Retraites (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 10 (Suite)

Mme la présidente.  - Amendement n°282, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Les articles 6 à 9 de la présente loi entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2015. Pour les entreprises employant moins de 250 salariés, l'article 6 de la présente loi entre en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

Mme Catherine Deroche.  - L'entrée en vigueur du nouveau dispositif devrait être reportée pour ces entreprises au 1er janvier 2007. Nous avons abondamment évoqué ses difficultés d'application.

Mme la présidente.  - Amendement n°280, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Les articles 6 à 9 de la présente loi entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2015. Pour les entreprises employant moins de 50 salariés, l'article 6 de la présente loi entre en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

Mme Catherine Deroche.  - Même chose pour les entreprises de moins de cinquante salariés.

Mme la présidente.  - Amendement n°281, présenté par M. Longuet et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Les articles 6 à 9 de la présente loi entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2015. Pour les entreprises employant moins de 20 salariés, l'article 6 de la présente loi entre en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

Mme Catherine Deroche.  - Et pour celles de moins de vingt salariés.

L'amendement n°318 n'est pas défendu.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Pourquoi différer l'entrée en vigueur du CPPP ? Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.  - Même avis.

Mme Catherine Deroche.  - Vous ignorez les difficultés créées dans les TPE et petites entreprises ; nous en tenons compte. Vous refusez l'application de ces règles aux grands établissements publics, comme les hôpitaux.

L'amendement n°282 n'est pas adopté.

M. Gilbert Barbier.  - En effet, pour les entreprises de moins de vingt salariés, il est difficile d'organiser ces fiches. Cela rebutera les chefs d'entreprises et pourrait les dissuader de recruter.

L'amendement n°280 n'est pas adopté.

M. Gérard Longuet.  - L'amendement n°281 est de repli. Il concerne les TPE. La réflexion sur la pénibilité est un devoir absolu, mais vous n'évaluez pas les charges administratives qu'elle induit, rapportées au nombre de salariés.

Ou l'on retient des normes générales ou on entre dans le détail de l'activité de chaque salarié. Je crains que le dispositif envisagé ne soit irréaliste.

Démolir une dalle densément ferraillée est un travail assurément très difficile mais comment évaluer précisément la pénibilité de chaque tâche ? La circulaire, les décrets s'en chargeront, peut-être, mais imaginez-vous les conséquences concrètes de ce que vous mettez en place ? Ce dialogue prévisionnel, puis rétrospectif, permanent va décourager les employeurs, particulièrement dans les TPE. Bonjour les dégâts ! Je défends avec conviction cet amendement n°281.

L'amendement n°281 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°161, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 4622-2 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le refus de l'employeur de se conformer aux prescriptions du médecin du travail doit être motivé par écrit.

« En cas de contentieux liés à l'altération ou à la dégradation de l'état de santé du salarié, en lien avec son activité professionnelle, le refus de l'employeur de se conformer aux prescriptions du médecin lui est opposable. »

Mme Annie David.  - L'espérance de vie en bonne santé des travailleurs est très inégale. Notre amendement garantit les effets des prescriptions des médecins du travail.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Nous sommes d'accord avec les obligations de l'employeur à l'égard du médecin du travail. Mais cet amendement est un cavalier. Le Conseil constitutionnel a censuré la réforme de la médecine du travail introduite dans la loi de 2010 au cours de la navette. Pour ce motif, avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis, d'autant que deux dispositions du code du travail satisfont déjà votre amendement, les articles L. 4624-3 et L. 4624-1.

M. Gérard Longuet.  - Cet amendement très intéressant nous replonge dans le débat d'hier soir sur le rôle du médecin du travail.

Mme Christiane Demontès, rapporteure, et Mme Marisol Touraine, ministre.  - Ce n'est pas le même sujet.

M. Gérard Longuet.  - Introduit hier, il est normal qu'il réapparaisse aujourd'hui... (Sourires à droite)

Censure constitutionnelle ou pas, c'est la procédure accélérée qui est en cause. Tout cela pour dire que nous ne participerons pas à ce vote qui ne concerne que les stratégies internes à la majorité. (M. Christiane Demontès, rapporteure, s'amuse)

Mme Annie David.  - Inconstitutionnalité possible, soit, mais cette disposition, qui figure déjà dans le code du travail, est-elle appliquée ? Non, chacun le sait. Réaffirmons-la afin que les employeurs respectent les prescriptions des médecins du travail. Nous maintenons l'amendement, qui a sa place dans ce texte.

L'amendement n°161 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°162, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Au III de l'article L. 4624-3 du code du travail, les mots : « , à leur demande, » sont supprimés.

