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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



CMP (Demande de constitution)

Organisme extraparlementaire (Candidature)

Protection de l'enfant (Suite)

Mme Michelle Meunier, auteure de la proposition de loi et rapporteure de la commission des affaires sociales

Discussion générale (Suite)

Mme Élisabeth Doineau

Mme Aline Archimbaud

Mme Laurence Cohen

M. Jean-Noël Cardoux

M. Claude Dilain

M. Philippe Mouiller

M. Jacques Bigot

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

ARTICLE 2

Mise au point au sujet d'un vote

Protection de l'enfant (Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3

ARTICLE 4

ARTICLES ADDITIONNELS

ARTICLE 5

ARTICLE 6

M. Claude Kern

ARTICLE 8

ARTICLE 12 (Supprimé)

ARTICLE 13

ARTICLE 14 (Supprimé)

ARTICLE 15

ARTICLE 16

ARTICLE 17

ARTICLE 18

ARTICLE 7 (Précédemment réservé)

ARTICLE 19

ARTICLE 20

Débat « Quels emplois pour demain ? »

M. Roger Karoutchi, président de la délégation sénatoriale à la prospective

M. Alain Fouché, rapporteur de la délégation sénatoriale à la prospective

Mme Corinne Bouchoux

M. Dominique Watrin

M. Pierre-Yves Collombat

M. Olivier Cadic

M. Daniel Gremillet

M. Yannick Vaugrenard

M. Didier Mandelli

M. Michel Savin

Mme Fabienne Keller

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Ordre du jour du jeudi 29 janvier 2015

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mercredi 28 janvier 2015

56e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président

Secrétaires : M. Philippe Adnot, M. Serge Larcher.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

CMP (Demande de constitution)

M. le président.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du Règlement.

Organisme extraparlementaire (Candidature)

M. le président.  - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein du conseil d'administration de l'agence Business France.

Conformément à l'article 9 du Règlement, la commission des Affaires économiques a été invitée à présenter une candidature.

La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du Règlement.

Protection de l'enfant (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la proposition de loi relative à la protection de l'enfant, présentée par Mme Michelle Meunier et plusieurs de ses collègues.

Mme Michelle Meunier, auteure de la proposition de loi et rapporteure de la commission des affaires sociales .  - En application de l'article 44-6 du Règlement, la commission des affaires sociales souhaite que la discussion de l'article 7, qui traite du délaissement parental, soit réservée jusqu'à la fin de l'article 18.

La réserve, acceptée par le gouvernement, est ordonnée.

Discussion générale (Suite)

Mme Élisabeth Doineau .  - Comment ne pas exprimer des regrets ? Que Mme Dini ne soit plus là aujourd'hui ; le sujet lui tenait tant à coeur. Que cette discussion générale se prolonge, avec un mois de décalage. Qu'un tel sujet mobilise si peu...

Mme Françoise Laborde.  - Les meilleurs sont là !

Mme Nicole Bricq.  - Les bons !

Mme Élisabeth Doineau.  - La protection de l'enfance, ce sont 30 000 mineurs, soit 1,8 % des jeunes de 0 à 21 ans, 7 milliards d'euros. Cette proposition de loi touche de nombreux sujets, comme l'inceste ; qui ne sont pas abordés par le rapporteur de la mission d'information du Sénat. C'est un peu un rendez-vous manqué... Avec Mme Dini, Mme Meunier a mené un travail empathique, empreint d'humanité pour dresser un bilan exhaustif, en interrogeant d'anciens enfants suivis par l'ASE : 62 % d'entre eux ont souffert de l'interruption de leur parcours, 43 % du maintien à tout prix du lien avec les parents. Preuve qu'il reste beaucoup à faire !

Je salue le travail de pédagogie de M. Pillet. La loi du 5 mars 2007 a clarifié les missions et le vocabulaire de la protection de l'enfance, renforcé les dispositifs d'alerte, amélioré l'information du personnel. Mais, huit ans après, sa mise en oeuvre n'est que partielle, faute de moyens financiers.

Le fonds créé pour financer la protection de l'enfance n'a jamais été abondé correctement. Les départements ont vu leurs dépenses sociales exploser, avec un reste à charge qui a crû de 4,6 %. En Mayenne, par exemple, ce sont 36 % de jeunes confiés en plus en cinq ans, 21 % de mesures éducatives en plus, 11 % de dépenses en plus entre les deux derniers budgets. De plus en plus de jeunes faisant l'objet de mesures pénales sont confiés à la protection de l'enfance, alors qu'ils relèveraient plutôt de la protection judiciaire de l'enfance.

Les autres pays européens privilégient l'épuisement des possibilités de négociations préalables avec les parents. En France, la réponse est majoritairement judiciaire. Le cas des jeunes souffrant de problèmes psychiatriques est difficile à gérer. Autre difficulté : le cas des mineurs étrangers isolés.

Les départements sont soumis à de multiples contraintes administratives : schémas, plans, tableaux de bord, etc. et leurs pratiques sont soumises à des audits internes et externes. Tout cela a été fait dans l'intérêt des enfants, certes, mais n'oublions pas l'humain au profit des grilles statistiques...

Certains départements n'ont plus les moyens d'appliquer toute la loi. Saint-Exupéry disait justement : « S'agissant de l'avenir, il ne s'agit pas de le prévoir mais de le rendre possible ».

Pour ce qui est des mineurs étrangers isolés, l'État s'est déchargé sur les départements. Il faut se pencher sur cette question sensible. Notre vote dépendra du sort réservé à nos amendements. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Aline Archimbaud .  - Dans son rapport de 2015, l'Observatoire national de la délinquance indique que les faits de violence et maltraitance contre les enfants s'élèvent à 20 884, en hausse de 6 000 par rapport à l'année précédente. La loi de 2007 marquait un progrès mais des manquements subsistent sur le terrain. Ils ont été bien soulignés par l'excellent travail de Mmes Meunier et Dini.

L'essentiel est de pouvoir intervenir en amont. L'information doit circuler pour éviter les drames. Or le cloisonnement entre les acteurs, le manque de moyens financiers y font obstacle. Il faut décloisonner les services de l'aide à l'enfance et de l'aide aux familles.

La centralisation des signalements, instaurée par la loi de 2007, doit faciliter la prise en charge des enfants. Mais la formation fait défaut... Les médecins scolaires devraient être en première ligne - or la santé scolaire reste le parent pauvre de la protection de l'enfance. En France, en 2009, on comptait 1 270 médecins scolaires pour 200 000 élèves. À Pantin, il n'y en a qu'un pour 11 000 élèves !

La situation des mineurs étrangers isolés, malgré la circulaire de 2013, est insatisfaisante. Les tests osseux, pourtant peu fiables et très lourds, sont encore utilisés pour évaluer l'âge des enfants, contrairement à ce que demande la circulaire. La répartition de ces mineurs entre départements a été refusée par certains ce qui accroît la charge des autres. Les associations dénoncent les conditions d'accueil de ces enfants, qui doit être réalisée conformément aux valeurs de la Convention internationale des droits de l'enfant dont notre pays est signataire.

Malgré ces regrets, cette proposition de loi apporte des premières réponses à un certain nombre de problèmes. Les écologistes le voteront. (Applaudissements à gauche)

Mme Laurence Cohen .  - Dans un contexte de précarisation sociale et économique, dans un système social qui exclut plus qu'il n'intègre, le nombre d'enfants pauvres a augmenté de 440 000 entre 2008 et 2012, et de 13 % celui des enfants pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance depuis 2010.

La proposition de loi de Mmes Meunier et Dini vise à améliorer le dispositif existant en prévoyant un pilotage national, pour remédier aux inégalités territoriales. Le dogme du maintien du lien avec les parents doit notamment être revu.

L'amélioration du suivi de l'enfant placé est indispensable. La proposition de loi renforce le projet pour l'enfant et l'information des familles d'accueil. La formation des acteurs doit être améliorée. La nomination d'un médecin traitant est bienvenue, tout comme la proposition par le juge d'un administrateur ad hoc, chargé de représenter les intérêts du mineur.

Je regrette toutefois l'absence de proposition sur la prise en charge des fratries et le silence du texte sur les moyens financiers et humains de la protection de l'enfance. Vu le contexte budgétaire, les inégalités territoriales risquent de progresser. Nous aurions aimé voir réaffirmé le rôle central de l'État, seul à même de garantir l'égalité de traitement.

En fait de prévention, la PMI se voit fragilisée par la dilution de ses missions. La question de l'autonomisation et de l'insertion professionnelle des jeunes de l'ASE aurait aussi mérité d'être abordée, tout comme celle de la situation d'extrême fragilité des mineurs étrangers isolés. Songez à ces lycéens sans papiers qui vivent la peur au ventre... Certains élus, notamment au conseil général du Val-de-Marne et au conseil régional d'Île-de-France, ont mis en place un système de parrainage pour leur permettre de poursuivre leurs études en France. Je salue l'action du réseau Éducation sans frontières, qui oeuvre pour mettre fin aux expulsions. Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements.

Le groupe CRC souhaite enrichir ce texte, nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Claude Dilain applaudit aussi)

M. Jean-Noël Cardoux .  - Chacun reconnaît que la loi de 2007, que nous devons à Philippe Bas, ici présent, est un bon texte - certes perfectible. En matière de protection de l'enfance, les départements - dont l'existence même, faut-il le rappeler ? est menacée -, sont chefs de file, et pilotent le dispositif, plutôt bien. Je rends hommage aux assistants familiaux et maternels, trop peu reconnus, qui exercent une mission difficile et côtoient au quotidien les pires situations.

Ce texte émane d'un excellent rapport de Mmes Meunier et Dini. Nous considérons, au groupe UMP, que sa transposition dans la loi n'est pas aboutie : elle aurait mérité plus de recul, et une véritable étude d'impact. Sur l'adoption, une remise à plat s'impose, comme le propose le président Milon. Cette proposition de loi arrive six mois après le dépôt du rapport, seulement ; nous aurions pu prendre plus de temps. Je salue toutefois le travail de la commission ; sur l'adoption, les amendements de M. Pillet ont été adoptés à l'unanimité de la commission.

L'article premier crée un conseil national de la protection de l'enfance. Mieux vaudrait s'appuyer sur l'Observatoire national de la protection de l'enfance qui existe déjà.

L'article 2 traite de la formation, mais pourquoi les conseils généraux financeraient-ils la formation d'agents de l'État ? Il serait plus simple de s'appuyer sur l'observatoire départemental de l'enfance pour assister, simplement, la formation des agents départementaux.

L'article 4 prévoit un médecin référent en PMI. C'est bien, mais cela se heurtera à la désertification médicale dans nos territoires...

L'article 7 crée une commission pluridisciplinaire - qui exigera la création de quatre ETP. Une usine à gaz, a dit un président de conseil général de l'actuelle majorité...

L'article 8, qui prévoit l'intervention du juge sur le lieu d'accueil, traduit une certaine défiance envers les services de la PMI...

Toutes ces obligations nouvelles imposées à des départements exsangues et menacés auraient mérité une réflexion approfondie, une concertation avec l'ADF. Ces nouvelles charges sont-elles d'ailleurs compatibles avec l'article 72-2, qui prévoit la compensation des transferts de charges aux collectivités locales...

Le groupe UMP, fort modéré, s'en tiendra à proposer de supprimer des articles qui créent le plus de charges pour les départements.

L'enfer est pavé de bonnes intentions... Si nos amendements sont adoptés, nous voterons le texte. Mais en l'état, nous ne pouvons l'approuver. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Claude Dilain .  - Après la loi de 2007, Mmes Meunier et Dini ont proposé un rapport d'information, adopté par la commission des affaires sociales. Une proposition de loi en a découlé, reprenant les suggestions les plus opportunes et consensuelles. Cette proposition de loi doit nous rassembler, car la protection de l'enfance fait l'objet d'un consensus évident. Tous, nous voulons protéger les enfants. Pourtant, légiférer sur ce sujet reste un exercice difficile.

Le souci du bien-être de l'enfant ne date réellement que du XIXe siècle. Il a fallu attendre le 23 décembre 1874 pour que soit votée la première loi relative à la protection des enfants et des nourrissons. Auparavant, les enfants étaient plutôt perçus comme une gêne, par les familles aristocratiques, qui confiaient leur progéniture à une nourrice, comme par les familles populaires, où abandons et infanticides n'étaient pas rares. Longtemps, le père a eu droit de vie et de mort sur ses enfants. L'instinct maternel ou paternel n'est pas inné, comme l'a démontré Élisabeth Badinter.

Deux philosophies de la protection de l'enfance s'opposent : celle qui prône le maintien des liens familiaux, celle qui privilégie la rupture. La maltraitance nous émeut - attention, car l'affect n'est pas bon conseiller en matière de législation.

La création d'un conseil national de la protection de l'enfance est indispensable, mais il doit se nourrir d'informations recueillies au niveau départemental.

C'est pourquoi je préconise des commissions départementales de la protection de l'enfance.

Je propose aussi de remplacer la formule classique « l'âge du discernement » par celle du « degré de maturité ». L'enfant discerne à tout âge ! Traduisons juridiquement cette réalité.

Cette proposition de loi est courageuse. Nul doute que le Sénat saura en débattre sereinement, avec pour seul objectif le bien-être de l'enfant. (Applaudissements à gauche)

M. Philippe Mouiller .  - La loi de 2007 est une bonne loi, même si elle peut paraître incomplète. En matière de protection de l'enfance, la main du législateur doit intervenir avec prudence et après mûre réflexion.

Or cette proposition de loi n'est pas totalement aboutie : nous n'avons pas tous les éléments pour prendre des décisions. Nous ne pouvons légiférer sous le coup de l'émotion. Je salue le travail de M. Pillet, qui a éclairé la réflexion de la commission des affaires sociales sur certains principes juridiques essentiels. Certains n'ont pas vocation à être remis en cause dans un tel texte. Ainsi de la procédure de consultation des documents administratifs.

Il ne nous a pas paru opportun de modifier le régime de l'adoption simple. Celle-ci est révocable mais l'article 370 limite la demande de révocation aux mineurs de plus de 15 ans. La proposition de loi rendait irrévocable l'adoption simple. Le sujet doit être traité dans son ensemble. Nous préférons supprimer les articles concernés et demander une étude sur la question. Nous proposons aussi la suppression de l'article 21, sur l'exclusion des parents de la succession de leur enfant en cas de crime ou délit à son encontre. Nous regrettons aussi le maintien de l'article 20, sur le retrait automatique de l'autorité parentale.

Le vote de notre groupe dépendra du sort réservé à nos amendements. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Jacques Bigot .  - La loi de 2007 a marqué un progrès indéniable, salué sur tous les bancs.

