Surveillance des communications électroniques internationales (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales.

Discussion générale

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense .  - Cette proposition de loi parachève notre travail global sur le renseignement depuis 2012. Je remercie, après Patricia Adam et Philippe Nauche, ses auteurs, vos commissions des lois et des affaires étrangères et leurs présidents et rapporteurs qui ont sensiblement enrichi le texte. Sur l'essentiel, nous sommes parvenus à un terrain d'entente.

Cette proposition de loi répond à un besoin urgent. La loi sur le renseignement établissait un régime de surveillance des communications électroniques internationales censuré par le Conseil constitutionnel car il renvoyait excessivement au règlement sur les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés, ainsi que sur le contrôle exercé par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), de la légalité des autorisations et de leur mise en oeuvre. C'est le rôle de cette proposition de loi : la surveillance ne concerne que des personnes situées à l'étranger -  nous ne recherchons donc pas un moyen détourné d'espionner les Français.

La proposition de loi fixe les données maximales de conservation et les modalités de destruction des données. Elle détaille les prérogatives de la CNCTR en cette matière. Enfin, elle organise un contrôle juridictionnel en prévoyant une saisine éventuelle du Conseil d'État. L'ensemble des garanties que le Gouvernement prévoyait de préciser dans un décret sont donc intégrées à la loi.

Un accord émerge entre les deux assemblées, les apports de votre commission des lois étant essentiellement d'ordre légistique et rédactionnel.

Votre texte supprime la délégation de signature du Premier ministre, ce qui me paraît contraire au principe de séparation des pouvoirs auquel je sais le président Bas attaché. Le Conseil d'État, cependant, n'y voit pas de violation de la Constitution ; dans ces conditions, soit.

Votre commission a également réduit de 12 à 10 mois la durée de conservation des données. L'équilibre choisi demeure plus favorable aux intérêts de la défense que le régime des surveillances intérieures. L'écart temporel entre interception et utilisation s'explique par le fait que des réseaux restent parfois dormants pendant très longtemps. En outre, les communications interceptées sont généralement en langue étrangère, parfois une langue rare. Le Gouvernement toutefois ne fera pas de ce raccourcissement un point de blocage.

Vous avez également souhaité que les opérateurs des communications aient l'assurance que les opérations matérielles rendues nécessaires par les autorisations seront effectuées par leurs agents lorsque ce sera pertinent. Le Gouvernement y est favorable, et proposera de renvoyer à l'article L. 871-7.

Cette proposition de loi fixe un cadre essentiel à la protection des intérêts français dans le respect des libertés fondamentales. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, Les Républicains et UDI-UC)

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois .  - Le Conseil constitutionnel avait considéré que nous législateurs, n'avions pas épuisé nos prérogatives, que nous ne pouvions nous en remettre au Gouvernement pour déterminer le régime de la collecte de renseignements dans le domaine des communications électroniques internationales. Cette proposition de loi comble le vide juridique que cette décision crée. L'initiative de Patricia Adam et Philippe Nauche était donc bienvenue.

Pour parer à tout risque d'inconstitutionnalité, j'ai utilisé la possibilité donnée par l'article 39 au président du Sénat de saisir le Conseil d'État d'une proposition de loi que j'ai déposée, très proche de celle-ci. Cela a permis de lever tous les doutes sur sa constitutionnalité de même que sur sa conventionalité, y compris à l'égard de la Cour européenne des droits de l'homme.

Le Conseil d'État a estimé que la mise en oeuvre d'un dispositif différent en France et à l'étranger ne créait pas de déséquilibre. Si cette surveillance ne donne pas lieu aux mêmes voies de recours, le Conseil d'État a relevé qu'il existait toutefois des recours : auprès de la CNCTR d'abord, puis auprès du Conseil d'État par trois membres de cette commission. Je n'ai jamais rencontré à l'étranger de système aussi protecteur des libertés.

Ce régime est dérogatoire : les utilisateurs ayant un identifiant étranger sont moins protégés, mais ils le sont par leur propre législation, comme les Français le sont à l'étranger. Chacun chez soi et tout ira bien, dit l'adage manchois. (Sourires)

Les deux assemblées devraient pouvoir s'entendre sur un dispositif simple. Les informations prises dans des flux d'échanges interceptés qui ne relèvent pas de ce régime ne pourront être utilisées.

Une autorisation doit être donnée pour des flux mixtes. Si le flux concerne deux terminaux étrangers, le régime est facilité et soumis à une autorisation du Premier ministre, laquelle peut porter sur des zones géographiques ou des personnes, de manière notamment à respecter des conventions internationales.

