure spéciale a déjà souligné à plusieurs reprises le décalage entre le montant du droit de timbre à la charge du demandeur d'un passeport biométrique et le coût complet de ce titre . Ce décalage a été mis en évidence par l'enquête, demandée par votre commission à la Cour des comptes, dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF, sur le coût du passeport biométrique 21 ( * ) . Alors que le droit de timbre s'élève à 89 euros pour un adulte , 45 euros pour un mineur de quinze ans et plus et 20 euros pour un mineur de moins de quinze ans 22 ( * ) , le coût moyen du passeport biométrique est de 55 euros et son coût moyen pondéré en fonction de l'âge du demandeur s'établit à 69 euros .

Votre rapporteure spéciale estime désormais souhaitable un alignement du montant du droit de timbre relatif au passeport sur le coût de ce titre .

Par ailleurs, il convient de relever que le permis de conduire , dont le coût de production est à la charge de l'ANTS, ne donne lieu à aucune contrepartie en termes de ressources pour l'agence.

Pour le permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur , la délivrance est conditionnée par un droit fixe de 70 euros en application de l'article 963 du code général des impôts (CGI). Toutefois, l'ANTS ne bénéficie d'aucune affectation de cette recette, alors même qu'elle assume le coût de fabrication de ce titre.

Au total, votre rapporteure spéciale considère qu'il est désormais temps de remettre à plat le mode de financement de l'ANTS afin de le rendre plus en phase avec l'activité réelle de cette agence . Ne faudrait-il pas aller vers une politique de « vérité des prix » ?

4. La nécessaire révision de la dotation accordée aux mairies procédant à l'enregistrement des demandes passeport et à la remise de ce titre

De même, ainsi qu'elle l'a recommandé dans son rapport précité sur « Les préfectures à l'heure de la réorganisation de l'administration territoriale de l'Etat (RéATE) » (recommandation n° 15), votre rapporteure spéciale considère nécessaire de réviser le mode de calcul de la dotation accordée aux mairies procédant à l'enregistrement des demandes de passeport biométrique et à la remise de ce titre.

Cette révision avait un temps été envisagée dans la perspective du passage à la CNIe. Ce passage étant différé, la réflexion doit être reprise afin de rétablir une plus grande équité entre les communes accueillant les stations d'enregistrement.

La réflexion devra tenir compte du retour d'expérience acquis grâce aux quatre premières années de fonctionnement du dispositif.

F. UN NIVEAU DE PERFORMANCE MAINTENU

Le volet « performance » du programme « Administration territoriale » comprend cinq objectifs et dix indicateurs de performance.

L'objectif n° 1 « Améliorer la prévention dans le domaine de la sécurité nationale » renvoie au coeur de métier des préfectures, au travers de leur mission essentielle de protection des populations. L'indicateur « Taux d'élaboration des plans communaux de sauvegarde pour les communes soumises à obligation légale » s'établit en prévision actualisée pour 2013 à 60 %, avec une prévision de 62 % en 2014.

Par ailleurs, le « taux d'exercices de sécurité civile réalisés dans les délais réglementaires sur les sites soumis à un plan particulier d'intervention (PPI) » rend compte de la réalisation plus ou moins complète de l'objectif n° 1 dans le cas des sites soumis à un risque technologique. Ce taux est de 90 % en prévision actualisée pour 2013, avec une prévision identique pour 2014 et une cible de 93 % en 2015.

L'objectif n° 2 « Optimiser les conditions de délivrance de titres fiables et l'efficience des services de délivrance de titres » touche à une autre mission primordiale des préfectures : la délivrance des titres d'identité, assortie d'une garantie de sécurité juridique. Dans cette perspective, il faut rappeler que le délai moyen de délivrance des cartes grises par l'ANTS était de 6 jours en 2009. La prévision actualisée pour 2013 et la prévision pour 2014 (toutes les deux égales à 3 jours) témoignent d'un bon niveau de performance. Ce constat vaut également pour le pourcentage de passeports biométriques mis à disposition dans un délai de 15 jours, qui s'établit à 90 % en prévision actualisée pour 2013 et en prévision pour 2014.

L'objectif n° 3 « Moderniser et rationaliser le contrôle de légalité » permet de mesurer l'efficacité de la stratégie de contrôle de légalité. A cet égard, le « taux de contrôle des actes prioritaires reçus en préfecture » atteint 100 % en prévision actualisée pour 2013 et en prévision pour 2014.