M. Charles Revet.  - Bravo, monsieur Bas !

M. Jacques Bigot.  - Nous avons à l'égard de nos enfants des responsabilités sociales incontestables. La protection de l'enfance ne concerne pas que les enfants maltraités mais aussi ceux qui ont eu le malheur de naître de parents incapables d'exercer l'autorité parentale. La Convention internationale des droits de l'enfant confère à tous les enfants le statut de personne. La lourde responsabilité de la protection de l'enfance est portée par les conseils généraux. Elle induit des charges considérables. Mais les services sociaux sont-ils ceux qui veillent le plus aux économies à réaliser ? La pluridisciplinarité est indispensable. Ce n'est pas la bonne volonté qui fait la qualité du travail. Les travailleurs sociaux revendiquent leur liberté de conscience et le secret professionnel. La pluridisciplinarité peut être très utile.

Soyons humbles : ce n'est pas les lois que nous faisons qui assureront aux enfants le bonheur et l'éducation. Le conseil national n'est pas un lieu de recentralisation mais un lieu de regard. Le projet pour l'enfant vise à apporter aux enfants un environnement aussi stable que possible. L'évolution de la parentalité nous invite à repenser l'adoption. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Madame Doineau, je partage avec vous l'idée que l'accumulation des schémas, etc., est souvent un obstacle à l'action. Ce texte, loin de suraccumuler, simplifie plutôt et donne aux départements et aux professionnels des outils adaptés.

Ce n'est pas un texte sur l'adoption, sujet sur lequel nous menons un travail, en particulier avec le ministère des affaires étrangères pour l'adoption à l'étranger.

Madame Archimbaud, une bonne nouvelle : l'étude que vous avez citée, qui fait état d'une hausse de 43 % des faits d'abandon et de maltraitance, s'explique par le changement des indicateurs.

Oui, madame Cohen, la crise explique bien des choses. La pauvreté est une maltraitance sociale ! Il n'y a pas de mineurs isolés étrangers expulsables tant qu'ils sont mineurs. Notre système est très protecteur.

La PMI est un acteur de la protection de l'enfance mais pas le seul. Nous avons mis en place un groupe de travail sur l'articulation entre PMI et protection de l'enfance dans les départements.

Merci à M. Dilain et à M. Bigot pour leurs interventions. Pour le reste, je répondrai lors de l'examen des articles.

Mes services ont été à la disposition de Mmes Meunier et Dini et je me sens, sur cette proposition de loi, tout à fait aidante. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - Le Gouvernement a déposé lundi 6 amendements ; Mme la ministre a pris l'attache de la commission en amont, pour en présenter la teneur. Ce souci de concertation est assez rare pour être salué.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par MM. Cardoux et Mouiller, Mmes Canayer et Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau et MM. Morisset, Pinton, D. Robert et Savary.

Supprimer cet article.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Il est illusoire d'imaginer qu'une nouvelle instance nationale va permettre de piloter un dispositif de protection de l'enfance entièrement décentralisé et de la compétence des départements depuis 1983.

Cet article est redondant avec l'article 3 qui maintient la nouvelle dénomination de l'« Observatoire national de la protection de l'enfance ».

Est-ce le choc de simplification tant attendu ? Mon amendement, lui, y contribue.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable. À titre personnel, j'y suis défavorable, puisqu'il s'agit de l'un des axes majeurs de la gouvernance de la protection de l'enfance voulue par la proposition de loi.

La redondance que vous alléguez n'est pas avérée, car le conseil national de la protection de l'enfance (CNPE) aura davantage un rôle d'évaluation et d'orientation. Le modèle est celui du Haut Conseil de la famille, qui fonctionne très bien. Pour mutualiser davantage, le CNPE pourrait remplacer le Comité interministériel de l'enfance maltraitée et le Conseil technique de la prévention spécialisée.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Je comprends la première réaction que l'on peut avoir face à la création d'une telle instance. En travaillant sur l'évaluation de la loi 2007, j'ai beaucoup rencontré les présidents de conseil général - je les ai réunis tous le 12 novembre -, toutes appartenances politiques confondues, tous confrontés aux mêmes constats : le besoin d'échanges, de pilotage national, régalien et décentralisé ; ils rejoignent en cela les professionnels qui travaillent en tuyaux d'orgue et expriment les mêmes besoins. Je souhaiterais que l'on donne une chance à ce nouvel outil, dont les compétences ne recouvrent pas celles de l'ONPE. Avis défavorable, donc, tout en étant consciente de l'utilité d'un rapprochement.

À la demande du groupe UMP, l'amendement n°20 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n° 85 :

Nombre de votants3 40
Nombre de suffrages exprimés3 40
Pour l'adoption18 7
Contre 153

Le Sénat a adopté et l'article premier est supprimé

Les amendements nos14 rectifié ter et 24 rectifié deviennent sans objet.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par MM. Cardoux et Mouiller, Mmes Canayer et Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau et MM. Morisset, Pinton, D. Robert et Savary.

Supprimer cet article.

M. Jean-Noël Cardoux.  - La portée de cet article est extrêmement large puisque les personnes visées par l'article L. 542-1 du code de l'éducation sont « les médecins, l'ensemble des personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats, les personnels enseignants, les personnels d'animation sportive, culturelle et de loisirs et les personnels de la police nationale, des polices municipales et de la gendarmerie nationale ».

La proposition de loi est muette sur le financement de ces formations : autant dire que les départements subiront un transfert de charges. On dit qu'on trouvera une solution... Ils ont déjà été tellement échaudés...

M. Charles Revet.  - C'est peu dire !

M. Jean-Noël Cardoux.  - ... que nous préférons prendre les devants.

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est dommage !

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission des affaires sociales a donné un avis favorable. À titre personnel, j'y suis défavorable. S'agissant de prévention, il faut repérer les signaux éventuels de maltraitance et de danger. De quels transferts parlez-vous ? Dans les départements où cela fonctionne bien, c'est ainsi que les choses se passent ; ainsi à Nantes, où j'assistais récemment à une réunion au CHU à propos des bébés secoués, tous les professionnels étaient présents. Les formations sont financées sur les crédits de droit commun. On a tout intérêt à décloisonner. Je n'y vois nul transfert de charges.

M. Charles Revet.  - Vous le dites vous-même, cela fonctionne déjà !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Il y a un malentendu dans la méthode. Vous traquez tout ce qui pourrait créer des charges supplémentaires aux départements mais il ne s'agit ici que de meilleure organisation du travail, source potentielle d'économie.

La loi de 2007 est très inégalement appliquée sur le territoire. En matière de formation, 60 % des départements n'ont pas mis en place l'obligation d'évaluation qui leur est faite. Nous voulons les inciter à appliquer la loi. De même, il n'y a que 10 % d'enfants qui bénéficient du projet pour l'enfance. Je ne crée pas de droit opposable en la matière, je veux voir avec les départements comment atteindre les objectifs de la loi de 2007. Soyons donc plus positifs ! (Applaudissements sur les bancs socialistes, écologistes et du RDSE)

M. René-Paul Savary.  - Je tiens à vous faire part des difficultés qui remontent du terrain. Ce n'est pas en légiférant qu'on changera les choses... Tout dépend des volontés locales et, surtout, des moyens des départements, qui peinent à avoir le personnel nécessaire et correctement formé. La Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) non plus n'a pas le personnel suffisant pour faire face à ses responsabilités. Ce qui est important, c'est que les gens travaillent ensemble et il faut surtout clarifier qui fait quoi. Ainsi, sur les mineurs étrangers isolés, nous sommes toujours en manque de formation adéquate malgré la loi.

J'ajoute que se pose le problème de la radicalisation. On voit des bénéficiaires du RSA qui changent de comportement mais on ne trouve pas le moyen de signaler sans dénoncer, sans tromper la confiance. Les procureurs sont davantage attentifs. Ils demandent aux travailleurs sociaux d'aller voir les familles. Mais ceux-ci ne peuvent intervenir qu'à la demande des familles. N'inversons pas les choses ! Nous avons besoin de moyens et de plus de personnel pour obtenir des résultats, de mettre davantage d'huile dans les rouages. La loi n'y peut rien, hélas !

Mme Nicole Bricq.  - Vous remettez le couvert sur la répartition des compétences des départements... Or vous n'avez à aucun moment abordé le sujet à propos de la loi NOTRe. Vous prenez le problème à l'envers : cette compétence ne vous a jamais été déniée mais vous ne voulez pas l'exercer. (M. Charles Revet s'exclame) Choisissez vos priorités ! Je considère que la protection de l'enfance, le signalement sont une priorité. Nous sommes confrontés à ce problème régulièrement. Il faut voter contre votre amendement.

Mme Laurence Cohen.  - On dépasse largement le cadre de cet article. Ne revenons pas au débat sur la loi NOTRe. Cet article instaure un bilan annuel des formations continues. Comment le législateur s'y opposerait-il ?

J'entends vos inquiétudes sur le financement de ces formations. Peut-être un sous-amendement serait-il opportun pour clarifier ce point mais supprimer cette évaluation ne me paraît pas approprié. Nous ne vous suivrons pas.

M. Philippe Bas.   - Cet amendement supprime une disposition qui n'a rien de très substantiel. Sa portée est assez difficile à apprécier. S'il s'agit de dire tout l'intérêt d'une formation des professionnels de la protection de l'enfance, nous tomberons vite d'accord... Mais qui sont, au juste, ces professionnels ? Ceux de l'ASE, ceux de la PJJ qui ne concernent pas les départements, les enseignants, les médecins... Bref, le champ d'application est difficile à appréhender. Il y a deux catégories : les agents des départements et les autres. Nous avons déjà des formations en direction des premiers et un bilan social, je ne vois pas l'utilité de mettre à la charge des départements un document supplémentaire. L'instrument de pilotage des formations existe. Quant aux autres, c'est une tâche impossible que l'on assignerait aux départements, d'élaborer des formations d'un personnel aussi divers. Ou cette disposition est sans grande portée, ou elle est d'application très difficile. On ne fera pas progresser la protection de l'enfance en se payant de mots. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Élisabeth Doineau.  - Pourquoi écrire un tel article dès lors que la loi de 2007 doit s'appliquer ? Si elle ne l'est pas, il doit être possible de multiplier les contrôles... En Mayenne, l'Igas, la Cour des comptes nous ont beaucoup apporté pour améliorer nos formations et nos méthodes. La réalité, c'est que les départements manquent de moyens.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - J'ai été, au siècle dernier, médecin et vice-président du conseil général du Vaucluse chargé de l'action sociale. J'ai un jour constaté la maltraitance, par sa mère, d'un enfant qui portait des marques de fer à repasser dans le dos... À la suite de l'hospitalisation de l'enfant, signalement fait, celui-ci est mort. Sa mère a été condamnée, et j'ai été poursuivi pour signalement incorrect. Cette expérience m'a meurtri. Vice-président du conseil général, j'ai mis en place un système de protection de l'enfance dès 1992 avec les enseignants, les juges, les médecins, les éducateurs sportifs, tous les professionnels, pour leur demander de travailler ensemble sur les signalements.

L'article demande aux départements de réaliser un bilan des formations. Les crédits de formation pourraient être réorientés à cet effet, pour que les signalements soient efficaces et pour que ceux qui signalent soient protégés. Je vous demande d'adopter cet article. Lui opposer un argument financier n'est pas pertinent ; le supprimer serait humainement lamentable. (Applaudissements à gauche)

Mme Aline Archimbaud.  - Oui, ces besoins de formation sont exprimés par tous les professionnels. Ne faisons pas la politique du pire. Il s'agit de faire en sorte que les professionnels soient plus efficaces. L'argument financier ne tient pas.

Mme Hermeline Malherbe.  - Oui, on a besoin de ce bilan de formation. Il aurait pu être porté par les observatoires départementaux de la protection de l'enfance, mais les conseils généraux sont bien chefs de file. Les incidences financières de ce bilan sont négligeables.

L'ensemble du personnel agissant pour la protection de l'enfance est concerné. Tous les professionnels échangent au sein des ODPE. La suppression de cet article me paraît aberrante. C'est de la politique politicienne, qui a rarement peu cours ici... (Applaudissements sur les bancs socialistes, CRC, du RDSE et écologistes)

L'amendement n°21 rectifié bis n'est pas adopté.

(On s'en félicite à gauche)

L'amendement n°16 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par M. Dilain et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le même article L. 226-3-1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Des commissions pour la protection de l'enfance regroupant tous les acteurs concernés par la protection de l'enfance sont instituées sur le territoire départemental.

« Elles ont pour mission d'évaluer les pratiques et les outils statistiques afin d'harmoniser ces pratiques et de faire des propositions au Conseil national de la protection de l'enfance.

« La composition et les modalités de fonctionnement de ces commissions sont fixées par décret. »

M. Claude Dilain.  - Les professionnels de la protection de l'enfance considèrent que les liens entre les différents services de la protection de l'enfance ne fonctionnent pas. D'où la création d'une commission départementale qui réunisse les différents acteurs, afin de dresser un bilan des bonnes pratiques.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Retrait ou rejet. Cela ferait doublon avec l'observatoire départemental de la protection de l'enfance.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Claude Dilain.  - C'est dommage...

L'amendement n°1 rectifié bis est retiré.

L'article 2 est adopté.

Mise au point au sujet d'un vote

M. le président.  - Notre collègue Roger Madec a été noté comme votant pour la loi NOTRe ; il souhaitait s'abstenir.

M. le président.  - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.

Protection de l'enfant (Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°30 rectifié bis, présenté par Mme Malherbe, MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mézard et Requier.

I.  -  Au début de cet article

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Les deux dernières phrases du dernier alinéa de l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles sont supprimées.

II.  -  Supprimer la référence :

L. 226-3,

III.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le chapitre VI du titre II du livre II du même code est complété par un article L. 226-3-... ainsi rédigé :

« Art. L. 226-3-...  -  Sont transmises à l'observatoire départemental de la protection de l'enfance et à l'observatoire national de la protection de l'enfance, sous forme anonyme, les informations relatives aux mesures mentionnées aux articles L. 222-3, L. 222-4-2, L. 222-5, L. 223-2 du présent code, aux articles 375-2, 375-3 et 375-9-1 du code civil et à l'article 1183 du nouveau code de procédure civile dont bénéficient des mineurs ou des majeurs de moins de 21 ans. La nature et les modalités de transmission de ces informations sont fixées par décret." 

Mme Hermeline Malherbe.  - Cette proposition découle des recommandations du rapport d'experts rendu public le 2 juillet 2013, établi en vue d'un consensus sur le périmètre de l'observation de la population prise en charge par la protection de l'enfance. La démarche était organisée par le GIP Enfance en Danger et l'État, avec le soutien de l'Association des départements de France. Elle a été reprise par la commission Gouttenoire dans son rapport de février 2014.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable. Cet amendement renforce le système national d'information.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Également.