Mme Laurence Cohen.  - Les propositions et préconisations du médecin du travail et la réponse de l'employeur doivent être systématiquement tenues à la disposition du CHSCT, des délégués du personnel, de l'inspecteur du travail, du médecin du travail et des agents des services de prévention de la sécurité sociale et des organismes de branches. Les salariés doivent pouvoir arriver en bonne santé à la retraite.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Autre cavalier. Même avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis.

M. Jean Desessard.  - Les médecins du travail ne sont pas des cavaliers !

Mme Catherine Procaccia.  - Ils seront taxés comme les centres équestres. (SouriresI

M. Gérard Longuet.  - L'employeur est au coeur du dispositif. Si l'on arrose tout le monde avec ce document, on risque qu'il ne soit lu par personne. Gare à la saturation. Cette fois-ci, nous soutenons le Gouvernement et le rapporteur.

L'amendement n°162 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°164, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 4624-3 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ...  -  En cas de contentieux lié à l'altération ou à la dégradation de l'état de santé du salarié en lien avec son activité professionnelle, le refus de l'employeur de se conformer aux prescriptions du médecin lui est opposable. »

M. Dominique Watrin.  - Nous avions déposé cet amendement lors de l'examen de la proposition de loi relative à l'organisation de la médecine du travail en 2011, malheureusement non retenu par la majorité de l'époque.

Depuis l'arrêt de la Cour de cassation du 28 février 2006, une jurisprudence constante affirme l'obligation de résultat de l'employeur, afin de maintenir la santé de ses employés au travail, ce qui implique qu'il se conforme aux prescriptions du médecin du travail. Notre amendement facilitera, en cas de contentieux, la preuve du manquement de l'employeur qui aurait refusé de suivre ces prescriptions.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Autre cavalier.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Même avis défavorable. En cas de contentieux, le refus de l'employeur de tenir compte des prescriptions du médecin du travail lui serait évidemment opposable, en vertu du droit actuel.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je soutiens cet amendement. On connaît la situation des chantiers de désamiantage, souvent itinérants, employant une main-d'oeuvre non durable. Les salariés, qui pour la plupart maîtrisent à peine le français, doivent attester qu'ils connaissent les risques de leur tâche et signent plus souvent d'une croix que d'un paraphe. Notre objectif, c'est le bon état de santé des travailleurs... Évitons les futurs morts de l'amiante !

M. Jean Desessard.  - Je suis en désaccord sur le mot « cavalier ». L'article L. 4624-3 du code du travail précisé par l'amendement est lié à la prévention de la pénibilité, qui est au coeur de ce texte et de cet article. Cet amendement a un lien évident sur le projet de loi en discussion, dans la continuité de nos débats. Je le redis, nous voterons cet amendement.

M. Gérard Longuet.  - Hier, nous avons soutenu l'idée que les médecins du travail devaient être associés à l'élaboration des fiches de pénibilité.

M. Jean Desessard.  - Vous l'avez voté !

M. Gérard Longuet.  - De bon coeur ! Un médecin est capable de distinguer la pénibilité de l'atteinte à la santé. Tout ce qui est dangereux n'est pas pénible. Le tabac est dangereux mais plutôt plaisant. De même l'alcool.

M. Jean Desessard.  - C'est pénible le lendemain (Sourires)

M. Gérard Longuet.  - Pour les autres, surtout. Inversement, il est sans doute pénible de m'écouter pendant des heures, mais ce n'est pas dangereux pour la santé. (On s'amuse)

L'amendement évoque les cas d'altération ou de dégradation de la santé. Quelle différence faites-vous entre ces deux notions ?

Quoi qu'il en soit, la pénibilité ne débouche pas sur la dégradation de la santé.

Mme Catherine Génisson.  - C'est plutôt ce que vous défendiez dans la loi de 2010.

M. Gérard Longuet.  - Nous évoluons !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Nous sommes tous d'accord sur la rédaction de l'amendement. La question est de savoir s'il est à la bonne place. Je rejoins Mme Blandin sur l'amiante. Il est normal que l'employeur se conforme aux prescriptions du médecin du travail. Mais est-ce que cela doit figurer ici ? Je ne le crois pas. Nous nous abstiendrons.

M. Dominique Watrin.  - Nous ne divergeons pas sur cet amendement sur le fond avec les autres groupes de la majorité sénatoriale, puisque nous l'avons soutenu ensemble en juillet 2011. On peut toujours se compliquer la vie avec des questions de forme. Depuis si peu de temps que je suis ici, j'en ai vu beaucoup défiler, des cavaliers, et celui-ci n'est pas des plus manifestes. Cet amendement se rattache clairement à cet article et il est bien dans la ligne du texte, qui concerne la prévention. Il serait logique que nous votions tous cet amendement. (Applaudissements sur les bancs CRC)

L'amendement n°164 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°163, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  L'article L. 4625-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ces médecins doivent être titulaires d'une habilitation délivrée par l'autorité administrative conditionnée par le suivi d'une formation spécifique dont le contenu est fixé par décret. Le protocole précise les modalités d'exercice au sein du service de santé au travail et l'incompatibilité entre la fonction de médecin de soin du travailleur ou de l'employeur et le suivi médical du travailleur prévu par le protocole. »

M. Michel Le Scouarnec.  - Nous avions défendu cet amendement avec nos collègues socialistes de la commission des affaires sociales lorsque nous étions dans l'opposition.

