Droit des étrangers en France (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au droit des étrangers en France.

Discussion des articles

ARTICLE 1ER A

M. Alain Marc .  - La France devrait avoir le droit de choisir qui elle souhaite accueillir sur son territoire. C'est au Parlement qu'il appartient d'en débattre annuellement sur la base d'un rapport du Gouvernement portant sur tous les aspects de notre politique d'immigration et d'intégration : indicateurs chiffrés sur les flux d'entrée et de sortie, conditions démographiques, économiques, géopolitiques, sociales, culturelles, capacités d'accueil de notre pays, actions des collectivités territoriales, articulation avec la politique européenne.

Je suis cosignataire d'un amendement qui prévoit que le Parlement fixera le nombre d'étrangers admis à s'installer en France, pour chaque catégorie de séjour, à l'exclusion de l'asile.

M. le président.  - Amendement n°107 rectifié bis, présenté par Mmes D. Gillot, Tasca, Meunier et Lepage, M. Duran, Mmes Cartron et D. Michel, MM. Masseret et Labazée, Mmes Monier et S. Robert et MM. Cornano et Raoul.

Supprimer cet article.

Mme Dominique Gillot.  - Cet article n'a rien de normatif comme l'indique le verbe « pouvoir »... Le Parlement peut déjà débattre de ces questions ; l'article L. 110-11 du Ceseda rend les dispositions proposées inutiles.

Le débat sur ces sujets devient rapidement passionné, manichéen, caricatural, on l'a vu hier soir...

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - À qui la faute ?

Mme Dominique Gillot.  - Les intentions des rédacteurs de l'article posent question, j'ai lu qu'il était essentiel d'afficher... Est-il vraiment nécessaire d'avoir chaque année un débat qui divise et convoque des instincts primaires ? Dans un contexte de défiance et de stigmatisation des étrangers, agissons avec bienveillance.

M. François-Noël Buffet, rapporteur de la commission des lois.  - Avis défavorable. Il n'y a nul comportement primaire mais des divergences de vues. La représentation nationale reste légitime à débattre de ces questions.

Cet article est parfaitement de niveau législatif et respectueux de la Constitution étant entendu que le Gouvernement est seul maître en la matière.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification.  - Un rapport est déjà prévu par la loi. Et le Gouvernement se tient bien sûr à la disposition du Parlement pour échanger, comme nous l'avons fait en 2013 sur l'immigration professionnelle et la mobilité professionnelle.

Cet article n'est au surplus guère normatif. Avis favorable à sa suppression.

Mme Sylvie Robert.  - Les débats sur ces questions sont toujours vifs, peuvent être électrisés par des propos polémiques d'un autre temps qui empêchent l'analyse. Je soutiendrai cet amendement. Lorsque l'on parle des étrangers, la défiance l'emporte trop souvent.

Le texte dont nous débattons n'a plus rien à voir avec le texte initial, qui était équilibré ; ne demeure qu'un catalogue de mesures hostiles aux étrangers - je pense aux conditions de regroupement familial ou à l'aide médicale de l'État (AME).

Vous connaissez l'Eldorado de Laurent Gaudé : « Il n'était plus personne [...] Rien d'autre qu'un homme de plus, un pauvre homme de plus sur la route de l'Eldorado »... Combien de ces « pauvres hommes de plus » ont-ils, par le passé, contribué à la richesse de notre pays !

M. Pierre-Yves Collombat.  - La prudence et la modestie devrait inciter chacun à ne pas instrumentaliser ces questions. Un débat annuel ne changera pas grand-chose, au contraire... Le Conseil d'État regrettait en 2006 que tout sujet du 20 heures devenait une loi potentielle. Alors de grâce, n'en rajoutons pas...

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Le fait que ce sujet de société suscite les passions est précisément un argument en faveur d'un débat annuel. Oser affirmer le contraire est stupéfiant : le Parlement ne pourrait se prononcer sur une question essentielle pour nos concitoyens ? Sur la protection sociale, le débat public a grandement profité de l'instauration des lois de financement de la sécurité sociale... Il est hautement souhaitable que la représentation nationale s'empare du dossier de l'immigration. Fuir le débat n'est pas de nature à ramener la sérénité. Le pays, la démocratie ont beaucoup à gagner d'un débat annuel sur l'immigration.

M. François Bonhomme.  - Je rejoins le président Bas. Ce sujet suscite les passions : un débat parlementaire raisonné a justement vocation à l'apaiser, à l'abri des postures. Comme le disait Clemenceau, on ne débat honorablement que de sujets dont on peut débattre librement...

Mme Éliane Assassi.  - Ce qui me gêne, c'est que nous serions invités à rediscuter des orientations pluriannuelles de la politique d'immigration à cette occasion. Les politiques ont vocation à s'emparer de ces questions quand ils le jugent nécessaire ; il nous est loisible de demander à tout moment l'inscription d'un débat à l'ordre du jour. Nous voterons cet amendement.

Mme Dominique Gillot.  - Le Ceseda prévoit déjà un dialogue transparent entre le Parlement et le Gouvernement, via la remise d'un rapport. Il n'est pas utile d'encombrer la loi. La comparaison avec les lois de financement de la sécurité sociale ne tient pas : les personnes concernées ne sont pas les mêmes, ni aussi nombreuses...

L'amendement n°107 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi, Frassa et Cambon, Mme Canayer, MM. César et Danesi, Mmes Deroche, Des Esgaulx et Di Folco, MM. Dufaut, J. Gautier et Gilles, Mme Giudicelli, M. Joyandet, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, de Legge, Retailleau, Saugey et Soilihi, Mme Troendlé, MM. Lefèvre, B. Fournier, Mayet, Calvet, Dallier, Mandelli, Bouchet, Lemoyne, Genest, Allizard, Pierre, Nougein, Vogel, Masclet, Pillet, Morisset et Doligé, Mmes Procaccia et Duchêne, M. Duvernois, Mme Kammermann, MM. Falco et Charon, Mme Gruny, MM. Houel, Houpert, Kennel et D. Laurent, Mme Lopez, MM. A. Marc, Portelli, Raison et Revet, Mmes Mélot et Micouleau, MM. Bouvard et Chaize, Mme Estrosi Sassone, MM. J.P. Fournier, Laménie, Lenoir, Mouiller, Nègre, Savary et Pellevat, Mme Keller, M. Chasseing, Mme Imbert, M. Pointereau, Mme Morhet-Richaud, MM. Cornu et Delattre, Mmes Deseyne, Duranton et Primas et MM. Gournac, Vasselle et Gremillet.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 111-10. - Les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration et d'intégration peuvent faire l'objet d'un débat annuel au Parlement.

« Le Parlement prend alors connaissance d'un rapport du Gouvernement qui indique et commente, pour les dix années précédentes :

« a) Le nombre des différents visas accordés et celui des demandes rejetées ;

« b) Le nombre des différents titres de séjour accordés et celui des demandes rejetées et des renouvellements refusés ;

« c) Le nombre d'étrangers admis au titre du regroupement familial et des autres formes de rapprochement familial ;

« d) Le nombre d'étrangers admis aux fins d'immigration de travail ;

« e) Le nombre d'étrangers ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, ainsi que celui des demandes rejetées ;

« f) Le nombre d'attestations d'accueil présentées pour validation et le nombre d'attestations d'accueil validées ;

« g) Le nombre d'étrangers ayant fait l'objet de mesures d'éloignement effectives comparé à celui des décisions prononcées ;

« h) Les procédures et les moyens mis en oeuvre pour lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers ;

« i) Les moyens mis en oeuvre et les résultats obtenus dans le domaine de la lutte contre les trafics de main-d'oeuvre étrangère ;

« j) Les actions entreprises avec les pays d'origine pour mettre en oeuvre une politique de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement ;

« k) Les actions entreprises pour favoriser l'intégration des étrangers en situation régulière ;

« l) Le nombre des acquisitions de la nationalité française, pour chacune des procédures ;

« m) Des indicateurs permettant d'estimer le nombre d'étrangers se trouvant en situation irrégulière sur le territoire français.

« Le Gouvernement présente, en outre, les conditions démographiques, économiques, géopolitiques, sociales et culturelles dans lesquelles s'inscrit la politique nationale d'immigration et d'intégration. Il précise les capacités d'accueil de la France. Il rend compte des actions qu'il mène pour que la politique européenne d'immigration et d'intégration soit conforme à l'intérêt national.

« L'Office français de protection des réfugiés et apatrides et l'Office français de l'immigration et de l'intégration joignent leurs observations au rapport du Gouvernement.

« Le Sénat est consulté sur les actions conduites par les collectivités territoriales compte tenu de la politique nationale d'immigration et d'intégration.

« Le Parlement détermine, pour les trois années à venir, le nombre des étrangers admis à s'installer durablement en France, pour chacune des catégories de séjour à l'exception de l'asile, compte tenu de l'intérêt national. »

M. Roger Karoutchi.  - Le débat d'hier était passionné, dites-vous ? Ce n'est rien à côté des propos tenus dans la presse ou dans les meetings... La France a le droit de dire qui elle souhaite accueillir - le droit d'asile étant bien sûr mis à part. En quoi un débat parlementaire évaluant les conditions politiques, économiques de l'accueil des immigrés pour définir notre politique d'immigration serait-il illégitime ? Mieux vaut que le débat ait lieu au Parlement qu'ailleurs...

M. le président.  - Amendement n°149 rectifié, présenté par MM. M. Mercier et Zocchetto.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 111-10.  - Chaque année, une loi détermine pour les trois années à venir le niveau d'étrangers admis à séjourner en France, pour chacune des catégories de séjour à l'exception des étrangers admis au titre du regroupement familial, des autres formes de rapprochement familial et de l'asile. 

