M. Jean-François HUSSON, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Mission « Écologie, développement et mobilité durables » (hors transports)

1. 9,6 milliards d'euros de crédits de paiement sont demandés au titre de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » en 2017 , soit une hausse de 5,5 % par rapport à 2016. Toutefois, cette hausse ne s'explique pas par un effort accru en direction de l'écologie mais principalement par des mesures de périmètre. À périmètre constant, la mission voit ses crédits progresser de 0,9 % , en raison du dynamisme des dépenses portées par le nouveau programme 345 « Service public de l'énergie », en particulier des dispositifs de soutien à la cogénération, à la péréquation tarifaire au profit des zones non interconnectées et aux ménages en situation de précarité énergétique.

2. La masse salariale du ministère de l'environnement augmente deux fois plus vite que les économies résultant de la baisse des effectifs . Malgré un schéma d'emploi de - 500 ETP prévu pour 2017, la masse salariale augmentera en 2017 de 16,6 millions d'euros à périmètre constant, ce qui s'explique notamment par la revalorisation du point d'indice de la fonction publique et par l'application du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) . En revanche les dépenses de fonctionnement diminuent du fait de la rationalisation de la fonction achat et des économies réalisées par le regroupement immobilier des services centraux du ministère.

3. La politique de lutte contre la pollution de l'air manque de vision stratégique et de cohérence . La situation financière des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) est fragile ; compte tenu du désengagement financier de certaines collectivités, il est impératif que l'État consolide sa participation financière après de ces associations. Le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA) prévu par la loi relative à la transition énergétique au 30 juin 2016 n'a pas été adopté, et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ne comporte aucune indication relative à l'évolution du parc nucléaire pour atteindre l'objectif fixé par la loi d'une part de nucléaire de 50 % dans la production d'électricité à l'horizon 2025.

4. La politique de transition énergétique est insuffisamment financée . Le fonds de financement de la transition énergétique qui devait être doté de 1,5 milliard d'euros sur trois ans n'a été pourvu que de 250 millions d'euros en 2016 et aucun crédit supplémentaire n'est prévu en 2017 . En ce qui concerne la fiscalité énergétique, aucun calendrier de rapprochement de la fiscalité du gazole et de l'essence , décidée précipitamment suite au « dieselgate », n'est défini afin de donner de la visibilité aux constructeurs. De même, après avoir annoncé, sans concertation, que la France s'engagerait unilatéralement à donner un prix plancher au carbone , le Gouvernement a renoncé à cette mesure qui aurait eu des conséquences sociales importantes.

5. La politique de prévention des risques est marquée par l'adoption de la quasi-totalité des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) , quinze ans après la catastrophe « AZF » ; les prochaines années seront dédiées à la mise en oeuvre opérationnelle de ces plans (renforcement du bâti des riverains, mesures foncières d'expropriation ou de délaissement). Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) , dont les ressources ont été accrues au fil du temps connaît un solde positif de plus de 300 millions d'euros en 2016. Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit en conséquence un prélèvement de 70 millions d'euros sur ce fonds.

6. La politique de l'eau et de la biodiversité est marquée par la création de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) au 1 er janvier 2017 . Ses moyens budgétaires et humains paraissent suffisants d'autant plus de 45 postes supplémentaires sont créés par rapport aux structures qu'elle remplace afin de tenir compte de l'élargissement de ses missions, notamment à la gestion des parcs naturels marins. En revanche la création de l'AFB ne devrait conduire qu'à une rationalisation à la marge des implantations territoriales . La création de l'AFB pose également la question de l'articulation de ses missions avec l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) , avec une perspective de mutualisation de leurs services départementaux.

7. Certains opérateurs sont trop fortement mis à contribution. Le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cérema) voit ses moyens fortement réduits (baisse de 4,2 % des effectifs) et est confronté à une équation impossible : sa subvention baisse plus vite que l'augmentation de la masse salariale, ce qui réduit les moyens disponibles pour développer ses activités notamment en direction des collectivités territoriales. Les agences de l'eau font à nouveau l'objet d'un prélèvement de 175 millions d'euros malgré l'élargissement de leurs compétences à la biodiversité.

8. Certains opérateurs pourraient être sous-dimensionnés à terme pour faire face à l'accroissement de leurs missions , en particulier l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui bénéficie d'une augmentation de ses moyens humains, mais qui voit ses missions fortement augmenter (renforcement de la sûreté du parc nucléaire suite à l'accident de Fukushima, vieillissement des centrales nucléaires et instruction des demandes de prolongation de leur fonctionnement, mise en service du réacteur EPR de Flamanville, etc.).

9. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) voit son budget maintenu par rapport à l'année dernière. L'annonce de la ministre de l'environnement d'un doublement du fonds « chaleur » d'ici 2017 n'est pas respectée (221 millions d'euros sont prévus au lieu des 420 millions d'euros annoncés). Les engagements des enveloppes des programmes d'investissement d'avenir (PIA) 1 et 2 gérés par l'ADEME devraient être terminés d'ici mi-2017. 700 millions d'euros supplémentaires sont prévus dans le cadre du PIA 3 pour le volet « Démonstrateurs de recherche de la transition énergétique et écologique ».

Compte d'affectation spéciale « Transition énergétique »

1.  La création d'un compte d'affectation spéciale (CAS) « Transition énergétique » par la loi de finances rectificative pour 2015 renforce la visibilité et le suivi des recettes et des dépenses liées à la politique de l'énergie par le Parlement , qui peut désormais fixer le taux de la contribution au service public de l'électricité (CSPE).

2. Les dépenses du CAS sont évaluées à près de 7 milliards d'euros en 2017, et présentent une évolution très dynamique , principalement du fait de la compensation aux opérateurs du service public de l'électricité et du gaz de leurs charges de service public au titre du soutien à la production d'électricité à partir de sources renouvelables (contrats d'obligation d'achat ou de complément de rémunération) et du soutien à l'injection de bio-méthane dans les réseaux de distribution de gaz.

3. Le CAS retrace également la dépense correspondant à l'apurement de la dette de l'État à l'égard d'EDF au titre de la compensation des charges de service public , pour un montant de 1,2 milliard d'euros en 2014 (sur une dette totale de 5,7 milliards d'euros à rembourser d'ici 2020).

4. Afin de compenser la hausse des dépenses, 1,7 milliard d'euros de dépenses supplémentaires sont nécessaires en 2017 . Ce financement est assuré grâce à la montée en puissance de la contribution-climat énergie (ou « taxe carbone ») pesant sur les énergies fossiles dont 85 % du produit supplémentaire est affecté au CAS .

5. Dans un contexte de développement croissant des filières renouvelables, les recettes fiscales devront augmenter rapidement, ce qui pose la question du coût de la transition énergétique pour les consommateurs finals . Par ailleurs, le Parlement n'a aucun contrôle sur le montant des charges à compenser et ne peut donc pas encadrer l'évolution de ces coûts. Il est impératif que le soutien public aux énergies renouvelables soit proportionné aux besoins, sans engendrer de sur-rémunérations des investisseurs.

Compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres »

1. Le compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres », prévoit une forte hausse de la dépense associée aux aides versées aux personnes achetant des véhicules propres en 2017 , qui augmente de 17 % pour s'établit à 347 millions d'euros . Cette hausse s'explique notamment par l'augmentation anticipée du nombre de véhicules achetés qui bénéficieront du bonus en 2017 (en particulier les véhicules électriques).

2. Les dispositifs d'aides à l'acquisition de véhicules propres et au retrait de véhicules polluants ont fait l'objet de modifications substantielles ces dernières années . Malgré l'élargissement de la prime à la conversion en 2016 (qui peut désormais être attribuée lorsque l'achat d'un véhicule neuf s'accompagne du retrait de la circulation d'un véhicule diesel de plus de dix ans), le nombre de primes versées reste bas ; ce dispositif parait toujours peu incitatif pour les ménages modestes . La forte baisse du bonus accordé aux véhicules hybrides (de 2 000 à 750 euros pour les full hybrides et de 4 000 à 1 000 euros pour les véhicules hybrides rechargeables) ne semble pas avoir provoqué de chute brutale des acquisitions de ces véhicules.

3. Le Gouvernement envisage, en 2017, d'élargir les « bonus » aux deux ou trois roues et aux quadricycles électriques ; le montant de l'aide pourrait être fixé à 27 % du coût d'acquisition, plafonné à 1 000 euros. Il envisage également d'introduire un plafond lié au prix des véhicules au-dessus duquel le bonus ne serait pas attribué (par exemple 40 000 ou 45 000 euros).

4. Afin de compenser la hausse prévue des dépenses, le projet de loi de finances pour 2017 prévoit une révision du barème du « malus » appliqué aux véhicules les plus polluants : le seuil d'application du « malus » serait abaissé à 127 grammes de CO 2 par kilomètre (contre 130 grammes actuellement), le barème serait lissé et fortement durci à partir d'un niveau d'émission de 155 grammes de CO 2 par kilomètre. Le surcoût serait ainsi de 4 000 et 6 000 euros pour les véhicules émettant respectivement 180 et 190 grammes de CO 2 par kilomètre. Cette révision du barème induirait un produit supplémentaire de 124 millions d'euros .

Au 10 octobre 2016, date limite fixée par la LOLF, 53,5 % des réponses (46 sur 86) au questionnaire budgétaire étaient parvenues à votre rapporteur spécial.