Pour certaines professions comme les intermittents du spectacle, les mannequins ou les salariés du particulier employeur, la loi réformant la médecine du travail a prévu que des médecins généralistes puissent accomplir des actes qui relèvent normalement de la compétence des médecins du travail. Nous proposons, comme l'avait fait Jean-Pierre Godefroy à propos de l'anorexie des mannequins, que leur habilitation résulte d'une autorisation administrative compétente en matière de santé publique et non d'un choix fait par le service de santé au travail.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement n'est pas à sa place dans ce projet de loi. Avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Monsieur Desessard, votre conception des cavaliers est pour le moins cavalière. (Sourires) Introduire une référence ne suffit pas à établir un lien. En 2010, le Conseil constitutionnel a annulé de nombreux articles sur la médecine du travail introduits dans le projet de loi sur les retraites de la précédente majorité. (M. Gérard Longuet le concède)

M. Jean Desessard.  - Je suis un fantassin de la santé au travail !

Mme Catherine Génisson.  - J'entends l'argument du cavalier mais cet amendement est intéressant et pointe l'importance et l'urgence d'une nouvelle réforme de la médecine du travail.

Nous tenons à préciser que le médecin du travail ne doit en aucun cas être aussi le médecin de soins du travailleur. (Applaudissements sur les bancs CRC)

L'amendement n°163 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°165, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le 1° bis de l'article L. 422-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1° ter Imposition d'une cotisation supplémentaire en cas de non-respect par l'employeur des obligations découlant de l'article L. 4622-1 du code du travail ; ».

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet amendement rappelle les employeurs au respect de leurs obligations en matière de médecine du travail. Un salarié en bonne santé, c'est une entreprise en bonne santé. La prévalence des troubles musculo-squelettiques est inquiétante. Aux dizaines de milliers de personnes affectées s'ajoutent les cas non déclarés. C'est dire s'il convient de renforcer la médecine du travail. La loi n'est pas respectée partout.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Cet amendement aurait toute sa place dans un texte réformant la médecine du travail, pas dans ce projet de loi : avis défavorable.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Il ne s'agit pas de nous prononcer de façon négative sur la place de la médecine du travail. Des améliorations, sur le fond des politiques publiques, comme sur l'organisation, doivent être entreprises. J'y ai fait référence dans le cadre de la stratégie nationale de santé publique. M. Sapin, devant le Coct, a pris, en mai dernier, l'engagement de présenter un bilan de la santé au travail et de sa médecine. La conférence sociale de juin dernier s'en est saisie. La médecine du travail est inscrite à l'agenda du Gouvernement.

Reste que ces dispositions n'ont pas leur place dans ce texte, d'où un avis défavorable.

Mme Isabelle Pasquet.  - Nous avons bien compris ce refus. Nous tenons que la médecine du travail a un rôle à jouer, dans le cadre de ce texte, à propos du compte pénibilité. D'où nos amendements. Cela n'enlève rien au futur débat que vous nous annoncez, qui implique aussi les partenaires sociaux. Nous considérons que nos amendements ne sont pas des cavaliers.

M. Philippe Bas.  - Je sais gré à Mme la ministre d'avoir déclaré que des évolutions sont indispensables. Mon opposition à cet amendement n'est pas due principalement au fait qu'il s'agit d'un cavalier. C'est le fond qui prime. De ce point de vue, madame la ministre, votre réponse me déçoit car elle ne nous éclaire guère sur les réformes envisagées par le Gouvernement. Ne pouvez-vous nous en dire un peu plus ? Aucun de ces amendements ne va dans la bonne direction. Vouloir ériger des barrières supplémentaires en médecine généraliste comporte un risque grave, celui de baisser la garde face à la réalité démographique : nous manquons de médecins du travail.

La méthode du groupe CRC ne me surprend pas : pénalité et prélèvement sur les entreprises, une fois de plus ; c'est la politique du tout fiscal, qui n'est pas pertinente. Nous nous y opposons.

Mme Catherine Génisson.  - Nous ne mettons en cause ni les médecins du travail ni les médecins généralistes. Ce qui importe, c'est que le médecin traitant du travailleur n'ait aucun lien avec le médecin du travail.

Mme Catherine Deroche.  - Beaucoup de collectivités locales n'arrivent pas à remplir leurs obligations à cause de la pénurie de médecins du travail. Combien de fois, dans leur carrière, les professeurs voient-ils un médecin du travail ?

Mme Catherine Génisson.  - Et la médecine scolaire ?

