Financement de la sécurité sociale pour 2016

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Discussion générale

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes .  - Plus que jamais les enjeux de solidarité sont sur le devant de la scène.

La France a toutes les raisons d'être confiante dans son avenir, ses valeurs, sa capacité à aller de l'avant. Ce n'est pas ce que ressentent beaucoup de nos concitoyens, mais ils expriment leur attachement à notre système de sécurité sociale. Garantir la pérennité et la modernité de celui-ci nous confère un avantage comparatif exceptionnel. Belle responsabilité, beau combat aujourd'hui contre ceux qui le confondent avec l'assistanat, dénoncent un héritage archaïque ou un gouffre financier, contre ceux qui appellent à la dissolution des droits fondamentaux dans le marché. La protection sociale, au contraire, permet à chacun d'entreprendre, de prendre des risques, de fonder une famille. Parce que la fatalité est l'autre nom du reniement, les Français ont plus que jamais besoin d'un modèle social conquérant et innovant, modernisé.

Ce projet de loi marque une étape dans le redressement des comptes sociaux. Réduire les déficits n'est pas une fin en soi...

Mme Nicole Bricq.  - Tout de même, c'est une nécessité !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - ... mais une exigence que nous devons à nos concitoyens, à nos enfants, à ceux qui seraient les premiers à pâtir d'une régression des droits, une exigence enfin si nous voulons garantir à chacun qu'il pourra bénéficier d'un accès aux soins et aux traitements les plus coûteux sans autre condition.

Le déficit de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), en trois ans, a baissé de 40 % ; il passera ainsi en 2016 sous la barre des 10 milliards. Pour la première fois, depuis 2005, la branche vieillesse sera à l'équilibre - ce n'est pas un hasard... L'an prochain, le déficit de l'assurance maladie sera de 6 milliards, soit 2,6 milliards de moins qu'en 2011.

L'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) est fixé à 1,75 %, soit un effort important de 3,4 milliards, après 3,2 milliards en 2015, grâce à des mesures structurelles - baisse des prix des médicaments et développement des génériques, économies d'échelle à l'hôpital, médecine ambulatoire... - sans rogner sur la protection de nos concitoyens, sans franchises nouvelles, sans nouveaux déremboursements, ce qui marque une rupture radicale avec la politique de la majorité précédente. Notre cap est clair, à la différence de celui proposé par l'opposition. Lors de mon audition en commission des affaires sociales, alors que le rapporteur général de la commission des affaires sociales nous avait félicités pour la baisse des dépenses, le rapporteur de la commission des finances a rejeté le tableau d'équilibre et souhaité davantage d'économies mais manifesté moins d'appétence pour les solutions concrètes... Je laisserai l'opposition résoudre ses propres contradictions...

Ce texte est marqué par la volonté d'améliorer les droits, et au-delà que chacun puisse les exercer : droits à la retraite en fonction de la pénibilité ; modulation des allocations familiales pour revaloriser les prestations des plus modestes, revalorisation de l'aide au paiement d'une complémentaire santé (ACS) pour les personnes âgées, IVG prise en charge à 100 %... La Cour des comptes l'a souligné, le reste à charge diminue régulièrement : il était de 9,1 %, en 2011, 8,5 % en 2014, soit 1 milliard d'euros de dépenses en moins pour les ménages français. En trois ans, nous avons ainsi effacé cinq ans de hausse du reste à charge...

Nous créons la protection universelle maladie (Puma), ensemble de dispositions qui rendront plus facile l'exercice par chacun de ses droits. Le statut des ayant droits sera supprimé pour les majeurs, ce qui profitera surtout aux femmes.

Mme Nicole Bricq.  - Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre.  - La carte Vitale sera délivrée dès 12 ans si les parents le souhaitent, afin d'en faire le véritable passeport d'une citoyenneté sociale. La spécificité des différents régimes est préservée.

Nous étendons aux salariés les plus précaires, aux plus de 65 ans l'accès à une complémentaire santé de qualité. Nous généralisons aussi la garantie des impayés de pension alimentaire, pour un montant de 100 euros par mois versé par les CAF ; 30 000 familles en bénéficieront à terme.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans la droite ligne du projet de loi de modernisation du système de santé, vise à renforcer la prévention et l'accès aux soins, pour sortir du tout curatif. Ainsi seront financés le repérage de l'obésité entre 3 et 8 ans ; la prise en charge d'un bilan d'activité physique, l'intervention d'un diététicien ou d'un psychologue. Nous renforçons l'accès des mineurs à la contraception, en étendant la gratuité à la consultation de prescription et aux analyses biologiques. Le dépistage du cancer du sein des femmes à risque sera pris en charge totalement - aujourd'hui, l'assurance maladie ne rembourse qu'une mammographie tous les deux ans entre 50 et 74 ans.