« Est annexé à cette loi un rapport du Gouvernement sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration et d'intégration qui indique et commente :

« a) Le nombre des différents visas accordés et celui des demandes rejetées ;

« b) Le nombre des différents titres de séjour accordés et celui des demandes rejetées et des renouvellements refusés ;

« c) Le nombre d'étrangers admis au titre du regroupement familial et des autres formes de rapprochement familial ;

« d) Le nombre d'étrangers admis aux fins d'immigration de travail ;

« e) Le nombre d'étrangers ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, ainsi que celui des demandes rejetées ;

« f) Le nombre d'attestations d'accueil présentées pour validation et le nombre d'attestations d'accueil validées ;

« g) Le nombre d'étrangers ayant fait l'objet de mesures d'éloignement effectives comparé à celui des décisions prononcées ;

« h) Les procédures et les moyens mis en oeuvre pour lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers ;

« i) Les moyens mis en oeuvre et les résultats obtenus dans le domaine de la lutte contre les trafics de main-d'oeuvre étrangère ;

« j) Les actions entreprises avec les pays d'origine pour mettre en oeuvre une politique de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement ;

« k) Les actions entreprises pour favoriser l'intégration des étrangers en situation régulière ;

« l) Le nombre des acquisitions de la nationalité française, pour chacune des procédures ;

« m) Des indicateurs permettant d'estimer le nombre d'étrangers se trouvant en situation irrégulière sur le territoire français.

« Le Gouvernement présente dans ce rapport les conditions démographiques, économiques, géopolitiques, sociales et culturelles dans lesquelles s'inscrit la politique nationale d'immigration et d'intégration et précise les capacités d'accueil de la France. Il rend compte des actions qu'il mène pour que la politique européenne d'immigration et d'intégration soit conforme à l'intérêt national.

« L'Office français de protection des réfugiés et apatrides et l'Office français de l'immigration et de l'intégration joignent leurs observations au rapport du Gouvernement.

« Le Sénat est consulté sur les actions conduites par les collectivités territoriales compte tenu de la politique nationale d'immigration et d'intégration. »

M. Michel Mercier.  - Il faut essayer d'aborder ces sujets le plus sereinement possible. Le Parlement est le lieu où la politique d'immigration et d'intégration trouverait le mieux à être discutée.

Mme Dominique Gillot.  - La loi le permet déjà !

M. Michel Mercier.  - Le ministre de l'intérieur nous a présenté hier les merveilleux résultats de sa politique ; à se demander pourquoi il nous propose une nouvelle loi... Nous, nous voulons que des dispositions soient prises qui ne figurent pas dans celle-ci. Et il est naturel que le Parlement débatte.

Certaines personnes ont un droit individuel à être accueillies, au titre de l'asile ou pour motifs familiaux. S'agissant des autres, il est légitime de fixer des niveaux en fonction de l'état de notre économie et de nos capacités d'accueil, car nous ne pouvons offrir à tous de meilleures conditions de vie que chez eux. C'est de la planification. Débattons-en, mieux vaut anticiper que subir.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Les amendements ont le même objectif : que le Parlement puisse fixer ce que l'on appelle communément des quotas. La commission a identifié une difficulté relative au regroupement familial et à l'asile mais l'amendement n°149 a été rectifié depuis ; je suis prêt à donner un avis personnel favorable.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État.  - Sur le premier point, je ne peux que redire que le Gouvernement est à la disposition du Parlement pour débattre.

Les amendements vont toutefois plus loin, puisqu'ils proposent que le Parlement établisse des quotas -  hors asile et regroupement familial  - même si M. Mercier évoque des niveaux... L'idée est ancienne. En 2008, Brice Hortefeux avait installé une commission présidée par P. Mazeaud pour réfléchir à la politique d'immigration : elle a jugé les quotas irréalisables ou sans intérêt et relevé qu'aucun pays européen n'y avait recours. Les raisons invoquées alors restent valables.

L'immigration familiale est garantie par des principes protégés par la Constitution et par nos engagements internationaux ; des quotas les méconnaitraient.

Appliquer des quotas aux étudiants, comme l'a fait la circulaire du 21 mai 2011, nous priverait de talents et limiterait le rayonnement de la France dans le monde.

Quant à l'immigration professionnelle, la délivrance des autorisations de travail permet déjà de la maîtriser. Les pays, qui comme le Canada, pratiquent des quotas en matière économique, font face à des flux d'entrée sur leur territoire bien supérieurs (M. Michel Mercier en convient). Avis défavorable aux deux amendements.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La rédaction de ces amendements justifie pleinement ma position sur le précédent. On fait comme si le problème c'était l'immigration sud-américaine... Le problème, ce sont des milliers de miséreux qui sont à nos frontières !

M. Roger Karoutchi.  - Ils relèvent de l'asile, ce n'est pas pareil...

M. Pierre-Yves Collombat.  - Le texte ne le traite pas, c'est ce que je lui reproche. On continue de mouliner les mêmes questions. Débattre oui, mais pas pour ergoter une énième fois sur le regroupement familial ou l'immigration de travail... À continuer ainsi, nous ne réglerons rien.

M. Jean-Yves Leconte.  - 209 000 titres d'admission au séjour ont été délivrés en 2014 : 92 000 pour raisons familiales, 66 000 pour études, 13 000 divers, 19 000 pour des raisons humanitaires et 19 000 pour motifs économiques. C'est dire que nous avons peu de marges de manoeuvre. Les amendements laissent croire le contraire... On ne peut tout simplement pas remettre en cause nos principes juridiques de protection de la vie familiale. En outre, ce sont les entreprises qui définissent les besoins de main d'oeuvre de notre économie. Et plafonner l'immigration de travail nous priverait de talents.

M. Roger Karoutchi.  - On essaie de caricaturer nos propositions... Le vrai sujet, c'est évidemment celui pointé par M. Collombat, mais il relève du droit d'asile ! Le Gouvernement annonce 31 000 réfugiés. J'affirme que ce sera le double dans deux ans, compte tenu des flux aux frontières de l'Europe.

Mais pour revenir au texte -  dont je n'ai pas choisi le contenu -, je maintiens que c'est à la représentation nationale de dire ce qui est bien pour le pays, pas au Medef ou à la corbeille de la Bourse -  un comble d'entendre un membre du parti socialiste dire cela ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Bruno Retailleau.  - Il n'a jamais été question d'instaurer des quotas pour l'asile, la chose serait d'ailleurs juridiquement impossible.

M. Jean-Yves Leconte.  - Et les mariages ?

M. Bruno Retailleau.  - Et contrairement à ce que d'aucuns disent, certains pays pratiquent les quotas. Depuis quand la politique française est-elle déterminée en fonction de ce qui se fait ailleurs ? Définir des quotas est du ressort du Parlement, émanation de la souveraineté populaire. Quoi de plus légitime ? La question de l'immigration traverse la société française, le peuple français. Veut-on lui donner le sentiment qu'il est tenu à l'écart ? J'affirme que plus les choses seront débattues ici plutôt que dans la rue, plus le débat gagnera en sérénité, au lieu d'être fondé sur la peur, les slogans et les batailles de chiffres. Pour notre part, nous voterons ces amendements.

M. Philippe Kaltenbach.  - La ministre l'a démontré : des quotas ne sont pas réalisables en France. Le chiffre de 200 000 est en quelque sorte incompressible. Les étudiants étrangers ne sont que 65 000 : c'est peu pour un grand pays comme le nôtre et c'est moins que le nombre d'étudiants français que nous envoyons à l'étranger... Quant au regroupement familial, nos principes nous empêchent d'y faire obstacle. Les pays qui mettent en place des quotas sont des pays qui font appel à une immigration de travail massive. Les chiffres sont là, nous n'avons pas de marge de manoeuvre ; il ne faut pas jeter de l'huile sur le feu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - On voit bien les divergences d'appréciation entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement... le nombre d'étrangers en situation régulière est de l'ordre de 250 000 ; 47 % d'entre eux sont accueillis en France au nom du regroupement familial au sens large. Dire qu'on ne peut rien faire, qu'on peut se contenter d'agir au fil de l'eau, c'est accepter le statu quo. C'est ce que propose le Gouvernement. Nous soutenons qu'on peut inverser la tendance, en privilégiant l'immigration économique. À la représentation nationale d'en débattre, sereinement, sans passion. Nous voulons parallèlement une immigration familiale contenue et une lutte sans répit contre l'immigration irrégulière.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Réunir une majorité suppose que les deux groupes dont émanent ces deux amendements très proches s'entendent... D'ores et déjà, nous avons institutionnalisé un débat parlementaire annuel, c'est un pas considérable. Nous savons bien qu'aller au bout de la démarche suppose une révision constitutionnelle, mais nous ne voulons pas attendre. Comme c'est le cas pour la discussion du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons déterminé les documents qui devront être transmis par le Gouvernement. Reste que cette discussion ne doit pas se résumer à un colloque parlementaire, elle doit déboucher sur un vote.

Le droit à mener une vie familiale normale existe, certes, mais il ne fait pas l'objet d'un accord universel. Nous devons fixer des critères.

M. Philippe Kaltenbach.  - C'est déjà le cas !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Restent deux difficultés : le droit d'asile et le regroupement familial, garantis par la Constitution. Mais ici comme en matière de dépenses de santé, le législateur doit pouvoir fixer des objectifs de maîtrise des flux. Cela n'implique nullement de violer nos engagements internationaux. Cela allait certainement de soi dans l'esprit de M. Karoutchi. Je lui propose de rectifier son amendement pour le rendre explicite.

L'amendement n°1 rectifié ter pourrait être modifié pour ajouter que « l'objectif en matière de regroupement familial est établi dans le respect des principes qui s'attachent à ce droit ». Ce qui ne nous empêche pas de resserrer les conditions du regroupement familial.

M. le président.  - La parole est à M. Karoutchi que je prie, comme nos autres collègues de respecter les temps de parole. D'autant qu'avec un collègue socialiste, il est celui qui a voulu les réduire...

M. Roger Karoutchi.  - Je les respecte !

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Le président de la commission n'est pas tenu par ces temps de parole...

M. Jean-Yves Leconte.  - Soit, mais vous ne parliez pas au nom de la commission...

M. Philippe Kaltenbach.  - Votre intervention était partisane.

M. Roger Karoutchi.  - Modification acceptée, je n'entends aucunement porter atteinte à nos principes constitutionnels.

L'amendement n°1 rectifié quater est adopté et l'article premier A est ainsi rédigé.

L'amendement n°149 rectifié devient sans objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi et Cambon, Mme Canayer, MM. César et Danesi, Mmes Deroche, Des Esgaulx et Di Folco, MM. Dufaut, Frassa, J. Gautier et Gilles, Mme Giudicelli, M. Joyandet, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, Lefèvre, de Legge, Retailleau et Soilihi, Mme Troendlé, MM. B. Fournier, Mayet, Calvet, Dallier, Mandelli, Bouchet, Lemoyne, Genest, Allizard, Pierre, Vogel, Pillet, Morisset, Doligé et Charon, Mmes Procaccia et Duchêne, M. Duvernois, Mme Kammermann, MM. Falco et Bonhomme, Mme Gruny, MM. Houel, Houpert, Kennel et D. Laurent, Mme Lopez, MM. A. Marc, Portelli, Raison et Revet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Chaize, Mme Estrosi Sassone, MM. Laménie, Lenoir, Mouiller, Nègre, Pellevat, Savary, Chasseing et Cornu, Mmes Imbert et Morhet-Richaud, MM. Pointereau et Delattre, Mme Deseyne, M. Dassault, Mme Duranton et MM. Vaspart, Gournac, Vasselle et Gremillet.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complétée par un article L. 211-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 211-1-... - L'étranger qui souhaite s'installer durablement sur le territoire français doit, avant son entrée en France, apporter la preuve de sa capacité d'intégration à la société française. Il doit justifier, à cette fin :

« 1° D'une connaissance suffisante de la langue française ;

« 2° D'une adhésion aux valeurs de la République et aux valeurs essentielles de la société française ;

« 3° De sa capacité à exercer une activité professionnelle ou, s'il ne l'envisage pas, de son autonomie financière. »

M. Roger Karoutchi.  - Pour être acceptés sur le territoire national, les étrangers doivent connaître suffisamment la langue française - mettons au niveau A2 -, adhérer aux valeurs de la République, être capables d'exercer une activité professionnelle... Nous fixons des conditions avec cet amendement n°5 rectifié ter. Ces conditions ne s'appliquent pas aux demandeurs d'asile ou aux candidats au regroupement familial.

M. le président.  - Amendement identique n°150 rectifié, présenté par M. M. Mercier et les membres du groupe UDI-UC.

M. Michel Mercier.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis favorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur.  - Avis défavorable. Ces amendements obligent les étrangers à faire la preuve de leur capacité d'intégration dans la société française avant leur arrivée en France, puisqu'ils en font une condition de l'obtention d'un visa de long séjour.

Le Gouvernement, je vous rassure, est sensible à la nécessité d'une préparation plus efficace dès le pays d'origine pour favoriser l'intégration des étrangers. Mais l'IGA et l'IGAS ayant jugé le dispositif pré-Contrat d'accueil et d'intégration (CAI) inefficace et inégalitaire, nous souhaitons y substituer un nouveau dispositif plus juste et plus opérationnel, assorti d'un support d'information gratuit et dématérialisé pour indiquer clairement aux candidats à l'immigration leurs droits et leurs devoirs. Le parcours d'intégration sera mieux préparé, les prestations renforcées à l'arrivée en France et les exigences de niveau de langue relevées.

Le niveau B1, monsieur Karoutchi, est celui aujourd'hui exigé pour la naturalisation. Il n'y a pas lieu d'imposer les mêmes exigences aux candidats à un visa de long séjour, pas plus qu'il n'est envisageable d'opposer une telle condition à la délivrance d'un visa de long séjour à un conjoint de Français.

L'intégration est indissociable de l'accueil. Elle ne saurait être appréciée de façon abstraite, sauf à vouloir en faire une barrière. Elle se conçoit dans le cadre d'un parcours jalonné d'étapes, c'est l'objet même du projet de loi.

M. Pierre-Yves Collombat.  - La laïcité faisant, je suppose, partie des valeurs de la République, prévoyez-vous, monsieur Karoutchi, une formation spécifique pour les candidats à l'installation en Alsace-Moselle ? Ce que vous proposez ne me paraît ni opportun, ni efficace...

M. Roger Karoutchi.  - Parler de valeurs de la République au Sénat est devenu polémique. Continuons, il n'y aura bientôt plus ni République ni valeurs !

M. Patrick Abate.  - N'exagérons rien !

M. Roger Karoutchi.  - Je ne cesse, à la commission des finances, de dénoncer le manque de moyens consacrés à l'intégration. J'ai fait plusieurs rapports - qui sont allés remplir les tiroirs, comme les autres... - soulignant que l'Ofii n'a pas les moyens de sa mission. On porte le niveau exigé de A1 à A2, mais sans le vérifier par un examen ! On se contente que les étrangers suivent les cours, sans se soucier du niveau qu'ils atteignent ! Arrêtons cet irréalisme.

Demander à ceux qui veulent s'intégrer en France de connaître suffisamment le français pour se débrouiller sans être tenus par des réseaux et de partager les valeurs de la République, est-ce surréaliste ? Nous ne voulons pas de ceux qui n'aiment ni la République ni la France ! (Applaudissements à droite)

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Nous non plus, je vous rassure, inutile de créer de faux clivages. Mais comment atteindre vos objectifs ? De nouveaux arrivants, désireux de s'intégrer, d'adhérer aux valeurs de la République, peuvent très bien apprendre le français dès lors qu'on leur offre les conditions d'un apprentissage facilité. Nous avons rehaussé le niveau requis dans le cadre du contrat d'intégration mis en place par le Gouvernement Fillon en 2003. Mais vous faites de la maitrise de la langue un obstacle, en refusant la délivrance d'un titre de séjour à ceux qui n'auraient pas acquis un certain niveau, alors que pour nous, la langue doit être un instrument d'intégration sur le territoire national.

M. Guy-Dominique Kennel, rapporteur pour avis.  - C'est en France que les exigences linguistiques sont les plus basses - à tel point que le niveau A1.1 ne figure même pas dans le référentiel européen !

Qu'est-ce que le niveau A1 ? C'est savoir, au bout d'un an, écrire une courte carte postale simple, inscrire son nom, sa nationalité et son adresse sur une fiche d'hôtel... Franchement ! La France doit avoir d'autres exigences.

Un rapport conjoint de l'IGA et de l'Igas constatait en octobre 2013 les insuffisances de la formation linguistique, alors que la langue est l'obstacle principal à l'intégration. Un peu d'ambition ! Pour rechercher un emploi, pour la vie quotidienne, il faut pour s'exprimer un minimum ! Le niveau A2, ce n'est que savoir écrire une note, un message simple et court, une lettre personnelle très simple, par exemple pour dire merci...

Mme Éliane Assassi.  - Pouvons-nous revendiquer ce niveau en anglais ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Revenons aux faits. C'est un Gouvernement de droite qui a fixé en 2003 le niveau A1.1 dans le contrat d'intégration.

M. Guy-Dominique Kennel, rapporteur pour avis.  - Faisons mieux !

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - C'est ce que nous efforçons de faire, dans tous les domaines (Sourires)

Le niveau A1.1, rudimentaire, n'est pas à la hauteur d'un véritable contrat d'intégration. Seul le Luxembourg demande un niveau aussi faible. C'est pourquoi nous exigerons désormais le niveau A2, gage d'autonomie. Il correspond à la capacité d'exprimer des messages plus élaborés relatifs à sa vie quotidienne et, donc, d'accomplir seul toutes les tâches administratives. C'est le niveau requis en Italie et en Autriche.

Une enveloppe de 21 millions d'euros sur cinq ans a été affectée, c'est un effort important et réaliste.

Débattons sur la base de données incontestables ; les définitions des niveaux que je vous ai données sont celles tirées de la nomenclature (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Yves Leconte.  - Merci au ministre d'avoir rappelé le cadre de référence européen, que certains avaient quelque peu caricaturé.

Pour avoir vécu à l'étranger, je sais par expérience qu'une langue s'apprend sur place. Quant aux valeurs de la République, elles sont partagées lorsqu'elles sont, non pas théoriques, mais vécues - c'est-à-dire quand on respecte les droits de chacun.

Les amendements identiques nos5 rectifié ter et 150 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.

ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°148 rectifié, présenté par M. M. Mercier et les membres du groupe UDI-UC.

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Chaque étranger contribue financièrement aux formations qu'il doit suivre, à la hauteur de ses ressources, selon des modalités définies par décret.

M. François Zocchetto.  - Nous souhaitons que les étrangers ayant conclu un contrat d'intégration républicaine participent au financement des formations civiques et linguistiques dont ils bénéficient, à la mesure de leurs moyens.

L'amendement n°148 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°108 rectifié bis, présenté par Mmes D. Gillot, S. Robert, Meunier, Tasca et Lepage, MM. Duran, Masseret et Labazée, Mme Monier et M. Raoul.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger qui s'engage dans le parcours mentionné au présent article conclut avec l'État un contrat d'intégration républicaine par lequel il s'engage à suivre ces formations.

Mme Dominique Gillot.  - Bien que les étrangers aient vocation à s'insérer dans les dispositifs de droit commun, les députés avaient jugé utile de préciser qu'ils concluent un contrat d'intégration s'engageant à suivre un parcours de formation, et bénéficient d'un accompagnement adapté pour faciliter leur accueil et leur intégration. Il s'agit d'un engagement réciproque, avec de la bienveillance de part et d'autre.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. La commission a souhaité simplifier le contrat en supprimant la notion de « parcours », juridiquement floue. Les engagements pris par contrat sont par définition individuels.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis favorable.

M. Roger Karoutchi.  - Je ne suivrai pas la commission. Tout ce qui peut faire en sorte que les nouveaux arrivants s'engagent, expriment la volonté de s'intégrer, se sentent concernés et impliqués, va dans le bon sens.

M. Philippe Kaltenbach.  - Très bien.

Mme Evelyne Yonnet.  - Merci à M. Karoutchi. La position de la commission me paraît contradictoire...

L'amendement n°148 rectifié prévoit que l'on fait payer leur formation aux étrangers. Comment vont-ils faire, quand on sait que la plupart sont dans une grande détresse ?

M. René Vandierendonck.  - Les formations les plus efficaces sont celles qui s'adaptent. Rappelez-vous du programme européen d'activation de compétences (PAC), destiné aux femmes avec enfants. Le droit commun oui, mais appliqué de manière spécifique pour les étrangers. Quant à demander aux étrangers de contribuer au financement de leur formation, c'est totalement démagogique.

Mme Éliane Assassi.  - Nous ne voterons pas plus cet amendement que le précédent. La CNCDH a discuté la pertinence juridique de la notion de « contrat » pour qualifier les contrats d'accueil et d'intégration.

De fait, ce contrat n'emporte aucun effet de droit ; il n'est pas opposable à l'administration, laquelle ne peut invoquer son absence de respect pour justifier le refus de délivrance d'un titre.

Le Conseil d'État observe, lui, que ce contrat, initialement facultatif et pris sur la base du volontariat, est devenu obligatoire ; résultat, il est rapidement devenu déséquilibré. Il constitue un « contrat injonction », voire un « contrat allégeance ».

Mme Catherine Tasca.  - Je salue la position de M. Karoutchi sur cet amendement. Nous devons tout faire pour que l'étranger qui arrive chez nous s'intègre, qu'il partage notre langue et nos valeurs. On ne peut exiger de lui qu'il sache tout d'emblée - d'ailleurs, on n'est pas aussi exigeants envers nos petits écoliers. En revanche, il est parfaitement légitime qu'il s'engage volontairement dans un parcours.

On voit ce qui nous sépare : c'est le regard que nous portons sur les étrangers. Vous accumulez les obstacles, nous incitons ceux qui arrivent à cheminer dans le bon sens.

M. René Vandierendonck.  - Très bien.

M. Joël Guerriau.  - Je reviens sur l'amendement n°148 rectifié. La contribution financière des étrangers à la formation ne sera pas systématique, mais indexée sur leurs ressources. Rien n'interdit la gratuité. Il n'y a pas de raison de le refuser. Laissons à nos territoires la possibilité de s'adapter.

M. Christian Manable.  - Ce débat est surréaliste. Mon beau-père, jeune maçon italien, est arrivé en France en 1945, sans savoir le français. Il a appris peu à peu à le parler, jamais à l'écrire. Et pourtant, il a participé à la reconstruction de la France, à l'essor des Trente Glorieuses, et il savait parfaitement payer ses impôts en France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, communiste républicain et citoyen et RDSE)

Mme Dominique Gillot.  - Je suis troublée par les propos de Mme Assassi. À mes yeux, c'est une manière de respecter la personne, de la traiter en personne responsable, que de demander cet engagement.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Je rappelle que nous parlons ici d'un problème de rédaction. Sur le fond, nous sommes tous d'accord ! Nous répétons à longueur de débats que la loi n'est pas assez claire, essayons donc de bien légiférer. La notion de parcours n'ajoute rien à celle de contrat, qui traduit la nature de l'engagement passé avec la personne.

L'amendement n°108 rectifié bis est adopté.

M. Philippe Kaltenbach.  - Très bien !

M. Félix Desplan.  - Je regrette que la commission ait supprimé l'alinéa selon lequel les étrangers s'installant outre-mer devaient suivre une initiation à l'histoire et à la géographie de ces territoires, sous prétexte qu'il relevait du règlement. Mon amendement sur ce sujet s'est vu opposer l'article 41.

Toute démarche d'intégration implique pourtant de connaître les spécificités socio-culturelles, les codes du territoire où l'on s'installe : ceux de Guyane, de Mayotte, de Polynésie, ne sont pas ceux de la France hexagonale. J'espère être entendu par le Gouvernement.

L'article premier, modifié, est adopté.

L'article 2 est adopté.

ARTICLE 3

M. Roland Courteau .  - La carte de séjour pluriannuelle, qui consacre un engagement du Gouvernement, répond concrètement aux problèmes des files d'attente interminables devant nos préfectures et de la situation précaire des étrangers installés régulièrement en France. Pourquoi imposer à des centaines de milliers de gens l'angoisse de devoir renouveler leur titre chaque année ? La création de ce titre pluriannuel mettra fin à la thrombose des préfectures, les services pourront se consacrer plus efficacement à la lutte contre la fraude. D'autant qu'ils disposeront désormais des mêmes informations que les administrations fiscales et sociales.

La stabilité du séjour est une condition de l'intégration.

Efficacité et fidélité aux valeurs républicaines, voilà l'esprit de la mesure voulue par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Alain Marc .  - Cet article traduit une promesse de campagne du président de la République. Une carte pluriannuelle, à la délivrance quasi automatique, créera un appel d'air, l'illusion d'un séjour acquis de manière quasi-définitive dès la première année. Elle ne fera qu'encourager l'afflux des immigrés, sous prétexte de réduire les files d'attente devant les préfectures.

L'article 3 est adopté.

ARTICLE 4

M. Alain Marc .  - Il faut pouvoir refuser un titre de séjour lorsque le contingent fixé par le Parlement aura été atteint.

M. le président.  - Amendement n°65, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 6

Supprimer le mot :

maximale

Mme Christine Prunaud.  - L'annuité de la carte de séjour entraîne un examen fastidieux et répétitif des conditions de séjour. Si nous pensons, avec le Défenseur des droits et de nombreuses associations, qu'une carte de séjour de dix ans, seule, mettrait fin à la précarité dans laquelle vivent les étrangers, nous sommes favorables à l'instauration d'une carte pluriannuelle, dont la durée de principe doit être clairement fixée à quatre ans, sans exception. Pour que la réforme ait du sens, il faut prévoir la durée la plus longue possible.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Il y a des cas dans lesquels c'est impossible : pensez aux étudiants. Ils ne peuvent être éligibles à la carte pluriannuelle qu'à partir du niveau master.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis défavorable.

L'amendement n°65 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°146, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'étranger qui séjourne au titre de l'un des documents mentionnés aux 2° et 3° du présent article peut solliciter la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle ou d'une carte de résident, dans les conditions prévues, respectivement, à l'article L. 313-17 et aux articles L. 314-8 à L. 314-12, sous réserve des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code. »

Mme Dominique Gillot.  - Cet amendement rétablit une disposition précisant les conditions de passage du visa de long séjour ou de la carte de séjour temporaire au titre pluriannuel ou à la carte de résident.

La complexité du parcours administratif des étrangers n'améliore ni la productivité, ni l'image des préfectures. Simplifions !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable, le Ceseda est déjà clair sur le passage du titre temporaire à la carte de résident. Je vous renvoie à ses articles L. 313-17, L. 314-8 et L. 314-12.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis favorable, cette rédaction, qui rétablit celle de l'Assemblée nationale, est plus conforme à l'esprit du texte du Gouvernement.

L'amendement n°146 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi et Cambon, Mme Canayer, MM. César et Danesi, Mmes Deroche, Des Esgaulx et Di Folco, MM. Dufaut, Frassa, J. Gautier et Gilles, Mme Giudicelli, M. Joyandet, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, de Legge, Retailleau et Soilihi, Mme Troendlé, MM. Lefèvre, B. Fournier, Mayet, Calvet, Dallier, Mandelli, Bouchet, Lemoyne, Genest, Allizard, Pierre, Vogel, Pillet, Morisset, Doligé et Charon, Mmes Procaccia, Duchêne et Kammermann, M. Falco, Mme Gruny, MM. Houel, Houpert, Kennel et D. Laurent, Mme Lopez, MM. A. Marc, Portelli et Revet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Chaize, Mme Estrosi Sassone, MM. J.P. Fournier, Laménie, Lenoir, Mouiller, Nègre, Savary, Pellevat et Chasseing, Mme Morhet-Richaud, MM. Pointereau et Delattre, Mmes Deseyne, Duranton et Primas et MM. Vaspart, Gournac, Vasselle et Gremillet.

Après l'alinéa 8

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 311-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 311-1-... - Toute demande de visa de long séjour ou de carte de séjour mentionnés à l'article L. 311-1 peut être rejetée lorsque, pour la catégorie de séjour concernée, le nombre annuel des étrangers admis à s'installer durablement en France, fixé par le Parlement en application de l'article L. 111-10, a été atteint. La demande peut faire l'objet d'un réexamen l'année suivante. »

M. Roger Karoutchi.  - Il n'a plus d'objet, puisque le Sénat a rejeté les plafonds... Ce que je regrette infiniment.

L'amendement n°3 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°44 rectifié bis, présenté par MM. Leconte, Yung et Sutour, Mmes Yonnet et Espagnac, M. Durain et Mme Lepage.

I. - Après l'alinéa 15

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : « ou futur conjoint » ;

...) Après le mot : « fraude », sont insérés les mots : « , d'opposition à mariage, » ;

II.  -  Alinéa 16

Rétablir le b) dans la rédaction suivante :

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint ou futur conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. » ;

III.  -  Alinéa 17

Après les mots :

les conjoints

insérer les mots :

ou futurs conjoints

M. Jean-Yves Leconte.  - Les conditions d'obtention d'un visa en vue de la célébration d'un mariage franco-étranger en France font l'objet de pratiques consulaires disparates. Il est fréquent que le Consulat exige la production d'un certificat de publication des bans, d'un certificat de non-opposition à mariage, de preuves de l'ancienneté de la relation ou de la réalité concrète du projet de mariage, portant ainsi atteinte au droit à mener une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. En outre, les motifs de refus, souvent stéréotypés et peu explicites, reposent sur la satisfaction de conditions matérielles ou sur l'appréciation du passé migratoire du futur conjoint étranger, non sur l'existence d'un projet d'union sur le territoire français.

D'où une différence de traitement entre les ressortissants français souhaitant se marier avec un étranger, selon que celui-ci est astreint ou non à présenter un visa. En outre, alors que certains États interdisent le mariage entre personnes de même sexe, rien n'est fait pour que le futur conjoint étranger puisse entrer sur le territoire pour s'y marier.

Il s'agit donc de sécuriser la délivrance d'un visa long séjour en vue du mariage et de l'établissement en France. Par cohérence, l'amendement rétablit l'obtention de plein droit du visa de long séjour au conjoint de Français, supprimé par la commission des lois du Sénat, et l'étend au futur conjoint.

M. le président.  - Amendement n°127, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 16

Rétablir le b) dans la rédaction suivante :

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. » ;

M. Philippe Kaltenbach.  - Cet amendement rétablit un alinéa supprimé en commission, qui prévoit la délivrance de plein droit du visa de long séjour au conjoint de Français remplissant les conditions prévues à l'article L. 211-2-1, ce qui n'obère en rien le pouvoir d'appréciation des autorités diplomatiques et consulaires puisque le visa peut être refusé en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public.

Nous ne sommes pas de ceux qui souhaitent décourager le mariage de Français avec des étrangers.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'amendement n°44 rectifié bis encouragerait la fraude et les mariages de complaisance, puisqu'il suffirait de déclarer son intention de se marier pour obtenir le droit de séjourner en France durant un an. Les difficultés dans les Consulats sont révélatrices d'un dysfonctionnement qui relève plutôt des bonnes pratiques administratives.

Avis défavorable à l'amendement n°127 : il est contradictoire d'écrire que le visa est délivré « de plein droit », puisqu'il peut être refusé en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis défavorable à l'amendement n°44 rectifié bis, superflu. Le bénéfice d'un visa de long séjour de plein droit est la conséquence du droit à la vie privée et familiale découlant du mariage, mais la seule déclaration d'intention ne saurait suffire. Des instructions ont été données aux postes consulaires pour faciliter la délivrance de visas aux futurs conjoints dans les pays ne reconnaissant pas le mariage des personnes de même sexe.

Avis favorable à l'amendement n°127, qui rétablit la rédaction de l'Assemblée nationale. La délivrance de plein droit ne prive pas les autorités consulaires de leur pouvoir d'appréciation ; ils peuvent procéder à toutes les vérifications nécessaires.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je voterai ces deux amendements qui simplifient une casuistique législative bien compliquée, d'autant moins justifiée qu'il s'agit de flux limités.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je ne comprends pas l'opposition du rapporteur à l'amendement n°127. C'est un droit fondamental que de vivre avec son conjoint, sauf dans les cas prévus par la loi : fraude, annulation du mariage, menace à l'ordre public. En dehors de ces cas, il se déduit évidemment que le visa de long séjour doit être délivré de plein droit aux conjoints de Français. J'attends encore vos arguments, monsieur le rapporteur.

Vous nous opposez qu'il faudrait conserver le pouvoir d'appréciation. C'est le cas ! Pourquoi la commission persiste-t-elle donc dans son refus de l'amendement n°127 ?

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Cher président Sueur, il y a une contradiction dans les termes de l'amendement. Si la délivrance d'un visa est de plein droit, elle ne souffre aucune condition.

Or elle ne saurait être automatique, les services consulaires doivent pouvoir contester la réalité du mariage quand cela s'impose.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cet amendement est pourtant clair !

L'amendement n°44 rectifié bis n'est pas adopté.

M. Joël Guerriau.  - Le mariage, c'est le principe de base, est tout de même fondé sur la vie commune. Je comprends bien la position du président Bas mais j'avoue que je suis embarrassé. Je voterai donc pour l'amendement. Après tout, on ne vit pas ensemble par contrainte... (Mme Eliane Assassi rit)

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°127, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°45 rectifié bis, présenté par MM. Leconte, Yung et Sutour, Mmes Yonnet et Espagnac, M. Durain et Mme Lepage.

Après l'alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À l'avant-dernier alinéa, après les mots : « marié en France », sont insérés les mots : « ou à l'étranger à condition que le mariage ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français » ;

M. Jean-Yves Leconte.  - Les conjoints de Français dont le mariage a été célébré à l'étranger doivent pouvoir obtenir un visa de long séjour lorsque leur mariage a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. Cette discrimination à leur endroit, relevée par le Conseil d'État, doit cesser.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - L'article L.211-2-1 du Ceseda est clair : l'étranger, conjoint de Français, doit solliciter un visa auprès du consulat du pays où le mariage a été célébré. Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Yves Leconte.  - On n'a pas le droit de donner ce genre de réponses ! Imaginons une Centrafricaine, vivant au Canada, obligée de rentrer à Bangui, pour obtenir son visa alors que son mariage est reconnu par la France. C'est profondément injuste : je pourrais vous citer quarante cas analogues.

L'amendement n°45 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Monsieur Karoutchi, nous abordons la discussion de votre amendement n°2 rectifié ter. Votre amendement n°1 rectifié quater ayant été adopté, vos amendements nos3 rectifié ter et 2 rectifié ter ne tombent pas. Voulez-vous les défendre ?

M. Roger Karoutchi.  - On n'y comprend plus rien ! Nous avons tous compris que mon amendement n°1 rectifié quater sur les plafonds avait été rejeté. Si ce n'est pas le cas, nous débattons depuis tout à l'heure à partir de bases fausses. Je demande une suspension de séance pour mettre les choses au clair.

M. le président.  - Soit.

La séance est suspendue quelques instants.

M. Roger Karoutchi.  - Monsieur le président, je vous prie d'excuser mon emportement... Il y a eu un peu de trouble. Je vous remercie de me confirmer que mon amendement n°1 rectifié quater, fondateur, a été adopté.

L'amendement n°3 rectifié ter, de même nature, demeure retiré.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi et Cambon, Mme Canayer, MM. César et Danesi, Mmes Deroche, Des Esgaulx et Di Folco, MM. Dufaut, Frassa, J. Gautier et Gilles, Mme Giudicelli, M. Joyandet, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, de Legge, Retailleau et Soilihi, Mme Troendlé, MM. Lefèvre, B. Fournier, Mayet, Calvet, Dallier, Mandelli, Bouchet, Lemoyne, Genest, Allizard, Pierre, Vogel, Pillet, Morisset, Doligé et Charon, Mmes Procaccia, Duchêne et Kammermann, M. Falco, Mme Gruny, MM. Houel, Houpert, Kennel et D. Laurent, Mme Lopez, MM. A. Marc, Portelli et Revet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Chaize, Mme Estrosi Sassone, MM. J.P. Fournier, Laménie, Lenoir, Mouiller, Nègre, Savary, Pellevat et Chasseing, Mme Morhet-Richaud, MM. Pointereau et Delattre, Mmes Deseyne, Duranton et Primas et MM. Vaspart, Gournac, Vasselle et Gremillet.

Après l'alinéa 18

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 211-2-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 211-2-1-...  -  La demande de visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois peut être rejetée lorsque, pour la catégorie de séjour concernée, le nombre annuel des étrangers admis à s'installer durablement en France, fixé par le Parlement en application de l'article L. 111-10, a été atteint. La demande peut faire l'objet d'un réexamen l'année suivante. »

M. Roger Karoutchi.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Favorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Rejet : cet amendement, qui perturberait le bon fonctionnement de l'administration, est inconstitutionnel et inconventionnel.

M. Philippe Kaltenbach.  - Si le plafond fixé par le Parlement était atteint...

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Ce n'est pas ça !

M. Philippe Kaltenbach.  - ...les demandes de visa d'étudiants déjà acceptés par une université par exemple, devraient être reportées à l'année suivante. On voit bien, avec cet amendement n°2 rectifié ter, les effets pervers de votre système de plafonds : repousser des demandes à titre familial qui se justifient pleinement. Je demande un scrutin public.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - À mon initiative, l'amendement n°1 rectifié quater a été modifié de sorte que ne soit plus visée que l'immigration économique. Exit l'asile et le regroupement familial. Si la peur d'attenter à la Constitution et à nos conventions vous retenait, monsieur Kaltenbach, libérez-vous en et votez l'amendement n°2 rectifié ter.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Je ne partage pas cette analyse. La modification introduite par le président Bas ne rend pas la mesure moins inconstitutionnelle, car le regroupement familial au sens où vous l'entendez n'épuise pas les cas de figure protégés par le droit à une vie familiale normale. Le ministre de l'intérieur de 2010, Brice Hortefeux, avait d'ailleurs confié à Pierre Mazeaud - qui n'est pas un dangereux gauchiste - un rapport sur ce point. Ses conclusions étaient sans appel : la mesure est inconstitutionnelle, donc irréaliste et sans intérêt.

M. Roger Karoutchi.  - Pierre Mazeaud, grand juriste devant l'éternel, aurait utilisé d'autres adjectifs pour qualifier cette proposition si elle était inconstitutionnelle.

Par cohérence, le Sénat doit voter mon amendement de conséquence.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Comme tout bon juriste, Pierre Mazeaud considère que tout ce qui est inconstitutionnel est irréalisable.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Cette discussion juridique mérite d'avoir lieu. Le regroupement familial concerne le conjoint mais aussi les enfants. Je persiste : notre volonté est, à la différence de 2010, d'instituer un contingentement de la seule immigration économique.

M. Philippe Kaltenbach.  - Affichage politicien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Votre modification concerne-t-elle le seul regroupement familial ?

Mme Catherine Tasca.  - Ces longs échanges prouvent très clairement que l'amendement n°1 rectifié quater est inconstitutionnel. La mise en oeuvre de plafonds, parce qu'inapplicable, ne sera pas appliquée. C'est de plus un leurre : faire croire à l'opinion publique qu'on peut réguler l'immigration par des quotas. (M. Philippe Kaltenbach applaudit)

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Que se passera-t-il pour le Français souhaitant faire venir son conjoint étranger si le plafond est dépassé ? Il en appellera à la Constitution. Problème supplémentaire, la mesure est contraire au principe constitutionnel d'égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel ne pourra pas ne pas la sanctionner.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Nous avons entendu par regroupement familial tout ce qui touche à l'immigration familiale. S'il y a la moindre ambiguïté, nous la livrerons au cours de la navette. Législateurs, nous avons pris garde d'exclure l'asile et l'immigration familiale de l'autorisation annuelle par catégories d'étrangers - ce qui ne nous empêche pas de vouloir restreindre l'immigration familiale ailleurs. Le fond est de créer un contingentement pour toutes les catégories d'étrangers dans le respect de la Constitution et des conventions internationales. Sans cet amendement n°2 rectifié ter de conséquence, la création de plafond sera un coup d'épée dans l'eau.

M. Jean-Yves Leconte.  - Si je comprends bien, on vise les étudiants et l'immigration économique ; des catégories où ça va et ça vient.

Notre modèle est-il la Corée du Nord ? Que voulons-nous ? Continuer de perdre des contrats parce que nous ne trouvons pas des gens sur lesquels s'appuyer, formés et parlant le français ? Un peu de cohérence, de grâce ! Arrêtons ce travail en silo ! (M. Philippe Kaltenbach applaudit)

À la demande du groupe socialiste et républicain, l'amendement n°2 rectifié ter est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°5 :

Nombre de votants34 2
Nombre de suffrages exprimés34 2
Pour l'adoption 188
Contre 15 4

Le Sénat a adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°51 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme Lepage, MM. Yung et Assouline et Mmes Conway-Mouret, Yonnet, Espagnac et Jourda.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 1° du II de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° À l'étranger résidant de façon habituelle dans un des pays figurant sur une liste définie par décret et inscrit dans un des établissements d'enseignement supérieur dont la liste figure au même décret, sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; ».

M. Jean-Yves Leconte.  - Le dernier vote est si contraire à notre intérêt économique que je désespère de vous convaincre...

Cet amendement vise les étudiants issus de plusieurs catégories de pays : les très grands, comme le Brésil, ou ceux où les transports sont très coûteux, comme le Japon, ou encore ceux où notre pays n'a plus de consulat, comme le Nicaragua - les étudiants sont là contraints de se rendre au Honduras. Pour tous ces étudiants, la prise d'empreintes biométriques, que d'autres pays n'exigent pas, représente une vraie difficulté. D'où la simplification que je propose : qu'ils arrivent avec un visa de tourisme et demandent leur visa de long séjour, arrivés en France, à la préfecture.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cet amendement crée un nouveau cas de délivrance de plein droit de titres de séjour. La commission des lois a suivi un principe : conserver le pouvoir d'appréciation du préfet ou des services consulaires. Le problème du nombre de consulats est d'ordre réglementaire.

M. Jean-Yves Leconte.  - Il s'aggrave !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Un arrêté d'octobre 2014 précise les consulats où peuvent s'adresser les étudiants demandeurs de visa de long séjour. Précisément, il existe 22 consulats rattachés à des consulats dans des pays tiers. Le problème concerne quelques milliers de visas de court séjour et quelques centaines de visas de long séjour.

Des centres délocalisés, tel celui de Katmandou, traitent les demandes et les envoient à New Delhi. Soit, cela coûte un peu plus cher mais moins que se déplacer à New Delhi. Les cas visés par l'amendement se comptent par centaine.

M. Jean-Yves Leconte.  - Soit, mais cela fait obstacle à la venue d'étudiants de petits pays en France, comme de grands pays tels le Brésil ou le Japon. Idem sur le passeport. Il faut absolument revoir cela si nous voulons une France attractive.

L'amendement n°51 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°53 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet, Espagnac, Jourda et Lepage.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 5° du II de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation scolaire, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Il faut délivrer de plein droit un titre de séjour temporaire portant la mention « étudiant »,  dans l'année qui suit le dix-huitième anniversaire, aux jeunes étrangers qui ont été confiés à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de 16 ans et l'âge de 18 ans et qui sont scolarisés depuis au moins 6 mois.

M. le président.  - Amendement n°54 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet et Lepage.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les mêmes conditions, si la formation suivie n'est pas destinée à lui apporter une qualification professionnelle, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-7 peut lui être délivrée. »

M. Jean-Yves Leconte.  - Amendement de repli.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Rejet. Votre amendement n°53 rectifié revient sur un choix fait par le législateur en 2011 de distinguer les mineurs isolés arrivés avant 16 ans - à qui est délivré un titre de séjour - des autres. N'encourageons pas les trafics.

Concernant l'amendement n°54 rectifié, rien n'empêche le préfet de délivrer à ces personnes une carte de séjour temporaire.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - J'entends régler le problème qui vous préoccupe par circulaire pour une application uniforme sur tout le territoire : rejet de l'amendement n°53 rectifié. Avis défavorable à l'amendement n°54 rectifié.

Les amendements nos53 rectifié et 54 rectifié sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°56 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet et Lepage.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « , de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine » sont supprimés.

M. Jean-Yves Leconte.  - La circulaire du ministre de l'intérieur du 28/11/2012 rappelle à l'autorité administrative qu'elle n'a pas à "opposer systématiquement le critère tiré de la nature des liens avec le pays d'origine mentionné aux articles L.313-11 2° bis et L.313-15 du CESEDA si ces liens sont inexistants, ténus ou profondément dégradés. »

En pratique, elle n'est pas appliquée. Des préfets sollicitent des actes de décès des parents pour faire obstacle à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale". Remédions-y !

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Il s'agit toujours des mineurs isolés. Soyons vigilants à l'égard des filières. Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le Gouvernement tient à faire appliquer la circulaire du 28 novembre 2012. Retrait ?

L'amendement n°56 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°55 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet et Lepage.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « , de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine » sont supprimés.

M. Jean-Yves Leconte.  - Dans le même esprit, cet amendement concerne les enfants confiés à l'ASE entre 16 et 18 ans et pour lesquels le placement s'est bien passé.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°55 rectifié n'est pas adopté.

L'article 4 bis demeure supprimé.

ARTICLE 5

M. le président.  - Amendement n°159, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux, Aïchi et Archimbaud et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Alinéas 2, 4 et 6

Remplacer le mot :

douze

par le mot :

vingt-quatre

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'article 5 prévoit la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour aux étudiants ayant un diplôme de niveau master et souhaitant compléter leurs études par une première expérience professionnelle ou par la création d'une entreprise. C'est une bonne chose car la recherche d'emploi est parfois longue : 30 % de nos diplômés y sont toujours plongés un an après leur diplôme. Et qui peut créer sa propre entreprise en un an ? Il serait bon de porter la durée de cette autorisation à vingt-quatre mois.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Le délai d'un an est cohérent avec le caractère provisoire de l'autorisation. Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°159 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°160, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 2

Supprimer le mot :

non

Mme Marie-Christine Blandin.  - Amendement de repli : restons-en à douze mois, mais renouvelable.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°160 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°161, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux, Aïchi et Archimbaud et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

master

par le mot :

licence

Mme Marie-Christine Blandin.  - Dernière tentative pour oxygéner nos universités... Le texte a été amélioré par l'Assemblée nationale en incluant les diplômes de niveau bac +2, comme un BTS ou un IUT, fixés par décret, pourquoi exclure la possibilité de la délivrance d'une APS aux étudiants ayant obtenu un diplôme au moins égal à la licence?

Les étudiants étrangers arrivant en France sont 41 % en doctorat, 19 % en master mais 11 % seulement en licence. Il n'y a rien à craindre...

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - 95 000 étudiants seraient concernés, la commission a souhaité en rester au texte actuel. Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

Mme Dominique Gillot.  - Je plaide pour cet amendement. C'est la loi de 2013 qui a porté l'APS de six à douze mois, en autorisant les personnes concernées à avoir plusieurs expériences professionnelles au cours de l'année. Ce projet de loi accorde une carte pluriannuelle de séjour aux étudiants en licence, comme c'est déjà le cas pour les étudiants en master. Par parallélisme, étendons-leur aussi l'APS.

La presse rapporte que le meilleur entrepreneur du monde en 2015, Mohed Altrad, est un Français venu de Syrie qui a bénéficié d'une bourse pour venir étudier à Montpellier. Sa ville natale, depuis, a été bombardée par Daech. Il est monté à la tribune recevoir son prix avec un drapeau français dans chaque main...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous avons reçu ici-même le président tunisien Béji Caïd Essebsi il y a quelques mois. Il a rappelé à cette occasion que les jeunes Tunisiens éprouvaient de grandes difficultés pour venir étudier en France. C'est plus facile dans d'autres pays, Chine ou Canada. Les étudiants étrangers sont une chance pour la France, son rayonnement, sa langue et son économie. Nous devons les aider. C'est le sens de cet amendement.

L'amendement n°161 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Requier et Vall.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

dans un domaine correspondant à sa formation

par le mot :

viable

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'article 5 conditionne l'octroi à un étudiant diplômé d'une autorisation provisoire de séjour à la justification, notamment, d'un projet de création d'entreprise « dans un domaine correspondant à sa formation ». Je comprends que le texte facilite le contrôle bureaucratique mais un diplômé en philosophie peut très bien envisager de créer une entreprise de maçonnerie -  ce serait peut-être mieux pour notre économie.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Il convenait d'aligner ce dispositif avec celui qui est destiné aux anciens étudiants salariés. Celui qui veut créer une entreprise dans un autre domaine peut toujours solliciter un passeport-talent aux termes de l'article L. 313-20 du Ceseda.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Mais pourquoi obliger les étudiants à passer par des circuits compliqués plutôt que de leur faciliter la vie ? Je peine à comprendre.

L'amendement n°21 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Grosperrin.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. »

M. Jacques Grosperrin.  - L'article 5 est une bonne idée, mais il est nécessaire de renvoyer à un décret en Conseil d'État, pour éviter les effets d'aubaine et les détournements.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Cette précision est utile et correspond au droit actuel. Avis favorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Renvoyer à un décret en Conseil d'État n'est pas nécessaire : le Gouvernement est en mesure de prendre par décret simple les mesures qui s'imposent. Avis défavorable.

M. Guy-Dominique Kennel, rapporteur pour avis.  - À la commission des lois de l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, vous avez déclaré vouloir réserver le dispositif aux meilleurs titulaires de master pour éviter tout effet d'aubaine.

Comment justifier d'un projet de création d'entreprise au moment de demander une APS ? De la viabilité de l'entreprise créée au moment de demander un changement de statut ? C'est cela qu'il s'agit de préciser.

Je voterai l'amendement n°17 ; avez-vous peur du Conseil d'État, monsieur le ministre ?

M. Philippe Kaltenbach.  - Bureaucratie !

L'amendement n°17 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

L'article 6 est adopté.

ARTICLE 7

M. le président.  - Amendement n°189, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois.

Alinéa 2

Supprimer la référence :

L. 313-7-2,

L'amendement de coordination n°189, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

ARTICLE 8

M. le président.  - Amendement n°66, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Supprimer cet article.

M. Christian Favier.  - L'article 8 instaure un contrôle permanent, éventuellement inopiné, des conditions de séjour, pouvant conduire au retrait du titre de séjour sur un simple défaut de déferrement au contrôle. Cette mesure est tout à fait disproportionnée : le Ceseda prévoit déjà le retrait du titre de séjour lorsque les conditions de sa délivrance ne sont plus remplies.

Les contrôles impromptus, ainsi que l'accès aux fichiers numériques des étrangers - je vous renvoie à l'article 25 - rendent possible une ingérence administrative incompatible avec le respect de la vie privée, protégée par l'article 8 de la CEDH. Celle-ci s'en est émue, ainsi que le Défenseur des droits.

M. le président.  - Amendement identique n°163, présenté par Mmes Benbassa, Archimbaud, Aïchi, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

Mme Esther Benbassa.  - L'article 8 étend considérablement les pouvoirs de l'autorité administrative. Son objectif réel s'apparente à une incitation au contrôle inopiné et à une précarisation du statut des étrangers réguliers.

Au fond, cet article va à l'encontre de l'esprit du projet de loi qui s'attache à consolider les droits des étrangers en France et à sécuriser leur parcours migratoire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Cet article, qui organise les contrôles effectués par les préfectures, instaure une nouvelle logique de vérification ciblée, a posteriori. Les intéressés pourront faire valoir leurs observations, le principe du contradictoire est respecté.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos66 et 163 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°67, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

I.  -  Alinéas 2 à 4

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 313-5-1.  -  Si l'étranger titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle cesse de remplir les conditions fixées pour sa délivrance, la carte peut lui être retirée ou son renouvellement refusé. »

II.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le premier alinéa de l'article L. 312-2 du même code est ainsi rédigé :

« La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de retirer, de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou une carte de séjour pluriannuelle à un étranger mentionné aux articles L. 313-17 à L. 313-23-1 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. »

M. Christian Favier.  - Cet article, en incitant à pratiquer des contrôles inopinés, précarise les étrangers réguliers. Qu'au moins la commission départementale du titre de séjour soit saisie avant toute décision de retrait du titre de séjour, ce serait sécurisant.

M. le président.  - Amendement n°164, présenté par Mmes Benbassa, Aïchi, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

I.  -  Alinéas 2 à 4

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 313-5-1.  -  Si l'étranger titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle cesse de remplir les conditions exigées pour sa délivrance, la carte de séjour peut lui être retirée ou son renouvellement refusé. »

II.  -  Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Au premier alinéa de l'article L. 312-2 du même code, les mots : « lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 » sont remplacés par les mots : « lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer de retirer ou de renouveler une carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11, une carte de séjour pluriannuelle ».

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement est de repli. Seule la carte de séjour pluriannuelle devrait pouvoir être motivée si les conditions de sa délivrance ne sont plus remplies, après saisine obligatoire de la commission départementale du titre de séjour.

M. le président.  - Amendement n°129, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 2, première phrase

après le mot :

doit

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte. L'autorité administrative peut procéder aux vérifications utiles pour s'assurer du maintien du droit au séjour de l'intéressé et, à cette fin, convoquer celui-ci à un ou plusieurs entretiens.

M. Philippe Kaltenbach.  - Cet amendement rétablit la rédaction issue de l'Assemblée nationale concernant les modalités de contrôle a posteriori du droit au séjour des titulaires d'un titre de séjour. La rédaction initiale du projet de loi faisait en effet peser une présomption de présence irrégulière sur l'étranger tout à fait disproportionnée. Si l'étranger doit être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte, il n'y a pas lieu pour autant de faire peser sur lui une telle suspicion.

Par ailleurs, il importe de laisser à l'autorité administrative une marge d'appréciation, comme le rapporteur y insiste souvent.

M. le président.  - Amendement n°113, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

contrôles ou

insérer les mots :

, sans motif légitime,

M. Philippe Kaltenbach.  - L'alinéa 3 prévoit que l'étranger peut se voir retirer sa carte s'il ne défère pas aux convocations, ce qui peut s'expliquer par une absence parfaitement licite du territoire français, voire par une hospitalisation. D'où la précision proposée qui sécurisera les étrangers.

M. le président.  - Amendement n°52 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet, Espagnac, Jourda et Lepage.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La décision de retrait ou de refus de renouvellement de la carte de séjour ne pourra intervenir avant un délai de six mois après la date à laquelle l'étranger a été mis à même de présenter ses observations, ou à la date d'expiration de cette carte si elle est antérieure.

M. Jean-Yves Leconte.   - La vie n'est pas une ligne droite : on peut divorcer, attendre un enfant, interrompre ses études... Sécurisons par conséquent la procédure de non-renouvellement de la carte de séjour en prévoyant un délai de six mois durant lequel l'étranger pourra faire valoir ses droits.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Les amendements nos67 et 164 ne sont pas opportuns. L'autorité administrative doit être en mesure de procéder aux contrôles, dans le respect du contradictoire. La saisine de la commission départementale alourdirait considérablement la procédure, déjà contradictoire.

Que l'étranger doive être en mesure de justifier « à tout moment » qu'il respecte encore les conditions de délivrance d'un titre ne fait peser aucune présomption sur lui. Avis défavorable à l'amendement n°129.

L'amendement n°52 rectifié réduirait lui aussi grandement l'efficacité de la procédure. Avis défavorable.

L'amendement n°113 est inutile : le contradictoire est garanti ; le retrait de titre n'est qu'une faculté donnée au préfet ; les convocations sont multiples ; la proportionnalité de la décision administrative est, enfin, appréciée par le juge.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis favorable aux amendements nos113 et 129, pertinents en ce qu'ils précisent utilement les pouvoirs de l'administration.

Avis défavorable aux amendements nos67, 164 et 52 rectifié.

L'amendement n°67 n'est pas adopté.

L'amendement n°164 n'est pas adopté.

L'amendement n°129 est adopté.

L'amendement n°113 n'est pas adopté.

L'amendement n°52 rectifié n'est pas adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

ARTICLE 8 BIS A

M. le président.  - Amendement n°195, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 6

Remplacer les mots :

condamné sur le fondement des

par les mots :

ayant commis les faits qui l'exposent à l'une des condamnations prévues aux

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Vous me trouverez peut-être à contre-emploi....

Le droit au séjour est un équilibre rigoureux entre droits et devoirs. Ce projet de loi en dépit de son titre concerne aussi les obligations qui incombent aux étrangers. Il est légitime que ceux qui troublent l'ordre public se voient renvoyés.

Le présent amendement rétablit la possibilité de procéder au retrait d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle lorsqu'un étranger a commis les faits constitutifs de certaines infractions.

La commission des lois du Sénat a considérablement réduit la portée du dispositif en imposant une exigence de condamnation définitive avant de pouvoir retirer le titre de séjour, ce qui priverait l'administration d'une faculté de réaction.

Aucun principe constitutionnel ne s'oppose pourtant à la rédaction voulue par le Gouvernement : le Conseil constitutionnel a été parfaitement clair dans sa décision du 13 mars 2003. Cela ne porte pas atteinte à la présomption d'innocence, puisqu'il ne s'agit pas d'une sanction pénale mais d'une mesure de police administrative. L'intéressé a la possibilité, comme la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations le prévoit de façon obligatoire, de présenter ses observations avant que l'administration prenne sa décision.

Face à des risques avérés de troubles à l'ordre public, l'administration doit conserver le pouvoir de retirer des titres qu'elle a octroyés. Je tiens beaucoup à cet amendement.

L'article visé concerne, je le rappelle, des faits graves : trafics de stupéfiants, traite des êtres humains, proxénétisme de mineurs, réduction en esclavage... La fermeté, vous le voyez, se justifie.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - C'est sans doute la seule fois où j'apparaitrai comme un dangereux laxiste... (Sourires)

Il existe aujourd'hui deux régimes distincts. L'article L. 313-3 prévoit un retrait de titre sans condamnation préalable en cas de menace pour l'ordre public. Loin de le supprimer, nous l'avons étendu aux cartes de séjour temporaire.

L'article L. 313-5 vise, lui, une liste limitative d'infractions. Fragile juridiquement, cette procédure est rarement utilisée par les préfets. La circulaire du 20 janvier 2014 ne prévoit, pour justifier le retrait, qu'un rapport administratif sans grande valeur probante... L'amendement du Gouvernement ne met pas fin à l'insécurité juridique. Selon la commission des lois, le recours à l'article L. 313-5 devrait toujours faire suite à une condamnation pénale. Le préfet pourra toujours s'appuyer sur le régime de l'article L. 313-3. L'action de l'administration n'est pas affaiblie mais renforcée.

M. Éric Doligé.  - Je vous suivrai, monsieur le ministre. C'est une disposition importante : l'auteur d'un trouble à l'ordre public dans les conditions ici précisées doit se voir retirer son titre de séjour. Le rapporteur ne m'a pas suffisamment convaincu...

M. Michel Mercier.  - Cet amendement rappelle quelques règles essentielles sur le droit des étrangers -  c'est un droit où s'exprime pleinement la souveraineté de l'État.

Le retrait de la carte de séjour ne doit pas être assimilé à une peine complémentaire à la condamnation pénale ; il faudra veiller à bien séparer les deux actions : la police administrative, c'est la prévention, la politique pénale, c'est la répression - impératif rappelé par le Conseil d'État depuis 1935. Je crois qu'on peut sans difficulté voter l'amendement du Gouvernement. Le ministre veut être ferme, il serait malvenu de lui refuser les moyens de sa fermeté.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le rapporteur a été précis et je l'en remercie. Mais ma responsabilité d'accueillir dignement les étrangers sur notre territoire a pour contrepartie une exigence de fermeté à l'égard de ceux que nous avons accueillis et qui bafouent nos règles, surtout dans le contexte de menaces actuel.

M. Mercier a raison de rappeler la distinction à faire entre police administrative et police judiciaire. J'ajoute que j'ai pris il y a peu des mesures extrêmement fermes à l'égard de bénéficiaires du statut de réfugiés dont le comportement n'était pas conforme à nos principes, et je m'en expliquerai publiquement le 13 octobre.

M. Guy-Dominique Kennel, rapporteur pour avis.  - Il conviendrait de recommander la même fermeté à certains de vos collègues ministres... Vous voyez de qui je parle....

Mme Éliane Assassi.  - Ben voyons...

M. Philippe Kaltenbach.  - Pas de polémiques inutiles !

L'amendement n°195 est adopté.

L'article 8 bis A, modifié, est adopté.

L'article 8 bis est adopté.

Mme Esther Benbassa.  - Nous nous abstenons.

ARTICLE 9

M. le président.  - Amendement n°68, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

I.  -  Alinéa 3, première phrase

Après le mot :

indéterminée

insérer les mots :

ou sous contrat de travail à durée déterminée de plus de douze mois

II.  -  Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

Mme Éliane Assassi.  - Je défendrai les amendements nos68 et 69. Outre que ce texte ne comporte aucune disposition sur le sort et les droits des travailleurs en situation irrégulière, comme l'ont pointé la CNCDH et le Défenseur des droits, il fragilise la situation des travailleurs en situation régulière en distinguant ceux qui ont un CDD de ceux qui ont un CDI. Je ne comprends pas que des membres du Gouvernement qui, en leur temps, ont dénoncé les lois Sarkozy et Hortefeux et l'immigration choisie, proposent maintenant un passeport « talents » et un titre temporaire pour les travailleurs en CDD mentionnant le nom de l'entreprise qui les emploie et la durée du contrat.

Enfin, nous déplorons la persistance dans le texte d'une préférence nationale qui ne dit pas son nom : l'opposabilité de la situation de l'emploi prend la forme de listes de métiers en tension par zone géographique lors de la délivrance de la carte de séjour « salarié », alors que la circulaire du Premier ministre du 28 novembre 2012 précisait que « la situation de l'emploi ne serait pas opposée aux demandeurs » dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour.

M. le président.  - Amendement n°114, présenté par M. Kaltenbach et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Alinéa 3, première phrase

Après le mot :

indéterminée

insérer les mots :

ou d'un contrat de travail à durée déterminée d'une durée égale ou supérieure à douze mois

II.  -  Alinéa 5, première phrase

Après le mot :

déterminée

insérer les mots :

d'une durée inférieure à douze mois

M. Philippe Kaltenbach.  - Les travailleurs temporaires ne doivent pas voir leurs droits rognés. Avec cet article 9, les détenteurs d'un CDD d'une durée égale ou supérieure à douze mois ne relèveront plus de la carte « salarié » mais de la carte « travailleur temporaire ». Or les droits attachés à l'une ou l'autre carte ne sont pas égaux. D'abord parce que l'autorisation de travail accordée au titulaire d'une carte « salarié » l'autorise à changer d'employeur ainsi que de métier après la troisième année de séjour régulier ; ce n'est pas le cas de l'autorisation de travail attachée à la carte de « travailleur temporaire ». Ensuite, parce que le titulaire d'une carte « salarié » est protégé contre les effets du licenciement sur le droit au séjour. On sait que les CDI deviennent rares, et que les métiers peu qualifiés font surtout appel au CDD. N'ajoutons pas la précarité à la précarité.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Le Gouvernement a préféré différencier les deux cartes selon la nature du contrat, CDI ou CDD, non sur sa durée. Cela a le mérite de la clarté. Avis défavorable.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis défavorable, la nature du contrat est un critère objectif et pertinent. Selon le code du travail, le CDD, temporaire par nature, comporte un terme déterminé et répond objectif précis. Au contraire, l'étranger titulaire d'un CDI, dont le caractère durable est garanti par le code du travail, s'inscrit dans la perspective d'une installation durable. L'étranger titulaire de la carte « travailleur temporaire » bénéficie des droits acquis à l'assurance chômage des travailleurs involontairement privés d'emploi. Le dispositif proposé par le gouvernement rétablit une cohérence sans porter atteinte aux droits des salariés.

L'amendement n°68 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°114.

M. le président.  - Amendement n°69, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 7

Après les mots :

la situation de l'emploi

supprimer la fin de cet alinéa.

Mme Éliane Assassi.  - Défendu.

L'amendement n°69, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°57 rectifié, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet, Espagnac, Jourda et Lepage.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La carte de séjour prévue aux 1° ou 2° est délivrée, sans que lui soit opposable la situation de l'emploi, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement prévoit l'attribution de plein droit d'une carte de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire » ou « salarié » aux jeunes étrangers placés à l'ASE, âgés de 16 à 18 ans et qui justifient avoir suivi durant au moins six mois une formation destinée à leur apporter une qualification professionnelle.

Les tribunaux administratifs réaffirment régulièrement que la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du Ceseda n'est pas conditionnée à la production d'un contrat de travail, pourtant presque systématiquement demandé par l'autorité administrative.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - La non-opposabilité de l'emploi pour les mineurs confiés à l'ASE existe déjà dans le code du travail. Nous ignorons combien de personnes sont concernées. Sagesse, à condition que l'amendement soit rectifié pour viser l'article L. 313-2.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°57 rectifié bis.

Amendement n°57 rectifié bis, présenté par MM. Leconte et Yung et Mmes Yonnet, Espagnac, Jourda et Lepage.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La carte de séjour prévue aux 1° ou 2° est délivrée, sans que lui soit opposable la situation de l'emploi, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Avis défavorable. Si la situation des mineurs étrangers isolés fait l'objet d'une attention particulière du Gouvernement, le fait d'être entré sur le territoire pendant leur minorité ne justifie pas à lui seule la délivrance de plein droit d'un titre de séjour quand ils atteignent la majorité.

En revanche, pour leur apporter une protection effective, l'article L. 313-1 du Ceseda prévoit que les mineurs étrangers peuvent demander à bénéficier de l'admission exceptionnelle au séjour. Est alors apprécié le caractère réel et sérieux des études ou de la formation suivie.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Je précise : ce dispositif était auparavant dans le code du travail.

M. Éric Doligé.  - Je me félicite d'entendre le ministre insister sur la problématique des mineurs isolés étrangers qui deviennent majeurs. Qui doit les prendre en charge, du département, de la CAF, de l'Éducation nationale ? À quelles aides ont-ils droit ? Entre 18 et 19 ans, c'est le flou.

M. Jean-Yves Leconte.  - La puissance publique a investi vis-à-vis de ces jeunes : va-t-on les abandonner au bord de la route ? Nous ne proposons une délivrance de plein droit d'un titre de séjour que s'ils respectent certaines conditions. Plus la zone grise entre droit et non-droit restera grande, moins on luttera efficacement contre l'immigration irrégulière. Il faut sécuriser les parcours, pour que ceux dans lesquels la République a investi puissent trouver leur place dans la société française.

L'amendement n°57 rectifié bis n'est pas adopté.

L'article 9 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°70, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Cette disposition inclut les contrats d'apprentissage et de professionnalisation. »

M. Christian Favier.  - Le Défenseur des droits dénonce les obstacles que mettent certaines préfectures à la conclusion d'un contrat d'apprentissage et de professionnalisation pour les mineurs isolés étrangers - et ce en méconnaissance des textes. En effet, les mineurs de 16 à 18 ans confiés à l'ASE sont par définition autorisés à séjourner en France et ne sont pas tenus de posséder un titre de séjour. Ils pourraient s'adresser à la Direccte pour obtenir une autorisation de travail sans passer par le bureau des étrangers.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. Les contrats d'apprentissage et de professionnalisation sont considérés comme des contrats de travail aux termes des articles L 6221-1 et L6225-3 du code du travail. Vous êtes donc satisfait.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Même avis

L'amendement n°70 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°32 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collombat, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 9° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° À l'étranger victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle entre le moment de la déclaration de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle et la date où son état de santé est consolidé par une décision de la caisse primaire d'assurance maladie ; ».

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement prévoit que l'étranger victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle bénéficie d'un titre de séjour provisoire entre le moment de la déclaration de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle et la date où son état de santé est consolidé par une décision de la caisse primaire d'assurance maladie, comblant ainsi une lacune du droit actuel. Aucune raison objective ne justifie le contraire.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Avis défavorable. L'évaluation du taux d'invalidité et l'attribution de la rente par les organismes sociaux sont nécessaires pour que la préfecture puisse vérifier que les conditions de délivrance sont réunies. Votre amendement ouvre un droit au séjour pour un an, quelle que soit la gravité de l'accident. C'est excessif.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Admettre une délivrance de plein droit sur la base d'une simple déclaration risquerait d'encourager les demandes infondées. Cela relève davantage du récépissé de demande de titre de séjour.

L'amendement n°32 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°71, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article L. 5221-5 du code du travail, après les mots : « en France », sont insérés les mots : « , et à l'étranger âgé de seize à dix-huit ans, pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, sans que la détention d'un titre de séjour lui soit opposable, ».

M. Christian Favier.  - Défendu.

M. François-Noël Buffet, rapporteur.  - Selon une circulaire de 2005, les mineurs ont accès à une autorisation de travail délivrée au cas par cas par la Direccte. Il semblerait que ces cas soient peu fréquents. En attendant l'avis du Gouvernement, sagesse.

M. Bernard Cazeneuve, ministre.  - Le mineur étranger isolé souhaitant poursuivre une formation en alternance ou en apprentissage n'est pas soumis à l'obligation de présenter un titre de séjour. Il leur appartient de demander une autorisation de travail, délivrée selon des conditions assouplies. La délivrance d'un titre de séjour à leur majorité est soumise à certaines conditions. Une prochaine instruction interministérielle illustrera notre volonté de mener une action collective et de mobiliser tous les services de l'État sur la question des mineurs étrangers isolés. Retrait ?

L'amendement n°71 est retiré.

La séance est suspendue à 18 h 55 pour reprendre à 21 h 30.

présidence de Mme Françoise Cartron, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 30.