Je me suis rendu deux fois dans les locaux de la DGSE. Autant que j'aie pu m'en rendre compte, c'est bien ce qui est mis en oeuvre. J'appelle donc à voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les mêmes bancs)

M. Michel Boutant, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - La commission des affaires étrangères, toujours soucieuse de trouver le juste équilibre entre libertés et sécurité, m'a demandé de vérifier si cette proposition de loi respectait les exigences du Conseil constitutionnel et si la réponse ne réduisait pas à l'excès les possibilités des services de renseignement qui assurent la sécurité nationale. L'initiative du président Bas a facilité les choses : le Conseil d'État a considéré que sa proposition de loi répondait aux exigences du Conseil constitutionnel. Les différences substantielles par rapport au régime de surveillance sur le territoire national correspondent à la différence corrélative des techniques employées.

Le Conseil d'État estime que le texte parvient à une juste conciliation entre les impératifs de la sécurité nationale et la sauvegarde de la vie privée. La surveillance des communications électroniques internationales correspond, dans une société démocratique, aux nécessités de la sécurité nationale et de la prévention des infractions pénales, au sens de l'article 8 de la CEDH. De même, l'absence d'un régime indifférencié selon la nationalité ne méconnaît aucune exigence constitutionnelle ou conventionnelle.

La procédure de recours, quant à elle, concilie selon le Conseil, d'une façon qui n'est pas manifestement disproportionnée, le droit au recours effectif et l'exigence constitutionnelle de sauvegarde des intérêts fondamentaux de la nation, dont participe le secret de la défense nationale. La CNCTR connaîtra toutes les autorisations, aura un accès élargi aux informations et pourra donc procéder à toutes les vérifications nécessaires.

L'existence d'un régime différent d'autorisation et de traitements automatisés était nécessaire pour reconstituer les réseaux. Le Conseil d'État considère que la formulation maintient les mesures prises pour la surveillance des communications par voie hertzienne pour la défense. Il était indispensable que les données de conservation soient plus longues : les données sont souvent en langue étrangère, il faut du temps pour les traduire comme pour identifier des réseaux d'ennemis dont il ne faut pas sous-estimer l'intelligence.

La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l'adoption de cette proposition de loi. Les ajouts de la commission des lois ne constituent pas des différences insurmontables ; ils ne me semblent pas devoir changer le sens de l'avis de ma commission.

Avec cette législation, la France témoignera de la maturité de sa démocratie et pourra s'en prévaloir sur la scène internationale. (Applaudissements sur les mêmes bancs)

Mme Esther Benbassa .  - Cette proposition de loi corrige des dispositions de la loi sur le renseignement censurées par le Conseil constitutionnel au motif que les garanties apportées aux citoyens n'étaient pas suffisantes. Le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée, ouvrant la voie à un examen expéditif. Or ce texte menace les droits, notamment ceux des étrangers, et en particulier le secret de la correspondance.

Le président Bas a déposé une proposition de loi similaire dont il a souhaité que le Conseil d'État fût saisi. Beau paradoxe : tandis que la gauche suit la pente glissante que nous savons, c'est la droite sénatoriale qui se soucie de nos libertés !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Et oui !

Mme Esther Benbassa.  - Le groupe écologiste considère que la proposition de loi laisse trop de marge de manoeuvre aux services de renseignement, impliquant la collecte par défaut des communications de personnes dont les identifiants sont français, mais qui transitent par des opérateurs étrangers comme Google ou Skype, que nous utilisons tous les jours. Et je ne dis rien des durées de conservation : jusqu'à huit ans pour les données chiffrées !

Des associations comme Amnesty international et le président du comité national consultatif des droits de l'homme ont critiqué ce texte que son flou rend difficile à amender et qui fait de chaque citoyen un suspect.

Les écologistes voteront donc contre ce texte au potentiel liberticide patent, car pouvant servir un jour à d'autres fins que la lutte contre le terrorisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Quelle modération !

M. Yves Détraigne .  - Notre pays attendait depuis longtemps la loi sur le renseignement. L'exercice était difficile, car les craintes légitimes étaient nombreuses. Mais nous sommes arrivés à un texte équilibré.

Les sages de la rue Montpensier ont censuré la forme et non le fond du régime spécifique à la surveillance des communications électroniques internationales. Nous devons énoncer les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des données ainsi que les modalités de contrôle par la CNCTR. Il est essentiel que notre appareil juridique soit complet. Les interventions de nos forces armées au Sahel et au Proche-Orient ont accru l'agressivité de nos adversaires. Avec cette proposition de loi, nos services pourront surveiller les Français engagés auprès de Daech, hélas de plus en plus nombreux. Les garde-fous demeurent.

Ainsi, les procédures sont détaillées : seul le Premier ministre, selon le texte de la commission, pourra donner une autorisation. La durée de conservation, forcément plus longue que pour les données recueillies en France, a été ramenée par la commission de douze à dix mois, montrant l'attachement de notre Haute Assemblée aux libertés fondamentales.