Au regard de ce niveau de performance, votre rapporteure spéciale souligne toutefois que le présent ratio ne porte que sur les « actes prioritaires » soit uniquement, selon le PAP pour 2014, ceux relevant de la commande publique, de l'urbanisme et de la fonction publique territoriale « auxquels peuvent s'adjoindre ceux relevant d'une priorité définie localement par le préfet dans le cadre de sa stratégie de contrôle ». Or, on peut s'interroger sur cette notion « d'actes prioritaires » et sur le niveau hiérarchique qui finalement la définit : le niveau central ou chaque préfet ? Si les « actes prioritaires » recouvrent au fil du temps de moins en moins d'actes, il n'est pas surprenant que le ratio rendant compte de leur contrôle soit élevé.

L'objectif n° 4 « Améliorer la coordination des actions interministérielles » vise à mettre en évidence la fonction incombant au préfet de pilotage et de coordination des services déconcentrés. L'unique indicateur de performance (le « délai d'instruction des dossiers ICPE et loi sur l'eau ») illustre l'activité essentielle de mise en cohérence de l'action publique par le préfet, dans des domaines stratégiques et s'inscrivant dans la logique interministérielle de développement durable impliquant de nombreux services de l'Etat. Ce délai est de 310 jours en 2013, avec une prévision identique pour 2014.

L'objectif n° 5 « Développer les actions de modernisation et de qualité » cherche à illustrer les initiatives des préfets dans le pilotage des actions de modernisation au sein des services déconcentrés de l'Etat et dans la qualité du service à l'usager. L'indicateur portant sur le « taux de préfectures certifiées ou labellisées », qui était de 21 % en 2011, atteint 100 % en 2013 et pour 2014. Un tel niveau amène à s'interroger sur la pertinence de cet indicateur pour l'avenir.


* 2 Pour mémoire, en 2011, les crédits relatifs aux dotations de fonctionnement associées aux effectifs (environ un millier d'agents) transférés dans les directions départementales interministérielles (DDI) et aux charges immobilières dites « charges de l'occupant » (loyers, travaux d'aménagement et d'entretien immobilier, loyers budgétaires et fluides) ont été transférés vers le programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».

* 3 La loi organique n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et de Mayotte a introduit dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) l'article L.O. 3446-1 qui dispose que « à compter de la première réunion suivant le renouvellement de son assemblée délibérante en 2011, la collectivité départementale de Mayotte est érigée en une collectivité régie par l'article 73 de la Constitution, qui prend le nom de « Département de Mayotte » et exerce les compétences dévolues aux départements d'outre-mer et aux régions d'outre-mer ».

* 4 Audition du 23 octobre 2013.

* 5 Les moyens nécessaires à l'instruction et au traitement des demandes de naturalisation sont réunis à Besançon, Beauvais et Nancy. Les usagers doivent alors se rendre sur ces sites.

* 6 Ces « plateformes » auraient alors une vocation régionale ou zonale.

* 7 Cf. Sénat, rapport spécial n° 148 (2012-2013) - tome III - annexe 2.

* 8 Sénat, rapport d'information n° 77 (2013-2014).

* 9 Cette démarche s'est accompagnée, dans une cinquantaine de départements, d'une intégration des agents des directions départementales du territoire (DDT) en charge du contrôle de légalité des documents et des actes d'urbanisme.

* 10 L'urbanisme, l'environnement, la commande publique, les actes budgétaires et à caractère financier, ainsi que les contrats des personnels des cabinets.

* 11 Cf. infra.

* 12 Cf . Sénat, rapport spécial n° 148 (2012-2013) - tome III - annexe 2.

* 13 L'Association des maires ruraux de France (AMFR), par exemple, s'est inquiétée des conséquences de la RéATE et des suppressions d'effectifs sur l'assistance technique fournie par l'Etat pour des raisons de solidarité et d'aménagement des territoires (ATESAT) et l'application du droit des sols (ADS).

* 14 Cette initiative s'inscrit à la suite d'une mission confiée à Michel Sappin, chef de l'inspection générale de l'administration (IGA), Jean-Marc Rebière, président du Conseil supérieur de l'administration territoriale de l'Etat (CSATE) et Emmanuel Berthier, délégué interministériel à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (Datar).

* 15 L'ANTS a été instituée par le décret n° 2007-240 du 22 février 2007.

* 16 L'ANTS bénéficie également d'un agent mis à disposition par le ministère de l'intérieur.

* 17 L'ANTAI relève actuellement du programme 207 « Sécurité et éducation routière » de la mission « Sécurités ».

* 18 Cf. Sénat, rapport spécial n° 107 (2011-2012) - tome III - annexe 2.

* 19 Audition du 23 octobre 2013.

* 20 Par ailleurs, l'ANTS a développé ses produits (cartes d'agents, par exemple) qu'elle vend à différentes partenaires publics.

* 21 Sénat, rapport d'information n° 596 (2009-2010), « Le véritable prix du passeport biométrique », Michèle André.

* 22 Article 953 du code général des impôts (CGI). Une décote de 3 euros est appliquée si le demandeur fournit lui-même ses deux photographies d'identité.