L'amendement n°165 n'est pas adopté.

M. Gérard Longuet.  - Cet article est passionnant. (Exclamations ironiques à gauche) Enfin une rupture par rapport aux lois « scélérates » de vos prédécesseurs !

L'article 10 met fin au comité scientifique sur la pénibilité qui devait évaluer l'incidence de celle-ci sur la santé et l'espérance de vie.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il n'a jamais été réuni !

M. Gérard Longuet.  - Je le regrette. Les ministres du travail successifs en portent la responsabilité. Ce comité nous aurait éclairés sur la frontière entre pénibilité et altération de la santé. Sans doute sont-ce, comme dans d'autres domaines, des ensembles flous...

L'expérimentation prévue devrait prendre fin... dans deux mois. Belle rupture ! Une espérance nouvelle se lève sur l'horizon des retraites... (Rires à droite) Nous nous opposerons à cet article.

M. Philippe Bas.  - Je prends la parole à mon tour parce que M. Longuet n'a pas eu le temps de développer toute son argumentation. (Exclamations à gauche) Il est regrettable que l'expérimentation prévue par la loi de 2010 n'ait pas eu lieu et que le comité n'ait pas été réuni.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Il devait l'être avant mars 2011 !

M. Philippe Bas.  - Pourquoi ne pas reporter l'échéance ? C'est l'utilité de la navette.

Mme Catherine Deroche.  - Il n'y en a pas...

M. Philippe Bas.  - Il sera impossible d'appliquer le dispositif, véritable « choc de complexité », avant le 1er janvier 2015. Pourquoi fixer de telles échéances irréalistes ?

Jusqu'à présent, notre droit était fondé sur le risque zéro. À présent, il y aura des seuils d'exposition à la pénibilité.

Nous-mêmes, nous avons fauté en ne laissant pas suffisamment de temps à l'expérimentation. Il conviendrait de lui donner une seconde chance.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Le Gouvernement, en 2010, avait insisté sur la nécessité de mesurer la pénibilité à effet différé sur l'espérance de vie. D'où le comité scientifique et l'expérimentation. Quelle erreur de s'en passer ! L'expérimentation n'est pas dans nos traditions, c'est dommage. Vous n'avez pas non plus porté, en contradiction avec la loi, le débat national sur les retraites par points, qui devait avoir lieu au premier semestre 2013.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'article 10, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°336 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 juin 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l'efficience du dispositif d'allocation transitoire de solidarité et la pertinence d'un retour à l'allocation équivalent retraite.

M. Jean Desessard.  - En 2011, l'allocation équivalent retraite (AER) a été supprimée et remplacée par l'allocation transitoire de solidarité (ATS), transitoire et très restrictive. Le président de la République s'est engagé à y revenir. Le rapporteur de l'Assemblée nationale a relevé que beaucoup de personnes en situation précaire avaient été exclues du dispositif. Certes, un assouplissement a été adopté pour 2013 mais il reste insuffisant. L'Assemblée nationale a voté un amendement socialiste demandant un rapport sur la génération 1952-1953, sans traiter l'ensemble des problèmes. D'où cet amendement.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - L'ATS, telle que modifiée par le Gouvernement, a corrigé la plupart des injustices provoquées par la réforme de 2010. L'Assemblée nationale a demandé un rapport, je ne suis pas sûre qu'il faille aller plus loin. Le décret de juillet 2012 permet aux salariés aux carrières longues de partir plus tôt à la retraite. Retrait.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille.  - Même avis.

L'amendement n°336 rectifié est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°348, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé:

Le Gouvernement crée, dans les deux mois qui suivent la promulgation de la présente loi, une commission permanente composée de représentants des organisations syndicales et patronales, d'élus nationaux et d'élus locaux des départements et territoires d'outre-mer, chargée d'évaluer dans les années à venir les effets de cette réforme sur les populations concernées.

M. Dominique Watrin.  - La situation est telle en outre-mer que l'application mécanique de la réforme y aurait de graves conséquences. À La Réunion, 42 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. L'île compte 167 000 chômeurs, dont 60 % de jeunes de moins de 25 ans.

La Réunion est aussi l'une des régions où l'espérance de vie est la plus faible, inférieure de deux ans à la moyenne nationale. 30 % des personnes âgées vivent avec le minimum vieillesse. L'Insee qualifie La Réunion de département hors-norme, où la pauvreté est un défi à relever. Il est indispensable de prendre des mesures spécifiques.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Vous avez raison de souligner les difficultés économiques des DOM, qui ont évidemment un impact sur les retraites. Quel est l'avis du Gouvernement et que compte-t-il faire ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - La législation nationale sur l'assurance vieillesse s'applique dans les DOM, sauf Mayotte. Toutes les mesures de solidarité prévues ici y seront applicables. Les difficultés d'insertion professionnelle, les stages et temps partiels seront pris en compte. Cette commission est d'autant plus inutile que le comité de suivi examinera aussi la situation de l'outre-mer. Avis défavorable.