Ce texte vient combler le vide juridique issu de la censure du Conseil constitutionnel. Les sénateurs du groupe UDI-UC le soutiendront dans leur majorité.

Mme Cécile Cukierman .  - Cette proposition de loi a un parcours législatif singulier. Ayant pour source la censure du Conseil constitutionnel, elle est la parade que le Gouvernement a trouvée pour répondre aux menaces qui pèsent sur notre pays. Mais nous regrettons le choix de cette procédure, sur un sujet aussi clairement régalien.

Notre hostilité ne porte pas sur la forme, mais sur le fond, sur la façon dont le texte répond à des problèmes réels : la collecte massive de données entraîne une surveillance de masse, selon une méthode que les services appellent « pêche au chalut ». Nous changeons ainsi de logique de renseignement au profit d'un système qui ne distingue pas ses cibles et est d'une efficacité douteuse. Une grande partie du trafic internet mondial passant par des câbles sous-marins français, la France se place dans un système de surveillance mondial. Selon le rapporteur, la durée de conservation est rendue nécessaire par une interprétation difficile des données : cette technique est-elle dès lors efficace ?

Je m'interroge sur la fiabilité de cette utilisation d'algorithmes propres peut-être à identifier ce que l'on cherche, mais dans une masse de données considérable, exploitées dans des conditions discutables. Cela me fait penser au programme Skynet utilisé par les États-Unis pour abattre, au moyen de drones, des individus soupçonnés de terrorisme au Pakistan, sur la base d'une très complexe analyse algorithmique de données collectées par les compagnies de téléphone mobile. Passons sur la légitimité éthique de telles pratiques, reste qu'en matière de lutte contre le terrorisme les résultats de ce programme sont loin d'être efficaces et qu'il y a eu beaucoup d'erreurs de cibles et de « dommages collatéraux » irrémédiables.

La collecte massive de données personnelles est tout à fait aléatoire alors qu'en la matière la réussite tient avant tout à la capacité d'analyse.

Ma seconde critique porte sur le fait que cette loi étendrait la surveillance de masse dans un flou et une absence de garantie, ou de recours, extrêmement dangereux pour les libertés fondamentales et individuelles. Ce texte pourrait d'ailleurs se heurter à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui a suspendu l'application de l'accord Safe Harbour au motif que le régime de protection des données n'était pas satisfaisant.

La CNCTR ne pourrait agir qu'après la décision unique du Premier ministre. Les communications reçues à l'étranger, depuis le territoire national vers un identifiant étranger, le serveur Google par exemple, pourront être surveillées sur la base du régime défini dans la proposition de loi. Puisque chacun utilise quotidiennement ces outils, toutes les communications sont concernées !

Cette proposition de loi déséquilibrée légitime des pratiques que nous jugeons contraires aux droits humains ; nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs écologistes et du groupe communiste républicain et citoyen)

M. André Reichardt .  - Ce texte parachève la loi sur le renseignement, qui renvoyait à un décret des dispositions relevant de la protection des libertés publiques, et donc de la loi : rendons un hommage appuyé à la démarche du président Philippe Bas.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Merci !

M. André Reichardt.  - Il a fait le nécessaire pour que nous bénéficiions d'un avis du Conseil d'État. L'analyse de celui-ci ne nous dispense certes pas d'examiner le texte, mais elle nous rassure sur sa constitutionnalité et sa conventionalité.

Ne sont concernées que les communications électroniques internationales dont la source et la réception sont étrangères. Une interception de sécurité vise une personne en particulier, sur le territoire national, en vertu d'éléments connus. Ce n'est pas le cas de la surveillance des communications électroniques internationales, qui vise des individus dont on ne connaît pas les noms ou des zones et des groupes terroristes.

Outre quelques amendements rédactionnels, la commission des lois a confié au Premier ministre la faculté de déterminer les réseaux concernés, ramené de douze à dix mois la durée de conservation des correspondances interceptées, et précisé le régime des opérations matérielles lorsqu'elles sont réalisées par les opérateurs de communications électroniques.

Au vu de la menace et des ramifications internationales des réseaux djihadistes, je ne peux que me féliciter de cette proposition de loi, qui reprend des dispositions que la commission d'enquête sur la lutte contre les réseaux djihadistes, que j'ai présidée avec Mme Goulet, et dont M. Sueur était rapporteur avait recommandées. Le terrorisme s'est mondialisé, de même que les trafics en tout genre. Nous avons rencontré à Washington M. John Brennan, directeur de la CIA, qui a exprimé la formidable attente des États-Unis à l'égard de la France, au sujet de l'échange de données - la convention n'avait pas encore été conclue. Toutes les garanties sont offertes pour sauvegarder les libertés publiques.