L'amendement n°30 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°25 rectifié, présenté par Mme Malherbe et les membres du groupe du RDSE.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Après la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 226-6 du même code, est insérée une phrase ainsi rédigée : « L'observatoire national de la protection de l'enfance anime le réseau des observatoires départementaux de la protection de l'enfance. »

Mme Hermeline Malherbe.  - Actuellement, le lien entre l'observatoire national et l'observatoire départemental est purement formel. L'enjeu n'est pas que sémantique. Ne prenons pas le risque d'avoir des observatoires dont le fonctionnement diverge l'un de l'autre, et sans lien avec l'observatoire national. Renforcer ainsi L'ONPE améliorera la connaissance du phénomène, la prévention et la prise en charge des mineurs en danger.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable. Pour ma part, j'y suis favorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°25 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

service départemental de protection maternelle et infantile

par le mot :

département

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Cet amendement garantit que la collaboration entre le secteur médical du département et les services de la protection de l'enfance du conseil général s'étend à l'ensemble des enfants jusqu'à leur majorité. 

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable à cet amendement de souplesse pour les départements : le médecin de la PMI ne serait pas le seul médecin référent possible. Il facilite la capacité du département à choisir un médecin. Il ne crée aucune obligation nouvelle ni aucune charge.

Mme Catherine Deroche.  - Très bien !

L'amendement n°54 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié bis, présenté par MM. Cardoux et Mouiller, Mmes Canayer et Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau et MM. Milon, Morisset, Pinton, D. Robert et Savary.

Alinéa 2

Après les mots :

d'établir des liens de travail réguliers

insérer les mots :

en coordonnant l'action et en facilitant la transmission d'informations

M. Jean-Noël Cardoux.  - Ce n'est pas un amendement de suppression mais de précision rédactionnelle... Les départements ont beaucoup de mal à recruter des médecins de PMI. La rédaction de l'article est vague.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable. Cet amendement précise le rôle et la fonction du médecin.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Oui, l'amendement est intéressant, même s'il paraît plutôt du domaine réglementaire. Avis positif sur le fond, de sagesse pour des raisons légistiques.

L'amendement n°22 rectifié bis est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié quater, présenté par M. Cadic, Mmes Canayer, Deromedi, Doineau, Garriaud-Maylam, Gatel, Goy-Chavent, Joissains, Lopez et Procaccia et MM. Adnot, Bonnecarrère, Bouchet, Charon, Duvernois, Frassa, Gilles, Guerriau, Laufoaulu, Mouiller, Malhuret, Portelli, Pozzo di Borgo, Sido et Tandonnet.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 221-3 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les demandes de renseignements relatives à une famille ou à un mineur formulées par une autorité étrangère doivent impérativement faire l'objet d'une validation au préalable de l'autorité centrale française puis d'un avis aux parents. »

M. Olivier Cadic.  - Les 2,5 millions de Français établis hors de France sont des Français comme les autres. Il y a parmi eux aussi, malheureusement, des enfants en souffrance, parfois repérés par les services sociaux à l'étranger qui prennent alors des mesures de sauvegarde.

J'ai été alerté de ce problème par de nombreux spécialistes de droit international de la famille. J'ai été informé par les services consulaires en Grande-Bretagne de la situation d'un jeune Français qui a fait l'objet d'une mesure de protection puis d'une adoption forcée sans l'accord de ses parents biologiques.

La communication systématique des pièces et des enquêtes sociales faite par certains services sociaux français auprès de services sociaux étrangers, sans passer par l'autorité centrale française - en l'occurrence le service de l'entraide juridique du ministère de la justice - peut déboucher sur un dossier à charge et aboutir à pareil dénouement. Ce type de situation existe en Grande-Bretagne et doit être anticipé, conformément au Règlement européen du 27 juillet 2003.

Il est ainsi indispensable qu'à l'occasion de ces demandes de communication, l'autorité judiciaire française compétente soit consultée et alertée sur toute procédure engagée à l'étranger concernant un éventuel placement d'enfant français par une autorité étrangère.

Cette procédure d'alerte permettra aux autorités françaises de suivre les dossiers, voire d'anticiper et de coordonner un retour de l'enfant, en concertation avec sa famille, pour un placement en France.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Quel est l'avis du gouvernement ? La question de l'adoption dépasse le cadre de cette proposition de loi...

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Retrait, sinon rejet. Non pas que je ne comprenne pas votre objectif mais votre amendement est contraire à la convention de La Haye. Je regarderai de façon approfondie la situation que vous évoquez.

M. Olivier Cadic.  - Je maintiens l'amendement. Je demande précisément l'application du Règlement européen.

L'amendement n°15 rectifié quater est adopté ; l'article additionnel est inséré.

(Applaudissements sur les bancs UDI-UC)

M. le président.  - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mézard et Requier.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de procédure civile est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article 1182, après les mots : « procureur de la République », sont insérés les mots : « ainsi qu'au président du conseil général » ;

2° Le dernier alinéa de l'article 1190 est complété par les mots : « ainsi qu'au président du conseil général ».

Mme Hermeline Malherbe.  - Pour assurer un meilleur accompagnement des familles et une prise en charge éducative adaptée des mineurs concernés, il est indispensable que le président du conseil général - donc le service de l'aide sociale à l'enfance - soient systématiquement informé des décisions d'assistance éducative prises par le juge des enfants. Cette information permet en outre d'améliorer la connaissance statistique du dispositif de protection. Peut-être cependant est-ce d'ordre réglementaire...

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Cet amendement apporte une précision utile. Avis favorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Cet amendement demande l'application de l'article 1190 du code de procédure civile, relatif à la notification des décisions du juge aux parents et tuteurs dans les huit jours. Sur le fond j'y suis favorable, d'autant qu'il est l'amendement miroir d'autres dispositions sur l'échange d'informations en sens inverse, lequel doit être réciproque. Cela dit, il est de nature réglementaire. Nous allons y travailler avec la Chancellerie. Retrait ?

Mme Hermeline Malherbe.  - Très bien.

L'amendement n°31 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les services départementaux de protection maternelle et infantile encouragent les actions de parrainage d'enfant.

Mme Laurence Cohen.  - Cet amendement, qui reprend une des propositions du rapport de Mmes Dini et Meunier, encourage les actions de parrainage d'enfants confiés à l'ASE, à la demande du titulaire de l'autorité parentale.

Un certain nombre de départements ont déjà mis en place de telles actions, comme le Pas-de-Calais, tandis que d'autres, comme le Rhône, soutiennent des associations.

Sur le même fondement que la tradition chrétienne, ce parrainage laïque donne une possibilité de construire des liens durables avec des adultes autres que les parents. Le parrain pourrait ainsi concrétiser un engagement solidaire. L'objectif est un soutien de nature avant tout affective.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Le parrainage est une solution intéressante, mais cela ne fait pas partie des missions de la PMI : avis défavorable. Le conseil national de la protection de l'enfance aurait pu s'en charger mais il a été supprimé à l'article premier.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Oui au parrainage, mais ce n'est pas du ressort de la PMI. De plus, je ne me vois pas soumettre maintenant au groupe de travail de nouvelles missions : ce ne serait pas conforme à ma conception de la concertation. Avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Le débat doit avoir lieu. La suppression de l'article premier l'empêche malheureusement. J'espère que nous y reviendrons.

L'amendement n°40 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par le Gouvernement.

Avant l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 6° de l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Veiller à la stabilité du parcours de l'enfant confié et à l'adaptation de son statut sur le long terme. »

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Cet amendement complète les missions classiques de la protection de l'enfance - restauration de l'autorité parentale, protection des mineurs. La doctrine a évolué ces trente dernières années, en particulier sur l'importance à accorder à la préservation du lien familial. Certains enfants font des allers et retours incessants entre familles d'accueil, entre familles d'accueil et foyers. Confions donc à la protection de l'enfance la mission de veiller à la stabilité du parcours de l'enfant.

C'est dans l'esprit de cette proposition de loi.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable.

L'amendement n°47 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 5

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

d'un service d'action éducative

par les mots :

de l'aide sociale à l'enfance

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Nous précisons bien que c'est l'ASE qui met en oeuvre le projet pour l'enfant.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°55 est adopté.

L'amendement n°17 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°42, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le projet pour l'enfant prend en considération l'existence des fratries, lorsqu'elles existent, afin de maintenir les liens existant et éviter les séparations.

Mme Laurence Cohen.  - Cet amendement assure une meilleure prise en charge des fratries dans le cadre du projet pour l'enfant.

Le code civil dispose que les frères et soeurs ne doivent pas être séparés, sauf si c'est dans leur intérêt. Il arrive en effet que le lien fraternel soit plus aliénant qu'émancipateur. Le placement conjoint n'est pas toujours la meilleure solution : tous les cas sont particuliers mais le lien fraternel est souvent un repère important, et participe à la construction psychique de l'enfant.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - L'environnement de l'enfant doit toujours être pris en compte - c'est le sens de cette proposition de loi. Mais certaines fratries sont néfastes, le frère ou la soeur peut être agresseur... Des associations se sont déjà spécialisées sur la prise en compte du lien fraternel, sur le long terme. Cet amendement est satisfait par la notion d'« environnement » : avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Est-ce un amendement d'appel ? Le vrai sujet, c'est le projet pour l'enfant. Seuls 10 % des enfants protégés en bénéficient, car la rédaction de la loi de 2007 en rend la mise en oeuvre compliquée. Tout le monde s'accorde pourtant à y voir une avancée. La prise en compte de la fratrie relève plutôt des référentiels des projets pour l'enfant que du code. Cela dit, je ne peux qu'être favorable à cet amendement dont j'approuve tous les termes.

Mme Laurence Cohen.  - On ne peut parler de projet pour l'enfant sans évoquer la fratrie. Nous ne créons pas d'obligation, nous demandons simplement que cet élément soit pris en compte. Le travail associatif n'est pas en cause.

M. René-Paul Savary.  - Même s'il n'y a que 10 % de projets rédigés, le projet de l'enfant est toujours au coeur de l'action de la protection de l'enfance. C'est une redoutable évidence ! Avec la fratrie, on risque de faire entrer le loup dans la bergerie : il faut parfois séparer l'enfant de ses frères et soeurs.

Les travailleurs sociaux font un travail remarquable et très difficile. Faisons-leur confiance ! On ne parle que des trains qui n'arrivent pas à l'heure : je pense à un reportage déplorable qui évoquait le cas d'un enfant marnais. Mais les travailleurs sociaux sont formés, ils font un travail très difficile, en ayant à coeur l'intérêt de l'enfant, au quotidien.

Mme Annie David.  - Vous êtes parfaitement hors sujet, monsieur le sénateur. Nous ne remettons nullement en cause l'engagement des travailleurs sociaux, dont personne ne songe à décrier le travail ! Nous disons simplement que la prise en compte de la fratrie, sans obligation aucune, est nécessaire. Ne faites pas dire à cet amendement ce qu'il ne dit pas ! (Applaudissements à gauche)

M. Joël Guerriau.  - Je partage le souci de protection de l'enfant et de ne pas le couper de sa fratrie. Le travail des services sociaux consiste naturellement à le prendre en compte. Si ce n'est pas le cas, nous avons un grave problème. Mais, comme il a été fort bien dit, la notion d'« environnement » suffit. L'amendement est donc satisfait et il n'est pas utile d'alourdir la loi.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Ce débat me surprend. Les enfants pris en charge sont dans des situations diverses. Préciser que la fratrie est prise en compte ne revient pas à déprécier le travail des travailleurs sociaux !

Mme Élisabeth Doineau.  - Les trois quarts des placements sont ordonnés par le juge, qui précise s'il faut ou non, et comment, séparer les enfants. La cellule familiale a évolué, s'est élargie, et les décisions, judiciaires ou administratives, sont réexaminées périodiquement.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°42, mis aux voix par assis et debout, n'est pas adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

ARTICLE 6

M. Claude Kern .  - L'article 6 précise les modalités d'exercice des actes usuels des personnes rendues titulaires de l'autorité parentale après un placement. Les assistants familiaux rencontrent des difficultés dans la prise en charge quotidienne de l'enfant.

Je salue le travail de la commission qui a enrichi le texte initial, conformément aux préconisations des associations, en assouplissant les conditions d'exercice de ces actes. Mais les droits des assistants familiaux sont insuffisamment précisés. Faisons bouger les lignes. Quelles mesures comptez-vous prendre, madame la ministre, pour revaloriser leur statut et mieux les associer à l'accompagnement de l'enfant ?

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

I.  -  Première phrase

Remplacer les mots :

service d'action éducative

par les mots :

service d'aide sociale à l'enfance

II.  -  Seconde phrase

Supprimer le mot :

courants

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Évitons de créer une nouvelle catégorie d'actes usuels, ce qui compliquerait la vie des assistants et des familles.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable.

M. François Pillet, rapporteur pour avis de la commission des lois.  - Cet amendement est issu d'une concertation avec tous les acteurs. Sa rédaction est bien meilleure que celle initialement proposée.

L'amendement n°52 est adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

M. le président.  - Je rappelle que l'article 7 a été réservé après l'article 18.

ARTICLE 8

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Malherbe et les membres du groupe RDSE.

Supprimer cet article.

Mme Hermeline Malherbe.  - Cet article constitue un recul dans l'équilibre des pouvoirs administratifs et judiciaires. Les magistrats ne doivent pas intervenir dans les modalités pratiques de mise en oeuvre du placement, qui engagent la responsabilité et les moyens de l'ASE. Dès que l'enfant est confié au conseil général par décision judiciaire, la responsabilité de celui-ci est pleine et entière ; son pouvoir administratif ne peut être soumis à un avis judiciaire.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable : le principe de subsidiarité n'est pas remis en cause. Il s'agit simplement d'informer le juge, non plus de recueillir son avis.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - En effet : l'avis a été remplacé par une simple information - en cas de changement de famille au bout de deux ans, par exemple. Cette précaution est dans l'intérêt de l'enfant comme des travailleurs sociaux.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - On ne peut espérer améliorer la protection de l'enfant uniquement par la loi. Il faut que les professionnels se parlent - ce que prévoit cet article -, que les textes s'appliquent, que l'interdisciplinarité soit renforcée. Les deux amendements du gouvernement qui suivent prennent en compte les propositions des sénateurs, et vous donneront satisfaction. Avis défavorable à l'amendement de suppression.

Mme Hermeline Malherbe.  - J'ignorais que le texte avait évolué. Cela dit, si le dialogue a bien lieu dans certains départements, il faudrait étendre ces bonnes pratiques à l'ensemble du territoire. La transmission d'informations de la justice vers les conseils généraux doit également être renforcée, par souci de réciprocité.

L'amendement n°27 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsque le service de l'aide sociale à l'enfance, auquel est confié un enfant en application de l'article 375-3 du code civil, envisage de modifier le lieu de placement de cet enfant, après plus de deux années au cours desquelles ce dernier a été confié à la même personne ou au même établissement d'accueil, il en informe le juge compétent au moins un mois avant la mise en oeuvre de sa décision, sauf urgence. »

Amendement n°53, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le même délai, il informe également, sauf urgence, le juge compétent lorsqu'il envisage de modifier le lieu de placement d'un enfant qui a été confié à une même personne ou à un même établissement pendant moins de deux années, sauf si un tel changement a été prévu par le projet pour l'enfant. »

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Ces deux amendements du gouvernement prolongent le précédent, qui assignait une troisième mission à la protection de l'enfant.