Ce texte est aussi un signe fort à l'égard de l'hôpital. J'ai présenté un plan d'action pour renforcer l'attractivité de l'exercice à l'hôpital et dans certaines spécialités. Pour la première fois, l'Ondam hospitalier est en ligne avec l'Ondam général. Dix millions supplémentaires sont dégagés pour financer la prise en charge des personnes les plus précaires ; trente équipes mobiles, et six unités supplémentaires de soins palliatifs seront créées. Nous réformons le financement des soins de suite et de réadaptation avec la dotation modulée à l'activité, qui met fin au tout T2A. Nous renforçons l'offre de soins visuels sans dépassement d'honoraires.

Redressement des comptes sociaux, modernisation de notre protection sociale, innovation : ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte de progrès. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale porte sur près de 496 milliards d'euros de dépenses, soit autant que les dépenses de l'État et des collectivités réunis. C'est dire son importance pour la trajectoire des finances publiques.

Nous réduisons les déficits par des économies de dépenses. Ce Gouvernement a la responsabilité d'apurer des décennies de déficit public, des comptes sociaux en particulier. Ainsi le FSV n'a plus été à l'équilibre depuis 2001... La crise économique et ses conséquences rendent le retour à l'équilibre encore plus difficile. La politique menée depuis 2012, en rupture avec celle de la majorité précédente, porte ses fruits. Les résultats sont là : le déficit est au plus bas depuis sept ans, la dette est stabilisée par rapport au PIB, les dépenses augmentent à un rythme historiquement bas.

Le déficit de la sécurité sociale est passé de 21 milliards en 2011 à 12,8 milliards en 2015, soit le niveau d'avant la crise. L'an prochain, deux des quatre branches du régime général -  AT/MP, vieillesse - seront à l'équilibre ; la branche famille s'en rapproche ; la dette sociale baissera même en valeur et l'horizon de remboursement reste inchangé, soit 2024. C'est dans ce contexte favorable que s'inscrit le transfert de dette de l'Acoss à la Cades dans la limite prévue de 62 milliards. Les administrations de sécurité sociale réaliseront 7,4 des 16 milliards d'économies de dépenses prévus en 2016, sans sacrifier les droits des assurés et en préservant la priorité en faveur des plus modestes. Les dépenses sociales du régime général augmentent de seulement 0,5 % en 2016, le niveau le plus bas depuis vingt ans - en 2015, la hausse était de 0,8 %.

La loi de programmation des finances publiques a mis l'accent sur l'efficacité de la dépense. Les niches sociales ont été rationalisées ; les exonérations applicables outre-mer ont été conservées, mais réduites pour les grandes entreprises et celles peu exposées à la concurrence. L'Assemblée nationale a souhaité conserver certaines exonérations zonées ; le Gouvernement peut l'admettre au regard de la modicité de la somme en jeu, mais il faut être cohérent : si une mesure est inefficace, il faut la supprimer. De même nous veillons au juste prix des médicaments et des actes ; nous prenons aussi le virage ambulatoire.

Le Gouvernement a aussi choisi de ne pas appliquer le mécanisme de revalorisation automatique des prestations familiales qui aurait conduit au 1er avril à une baisse de 0,7 %. À l'avenir, il prévoit deux dates de revalorisation des prestations, au 1er octobre pour les retraites et au 1er avril pour toutes les autres et supprimons le risque de régularisation négative. Ces dispositions sont financièrement neutres à terme.

Nous réalisons 3,4 milliards d'économies grâce à l'Ondam ; 1 milliard grâce à la modulation des allocations familiales et la réforme du cumul emploi-retraite ; 3 milliards d'euros grâce à d'autres mesures : 500 millions sur les dépenses de gestion des organismes de sécurité sociale, 500 millions grâce à la réforme des modalités de revalorisation des prestations ; 300 millions grâce à la lutte contre la fraude ; 1 milliard grâce à l'accord des partenaires sociaux sur la réforme des retraites complémentaires et 800 millions sont attendus de la réforme de l'assurance chômage en cours de négociation entre les partenaires sociaux.

Votre commission des affaires sociales a souligné l'effort réalisé et reconnu que les hypothèses qui le fondent étaient réalistes. Je m'étonne en conséquence qu'elle envisage d'adopter le texte sans les prévisions de recettes, de dépenses et de solde... Ce serait à cause des mesures qui n'y figurent pas... Que n'avez-vous fait des propositions...

L'Ondam est limité en 2016 à 185,2 milliards d'euros, soit 3,3 milliards de plus qu'en 2015 - mais 3,4 milliards de moins par rapport à l'évolution spontanée des dépenses.