Le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi importante et consensuelle. Il ne s'agit certes que d'une clarification juridique, sans rien de fondamentalement nouveau. Il n'en était pas moins indispensable de doter nos services de renseignement d'un panel large et complet d'outils, au service des intérêts fondamentaux de la Nation. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UDI-UC et socialiste et républicain)

M. Jean-Pierre Sueur .  - Rappelons d'abord l'horreur du terrorisme, sans quoi on ne comprend pas les motifs de ces textes successifs. Notre commission d'enquête sur les filières djihadistes, M. Reichardt l'a dit, a souligné que le renseignement était notre meilleure arme contre le terrorisme qui peut frapper quiconque, partout, n'importe quand. Les démocraties doivent réagir, sans renoncer aux libertés - ce serait donner gain de cause aux terroristes. Je rends hommage à nos services de renseignement qui oeuvrent dans des conditions extrêmement difficiles - qui a siégé à la délégation parlementaire au renseignement le sait...

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Tout à fait !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cette proposition de loi, nécessaire, vient compléter la loi sur le renseignement. Il faut donc l'adopter dans le même esprit. Les finalités de la surveillance des communications électroniques internationales relèvent strictement de l'article 811-3 du code de la sécurité intérieure, soit de l'article 2 de la loi sur le renseignement.

J'ai entendu dire que ce texte « liberticide » créait un « climat social délétère ». N'est-ce pas plutôt le terrorisme ? Je salue les garanties offertes, qu'il s'agisse des autorisations, des conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des données.

L'esprit n'est pas le même qu'à la CIA. Nous mettons en oeuvre des procédures extrêmement respectueuses des libertés, tout en veillant à l'efficacité de nos services.

Enfin, la plateforme nationale de cryptage sera contrôlée par la CNCTR. La DGSE fonctionnait auparavant sans l'encadrement que nous proposons aujourd'hui. N'est-ce pas l'absence de contrôle qui créait une situation délétère ? Et les professions sensibles sont protégées. La CNCTR disposera d'un accès permanent, complet et direct, au dispositif de traçabilité, aux renseignements collectés, aux transcriptions.

Certains se disent : à quoi bon lutter contre le terrorisme dès lors qu'il peut frapper partout et n'importe quand... C'est presque un travail de Sisyphe. Mais Camus écrivait, à la fin de La Peste : « Mais il savait cependant que cette chronique (...) ne pouvait être que le témoignage de ce qu'il avait fallu accomplir et que, sans doute, devraient accomplir encore, contre la terreur et son arme inlassable, malgré leurs déchirements personnels, tous les hommes qui, ne pouvant être des saints et refusant d'admettre les fléaux, s'efforcent cependant d'être des médecins ». (Applaudissements)

M. Daniel Reiner .  - Ce texte, je l'espère, est le dernier jalon de la modernisation d'un cadre législatif jusque-là plutôt léger. La loi de 1991, obsolète, ne couvrait plus le champ des innovations technologiques. La loi sur le renseignement a enfin pris en compte le cyberespace, tiré les conséquences de menaces plus que jamais transnationales, fixé un cadre législatif et garanti l'équilibre entre impératif de sécurité et libertés publiques. Aux yeux de tous, il y a désormais un continuum entre sécurité intérieure et extérieure.

Selon le Conseil constitutionnel, s'agissant des communications électroniques internationales, le législateur n'a pas épuisé ses compétences pour garantir l'État de droit. Avec cette proposition de loi, c'est chose faite : extension des communications rattachables au territoire national - sauf pour les personnes déjà visées par une autorisation d'interception de sécurité, durée de conservation des données précisée, rôle du Premier ministre, contrôle de la CNCTR, droit de saisine des justiciables. Ainsi, l'État de droit se trouve consolidé, dans un domaine où il était presque inexistant.

En conciliant sécurité et libertés publiques, la France fait oeuvre utile pour elle-même comme pour d'autres, tout en évitant les excès du Patriot Act américain. Saluant les apports de la commission des lois, le groupe socialiste votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain, UDI-UC et Les Républicains)

Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois.  - Très bien.

M. Jacques Mézard .  - Alors qu'on reproche souvent au Parlement d'empiéter sur le pouvoir réglementaire, il nous est aujourd'hui proposé de remédier à une censure pour incompétence négative. Ce motif pourrait suffire à ce que je souscrive à cette proposition de loi, tant je suis soucieux des prérogatives du Parlement.

Sur le fond, les grandes lignes du régime de surveillance des communications électroniques internationales - qui diffère de celui des interceptions de sécurité - ont été fixées par la loi de juin dernier, selon un régime différent des interceptions de sécurité ; le champ opérationnel a été aménagé en conséquence.