Certains juges apprennent à l'occasion d'une visite annuelle qu'un enfant a été transféré dans une autre famille que celle où il était placé depuis des années. Le juge doit être, sinon sollicité, du moins informé de pareils changements. Après concertation, nous avons retenu le principe d'une saisine du juge pour déplacer un enfant accueilli dans une famille depuis plus de deux ans ; il serait seulement informé lorsque l'enfant est dans sa famille depuis moins de deux ans. Bien évidemment, son silence vaut acceptation.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable aux deux amendements.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.   - N'ayant pu saisir la commission des lois, je m'exprimerai à titre personnel. Le juge doit être prévenu un mois au moins avant la décision. Je suis favorable à ces amendements bienvenus.

L'amendement n°49 est adopté, de même que l'amendement n°53.

L'article 8, modifié, est adopté.

L'article 9 est adopté.

L'article 10 demeure supprimé.

L'article 11 est adopté.

ARTICLE 12 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par Mme Meunier.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article 370 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 370.  -  S'il est justifié de motifs graves, l'adoption simple peut être révoquée, à la demande de l'adoptant ou de l'adopté, et lorsque ce dernier est mineur, à celle du ministère public uniquement. »

Mme Michelle Meunier.  - C'est un amendement que je présente à titre personnel.

Cet article, supprimé par la commission, réforme l'adoption simple, afin de lever certains freins juridiques à son développement. L'idée de rendre irrévocable l'adoption simple pendant la minorité de l'enfant avait été proposée par le rapport Colombani, le rapport Tabarot, l'Igas, ou encore l'Académie de médecine...

M. le président.  - Amendement identique n°32 rectifié ter, présenté par MM. Milon, Trillard, Mandelli, Gremillet, Vaspart, Bouchet, D. Laurent et B. Fournier, Mme Debré, M. Vogel, Mmes Mélot et Canayer, MM. César, P. Leroy, Savary, Lefèvre et Cadic, Mme Giudicelli, M. Dériot, Mme Micouleau et MM. G. Bailly et del Picchia.

M. Alain Milon.  - À mon tour de quitter le banc de la commission... La modification de l'article 370 du code civil a en effet été préconisée par Mme Tabarot, présidente du Conseil supérieur de l'adoption - que préside désormais Mme Meunier. Cet organisme rassemble toutes les parties prenantes, ainsi que des parlementaires.

Le texte initial clarifiait le régime de la révocation de l'adoption simple. Celle-ci crée un lien de filiation pérenne entre l'adoptant et l'adopté, lien ayant vocation à se perpétuer de génération en génération, et transfère à l'adoptant, de manière exclusive, les droits d'autorité parentale.

Certes, les demandes de révocation sont très peu nombreuses et plus des deux tiers d'entre elles sont rejetées. Mais les statistiques ne nous renseignent pas sur le nombre d'adoptés mineurs concernés, ni sur l'auteur de la demande. S'il faut préserver le principe de la révocabilité de l'adoption simple, mieux vaut, pendant la minorité de l'enfant, laisser l'initiative de l'action en justice au seul ministère public. Lorsque l'adopté est majeur, l'adoption simple pourrait être révoquée à la demande de l'adoptant ou de l'adopté.

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié ter, présenté par MM. Milon, Trillard, Mandelli, Gremillet, Vaspart, Bouchet, D. Laurent et B. Fournier, Mme Debré, M. Vogel, Mmes Mélot et Canayer, MM. César, P. Leroy, Savary, Lefèvre et Cadic, Mme Giudicelli, M. Dériot, Mme Micouleau et MM. G. Bailly et del Picchia.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le troisième alinéa de l'article 370 du code civil est ainsi rédigé :

« Lorsque l'adopté est mineur, les père et mère d'origine ou à leur défaut, un membre de la famille d'origine justifiant d'un lien de parenté jusqu'au troisième degré avec le mineur, peut demander la révocation. »

M. Alain Milon.  - Ne donnons pas l'impression de restreindre les droits des parents d'origine de demander la révocation de l'adoption simple pour motifs graves. Mais comment donner la possibilité d'agir en révocation aux membres de la famille élargie jusqu'aux cousins issus de germains. Comment admettre que des personnes, dont il n'est pas requis qu'elles aient antérieurement manifesté un quelconque intérêt pour l'enfant, puissent intervenir et peser sur son devenir ?

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission a émis un avis favorable aux amendement identiques nos3 et 32 rectifié ter. Elle est défavorable, en revanche, à l'amendement n°33 rectifié ter.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Ces sujets nous émeuvent tous. Or l'émotion n'est pas bonne conseillère. Les amendements nos3 et 32 rectifié ter reviennent sur la suppression de l'article 12 votée par la commission des affaires sociales et à l'unanimité de la commission des lois. La proposition de loi de Mme Tabarot, de 2011, avait d'ailleurs subi le même sort en commission et n'avait jamais été inscrite à l'ordre du jour à l'Assemblée nationale. L'adoption est une construction, juridique certes, mais une construction d'abord : déplacer une pierre fragiliserait l'édifice. En outre, le maintien du lien avec la famille d'origine est crucial.

Imposer le maintien du lien adoptif avec quelqu'un qui souhaite le rompre n'est pas opportun. De toute manière, la révocation ne peut être décidée à la légère. Un juge vérifie que la révocation obéit bien à des motifs graves : la demande d'un cousin lointain ne saurait suffire. De fait, le cas est rare.

Ces amendements auraient des effets inverses que ceux que recherchent leurs auteurs. Avec une adoption irrévocable, on risque de dissuader et les candidats à l'adoption et les familles d'origine, qui tiennent au maintien du lien avec l'enfant.

L'adoption simple n'est pas une version allégée de l'adoption plénière, c'est une autre forme d'adoption. Utilisons toutes les possibilités offertes pour l'adoption simple, laquelle n'est pas assez encouragée. Le rapport Meunier-Dini le dit : il faut sensibiliser et former les travailleurs sociaux à cette procédure, identifier les enfants susceptibles d'en bénéficier, sélectionner les parents adoptifs potentiels. Bref, avant de nous prononcer sur ces amendements, réfléchissons !

Si l'on devait néanmoins revenir sur la suppression de cet article, je préfère la rédaction de l'amendement n°33 rectifié ter.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable aux amendements identiques nos3 et 32 rectifié ter ; avis défavorable à l'amendement n°33 rectifié ter.

Mme Catherine Deroche.  - Le groupe UMP suivra le rapporteur de la commission des lois en votant contre ces amendements.

À la demande du groupe UMP, les amendements identiques nos3 et 32 rectifié ter sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n° 86 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 313
Pour l'adoption 123
Contre 190

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande du groupe UMP, l'amendement n°33 rectifié ter est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n° 87 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 313
Pour l'adoption     3
Contre 310

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 12 demeure supprimé.

ARTICLE 13

M. le président.  - Amendement n°57, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié : L'article L. 223-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un enfant né sous le secret est restitué à l'un de ses parents, le président du conseil général propose un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social du parent et de l'enfant pendant les trois années suivant cette restitution afin de garantir l'établissement des relations nécessaires au développement physique et psychologique de l'enfant ainsi que sa stabilité affective. »

II.  -  Après le deuxième alinéa de l'article L. 224-6, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un enfant pupille de l'État est restitué à l'un de ses parents, le président du conseil général propose un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social du parent et de l'enfant pendant les trois années suivant cette restitution afin de garantir l'établissement des relations nécessaires au développement physique et psychologique de l'enfant ainsi que sa stabilité affective. »

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Cet amendement précise qu'il relève de la responsabilité du président du conseil général de proposer, dans l'intérêt supérieur de l'enfant, un accompagnement du parent auquel est restitué un enfant né sous le secret ou devenu pupille de l'État.

M. le président.  - Amendement n°34 rectifié ter, présenté par MM. Milon, Trillard, Gilles, Mandelli, Cardoux, Gremillet, Bouchet, D. Laurent et B. Fournier, Mme Debré, M. Vogel, Mmes Mélot et Canayer, MM. César, P. Leroy, Savary, Lefèvre et Cadic, Mme Giudicelli, M. Dériot, Mme Micouleau et MM. G. Bailly, Pointereau et del Picchia.

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Dans ces circonstances, il sera proposé aux parents de faire bénéficier l'enfant d'un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social au cours des trois années suivant cette reprise. »

M. Alain Milon.  - Le texte visait initialement à assurer un accompagnement médical, psychologique et éducatif d'un enfant né sous le secret puis reconnu par au moins un de ses parents. Cet accompagnement qui suppose de contrôler la vie privée et familiale des parents, sans contrôle du juge, ne peut pas leur être imposé. Il s'agirait d'une atteinte au respect de la vie privée et familiale, en contravention avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec la Constitution. L'emploi de l'indicatif futur implique le caractère obligatoire de cette mesure. Il convient donc de modifier l'alinéa 4.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Favorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable aux deux amendements.

L'amendement n°57 est adopté, l'article 13 est ainsi rédigé.

L'amendement n°34 rectifié ter devient sans objet.

ARTICLE 14 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°35 rectifié ter, présenté par MM. Milon, Trillard, Mandelli, Bouchet, D. Laurent et B. Fournier, Mmes Debré, Mélot et Canayer, MM. César, Savary, P. Leroy, Lefèvre et Cadic, Mme Giudicelli, M. Dériot, Mme Micouleau et MM. G. Bailly, Pointereau et del Picchia.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code civil est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l'article 346 est ainsi rédigé :

« Toutefois, une nouvelle adoption peut être prononcée soit après décès de l'adoptant, ou des deux adoptants, soit après décès de l'un des deux adoptants, si la demande est présentée par le nouveau conjoint du survivant d'entre eux, soit encore après que l'enfant adopté a été admis en qualité de pupille de l'État ou que les adoptants ont régulièrement consenti à son adoption. » ;

2° Le deuxième alinéa de l'article 360 est supprimé.

M. Alain Milon.  - Contrairement à ce qui a pu être soutenu devant la commission, cet amendement ne bouleverse pas les règles applicables en matière d'adoption plénière.

Une seconde adoption plénière est déjà possible en cas de décès du ou des premiers adoptants.

Il s'agit d'éviter un hiatus dans la filiation. En cas d'échec de l'adoption, il est essentiel de bénéficier d'une seconde chance. Depuis la loi du 5 juillet 1996, des dizaines d'enfants ont pu être accueillis par une famille et adoptés une seconde fois, sans que l'institution de l'adoption en soit pour autant déstabilisée.

La loi de 1996, qui revient sur le principe « adoption sur adoption ne vaut », ne suffit pas à rendre compte de la situation réelle de l'adopté, qui n'a plus aucun lien social ni affectif avec les soi-disant parents adoptifs pléniers et qui n'est pas placé à égalité des autres enfants de la famille adoptante. L'enfant reste au milieu du gué, lié à des adoptants qui ne sont pas ses parents sociaux et sans filiation complète vis-à-vis de ses parents réels, socialement et affectivement.

Donner cette seconde chance, c'est respecter la philosophie de toute adoption : donner une famille à tout enfant pour la vie.

Les parents biologiques ont la possibilité de renoncer définitivement à tout lien de filiation avec l'enfant s'il a moins de deux ans, en le remettant en vue de son adoption à l'aide sociale à l'enfance ou à un organisme autorisé pour l'adoption et également, s'il a plus deux ans, en consentant devant notaire à son adoption plénière par des parents déterminés. Il n'y aurait donc pas de rupture d'égalité entre les deux formes de filiation en reconnaissant ce même droit aux adoptants mais égalité entre tous les enfants d'accéder au statut d'adopté plénier. Le tribunal saisi de la requête en adoption plénière en vérifierait nécessairement le bien-fondé, dans l'intérêt de l'enfant ; ce qui est de nature à prévenir toute répudiation de l'enfant.

Cette modification est approuvée par le Conseil supérieur de l'adoption et l'ensemble des associations de familles adoptives et de personnes adoptées.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par Mme Meunier.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. - Le second alinéa de l'article 346 du code civil est complété par les mots : « , soit encore après que l'enfant adopté a été admis en qualité de pupille de l'État. »

II. - Le deuxième alinéa de l'article 360 du code civil est supprimé.

Mme Michelle Meunier.  - Mêmes arguments : M. Milon l'a très bien défendu.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - L'avis de la commission des affaires sociales est favorable aux deux amendements.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Ces deux amendements rétablissent l'article 14, supprimé par la commission des affaires sociales, pour permettre une seconde adoption plénière, ce qui revient à rendre la première adoption plénière révocable - en contradiction avec le principe d'irrévocabilité posé à l'article 359 du code civil. Cela exige une réflexion approfondie. Avec ces deux amendements, l'adoption plénière deviendrait révocable sans motif grave, et sans contrôle du juge ! L'adopté se retrouverait sans famille de sang, et avec la menace permanente de se voir renvoyé à l'ASE...

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Ces deux amendements ne sont pas farfelus. Ils soulèvent une question qui revient souvent. Mais je leur donne un avis défavorable s'ils ne sont pas retirés, car nous ne sommes pas prêts, en termes d'expertise juridique ou psychologique. Nous y travaillons.

M. Philippe Bas.  - Il conviendrait de retirer ces amendements, pour préserver l'avenir. Le problème est celui de l'abandon d'enfants par les parents adoptants, le décès des parents adoptifs étant déjà traité par un article du code civil. C'est une matière qui exige des analyses, des réflexions et concertations très approfondies. Un enfant qui a déjà connu l'échec d'une adoption doit-il être exposé à une nouvelle procédure forcément incertaine ? Il y a sans doute d'autres moyens de recréer des liens d'attachement avec des adultes qu'une nouvelle adoption. Ces amendements risqueraient d'avoir des conséquences graves.

M. Alain Milon.  - Que puis-je faire, moi qui suis le petit président de la commission des affaires sociales, face à deux ministres et un rapporteur de la commission des lois, sinon retirer mon amendement ? (Sourires)

Mme Michelle Meunier.  - Je retire également, mais gardons à l'esprit ce sujet.

L'amendement n°35 rectifié ter est retiré, ainsi que l'amendement n°4.

L'article 14 demeure supprimé.

ARTICLE 15

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L'enfant capable de discernement est entendu par le tribunal ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le tribunal à cet effet. »

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Cet amendement d'esthétisme juridique ne remet pas en cause l'audition systématique de l'enfant dans le cadre de la procédure d'adoption, qui est dans l'intérêt de l'enfant. Il remplace la formulation utilisée à l'article 15 : « selon des modalités adaptées à son degré de maturité », par celle de « capable de discernement », actuellement utilisée par l'article 388-1 du code civil, qui pose la règle générale applicable à l'audition de l'enfant dans l'ensemble des procédures qui le concernent.

Ne portons pas atteinte à la lisibilité du droit.

La proposition de loi sur l'autorité parentale en cours de navette consacre un chapitre entier à la prise en compte de la parole de l'enfant. Ce sera l'occasion d'en discuter. Ne lions pas la position du Sénat.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Favorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Il faut harmoniser les textes existants concernant la parole de l'enfant. Avis défavorable à ce stade.