Mme Catherine Procaccia.  - Cet amendement m'étonne. À quoi sert donc la délégation à l'outre-mer, composée à parité de sénateurs ultramarins et métropolitains ?

M. Gérard Longuet.  - Une commission associant le Gouvernement et les représentants de l'outre-mer ? Non, il faut des personnes compétentes pour évaluer le régime national et son application outre-mer. C'est le cas des membres de la délégation à l'outre-mer, qui légifèrent pour tous mais connaissent particulièrement bien les handicaps liés à l'insularité.

Pourquoi court-circuiter le Parlement ? Nous voterons contre l'amendement.

M. Philippe Bas.  - Mme Procaccia a été convaincante.

Quant à la situation des outre-mer, je veux rappeler que c'est à la demande du président Chirac qu'en 1995, les allocations de solidarité versées en outre-mer ont été alignées sur celles de la métropole. Ce fut une grande avancée.

La question du traitement social des problèmes ne doit pas occulter celle du développement économique. L'Amérique latine, l'Afrique, l'île Maurice connaissent une croissance de 8 % à 10 %. Que faisons-nous pour que nos entrepreneurs ultramarins profitent de ce dynamisme ?

Le développement économique, c'est la clé de la baisse du chômage, donc de l'augmentation des droits à la retraite.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Vous n'avez pas lu notre amendement qui ne court-circuite nullement le Parlement. Je crois que nos propos sont systématiquement déformés... La commission comprendrait des représentants des organisations syndicales et patronales, des élus locaux et nationaux...

M. Philippe Bas.  - Nous savons lire !

Mme Annie David.  - Apparemment non !

M. Philippe Bas.  - Nous avons essayé d'élever le débat !

Mme Annie David.  - M. Antoinette a parlé ici des difficultés de la Guyane. M. Paul Vergès nous entretient régulièrement de celles de la Réunion. J'ai reçu le président Serge Larcher pour l'assurer du soutien de la commission des affaires sociales afin de faire entendre la voix des outre-mer dans les débats législatifs.

Malgré les mesures de solidarité prévues, les injustices sont flagrantes, et seraient aggravées par l'application uniforme de la réforme.

M. Michel Magras.  - Je ferai donc entendre la voix de l'outre-mer dans cet hémicycle. Chacun sait que le problème des retraites, c'est l'emploi. L'assurance vieillesse serait excédentaire si le taux de chômage était de 4 %. À Saint-Barthélemy, avec 3 % de chômage, nous dégageons un excédent de 20 millions d'euros ; nous contribuons ainsi à la solidarité nationale.

Comment peut-on augmenter les charges sociales et les impôts simultanément ? À Saint-Barthélemy, le système fiscal est adapté. A la Guadeloupe, la fiscalité plombe tellement l'économie que le déficit est de 100 millions d'euros. Abordons le problème dans sa globalité.

Enfin, il y a autant de situations que d'outre-mer, j'ai parlé au nom d'une collectivité, pas d'un département.....

Mme Catherine Deroche.  - La délégation à l'outre-mer associe des élus nationaux d'outre-mer et de métropole, contrairement à la commission que vous proposez. À moins qu'il manque une virgule ? (Marques d'agacement sur les bancs CRC)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°348, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

ARTICLE 10 BIS

Mme Annie David .  - Cet article prévoit un rapport sur la situation des personnes nées en 1952 et 1953, exclues de l'ATS alors qu'elles en remplissent les critères. C'est bien, mais insuffisant ! Nous recevons tous des appels de seniors désespérés qui ont acceptés un plan de sauvegarde de l'emploi sans imaginer que l'âge de la retraite serait repoussé.

Fin 2010, le gouvernement Sarkozy-Fillon supprimait en outre l'AER pour la remplacer par l'ATS, réservée aux plus de 60 ans.

Début 2013, le Premier ministre a annoncé le rétablissement de l'AER pour les générations de 1952 et 1953 mais, aux termes du décret, les trimestres validés au titre de l'allocation de solidarité spécifique ne sont pas pris en compte, ce qui pénalise 10 000 à 11 000 personnes. Je connais une femme qui a cotisé 169 trimestres dont 164 seulement sont validés, alors qu'il en faudrait 165, et qui devra vivre encore deux ans avec l'ATS.

Il est temps d'exprimer notre solidarité à l'égard de ces salariés licenciés à 56 ou 57 ans et de réparer cette injustice.

Mme Laurence Cohen .  - Nous voterons cet article. L'ATS n'a pas remplacé, à proprement parler, l'AER car elle n'en a jamais été l'équivalent. Des milliers de salariés privés d'emploi ne cumulent pas assez de trimestres pour partir à la retraite. Ils plongent alors dans l'Allocation de solidarité spécifique (ASS).

Cet article 10 bis, à sa manière, participe de la politique de rigueur du Gouvernement. Bridés par l'article 40, les parlementaires doivent se contenter d'un rapport. Il faudrait mener une réflexion globale sur les seniors en situation précaire. Au-delà du rapport, il faut en effet examiner le fond de la question.

Mme Isabelle Pasquet .  - Cet article permet d'aborder à peu de frais la question de l'ATS. Nous ne nous satisfaisons pas d'attendre encore trois mois un rapport qui ne nous apprendra rien.

Les Carsat prennent en compte les trimestres validés au titre de l'allocation spécifique de solidarité. Or, consigne aurait été donnée de ne plus le faire. Le confirmez-vous ?

Mme la présidente.  - Amendement n°369 rectifié bis, présenté par MM. M. Bourquin, Daudigny, Kerdraon, Fichet et Mirassou.

Remplacer les mots :

trois mois

par les mots :

un mois

M. Yves Daudigny.  - On voudrait nous faire croire que l'histoire de notre pays a commencé en 2012... Rappelons que la précédente majorité avait supprimé l'AER.

Le décret du 4 mars 2013 témoigne d'une volonté réelle de répondre à une urgence sociale. Il s'agit, par cet amendement, de permettre d'évaluer et corriger les difficultés d'application avec la même exigence avant la fin de cette année budgétaire.

Les années concernées étant restreintes aux classes d'âges 1952 et 1953, une évaluation longue du dispositif préalable à toute décision risque d'être perçue comme dilatoire.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Nous connaissons tous les difficultés liées à cette question. J'espère que Mme la ministre nous éclairera sur les intentions du Gouvernement. Sur cet amendement, sagesse.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Le relèvement de l'âge de départ à la retraite en 2010 a créé une situation injuste pour les chômeurs qui pensaient pouvoir prendre leur retraite à l'issue de leur période de chômage. Pour y remédier, le décret de 2013 a reconduit l'ATS pour les personnes nées en 1952 et 1953, justifiant d'une durée de cotisation complète.

L'article prévoit un rapport d'ici trois mois sur l'ATS. Laissons aux services le temps de travailler. Retrait.

Mme Annie David.  - Le rapport peut être rédigé très rapidement : M. Sapin nous a cité les chiffres l'an dernier. Remettre les choses à plus tard n'est pas bon car il y a urgence. S'il le faut, nous donnerons un coup de main au ministère car les chiffres sont disponibles dans les départements.

L'amendement n°369 rectifié bis est adopté.

L'article 10 bis, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Mme la présidente.  - Amendement n°166, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article L. 1231-1, les mots : « , ou d'un commun accord, » sont supprimés ;

2° Au second alinéa de l'article 1233-3, les mots : « à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, » sont supprimés ;

3° Les articles L. 1237-11 à L. 1237-16 sont abrogés.

M. Michel Billout.  - Cet amendement supprime les articles relatifs à la rupture conventionnelle qui sert, dans la plupart des cas, à licencier sans avoir à passer par une procédure de licenciement beaucoup plus contraignante pour l'employeur.

Nous avons dénoncé le dispositif, lors de son adoption en 2009, qui ouvre une brèche supplémentaire dans la législation sur le licenciement. En 2011, L'Humanité (exclamations ironiques à droite), de bonne lecture (mêmes mouvements), citait le nombre d'entreprises qui utilisaient ce dispositif pour passer outre leurs obligations en matière de plans de sauvegarde de l'emploi. La baisse du nombre de ces plans entre 2010 et 2011 peut fort bien s'expliquer par un recours accru à la rupture conventionnelle.

Près de cinq ans après leur adoption, nous portons les mêmes critiques, confirmées depuis par le Conseil d'analyse stratégique, qui relève des dérives.

Le retour à l'emploi qui suit est souvent précaire. On peut qualifier cet amendement de cavalier mais, comme il ne semble pas dans les intentions du Gouvernement de l'abroger dans un prochain texte, nous avons estimé utile d'en débattre.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Vous l'avez dit vous-même, cet amendement est sans lien avec le projet de loi. Je rappelle que le dispositif est issu d'un accord national interprofessionnel de 2008. Avis défavorable.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Même avis.

Mme Catherine Procaccia.  - Ni Mme la rapporteure ni Mme la ministre n'ont remis en cause la rupture conventionnelle. Dans mon entreprise, elle était attendue par les salariés et non par l'employeur. Le Conseil d'analyse stratégique est moins critique que vous, même s'il est moins dithyrambique que moi... Respectons les choix de chacun. Je continue à défendre la rupture conventionnelle et je me félicite qu'il ne soit pas question de l'abroger.

M. Jean Desessard.  - Mes collègues communistes ne vont pas être d'accord... J'aurais aimé entendre l'avis du groupe socialiste. Je suis pour la rupture conventionnelle, même s'il y a des abus ou des excès. Elle évite les pressions morales. Mais il faudrait à tout le moins renforcer les effectifs de l'inspection du travail.

L'amendement n°166 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°169, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 5121-14 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L'inspection du travail procède annuellement au contrôle de l'application de l'accord ou du plan d'action dans l'entreprise. »

M. Dominique Watrin.  - Des salariés âgés souhaitent partir en retraite un peu plus tôt lorsqu'ils sont touchés par la pénibilité de leur poste de travail. Organisations syndicales, comités d'entreprise et CHSCT peuvent agir dans les entreprises moyennes ou grandes. Il en va différemment dans les PME-TPE ; les délégués du personnel ont peu de moyen pour exercer les contrôles nécessaires. Nous avons la chance, dans notre pays, d'avoir des inspecteurs du travail qui accomplissent un travail admirable, mais sont peu nombreux et manquent de moyens.

M. Jean Desessard.  - C'est vrai !

M. Dominique Watrin.  - Nous souhaitons qu'ils soient les garants de la bonne application des accords et plans concernant les salariés âgés. Par leur expertise, ils sont, notamment dans les PME, le meilleur rempart des salariés, les meilleures vigies du respect des règles qui protègent ces derniers.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le contrôle des accords relatifs aux contrats de génération est particulièrement strict. Ils sont soumis à la Direccte et les entreprises ont l'obligation de lui transmettre chaque année un document d'évaluation. Celles qui ne remplissent pas leurs obligations sont soumises à des pénalités. Ce dispositif a moins d'un an : voyons comment il s'applique avant d'aller plus loin. Avis défavorable.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Le Gouvernement est tout aussi soucieux que vous que les accords relatifs à l'emploi des salariés âgés soient appliqués. Le document d'évaluation est transmis à la Direccte et les instances représentatives du personnel en ont copie. Un contrôle annuel est déjà consacré dans le droit et le sera dans les faits. Avis défavorable.

Mme Catherine Procaccia.  - Vu le succès des contrats de génération, les inspecteurs du travail ne seront pas débordés !

M. Gérard Longuet.  - À partir de quand est-on « âgé »au sens du contrat de génération ?

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - 55 ans au chômage, 57 ans dans l'entreprise.

M. Gérard Longuet.  - Merci.

M. Jean Desessard.  - Mme la rapporteure a réponse à tout !

L'amendement n°169 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°170, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 5121-14 du code du travail, le taux : « 1 % » est remplacé par le taux : « 10 % ».

M. Gérard Longuet.  - Encore un amendement matraque !

Mme Isabelle Pasquet.  - L'un des défis de ce texte, au-delà des retraites, est l'emploi des salariés âgés. Il importe de s'assurer de l'efficacité des dispositifs existants.

Nous devons rejoindre la moyenne du taux d'emploi des salariés âgés dans l'Union européenne. Solliciter les entreprises, c'est aussi mieux répartir l'effort pour développer l'emploi des seniors.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Comme pour l'amendement précédent, il est trop tôt pour modifier le régime du contrat de génération. Décupler la pénalité est excessif. Avis défavorable.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Une pénalité n'a de sens que si elle est appliquée et dissuasive. La décupler, c'est la rendre inapplicable ou contraindre les entreprises à la cessation de paiement. Le dispositif actuel est assorti de pénalités dissuasives et proportionnées. Avis défavorable.

M. Gérard Longuet.  - C'est un salarié âgé qui s'exprime devant vous...

M. Jacky Le Menn.  - Vous ne faites pas votre âge...

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Ni n'exécutez un travail pénible !

M. Gérard Longuet.  - Bienvenu dans un monde de répression, de pénalité, de sanction ! Étonnez-vous ensuite de la fuite des investisseurs et de la panne des embauches ! Certes, dans L'Humanité chère à Jaurès et à Cachin, vous pourrez dire que vous avez frappé fort, mais de tels excès nous décourageraient s'ils ne nous faisaient pas sourire.

M. Jean Desessard.  - Cela mériterait une réponse énergique !

Mme Laurence Cohen.  - Nous dépensons notre énergie autrement. C'est trop caricatural !

L'amendement n°170 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°167, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Avant l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un décret précise les conditions selon lesquelles, dans les entreprises de plus de 300 salariés, l'inspecteur du travail peut constater un recours abusif aux procédures de licenciement et de pré-retraite concernant les salariés de plus de cinquante-cinq ans. Après une telle constatation et au terme d'une procédure contradictoire avec le comité d'administration ou de surveillance, l'inspecteur du travail peut soumettre à une majoration de 10 % les cotisations dues par l'employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l'ensemble des salariés dans l'entreprise concernée, pour une période de douze à vingt-quatre mois.

M. Michel Billout.  - L'objectif de la réforme des retraites est d'allonger la durée de cotisation. Mais le taux d'emploi des seniors est faible en France, 41,5 %, en-dessous de la moyenne européenne -l'objectif pour 2010 était, dans l'Union, de 50 %. Les employeurs se servent des ruptures conventionnelles pour se séparer à bon compte de leurs seniors.

L'assurance chômage relève une surreprésentation des 55-60 ans. La grande majorité d'entre eux sont poussés vers la sortie, c'est une forme de discrimination en contradiction totale avec l'article L. 1133-2 du code du travail. Les inspecteurs du travail doivent pouvoir constater les abus et les sanctionner.

Mme Christiane Demontès, rapporteure.  - Le contrat de génération contribue au maintien dans l'emploi des salariés âgés. L'inspecteur du travail n'a pas à juger la politique des ressources humaines de l'entreprise mais à contrôler le respect du droit du travail. Un recours est ouvert devant les prud'hommes aux salariés qui s'estiment victimes de discrimination en raison de leur âge. Avis défavorable.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - J'abonde dans votre sens. La loi de sécurisation de l'emploi de juin 2013 a créé une procédure de validation des PSE par l'administration, qui veille à ce qu'ils ne soient pas discriminatoires à l'encontre des salariés de plus de 55 ans.

ARTICLE 11

Mme Isabelle Pasquet .  - Cet article modifie les règles applicables à la retraite progressive pour les rendre plus claires et plus protectrices. Nous aurions besoin de quelques éclaircissements.

Les décotes générales s'appliquent-elles aux retraites progressives ? Si tel était le cas, le salarié serait lésé. Et si le temps de travail passe sous la barre des 150 heures, il n'est pas pris en compte ; les droits à la retraite seraient calculés sur la base d'une carrière amputée -sauf en cas de surcotisation. Moins de 2 500 personnes bénéficient de la retraite progressive au 31 décembre 2012, selon la Cnav, ce qui est peu. Il est regrettable que les salariés doivent recevoir l'accord de leur employeur ; combien de demandes ont-elles été formulées, et combien acceptées ?

M. Jean-Yves Leconte .  - Pour qu'il n'y ait pas d'hypocrisie, il faut que les personnes concernées puissent cotiser jusqu'à l'obtention d'une retraite à taux plein. Cet article répond à leur préoccupation. J'attire l'attention sur les difficultés spécifiques rencontrées par les Français résidant à l'étranger pour obtenir un taux plein. Certains cotisent volontairement à la Cnav par le biais de la caisse des Français de l'étranger (CFE) mais sont soumis, pour le droit du travail, à celui du pays de résidence. Les recrutés locaux qui travaillent dans nos établissements publics à l'étranger -et cotisent à la CFE- sont, du fait des réductions d'effectifs, invités à partir à la retraite à 60 ans, voire mis à la retraite d'office, avant d'avoir pu obtenir une retraite à taux plein. Je souhaite que le décret d'application de l'article 11 leur permette de partir en retraite progressive.

M. Gérard Longuet .  - On recherche souvent la perfection d'un dispositif sans rencontrer l'adhésion de ceux qui sont censés en bénéficier... L'idée d'une retraite progressive est séduisante. Le nombre de personnes concernées reste modeste. Quel est le pourcentage de ces retraités qui dépendent des régimes des indépendants ou agricoles, de la CNRPL en particulier ? La complexité du système proposé est remarquable. Cela me rappelle les moments les plus difficiles de mes permanences d'élus quand il faut répondre aux polypensionnés qui ne peuvent pas faire valoir leurs droits... Ajoutons à cela les conséquences de la globalisation. Il y aura de plus en plus de carrières internationales, transfrontalières, européennes.

Qu'attendez-vous de ce dispositif, madame la ministre ?

Mme la présidente.  - Je vais mettre aux voix l'article 11.

M. Gérard Longuet.  - Je n'ai pas de réponse... Je comprends que Mme Demontès soit un peu lasse mais je m'étonne que le Gouvernement ne veuille ou ne puisse pas répondre. Le dispositif de l'article 11 est compliqué, il n'est pas inutile que nous soyons éclairés. Sinon, nous nous abstiendrons, par prudence.

Mme Christiane Demontès, rapporteur.  - Très bien, abstenez-vous !

M. Jean Desessard.  - Je ne répondrai pas pour le Gouvernement... (Sourires)

M. Gérard Longuet.  - Dommage !

M. Jean Desessard.  - J'aurais aimé que Mme la rapporteure nous fasse l'article sur cet article... (Sourires)

M. Gérard Longuet.  - Toujours pas de réponse.

M. Philippe Bas.  - Difficile pour notre groupe de se déterminer sans entendre le Gouvernement. Les interrogations de M. Gérard Longuet n'ont rien d'extravagant.

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Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques