Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle vingt-six questions orales.

Rénovation des voies de chemins de fer capillaires en France

Mme Françoise Férat .  - Notre pays est traversé par de nombreuses voies ferrées secondaires dédiées au fret, dont certaines existent depuis le début du siècle dernier, voire avant 1900 ; dans certains cas les traverses n'ont pas été changées depuis quatre-vingts ans. De ce fait, de nombreuses lignes sont délaissées pour raisons de sécurité ou ont un trafic très perturbé. Ce réseau a la particularité de connecter de nombreuses activités économiques entre elles, et il joue un grand rôle dans la protection de l'environnement, compte tenu de son faible impact carbone. Dans mon département de la Marne, le partenariat avec les Ardennes, les communautés de communes, SNCF Réseau et les chargeurs est exemplaire. Ainsi 21 millions d'euros ont été engagés pour pérenniser ces lignes. L'apport de l'État ne suffira toutefois pas. Compte-t-il s'engager davantage et pour combien de temps ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Le réseau capillaire est en effet essentiel, or son modèle économique est très dégradé. La réflexion doit s'ancrer dans une perspective d'aménagement du territoire. Dans le cadre de la loi NOTRe, j'ai obtenu que les régions et intercommunalités puissent devenir propriétaires de ces infrastructures. L'État a engagé 30 millions sur trois ans pour leur rénovation - les cofinancements se montent à 100 millions d'euros. Des comités de lignes se sont réunis à l'automne 2015, des conventions de financement ont été signées en décembre pour trois lignes, Oiry-Sézanne, Châlons-en-Champagne-Troyes et Vitry-le-François-Troyes. Je souhaite que les chantiers démarrent dès cette année.

Mme Françoise Férat.  - Merci pour cette réponse. Dans un contexte budgétaire contraint, les collectivités territoriales ont besoin d'engagements forts.

Traitement des déchets de certaines entreprises

M. Henri de Raincourt .  - Ma question porte sur la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte et, en particulier, de son article 93 qui concerne le traitement des déchets de certaines entreprises.

En effet, ces dispositions prévoient qu'à compter du 1er janvier 2017, tout distributeur de matériaux, produits et équipements de construction à destination des professionnels s'organise pour reprendre, sur ses sites de distribution ou à proximité de ceux-ci, les déchets issus des produits qu'il vend.

Or, aujourd'hui, il semble que cette date ne laisse pas suffisamment de temps aux professionnels pour trouver des solutions viables. Surtout, les professionnels ont deux interrogations. La reprise et la mutualisation d'un service marchand payant, entre des entreprises concurrentes, ne posent-elles pas un problème anticoncurrentiel ? En outre, exclure les grandes surfaces de bricolage ne risque-t-il pas de créer une distorsion de concurrence entre opérateurs ?

Quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il prendre ? Il serait nécessaire de le savoir rapidement.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Les entreprises de traitement de déchets n'investissent dans les plateformes de valorisation des matériaux du BTP que si le stock de déchets anticipé est suffisant ; d'où cet article 93, destiné à densifier le maillage du territoire en déchetteries spécialisées. Des seuils d'incorporation de déchets pour la commande publique ont été fixés dans le projet de décret. Celui-ci est actuellement examiné par le Conseil d'État. Il prend en compte, pour établir les obligations des professionnels, de nombreux critères, notamment la surface de vente, le chiffre d'affaires, l'implication des collectivités dans la gestion des déchets professionnels. Les distributeurs pourront ainsi optimiser leurs investissements, notamment par la mutualisation.

M. Henri de Raincourt.  - Le problème des déchets industriels est compliqué, or il est également très sensible dans la vie quotidienne de nos compatriotes, donc de nos collectivités territoriales.

Merci pour votre réponse ; dommage que la date de publication du décret ne soit pas connue, cependant.

Desserte ferroviaire Aurillac-Brive

M. Jacques Mézard .  - Lorsque j'ai déposé cette question orale, la ligne Brive-Paris avait, après un déraillement, été coupée pour des raisons de sécurité. Aujourd'hui, des suspensions demeurent. Les locomotives ont même été détournées pour la desserte périurbaine de Clermont-Ferrand.

Malgré les travaux du plan Rail, la liaison Aurillac-Brive demeure constamment ralentie à 50 kilomètres par heure. Monsieur le ministre, il faut que vous sachiez ce qui se passe sur le terrain : mes concitoyens se retrouvent parfois, quand ils arrivent de Paris en gare de Brive, sans train ni bus pour rentrer à Aurillac !

Alors que le redécoupage des régions nous a rattachés à Lyon, nous avons besoin de solutions concrètes...

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - La sécurité ferroviaire est une de mes priorités. J'ai d'ailleurs créé un comité dédié que je préside.

Le phénomène de deshuntage est très préoccupant. Après l'accident de Sainte-Pazanne en octobre, j'ai demandé une enquête à ce propos, et demandé à la SNCF de prendre des mesures conservatoires. La ligne que vous citez fait partie des voies sur lesquelles roulent les trains X73500 sujets à ces difficultés ; nous ne saurions les remettre en circulation sans assurer la sécurité des usagers.

Le prochain comité de suivi de la sécurité ferroviaire du printemps 2016 sera l'occasion de faire le point sur la situation. Une modernisation des infrastructures de cette ligne est également prévue aux CPER des régions Midi-Pyrénées et Limousin.

M. Jacques Mézard.  - Précisément, le CPER conclu avec l'Auvergne ne flèche pas un centime vers les lignes Aurillac-Figeac-Toulouse et Aurillac-Brive, à la différence de celles des régions Limousin et Midi-Pyrénées. Il est indispensable d'inscrire 15 millions d'euros dans le CPER d'Auvergne-Rhône-Alpes pour éviter que les lignes soient rénovées uniquement jusqu'à la limite du département !

Ruisseaux couverts de l'ex-bassin houiller cévenol

M. Jean-Paul Fournier .  - Ma question porte sur les ruisseaux couverts de l'ex-bassin houiller cévenol construits à partir du XIXe siècle dans le cadre de l'exploitation industrielle du charbon et de la houille.

Le 10 novembre 2012, après un épisode pluvieux, la commune de Robiac-Rochessadoule subissait l'effondrement d'une partie de tunnel recouvrant l'un de ces ruisseaux, ouvrant un trou béant. Certains tunnels délabrés se situent au-dessous de lieux de vie... Il s'agit de propriété publique, justifiant de la part de l'État un plan pluriannuel d'entretien et de rénovation. Outre leur sécurisation, une valorisation est envisageable, je songe à la création d'échangeurs géothermiques, comme cela se fait à l'étranger.

Dans quelle mesure l'État pourrait-il en outre s'impliquer dans la création d'un laboratoire de recherches sur les techniques de remise en ordre de ces ruisseaux couverts ? Ce serait un nouveau départ pour ces territoires.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - En matière de risques miniers, la loi ne confie à l'État de responsabilités qu'en cas de disparition ou de défaillance des exploitants. Du reste, ces ruisseaux ne sont pas directement liés à l'extraction, ce sont des ouvrages de génie civil qui ne sont pas soumis aux procédures de fin d'exploitation. Les obligations d'entretien ont été transférées aux acquéreurs des terrains. L'État n'a pas vocation à se substituer à tous les propriétaires privés... Cependant, compte tenu des difficultés auxquelles font face les acteurs locaux, l'État a cofinancé le programme de recherches de l'école des mines d'Alès ; Ségolène Royal a en outre saisi l'inspection générale du ministère de l'écologie d'une mission dont les conclusions seront rendues au premier trimestre 2016. L'accident de Robiac-Rochessedoule y sera examiné. L'expertise est, en toute hypothèse, déjà disponible au niveau régional. La création d'un laboratoire de recherche n'est donc pas nécessaire.

M. Jean-Paul Fournier.  - Cette réponse ne me rassure guère... Nous devons ensemble assurer l'après-mine, dans un territoire qui s'est illustré par ses efforts en faveur de la reconstruction après la seconde guerre mondiale, à l'époque où l'on utilisait le charbon ; nous ne pouvons, en tout cas, fermer les yeux.

Réglementation en matière d'amiante sur la voirie

M. René Danesi .  - La circulaire du 15 mai 2013 portant « instruction sur la gestion des risques sanitaires liés à l'amiante dans le cas de travaux sur les enrobés amiantés du réseau routier national non concédé » introduit une nouvelle contrainte pour les collectivités territoriales gestionnaires de voiries.

Elle est d'abord illégale, l'article annexe 13-9 du code de la santé publique n'évoquant nullement les enrobés utilisés pour la voirie.

Elle est ensuite inadaptée, car la cartographie des voiries concernées par l'éventuelle présence d'amiante n'a pas été établie par les directions interdépartementales des routes (DIR). Dès lors il faudra un carottage systématique pour rechercher la présence d'amiante.

Elle est inapplicable, enfin, car les voiries potentiellement concernées selon la circulaire sont exagérément larges.

Enfin, par le biais de différentes commissions, notamment le comité de pilotage national « travaux routiers - risques professionnels » de novembre 2013, les analyses des « carottages » de voirie sont étendues à la recherche de la présence d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).

Avec le « guide d'aide à la caractérisation des enrobés bitumineux », ce comité met en place des recommandations sur le recyclage des enrobés contenant des HAP. Sans fondement légal, on recommande aux maîtres d'ouvrage des dispositifs conduisant à un surcoût important.

Par des moyens détournés, l'administration s'exonère ainsi de l'obligation fixée par le Gouvernement de limiter le nombre de nouvelles normes...

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - La circulaire du 15 mai 2013 n'est destinée qu'aux services gérant le réseau routier national, et ne traite que de l'amiante. Le guide sur les HAP n'est pas opposable ; il a été élaboré par le groupe de travail qui réunissait INRS, assurance maladie et administration, pour dresser un état de l'art et dégager des pistes de prévention du risque amiante dans les revêtements routiers.

La cartographie établie par les gestionnaires de réseaux routiers s'avérera très utile pour affiner l'application de la réglementation amiante aux travaux de voirie et éviter les carottages inutiles.

M. René Danesi.  - Dans ma modeste commune de Tagsdorf, le bureau d'études a ordonné le carottage sur quelques mètres de chemin rural que je comptais rénover ! Je vous remercie donc de cette réponse claire et officielle. Les comités Théodule et les administrations ont développé un art consommé pour contourner les engagements du Gouvernement. Nous n'avons cependant plus les moyens d'empiler des règlementations dont le seul objet est d'entretenir une administration de contrôle pléthorique et de soutenir certaines activités économiques !

Étapes de réalisation de la ligne à grande vitesse Montpellier-Perpignan

M. Roland Courteau .  - La ligne à grande vitesse de Montpellier à Perpignan, chaînon essentiel sur le plus grand des axes européens de lignes à grande vitesse, reliant le sud de l'Espagne à l'Europe du Nord, est attendue depuis presque vingt-cinq ans, c'est-à-dire depuis la mission Querrien.

Votre prédécesseur avait posé les perspectives suivantes : un tracé approuvé à la fin de l'année 2015, une enquête publique à la fin de 2016, pour un début de chantier en 2018. Vous avez vous-même indiqué, en novembre 2014, qu'un objectif de lancement de l'enquête publique à l'horizon fin 2016 avait été retenu.

Où en sommes-nous, monsieur le ministre ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Le projet suit son cours, conformément à la feuille de route de la commission Mobilité 21.

Plusieurs étapes importantes ont été franchies en 2015. En particulier, la Commission européenne a confirmé le cofinancement de la moitié des études de 2015 à 2019, pour 11,65 millions d'euros. C'est une première étape vers le cofinancement des travaux, le moment venu.

Le 29 janvier, j'ai signé la décision confirmant le tracé. En 2016, SNCF Réseau initiera la procédure préalable à l'enquête publique, qui sera mise en oeuvre à l'hiver 2016-2017.

Les choses avancent conformément à l'engagement du Gouvernement et dans l'intérêt de la région et de l'Europe, dont les choix seront déterminants.

M. Roland Courteau.  - La basse plaine de l'Aude a déjà payé un lourd tribut lors des inondations de 1999 : il faudra un viaduc, non un simple remblai. Le projet est important pour toute la région. Merci pour votre réponse.

Pénurie de médecins en Eure-et-Loir

Mme Chantal Deseyne .  - Tous les départements de la région Centre ont une densité de médecins inférieure à la moyenne nationale : 97,6 omnipraticiens pour 100 000 habitants. L'Eure-et-Loir est le moins bien loti : 74,2 omnipraticiens pour 100 000 habitants, et entre 2013 et 2018, le nombre de médecins inscrits va diminuer de 3,4 %...

Ce manque provoque un engorgement des services d'urgence à l'hôpital. Au cours de l'été de 2015, les médecins urgentistes du centre hospitalier de Dreux ont fait grève pour alerter les pouvoirs publics. En un an, le nombre de leurs patients a augmenté de 8 %. Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Remédier au problème de démographie médicale est une des priorités du Gouvernement, que traduit le pacte territoire santé lancé par Marisol Touraine en 2012. Trois ans après, ses effets sont tangibles. Cela a conduit à définir, fin 2015, un pacte territoire santé 2, avec de nouvelles initiatives.

En contrepartie d'une bourse, 1 300 internes se sont engagés à s'installer dans une zone à faible démographie médicale ; grâce au statut de praticien territorial de médecine générale (PTMG), 500 professionnels se sont installés en zones sous-dotées.

L'exercice coordonné se développe : le nombre des maisons de santé est passé de 174 à 800 entre 2012 et 2015.

Dans le cadre du contrat de plan État-région (CPER), 42 maisons pluridisciplinaires ont été créées en région Centre-Val de Loire, dont une à Dreux le 2 janvier 2016.

Le Gouvernement continuera à s'engager pour résorber les déserts médicaux.

Mme Chantal Deseyne.  - Sur la seule ville de Dreux, sept médecins prendront leur retraite en 2016... Je vous invite à valoriser davantage la médecine générale à l'université : seuls 10 % des étudiants envisagent de s'y consacrer.

Situation des enfants intersexes

Mme Maryvonne Blondin .  - Les personnes intersexes ne disposent pas, à la naissance, de caractères sexuels déterminés. Il naît environ 2 % d'enfants intersexes par an, en France. Les parents, souvent désemparés, doivent alors se déterminer sur le sexe qu'ils veulent attribuer à leur enfant, avec le conseil des médecins ; Ces pratiques chirurgicales constituent une véritable violence à l'égard de ces enfants. Douloureuses, souvent très nombreuses, elles entraînent, bien souvent, des difficultés postopératoires et des troubles d'identité. L'ONU reconnaît d'ailleurs ces pratiques médicales comme de véritables mutilations. Les personnes intersexes sont niées dans leur identité.

Certains pays ont d'ores et déjà interdit toute opération avant que l'enfant soit en âge de choisir son sexe. Si nous n'en sommes pas encore là, la réflexion progresse en France. Dans le cadre du festival du cinéma des minorités sexuelles, des initiatives intéressantes ont été présentées, comme une résidence à Douarnenez qui a réuni nombre de professionnels d'horizons divers.

La délégation aux droits des femmes organisera le 12 mai prochain une table ronde sur la question. Je rappelle que le TGI de Tours, en octobre dernier, a autorisé la mention « sexe neutre » sur le registre d'état civil. Le Gouvernement compte-t-il aller plus loin ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Le phénomène est heureusement marginal - deux naissances sur 5 000, soit 160 par an d'après mes sources - ce qui ne minimise pas l'importance du problème. Les enfants ont d'abord besoin d'une prise en charge interdisciplinaire. Le centre des maladies rares du développement sexuel, implanté à Lyon et au Kremlin-Bicêtre, est le centre de référence sur ces questions. Les interventions chirurgicales doivent tenir compte des données médicales et du libre choix des parents, et des enfants lorsqu'ils sont en âge de l'exprimer.

Ces questions font l'objet de réflexions larges au niveau européen compte tenu de la complexité des enjeux de l'intersexualité. Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) sera saisi avant que le Gouvernement prenne des décisions en la matière.

Mme Maryvonne Blondin.  - Devoir remplir une case femme ou homme sur la fiche d'état civil reste un problème, auquel je souhaite que l'on sensibilise nos concitoyens le plus largement possible. En Allemagne, les interventions chirurgicales sont différées jusqu'aux 15 ans de l'enfant, qui peut ainsi exprimer son choix. Le Défenseur des droits serait utilement saisi...

Mutualisation de la direction des centres sociaux

Mme Corinne Imbert .  - Ma question porte sur la politique d'animation de la vie sociale, élément de la politique familiale et sociale porté par les caisses d'allocations familiales (CAF). Cette politique s'appuie, notamment, sur les centres sociaux et les espaces de vie sociale. Les collectivités, qui financent les prestations de service assurées par le centre et les fonctions dites « tronc commun », se sont engagées dans une démarche d'optimisation et de rationalisation de leurs moyens dans tous les secteurs d'activité. Le département de la Charente-Maritime compte par exemple vingt-trois centres sociaux, dont sept pour la seule ville de La Rochelle. Le regroupement envisagé à Saintes s'est heurté à la position de la CAF locale, au motif qu'il ne peut être accordé plusieurs agréments à une seule association assurant la fonction d'animation globale et que l'agrément d'un centre social passe par la nécessité de disposer d'un directeur. Or ces centres ne peuvent exister qu'avec l'apport des financements des collectivités locales. Aussi, convient-il que les centres sociaux puissent mutualiser leurs moyens.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - L'offre d'accompagnement de la Cnaf a été précisée dans sa circulaire du 20 juin 2012 - les critères ont été définis plus clairement. L'encadrement de chaque centre social exige un ETP. Mais il est possible de mutualiser certaines fonctions de pilotage, sans fusionner pour autant les structures.

Le conseil d'administration de la CAF doit en toute hypothèse donner son accord.

Mme Corinne Imbert.  - Merci. Vous comprenez bien qu'il ne s'agit pas de diminuer le nombre de centres, mais de faciliter la mutualisation de leurs directions. C'est une compétence facultative des départements, qui sont donc attachés à cette mutualisation. Une modulation par territoire est nécessaire.

Prévention spécialisée

Mme Marie-Pierre Monier .  - D'année en année, de plus en plus de départements se désengagent financièrement des actions de prévention spécialisée. Cette situation soulève une forte inquiétude, comme l'a souligné le député Jean-Pierre Blazy, dans son rapport d'information. Il est vrai que les articles du code qui traitent de la prévention spécialisée sont susceptibles d'interprétations contradictoires en ce qui concerne l'obligation pour le département de mettre en oeuvre la prévention spécialisée. En outre, leur rédaction pourrait laisser croire qu'aucune action ne saurait être menée hors des zones urbaines sensibles. Pourtant même les territoires les plus ruraux sont concernés.

Comment expliciter les compétences et leur exercice en matière de prévention spécialisée ? Quelles suites le Gouvernement entend-il apporter à la proposition de M. Blazy de dresser un état des lieux du financement de la prévention spécialisée par les départements, afin de le pérenniser ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Croyez bien que je partage votre préoccupation. De nouvelles menaces pèsent sur les jeunes : les équipes de prévention spécialisée sont une aide indispensable pour ceux qui sont éloignés de toute autre intervention sociale. Cette prévention relève désormais de l'aide sociale à l'enfance. La feuille de route pour la protection de l'enfance prévoit plusieurs mesures pour consolider l'exercice de cette prévention. Un groupe de travail a été installé le 27 janvier. Il rendra ses propositions avant l'été.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Merci de votre attention à ce problème. Ancienne enseignante, je peux témoigner de l'utilité de la prévention spécialisée, y compris dans la ruralité, qui ne doit pas être encore une fois oubliée.

Accueil des personnes handicapées

M. Dominique Bailly .  - Le Gouvernement mène une politique très active sur la question du handicap : la troisième conférence nationale du handicap du 11 décembre 2014 ou encore la loi du 10 juillet 2014 en témoignent. Des difficultés subsistent pourtant. Faute de places disponibles dans les établissements spécialisés français, des personnes souffrant d'handicaps complexes sont orientées vers des établissements situés hors de nos frontières : 6 500 en Belgique et parmi eux 1 500 enfants.

Les conséquences pour les proches sont graves : les familles sont épuisées, parfois même contraintes de quitter leur activité professionnelle pour s'occuper à plein temps de leur parent handicapé, voire de déménager si elles en ont les moyens.

Pourquoi ne pas créer de nouvelles places d'hébergement, en réorientant les financements de l'assurance maladie actuellement consacrés à l'accueil de ces citoyens handicapés, pour financer ces nouvelles places en France, via un fonds géré par la caisse nationale de la solidarité et de l'autonomie ? On pourrait ainsi créer 4 000 emplois en France ; l'assurance maladie et les départements économiseraient 250 millions d'euros.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - En effet, la Belgique est accueillante pour les handicapés français. Un accord-cadre franco-wallon a été signé en 2014, ce qui nous permet de contrôler les établissements par des inspections communes. Cela ne dédouane pourtant pas la France de ses responsabilités : aucune personne ne devrait être contrainte à s'exiler ainsi.

Un fonds d'amorçage de 15 millions d'euros servira à financer des interactions à domicile ou des créations de places sur mesure. Les crédits devront être utilisés en cohérence avec la loi Santé. L'Igas fera un bilan fin 2017.

M. Dominique Bailly.  - Merci de votre attention. Je souhaitais alerter sur l'urgence de la situation. La vie quotidienne de certains de nos concitoyens est fortement perturbée. Si le Gouvernement est attentif, l'administration doit être dans la même dynamique.

Mesures agro-environnementales et climatiques

Mme Agnès Canayer .  - Dans le cadre de la nouvelle réforme de la politique agricole commune en 2015, les mesures agro-environnementales sont devenues « mesures agro-environnementales et climatiques » (Maec) pour encourager les pratiques favorables à l'environnement.

En Seine-Maritime, neuf projets ont été retenus. Or le cahier des charges ne tient pas compte des conditions géologiques et climatiques qui requièrent de lutter contre l'érosion et l'assèchement des sols. Les agriculteurs abandonnent donc leur projet. La rémunération est trop faible. Comment le cahier des charges et la rémunération pourraient-ils être adaptés aux besoins de mon département ?

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie .  - Les MAEC sont de deux types : des mesures systèmes et des mesures localisées qui ne concernent que quelques parcelles. Dans un cas comme dans l'autre, les montants sont fixés par un calcul de surcoût, défini au niveau européen.

Des modifications sont à l'étude pour répondre aux retours d'expérience des utilisateurs. Les cahiers des charges et des montants sont révisés pour tenir compte des spécificités locales. Notamment dans votre région, les agriculteurs demandaient à toucher des avances de trésorerie sur les versements qui sont en retard du fait de la pénalité d'1 milliard qui a touché la France à cause des pratiques des années 2008 à 2012. Ce sera possible en avril, comme l'a annoncé le ministre de l'agriculture le 26 janvier.

Mme Agnès Canayer.  - Les agriculteurs ont besoin d'être rassurés par des engagements qui prennent en compte les spécificités locales.

Accueil des mineurs isolés étrangers

M. Christian Favier .  - Dans le cadre d'un protocole signé avec l'Association des départements de France, une cellule nationale avait été instituée en 2013, afin de mieux répartir sur le territoire national la prise en charge des mineurs étranges isolés. Malheureusement ces dispositions ne sont plus respectées et, en 2015, le Val-de-Marne, qui aurait dû recevoir 13 mineurs isolés, en a accueilli 185. Cela déstabilise les dispositifs d'accueil du département et a représenté une charge supplémentaire de 21 millions d'euros en 2015.

Mon département ne pourra faire face à cette explosion de l'accueil de ces mineurs, si le rythme actuel des placements judiciaires ne faiblit pas et que la répartition nationale ne reprend pas.

Que compte faire le Gouvernement pour assurer, sans délai, une juste répartition territoriale de cette mission et pour que l'État prenne sa part des dépenses d'accueil ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le garde des sceaux est actuellement à l'Assemblée nationale.

La France comme les autres pays européens accueille de nombreux mineurs isolés étrangers : 213 ont été confiés au Val-de-Marne en 2014. En 2015, sur les 343 confiés initialement au Val-de-Marne, 174 ont été réorientés. La dette de l'État a été soldée en septembre dernier, pour 9,5 millions et le Gouvernement a ouvert une ligne de crédits de 14 millions d'euros.

Deux articles ont été introduits à la demande du Gouvernement dans le projet de loi Enfance que le Sénat examinera le 18 février afin de parvenir à une répartition de ces mineurs sur tout le territoire. Une circulaire du 16 décembre dernier devait y contribuer en attendant, en facilitant la coordination entre les différents services.

Je salue vos initiatives. Le Gouvernement est pleinement investi dans la résolution de ce problème.

M. Christian Favier.  - L'accueil des mineurs isolés étrangers relève d'une mission régalienne de l'État, qui doit s'assurer que ces personnes relèvent bien des engagements de la France, ce qui n'est pas le cas : de nombreux jeunes exploités par des mafieux ne sont pas identifiés par les services de l'État. Je renverrai tout mineur qui ne pourra pas justifier de son identité, rétablissant l'État dans ses missions régaliennes. J'assignerai aussi l'État en référé pour obtenir la compensation de cette dépense indue.

Établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés non lucratifs

M. Jean-Jacques Filleul .  - Les services fiscaux notifient, de plus en plus souvent, aux établissements et services sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés non lucratifs des assujettissements à la taxe foncière et à la taxe d'habitation, alors même que d'autres bénéficient d'une exonération pour des activités similaires. Elles sont privées de crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, de crédit d'impôt recherche et de crédit d'impôt innovation, alors que les établissements de santé privés de statut commercial en bénéficient. Les mêmes activités sociales et médico-sociales gérées par des centres communaux d'action sociale sont exonérées à la fois de la TVA et de la taxe sur les salaires - qui est une charge fixe que l'on acquitte quelle que soit sa situation budgétaire, tout en pouvant accéder au fond de compensation de la TVA pour leurs investissements.

J'appelle à un réajustement fiscal au bénéfice du secteur privé non lucratif.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Vous soulevez, dites-vous, une injustice fiscale ; elle est toute relative : le secteur privé est soumis aux trois impôts commerciaux. Je reste réservé sur le fait de priver les collectivités territoriales de ressources propres. L'article 92 de la loi de finances pour 2016 les autorise à décider d'exonérations de ce genre si elles le souhaitent. L'abattement sur la taxe sur les salaires a été porté de 6 000 à 20 000 euros. Le CICE a trouvé son pendant dans l'économie sociale. Le président de la République a évoqué la mutation du CICE vers une exonération de cotisations sociales. Cela pourrait être une réponse à votre préoccupation.

M. Jean-Jacques Filleul.  - Les associations nous ont entendus : nous devons encore travailler pour qu'elles ne se sentent plus exclues. Votre piste me semble de nature à les satisfaire.

Établissements publics de coopération culturelle

Mme Sylvie Robert .  - Les établissements publics de coopération culturelle (EPCC) sont la traduction de notre modèle français, la culture étant une compétence partagée entre État et collectivités territoriales. Ils se sont multipliés mais ils rencontrent des défis économiques. Deux mesures pourraient les aider. Un EPCC dont l'État est membre ne peut récupérer la TVA pour les travaux d'investissement dont il est maître d'ouvrage. C'est dommage. De plus, les EPCC sont soumis à la taxe sur les salaires, ce qui grève leur budget. Quel serait le chiffrage de la suppression de ces deux règles ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - L'extension du FCTVA demandée par de nombreux amendements à la loi de finances représenterait une dépense importante. Les EPCC ne sont pas exclus dès lors que tous ses membres peuvent bénéficier du FCTVA. Ceux dont l'État ou un établissement public national est membre ne sont donc pas concernés. Les y inclure créerait un précédent regrettable. Attention à ne pas faire de même sur la taxe sur les salaires. Je vous transmettrai les chiffrages demandés, qui sont en cours.

Assouplissement des normes pour les petites entreprises

M. Jacques Genest .  - Les grands oubliés de la simplification sont les petites entreprises qui doivent sans cesse revoir leurs locaux pour satisfaire à de nouvelles normes en termes de sécurité ou d'accessibilité. Dommage pour celles des territoires ruraux qui n'ont pas vu l'effet fracassant du choc de simplification ! Les fonctionnaires qui écrivent ces textes pensent-ils à leur effet sur les Français ? Maire, je peux ester en justice mais je n'ai pas le droit de changer une ampoule.

Cette situation kafkaïenne ferait rire si elle n'était tragique. Le Gouvernement compte-t-il simplifier la vie des petits artisans, poumon économique de nos territoires ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Excusant l'absence de Martine Pinville, je rappelle que 55 mesures du choc de simplification sur les 415 qu'il comprend - auxquelles 90 nouvelles ont été ajoutées le 3 février-  ont déjà été engagées : l'adaptation des règles d'accessibilité par la possibilité de pose de rampes amovibles. Rappelons aussi le moratoire des normes : une norme ajoutée, une norme supprimée. Rappelons enfin la lutte contre la surtranspositon. Un programme consacré aux problématiques des PME et TPE prend en compte leurs préoccupations à trouver des ateliers.

M. Jacques Genest.  - Si les services parisiens appliquaient les normes avec le même zèle que les provinciaux, il ne resterait plus aucun hôtel à Paris ! Le monde rural aime les paroles, mais préfère les actes.

Commerce de proximité

M. Mathieu Darnaud .  - Le commerce de proximité est un véritable lien social, un lieu d'échanges qui contribue à l'attractivité d'une ville, petite ou moyenne ; la qualité du cadre de vie des habitants en dépend. La majorité de ces entreprises proposent une grande variété de produits de qualité, provenant de circuits courts et pour lesquels la relation humaine est au coeur de leur activité. Le commerce reflète l'âme d'un village.

Malheureusement, les cessions de fonds de commerce se sont effondrées au premier semestre de 2015, en passant sous le seuil des 20 000, soit une chute de près de 12 % en un an - selon le baromètre officiel des annonces civiles et commerciales. Sur l'ensemble du territoire, la proportion des commerces vacants en centre-ville est proche de 8 %.

À la suite de la loi du 18 juin 2014 qui avait pour but de simplifier les modalités de mise en oeuvre du Fisac, le montant de cette aide est passé de 42 millions en 2012 à 15 millions en 2016.

Cette baisse massive et brutale des moyens d'accompagnement est un des facteurs de la crise actuelle. Les artisans sont préoccupés par les contraintes du compte pénibilité pour lesquelles ils ne sont pas prêts. Que compte faire le Gouvernement pour aider le commerce de proximité ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le Gouvernement s'était engagé à réformer le Fisac : il passe d'une logique de guichet à une logique de projets, conformément aux recommandations de la Cour des comptes.

Notre action est désormais ciblée vers les projets qui ont des conséquences sur les zones marquées par une disparition de l'activité commerciale ou la mono-activité. Le délai dont dispose la commune pour trouver un gérant passe de deux à trois ans, tandis que le droit de préemption pourra être délégué à l'intercommunalité ou à une société d'économie mixte.

Concernant les centres villes, Mmes Pinel et Pinville ont lancé une mission le 5 février dernier, dont les conclusions seront rendues en juin 2016. Sur le compte pénibilité, d'autres ministres vous répondront mieux que je ne saurais le faire.

M. Mathieu Darnaud.  - Sur le Fisac, reste l'essentiel : le montant est passé de 42 à 15 millions d'euros ; les moyens manquent pour le développement des territoires ruraux. Je serai heureux d'entendre un autre ministre sur le compte pénibilité. Mais les artisans voient arriver de nouvelles contraintes avec inquiétude.

Évasion fiscale organisée

M. François Marc .  - La crise financière de 2007 et 2008 a fait d'énormes ravages ; de nombreuses dérives du monde financier ont contribué à ce déclenchement : et notamment certaines pratiques spéculatives et les agissements de certains réseaux bancaires internationaux. On peut se féliciter que des mesures significatives aient été prises ces dernières années en vue d'une meilleure régulation financière et bancaire. La réglementation a été renforcée et les conventions internationales ont évolué dans un sens souhaitable.

Des questions restent toutefois posées sur le développement considérable du shadow banking, avec toute l'opacité que cela laisse deviner quant aux méthodes et aux agissements spéculatifs des acteurs de la sphère financière. Une autre question fondamentale porte sur la subsistance de circuits d'évasion fiscale organisée qui ont continué à prospérer depuis 2008.

A-t-on pris des mesures suffisantes pour prévenir et sanctionner ces circuits d'évasion fiscale organisée ? Je pense à la banque HSBC ou la banque Pasche. D'anciens cadres de cet établissement ayant son siège à Monaco, et qui était filiale d'une banque française jusqu'à l'été 2015, ont dénoncé des pratiques frauduleuses ayant eu cours jusqu'à une période très récente.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Ces agissements étaient inacceptables. HSBC a été mis en examen et la justice fait son travail ; le Gouvernement est partie civile dans cette affaire.

Depuis 2012, nous avons promu un accord entre pays de l'OCDE - que 57 États ont signé - pour le partage des données bancaires des particuliers. Tous les moyens sont mis en oeuvre pour qu'il puisse commencer en 2017. Nous assistons aussi à de nombreuses régularisations car les contribuables savent que l'ère de l'opacité est derrière nous. Cela a rapporté 2,65 milliards en 2015, après 1,9 milliard en 2014. Nous attendons 2,4 milliards en 2016. Sur la totalité du quinquennat, nous avons mis fin au secret bancaire. Conséquence, nous pouvons baisser les autres impôts.

L'ACPR, vous le savez, prononce des sanctions pour les banques qui manquent à leurs obligations.

M. François Marc.  - Les choses avancent ; mais la finance évolue aussi dans un sens qui n'est pas rassurant. Avec le shadow banking, 40 % des transactions financières ne seraient pas régulées.

M. Rameix, le président de l'Autorité des marchés financiers, juge les moyens de contrôle trop modestes au regard des capacités des établissements. Il y va de la protection des épargnants et de l'orientation de l'épargne vers l'économie réelle et non vers la spéculation.

Effectifs de la douane

M. Thierry Foucaud .  - Le rétablissement temporaire des contrôles aux frontières à compter du 6 novembre 2015 et les mesures décidées dans le cadre de l'application de l'état d'urgence ont mis en lumière la situation, d'une gravité sans précédent, à laquelle est confrontée la profession douanière et qui relève d'une question de sécurité nationale.

L'approche douanière par les flux de marchandises, de capitaux, en complémentarité des personnes, a démontré son efficacité. Cette approche devrait pouvoir se décliner en tout point du territoire mais ce n'est plus le cas, à cause de la multiplication des économies réalisées sur les vedettes garde-côtes, les avions, les brigades, les bureaux, les effectifs et même les missions, en pleine guerre contre le terrorisme.

La douane doit redevenir une administration de protection prioritaire. Le président de la République a annoncé, le 16 novembre 2015, le recrutement de mille douaniers en plus des 70 emplois annoncés à la suite des attentats de janvier 2015. Le Gouvernement s'engage-t-il à ce que les effectifs soient effectivement portés à 17 466 d'ici à deux ans et que les moyens mis à leur disposition soient au rendez-vous ? La loi de finances pour 2016 prévoit la création de 500 postes mais aussi la suppression de 230 autres...

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le Gouvernement est conscient de l'importance de la douane. Un plan de renfort des moyens a été annoncé par le président de la République devant le Congrès le 16 novembre 2015, dont j'ai précisé le contenu en Haute-Savoie le 22 janvier 2016. Ces nouveaux moyens sont budgétés dans la loi de finances pour 2016. 1 000 recrutements supplémentaires auront lieu en 2016 et 2017 : 550 agents de constatation, 350 contrôleurs et 100 inspecteurs. Évitons la bataille de chiffres. Au total, 635 emplois supplémentaires seront créés, nous mettons un terme à une trajectoire décroissante. Le nombre de postes mis au concours de la douane en est la preuve. Outre les moyens humains, nous augmentons aussi les équipements.

M. Thierry Foucaud.  - Si je comprends bien, les effectifs seront bel et bien portés à environ 17 400 dans deux ans...

La baisse des effectifs douaniers était préoccupante. Mais il faut aussi renforcer les moyens sur tout le territoire. Ainsi le scanner des conteneurs au Havre n'a toujours pas été remplacé. Cet outil non intrusif était pourtant très efficace. Il s'agit non seulement de défendre des emplois mais bien le pays !

Zones d'entraînement à très basse altitude et croissance verte

M. Olivier Cigolotti .  - L'installation de zones d'entraînement militaire de type secteur d'entraînement à très basse altitude (SETBA) pénalise l'activité éolienne en France. Ainsi, la Haute-Loire compte seulement trois parcs éoliens en dépit d'atouts sérieux et peut miser sur le développement de l'énergie éolienne. Le schéma régional éolien de juin 2012 a défini les zones favorables. Le ministère de la défense est pleinement associé à la réalisation de ce schéma. Une partie du département est exclue, afin de tenir compte des réseaux très basse altitude (RTBA). Les avis négatifs émis par le ministère de la défense en raison de l'existence de périmètres SETBA compromettent la réalisation de nombreux projets, notamment à Bas-en-Basset, à Saint-Paul-de-Tartas et à Saint-Jean-de-Nay.

En 2014, le ministère de la défense avait annoncé qu'une réflexion serait lancée sur les moyens techniques opérationnels ou réglementaires, afin de permettre de concilier au mieux les activités du ministère de la défense, tout en accroissant la part des énergies renouvelables. Où en est-on ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Il est impératif de maintenir l'entraînement des équipages à basse altitude, pour des raisons de sécurité et d'efficacité.

Les SETBA existaient déjà lors de la création des premiers schémas éoliens. Chaque projet fait l'objet d'une appréciation au cas par cas. Il faut savoir que la hauteur des éoliennes est passée en moyenne de 90 mètres à 200 mètres les rendant plus dangereuses pour les équipages. Les SETBA sont choisis en raison de leur position centrale, de leur faible densité de population et de leur topographie, critères auxquels la Haute-Loire répond bien.

Une réunion a été tenue à la préfecture d'Auvergne. D'autres échanges sont prévus. Nous renforçons l'information en amont des porteurs de projets. Des études sont en cours pour évaluer les effets des éoliennes sur les radars.

Notez qu'à ce jour, 26 GW ont été autorisés par le ministère de la défense, l'objectif fixé par le Grenelle pour 2020 étant de19 GW. Et en Haute-Loire, 462 MW ont été autorisés sur les 800 prévus au schéma.

M. Olivier Cigolotti.  - Merci. La Haute-Loire ne veut pas rester en marge de la transition énergétique et de la croissance verte.

Financement des temps d'activités périscolaires dans les établissements privés

M. Yannick Botrel .  - Alors que de nombreux établissements d'enseignement privés sous contrat d'association, en partenariat avec les communes, ont mis en oeuvre des temps d'activités périscolaires dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, la non-éligibilité de leurs dépenses au titre du fonds de soutien crée une inégalité de traitement qui semble contestable et pénalise les communes concernées, déjà lourdement impactées par la situation budgétaire contrainte que nous connaissons.

Le dispositif est-il pleinement opérationnel ? Quelles sont les raisons de cette non-éligibilité au fonds de soutien des communes au titre des établissements privés sous contrat d'association ? Il semble que ma question soit caduque depuis la loi de finances pour 2016 ; reste la question de la rétroactivité pour la période entre la rentrée 2105 et la date d'adoption du texte...

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Certaines communes ont souhaité mettre en place le dispositif pour la totalité des écoles publiques et privées sous contrat de leur territoire. Ce choix conforme à l'esprit de la réforme a conduit le ministère de l'éducation à apporter une réponse pérenne à leur demande, par le biais d'un amendement au collectif de fin d'année.

Désormais tous les élèves sont pris en compte pour le calcul des aides dès lors que le dispositif s'inscrit dans un projet éducatif territorial.

M. Yannick Botrel.  - Cette disposition sera-t-elle rétroactive ? En Bretagne, de très nombreux enfants sont scolarisés dans le privé.

Assouplissement des règles de gestion de trésorerie des communes

M. Patrick Masclet .  - La baisse des dotations pénalise les communes, qui sont contraintes de réduire leurs investissements. Les départements sont en difficulté pour les aider - le reste à charge au titre du RSA est ainsi de 288 millions d'euros dans celui du Nord.

Pour continuer à investir les maires sont contraints d'ouvrir des lignes de trésorerie, qui doivent être remboursées au cours de l'exercice. Or les subventions attendues par les communes arrivent souvent en retard... Le Gouvernement entend-il assouplir les règles, de sorte qu'au moment de l'arrêté des comptes le déséquilibre constaté n'alerte pas les services de l'État ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - L'investissement communal et intercommunal, qui représente 60 % de l'investissement public, est fondamental. Les lignes de trésorerie n'entrent pas dans le calcul de l'équilibre budgétaire. Il n'est ainsi pas nécessaire de modifier les règles de gestion.

Le Gouvernement soutient l'investissement public. La Caisse des dépôts et consignations propose déjà de préfinancer le remboursement de TVA à taux zéro. Le Gouvernement a aussi débloqué un milliard d'euros pour soutenir l'investissement des collectivités territoriales, crédits déjà mis à la disposition des préfets de département.

M. Patrick Masclet.  - Merci pour cette réponse précise. Les services de l'État doivent être sensibilisés.

Communication du fichier DGF aux collectivités locales

M. Dominique de Legge .  - Chaque année, la direction générale des collectivités locales (DGCL) communiquait aux collectivités locales, laboratoires de recherches ou bureaux d'études qui en faisaient la demande, le fichier DGF qui intègre l'ensemble des paramètres de calcul de celle-ci pour toutes les collectivités locales de France. Ce fichier est précieux car il sert de base aux intercommunalités pour effectuer des calculs de critères de répartition de la dotation de solidarité communautaire. Ce fichier, communiqué depuis des années sous format papier est, depuis quelques années, dématérialisé. Or depuis 2014, la DGCL refuse de le communiquer ou de le vendre, ce qui est contraire à l'exigence de transparence...

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Conformément à la décision n°25 du Cimap du 18 décembre 2013, le CD-Rom contenant ce fichier n'est plus commercialisé par la DGCL. Les données figurent désormais sur son site internet. Une annexe est jointe au projet de loi de finances qui détaille les versements aux collectivités territoriales et les prélèvements sur recettes.

Chaque commune, EPCI, département ou région peut trouver sur le site toutes les informations utiles, montants versés et contribution aux fonds nationaux de péréquation, les principaux critères de répartition de ces fonds et les modalités de répartition des dotations d'État. Il est enfin possible d'en consulter les évolutions dans le temps. Toutes ces données sont téléchargeables.

M. Dominique de Legge.  - La vie est belle, donc... Le site de la DGCL a été rénové... Mais les collectivités territoriales n'ont pas toujours les moyens humains pour les analyser en détail. Par transparence, il serait bon de les communiquer à tous ceux qui y ont un intérêt.

Destruction de 750 logements sociaux récemment rénovés à Clamart

M. Philippe Kaltenbach .  - Un projet de démolition de 750 logements sociaux dans le quartier du Pavé blanc à Clamart, dans les Hauts-de-Seine, a été lancé ; l'actuelle équipe municipale entend confier les terrains à des promoteurs privés pour construire des logements de standing et assurer, dit-elle, la mixité sociale... Pourtant, un projet de requalification globale de ces logements et de leur environnement vient de s'achever après plusieurs années de travaux dont le coût global avoisine les 20 millions d'euros.

La destruction de ces 750 logements sociaux, tout juste requalifiés, va à l'encontre des efforts entrepris dans la lutte contre la crise du logement et représente un gaspillage d'argent.

L'association des locataires s'est mobilisée ; la pétition qui a été lancée a révélé que 69 % des occupants de ces logements s'opposent à leur destruction.

L'État donnera-t-il son accord à ce projet de démolition ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - 671 logements ont été réhabilités il y a une vingtaine d'années, les travaux ont été amortis ; d'autres ont été lancés plus récemment, sans aide publique. Le préfet des Hauts-de-Seine, vous le savez, est particulièrement attentif à ce dossier. Rien n'est figé, les études se poursuivent.

L'aménagement du quartier du Pavé blanc, qui date de 1964, n'est plus guère adapté aux besoins de la population. Il n'est pas anormal, de plus, d'introduire de la mixité sociale là ou 100 % des logements sont des logements sociaux. S'il y a démolition de tout ou partie des logements, l'État sera vigilant sur la qualité de la concertation, celle des propositions de relogement et l'équilibre économique de l'opération.

M. Philippe Kaltenbach.  - Les logements ont été réhabilités. Mieux vaudrait construire des logements sociaux là où on en manque - la ville de Clamart en compte 26 % - que détruire les logements de qualité qui existent. Je note toutefois que rien n'est encore tranché.

Création d'une zone d'aménagement concerté

M. Rémy Pointereau .  - Depuis la loi Alur, l'avis émis par l'autorité environnementale sur l'étude d'impact préalable à la création d'une ZAC pourra tenir lieu d'avis pour les études d'impact afférentes aux acquisitions foncières, aux travaux et aux ouvrages réalisés au sein de la zone. Cette disposition, adoptée par le Sénat, est bienvenue car elle allège les normes dans un domaine, l'urbanisme, dont deux tiers des élus locaux ont jugé la simplification prioritaire.

Elle contribuera, sans doute, à revaloriser le dispositif des ZAC, qui a largement perdu de son attractivité depuis les années 1990.

Cette désaffection est due, pour partie, à la prolifération normative. Plusieurs études d'impact sont, aujourd'hui, requises lors de la mise en oeuvre des ZAC : la première pour leur création et les autres pour les travaux, les ouvrages et les aménagements réalisés en leur sein. Au total, le cumul des études d'impact conduit à porter les délais de créations des ZAC à vingt-cinq mois dans le meilleur des cas, et entre trois et cinq ans en pratique.

Quand sera pris le décret en Conseil d'État prévu par la loi Alur et quel en sera le contenu ? Toutes les ZAC seront-elles concernées ? Les autorités environnementales pourront-elles dispenser les ZAC de certaines évaluations ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - L'article L. 122-3 introduit par la loi Alur vise à simplifier les procédures. J'ai souhaité aller plus loin : en vertu d'une ordonnance dont l'habilitation a été votée dans la loi sur la croissance et le pouvoir d'achat, l'étude d'impact globale de la ZAC, pourvu qu'elle soit précise, vaudra pour les projets inscrits dans la même zone. Le décret pris sur le fondement de cette ordonnance est lui-même, simultanément, en préparation. Cela redonnera à la ZAC sa vocation d'ensemblier, accélérera les projets de construction sans mettre en péril la protection de l'environnement, sera source d'économies importantes pour les maîtres d'ouvrages publics et privés et s'inscrit parfaitement dans le plan de relance de la construction.

M. Rémy Pointereau.  - Nous avons besoin de concret, les normes sont un frein à l'emploi et à l'activité. Toute avancée réglementaire produisant des résultats tangibles dans les meilleurs délais est bonne à prendre... J'en proposerai moi-même si le Gouvernement tarde.

Mise en oeuvre du plan numérique dans les établissements d'enseignement

M. Jean-Claude Lenoir .  - Le déploiement du plan numérique dans l'ensemble des établissements publics locaux d'enseignement est un objectif du Gouvernement.

Qu'en est-il des ressources toutefois ? Les manuels numériques coûtent plus cher que leur forme papier, sans compter qu'il faudra les changer avec la refonte des programmes. De plus, l'administration des réseaux repose souvent sur le volontariat et la bonne volonté des personnels enseignants. Dans nombre de collèges ruraux, toutefois, les équipes pédagogiques ne sont pas en nombre ou n'ont pas les compétences. Le Gouvernement a annoncé la création de référents numériques. Où en est-on ? Quels seront les moyens ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .  - Mme Najat Vallaud-Belkacem a lancé l'appel à projet « Collège numérique » pour concentrer les efforts de tous et accélérer les investissements nécessaires. Pour 1 euro investi dans les équipements individuels par les collectivités territoriales, l'État versera 1 euro et 30 euros supplémentaires par enfant et par enseignant équipé pour l'acquisition de ressources supplémentaires.

L'État assume aussi la totalité de l'équipement informatique des enseignants. La mise à disposition des banques de ressources numériques sera gratuite. Un plan exceptionnel de formation au numérique a été lancé : 250 000 enseignants ont déjà été formés. Des référents ont été créés dans chaque académie.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je ne peux que souligner le décalage entre les objectifs annoncés et les moyens. Trente euros par élève, c'est bien peu au regard du coût des manuels.

La question de la rémunération des personnels reste posée. Les enseignants souhaitent avant tout une décharge horaire. Je partage les objectifs de ce plan mais les moyens doivent être à la hauteur.

Enfin à titre personnel, je tiens à saluer, madame la ministre, à l'heure où la rumeur vous donne partante du Gouvernement, la courtoisie qui ne vous a jamais quittée tout au long de nos nombreux débats. Je vous souhaite bonne chance dans l'exercice de la mission que les électeurs vous ont confiée.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Je m'associe, madame la ministre, aux propos du président Lenoir.

La séance est suspendue à 12 h 25.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.