L'Assemblée nationale, puis la commission des lois du Sénat ont conservé l'essentiel des dispositions de l'article L. 851-1 tout en répondant strictement aux griefs du Conseil constitutionnel. Je me réjouis du renforcement en commission de la protection des professions protégées et des mandats parlementaires, et de la saisine ouverte à la CNCTR du juge administratif, même si je regrette que cela conforte au détriment du juge judiciaire son rôle de juge de droit commun de la voie de fait. Toutes ces mesures dessinent un projet global pour garantir la sécurité de nos concitoyens. On ne peut que les soutenir.

La prévention du terrorisme ne représentait en 2013 que 28 % des interceptions ; mais quoi qu'il ne soit que l'une des sept finalités prévues, elle est un axe majeur de notre politique de sécurité nationale.

Le Gouvernement a fait du renseignement une priorité. Si je partage le souci d'encadrer juridiquement nos activités de renseignement, mes réserves demeurent. Je ne méconnais pas la difficulté qu'il y a à concilier efficacité et protection de la vie privée. Mais les garde-fous auraient pu être renforcés. N'aurait-on pas pu lier davantage le Premier ministre aux recommandations de la CNCTR ? Car il y a le droit et la pratique...

Jean-Marie Delarue, que j'ai auditionné dans le cadre de la commission d'enquête, estime que la loi sur le renseignement et les techniques employées n'apportent pas les garanties d'un contrôle suffisant. Je n'en dirai pas plus...

Vous connaissez l'attachement du RDSE aux principes républicains, dont le respect des libertés publiques. Pour jouir de ses libertés sans entrave ni risque, encore faut-il être en sécurité.

Parce que la voie est étroite entre le possible et le souhaitable, la majorité d'entre nous votera cette proposition de loi, pour la majorité d'entre nous.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Alain Duran .  - Lors de l'examen du projet de loi sur le renseignement, j'avais notamment déposé un amendement pour restreindre le champ des communications pouvant être rattachées au régime de la surveillance internationale, au motif que ce régime comprenait moins de garanties ; c'est ce point, censuré par le Conseil constitutionnel, qui nous revient aujourd'hui.

Il ne s'agit pas d'empêcher les services de renseignement de mettre en oeuvre des techniques de surveillance lorsqu'ils ont les raisons légitimes de le faire, lorsque les intérêts fondamentaux de la Nation sont menacés ; mais, au regard de l'atteinte à la vie privée, de s'assurer d'une stricte proportionnalité dans l'usage de ces techniques et de prévenir des usages dévoyés. Tous les citoyens français sont concernés dès lors qu'ils se connectent à un site hébergé à l'étranger ou échangent un mail avec une personne installée dans un autre pays. Le contrôle est allégé et a posteriori. Sous ce régime, les professions sensibles peuvent faire l'objet d'une surveillance. Et l'utilisation des algorithmes n'est plus cantonnée à la seule lutte contre la menace terroriste. Elle permet la recherche de comportements suspects grâce à des traitements automatisés des données de citoyens qui ne sont pourtant pas identifiés comme présentant une menace.

Nos amendements remédient à ces difficultés.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Duran, Mmes Bonnefoy et Bataille, MM. Cabanel et Durain, Mme Jourda, MM. Lalande et Leconte et Mmes Lienemann et Lepage.

Alinéa 8

Après les mots :

communications transitent

insérer les mots :

ou sont stockées

M. Alain Duran.  - Une part considérable des communications des citoyens français, y compris franco-françaises, sont en effet stockées sur des serveurs installés à l'étranger : cloud, webmail, réseaux sociaux. Conformément à l'esprit du texte, ces communications doivent être également exclues du régime de la surveillance internationale.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Retrait. L'alinéa 8 englobe le stockage.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 10 à 23

Supprimer ces alinéas.

Mme Esther Benbassa.  - Ces alinéas autorisent des mécanismes d'interception massive de données, qui ne seraient plus limités à la détection de menaces terroristes et n'étaient nullement prévus dans l'article de la loi relative au renseignement censuré par le Conseil constitutionnel. C'est un détournement. L'exploitation non individualisée de données de connexion associées à des communications internationales est plus large que celle associée aux communications nationales, ce qui n'est pas acceptable.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Duran, Mmes Bonnefoy et Bataille, MM. Cabanel et Lalande et Mmes Lienemann et Lepage.

Alinéa 15

Avant les mots :

Le type

insérer les mots :

Pour les seuls besoins de la prévention du terrorisme,

M. Alain Duran.  - Serait désormais autorisé le traitement automatisé de données à des fins autres que la prévention du terrorisme, ce qui n'était pas prévu dans la loi sur le renseignement. Ce traitement par algorithmes pourra notamment porter sur les données des citoyens français.

De tels dispositifs n'ont été admis par le Parlement, au regard des dérives possibles, que face à la gravité des menaces terroristes. Dès 1978, la loi Informatique et libertés avait prévu qu'aucune « décision de justice impliquant une appréciation sur le comportement d'une personne ne peut avoir pour fondement un traitement automatisé de données à caractère personnel destiné à évaluer certains aspects de sa personnalité. »

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par MM. Leconte et Duran et Mmes Lienemann et Bonnefoy.

Après l'alinéa 22

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Cette autorisation peut prévoir l'exclusion de certains numéros d'abonnement ou identifiants techniques de toute surveillance ou, pour certains numéros ou identifiants, des conditions particulières d'accès aux communications.

M. Jean-Yves Leconte.  - L'autorisation d'exploitation de communications ou de données de connexion interceptées doit pouvoir exclure certains numéros d'abonnement ou identifiants techniques ou prévoir des conditions particulières d'accès. Cette disposition a été supprimée par la commission des lois.

N'oublions pas le principe de réciprocité, au fondement des relations internationales.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Après l'alinéa 23

Insérer six alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 854-2-1.  -  Sur demande motivée des ministres, ou de leurs délégués, mentionnés au premier alinéa de l'article L. 821-2, le Premier ministre, ou l'un de ses délégués, autorise la surveillance individualisée d'une personne.

« L'autorisation désigne :

« 1° La ou les finalités poursuivies parmi celles mentionnées à l'article L. 811-3 ;

« 2° Le ou les motifs justifiant cette surveillance ;

« 3° Sa durée de validité ;

« 4° Le ou les services mentionnés à l'article L. 811-2 en charge de cette surveillance.

II.  -  Alinéa 38, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et à l'article L. 854-2-1.

Mme Esther Benbassa.  - Si la surveillance individualisée est prévue par la proposition de loi, aucun encadrement ni aucune mesure d'autorisation ne sont prévus, contrairement aux mesures de surveillance non individualisées. Dès lors, le contrôle a posteriori prévu par la CNCTR sera très difficile, voire impossible.

C'est inacceptable. Nous demandons que l'autorisation comporte le motif, la durée et le service en charge de la surveillance.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable à tous les amendements. L'amendement n°7 remet en cause l'objet même du texte : donner un cadre légal à l'interception de très nombreuses communications, pour se rapprocher progressivement, au moyen d'une sorte de zoom, d'informations essentielles à la protection de nos intérêts fondamentaux. Restreindre les techniques à la lutte contre le terrorisme, comme le prévoit l'amendement n°2 rectifié, c'est empêcher la France de défendre des intérêts, alors même que des contrôles sont prévus et le dispositif très encadré.

Le Premier ministre peut naturellement exclure certains identifiants, notamment pour respecter les stipulations de la convention de Vienne sur les correspondances diplomatiques. L'amendement n°6 rectifié bis est superflu et prêterait au raisonnement a contrario.

L'amendement n°8 est la conséquence de l'amendement n°7, défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - M. Duran et Mme Benbassa ont raison de souligner que l'exploitation de données de connexion non individualisées est permise plus largement pour les communications internationales que pour les communications nationales. Et que les communications internationales peuvent être surveillées à d'autres fins que la prévention du terrorisme.

Le Gouvernement assume, la commission des lois aussi : l'équilibre entre besoins des services et protection des libertés est ici plus favorable aux premiers. Mais la situation des personnes concernées n'est pas la même, comme l'a dit le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères...

Le cantonnement de la surveillance à la lutte contre le terrorisme serait malvenu, songez au routage des réseaux. Avis défavorable aux amendements nos7 et 2 rectifié.

Le Gouvernement entendait donner un avis favorable à l'amendement n°6 rectifié bis mais s'en remettra à la sagesse du Sénat.

Avis défavorable à l'amendement n°8.

M. Alain Fouché.  - Il faudra empêcher les dérives. Je m'abstiendrai sur l'amendement n°2 rectifié et voterai l'amendement n°6 rectifié bis : cela va mieux en le disant.

Mme Nicole Bonnefoy.  - L'utilisation de traitements automatisés serait donc autorisée, au-delà même de la lutte contre le terrorisme. Lors de l'examen du projet de loi sur le renseignement le 3 juin, vous disiez pourtant, monsieur le ministre, que cet objectif seul justifiait de telles pratiques...

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Au niveau national !

Mme Nicole Bonnefoy.  - Les algorithmes pourront être utilisés pour la surveillance des communications de tous les citoyens français, dès lors qu'ils se connectent à un site hébergé à l'étranger, appellent ou échangent un email avec un correspondant étranger. L'argument selon lequel « les autres pays le font » ne suffit pas...

On nous dit que le Conseil constitutionnel a validé la loi sur le renseignement, que le Conseil d'État n'a pas trouvé à redire à la proposition de loi du président Bas. À quoi sert donc le Sénat ?

M. Alain Richard.  - Depuis sa création, la Cnil a toujours pris en compte l'impératif de sécurité nationale. Et quand M. Leconte parle de réciprocité avec nos partenaires étrangers, il me semble que son expérience pourrait être complétée...

L'amendement n°7 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos2 rectifié, 6 rectifié bis et 8.

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par M. Leconte, Mme Lepage, M. Yung et Mme Conway-Mouret.

Alinéa 24

1° Remplacer les mots :

en France

par les mots :

soit en France soit à l'étranger pour le compte d'intérêts français

2° Après le mot :

communications

rédiger ainsi la fin de la phrase :

que dans les conditions les concernant sur le territoire national prévues au titre II du présent livre

3° Compléter cet alinéa par trois phrases ainsi rédigées :

La captation des communications des personnes qui exercent soit en France soit à l'étranger pour le compte d'intérêts français un mandat ou une profession mentionné à l'article L. 821 - 7 doit faire l'objet d'une information de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement dans un délai de vingt-quatre heures. La Commission transmet alors un avis au Premier ministre qui, soit autorise la poursuite de cette captation soit ordonne la destruction immédiate de l'ensemble des données collectées relatives à ces personnes. La Commission et le Premier ministre ont respectivement chacun vingt-quatre heures afin de rendre leurs avis et décision.

M. Jean-Yves Leconte.  - Que le régime de surveillance des communications internationales ne soit pas le même, soit. Mais qu'en est-il des communications sur Skype, les réseaux sociaux ou certaines messageries ? Des Français qui travaillent régulièrement à l'étranger ?

Notre amendement protège les personnes exerçant à l'étranger un mandat ou une profession dite sensible pour le compte d'intérêts français. Il aligne en outre pour ces personnes le régime relatif à la surveillance individuelle des communications internationales sur celui des communications émises ou reçues sur le territoire national.

Le dispositif soumet enfin à l'information de la CNCTR et à l'autorisation du Premier ministre la captation de communications internationales englobant celle d'une personne exerçant en France une profession protégée dans le cadre d'une communication internationale, ou une profession protégée en France mais exerçant à l'étranger pour le compte d'intérêts français, je pense aux avocats inscrits dans un barreau français exerçant aussi à l'étranger.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 24

Après le mot :

communications

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

qu'après une autorisation préalable du Premier ministre, délivrée après l'avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement mentionné à l'article L. 821 - 1. Elles ne peuvent faire l'objet d'une surveillance individuelle de leurs communications à raison de l'exercice du mandat ou de la profession concernée.

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement prévoit la protection des personnes exerçant en France la profession de parlementaire, d'avocat, de magistrat ou de journaliste. Ces personnes ne doivent pas être soumises aux mesures de surveillance internationale sans avis préalable de la CNCTR, dès lors qu'elles exercent habituellement sur le territoire français. Il s'agirait sinon d'un véritable détournement de procédure.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Duran, Mmes Bonnefoy et Bataille, M. Lalande et Mme Lienemann.

Après l'alinéa 24

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes exerçant en France ou hors du territoire national un mandat ou une profession mentionné à l'article L. 821-7 ne peuvent faire l'objet d'une surveillance qu'après une autorisation préalable du Premier ministre, délivrée après l'avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement mentionné à l'article L. 821-1.

M. Alain Duran.  - Les services de renseignement ne doivent certes pas être empêchés de surveiller des personnes exerçant des professions dites sensibles : journaliste nord-coréen, avocat proche de Daech ou parlementaire d'un pays belliqueux. Des garanties n'en sont pas moins nécessaires.

Comment distinguer, comme le fait l'alinéa 24, les communications privées des communications professionnelles ? Cet amendement institue un contrôle renforcé de la CNCTR lorsque les techniques de renseignement visent, à l'international comme sur le territoire national, des personnes exerçant des mandats et professions sensibles. Cela n'empêchera pas le Premier ministre de délivrer une autorisation.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Si ces personnes utilisent des terminaux correspondant à des identifiants français, elles tombent dans le régime de droit commun ou dans celui qui suppose une autorisation spécifique. Ces amendements sont donc superflus. Pis, ils auraient des effets pervers : une protection excessive se retournerait contre ces professions. Même avis négatif à l'amendement n°9, la protection est déjà robuste, n'en rajoutons pas.

L'amendement n°3 a été rejeté par la commission pour des raisons analogues.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable aux trois amendements. Je ne vois pas pourquoi nous protégerions spécifiquement les avocats ou journalistes n'exerçant pas en France, ni pourquoi nous enfreindrions pour eux la règle générale selon laquelle la CNCTR, s'agissant des communications internationales, n'intervient pas en amont.

M. Alain Fouché.  - Ayant longtemps exercé le métier d'avocat, je ne vous cacherai pas mes inquiétudes. Des affaires récentes d'écoutes ont rappelé la nécessité de préserver la confidentialité de certaines informations.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Nous parlons d'international !

M. Alain Fouché.  - Les écoutes téléphoniques existent depuis longtemps. Il faudra un contrôle très fort et un bilan.

M. Jean-Yves Leconte.  - La protection devrait concerner des personnes et non des communications, comme le texte le précisait. Sinon, il faudrait d'abord intercepter les communications pour savoir si elles doivent être protégées ! Protéger des professions, y compris à l'étranger, c'est protéger ceux qui travaillent pour la France.

M. Alain Richard.  - Comment s'appliquerait cet amendement ? Les services n'auraient aucun moyen de sélectionner les communications des avocats ou des journalistes établis à l'étranger, sauf à ce que ces derniers fassent une déclaration à la CNCTR.

L'amendement n°5 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos9 et 3.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 27

Après la première occurrence du mot :

leur

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

recueil, pour les correspondances ;

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement réduit la durée de conservation des données de correspondances prévues : rien ne justifie un délai de quatre ans, surtout si on le compare à la durée de conservation pour les correspondances recueillies sur le territoire national - entre trente jours et quatre mois.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Avis défavorable. Le contexte est différent. Les renseignements sont beaucoup plus nombreux et il faut les traduire.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 36

Remplacer la référence :

à l'article L. 871-6

par la référence :

aux articles L. 871-6 et L. 871-7

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Cet amendement rappelle -  car cela résulte d'une exigence constitutionnelle  - que les surcoûts éventuellement subis par les opérateurs du fait de la mise en oeuvre des mesures prévues par le chapitre IV du titre V du livre VIII font l'objet d'une compensation de la part de l'État.

M. Alain Fouché.  - Encore heureux !

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Favorable.

L'amendement n°13 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par M. Duran, Mmes Bonnefoy et Bataille, MM. Lalande et Leconte et Mmes Lienemann et Lepage.

Alinéa 38, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

dans un délai rapproché suivant leur délivrance, qui ne peut excéder sept jours

M. Alain Duran.  - Le texte prévoit un dispositif de contrôle allégé, sans avis préalable, contrairement à la procédure applicable aux mesures de surveillance menées sur les communications franco-françaises.

Dans le cadre de la surveillance internationale, le contrôle de la CNCTR est uniquement effectué posteriori. Il convient dès lors de préciser que les autorisations de surveillance délivrées par le Premier ministre sont transmises à la CNCTR dans un délai rapproché, afin que celle-ci puisse procéder rapidement à des vérifications de conformité. La loi ne saurait, par omission, autoriser une rétention de l'information sur laquelle doit s'exercer le contrôle. 

M. Philippe Bas, rapporteur.  - On peut craindre effectivement, si l'on prévoit un délai « maximum » de sept jours, que les services attendent systématiquement le septième jour. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Cet amendement ne sert pas son intention affichée, car le dispositif prévu implique une communication immédiate ou quasi immédiate des autorisations. Avis défavorable.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - Même avis donc.

L'amendement n°4 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'alinéa 38

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement reçoit communication des accords de coopération ou d'échange d'informations et de données entre les services mentionnés à l'article L. 811 - 2. Elle dispose d'un accès permanent, complet et direct aux informations et échanges d'informations opérés dans le cadre de ces accords. 

Mme Esther Benbassa.  - L'importance croissante de la coopération entre les services de renseignement implique un contrôle de la part de la CNCTR qui doit également disposer d'un accès direct, complet et permanent aux informations collectées ou échangées.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

Après l'alinéa 38

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement reçoit communication des accords de coopération ou d'échange d'informations et de données entre les services mentionnés à l'article L. 811 - 2.

Mme Esther Benbassa.  - Amendement de repli qui prévoit une information systématique sur tout nouvel accord.

M. Philippe Bas, rapporteur.  - La mission de la CNCTR est de vérifier la légalité des autorisations délivrées par le Premier ministre. Ici, il s'agit de tout autre chose : contrôler les accords avec les autres États, dont il n'est pas nécessaire de rappeler le caractère secret. Ce n'est pas le rôle de cette commission, sa composition n'a pas été prévue pour cela. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je n'ai pas la même interprétation de cet amendement. Il s'agit selon moi de contrôler les accords entre services nationaux du premier cercle. Mais l'autorisation est donnée à un service spécifique, de tels échanges entre services seraient illégaux ! Avis défavorable, donc.

L'amendement n°11 n'est pas adopté non plus que l'amendement n°12.

L'article premier, modifié, est adopté.

L'article 2 est adopté.

La proposition de loi est adoptée.

Prochaine séance demain, mercredi 28 octobre 2015, à 14 h 30.

La séance est levée à 23h45.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus analytiques