M. Charles Revet.  - Qui détermine la capacité de discernement de l'enfant ?

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Le juge, heureusement !

L'amendement n°6 est adopté.

L'article 15, modifié, est adopté.

ARTICLE 16

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par MM. Lefèvre, Bizet, Charon et Laufoaulu, Mmes Imbert et Gruny, MM. Trillard, Cambon, Mandelli, B. Fournier, Morisset, Houel, D. Laurent et Leleux, Mmes Mélot et Deroche, M. Savary, Mme Hummel et MM. Revet, G. Bailly, Perrin, Raison, Bouchet, Pointereau et Longuet.

I.  -  Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

dont la preuve est établie par tous moyens. La preuve de la prise en charge peut résulter d'un acte de notoriété dressé par un notaire. L'acte de notoriété fait mention des pièces justificatives qui ont pu être produites et attestent des secours et soins non interrompus reçus par l'adopté.

II.  -  Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toute personne dont les dires paraîtraient utiles peut être appelée à l'acte.

« L'acte de notoriété ainsi établi fait foi jusqu'à preuve du contraire. »

M. Antoine Lefèvre.  - Il s'agit de simplifier et de sécuriser l'administration de la preuve des soins et secours prodigués.

L'administration fiscale exige que la preuve soit rapportée par écrit, ce qui exclut tout témoignage, même sous forme d'attestation.

Il convient donc de modifier le dispositif pour admettre que la preuve de la prise en charge continue et principale de l'adopté simple par l'adoptant, soit libre, établie par tous moyens.

En raison de la sécurité juridique qu'apporte, en matière familiale, l'acte de notoriété dressé par un notaire, l'amendement propose que la preuve des secours et soins non interrompus puisse résulter de cet acte authentique, établi au vu de pièces et documents justificatifs fournis par la personne intéressée, et éventuellement de témoignages.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Seule une loi de finances peut modifier un article du code général des impôts.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable. L'acte notarié n'est nullement interdit.

L'administration admet que la preuve soit faite par tout moyen.

L'amendement n°2 rectifié n'est pas adopté.

L'article 16 est adopté.

ARTICLE 17

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois.

Supprimer cet article.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Refuser, par principe, que le service de l'ASE auquel l'enfant a été confié puisse être désigné administrateur ad hoc traduit une défiance à l'égard des magistrats et des services sociaux.

La désignation d'un administrateur ad hoc n'intervient, en vertu de l'article 388-2 du code civil, que si les intérêts de l'enfant s'opposent à ceux de ses représentants légaux. Les services de l'ASE n'ont pas un intérêt forcément opposé à celui de l'enfant, surtout s'il s'agit de le protéger. Ils auront une bien meilleure connaissance de l'intérêt de l'enfant et de sa situation qu'un administrateur ad hoc désigné du jour au lendemain. Encore une fois, c'est le juge qui décide. À lui de choisir l'administrateur ad hoc.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable à cet amendement de suppression.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Défavorable.

L'amendement n°7 est adopté ; l'article 17 est supprimé.

Les amendements nos58 et 8 deviennent sans objet.

ARTICLE 18

M. le président.  - Amendement n°36 rectifié ter, présenté par MM. Milon, Trillard, Gilles, Mandelli, Cardoux, Bouchet, D. Laurent et B. Fournier, Mmes Debré, Mélot et Canayer, MM. César, P. Leroy, Savary, Lefèvre et Cadic, Mme Giudicelli, M. Dériot, Mme Micouleau et M. del Picchia.

Supprimer cet article.

M. Alain Milon.  - Étymologiquement, « délaisser » un enfant, c'est le laisser seul, sans s'assurer qu'il soit pris en charge par un tiers. C'est le terme choisi par le législateur pour désigner l'élément constitutif de l'infraction pénale de mise en péril du mineur. Le délaissement n'est pas en soi une infraction, il n'est réprimé que s'il met en danger la santé ou la sécurité du mineur.

Le terme « abandon » est plus général : il a une connotation tout aussi, si ce n'est plus, péjorative mais il est plus compréhensible. Il est également un élément constitutif des infractions d'abandon de famille ou d'incitation à l'abandon. Maintenir ce terme d'abandon, notion civile, pour le distinguer du délaissement, notion pénale, n'a pas de sens.

La rédaction nouvelle de l'article 18 de la proposition de loi dénature l'esprit de la réforme souhaitée par Mmes Dini et Meunier, qui figurait dans la proposition de loi Tabarot et fut également proposée par le Conseil supérieur de l'adoption...

En introduisant la notion d'« abstention volontaire » dans le texte, on va aller plus loin que la jurisprudence actuelle ; en revenant à la notion de « grande détresse », seul le désintérêt intentionnel des parents peut justifier le prononcé de la déclaration d'abandon par le tribunal. Seuls les parents fautifs peuvent être sanctionnés. C'est détourner son regard de l'enfant pour ne considérer que les adultes et leur responsabilité. 

Les débats actuels sur la possibilité pour un tribunal de déclarer abandonné un enfant sans le consentement de ses parents montrent que la réflexion doit être approfondie. Il est préférable de ne pas modifier l'article 350 du code civil. Nous avions beaucoup parlé de ces problèmes en 2005, lors de la discussion de la loi Bas.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable. La notion d'abandon est peu mise en oeuvre. C'est pourquoi la proposition de loi initiale substituait une procédure de déclaration judiciaire de délaissement parental, fondée sur des critères plus objectifs.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - La commission des lois a proposé une rédaction de compromis assurant la sécurité juridique. L'article 18 conserve la notion d'abandon. Le nouvel article 381 du code civil suppose que l'abandon de l'enfant soit volontaire, pour éviter qu'un parent « à éclipse » ne fasse échec à la procédure.

Je vous invite donc à rejeter l'amendement de suppression, ainsi que le suivant, qui rétablit l'article 18.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Défavorable.

L'amendement n°36 rectifié ter n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mme Meunier.

Rédiger ainsi cet article :

I. - L'article 350 du code civil est abrogé.

II. - Le chapitre Ier du titre IX du livre Ier du même code est complété par une section 5 ainsi rédigée :

« SECTION 5

« De la déclaration judiciaire de délaissement parental

« Art. 381-1. - Un enfant est considéré comme délaissé par ses parents lorsque pendant une durée d'un an ceux-ci n'ont contribué par aucun acte à son éducation ou à son développement et au maintien de relations affectives durables, sans en avoir été empêchés.

« Art. 381-2. - Tout enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance, délaissé par ses parents pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration judiciaire de délaissement parental, est déclaré délaissé par ses parents par le tribunal de grande instance, sans préjudice des dispositions du troisième alinéa. La demande en déclaration de délaissement parental est obligatoirement transmise par le particulier, l'établissement ou le service de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant délaissé par ses parents à l'expiration du délai d'un an dès lors que les parents ont délaissé l'enfant. La demande peut également être présentée par le ministère public agissant d'office ou sur proposition du juge des enfants.

« La simple rétractation du consentement à l'adoption, la demande de nouvelles ou l'intention exprimée mais non suivie d'effet de reprendre l'enfant n'est pas un acte suffisant pour motiver de plein droit le rejet d'une demande en déclaration de délaissement parental et n'interrompt pas le délai mentionné au premier alinéa.

« Le délaissement parental n'est pas déclaré si, au cours du délai mentionné au premier alinéa, un membre de la famille a demandé à assumer la charge de l'enfant et si cette demande est jugée conforme à l'intérêt de ce dernier.

« Le tribunal se prononce dans un délai de six mois à compter du dépôt de la demande en déclaration judiciaire de délaissement parental.

« Lorsqu'il déclare par ses parents l'enfant délaissé, le tribunal délègue par la même décision les droits d'autorité parentale sur l'enfant à la personne, à l'établissement ou au service de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant ou à qui ce dernier a été confié.

« La tierce opposition n'est recevable qu'en cas de dol, de fraude ou d'erreur sur l'identité de l'enfant. »

III.  -  1° Au 3° de l'article 347 du même code, la référence : « par l'article 350 » est remplacée par les références : « aux articles 381-1 et 381-2 » ;

2° Au 6° de l'article L. 224-4 du code de l'action sociale et des familles, la référence : « de l'article 350 » est remplacée par les références : « des articles 381-1 et 381-2 ».

Mme Michelle Meunier.  - Cet amendement se situe délibérément du côté de l'intérêt de l'enfant, quitte à bousculer un peu les choses.

M. le président.  - Sous-amendement n°51 à l'amendement n°5 de Mme Meunier, présenté par M. Mazuir.

Amendement n° 5

I.  -  Alinéa 6

Remplacer les mots :

par ses parents

par les mots :

par l'un ou l'autre de ses parents ou les deux

II.  -  Alinéa 7, première phrase (deux fois) et deuxième phrase

Remplacer les mots :

par ses parents

par les mots :

par l'un ou l'autre de ses parents ou les deux

III.  -  Alinéa 11

Après les mots :

par ses parents

insérer les mots

ou l'un ou l'autre de ses parents

M. Rachel Mazuir.  - Ce sous-amendement précise que la requête en déclaration judiciaire de délaissement manifeste peut se faire contre l'un ou l'autre des parents ou les deux.

De nombreuses requêtes n'aboutissent pas si l'un des parents seulement a signé un consentement à l'adoption. Malgré l'absence de liens avec le deuxième parent, les autorités judiciaires refusent de prononcer une déclaration judiciaire d'abandon sur le motif que la procédure ne pouvait s'envisager que contre les deux parents.

Cela contraint les services à ne pas proposer de consentement à l'adoption aux parents d'origine alors que l'un d'entre eux peut souhaiter être acteur dans la démarche d'adoption. Cela va, bien sûr, dans le sens de l'intérêt de l'enfant.

M. le président.  - Amendement n°29 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mézard et Requier.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. 381-1. - L'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance, qui n'a pas bénéficié de la part de ses parents d'actes ou de relations nécessaires à son développement physique, psychologique et affectif, pendant l'année qui précède l'introduction de la requête, sans que ces derniers en aient été empêchés par un tiers, est déclaré judiciairement abandonné, si cette déclaration est conforme à son intérêt. »

Mme Hermeline Malherbe.  - Là encore, nous mettons l'enfant au centre. L'adoption est tout sauf un marché !

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par Mme Archimbaud et M. Desessard.

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots : 

malgré les mesures de soutien proposées en application du 1° de l'article L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles

Mme Aline Archimbaud.  - Il s'agit de s'assurer que toutes les solutions ont été mises en oeuvre pour prévenir la dégradation de la situation familiale.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois.

Alinéa 6, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

« Le tribunal de grande instance déclare abandonné l'enfant recueilli par une personne, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance, qui se trouve dans la situation décrite à l'article 381-1, pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration judiciaire d'abandon.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Amendement rédactionnel qui inverse les termes de la première phrase du nouvel article 381-2 du code civil.

M. le président.  - Amendement n°41, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le tribunal se prononce dans un délai de neuf mois à compter du dépôt de la demande en déclaration judiciaire de délaissement manifeste.

Mme Laurence Cohen.  - Le texte est clair.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis favorable à l'amendement n°5 et au sous-amendement n°51. Sagesse sur l'amendement n°29 rectifié. Retrait de l'amendement n°39, avis favorable à l'amendement n°9 ; sagesse sur l'amendement n°41.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Défavorable à tous les amendements, pour des raisons différentes... Pour aller vite, je n'entre pas dans le détail.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - Défavorable à tous les amendements, - sauf le mien. (Sourires)

Le sous-amendement n°51 n'est pas adopté.

L'amendement n°5 n'est pas adopté.

L'amendement n°29 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

L'amendement n°9 est adopté.

L'amendement n°41 n'est pas adopté.

L'article 18, modifié, est adopté.

ARTICLE 7 (Précédemment réservé)

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié bis, présenté par MM. Cardoux et Mouiller, Mmes Canayer et Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau et MM. Morisset, Pinton, D. Robert et Savary.

Supprimer cet article.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Cet article est une usine à gaz : nous allons créer une situation qui va à l'encontre du but recherché et fait obstacle à la fluidité du circuit. L'arbitrage des services se superposera à celui du juge, et entraînera un surcoût pour les conseils généraux. Certains présidents de conseils généraux de la majorité présidentielle font la même analyse...

M. le président.  - Amendement identique n°26 rectifié, présenté par Mme Malherbe et les membres du groupe du RDSE.

Mme Hermeline Malherbe.  - Je n'utiliserai pas les mêmes termes.

Je comprends la volonté des auteurs de la proposition de loi. Mais la mise en pratique de cette commission pluridisciplinaire me paraît très compliquée, pour ne pas dire irréaliste, vu la situation actuelle des départements.

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable, et puisque nous ne pourrons aller au terme de l'examen de ce texte, je vais prendre le temps de vous expliquer pourquoi. J'ai été vice-présidente de mon conseil général en charge de l'action sociale. La mise en place des comités locaux d'insertion avait suscité la même opposition. Mettons du politique dans ces sujets, pour avoir un regard croisé, sans nous en tenir à l'avis des professionnels, qui sont très bons. Toutes les questions sont bonnes à poser quand il s'agit de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Je comprends la vigilance des conseils généraux, mais on ne peut à la fois regretter que le projet pour l'enfant soit insuffisamment appliqué, que les professionnels travaillent en silo, et refuser une commission pluridisciplinaire. Pour travailler ensemble, il faut d'abord se rencontrer ! Avançons ! Le texte réserve la pluridisciplinarité à un nombre limité de cas. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos23 rectifié bis et 26 rectifié sont adoptés et l'article 7 est supprimé.

Les amendements nos48 et 56 deviennent sans objet.

ARTICLE 19

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - L'article 19 modifie un dispositif mis en place par une loi de juillet 2013. C'est un peu tôt !

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable. À en croire les remontées du terrain, cette loi rencontre de réelles difficultés d'application.

L'amendement n°50 est adopté et l'article 19 est supprimé.

L'amendement n°37 rectifié ter devient sans objet.

ARTICLE 20

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois.

Supprimer cet article.

M. François Pillet, rapporteur pour avis.  - L'article 20 rend automatique la suppression de l'autorité parentale aux parents s'ils ont commis un crime ou un délit contre leur enfant ou l'autre parent.

Ce principe de l'automaticité se concilie mal avec le principe de l'intérêt de l'enfant. Il prive le juge d'outils qui peuvent être utiles. La rédaction de l'article entraînerait, dans l'hypothèse où le parent aurait eu un accident de voiture causant à l'enfant des blessures, le retrait automatique de l'autorité parentale !

En outre, cette mesure, contraire à la Convention européenne des droits de l'homme et à la Constitution, risquerait d'être censurée par le Conseil constitutionnel.

Après avoir supprimé les peines plancher au pénal, il serait curieux de les réintroduire au civil !