Depuis 2012, l'Ondam a toujours été respecté. L'objectif de 1,75 % est le plus bas depuis 1997 mais garantit la qualité des soins aux assurés. Nous diminuons aussi les charges des exploitants agricoles et des travailleurs indépendants en cas de revenus très faibles, mettant rapidement en application une des recommandations du rapport Cardoux-Godefroy. Nous baissons les prélèvements sur les entreprises en mettant en oeuvre le pacte de responsabilité : baisse de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) qui favorisera en particulier les TPE et PME, maintien des dispositifs comme le crédit d'impôt recherche ou le CICE, baisse de 1,8 point des cotisations sociales sur les salaires inférieurs à 3,5 smic.

La baisse des recettes sera supportée par l'État et non la sécurité sociale. Cet effort de plus de 5 milliards d'euros supplémentaires explique pourquoi, malgré l'ampleur des économies, le solde nominal de l'État se réduirait de l'ordre de 1 milliard d'euros en 2016...

Alors que l'opposition veut baisser les impôts par l'ascenseur et les dépenses par l'escalier, nous baissons à la fois les prélèvements et les déficits.

Nous tirons aussi les leçons de l'arrêt Ruyter. Toutes les dispositions ont été prises afin d'assurer que les personnes concernées puissent bénéficier d'un remboursement des sommes prélevées à tort. Certains redevables ont en outre tardé à déposer leurs réclamations ; j'ai demandé à l'administration fiscale de leur permettre de déposer, le cas échéant, une demande de remboursement au titre des prélèvements de 2012. Enfin, rien n'interdit juridiquement de soumettre les non-résidents aux prélèvements sur le capital ni de prélever un impôt sur l'ensemble des redevables, y compris ceux qui ne sont pas affiliés en France, dès lors que ces recettes ne participent pas au financement de prestations réservées aux assurés de la sécurité sociale en France.

Ce texte sécurise notre trajectoire de réduction du déficit, tout en contribuant à soutenir la croissance et à rétablir la confiance des assurés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales .  - Les comptes s'améliorent, j'en donne acte au Gouvernement, mais de manière limitée au vu des prélèvements qui ont pesé depuis trois ans sur les ménages et les entreprises. En 2015, malgré des milliards de recettes nouvelles, le déficit n'a baissé que de 400 millions... En 2016, les administrations de sécurité sociale retrouveraient l'équilibre - un excédent de 1,3 milliard sur 582 milliards de dépenses... - contre un déficit de 6,2 milliards en 2015. Le redressement est spectaculaire mais sans les contributions positives de la Cades et du FSV le déficit s'établit à 14,7 milliards d'euros ; et 5 milliards de dépenses ont été transférés à l'État au titre de la compensation du pacte de responsabilité. En 2008, avant la crise, le solde était positif de 14 milliards d'euros.

En 2016, le déficit de l'ensemble régime général - FSV serait de 9,7 milliards d'euros, pour 3 milliards d'euros de dépenses. Le ralentissement des dépenses est réel ; mais les comptes ne se redressent que là où un effort réel a été supporté par les assurés... Le texte enregistre la deuxième étape du pacte de responsabilité ; il s'agit de financer autrement la protection sociale en pesant moins sur les salaires mais l'évolution est mesurée - les cotisations sociales représentaient 55 % des recettes en 2014, 55,4 % en 2016. On peut regretter que la réduction des cotisations sociales n'intervienne qu'au 1er avril, et non au 1er janvier.

Le redéploiement des recettes a cette année une ampleur particulière. Pour se mettre en conformité avec l'arrêt Ruyter, le Gouvernement a décidé d'affecter, à l'article 15, le produit de tous les prélèvements sociaux sur les revenus du capital au FSV, à la Cades et à la CNSA, ce qui représente au total 18 milliards. Solution fragile car la CJUE exclut toute affectation de recettes à la sécurité sociale. Mieux aurait valu abonder le budget de l'État. En tout état de cause, la distinction entre prestation contributive et non contributive dans le Règlement européen n'est pas claire.

L'article 17 anticipe le calendrier de transfert de dette de l'Acoss à la Cades. La question du stock de dette reste cependant entière ; la décision devra être prise en 2017 - reporter la dette sur les générations futures ou augmenter la CRDS...

L'annexe B contient peu d'éléments au-delà de 2016, en contravention avec les dispositions organiques. Le retour à l'équilibre est différé après 2019, ce qui est plutôt optimiste.

Je vous propose d'adopter la première et la deuxième partie relatives aux comptes 2014 et 2015. En revanche, faute de mesures fortes sur la vieillesse et l'assurance maladie, la commission des affaires sociales proposera de ne pas voter les équilibres généraux pour 2016.

Une trentaine d'articles concernent l'assurance maladie. L'article 44 pérennise l'expérimentation conduite dans la région Pays de la Loire et envisage sa généralisation. Preuve que des solutions existent.

La protection universelle d'assurance maladie (Puma) n'a d'universel que le nom car elle ne prévoit aucune suppression des 14 régimes et 83 opérateurs existants. Sur le principe on ne peut qu'approuver une mesure qui simplifie les formalités des usagers. Pourtant la mise en oeuvre informatique et réglementaire de cette réforme essentiellement administrative sera complexe. Madame la ministre, les régimes sont-ils tous capables de mettre ce dispositif en oeuvre ? Avec quels moyens ?

La réforme de la tarification des services de soins de suite et de réadaptation (SSR) fait consensus, et pourrait servir de modèle à d'autres établissements. Mais les bases de calcul sont incertaines et parfois contestées. Leur fiabilité doit être renforcée. Nous proposerons des amendements pour lever les incertitudes.

Un mot sur les organismes complémentaires. Leur régime sera généralisé au 1er janvier prochain ; il conviendrait de s'interroger plus globalement sur leur place dans notre système...

Il existe déjà de multiples dispositifs à l'attention des plus de 65 ans - CMU-C, ACS (assurance complémentaire santé)... Les mécanismes de mutualisation des risques sont les seuls susceptibles de faire baisser les prix. Attendons sur ce point le rapport commandé à l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), et supprimons l'article 21.

L'article 22, à quelques semaines de l'entrée en vigueur des dispositifs négociés, paraît malvenu.

Il n'est possible de résorber les déficits que par une baisse des dépenses. La commission des affaires sociales vous proposera, comme l'année dernière, la mise en place de trois jours de carence.

Le soixante-dixième anniversaire de la sécurité sociale a donné l'occasion de célébrer un modèle parfois fantasmé. La sécurité sociale n'a cessé de s'étendre, au rythme de l'augmentation et du vieillissement de la population, ainsi que de la sophistication des soins, c'est pour faire face à l'évolution des besoins qu'elle doit s'adapter en restant fidèle aux principes de solidarité et d'équité... Le projet de loi de financement de la sécurité sociale, seul, ne peut avoir réponse à tout... (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-UC et Les Républicains)

Mme Colette Giudicelli, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social .  - En s'établissant à 18,2 milliards d'euros en 2016, soit une hausse de 1,9 % par rapport à 2015, l'Ondam médico-social connaîtra une progression plus soutenue que l'Ondam dans son ensemble. La décélération de son rythme de progression se poursuit cependant, et le secteur continue de contribuer très largement à la régulation des dépenses d'assurance maladie par le biais des gels de crédits qui sont effectués au cours de chaque exercice budgétaire.

Comme chaque année, l'Ondam médico-social sera abondé, notamment par une partie de ressources propres à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), pour former l'Objectif global de dépenses (OGD). Celui-ci s'établirait à 19,5 milliards d'euros l'année prochaine, en augmentation de 2,1 % par rapport à 2015. Une fois de plus, il est prévu de mettre à contribution les réserves de la CNSA pour former l'OGD, mécanisme qui ne peut constituer une solution pérenne de financement.

Au total, 405 millions d'euros de crédits supplémentaires seront consacrés au renforcement des moyens existants dans les établissements et services médico-sociaux. Je me félicite que le ministère ait annoncé une enveloppe supplémentaire de 15 millions d'euros : aujourd'hui, faute de solutions d'accueil adaptées, des familles sont aujourd'hui contraintes de se rendre en Belgique.

La commission des affaires sociales est favorable à l'adoption des articles relatifs au secteur médico-social, à quelques modifications rédactionnelles près : l'article 46 doit s'accompagner d'une plus grande souplesse donnée aux ARS. Les recettes de l'État devront être suffisamment dynamiques pour couvrir les besoins de fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (Esat).

L'État continuera de financer les travailleurs en Esat pour 1,3 milliard d'euros ; dépenses de fonctionnement et aides au poste seront toutefois placées sous l'autorité de deux financeurs différents : il faudra veiller à ce qu'elles évoluent simultanément...

La généralisation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) dans les Ehpad a été votée dans le cadre de la loi Vieillissement. Elle doit servir de levier pour améliorer la qualité de la prise en charge - je crains en réalité la baisse des marges de manoeuvre en la matière... Le Cpom ne peut être à lui seul la solution miracle pour dépasser les limites de l'organisation de l'offre médico-sociale sur nos territoires. Dans son rapport publié en juin 2014, Denis Piveteau a tracé un certain nombre de pistes. Certaines sont déjà en voie d'être mises en oeuvre - je pense à l'article 21 bis du projet de loi Santé. D'autres restent encore à construire pour mettre fin aux ruptures de parcours et améliorer de façon structurelle l'accompagnement des personnes handicapées et de leurs familles. (Applaudissements au banc de la commission ainsi qu'au centre et à droite)

Mme Caroline Cayeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille .  - Nous sommes tous attachés à la politique familiale. Son équilibre financier est une condition de sa pérennité. Il serait atteint à l'horizon 2018 ; faut-il s'en réjouir, pourtant ? Derrière les chiffres, la pérennité de notre modèle est remise en cause. Le creusement des déficits a été conjoncturel, et la conjoncture s'est maintenue... Le transfert de certaines charges budgétaires - prime à la naissance décalée au 7e mois par exemple - n'a été qu'un tour de passe-passe.

La modulation des allocations familiales, censée économiser 800 millions d'euros en 2014, ne doit pas tromper non plus. C'est au mépris du principe d'universalité de cette politique que l'on ponctionne ainsi les prestations accordées aux familles - et à elles seules, car les personnes sans enfant ne contribuent en aucune façon. Pour cette raison, nous vous proposerons de ne pas adopter les comptes de politique familiale.

Les allègements de cotisations sociales sur les bas salaires n'entreront en vigueur qu'au 1er avril 2016 : le poste pour la branche atteint un milliard d'euros, il faudra trouver de nouvelles ressources.

La réduction du déficit de 2 milliards d'euros repose surtout sur la réduction des prestations et sur des mesures de tuyauterie : nous ne pouvons l'accepter. Les mesures sociales et fiscales représentent, depuis 2012, 1,8 milliard d'euros.

Or seules les familles sont mises à contribution... La modulation des allocations modifie radicalement la philosophie du système bâti il y a soixante-dix ans. Renier son universalité, c'est faire fi de nos principes républicains. Les associations familiales que j'ai rencontrées s'inquiètent de ces mesures purement financières, qui remettent en cause le système lui-même : qu'est-ce qui s'opposera, demain, à ce que la gratuité des soins ou des services publics soit remise en cause ? Les promesses, bien sûr, n'engagent que ceux qui les écoutent...

La convention d'objectifs et de gestion conclue avec la Cnam prévoyait d'ambitieux objectifs d'accueil des enfants, qui n'ont pas été concrétisés : 21 000 solutions d'accueil nouvelles en 2013 et 2014, quand 275 000 sont attendues d'ici 2017, 8 000 places individuelles en deux ans contre 40 000 prévues...

Or l'accueil des jeunes enfants est un enjeu majeur pour l'insertion professionnelle des femmes. Si les objectifs fixés sont désormais inaccessibles, sans doute peut-on progresser en allégeant les mesures, travailler sur la formation des professionnels de la petite enfance ou en revalorisant les aides à la garde - propositions qui figurent dans mon rapport.

Je suis inquiète pour l'avenir, pour les familles qui renoncent déjà à s'agrandir. (M. Jean Desessard proteste) La natalité est l'une de nos forces. Plutôt que de renforcer notre politique familiale, et alors que la Chine déverrouille la sienne, nous verrouillons notre système. Au lieu de faire, le Gouvernement défait. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Roche, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse .  - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte apparemment une bonne nouvelle : la réduction à 2,8 milliards d'euros du déficit de l'assurance vieillesse grâce aux 900 millions d'euros d'excédent du régime de base. Les recettes, dopées par la hausse des cotisations vieillesse depuis 2012, sont plus dynamiques que les dépenses, qui bénéficient pleinement de la réforme des retraites de 2010 et du recul de l'âge légal à 62 ans.

Mais la hausse des cotisations vieillesse - qui avec un taux de 17,65 % continueront à peser lourd sur le coût du travail - prendra fin en 2017. Cette situation ne durera donc pas, et le « coin de ciel bleu » évoqué par notre collègue Jean-Louis Tourenne va donc s'assombrir.

Le déficit du fonds de solidarité vieillesse (FSV) se stabilisera au niveau élevé de 3,7 milliards d'euros. Le chômage dû à la crise l'explique largement, et rien, ni dans le texte ni dans les propos des ministres, ne laisse espérer une inflexion.

Le retour à l'équilibre du système de retraite à l'horizon des 25 prochaines années ne semble pas non plus envisageable : d'après les projections du Conseil d'orientation des retraites (COR), il faudrait que le taux de chômage tombe à 4,5 % et que les gains de productivité atteignent 2 % par an. Les hypothèses macroéconomiques du projet de loi de financement de la sécurité sociale sont contestées par le Haut Conseil des finances publiques.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - C'est faux !

M. Gérard Roche, rapporteur.  - Les organismes de retraites complémentaires Agirc-Arrco devraient, eux, voir leur situation s'améliorer.

La réforme de 2003 visait à effacer les disparités entre privé et public ; les conditions de leur convergence ne sont plus réunies... J'ai proposé à la commission des affaires sociales d'adopter un amendement généralisant l'âge de départ à la retraite à 63 ans, et celui de la décote à 57 ans.

Mme Nicole Bricq.  - Tout ça par amendement !

M. Gérard Roche, rapporteur.  - L'économie réalisée atteindrait 5 milliards d'euros. Je crois cet amendement juste et efficace, qui garantirait la pérennité d'un système par répartition auquel nous sommes tous attachés. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles .  - Avec un excédent prévisionnel d'un demi-milliard d'euros, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) devrait pouvoir rembourser l'intégralité de sa dette dès l'année prochaine. Ces résultats très positifs n'auraient pas été possibles sans l'ajustement régulier des taux de cotisation et le maintien d'un dialogue social fructueux.

L'essentiel des dépenses couvre trois types de sinistres : les accidents du travail, les accidents de trajet et les maladies professionnelles. La baisse tendancielle de la sinistralité ne s'est pas démentie récemment. Des évolutions contrastées se profilent néanmoins en fonction du type de risque considéré. Pour la première fois en 2014, le nombre d'accidents du travail est passé sous la barre des 900 000 ; il a diminué de près de 21 % en sept ans, grâce aux efforts de prévention des employeurs, à la réduction du poids du secteur industriel, le plus accidentogène dans l'économie et au ralentissement de l'activité. Le nombre d'accidents de trajet a été ramené de 125 000 en 2008 à 119 000 en 2014, malgré une légère remontée en fin de période. Cette évolution est au moins partiellement liée à l'amélioration de la sécurité routière.

Le nombre de maladies professionnelles a connu un pic en 2011 avant d'amorcer une légère décrue, pour se stabiliser aujourd'hui à environ 68 000 et demeurer largement supérieur aux niveaux observés au début des années 2000. Cette croissance est portée par celle des troubles musculo-squelettiques, dont la part est passée de 26 % en 1990 à 87 % en 2014. Les pathologies dues à l'amiante représentent 7 %. Les maladies professionnelles reconnues sur le fondement des procédures dérogatoires par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) ont fortement progressé : les troubles psycho-sociaux ont été les plus nombreux en 2014, avec 693 demandes. En quatre ans, le nombre d'avis favorables s'est accru de 73 % pour les dépressions et de 13 % pour les troubles anxieux, résultat en partie d'une interprétation plus souple du Gouvernement des règles d'appréciation de l'incapacité permanente.

Malgré cet assouplissement, la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une pathologie psychique demeure difficile. Il n'est pas toujours évident d'imputer un burn out aux seules conditions de travail et l'on manque d'indicateur précis pour déterminer le degré d'incapacité qui en résulte. Le rapport que le Gouvernement rendra l'an prochain en application de la loi de 2015 relative au dialogue social nous apportera des éléments d'appréciation.

Les dépenses de transfert financées par la part mutualisée des cotisations, représentent déjà 20 % des charges de la branche, ce qui réduit d'autant la part variable liée à la sinistralité de l'entreprise. Et voici que l'annexe B annonce un nouveau transfert de 0,05 %, soit un demi-milliard d'euros ponctionné en 2016 et en 2017 sur cette tranche, remettant en cause son autonomie et son caractère assurantiel.

La convention d'objectifs et de gestion de la branche réaffirmait la priorité à donner à la prévention. La commission des accidents de travail de la branche a été de plus prise de court par les négociations relatives aux retraites complémentaires et à la compensation subséquente de la hausse de la cotisation employeur, à hauteur de 700 millions d'euros, par une baisse de la cotisation AT-MP, dès 2019.

La commission des affaires sociales réitère la double réserve émise l'an passé ; la première porte sur le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), doté de 4,7 milliards d'euros depuis sa création, dont 4,3 milliards d'euros issus de la branche AT-MP ; la dotation prévue par l'État ne porte en 2016 que sur 10 millions d'euros, soit un cinquième des ressources utiles au lieu du tiers envisagé...

Je suis également réservé sur le versement d'un milliard d'euros sur la branche AT-MP à la branche maladie, au titre de la sous-déclaration des maladies professionnelles, au lieu de 300 millions d'euros en 2002. La réalité des efforts engagés pour lutter contre la sous-déclaration reste sujette à caution.

La branche reste alimentée par les cotisations des entreprises, qui pourraient être allégées...

M. Jean Desessard.  - Elles ont déjà refait leurs marges !

M. Gérard Dériot, rapporteur.  - Vous ne serez pas surpris que la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable aux objectifs de dépenses pour 2016. (M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général, applaudit ; applaudissements au centre et à droite)

M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - Comme chaque année, l'imbrication du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale est manifeste, ce qui rend utile l'avis de la commission des finances. La dépense sociale représente désormais 42 % des dépenses publiques : l'enjeu en termes de finances publiques est donc considérable.

Les administrations de sécurité sociale étaient censées revenir à l'équilibre vers 2016 ; le retard pris affectera nécessairement le respect de nos engagements européens.

Peut-on soutenir qu'il est réaliste de réaliser 7,4 milliards d'euros d'économies sur les dépenses sociales, est-ce réaliste ? 3,4 milliards pour respecter l'Ondam, c'est difficile mais sans doute réalisable ; crédibles également, les économies prévues, d'un milliard d'euros, sur la politique familiale et le cumul emploi-retraite ; quant aux 500 millions d'euros censés être économisés sur la gestion des organismes de sécurité sociale, nous sommes plus dubitatifs, alors que pas moins de 420 recrutements ont été engagés pour 2016, pour faire face aux conséquences des réformes décidées par le Gouvernement ! L'économie alléguée d'1,8 milliard d'euros sur l'assurance chômage et la réforme des organismes Agirc-Arrco, sur laquelle le Gouvernement n'a aucune prise, suscite également de vrais doutes...

Au total, pas plus de 5 milliards d'euros d'économies semblent réalisables.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale confirme l'abandon de l'équilibre en 2016, pour le reporter en 2019. Le déficit global atteindra 9,3 milliards d'euros en 2016. Face aux économies envisagées, cela semble paradoxal ; on peine parfois à y voir clair... L'équilibre de la branche vieillesse, lui, s'explique par la loi votée sous la précédente majorité.

Bref, ces chiffres ne nous encouragent pas à un enthousiasme béat. La consolidation d'un trou de trésorerie par de la dette n'anticipe nullement sur des déficits futurs, et aggrave notre situation au regard des règles maastrichtiennes. La Cades est en saturation.

Nous proposerons des amendements pour améliorer la situation. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - Le projet de loi s'inscrit dans une trajectoire de réduction du déficit de la sécurité sociale, nous dit le Gouvernement. Nous ne le nions pas mais remettons en cause les résultats obtenus et les moyens utilisés. La diminution d'un tiers du déficit atteinte en trois ans, soit un peu plus de 6 milliards d'euros, ce n'est pas rien, il faut en convenir, mais il reste beaucoup de chemin à parcourir pour rétablir l'équilibre. Nous sommes loin de l'engagement du président de la République, de ramener les déficits publics à 3 % du PIB dès 2013 pour un équilibre en 2017...

Hausse des cotisations vieillesse et accident du travail, hausse du forfait social, création de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), réduction du quotient familial...Toutes ces mesures traduisent le recours privilégié à l'impôt et n'ont pas produit tous les résultats escomptés.

La mise en oeuvre du pacte de responsabilité relève certes d'une logique différente, mais il faudrait concomitamment réduire les dépenses. Or la seule mesure significative à cet égard depuis 2012 est la modulation des allocations familiales selon le revenu - tout à fait inopportune, comme l'a montré notre rapporteur, je n'y reviens pas.

Quant aux retraites, les bénéfices de la réforme de 2010 ont été contrariés par l'élargissement des possibilités du départ anticipé. Nos concitoyens sont conscients des réalités démographiques, pourquoi refuser d'agir dès aujourd'hui ?

Le refus des franchises et des déremboursements reporte mécaniquement le retour à l'équilibre de la branche maladie. En 2016, c'est l'Ondam qui sera limité, à 1,75 %, peu ou prou ce que proposait le Sénat l'an passé. La généralisation du tiers payant limitera-t-elle l'inflation des dépenses de soins ?

Une part majeure des économies annoncées portera sur les médicaments. Il faudra tenir compte des études médico-économiques produites par les organismes légitimes et veiller à ne pas brider l'innovation.

Nous avons suivi les difficiles négociations avec le personnel de l'AP-HP sur leur temps de travail ; le statu quo semble avoir été privilégié, ce qui n'est guère satisfaisant.

Voilà des années que le régime des assurances complémentaires fait l'objet de réformes par petites touches, sans qu'aucune cohérence ne se dégage. S'agit-il de renforcer le rôle des complémentaires au détriment du libre choix des assurés et de regrouper les intervenants du secteur ? La dualité régime de base-régime complémentaire fait d'ailleurs débat.

Tous les groupes de notre assemblée, sauf un, demandent la suppression de l'article 21. Preuve que toutes les garanties n'ont pas été apportées. La commission des affaires sociales vous proposera donc de rejeter les objectifs de dépenses et de recettes de ce projet de financement de la sécurité sociale.

C'est le douzième projet de financement de la sécurité sociale sur lequel je suis appelé à me prononcer. Comme souvent, il conjugue mesures intéressantes et mesurettes. Comme toujours, il cherche à rétablir l'équilibre de l'assurance maladie, sans jamais y parvenir. Il faudra un jour régler cette question globalement, en associant caisses de sécurité sociale et organismes complémentaires ! (Applaudissements au centre et à droite)

Question préalable

Mme la présidente.  - Motion n°442, présentée par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2016 (n° 128, 2015-2016).

M. Dominique Watrin .  - Il n'y a pas lieu de débattre d'un budget qui contredit les principes mêmes de la sécurité sociale.

En moins de deux mois, la commission des affaires sociales a examiné quatre textes complexes sur la santé, la protection de l'enfance, la vieillesse, la fin de vie, et voici le projet de financement de la sécurité sociale. Où est le recul nécessaire à la qualité de nos travaux ! On annonce en même temps dans la presse un accord sur les retraites complémentaires qui ne pèse que sur les retraités. Et le Gouvernement s'en félicite ! On exagère la gravité de la situation financière de nos régimes de sécurité sociale, pour ponctionner les salariés. Le déficit de 9 milliards d'euros ne représente que 2,6 % du budget de 346 milliards - l'équivalent d'un découvert mensuel de 40 euros pour un salarié gagnant 1 500 euros par mois !

Au-delà de la question des dépenses - il faudrait agir, à cet égard, sur les prix pratiqués par les laboratoires - la vraie raison du trou de la sécurité sociale, c'est la multiplication des exonérations de cotisations sociales - 33 milliards en 2016, 41 milliards en 2017... Ambroise Croizat, pourtant, mettait déjà en garde contre un financement par l'État de la sécurité sociale, qui aurait inévitablement pour effet de subordonner l'efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Assujettir celle-ci à la trajectoire financière imposée par Bruxelles, c'est faire fi de sa raison d'être. D'autant que le redressement économique de la France à la Libération est aussi le résultat de la sécurité accordée aux travailleurs !

Nos comptes sociaux n'ont, récemment, été à l'équilibre qu'entre 1997 et 2001 ; il a suffi que le gouvernement Raffarin délie exonérations de cotisations sociales et réduction du temps de travail pour que le déficit se creuse à nouveau...

Où est la vision d'ensemble de ce texte ? Jamais on ne s'interroge sur la CSG imposée aux retraités, sur la cotisation dépendance...

À part quelques mesures positives, de prévention notamment, ce budget est d'abord marqué par la réduction des dépenses, en contradiction avec l'objectif d'assurer à chacun une sécurité face aux risque de la vie, de la naissance à la mort. La droite n'a qu'à s'engouffrer dans la brèche pour imposer en commission un report à 63 ans de l'âge du départ à la retraite et un rétablissement de trois jours de carence.

Parallèlement, le Gouvernement accorde de nouveaux cadeaux sociaux et fiscaux au patronat et il renonce à lutter contre la fraude à la déclaration de certains employeurs, qui coûte 20 milliards. Espérons que le Gouvernement n'utilisera pas l'amélioration du solde de la branche AT-MP pour réduire encore les cotisations patronales, quand les besoins sont criants.

Voter cette question préalable, c'est le seul moyen de revenir aux valeurs humanistes de notre sécurité sociale.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable, la commission a bien l'intention de débattre du projet de loi.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - En effet, le débat nous permettra d'aller au fond de ces questions. Je m'étonne, monsieur Watrin, de vos remarques sur la charge de travail de la commission des affaires sociales. Nos concitoyens attendent que nous travaillions pour eux. C'est ce que fait le Gouvernement. Qui peut nier les apports des textes sur le vieillissement, la santé, l'enfance ?

Je répondrai à la fin de la discussion générale aux interpellations qui m'ont été faites. S'agissant seulement de la branche AT-MP, il est normal et sain que son excédent soit reversé à l'assurance maladie, car la sécurité sociale forme un tout.

Quel est le fondement de la discussion de ce texte, demandez-vous ? Je vous retourne la question : comment ne pas vouloir discuter d'un texte qui améliorera le dépistage du cancer du sein, facilitera l'accès à la contraception pour les mineures, donnera de nouveaux moyens aux hôpitaux, offrira une garantie contre les impayés de pension alimentaire, facilitera la vie de millions de Français, grâce à la Puma ? Je m'étonne du désintérêt de votre groupe pour ces mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Yves Daudigny.  - Le groupe socialiste et républicain votera contre cette motion, pour ne pas sacrifier ce débat qui concerne la protection de nos concitoyens. Une loi de financement de la sécurité sociale est infiniment plus qu'un texte financier, c'est la définition d'un programme politique et des droits.

La sécurité sociale née de la Résistance est notre patrimoine, il nous appartient de la moderniser, de la rendre plus efficace, et donner aux Français de nouveaux droits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Aline Archimbaud.  - Le groupe écologiste, constant, souhaite que le débat ait lieu sur des sujets cruciaux pour nos concitoyens. Nous voterons contre la motion.

Mme Laurence Cohen.  - Votre réponse, madame la ministre, est caricaturale. Nous n'avons jamais fait fi des questions soulevées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, au contraire. Nous jugeons que les réponses apportées par le Gouvernement ne sont pas à la hauteur. Mais face au « Pas touche aux profits des entreprises ! », nous marquons par cette motion que ce débat doit être fondé sur de nouvelles bases.

M. Gérard Roche.  - Je connais les convictions du groupe communiste républicain et citoyen. Raison de plus pour que le débat se poursuive, c'est cela la démocratie ! Le groupe UDI-UC votera contre la motion.

La motion tendant à opposer la question préalable est mise aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°45 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption   19
Contre 325

Le Sénat n'a pas adopté.

La séance, suspendue à 16 h 55, reprend à 17 h 5.