Mme Michelle Meunier, rapporteure.  - Avis défavorable. Le texte de la commission précise bien que l'intérêt de l'enfant prime.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État.  - Avis favorable : cet article est contraire au principe d'individualisation des peines et encourrait un risque de censure constitutionnelle.

L'amendement n°10 est adopté et l'article 20 est supprimé.

M. le président.  - Nous avons épuisé le temps imparti pour l'examen de cette proposition de loi, dont la Conférence des présidents décidera d'une nouvelle inscription à l'ordre du jour.

La séance suspendue à 18 h 30, reprend à 18 h 40.

Débat « Quels emplois pour demain ? »

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat sur le thème « Quels emplois pour demain ? », à la demande de la délégation sénatoriale à la prospective.

M. Roger Karoutchi, président de la délégation sénatoriale à la prospective .  - C'est la première fois dans l'hémicycle que je prends la parole en cette qualité. La délégation a beaucoup travaillé, a produit beaucoup de rapports sur des sujets clés - l'emploi, l'environnement, la santé, l'éducation -, sans faire concurrence aux commissions mais a évoqué, au-delà de l'actualité, des thèmes de réflexion prospective.

Monsieur le ministre, vous savez combien il faut être solide, avec du tempérament, à un poste où les chiffres du chômage progressent mois après mois, mais il vous faut aussi porter une vision à long terme pour préparer l'avenir - la relève. Car les emplois de demain ne seront pas ceux d'aujourd'hui. D'où l'excellent rapport d'Alain Fouché, initié lorsque Joël Bourdin présidait la délégation : quels seront les secteurs qui embaucheront demain ?

Avant d'être sénateur, inspecteur de l'éducation nationale, j'avais travaillé sur les évolutions futures de notre système éducatif mais celui-ci ne se transforme pas rapidement. Comment le transformer pour l'adapter aux évolutions des secteurs économiques ? Est-ce même possible ? Certaines perspectives n'ont pas été avérées et des jeunes n'ont pas trouvé l'eldorado qu'on leur avait promis...

Les chiffres sont difficiles, le Premier ministre l'a redit : il faut 2 % de croissance pour créer des emplois. Si on veut préparer l'avenir, il faut que le gouvernement, l'État, les ministères, les acteurs publics soient informés des perspectives. C'est tout l'intérêt du rapport d'Alain Fouché, qui trace des pistes. Nous attendons monsieur le ministre, que vous nous donniez votre avis sur celles-ci. Vous direz, bien sûr, qu'il est un excellent sénateur et qu'il a rédigé un excellent rapport ; mais ce que nous attendons de vous, c'est que vous reveniez dans un an ou deux et nous disiez ce que vous aurez proposé au ministère de l'éducation nationale pour préparer les emplois de demain. (Applaudissements)

M. Alain Fouché, rapporteur de la délégation sénatoriale à la prospective .  - Merci pour cette excellente introduction ! Je salue tous les parlementaires qui ont travaillé sur le thème de ce soir. Nous avions l'ambition de dresser un panorama des secteurs qui embaucheront demain les jeunes qui se présenteront d'ici dix ou quinze ans sur le marché du travail. Le système de formation initiale et continue se met-il en phase avec ces évolutions ?

J'ai conduit une série d'auditions et de visites, de déplacements - peu coûteux - à Bruxelles et Cologne, j'ai colligé notes et rapport en tous genres. Je n'ai pas manqué de documentations, qui sont pléthoriques, de même que sont divers les acteurs qui interviennent dans les secteurs de l'emploi et de la formation. Je les ai consultés, interrogés, rencontrés. J'ai entendu les perspectivistes du Conseil d'orientation de l'emploi, de la Dares, du Céreq, des services de la Commission européenne. Au Futuroscope, j'ai interrogé les institutions, telles que le CNDP, présentes sur le site.

Certains raisonnements sont très scientifiques, d'autres plus empiriques, inspirés de l'air du temps. Ce ne sont jamais les mêmes viviers d'emplois qui sont cités. Mais se dégagent deux grandes tendances : des perspectives très élevées d'embauche dans les nouvelles technologies, le numérique et l'informatique - il manque 30 000 emplois dans ce secteur - et des débouchés importants pour les services à la personne, en raison du vieillissement de la population - et l'on sait la fiabilité à long terme des perspectives démographiques. Pour le reste, emploi industriel, professions intermédiaires, les perspectives sont plus floues ou contradictoires.

Faisons preuve d'humilité : on ignore largement quels seront les métiers de demain. Entre un tiers et 70 % de ces métiers sont encore inconnus. D'où ma question de Candide : comment se former à des emplois dont on ignore à peu près tout ? L'accélération des connaissances, les mutations de la société, la mondialisation font que ce qu'on apprend est obsolète deux ou trois ans plus tard.

Il faut s'attendre à une modification profonde des conditions de travail : horaires, environnement, localisation, carrières, cette dimension de la mobilité doit être intégrée à notre réflexion. Le gouvernement y prépare-t-il notre société ?

Il faut revoir la nature des savoirs à enseigner aux enfants pour accueillir le concept décrit sous le barbarisme d'employabilité. Il serait utile, plutôt que de les former à des métiers qui peut-être n'existeront plus, de leur inculquer des compétences transversales, comme la maîtrise des langues étrangères et de l'informatique, la compréhension des enjeux du développement durable, la capacité à travailler en équipe.

Je m'interroge sur la capacité de notre système éducatif à effectuer cette mutation, à l'heure où les enquêtes Pisa et autres montrent la dégradation du niveau des élèves. Comment y travaillez-vous avec votre collègue de l'éducation nationale, monsieur le ministre ? Notre système éducatif ignore encore trop les besoins réels des entreprises. Partagez-vous ce sentiment ?

Bien des difficultés que l'on m'a signalées ne sont pas nouvelles, de l'apprentissage, qui reste trop souvent un choix par défaut, aux inégalités devant la formation tout au long de la vie, en passant par l'insuffisante féminisation de certains carrières ou le peu de développement du télétravail. Que faire pour que les choses bougent ?

Notre délégation a adopté quatre séries de préconisations. La première porte sur les moyens de rendre plus visibles les perspectives immédiates d'emploi à l'aide de documents plus maniables, de l'accroissement des capacités d'accueil dans les secteurs prometteurs, de l'amélioration de l'orientation, du renforcement des liens entre le monde du travail et celui des étudiants. Voyez l'Allemagne : les jeunes en apprentissage passent 60 % de leur temps en entreprise et sont payés convenablement...

La deuxième série de préconisations est plus ciblée. Il s'agit d'anticiper la réindustrialisation en encourageant les formations scientifiques de niveau élevé, de stimuler la féminisation des emplois, notamment scientifiques, de mener une ambitieuse démarche en faveur de la robotique.

Ensuite, pour préparer l'employabilité des générations futures, l'éducation nationale doit recentrer les savoirs à transmettre sur les compétences transversales, sans hésiter à s'inspirer des modèles étrangers les plus performants, conforter une formation duale, mêlant savoirs académiques et expériences en entreprises, créer un dispositif de formation pratique professionnalisante pour réintégrer les décrocheurs.

Enfin, pour tenir compte de l'évolution de notre société, notre délégation insiste sur la promotion de carrières plus évolutives et plus adaptables - d'où l'ouverture effective de la formation tout au long de la vie au plus grand nombre. Il faudra encourager la mobilité professionnelle, sociale et géographique des travailleurs.

Monsieur le ministre, je prendrai connaissance avec intérêt et attention de vos réponses. (Applaudissements)

Mme Corinne Bouchoux .  - Je remercie le rapporteur pour son travail très riche ; le sénateur Jean Desessard, qui est le référent du groupe écologiste sur ces sujets. Je reprendrai pour commencer ses propos : la prospective ne décrit pas seulement une courbe, elle doit aussi déterminer la courbe que nous voulons ; l'évolution dépend de la volonté publique   du monde que nous voulons construire.

Le rapport est intéressant mais la place qu'il accorde à la transition énergétique n'est pas celle qu'elle mérite. Je vous renvoie aux travaux de l'OPECST sur l'Allemagne, qui montrent que c'est une perspective pour notre société, si la formation, l'école, les pouvoirs publics remplissent certaines conditions - formation, politique des entreprises, aides des pouvoirs publics. Ni une punition, ni une contrainte, mais une formidable opportunité. Entre 50 000 et 250 000 emplois sont à la clé.

Et si nous considérions mieux les activités verdissantes, le travail sur les pesticides ? Ce sont des opportunités pour la recherche et les emplois de demain.

La clé de tout, c'est l'école et la formation tout au long de la vie. En France, on aime l'école ou on ne l'aime pas. Si on a raté le train... On devrait avoir une deuxième chance, à 20 ou 25 ans, pour entreprendre des études d'ingénierie ou de médecine, comme cela se fait en Allemagne. Il faut répondre en ce sens par une articulation plus dynamique entre l'école et la formation professionnelle.

J'ai été élevée pour partie en Allemagne. En Allemagne, il n'y a pas l'ENA, pas de classes préparatoires aux grandes écoles, moins de ségrégation scolaire ; en Allemagne, la formation est continue tout au long de la vie - 50 % des PDG allemands sont issus de l'apprentissage. Le rapport au réel est différent...

Nous proposons, non pas une évolution quantitative, mais qualitative, vers cette autre société que permet la transition énergétique. Qui parmi nous a envoyé ses enfants en apprentissage de métiers manuels ? Les métiers intellectuels sont valorisés et ceux-là sont mal vus, à tort. D'où la mauvaise image de l'industrie. Il faut changer de paradigme !

Je n'aime pas du tout le mot « employabilité » qui transfère la charge d'adaptation à l'économie aux jeunes eux-mêmes. Il faut des écoles de la deuxième chance, de nouvelles méthodes pédagogiques, bref une révolution... (Applaudissements)

M. Jean Desessard.  - Bravo !

M. Dominique Watrin .  - Ma région, le Nord-Pas-de-Calais, est particulièrement concernée par les emplois de demain, tant nous avons perdu d'emplois hier et continuons à en perdre aujourd'hui. Jeremy Rifkin a été consulté par la région : à l'en croire, hydrogène et imprimantes 3D transformeront demain chaque immeuble en usine... Ce monde idyllique dépolitisé relève plus de la fable que de la prospective. Ce discours est dangereux car il nous faut penser nous-mêmes les impasses d'un modèle économique dominé par le gâchis économique, le court-termisme et les dégâts de la rentabilité maximale des capitaux. La piste des emplois verts est à peine esquissée dans le rapport et mériterait de plus amples développements. Je pense aux potentialités d'emplois en lien avec le grand port méthanier de Dunkerque, au projet porté par les associations Génération Ferdinand Béghin et Géants du papier pour fabriquer du papier d'emballage à base de chanvre, ou encore à l'exploitation du gaz de couche - qui n'a rien à voir avec le gaz de schiste -, exploitable sans fracturation hydraulique, dont les réserves dans le bassin minier sont évaluées à douze années de consommation de la région Nord-Pas-de-Calais.

L'industrie n'est pas un gros mot. J'ai apprécié, monsieur le rapporteur, la piste d'une réindustrialisation moderne à base d'emplois très qualifiés et de robotique après des années de délocalisations et de démembrements - 300 000 emplois perdus en cinq ans, et le « redressement productif » n'y a rien fait. Mieux vaut cependant utiliser le concept de « nouvelle industrialisation » pour ne pas reproduire des modèles qui ont disparu et anticiper l'avenir : relations nouvelles avec les services, y compris publics, qui sont les principaux prescripteurs de production industrielle ; importance de la révolution numérique dans le processus de production. La RTT est un facteur important de progrès social, elle est au coeur du débat sur les emplois de demain - et c'est à l'époque des lois Aubry que le chômage a le plus diminué... Il y a urgence à mettre fin au productivisme et au consumérisme, à rompre avec l'obsolescence programmée, à mettre en place des filières tout au long du cycle du produit : là aussi sont les emplois de demain. Le rapport insiste sur la montée en qualification, aussi sur le risque d'une société à deux vitesses avec des emplois hyper-qualifiés d'un côté et de l'autre une tendance à la baisse de la qualification des ouvriers et employés. Nous ne nous résignons pas à pareille évolution.

On évoque souvent; comme vous, monsieur le ministre, le secteur de l'aide à domicile comme particulièrement porteur. Je vous renvoie au rapport que j'ai signé avec Jean-Marie Vanlerenberghe : 98 % de femmes...

Mme Corinne Bouchoux.  - C'est vrai !

M. Dominique Watrin.  - ... précarisation, manque d'attractivité... Je pose le postulat d'une montée en qualification de tous les métiers.

Votre rapport est utile mais n'oublions pas l'enseignement d'Henri Bergson : « l'avenir n'est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons faire ». (Applaudissements)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Je suis désolé mais je vais vous décevoir : je crois qu'il n'y a pas de réponse à la question posée... On peut spéculer sur l'avenir, le prêcher, mais il ne répond guère. On estime qu'entre un tiers et 70 % des métiers de demain n'existent pas encore, c'est dire ! Les experts n'en savent pas plus que ceux qui ne le sont pas...

Voici ma propre prévision : les métiers futurs ressembleront à ceux d'aujourd'hui, même s'ils se transformeront de l'intérieur par la technologie et les méthodes. Imaginer une transformation magique de la société sous leur empire est parfaitement vain, car les nouvelles technologies doivent composer avec les capacités des hommes et de leurs organisations. Les gains de productivité qu'elles entraînent ne réduisent pas nécessairement les charges de travail, ni les effectifs.

D'où ce paradoxe : l'avènement d'une société affranchie de l'obligation de travailler, annoncée par Aristote, Marx et tant d'autres, n'a pas eu lieu. On travaille encore plus, on a créé des emplois inutiles ou sans intérêt, des « jobs à la con », selon la citation d'une prospectiviste, placée en note de bas de page dans votre rapport... Parmi ces emplois inutiles, les directeurs généraux des entreprises, les huissiers de justice, les télémarketteurs, les lobbyistes, les chargés de relations publiques...

On oublie la dimension politique des créations d'emplois. Alain Minc et Jacques Attali annonçait dès la fin des années 70 l'informatisation de la société par la télématique... Déjà eux, déjà un mirage... Le minitel, lancé en même temps que le projet américain Arpanet qui donnera naissance à Internet est abandonné en 2011...

La prévision devient impossible dans une mondialisation financiarisée et non régulée, livrée au libre-échange généralisé, où le rôle de l'État est réduit à celui de fluidificateur du marché du travail. Certes, la France doit se réindustrialiser et cela devrait rimer avec la transition énergétique. Or les prix du gaz et du pétrole baissent et ce sont les Chinois qui produisent désormais seuls les panneaux solaires. Rien ne dit que la croissance de l'énergie solaire profitera à l'Europe et à la France.

Les aides à la personne sont considérées un peu vite comme un gisement d'emplois alors que leur développement dépend des incitations fiscales et financières, des capacités économiques des familles... Du besoin à l'emploi se déploie tout l'espace de la décision politique. Au lieu de prolonger des courbes, il convient de décider quelle société on veut et quels moyens on entend y consacrer. (Applaudissements à gauche)

M. Olivier Cadic .  - L'expression « Emplois de demain » devrait résonner comme une promesse, surtout auprès des plus jeunes pour lesquels elle rime avec « métiers auxquels les parents ne comprennent rien »... (Sourires) C'est mon cas. J'ai commencé ma carrière en 1981 comme dessinateur assisté par ordinateur sur carte électronique, métier qui n'existait pas trois ans plus tôt et a disparu dix ans plus tard... Les emplois se créent et sont supprimés plus vite que le temps que le système éducatif met à y former. C'est ainsi.

Les jeunes de 20 ans sont nés dans une Europe aux frontières ouvertes. Le rôle du ministre de l'emploi est de faciliter la mobilité internationale. Or votre gouvernement la menace...

Les emplois de demain sont encore inconnus. Une lame de fond s'annonce à l'horizon, qu'on appelle biotech, greentech, nanotech... Thérapie cellulaire, exosquelette... Demain, les sourds entendront et les aveugles verront ! Nous approchons de l'immortalité...

M. Jean Desessard.  - Dépêchons ! (Sourires)

M. Olivier Cadic.  - Il faut investir massivement dans la recherche, faute de quoi nos pépites comme Carmat, entreprise française qui a inventé le coeur artificiel, seront rachetées par des groupes américains. Il faut développer un système de capital-risque et de capital-développement. Il nous faut dix fois plus d'investisseurs privés, de venture capitalists. Nous avons traduit venture par « risque » plutôt que par « aventure » : c'est significatif...

De l'argent, nous en avons ! La France est le troisième épargnant mondial. Notre encours d'assurance-vie avoisine les 1 500 milliards d'euros ! Incitation fiscale et emplois de demain sont donc des mots qui vont très bien ensemble. Or, dans la loi Macron, rien ou presque sur la fiscalité. Dans nos entreprises familiales, les actionnaires minoritaires réclament des augmentations de dividendes pour pouvoir payer leur ISF. Autant de manque à investir ! Quelle destruction de valeur !

À l'heure du combat entre États-continents, nous devons sortir de notre confetti et penser l'avenir au niveau européen. Des investissements ambitieux ne peuvent se concevoir qu'à l'échelle de l'Union européenne, laquelle doit harmoniser nos législations et créer au plus vite le marché unique numérique. Londres reste plus attractive que Paris pour accueillir des emplois qualifiés.

McKinsey a identifié, en mai 2013, douze technologies porteuses, dont l'internet des objets connectés, l'impression 3D, les énergies renouvelables, les nouveaux matériaux. La puissance publique fait face à un double défi s'agissant des emplois d'avenir : la formation et l'information. « Stratifieur », qui sait que ce métier consiste à assembler des matériaux composites ? De même pour les data scientists, qui seront pourtant 1,5 million aux États-Unis en 2018. Pour s'y préparer, il faut rapprocher informatique, statistiques et marketing. Ce métier, tout comme celui de community manager, n'existait pas il y a quelques années. Il faut inciter à beaucoup plus de mobilité. La Poste invente le postier moderne, qui rend aussi visite aux personnes seules, contre rémunération par le CCAS. Face au vieillissement de la population, le potentiel de l'économie sociale et solidaire est considérable ; il compensera la destruction d'emplois dans les autres secteurs.

Y en aura-t-il pour tout le monde ? Selon une étude réalisée en septembre 2013 par Frey et Osborne, deux chercheurs d'Oxford, 47 % des emplois aux États-Unis pouvaient être remplacés par des machines. Selon une étude du cabinet Roland Berger, datant de décembre 2014, la robotique supprimera chez nous 3 millions d'emplois d'ici à 2025. Après les cols bleus, les cols blancs seront les prochaines victimes de l'évolution technologique. Ne resterait alors qu'une catégorie : les « cols d'or », selon le terme inventé par Richard Florida, professeur à l'université de Columbia. Ces architectes, développeurs, directeurs artistiques représentent déjà 30 % de la population active aux États-Unis, mais 50 % des salariés et 70 % du pouvoir d'achat. C'est la nouvelle creative class !

Les métiers même intellectuels, sans valeur créative, sont donc menacés à long terme. Ils devront se transformer de l'intérieur. J'ai commencé, vous ai-je dit, à travailler dans le dessin assisté par ordinateur. Beaucoup d'emplois, demain, assisteront les ordinateurs.

Invité à partager ma vision d'entrepreneur à une conférence récente, j'ai proposé le résumé suivant : pas de papier, pas de salarié : no paper, no people. Mes collaborateurs travaillent sur plusieurs continents. Je ne les rencontre jamais. Ils n'ont pas de contrat de travail. Ils sont indépendants et en vivent bien. L'exact inverse du modèle qui a fait le succès de Gérard Pélisson à la tête du groupe Accor, qui a créé 200 000 emplois dans le monde.

L'avenir sera fait de mastodontes économiques, des multinationales qui rivalisent avec les États-nations, lesquels devront se montrer accueillants aux nouvelles activités. Et il y aura aussi un tissu de PME fondées sur des structures flexibles, qui s'affranchiront de tout carcan administratif pour avoir la souplesse leur permettant de répondre aux demandes venant de partout à tout moment.

Les États où il fera bon vivre et travailler verront leur volume d'emplois croître comme par magie. Toronto gagne 250 000 habitants par an. Le monde a déjà changé. La France, elle, est-elle prête à changer ? (Applaudissements à droite et au centre)

M. Daniel Gremillet .  - Depuis la crise, aucune inversion de la courbe du chômage n'a été constatée. Les plus de 50 ans sont les plus touchés, avec les plus jeunes. L'Insee souligne que la France a perdu 9 % de ses actifs depuis 1980. L'industrie représentait 30 % du PIB ; c'est 20 % désormais.

La Commission européenne a montré que trois pays de la zone euro ont plus détruit d'emplois industriels que leurs voisins, l'Espagne, l'Italie, la France. L'Allemagne, elle, en a créé. Nous comptions 689 000 personnes au chômage en 1975 ; nous en sommes à 3,5 millions. Le parallèle est patent, entre le taux de chômage et la désindustrialisation. Seuls 27 % des salariés de l'industrie suivent une formation ; ce chiffre doit nous interpeller. Entre 2005 et 2013, les ingénieurs partis travailler à l'étranger sont passé de 13 % à 15 %. La demande croît, sans doute. Mais lorsqu'elle progresse de 3,8 % en France, c'est plutôt 5,8 % hors de nos frontières. Et deux tiers des ingénieurs qui vont travailler dans l'industrie étrangère, le font de leur propre initiative, non à la demande d'un groupe étranger. Chaque jeune parti d'un territoire est un appauvrissement supplémentaire de notre économie.

La loi NOTRe telle que votée par le Sénat va dans le bon sens : il faut s'appuyer sur les spécificités des territoires ; la région est l'échelon le plus adéquat.

M. Alain Fouché, rapporteur.  - Il ne faut pas oublier le département !

M. Daniel Gremillet.  - Élu de la Lorraine, j'ai vu des activités bouleversées par l'évolution de notre économie. Il faut renforcer le couple formation-emploi. Avec Jackie Pierre, nous avons rencontré des chaudronniers cet été : l'autorisation d'ouvrir les classes nécessaires à la pérennisation de leur activité n'a jamais été donnée.

Donnons confiance aux jeunes d'aujourd'hui qui inventent les emplois de demain ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Yannick Vaugrenard .  - Je tiens à féliciter Alain Fouché pour son excellent rapport. Sur ce sujet complexe qui mêle philosophie, social, sociétal, faisons preuve d'une certaine humilité. Je forme le voeu que ce travail nous permette d'élaborer des pistes pour l'avenir. Les nombreuses statistiques disponibles ne suffisent pas à éclairer l'avenir, sachant que de 30 à 70 % des métiers d'avenir n'existent pas encore. Cela ne doit toutefois pas nous empêcher de réfléchir : vous avez su prendre de la hauteur par rapport aux chiffres mensuels du chômage.

Vous souhaitez que les perspectives immédiates soient plus lisibles : il faut repenser la statistique de l'emploi. Identifier les secteurs de demain n'est pas facile, mais ceux liés au vieillissement de la population seront certainement en tête des plus dynamiques. Le ministère du travail évalue à 350 000 le nombre d'offres d'emploi qui ne trouvent pas preneurs. La cause en est à chercher dans l'inadaptation de l'offre et de la demande, et non dans je ne sais quelle mauvaise volonté des chômeurs. Notre système de formation doit être remis à plat.

L'enquête Pisa fait apparaître une dégradation des résultats des jeunes Français en fin de scolarité, s'agissant notamment des fondamentaux éducatifs. C'est dès l'enseignement maternel et primaire que des efforts considérables doivent être entrepris. Une formation générale performante permettra toujours une adaptabilité plus aisée.

Mais le point qui nous occupe aujourd'hui et sur lequel le gouvernement a décidé d'agir, concerne les offres d'emplois non pourvues. Le gouvernement a mis en place l'opération « Formations prioritaires pour l'emploi », qui offre des formations ciblées dans des secteurs comme le commerce, les transports, les secteurs sanitaire et social. Lors de ses voeux aux acteurs de l'entreprise et de l'emploi, le président de la République a dressé un premier bilan de cette opération. L'objectif initial était de faire entrer 30 000 demandeurs d'emploi dans ces formations spécifiques en 2013. Cet objectif a été dépassé : 80 000 demandeurs d'emploi ont été concernés en 2014 et l'objectif pour 2015 est désormais de toucher 100 000 personnes.

Vous préconisez de miser sur la réindustrialisation. Mais nous ne vivons pas en autarcie. Nos plus de 2,3 millions d'entreprises industrielles dégagent plus de 1 600 milliards d'euros de valeur ajoutée par an, sachant que 1 200 milliards d'euros de déficit commercial ont été accumulés par l'Europe face à la Chine. La lutte contre la désindustrialisation est engagée.

Certes nécessaire, la mobilité professionnelle ne doit pas aggraver la précarité des salariés. On estime à 3,2 millions le nombre de salariés précaires. Les CDD représentent 7,4 % de l'ensemble des emplois. Le taux d'emplois précaires est passé de 5 % en 1982 à 11 % aujourd'hui. L'ampleur de cette précarité est sous-estimée, car il existe aussi des emplois précaires non salariés.

Les emplois de demain seront aussi soumis à la concurrence internationale. Il convient de prendre en compte le problème des travailleurs détachés.

C'est souvent à la suite de crises aiguës que la construction européenne a progressé ; soyons donc résolument optimistes. « Ce n'est pas le doute, c'est la certitude qui rend fou », disait Nietzsche.

Vos dix préconisations sont intéressantes. Je souhaite que la délégation fasse des points d'étape réguliers, pour que nous travaillions de façon constructive pour nos concitoyens. (Applaudissements à gauche)

M. Didier Mandelli .  - Je remercie nos collègues de la délégation à la prospective, et félicite le rapporteur pour la qualité de son travail.

La réponse à la question posée dépend de la conjoncture. Or 35 % des employeurs expriment des difficultés de recrutement, deux tiers des embauches se font en CDD et 150 000 jeunes quittent le système scolaire sans formation.

Les métiers ont fortement évolué ces dernières décennies. Le nombre d'agriculteurs a fondu tandis que celui des cadres d'entreprise et d'administration dépassait les 4 millions. Le vieillissement de la population, l'apparition de smart cities dotées de mobiliers urbains et de transports intelligents, la croissance verte, vont créer des emplois nouveaux. Ce dernier point me tient à coeur en tant que membre de la commission du développement durable. Le projet de loi transition énergétique doit susciter les changements nécessaires. Les emplois de demain resteront en grande partie ceux d'aujourd'hui, adaptés aux évolutions environnementales ; protégeons-les et faisons-les évoluer.

Les emplois vacants sont nombreux, ce qui est difficile à expliquer en période de chômage. Le prix Nobel Jean Tirole a fustigé le fonctionnement du marché du travail et proposé de créer un contrat de travail unique. M. Valls s'est montré ouvert à cette idée. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Le travail détaché est un problème majeur. En principe très spécialisés et censés compenser une carence dans un domaine précis, les travailleurs détachés se multiplient pourtant. Cette concurrence est redoutable. Le contrôle de ces pratiques devait être renforcé. Cela ne suffira pas. Il faut harmoniser les règles au plan européen.

Comment préparer les jeunes aux emplois de demain lorsque 150 000 quittent déjà le système sans formation ?

M. Charles Revet.  - Eh oui !

M. Didier Mandelli.  - Il faut renforcer la formation, mieux l'articuler aux besoins de Pôle emploi. L'emploi nous concerne tous. Il ne se décrète pas. Mais nous ne pourrons laisser nos concitoyens dans le désespoir. Ce rapport doit être suivi d'effets. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Charles Revet.  - Très bien !

M. Michel Savin .  - Alain Fouché relève qu'entre un tiers et 70 % des métiers de demain sont encore inconnus. Pour l'heure, nous constatons la disparition de nombreux emplois artisanaux. De nombreuses évolutions du marché du travail sont en germe depuis des années.

L'apprentissage est identifié comme une voie d'avenir : 70 % des jeunes ainsi formés obtiennent un emploi. Or, faute de visibilité des entreprises, ce secteur n'est guère soutenu. Les mesures récentes n'ont rien arrangé. Un travail de fond doit être conduit. Nous attendons des propositions concrètes pour l'apprentissage. Notre pays doit se préparer aux grands changements de demain - développement durable, numérique - mais aussi soutenir les secteurs qui souffrent : agriculture, logement. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Fabienne Keller .  - Je salue à mon tour le travail d'Alain Fouché dans le cadre de la délégation sénatoriale à la prospective, qui s'appuie sur de nombreuses rencontres et de nombreuses auditions.

L'actualité est lourde : 189 000 chômeurs de plus l'année dernière, portant le total à 3,5 millions. Comment créer les conditions de l'emploi ? Le rapport identifie trois leviers.

L'apprentissage, d'abord. Le dispositif fonctionne outre-Rhin, pour des emplois manuels, mais aussi des jobs d'ingénieur ou de comptable. Le processus s'inscrit dans la durée : le jeune est suivi tout au long de son parcours. Et que faites-vous, monsieur le ministre ? Vous supprimez la prime à l'embauche, moyennant quoi vous faites baisser le nombre d'apprentis ! La confiance placée dans le jeune devrait pourtant se transformer en atout économique.

M. Charles Revet.  - C'est aussi vrai de l'alternance.

Mme Fabienne Keller.  - Deuxième levier : les entreprises. Elles ont besoin de confiance et de stabilité. Or au lieu de baisser les charges, vous les avez alourdies, au profit d'un CICE illisible, qui crée un effet d'aubaine plutôt qu'il incite, et qui ne jouera qu'après un délai de trois ans pour les grandes entreprises.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.  - Quelle argumentation décevante !

Mme Fabienne Keller.  - Le compte personnel formation (CPF) est une excellente idée, que nous avions eue avec le DIF, dont vous changez le nom et l'administration pour l'éclat de la communication.

L'activité dépend de milliers de petites décisions, lesquelles dépendent de la confiance permise par la simplicité et la stabilité de l'environnement économique. La loi Macron ne va pas dans ce sens. (Exclamations sur les bancs socialistes) Je propose donc cette piste : connaître et respecter l'entreprise, créatrice de richesses.

Troisième levier : l'humain. On crée de la désespérance en multipliant les catégories de chômeurs. « Il faut changer de logiciel dans la lutte contre le chômage », titrait justement ce matin un grand quotidien ; considérer les demandeurs d'emploi comme des personnes, riches d'un véritable potentiel, non comme des étiquettes.

Que faites-vous, concrètement, pour développer l'apprentissage, et pour soutenir les nouveaux emplois ? (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social .  - Je remercie d'abord le président Karoutchi des propos qu'il a tenus et de leur ton ! Je salue l'excellent rapport commis par Alain Fouché ; il restera sans doute dans les annales du Sénat et nous nous y référerons.

En matière d'emploi, il y a beaucoup de spécialistes, sans doute autant que de Brésiliens compétents pour être sélectionneur de leur équipe de football, soit à peu près tout un chacun !

Vos interrogations recoupent souvent les miennes ; nous essayons ensemble de nous projeter dans l?avenir, nous n'étions pas réunis aujourd'hui pour débattre de la situation d'aujourd'hui, surtout avec des arguments comme ceux de Mme Keller.

Mme Fabienne Keller.  - Ils vous ont donc touché !

M. François Rebsamen, ministre.  - Je remercie chacun pour son intéressante participation au débat. La transition énergétique ? Nous pouvons en espérer 15 000 emplois d'avenir. Le crédit d'impôt recherche est efficace : notre pays est de ceux qui attirent le plus de chercheurs étrangers, monsieur Cadic. La concurrence déloyale des travailleurs détachés, monsieur Mandelli ? Il faut certes lutter contre, en faisant bien la différence avec ceux qui viennent dans des conditions parfaitement légales.

Le rapport de la délégation sénatoriale à la prospective pose une question essentielle pour notre pays, confronté à la crise sans précédent de l'Europe. Le temps perdu dans le chômage de longue durée, pour certains, ne sera jamais rattrapé. L'effort dans la formation sera maintenu en 2015. Le compte personnel de formation, la garantie jeunes déploieront leurs effets. Qu'il s'agisse des métiers de l'environnement, des aides à la personne, voyez là-dessus le livre sur les métiers 2022 publié par la Dares et France Stratégie.

La prospective en la matière - et je veux bien revenir en débattre avec vous, monsieur le président, quand vous voulez - doit nous aider à nous préparer. Il serait vain d'opposer un présent tout entier consacré à la lutte contre le chômage et des perspectives lointaines, peu opérationnelles. En matière d'emploi, l'action présente est intimement liée à la préparation de l'avenir, fondée sur les grandes tendances qui dessinent le marché du travail de demain.

Notre dispositif de formation et d'orientation professionnelle doit être, en conséquence, réactif et utile à l'économie. Nous devons donc renforcer notre capacité à identifier les besoins des entreprises en compétences, en métiers. Certains sont déjà visibles.

La prospective, activité difficile, n'a de sens qu'orientée vers la décision. Ayons des acteurs qui interviennent, au plan national et territorial, sans trop de redondance.

Cinq mutations structurelles sont à l'oeuvre : une nouvelle géographie mondiale de l'activité se dessine, qui ne réserve plus aux pays développés la production à haute valeur ajoutée et aux autres pays la concurrence par les prix ; une démographie à la fois dynamique et caractérisée par le vieillissement ; une évolution profonde de notre modèle familial qui crée de nouveaux besoins en services à la personne, logement, enseignement ; l'exigence de la transition énergétique ; la révolution numérique et robotique qui entraîne des conséquences sur les compétences et sur toute la chaîne de valeur.

Le besoin de se projeter existe pour développer certaines filières comme le numérique et le nucléaire, ou assurer la réussite de grands projets. Une grande partie de la question de l'emploi nécessite non pas une projection sophistiquée mais une capacité à aider les entreprises à transformer leur potentiel d'activité en emplois. Nous avons trop de futurologues et pas assez d'accoucheurs.

Les services de l'État doivent se recentrer sur le concret, le présent porteur d'avenir...

Mme Fabienne Keller et M. Michel Savin.  - Très bien !

M. François Rebsamen, ministre.  - Comment aider les entreprises à recruter ? Aidons les employeurs dépourvus de fonction ressources humaines structurée à répondre aux questions, généralement simples, qu'ils se posent. Les services de l'État doivent devenir les ensembliers des offres de services relevant de la compétence de plusieurs acteurs.

Les métiers évoluent à une vitesse vertigineuse. Nous devons collectivement suivre cela dans notre pratique quotidienne. Le service public de l'emploi doit être au contact réel de l'entreprise, ici et maintenant : c'est le cas pour Pôle emploi, avec ses conseillers dédiés à la relation entreprises, ce doit l'être pour les services déconcentrés de l'État, qui doivent s'orienter davantage vers les entreprises.

Le répertoire opérationnel des métiers de Pôle emploi, le seul référentiel en France, doit être repensé à partir des compétences, actualisé et rendu collaboratif. Pôle emploi y travaille à ma demande.

Les diplômes professionnels doivent évoluer avec les besoins des acteurs économiques. Dans le cadre du plan pour le développement de l'apprentissage annoncé par le président de la République le 19 décembre dernier, nous travaillons à améliorer le processus de validation pour que les partenaires sociaux soient davantage sollicités. La compréhension des évolutions vaut aussi pour le recrutement et la recherche d'emploi, avec le rôle croissant des réseaux sociaux et d'Internet pour l'évaluation des profils.

Il revient au service public de l'emploi de mieux faire circuler l'information sur les besoins avec l'open data sur le marché du travail et les besoins de recrutement. Il faut développer des plates-formes collaboratives : c'est l'objet de l'Emploi store de Pôle emploi.

Notre système d'orientation et de formation doit s'adapter aux enjeux actuels et futurs de l'entreprise. Il doit donner les bonnes informations aux bonnes personnes au bon moment.

Mme Pascale Gruny.  - On en est loin !

M. François Rebsamen, ministre.  - Il est vrai qu'on ne trouve pas de chaudronnier. On pourrait peut-être aussi les payer plus...

Monsieur Fouché, votre rapport signale des défauts qui ont été ou sont en passe d'être corrigés par la réforme de la formation professionnelle du 5 mars 2014, qui passe de l'obligation de dépenser à l'obligation de former - avec une baisse des cotisations -, qui vise à valoriser les formations certifiantes, pour concentrer l'effort sur les besoins de l'économie et rendre accessible la formation à tous, ce que ne faisait pas le DIF. Le compte personnel de formation est la première grande avancée depuis Jacques Delors, en 1971. (M. Jean Desessard approuve) Chacun pourra se former tout au long de sa vie professionnelle, y compris pendant ses périodes de chômage, quand il en a le plus besoin.

J'ajoute que la définition des critères partagés installera un système de certification des organismes de formation. Le CPF marche : 200 000 comptes ont été ouverts entre le 5 et le 25 janvier.

M. Jean Desessard.  - C'est bien !

M. François Rebsamen, ministre.  - Il y en aura des millions, au total... Pour ceux qui s'interrogent sur leur rôle, c'est désormais le défi des régions, qu'elles mettent en place des services pour les compétences dont elles disposent.

M. Jean Desessard.  - Voilà !

M. François Rebsamen, ministre.  - L'État à un rôle d'impulsion pour les projets structurants destinés à relancer l'économie, pour l'investissement social que représente la formation. L'Europe doit y prendre aussi sa part. Or nos programmes répondent à des besoins ponctuels et plus rarement à des besoins de long terme. C'est l'enjeu du rôle du chef de file des régions.

L'État doit impulser des systèmes structurants pour donner à la France de nouvelles générations de salariés capables de programmer et de coder. La demande est énorme et les États-Unis l'ont compris qui proposent une formation à de jeunes Français habitant autour de Paris. Heureusement, des chefs d'entreprises, en France aussi, ont ouvert des écoles dans le même but.

L'État doit contribuer, avec ses partenaires, à mettre en valeur des filières porteuses. Le plan de développement de l'apprentissage comporte à cet égard toute une série d'actions, comme la campagne de sensibilisation ou le décret sur les machines dangereuses, qui ont pour objet de lever des freins, de valoriser certaines filières.

Il n'y a pas que des problèmes financiers, même si les décisions de 2012 et 2013 n'étaient pas bonnes.

Mme Fabienne Keller.  - Ah !

M. Jean Desessard.  - C'est bien de le reconnaître !

M. François Rebsamen, ministre.  - La baisse n'a pas été aussi forte que certains l'ont dite en 2013, et nous avons enregistré une légère reprise en 2014. L'apprentissage et l'alternance sont des filières d'excellence, y compris pour les bacs + +... (Exclamations sur les bancs UMP)

C'est bien de le dire, mais que les chefs d'entreprises embauchent des jeunes en alternance ! Un jeune doit envoyer en moyenne 59 CV pour trouver un tel poste !

Mme Pascale Gruny.  - Cela coûte trop cher ! (On renchérit sur les bancs UMP)

M. François Rebsamen, ministre.  - Mais non ! Les grandes entreprises qui ont des usines en France et en Allemagne embauchent deux à trois fois plus d'apprentis outre-Rhin ! Cela s'explique par la différence de systèmes de formation. Chez nous aussi, l'apprentissage, je le répète, est une filière d'excellence !

M. Charles Revet.  - Dites-le à vos amis du gouvernement !

M. François Rebsamen, ministre.  - Nous mettons en place une bourse nationale de l'apprentissage sur le site de Pôle emploi. Nous avons augmenté, voire doublé certaines primes ; ce n'est donc pas un problème financier pour les entreprises. Luttons tous ensemble contre les a priori sur l'apprentissage et sur certains métiers. Il y a des métiers pénibles qui méritent des salaires correspondant au travail qu'ils exigent.

Avançons donc ensemble ! Nous sommes à la croisée des chemins. La robotisation menace des emplois mais apportera aussi des progrès de compétitivité, de nouvelles filières ou des relocalisations. Je suis convaincu que la France a tous les atouts en main : de grands groupes, un tissu de PME numériques dynamiques, des infrastructures de très haut niveau, un appareil de recherche puissant, une administration compétente, un système de formation rénové et performant.

Ces améliorations techniques et organisationnelles ne suffiront pas pour relever le défi. Il faudra faire évoluer les individus dans leurs compétences. Mettre le social au contact de l'entreprise, le doter d'un appareil de formation performant et réactif, tel est le défi que les réformes en cours et à venir ont pour objet de relever. (Applaudissements des bancs socialistes jusqu'à certains bancs à droite)

Prochaine séance demain, jeudi 29 janvier 2015, à 9 heures.

La séance est levée à 20 h 55.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du jeudi 29 janvier 2015

Séance publique

De 9 heures à 13 heures

Présidence : Mme Isabelle Debré, vice-présidente

Secrétaire : M. Jean-Pierre Leleux

1. Suite de la proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du président de la République et à le rendre non renouvelable (n°779, 2013-2014)

Rapport de M. Hugues Portelli fait au nom de la commission des lois (n°92, 2014-2015).

Résultat des travaux de la commission (n°93, 2014-2015).

2. Débat sur le thème : « La France dispose-t-elle encore du meilleur système de santé au monde ? »

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

3. Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 h 15

Présidence : Mme Françoise Cartron, vice-présidente

4. Proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy (n°473, 2013-2014)

Rapport de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois (n°233, 2014-2015).

Texte de la commission (n°234, 2014-2015).

Le soir

Présidence : M. Thierry Foucaud, vice-président

5. Projet de loi ratifiant l'ordonnance n°2014-806 du 17 juillet 2014 modifiant le chapitre unique du titre VIII du livre VII de la troisième partie du code de l'éducation relatif aux dispositions applicables à l'université des Antilles et de la Guyane pour y adapter le titre V de la loi n°2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche et les ordonnances n°2008-1304 du 11 décembre 2008 et n°2014-807 du 17 juillet 2014 modifiant la partie législative du code de l'éducation (Procédure accélérée) (n°148, 2014-2015)

Rapport de M. Jacques Grosperrin, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n°225, 2014-2015).

Texte de la commission (n°226, 2014-2015).

Analyse des scrutins publics

Scrutin n° 85 sur l'amendement n°20 rectifié bis, présenté par M. Jean-Noël Cardoux et plusieurs de ses collègues, à l'article premier de la proposition de loi relative à la protection de l'enfant.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :340

Suffrages exprimés :340

Pour :187

Contre :153

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (143)

Pour : 140

Contre : 1 - M. Alain Milon

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste (111)

Contre : 111

Groupe UDI-UC (43)

Pour : 43

Groupe CRC (19)

Contre : 19

Groupe RDSE (13)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 12

Groupe écologiste (10)

Contre : 10

Sénateurs non-inscrits (9)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 6 - MM. Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n° 86 sur l'amendement n°3, présenté par Mme Michelle Meunier et l'amendement n°32 rectifié ter, présenté par M. Alain Milon et plusieurs de ses collègues, tendant à rétablir l'article 12 de la proposition de loi relative à la protection de l'enfant.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :332

Suffrages exprimés :313

Pour :123

Contre :190

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (143)

Pour : 2 - MM. Alain Milon, René-Paul Savary

Contre : 139

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, président du Sénat, M. André Trillard

Groupe socialiste (111)

Pour : 109

Contre : 2 - M. Jacques Bigot, Mme Catherine Tasca

Groupe UDI-UC (43)

Contre : 43

Groupe CRC (19)

Abstentions : 19

Groupe RDSE (13)

Pour : 12

Contre : 1 - M. Gilbert Barbier

Groupe écologiste (10)

N'ont pas pris part au vote : 10

Sénateurs non-inscrits (9)

Contre : 5

N'ont pas pris part au vote : 4 - MM. Jean-Noël Guérini, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier

Scrutin n° 87 sur l'amendement n°33 rectifié ter, présenté par M. Alain Milon et plusieurs de ses collègues, tendant à rétablir l'article 12 de la proposition de loi relative à la protection de l'enfant.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :332

Suffrages exprimés :313

Pour :3

Contre :310

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (143)

Pour : 2 - MM. Alain Milon, René-Paul Savary

Contre : 139

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, président du Sénat, M. Michel Bouvard

Groupe socialiste (111)

Contre : 111

Groupe UDI-UC (43)

Contre : 43

Groupe CRC (19)

Abstentions : 19

Groupe RDSE (13)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 12

Groupe écologiste (10)

N'ont pas pris part au vote : 10

Sénateurs non-inscrits (9)

Contre : 5

N'ont pas pris part au vote : 4 - MM. Jean-Noël Guérini, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier