SÉANCE

du vendredi 29 avril 2016

90e séance de la session ordinaire 2015-2016

présidence de M. Hervé Marseille, vice-président

Secrétaires : M. Jean Desessard, M. Jean-Pierre Leleux.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

République numérique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une République numérique.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 23

L'amendement n°89 rectifié bis n'est pas défendu, non plus que les amendements nos60 et 68.

M. le président.  - Amendement n°150, présenté par M. Courteau.

Après l'article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le fait, pour une personne morale définie à l'article L. 511-1 du code monétaire et financier, d'effectuer des opérations mentionnées à l'article L. 314-1 du même code, dans le cadre d'activités définies à l'article568 ter du code général des impôts, est puni d'une peine de 75 000 euros d'amende par opération effectuée.

M. Roland Courteau.  - 722 bureaux de tabac ont dû fermer en 2013 ; mais la consommation de tabac en France ne diminue pas... La raison en est que la vente de tabac en ligne se développe fortement, en dépit de l'interdiction prévue par la loi de 2004 - l'achat est, lui, interdit depuis 2014. À Roissy, les centres de tri regorgent de colis contenant des cartouches de cigarettes commandées sur internet ; et il s'agit souvent de contrefaçon. Les contrôles ne suffisent plus. D'où cet amendement qui impose aux banques de refuser les transactions illicites en rejetant les paiements sur les sites de e-commerce qui ne respectent pas la loi.

M. le président.  - Amendement identique n°177 rectifié ter, présenté par M. Marseille, Mme Doineau, M. Bonnecarrère, Mme Joissains et MM. Cigolotti, Bockel, Maurey, Kern, Gabouty et Guerriau.

M. Hervé Maurey.  - Défendu.

L'amendement n°299 n'est pas défendu, non plus que les amendements nos44 rectifié bis, 61 et 69.

M. le président.  - Amendement n°151, présenté par M. Courteau.

Après l'article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le cinquième alinéa du 7 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique est ainsi modifié :

1° À la première phrase, après les mots : « jeux d'argent », sont insérés les mots : « et d'achat de tabac » ;

2° À la seconde phrase, après les mots : « d'actes de jeux », sont insérés les mots : « ou d'achat de tabac ».

M. Roland Courteau.  - Cet amendement complète le précédent. Le marché parallèle du tabac ne cesse de progresser. Il est temps de réagir fermement.

L'amendement n°300 n'est pas défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur de la commission des lois.  - Je comprends la démarche. Mais les banques ne peuvent connaître la nature des produits achetés par le consommateur sur une plateforme numérique. L'obligation de signalement n'existe que pour les jeux d'argent. Une approche globale, plurisectorielle, est préférable, car d'autres produits, comme l'alcool ou la drogue, sont concernés.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique.  - Avis défavorable. Je sais les préoccupations des buralistes. Mais est-ce aux banques ou aux fournisseurs d'accès de contrôler les contenus ? On a estimé que oui pour la lutte contre le terrorisme ou la pédopornographie. La question est éthique. Il faut plutôt donner aux pouvoirs publics, aux douanes, les moyens de lutter contre les réseaux, renforcer les sanctions pénales, et se doter des outils technologiques innovants de traçage des flux. La question se pose évidemment aussi pour d'autres produits comme l'alcool et les drogues.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous voterons contre ces amendements, qui ne règlent pas le problème des moyens alloués aux douanes, et donnent aux banques des responsabilités qui n'ont pas à être les leurs.

M. Philippe Dallier.  - Ce dispositif semble impraticable. De quels moyens disposons-nous pour nous assurer que la loi est appliquée ?

M. Roland Courteau.  - C'est bien le problème !

M. Philippe Dallier.  - Il faut bloquer l'accès aux sites de vente, comme peut le faire l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) pour les jeux en ligne.

Mme Corinne Bouchoux.  - L'amendement pose plus de problèmes qu'il n'en résout.

Un mot sur nos débats, pour les internautes qui nous suivent : va-t-on à nouveau multiplier les scrutins publics ?

M. le président.  - Le règlement sera appliqué.

M. Roland Courteau.  - J'entends les réserves, mais vous ne proposez rien de précis...

Les amendements identiques nos150 et 177 rectifié ter ne sont pas adoptés.

L'amendement n°151 n'est pas adopté.

L'amendement n°82 rectifié bis n'est pas défendu, non plus que les amendements nos360 et 382 rectifié ter.

ARTICLE 23 BIS (Supprimé)

L'amendement n°119 rectifié bis n'est pas défendu.

L'article 23 bis reste supprimé.

ARTICLE 23 TER (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°502 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le loueur du local à usage d'habitation qui le loue pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile doit justifier de sa qualité de propriétaire dudit local ou, s'il en est locataire, de l'autorisation du bailleur auprès des professionnels qui, opérant en ligne, assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements. Le défaut de justification de la qualité de propriétaire ou de l'autorisation du bailleur est puni, pour le loueur et les professionnels précités, conformément aux articles L. 651-2 et L. 651-3. »

M. Jean-Claude Requier.  - Nous rétablissons l'article 23 ter adopté à l'Assemblée nationale qui prévoit que toute personne qui loue un logement pour une courte durée sur une plateforme d'intermédiation locative comme Airbnb doit justifier de sa qualité de propriétaire, ou, le cas échéant, de l'autorisation donnée par le bailleur de sous-louer le logement auprès de la plateforme en cause.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - La commission des lois a supprimé l'article qui pose des problèmes de constitutionnalité en ce qu'il distingue les sous-loueurs selon qu'ils utilisent ou non une plateforme numérique. Plusieurs amendements à venir sont plus opportuns. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean-Claude Requier.  - Soit, mais il faut résoudre ce problème.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Il le sera.

L'amendement n°502 rectifié est retiré.

L'article 23 ter reste supprimé.

ARTICLES ADDITIONNELS

Les amendements identiques nos97 rectifié bis et 384 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°469, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 23 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du tourisme est ainsi modifié :

1° L'article L. 324-1-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le maire affecte un numéro d'enregistrement à la déclaration et en délivre un récépissé. Ce numéro d'enregistrement est mentionné par tout service de mise en relation en vue de la location d'hébergements, opérant en ligne. » ;

2° L'article L. 324-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le maire affecte un numéro d'enregistrement à la déclaration et en délivre un récépissé. Ce numéro d'enregistrement est mentionné par tout service de mise en relation en vue de la location d'hébergements, opérant en ligne. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Lutter contre Airbnb, plateforme qui illustre la dérégulation du marché du logement, c'est aussi lutter contre le logement cher. Ses services sont de plus en plus utilisés par des professionnels, ce qui restreint le parc de locations disponibles. On est loin de l'image « cool » affichée par le site...

Cet amendement prévoit que la mairie affecte un numéro d'enregistrement au moment de la déclaration, et que ce numéro est mentionné par tout service de mise en relation dans la perspective d'une location en ligne.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - J'éviterai de mentionner trop souvent le nom de la principale plateforme en cause pour ne pas lui faire de la publicité gratuite, mais les internautes l'auront identifiée...

Cet amendement crée une rupture d'égalité entre les agences physiques et les agences en ligne, et il supprime la dérogation accordée à tous ceux qui louent leur résidence principale en tant que meublé de tourisme. Retrait au profit de l'amendement n°401 rectifié à venir qui cible les collectivités territoriales de plus de 200 000 habitants ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - La transition numérique affecte de nombreuses professions : buralistes, chauffeurs de taxi, hôteliers...

En matière de logement, ces plateformes restreignent l'offre locative, ce qui exclut les plus fragiles, notamment les étudiants. L'autre problème posé par ces plateformes est de nature fiscale - nous y reviendrons.

Cet amendement impose aux loueurs de résidences secondaires et de meublés de tourisme d'obtenir un numéro d'enregistrement délivré par les mairies. Il crée ainsi une distinction entre les loueurs en ligne et les autres tout en instaurant une nouvelle charge pour les mairies. Or les situations sont très différentes selon les territoires : dans certaines villes peu pourvues en hôtels, cette pratique a entraîné un afflux touristique inattendu - nous restons avec 84 millions de touristes la première destination mondiale. Retrait au profit de l'amendement n°401 rectifié ? Laissons les municipalités prendre, le cas échéant, de telles initiatives.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Entendu, le débat se poursuivra. L'amendement n°401 rectifié semble en effet plus souple.

L'amendement n°469 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°401 rectifié, présenté par M. Carvounas et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Après l'article 23 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du tourisme est ainsi modifié :

1° L'article L. 324-1-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans les communes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, une délibération du conseil municipal peut rendre obligatoire, pour toute location d'un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile, un enregistrement auprès de la commune. Lorsqu'elle est mise en oeuvre, cette procédure d'enregistrement se substitue à la procédure de déclaration mentionnée au premier alinéa.

« La délibération fixe le nombre minimal de nuitées par an à partir duquel l'enregistrement est obligatoire. La commune délivre un numéro d'enregistrement au loueur par voie dématérialisée ou par tout autre moyen. » ;

2° Après les mots : « prévues par ces articles », la fin de l'article L. 324-2-1 est ainsi rédigée :

« . Elle obtient de lui, préalablement à la location du bien, une déclaration sur l'honneur attestant du respect de ces obligations ainsi que le numéro d'enregistrement mentionné à l'article L. 324-1-1 du présent code. »

M. David Assouline.  - Nous devons éviter le détournement de l'économie collaborative ; les prédateurs qui l'utilisent sont son meilleur ennemi. Et je ne parle pas des questions de fiscalité.

La question du logement est prégnante ; dans certaines de nos villes, des quartiers sont devenus des quartiers-musée. Paris vit fortement cette évolution.

Afin d'assurer la traçabilité et une meilleure transparence des activités de location de locaux meublés pour de courtes durées, les communes auront la faculté de mettre en place une procédure d'enregistrement du loueur. Cette procédure est laissée au libre choix des communes de plus de 200 000 habitants. Le numéro d'enregistrement permettra à la mairie de s'assurer que le loueur de meublé est en droit de le faire ; et ce numéro devra être demandé par tout service de mise en relation en ligne avant publication de l'annonce et figurer dans celle-ci.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - De nombreuses villes ont mis en place un tel système, Berlin, Bruxelles, Amsterdam... Cet amendement a le mérite de sortir l'économie collaborative de l'économie grise, tout comme l'article 23 quater adopté par la commission des lois à l'initiative de son homologue des finances, qui oblige les plateformes à déclarer les revenus perçus par les loueurs. Cet amendement est ciblé. Il distingue les locations de quelques nuitées des autres. La commission des lois était réservée, mais à titre personnel, je vous propose d'adopter cet amendement si nous voulons que le sujet soit abordé en CMP.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cet amendement est équilibré. Il distingue entre les usages occasionnels des plateformes et vise ceux qui détournent le système pour en tirer des revenus récurrents, professionnels.

Berlin, que vous citez, a purement et simplement interdit Airbnb. Est-ce souhaitable ? Je ne le crois pas. Cet amendement prévoit plus simplement de lutter contre les détournements de la loi dans les zones tendues. Il laisse le choix aux grandes villes de fixer les règles car elles sont les mieux placées pour apprécier la situation de l'immobilier.

Cet amendement laisse aussi aux communes le choix des modalités, libres de définir le seuil de nuitées au-delà duquel l'enregistrement est obligatoire.

M. Philippe Dallier.  - Faute de pouvoir renforcer les moyens de contrôle, il faut être plus radical et imposer un enregistrement à tous les propriétaires qui louent leur logement en ligne, ainsi que l'affichage par les plateformes des numéros d'enregistrement.

En fixant un seuil d'enregistrement déclaratif il sera facile pour les propriétaires de frauder...

Mme Corinne Bouchoux.  - L'économie collaborative a ceci d'ambigu que l'on peut être simultanément gagnant et perdant du système, comme les cadres urbains ou les étudiants, heureux de louer un appartement pour un week-end, mais victimes de la pénurie de logements.

La question est de réguler intelligemment sans créer d'usine à gaz. Le groupe écologiste votera cet amendement.

M. Yves Rome.  - Le groupe socialiste soutient cet amendement. Le problème est celui de la frontière entre l'économie collaborative et l'économie traditionnelle. Il faudra aussi contraindre les plateformes à déclarer les revenus des loueurs au fisc.

M. David Assouline.  - Je suis comme M. Dallier partisan d'une certaine radicalité...

M. Philippe Dallier.  - Pas sur tous les sujets...

M. David Assouline.  - ... mais cet amendement est équilibré. J'en aurai un autre pour fixer un seuil de 120 jours au-delà duquel l'activité de location en ligne sera considérée comme activité professionnelle. Je proposerai aussi un dispositif pour que les revenus tirés de cette activité soient mieux déclarés. Paris n'est pas la seule ville concernée, j'ai vu que M. Juppé à Bordeaux montait aussi au créneau... C'est le problème de toutes les métropoles confrontées à un parc locatif tendu.

L'amendement n°401 rectifié est adopté et devient article additionnel.

L'amendement n°128 rectifié n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°403 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°468, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 23 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, les mots : « de plus de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne » sont remplacés par les mots : « de plus de 100 000 habitants et à celles de l'unité urbaine de Paris ».

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Nous élargissons le périmètre des communes habilitées à réglementer l'offre de location de passage aux communes de plus de 100 000 habitants. Dans ces communes aussi le marché locatif est parfois tendu. Nous visons aussi l'unité urbaine de Paris.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis défavorable. Le seuil de 200 000 est équilibré et a fait l'objet d'un consensus parmi nous. En l'abaissant à 100 000 on risque de remettre en cause l'économie de location de tourisme.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. L'autorisation administrative en cas de changement d'usage imposé dans les villes de plus de 200 000 habitants se justifie par un intérêt public supérieur, celui de préserver l'habitat résidentiel. La loi Alur n'a que deux ans, son impact n'a pu encore être mesuré. Soyons prudents.

L'amendement n°468 n'est pas adopté.

L'amendement n°402 rectifié n'est pas défendu.

L'amendement n°30 rectifié quater n'est pas défendu.

M. le président.  - Je vous rappelle que l'examen des amendements nos602 et 603 rectifié a été réservé.

ARTICLE 23 QUATER

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Cet article vise à lutter contre la fraude fiscale. Nous préférons la rédaction retenue par M. le rapporteur Dallier à celle du groupe socialiste. Nous voterons l'obligation de déclaration auprès de l'administration fiscale par les opérateurs de plateformes de certaines informations relatives à leurs utilisateurs, tout en regrettant que certaine sociétés continuent d'utiliser des techniques d'optimisation fiscale pour échapper à l'impôt.

Les utilisateurs seront informés, pourquoi pas l'administration fiscale ?

L'amendement n°127 rectifié n'est pas défendu.

L'amendement n°133 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°586, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - L'article 23 quater introduit une obligation de transmission automatique à l'administration fiscale des revenus des utilisateurs de plateformes en ligne. Le Gouvernement en souhaite la suppression.

L'article 87 de la loi de finances pour 2016 vient d'introduire, à compter du 1er juillet de cette année, l'obligation de transmission à l'utilisateur du relevé de ses revenus, ce qui améliorera sensiblement l'information des utilisateurs et des plateformes.

Pour l'heure, seuls les employeurs et les banques sont soumis à des obligations de communication nominative d'informations à l'administration fiscale.

La complexité des problèmes techniques et juridiques liés à la vérification des identités et à la protection de la vie privée ne doit pas être sous-estimée. En l'état, cet article est inapplicable.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Nous sommes à la croisée des chemins. Ce qu'il ne faut pas sous-estimer, c'est l'évaporation des bases fiscales qu'entraîne la révolution numérique : elle concerne l'impôt sur les sociétés (IS), et nous y reviendrons avec le projet de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) de l'OCDE ; mais également la TVA, ce qui commence à préoccuper la Commission européenne, et maintenant l'impôt sur le revenu.

Il n'est donc pas anormal de soumettre les grandes plateformes à certaines contraintes et de donner à l'administration fiscale les moyens de connaître et de contrôler les revenus qu'elles génèrent. L'ancien chef de projet en informatique que je fus peut vous rassurer sur la complexité technique, qui ne paraît pas insurmontable.

Le problème se pose dans bien des secteurs, au-delà de l'hébergement, la location de voitures, dont nous avons reçu les représentants à la commission des finances, est aussi fortement touchée : les plus gros loueurs ne sont plus Hertz ou Avis, mais les plateformes de partage ! Certaines personnes louent via ces plateformes une dizaine de véhicules ou plus... On peut sans doute en ce cas parler de véritable activité professionnelle.

Notre belle République n'a pas les moyens de laisser ainsi s'évaporer ses ressources fiscales ! Donnons à l'administration les moyens de faire appliquer la loi.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Vous ne ciblez que les locations en ligne : vous excluez donc les transactions faites au moyen de petites annonces, à la boulangerie par exemple...

Quant au volume de l'évaporation qui vous préoccupe à juste titre, celle-ci tient surtout aux pertes d'impôt sur les sociétés liées à l'optimisation fiscale - des dizaines de milliards d'euros selon un récent rapport publié par Oxfam aux États-Unis qui font défaut...

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Et la TVA !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Ciblons plutôt les personnes qui tirent de massifs revenus de ces plateformes. Le Royaume-Uni a récemment introduit dans son budget un seuil de 7 000 livres : voilà une initiative plus fine que l'obligation générale de déclaration qu'instaure cet article, complexe à mettre en oeuvre et dangereux pour la protection de la vie privée.

M. François Marc.  - La commission des finances s'est prononcée à l'unanimité pour ce dispositif, en faveur d'une transparence maximale, face au développement accéléré de cette nouvelle forme d'économie - je voterai donc contre sa suppression.

Que les petites annonces des commerces de quartier ne soient pas concernées ne me paraît pas un argument assez convaincant pour refuser cet article.

M. Bruno Sido.  - Le mot « utilisateur » revient cinq fois dans le texte de la commission : est-il assez précis ? Il peut en effet renvoyer au loueur comme au propriétaire du logement.

Mme Corinne Bouchoux.  - J'entends l'argument de la complexité, et je fais confiance à mon collègue Gattolin, membre de la commission des finances. On ne peut se contenter de deux poids deux mesures, prôner en tout la transparence et voter la suppression de cet article vertueux en la matière. Indiquons un cap.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Reste tout de même l'argument de protection de la vie privée. L'administration fiscale aura, si l'on vous suit, connaissance, par l'obligation de transmission que vous voulez imposer aux plateformes, d'une multitude d'informations sur toute transaction, quel que soit son montant ou son objet, et sans qu'elle génère nécessairement un revenu. Que fera-t-elle de l'information selon laquelle untel aura revendu, mettons, une poussette ou un autre objet d'occasion 15 euros ?

Certains s'opposent déjà à l'imposition des revenus à la source au motif qu'elle serait dangereuse pour le respect de la vie privée, alors même que le fisc peut déjà avoir accès à toutes les informations collectées par les employeurs. Imaginez ce qu'il en sera pour une transmission généralisée de toutes les informations portant sur toutes les transactions, sur toutes les plateformes, quel qu'en soit l'objet ou le montant !

Monsieur Sido, je n'ai pas de réponse précise à votre question à ce stade, mais j'espère qu'elle n'emportera pas seule votre vote. Le terme « utilisateur » permet surtout de ne pas se limiter à celui de consommateur, qui renvoie à un régime juridique particulier, ou à celui d'usager, qui fait référence au service public. Il couvre bien l'ensemble du champ des acteurs qui interviennent sur ces plateformes. Il caractérise de façon adéquate l'économie de la data.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - L'amendement de M. Frassa à venir clarifie ce point.

L'argument de la vie privée me laisse pantois : l'administration des impôts est tenue au secret fiscal, bien codifié et protégé ; elle y est habituée et vos craintes à ce sujet, madame la ministre, me paraissent injustifiées. Elle est fondée à ce titre à connaître de certains détails sur la nature des transactions.

Le mécanisme du prélèvement à la source est différent, il concerne non pas l'administration mais l'employeur, auquel le salarié doit communiquer certains éléments concernant sa vie privée afin de justifier l'application de tel ou tel taux de prélèvement.

Ce que notre article additionnel met en jeu, et que votre amendement de suppression menace, c'est la capacité de contrôle de l'État.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Ce contrôle s'exerce posteriori ! Ce n'est pas parce que nous sommes dans l'économie numérique que toutes les données doivent être transmises à l'administration priori, avant même qu'elle ait décidé une vérification ! À l'État d'exercer pleinement son contrôle en temps utile, le cas échéant.

L'amendement n°586 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°638, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 4

1° Après le mot :

sens

insérer la référence :

du 2° 

2° Après le mot :

France

insérer les mots :

au titre des revenus qu'ils perçoivent par l'intermédiaire de la plateforme

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cet amendement précise le champ de la déclaration automatique sécurisée des revenus des utilisateurs des plateformes en ligne. M. Sido doit être rassuré.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°638 est adopté.

L'amendement n°49 rectifié bis n'est pas défendu.

L'article 23 quater, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°129 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°404, présenté par M. Lalande et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Après l'article 23 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le A du 4 du II de la première sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un d ainsi rédigé :

« d. Régime applicable aux revenus perçus par l'intermédiaire de plateformes en ligne

« Art. ...  -  I.  -  Sont soumis au régime défini au présent article les redevables de l'impôt sur le revenu qui exercent, par l'intermédiaire d'une ou de plusieurs plateformes en ligne, une activité relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

« II.  -  1. Pour les redevables soumis à l'article 50-0, les abattements mentionnés au troisième alinéa du 1 de cet article et appliqués au chiffre d'affaires hors taxes provenant des activités mentionnées au I du présent article ne peuvent pas être inférieurs à 5 000 euros.

« 2. Pour les redevables soumis aux articles 53 A et 302 septies A bis, le chiffre d'affaires hors taxes provenant des activités mentionnées au I pris en compte pour la détermination du résultat imposable est diminué d'un abattement forfaitaire de 5 000 euros, et seule la fraction des charges supérieure à 5 000 euros peut être déduite.

« III.  -  Le présent article est applicable aux seuls revenus qui font l'objet d'une déclaration automatique sécurisée par les plateformes en ligne.

« IV.  -  Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. François Marc.  - Défendu !

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - J'ai hésité à redéposer cet amendement instaurant cette franchise de 5 000 euros sur les revenus tirés par les particuliers de leurs activités sur les plateformes collaboratives, que la commission des finances avait présenté dans la discussion du budget et auquel le Gouvernement avait opposé un avis défavorable.

J'ai préféré ne pas y revenir, bien qu'elle puisse avoir un effet vertueux. Pour autant, l'argument de la rupture d'égalité devant les charges publiques, invoqué par M. Eckert, ne m'a pas convaincu. Qu'en pense, aujourd'hui, le Gouvernement ? S'il est pour, je le serai également...

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Désolée de vous décevoir : il est toujours défavorable. Les travaux de la commission des finances du Sénat ont très utilement alimenté la réflexion de Bercy sur ce sujet, qui est toujours en cours et devrait aboutir à l'été. Je vous propose donc d'y revenir dans le cadre du débat budgétaire.

M. Bruno Sido.  - La rédaction de l'amendement ne prête-t-elle pas à confusion entre le chiffre d'affaires et le revenu ? Vendre sa voiture, un certain montant, ne signifie pas que l'on en tire un revenu.

M. Yves Rome.  - Les particuliers pourraient, grâce à cet amendement, continuer à utiliser les plateformes sans être taxés en deçà du seuil de 5 000 euros de revenu : il distingue bien l'économie collaborative, dont nous encourageons le développement, du commerce classique.

M. Jean-Yves Leconte.  - La frontière entre les deux n'est pas si aisée à tracer... Comment fixer un seuil adapté ? En dépit de l'avis de la ministre, et malgré l'hésitation que vous avez exprimée, pouvez-vous, monsieur le rapporteur, soutenir cet amendement ?

M. François Marc.  - Cet amendement complète utilement le précédent, relatif à la transmission automatique d'informations, en atténuant, voire annihilant les effets pervers redoutés par la ministre : les particuliers effectuant de petites transactions sur internet ne seront pas concernés. Gagner 5 000 euros sur une plateforme collaborative, c'est le début d'une véritable activité commerciale, d'un business, comme l'on dit maintenant...

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Les mêmes règles fiscales s'appliquent, monsieur Sido, rigoureusement inchangées. Nous ne créons pas un impôt nouveau. Simplement, le travail de contrôle de l'administration sera grandement facilité ; ceux qui auront des charges à déduire de la location d'un logement par exemple pourront toujours le faire et la vertu des internautes qui utilisent les plateformes sera encouragée. La commission des finances a voté cette disposition à l'unanimité.

L'amendement n°404 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°203 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Khiari et Lienemann et M. Sueur.

Après l'article 23 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 135 B du livre des procédures fiscales est complété par sept alinéas ainsi rédigés :

« Les opérateurs de plateformes, au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, qui assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements adressent aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale ayant institué la taxe de séjour ou la taxe de séjour forfaitaire, une déclaration mentionnant, pour chacun de leurs utilisateurs, les informations suivantes :

« 1° Pour une personne physique, le nom, le prénom et la date de naissance de l'utilisateur ;

« 2° Pour une personne morale, la dénomination, l'adresse et le numéro Siren de l'utilisateur ;

« 3° L'adresse électronique de l'utilisateur ;

« 4° Le statut de particulier ou de professionnel caractérisant l'utilisateur sur la plateforme ;

« 5° L'adresse du local loué.

 « Cette déclaration est adressée annuellement par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. »

M. David Assouline.  - Cet amendement oblige les plateformes de locations saisonnières à transmettre des informations sur les biens loués par leur intermédiaire sur le territoire des collectivités ayant instauré la taxe de séjour, pour compléter utilement les informations déjà transmises à l'État depuis 2014. Sans ces informations, impossible d'appliquer correctement la taxe...

Il est ainsi remédié à l'injustice actuelle, qui veut que certains biens soient taxés, d'autres non.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Nous avons voté la transmission des données automatiques, tous secteurs confondus : cet amendement devient dès lors superfétatoire. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Vous visez les résidences secondaires mises en location sur internet. Cet amendement va au-delà de la loi Alur, qui oblige déjà à déclarer en mairie les meublés de tourisme.

L'objectif est explicitement fiscal. La loi Alur avait exclu ce dispositif dans un but de simplification administrative et pour favoriser de nouveaux usages.

La transmission des informations aux mairies ne serait, de plus, par définition, pas couverte par le secret fiscal ! Airbnb n'est pas Big Brother, mais la menace sur la vie privée est réelle.

Enfin, vous vous référez au livre des procédures fiscales, qui régit en principe les relations entre le fisc et ses interlocuteurs directs. Avis défavorable.

M. David Assouline.  - Je ne partage pas vos arguments. Nous y reviendrons, après observation attentive des pratiques. Le développement de l''économie collaborative ne doit pas faire obstacle à l'objectif de simplification.

L'amendement n°203 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°202 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Khiari et Lienemann et M. Sueur.

Après l'article 23 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 631-... ainsi rédigé :

« Art. L. 631-...  -  Les opérateurs de plateformes, au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, qui assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements doivent s'assurer que les transactions réalisées via leurs plateformes respectent les dispositions des articles L. 631-7 à L. 631-9 du présent code. Le cas échéant, ces plateformes sont tenues, après informations de l'utilisateur, de bloquer toute transaction ne respectant pas les dispositions susmentionnées et de transmettre chaque année aux communes mentionnées à l'article L. 631-7 du présent code la liste des transactions bloquées avec le nom des propriétaires et les adresses concernées. Les modalités de contrôle et les amendes encourues en cas de non-respect de cette obligation sont précisées par décret. »

M. David Assouline.  - Les plateformes doivent s'assurer du respect des dispositions de la réglementation en matière de déclaration de changement d'usage des locaux destinés à la location saisonnière, qui prévoit un seuil de 120 jours par an. Au-delà, on est clairement dans le commerce.

Évitons d'encourager la saturation du marché locatif par les meublés de tourisme de courte durée, ce qui renchérit les prix et pénalise les populations les plus fragiles, comme on l'observe dans plusieurs capitales, l'une des plus touchées par ce phénomène étant Lisbonne.

Les amendements de régulation que nous défendons ce matin reposent sur deux piliers : le numéro d'enregistrement, que nous avons adopté, et les 120 jours.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Retrait au profit de l'amendement n°204 rectifié bis à venir, plus efficace ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis. Le problème posé par le dévoiement de la loi est réel.

L'amendement n°202 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°204 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Khiari et Lienemann et M. Sueur.

Après l'article 23 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 631-... ainsi rédigé :

« Art. L.631-...  -   Les opérateurs de plateformes, au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, qui assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements doivent s'assurer que nulle résidence principale, au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, n'est louée plus de 120 jours par an par leur intermédiaire dans les communes mentionnées à l'article L. 631-7 du présent code. À compter de cette période de location de 120 jours, les plateformes sont tenues, après information de l'utilisateur, de bloquer toute transaction relative à cette résidence principale pour une durée d'un an à compter du premier jour de location, et de transmettre chaque année aux communes mentionnées à l'article L. 631-7 du présent code la liste des transactions bloquées, comprenant le nom du loueur et l'adresse concernée. Les modalités de contrôle et les amendes encourues en cas de non-respect de cette obligation sont précisées par décret. »

M. David Assouline.  - L'amendement fixe un seuil de 120 jours par an au-delà duquel une résidence principale ne peut plus être louée sur les plateformes.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable. Celui-ci est plus efficace que le précédent. L'opérateur n'aurait en effet qu'à obliger le loueur à préciser la nature du logement, pour indiquer s'il est bien affecté à un usage d'habitation ; il devra également se soumettre le cas échéant aux obligations de déclaration de changement d'usage. La seule question qui reste est celle de sa compatibilité avec la directive européenne sur le commerce électronique. Nous pourrons y répondre d'ici la CMP.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Oui, les plateformes pourront aisément vérifier le nombre de nuitées et bloquer les transactions au-delà du seuil de 120 jours. Le système collaboratif est en effet dévoyé par certains utilisateurs qui louent leur bien à l'année, entretenant de ce fait la hausse des prix.

Cet amendement peut encore être affiné, pour mieux respecter la vie privée et le droit européen. Avis favorable toutefois.

L'amendement n°204 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°200 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Khiari et Lienemann et M. Sueur.

Après l'article 23 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 2333-34 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, après les mots : « les intermédiaires mentionnés à l'article L. 2333-33 », sont insérés les mots : « et les opérateurs de plateformes, au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, qui assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements et qui sont intermédiaires de paiement pour le compte de loueurs non professionnels » ;

2° Au premier alinéa du II, les mots : « Les professionnels qui, par voie électronique, assurent un service de réservation ou de location ou de mise en relation en vue de la location d'hébergements pour le compte des logeurs, des hôteliers, des propriétaires ou des intermédiaires mentionnés à l'article L. 2333-33 » sont remplacés par les mots : « Les opérateurs de plateformes, au sens de l'article L. 111-7 du code de la consommation, qui assurent un service de mise en relation en vue de la location d'hébergements pour le compte de loueurs professionnels ».

II.  -  Le I s'applique à compter du 1er janvier 2017.

M. David Assouline.  - Cet amendement rend automatique la collecte de la taxe de séjour par les plateformes qui sont intermédiaires de paiement à compter du 1er janvier 2017. Nous pourrons toutefois y revenir en loi de finances.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Oui, retrait ?

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - La commission des finances n'a pas pu l'examiner, mais son retrait s'impose en effet. Une expérimentation est en cours, attendons la loi de finances.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - J'y vois un amendement d'appel. Exiger une fiche détaillée sur chaque logement loué est excessif et menace le respect de la vie privée. L'administration fiscale a une culture du secret, les plateformes, elles, non. Retrait ?

M. David Assouline.  - Nous venons de réaliser quelque chose d'important...

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Qui sera entendu jusqu'à San Francisco !

M. David Assouline.  - ...à l'approche de l'Euro 2016 et de son afflux de touristes et de supporters : nous soutenons l'économie collaborative et notre industrie hôtelière. Nous affinerons nos dispositifs au fur et à mesure, je sais que le Gouvernement y est favorable et que cela transcende les clivages politiques.

L'amendement n°200 rectifié bis est retiré ainsi que l'amendement n°201 rectifié bis.

ARTICLE 24

Les amendements identiques nos134, 148 rectifié et 612 rectifié ne sont pas défendus.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je reprends le I de ces amendements identiques qui apporte une clarification utile.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°671.

Amendement n°671, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

à ces consommateurs

par les mots :

aux utilisateurs

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable : en l'espèce, les deux statuts se confondent juridiquement puisque « utilisateur » comprend le consommateur qui publie un avis ainsi que toute personne qui le consulte sur une plateforme. L'amendement serait contre-productif.

L'amendement n°671 est adopté.

L'amendement n°85 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°99 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère et Luche, Mme N. Goulet et MM. Médevielle, L. Hervé, Marseille, Maurey, Cigolotti, Longeot, Tandonnet, Kern et Gabouty.

Alinéa 3

Remplacer les mots :

publication et de contrôle des avis mis en ligne

par les mots :

collecte, de vérification, de modération, de classement et de diffusion des avis mis en ligne et d'être en conformité avec la norme NF Z74-501 « Avis en ligne des consommateurs »

M. Hervé Maurey.  - Les faux avis représenteraient 30 % du total, ce qui lèse les professionnels et trompe les consommateurs. Cet amendement propose d'aller plus loin en exigeant que les avis en ligne soient conformes à la norme NF Z74-501 « Avis en ligne des consommateurs ».

Les amendements identiques nos142 et 386 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°504 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall.

Alinéa 3

Après les mots :

les modalités de publication

insérer les mots :

, de classement

M. Jean-Claude Requier.  - Dans un objectif de transparence, cet amendement crée une obligation d'information sur les modalités de classement des avis en ligne.

M. le président.  - Amendement n°74 rectifié, présenté par MM. Chaize, Mandelli, de Nicolaÿ et Calvet, Mme Cayeux, MM. Bignon, Bizet, de Legge, Mouiller, B. Fournier, Kennel et Masclet, Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Micouleau, MM. Grand, Cornu, Vaspart, Rapin et P. Leroy, Mme Estrosi Sassone, M. Pellevat, Mme Procaccia, MM. Lemoyne, Vasselle et Delattre, Mme Deroche et MM. Husson, Laménie, Trillard et Magras.

I.  -  Alinéa 3

Remplacer le mot :

contrôle

par le mot :

traitement

II.  -  Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Elle précise si ces avis font ou non l'objet d'une modération et, si tel est le cas, elle indique les caractéristiques principales du traitement mis en oeuvre.

M. Patrick Chaize.  - Face au fléau des faux avis, le respect de la norme NF Z74-501 sera un gage de confiance et de transparence. Encourageons les entreprises françaises qui l'appliquent.

Le terme de contrôle des avis, ambigu, peut laisser penser que la plateforme collecte des preuves de consommation ou procède à des contrôles très détaillés ; cet amendement reprend donc les termes et définitions de la norme Afnor.

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et M. L. Hervé.

Alinéa 3

Remplacer le mot :

contrôle

par le mot :

traitement

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je reprends cet amendement au nom de la commission des lois.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°672.

Amendement n°672, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 3

Remplacer le mot :

contrôle

par le mot :

traitement

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Il n'appartient pas à la loi d'imposer à tous les sites de vente en ligne de se conformer à une norme unique : cela contreviendrait au principe de liberté d'entreprendre et au droit européen. Retrait, sinon rejet de l'amendement n°99 rectifié.

Idem pour l'amendement n° 504 rectifié : les modalités de publication incluent déjà les modalités de classement et de référencement des avis.

Avis favorable au I de l'amendement n°74 rectifié, mais le II affaiblirait les obligations de contrôle des avis pesant sur les plateformes, contrôles qui ne se limitent pas à la seule modération des propos illicites ou injurieux. Pouvez-vous le rectifier ?

M. Patrick Chaize.  - D'accord. Il devient dès lors identique à l'amendement n°110 rectifié que la commission a repris...

M. le président.  - C'est l'amendement n° 74 rectifié bis.

Amendement n°74 rectifié bis, présenté par MM. Chaize, Mandelli, de Nicolaÿ et Calvet, Mme Cayeux, MM. Bignon, Bizet, de Legge, Mouiller, B. Fournier, Kennel et Masclet, Mmes Garriaud-Maylam, Deromedi et Micouleau, MM. Grand, Cornu, Vaspart, Rapin et P. Leroy, Mme Estrosi Sassone, M. Pellevat, Mme Procaccia, MM. Lemoyne, Vasselle et Delattre, Mme Deroche et MM. Husson, Laménie, Trillard et Magras.

Alinéa 3

Remplacer le mot :

contrôle

par le mot :

traitement

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Défavorable à l'amendement n° 99 rectifié. Il n'appartient pas au législateur d'imposer le respect d'une norme de nature privée - même si le Gouvernement en a soutenu le développement, y compris financièrement. Rien n'interdit aux sites de mettre en avant le respect des normes Afnor comme gage de qualité. Il n'est juridiquement pas possible d'imposer aux hébergeurs de vérifier le contenu des annonces mises en ligne, sauf lorsqu'il s'agit de contenus ou de propos illicites.

C'est votre groupe, monsieur Maurey, qui a fait voter la suppression de l'obligation de publication des normes Afnor. Je trouve paradoxal d'imposer aux entreprises ce que l'Afnor refuse de faire elle-même !

M. Roland Courteau.  - Très bien.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°504 rectifié. Avis favorable aux amendements identiques nos672 et 74 rectifié bis.

Les amendements nos99 rectifié et 504 rectifié sont retirés.

Les amendements identiques nos672 et 74 rectifié bis sont adoptés.

L'amendement n°81 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°100 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère et Luche, Mme N. Goulet et MM. Médevielle, L. Hervé, Maurey, Cigolotti, Longeot, Tandonnet, Kern et Gabouty.

Alinéa 6

Après les mots :

faisant l'objet d'un avis en ligne de

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

disposer d'un droit de réponse en ligne systématique et facilité.

M. Hervé Maurey.  - Dans un souci de sincérité des avis en ligne, cet amendement instaure un droit de réponse systématique et facilité.

M. le président.  - Amendement n°505 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle installe un droit de réponse en ligne systématisé.

M. Jean-Claude Requier.  - Afin de lutter contre les faux avis, une procédure systématisée de droit de réponse en ligne est mise en place par les opérateurs qui ont une activité de collecte, de modération, ou de diffusion des avis de consommateurs.

Les amendements nos86 rectifié bis, 143, 387 et 101 rectifié ne sont pas défendus.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - L'esprit de ce texte est de garantir l'information loyale et transparente des consommateurs, sans imposer de nouvelles contraintes aux plateformes. Il est certes tentant d'imposer des bonnes pratiques au secteur, mais ces obligations risquent d'être jugées contraires au droit de la concurrence et à la directive sur le commerce électronique, et de ne pouvoir être appliquées. Le renforcement de l'information des consommateurs est plus compatible avec le fonctionnement de l'économie numérique qui repose, avant tout, sur la confiance. À défaut de retrait, avis défavorable aux amendements nos100 rectifié et 505 rectifié.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement partage le souci de renforcer la transparence, c'est précisément l'objet de l'article 24. Les plateformes ont déjà l'obligation de signaler les avis douteux. Aller plus loin est délicat : comment juger de la sincérité ou du bien-fondé d'un avis ? Comment modérer les avis en ligne sans empiéter sur la liberté d'expression ? Certains avis risqueraient d'être supprimés au simple motif qu'ils sont défavorables, au risque de freiner la publication de témoignages.

Je m'engage à aborder ces questions avec les plateformes de vente en ligne lors de la rédaction du décret d'application : à elles de dire ce qui est opportun, et faisable technologiquement. Retrait ?

M. Jean-Claude Requier.  - Des promesses... (Sourires). Soit.

L'amendement n°100 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n° 505 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°506 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle affiche la date de l'avis et les éventuelles mises à jour.

M. Jean-Claude Requier.  - Cet amendement impose l'affichage de la date de l'avis et les mises à jour éventuelles, car des avis obsolètes n'ont guère d'intérêt.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable sous réserve d'une rectification pour insérer cette précision après le quatrième alinéa.

M. Jean-Claude Requier.  - D'accord.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°506 rectifié bis.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cela relève du domaine réglementaire. Retrait ?

L'amendement n°506 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°37 rectifié bis n'est pas défendu.

L'article 24, modifié, est adopté.

L'amendement n°19 rectifié bis n'est pas défendu.

ARTICLE 25

M. le président.  - Amendement n°518 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Vall et Guérini.

I.  -  Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le 2° est complété par les mots : « y compris les débits minimums, moyens, maximums montants et descendants fournis lorsqu'il s'agit de services d'accès à internet fixe et une estimation des débits maximums montants et descendants fournis dans le cas de services d'accès à internet mobile ; »

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Le 4° est ainsi rédigé :

« 4° Les compensations et formules de remboursement applicables lorsque le niveau de qualité de services ou les débits prévus dans le contrat, ou annoncés dans les publicités ou les documents commerciaux relatifs à l'offre souscrite ne sont généralement pas atteint, de façon continue ou récurrente ; »

M. Jean-Claude Requier.  - Le consommateur a droit à une information claire et honnête, et les opérateurs qui investissent dans les réseaux performants doivent pouvoir être récompensés de leurs efforts.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cet amendement, comme l'amendement n°519 étend l'obligation d'information pour les contrats de service d'accès à internet. Qu'en pense le Gouvernement, notamment de sa conformité au droit européen ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Retrait ? Les contrats de consommation conclus avec les opérateurs de télécommunications sont souvent complexes, l'environnement très concurrentiel. Un arrêté est récemment venu renforcer la transparence concernant les offres fixes de très haut débit. S'agissant de l'information sur les débits, nous respectons à la lettre le règlement européen - auquel nous avons activement participé - et donnons au régulateur les moyens de le faire appliquer.

Quant à l'information sur les compensations, elle relève plus, compte tenu de sa complexité, du domaine contractuel, réglementaire à la rigueur, que de la loi.

De plus, il faut souligner que souvent, les problèmes de réception sont davantage dus aux appareils, de plus en plus intelligents et miniaturisés...

M. Yves Rome.  - Et aux réseaux !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - C'est plutôt sur ces aspects qu'il faudrait renforcer l'information des consommateurs !

L'amendement n°518 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°519 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Vall et Guérini.

Après l'alinéa 5

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le 14°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les architectures de réseaux et technologies employées. »

M. Jean-Claude Requier.  - Les contrats de service de communications électroniques doivent être clairs et détaillés sur les architectures de réseaux et technologies employées.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Qu'en pense le Gouvernement ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis que précédemment.

L'amendement n°519 rectifié est retiré.

L'article 25 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°639, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Après l'article 25

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles 22, 23, 23 quater et 25 entrent en vigueur le 1er juillet 2016 ou le lendemain de la publication de la présente loi si cette date est postérieure à celle du 1er juillet 2016.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Coordination de l'entrée en vigueur avec celle du nouveau code de la consommation.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Je me réjouis que vous ayez hâte, vous aussi, de voir la loi entrer en vigueur ! (Sourires)

L'amendement n°639 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°405, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 25

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La plateforme coopérative regroupe une communauté de personnes physiques ou morales qui décident de mettre et utiliser en commun une ou plusieurs ressources matérielles ou immatérielles. Chacune de ces personnes est appelée contributeur.

Les contributeurs règlent la manière de disposer ensemble des ressources dans un contrat de coopération. Ce contrat fixe notamment les règles pour administrer, entretenir et partager les ressources. Les contributeurs peuvent convenir entre eux d'une rétribution en nature ou en valeur, en fonction de la participation de chacun à la constitution des ressources, leur entretien ou leur enrichissement.

Les contributeurs désignent la personne physique et morale qui assume, au regard de la plateforme coopérative, la responsabilité légale d'un éditeur de service de communication en ligne au sens de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, ainsi que plus généralement, les modalités de la gouvernance de la plateforme dans le contrat de coopération.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement propose de reconnaitre les plateformes coopératives, propices à la mutualisation des ressources matérielles ou immatérielles. Les inciter à formaliser ces échanges, c'est reconnaître la création de valeur, le lien de solidarité - bref, mettre en place un écosystème favorable au développement d'une forme de contribution collective, inspirée des coopératives du XIXe siècle, qui a toute sa place dans la construction de la République numérique.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - La commission des lois s'interroge sur l'intérêt de cet amendement.

M. Philippe Dallier.  - La commission des finances aussi.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur - Les formes sociales existantes, association ou société, sont parfaitement adaptées. Preuve que notre vieux droit civil permet déjà d'accueillir l'innovation numérique ! Retrait, sinon rejet.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Je perçois tout l'intérêt du sujet. Cet amendement donne un statut juridique à des communautés de personnes qui se regroupent pour partager locaux, ressources matérielles, réseaux, accès aux investisseurs ou aux données. La question est au coeur de l'économie collaborative ; l'économie sociale et solidaire trouve une nouvelle dimension grâce au numérique.

Certains pays, comme les États-Unis, ont créé des statuts pour ces structures innovantes qui valorisent le partage, y compris à des fins lucratives. C'est une revendication en France - je pense à la Social good week ou au mouvement des Makers, qui organise le Maker Faire à Paris ce week-end.

Nous n'avons pas à ce stade trouvé de réponse juridique adéquate. Votre amendement ne distingue pas suffisamment les caractéristiques du statut que vous proposez. Retrait ? Pascal Terrasse réfléchit aussi à ce sujet et je suis ses travaux avec intérêt.

M. Jean-Yves Leconte.  - La réflexion doit se poursuivre, car il faut répondre à un besoin nouveau. La République numérique mérite de nouvelles audaces juridiques !

L'amendement n°405 est retiré.

ARTICLE 25 BIS

M. le président.  - Amendement n°640, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Supprimer cet article.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur - Coordination avec le déplacement de cet article après l'article 18.

L'amendement n°640, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 25 bis, modifié, est supprimé.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°471, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Avant l'article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Constitue un réseau indivisible de données, les données à caractère personnel relatives à plusieurs personnes physiques identifiées ou qui peuvent être identifiées, directement ou indirectement, et qui sont liées entre elles dans un ou des systèmes de traitement informatique. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Cet amendement, comme le suivant, est d'appel. L'article 26 consacre le droit des personnes à contrôler l'usage des données personnelles qui les concernent, sans reconnaître toutefois un droit de propriété sur ces données. Le droit considère que les données personnelles sont autonomies et isolables, et ignore la nécessité d'une dimension collective de la protection des données. Or ce n'est pas le cas dans la réalité : les algorithmes utilisés par les géants du Net croisent et agrègent les données pour modéliser nos comportements. Il faut nous protéger de ces réseaux de données.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je comprends l'esprit de votre amendement, mais la notion de réseau indivisible de données personnelles est trop large : elle pourrait s'appliquer à un grand nombre d'opérations de traitement de données et à tous les systèmes de données indirectement connectées. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis.

La notion de réseau indivisible de données est peu juridique, et même un peu absconse. L'objectif de l'amendement est satisfait par le titre II, qui consacre le principe de libre disposition des données, que la jurisprudence déclinera concrètement. Nous réaffirmons, dans un contexte de massification des données, la place de l'individu dans des termes différents de ceux de la loi de 1978, qui vise les seules données personnelles. D'où le droit à la portabilité des données personnelles, mais aussi des données d'usage, ainsi que l'emploi du terme utilisateurs, plutôt que celui de consommateurs, et de la meilleure articulation entre la Cnil et la Cada. Nous voulons que les particuliers soient maîtres de données qu'ils produisent, sans pour autant admettre le principe de propriété des données, car nous refusons leur commercialisation.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je m'incline, même si je doute que le titre II apporte une sécurisation parfaite...

L'amendement n°471 est retiré.

ARTICLE 26

M. le président.  - Amendement n°472, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les données à caractère personnel, lorsqu'elles forment un réseau indivisible de données liées qui concernent plusieurs personnes physiques, constituent un bien commun qui n'appartient à personne et dont l'usage est commun à tous, dont la protection et le contrôle des usages sont régies par la présente loi.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je l'ai défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Même avis que précédemment.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Idem.

L'amendement n°472 est retiré.

L'article 26 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

Les amendements identiques nos46 rectifié bis et 109 rectifié ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°234, présenté par M. Rome et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du 1° du I de l'article 5 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, après les mots : « le responsable », sont insérés les mots : « ou son sous-traitant ».

M. Yves Rome.  - Environ 80 % des transactions en ligne sont réglées par carte bancaire. La Cnil autorise les plateformes à conserver les données bancaires des particuliers, sous réserve du consentement préalable explicite des clients - règle qu'applique la Fnac. Toutefois, les plateformes installées à l'étranger, comme Amazon, qui est soumise à la législation luxembourgeoise, s'exonèrent de ces obligations et enregistrent automatiquement les données bancaires sans consentement préalable des utilisateurs.

Il convient de corriger la distorsion de traitement entre les plateformes présentes en France et celles qui sont installées à l'étranger lorsque ces dernières adressent leurs services à des utilisateurs français.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - L'article 5 de la loi Informatique et libertés vise les sociétés françaises comme les sociétés étrangères enregistrées à l'étranger mais qui recourent à des sous-traitants situés sur le territoire français. La loi impose en outre de nommer un représentant établi sur le territoire français. Cet amendement semble satisfait. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - La France a défendu à Bruxelles une position identique à la vôtre, monsieur Rome, lors du débat sur l'extension du règlement européen sur les données personnelles aux sous-traitants. Sa position l'a emporté.

On connaissait le dumping fiscal ou social ; l'harmonisation européenne était nécessaire pour lutter contre ce data dumping, visant à bénéficier de la législation la moins protectrice des données personnelles. Le règlement européen sera bientôt publié. Son article 3 reconnaît la responsabilité des sous-traitants. Retrait ?

L'amendement n°234 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°473 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Après l'article 26

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 6 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° Elles sont stockées dans un centre de données situé sur le territoire de l'un des États membres de l'Union européenne, et, sans préjudice des engagements internationaux de la France et de l'Union européenne, ne peuvent faire l'objet d'aucun transfert vers un État tiers. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Avec la globalisation, les transferts de données personnelles hors de France se multiplient. Or ceux-ci sont interdits hors du territoire de l'Union européenne, à moins que les pays n'assurent un niveau de protection des données suffisant. Encore la loi permet-elle des exceptions.

Cet amendement impose le stockage des données personnelles des citoyens français sur le territoire européen. La CJUE est allée dans ce sens en annulant le mécanisme d'adéquation Safe Harbor qui permettait le transfert des données vers les États-Unis, estimant que le programme de surveillance de masse des États-Unis révélé par Edward Snowden était incompatible avec une protection adéquate des données personnelles des citoyens européens.

Le sous-amendement n°661 n'est pas défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Le sujet est très important et cet amendement, intéressant. La commission des lois est tout à fait favorable, il s'agit de réaffirmer notre souveraineté numérique : le transfert des données vers un État tiers est empêché, sauf - l'amendement a été rectifié en ce sens - application des engagements internationaux et européens de la France.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cette question est fondamentale. On ne peut toutefois la régler qu'a minima au niveau européen ; un traité international serait même utile...

Au sein de l'Union européenne, les données circulent librement, comme les biens et les personnes ; grâce au règlement européen nous avons un cadre de confiance et de sécurité harmonisé. L'enjeu est d'appliquer les standards de l'Union aux transferts de données hors Union. L'accord Privacy Shield, non encore définitif mais susceptible de remplacer le Safe Harbor annulé par la CJUE, a reçu un accueil mitigé au sein des Cnil européennes, ce qu'on appelle le groupe des 29.

L'obligation de localiser les données sur le sol national existe pour certains types de données sensibles, biométriques, judiciaires, de santé ou liées à la défense nationale ; on pourrait allonger la liste, y ajouter par exemple celles relatives aux mineurs.

Si la France peut peser, c'est dans le cadre européen. Il ne serait d'ailleurs pas inutile que le Parlement se prononce sur les discussions autour de l'accord Privacy Shield. Retrait, sinon défavorable.

À la demande du groupe communiste républicain et citoyen, l'amendement n°473 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°208 :

Nombre de votants 302
Nombre de suffrages exprimés 286
Pour l'adoption 286
Contre 0

Le Sénat a adopté.

L'amendement n°473 rectifié devient article additionnel.

L'article 26 bis demeure supprimé.

L'article 26 ter est adopté.

M. le président.  - Il reste 209 amendements à examiner... À ce rythme, nous devrons prendre des dispositions pour lundi soir et peut-être au-delà...

La séance est suspendue à 12 h 40.

présidence de M. Hervé Marseille, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

M. le président.  - Amendement n°378 rectifié bis, présenté par Mme D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 26 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 58 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est ainsi rédigé :

« Art. 58.  -  Sont destinataires de l'information et exercent les droits prévus aux articles 56 et 57 les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, pour les mineurs, ou le représentant légal pour les personnes faisant l'objet d'une mesure de tutelle.

« Par dérogation au premier alinéa, pour les traitements de données à caractère personnel réalisés dans le cadre de recherches mentionnées au 2° et au 3° de l'article L. 1121-1 du code de la santé publique ou d'études ou d'évaluations dans le domaine de la santé, ayant une finalité d'intérêt public et incluant des personnes mineures, l'information préalable prévue au I de l'article 57 peut être effectuée auprès d'un seul des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, s'il est impossible d'informer l'autre titulaire ou s'il ne peut être consulté dans des délais compatibles avec les exigences méthodologiques propres à la réalisation de la recherche, de l'étude ou de l'évaluation au regard de ses finalités. Le présent alinéa ne fait pas obstacle à l'exercice ultérieur, par chaque titulaire de l'exercice de l'autorité parentale, des droits d'accès, de rectification et d'opposition.

« Pour les mêmes traitements, le mineur âgé de quinze ans ou plus peut s'opposer à ce que les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale aient accès aux données le concernant recueillies au cours de la recherche, de l'étude ou de l'évaluation. Le mineur reçoit alors l'information prévue aux articles 56 et 57 et exerce seul ses droits d'accès, de rectification et d'opposition. 

« Pour les traitements mentionnés au deuxième alinéa du présent article, le mineur âgé de quinze ans ou plus peut s'opposer à ce que les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale soient informés du traitement de données si le fait d'y participer conduit à révéler une information sur une action de prévention, un dépistage, un diagnostic, un traitement ou une intervention pour laquelle le mineur s'est expressément opposé à la consultation des titulaires de l'autorité parentale en application des articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 du code de la santé publique ou si les liens de famille sont rompus et que le mineur bénéficie à titre personnel du remboursement des prestations en nature de l'assurance maladie et maternité et de la couverture complémentaire mise en place par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle. Il exerce alors seul ses droits d'accès, de rectification et d'opposition. »

M. Roland Courteau.  - La loi du 6 janvier 1978 sur les recherches, études et évaluations dans le domaine de la santé prévoit que les titulaires de l'autorité parentale exercent les droits reconnus par cette même loi au mineur. Nous modifions la loi, dans le cas des études ne présentant pas de risques pour les mineurs ou présentant des risques et des contraintes minimes. Aujourd'hui, une mineure peut obtenir une contraception sans l'autorisation de ses parents mais elle ne peut participer à une étude sur le sujet sans que ses parents soient informés de ses réponses. De même, si le père a rompu avec le foyer, les enfants ne peuvent participer à des études sur l'usage du tabac, des drogues, ou sur les comportements à risque. C'est un biais dans les résultats !

J'ajoute que la Cnil a déjà autorisé expressément des recherches sans l'autorisation des parents : un changement de jurisprudence est déjà intervenu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable à cet amendement qui lève des difficultés et qui a été modifié à la demande de la commission des lois. Il est à présent équilibré.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable, cette modification contribuera à la protection des mineurs et à des politiques de prévention plus efficaces.

L'amendement n°378 rectifié est adopté et devient article additionnel.

L'article 27 est adopté.

ARTICLE 28

M. le président.  - Amendement n°236, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Yves Rome.  - Ne reportons pas à une date incertaine - 2018 ? - l'entrée en vigueur du nouvel article 43 bis de la loi de 1978 qui permettra aux personnes d'exercer par voie électronique leurs droits. Il constitue une mesure de simplification et une avancée en matière de protection des droits. Nul besoin d'attendre le règlement européen sur la protection des données personnelles.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Contrairement à ce qu'affirme l'étude d'impact, cette mesure n'est pas sans coût. Les personnes morales chargées du traitement des données doivent s'adapter à l'exercice en ligne du droit à l'information, à l'opposition ou à la rectification ouverts aux personnes concernées. Un délai de préparation est nécessaire. Il faudra surtout trouver une solution pour que le demandeur puisse prouver son identité dans un cadre sécurisé, pour éviter tout détournement. Retrait.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable. Je ne vois aucune raison de différer l'application de ce droit. Cet article 43 bis impose aux opérateurs de services en ligne, qui collectent les données personnelles de nos concitoyens, de leur offrir une procédure dématérialisée pour exercer leur droit d'accès aux données. Jusqu'à présent, il fallait un courrier timbré. Il faut être en phase avec les réalités du présent et du futur.

L'amendement n°236 est adopté.

L'article 28, modifié, est adopté.

ARTICLE 29

L'amendement n°352 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°237, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

ou comportant des dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel ou au traitement de telles données

M. Yves Rome.  - La Cnil doit être consultée sur tous les textes comportant des dispositions relatives au traitement de données à caractère personnel, y compris les traitements non automatisés. Nous actualisons la formulation, qui n'est plus satisfaisante - les traitements non automatisés par exemple sont exclus du périmètre - et qui peut donner lieu à interprétation.

M. le président.  - Amendement n°238, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 9

Rétablir le 1° bis dans la rédaction suivante :

1° bis Après le a, il est inséré un a bis ainsi rédigé :

« a bis) Elle peut être consultée par le président d'une assemblée parlementaire sur une proposition de loi relative à la protection des personnes à l'égard des traitements automatisés ou comportant des dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel ou au traitement de telles données et déposée par l'un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s'y oppose, sans préjudice des prérogatives de la commission qui en est saisie.

« La commission dispose d'un délai de trois semaines à compter de la saisine pour rendre son avis. Ce délai est reconductible une fois par décision du président de la commission.

« À défaut de délibération dans les délais, l'avis de la commission est réputé avoir été rendu.

« L'avis de la commission est adressé au président de l'assemblée qui l'a saisie, qui le communique à l'auteur de la proposition et le rend public ; »

M. Yves Rome.  - Cet amendement réintroduit la possibilité pour le président d'une assemblée parlementaire de consulter la Cnil sur une proposition de loi comportant des dispositions sur la protection des données personnelles ou le traitement de telles données. Ce mécanisme s'inspire de la saisine du Conseil d'État sur une proposition de loi. Nous avons tenu compte des remarques du rapporteur. Ainsi, sur le droit d'opposition de l'auteur de la proposition de loi, sur le rôle constitutionnel de la commission et de son rapporteur, ou sur le délai accordé à la Cnil pour émettre son avis, resserré à trois semaines et désormais compatible avec le temps de la procédure parlementaire.

M. le président.  - Amendement n°239, présenté par M. Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...) Elle conduit une réflexion sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par l'évolution des technologies numériques, en impliquant des personnalités qualifiées et en organisant des débats publics ;

II.  -  Alinéas 12 à 14

Supprimer ces alinéas.

M. Yves Rome.  - C'est à la Cnil de conduire les réflexions et les débats éthiques sur les questions de société liées à l'évolution des technologies numériques.

La commission des lois a confié cette mission au Conseil national consultatif d'éthique : mais il s'occupe de sciences de la vie, de santé, de problèmes éthiques liés aux évolutions de la biologie ou de la médecine ! La Cnil est l'une des plus anciennes des autorités administratives indépendantes. Son rôle est reconnu, au service de la protection des droits.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je saisis mal l'apport de l'amendement n°237 à la rédaction de l'alinéa 4. Retrait.

Avis défavorable à l'amendement n°238 qui s'inspire à tort du mécanisme de saisine du Conseil d'État - conseiller juridique du gouvernement, il n'a pas la même position institutionnelle que la Cnil. Celle-ci est libre de répondre à toutes les sollicitations du Parlement ; du reste, les présidents de commissions l'interrogent souvent sur les textes en préparation. Ne créons pas une obligation, ne faisons pas obstacle au rôle constitutionnel de la commission au fond et du rapporteur, qui s'adressent à qui leur semble utile. Le délai maximal de six semaines est peu compatible avec le calendrier d'examen parlementaire. Enfin et surtout, cet amendement n'a pas sa place ici, ni même dans la loi de 1978 : il faudrait modifier l'ordonnance de 1958 sur le fonctionnement des assemblées parlementaires.

Il ne tient qu'au législateur d'étendre le champ de compétences du Conseil national d'éthique, éventuellement en créant deux collèges distincts. Avis défavorable à l'amendement n°239.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable à ces trois amendements. Je regrette l'opposition systématique de la commission à ces propositions...

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je m'efforce simplement de rendre la loi lisible.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Le numérique n'existait pas lors de l'adoption de la loi de 1978. Celle-ci ne vise que le « traitement automatisé des données ». Le langage de 1978 ne pouvait prendre en compte l'utilisation de masse des données.

Le Gouvernement souhaite faciliter l'ouverture et la circulation des données, source d'avancées et d'innovation, en fixant un cadre juridique adapté.

Sagesse sur l'amendement n°238, puisqu'il concerne le Parlement, mais je souligne qu'il s'agit d'une faculté, non d'une obligation.

Enfin la Cnil est une instance reconnue en matière de protection des droits liés à l'informatique. Il est plus pertinent de lui confier la réflexion sur les libertés numériques, la sécurité numérique, le stockage et les fichiers, plutôt qu'au CNCE, compétent en matière médicale. La Cnil a vocation à organiser le débat public de façon très ouverte, les chercheurs et les instituts de recherche auront l'occasion d'y participer.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - L'amendement n°237, rend l'alinéa illisible, inapplicable ! Quel charabia... C'est uniquement pour faire plaisir à sa majorité que la ministre donne un avis favorable ! (Mme la ministre s'indigne)

L'amendement n°237 est adopté.

À la demande de la commission des lois, l'amendement n°238 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°209 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 155
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°239, mis aux voix par scrutin public dans les mêmes conditions, n'est pas adopté.

L'article 29 est adopté.

ARTICLE 30

M. le président.  - Amendement n°652, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 2

Après les mots :

conditions prévues

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

au titre II du livre III du code des relations entre le public et l'administration.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Coordination avec l'entrée en vigueur du code des relations entre le public et l'administration.

M. le président.  - Amendement n°641, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Pourquoi préciser que, lorsqu'elle envisage de sanctionner un responsable de traitement pour défaut d'anonymisation d'un traitement de données, la Cnil « tient compte, le cas échéant » du fait qu'elle a certifié des dispositifs d'anonymisation ? S'agit-il d'atténuer la sévérité de la sanction ou, au contraire, de l'aggraver ?

La précision ne semble pas nécessaire : la Cnil elle-même a relevé dans son avis sur le projet de loi que l'alinéa traduisait « légalement un état de fait préexistant ».

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Je suis très heureuse de donner un avis favorable à l'amendement n°652... et très triste de donner un avis défavorable à l'amendement n°641 ! Avec la massification de la collecte, les données deviennent de plus en plus des données d'usage, il convient donc de déplacer la focale du champ de la vie privée au champ économique. En la matière, mieux vaut prévenir que guérir : avec le certificat de conformité délivré par la Cnil nous introduisons une sorte de rescrit pour sécuriser l'environnement juridique des entreprises.

Les amendements nos652 et 641 sont adoptés.

L'article 30, modifié, est adopté.

ARTICLE 30 BIS

M. le président.  - Amendement n°647, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

I.  -  Alinéa 2

Remplacer les mots :

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes

par les mots :

L'autorité

II.  -  Alinéa 4

Remplacer les mots :

Commission nationale de l'informatique et des libertés

par les mots :

commission

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Harmonisation rédactionnelle.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°647 est adopté.

L'article 30 bis, modifié, est adopté.

L'article 31 est adopté.

ARTICLE 32

M. le président.  - Amendement n°240 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Alinéas 5 à 7

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

« II.  -  En cas de non-exécution de l'effacement des données à caractère personnel demandé sur le fondement du paragraphe 1 f) de l'article 17 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ou en cas d'absence de réponse du responsable du traitement à l'expiration dans les meilleurs délais et au plus tard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la demande, la personne concernée peut saisir la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui se prononce sur cette demande dans un délai de trois semaines à compter de la date de réception du dossier complet de la réclamation.

« Le premier alinéa du présent II ne s'applique pas lorsque le traitement de données à caractère personnel est nécessaire : 

II.  -  Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 4° À des fins archivistiques dans l'intérêt public, à des fins de recherche scientifique et historique, ou à des fins statistiques, dans la mesure où le droit visé au présent II est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs du traitement à des fins archivistiques dans l'intérêt public, à des fins de recherche scientifique et historique ou à des fins statistiques ;

M. Yves Rome.  - Cet amendement tient compte de la rédaction définitive de l'article 17 du règlement européen adopté le 14 avril dernier, qui prévoit le principe du droit à l'oubli numérique pour les mineurs. Il précise l'exception - à des fins archivistiques dans l'intérêt public, à des fins de recherches scientifiques et historiques, ou à des fins statistiques. Il harmonise les délais de réponse, en prévoyant un maximum de un mois.

M. le président.  - Amendement n°75 rectifié, présenté par MM. Chaize, Mandelli, de Nicolaÿ et Calvet, Mme Cayeux, MM. Bignon, Bizet, de Legge, Mouiller, B. Fournier, Kennel et Masclet, Mmes Deromedi, Micouleau et Gruny, MM. Cornu et Vaspart, Mme Estrosi Sassone, MM. Bouchet, Vasselle, P. Leroy, Delattre et Rapin, Mme Deroche et MM. Husson, Laménie, Trillard et Magras.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa:

« La non-exécution de l'effacement des données à caractère personnel ou l'absence de réponse du responsable du traitement dans un délai d'un mois à compter de la demande est puni d'une amende de 10 000 € ainsi que d'intérêts de retard journaliers jusqu'à la mise en oeuvre de la demande. Un décret en Conseil d'État précise les conditions et les modalités d'application du présent alinéa.

M. Patrick Chaize.  - Cet amendement prévoit une sanction plus importante afin de pousser les responsables des traitements à procéder rapidement à l'effacement : il y va du respect des droits des mineurs.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°240 rectifié, qui vise à attendre l'entrée en vigueur du règlement européen : cela aurait pour conséquence de repousser d'un an l'application du dispositif. Le II de l'amendement est illisible, incompréhensible, comme le sont hélas souvent les textes européens. Retrait ?

La sanction en cas de refus de mise en oeuvre du droit à l'oubli existe déjà à l'article 45 de la loi de 1978. Retrait de l'amendement n°75 rectifié ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°240 qui réduit les délais de réponse de la Cnil en cas de non effacement des données personnelles concernant des mineurs. Le droit européen est muet sur ces questions procédurales. Le garde des sceaux et moi-même avons demandé à la Commission européenne d'autoriser notre pays à inclure une telle procédure en droit interne, et nous l'avons obtenu. Tant mieux, car les délais de réponse, quels que soient les efforts de la Cnil, sont parfois trop longs, alors qu'il y a urgence, par exemple lorsque sont postées des images compromettantes d'une adolescente sur des réseaux sociaux.

Il s'agit de trouver le bon équilibre entre le droit à l'effacement des données personnelles, qui n'est pas absolu, et la liberté d'expression ou la liberté d'information. Je partage le souci des auteurs de l'amendement n°75 rectifié, qui souhaitent donner plus de force exécutoire à l'effacement. Mais procédure accélérée n'est pas procédure bâclée. La Cnil doit disposer des délais d'examens suffisants avant de prononcer une sanction. Avis défavorable.

L'amendement n°240 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°75 rectifié est adopté.

L'amendement n°29 rectifié ter n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°242, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 28

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

« En l'absence de directives, les droits mentionnés à la présente section s'éteignent avec le décès de leur titulaire. Toutefois, par dérogation :

« a) Les héritiers peuvent, lorsque la personne est décédée, avoir accès aux données contenues dans les traitements de données à caractère personnel de la personne lorsque celles-ci sont nécessaires à la liquidation et au partage de la succession.

« Lorsqu'un notaire a été désigné dans ce cadre, il peut demander l'accès à ces informations s'il joint à sa demande un mandat l'autorisant à agir au nom des ayants droit ;

« b) Les héritiers de la personne décédée justifiant de leur identité peuvent, si des éléments portés à leur connaissance leur laissent présumer que des données à caractère personnel la concernant faisant l'objet d'un traitement n'ont pas été actualisées, exiger du responsable de ce traitement qu'il prenne en considération le décès et procède aux mises à jour qui doivent en être la conséquence ainsi qu'à la clôture du compte.

« Lorsque les héritiers en font la demande, le responsable du traitement doit justifier, sans frais pour le demandeur, qu'il a procédé aux opérations exigées en application du premier alinéa du présent b.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Le droit d'accès aux données personnelles, subjectif, attaché à la personne, n'est pas transmissible aux héritiers en cas de décès. Il y aurait là en effet une potentielle atteinte à la vie privée du défunt. La commission des lois a refusé de prendre en considération la spécificité des droits numériques et du cyberespace. Cet amendement rétablit le texte de l'Assemblée nationale. Un changement de culture s'impose : chacun doit gérer son capital numérique. Il faut encore approfondir ces questions ensemble.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Deux visions s'opposent. Le débat en commission des lois a été riche. La succession des droits numériques doit-elle être traitée différemment des successions physiques ? Le respect de la vie privée cesse avec la mort, selon le code civil, et c'est la mémoire du défunt qui a droit à protection. En va-t-il de même pour la vie numérique ?

L'amendement n°242 prive les héritiers d'un accès aux données numériques du défunt, ce qui ne profitera qu'aux opérateurs du numérique, qui pourront faire ce qu'ils voudront si la personne n'a pas rédigé de directives... Les dérogations seront inopérantes, car pour savoir quelles données existent, il faut avoir des possibilités de consultation ! Le dispositif de l'Assemblée nationale est une impasse. La propriété des biens numériques cesse-t-elle avec la mort ? Rien ne justifie de dissocier la succession numérique d'une succession physique. Avis défavorable à cet amendement.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Très bien !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - C'est un débat passionnant. Après la mort physique et numérique d'un individu, que fait-on de ses données ? La Cour de Cassation a réaffirmé que la vocation successorale est étrangère au respect de la vie privée. Si aucun voeu en sens contraire n'a été exprimé, le notaire recherche les biens et les héritiers. Mais le patrimoine numérique est différent du patrimoine physique. Un compte personnel sur un réseau social, des photos postées par les amis, les messages, les avis et préférences, tout cela relève de la vie personnelle, ce n'est pas un patrimoine auquel les héritiers pourraient prétendre accéder sans restriction.

Les exceptions sont liées à la succession et à la fermeture des comptes par le défunt. Ce qu'on trouvait dans une boîte à chaussures dans le grenier du parent décédé n'est pas comparable avec le contenu du cloud - qu'il faudrait plutôt comparer dans le monde physique à un conteneur de documents.

Encourageons les internautes à émettre des voeux en ce domaine, et à s'astreindre à une bonne hygiène numérique en supprimant régulièrement les données qu'ils ne souhaitent pas conserver.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois.  - Le rapporteur a parfaitement résumé les enjeux de principe. Les technologies de l'information causent une forme de vertige prométhéen, au nom duquel il faudrait repenser les libertés fondamentales établies depuis longtemps et séparer les générations selon la maîtrise qu'elles ont des nouveaux outils.

Eh bien non, nos anciens n'ont pas posé des règles contingentes qui seraient déjà dépassées par l'essor des nouvelles technologies. Non, les droits fondamentaux qu'ils ont tenu à défendre, tout comme les principes qui en assurent le respect, sont loin d'être caducs, je les crois même plus nécessaires que jamais.

Les méconnaître, introduire une telle brèche dans notre droit, un tel doute interstitiel dans le droit de demain, me semble dangereux. Nous avons tous nos secrets ; à chacun de les défendre par ses propres moyens. Mais ne touchons pas la règle selon laquelle la mort rend accessible à nos héritiers ce que nous n'avons voulu dissimuler.

Attention à ne pas faire une dissociation qui, outrée, pourrait aller jusqu'à nous conduire à revoir la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, parce qu'internet l'aurait périmée !

M. Roger Karoutchi.  - N'étant pas membre de la commission des lois, je n'ai pas assisté au débat passionnant sur le point de savoir ce que l'on devient lorsque l'on meurt (Sourires) ; je n'ai pas de boîte à chaussures, madame la ministre, et ne suis pas même un internaute chevronné.

Ce que je sais, c'est que la mort, ne donnant pas toujours son préavis, ne laisse pas forcément le temps de faire le ménage. Je préfère laisser ce soin à mon héritier plutôt qu'aux réseaux sociaux. J'ai plus d'espoir en la bienveillance de celui-là qu'en celle de ceux-ci. Ce qui n'enlève rien aux mérites de « l'hygiène numérique », belle expression, en effet...

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Il n'est pas question de modifier la Déclaration des droits de l'homme, mais de respecter la mémoire - numérique - des défunts, ce que ne permettent pas les dispositions du code civil dans leur rédaction actuelle.

Les notaires nous ont alertés : il y a, en la matière, inadéquation entre le droit et les pratiques. Le numérique démultiplie nos identités et complique la gestion du secret : des informations qui auraient été sûrement dissimulées si elles avaient été consignées sur papier, apparaissent uniquement parce qu'elles sont conservées sur support numérique.

Nous avons longuement échangé à ce sujet avec la Chancellerie. Il a été proposé d'ajouter à la liste des exceptions les « souvenirs de famille », notion jurisprudentielle bien établie. Faut-il hériter de la totalité de la mémoire du défunt ? Faut-il vraiment que la mort emporte une transparence absolue de la vie du défunt ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Deux conceptions s'affrontent manifestement. Le texte des députés interdit aux héritiers l'accès aux informations placées dans le Cloud, sauf déclaration expresse contraire, alors que cela n'est pas nécessaire dans le monde physique, pour accéder et partager les effets du défunt car il ne s'agit pas seulement de l'accès, mais du partage.

Notre rédaction aligne les règles de la succession numérique sur celles du monde physique, ce qui est aisément compréhensible, de sorte que les familles s'y retrouvent. Faire diverger les régimes serait source de contentieux et donnerait un pouvoir excessif aux opérateurs numériques.

À la demande de la commission des lois, l'amendement n°242 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°210 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption 135
Contre 209

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 32 est adopté.

L'article 33 est adopté.

L'amendement n°548 rectifié n'est pas défendu.

ARTICLE 33 BIS A (Supprimé)

Les amendements identiques nos122 rectifié et 135 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°243, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La section 2 du chapitre V de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 précitée est complétée par un article 43 ter ainsi rédigé :

« Art. 43 ter.  -  Lorsque plusieurs personnes, placées dans une situation similaire, subissent un dommage causé par le même responsable de traitement de données personnelles, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales, une action collective de protection des données personnelles peut être exercée en justice au vu des cas individuels présentés par le demandeur.

« Cette action peut être exercée en vue soit de la cessation du manquement mentionné au premier alinéa, soit de l'engagement de la responsabilité de la personne ayant causé le dommage afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis, soit de ces deux fins.

« Seules les associations ayant pour objet la protection de la vie privée et des données personnelles ainsi que les associations de défense des consommateurs représentatives au niveau national et agréées en application de l'article L. 411-1 du code de la consommation, lorsque le traitement de données personnelles affecte des consommateurs peuvent exercer l'action mentionnée au premier alinéa.

« L'exercice de l'action collective de protection des données personnelles est subordonné à l'accomplissement de démarches préalables auprès du responsable de traitement afin qu'il fasse cesser la violation. »

M. Pierre Camani.  - Seules les associations de consommateurs agréées au sens de l'article L. 411-1 du code de la consommation et celles dont l'objet est la protection des libertés numériques pourront exercer une action de groupe relative au traitement des données personnelles. Il est vrai qu'une telle action est particulièrement indiquée, puisque c'est l'agrégation d'une grande quantité de données qui en fait la valeur. Le dispositif de notre amendement, soutenu par la Cnil, est conforme aux recommandations du Conseil national du numérique et du Conseil d'État.

Les amendements identiques nos123 et 136 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°474, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La section 2 du chapitre V de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 précitée est complétée par un article 43 ... ainsi rédigé :

« Art. 43 ...  -  Les personnes suivantes peuvent exercer devant une juridiction civile une action collective de protection des données personnelles afin d'obtenir la cessation d'une violation de la présente loi :

« 1° Les associations ayant pour objet la protection de la vie privée et des données personnelles ;

« 2° Les associations de défense des consommateurs représentatives au niveau national et agréées en application de l'article L. 411-1 du code de la consommation, lorsque le traitement de données personnelles affecte des consommateurs ;

« 3° Les organisations syndicales de salariés, lorsque le traitement affecte des salariés ;

« 4° Toute association formée aux seules fins d'entreprendre l'action collective concernée.

« L'exercice de l'action est subordonné à l'accomplissement de démarches préalables auprès du responsable de traitement afin qu'il fasse cesser la violation. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Cet amendement réintroduit la possibilité pour les associations citées d'exercer une action collective devant les juridictions civiles après qu'une demande préalable a été adressée au responsable de traitement des données en cause.

Ces derniers mois, une clause prévoyant que tout litige sera porté devant un tribunal arbitral et interdisant toute action de groupe fleurit aux États-Unis - pour l'instant il ne concerne que les utilisateurs américains, mais soyons vigilants.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cela ne semble ni juridiquement fondé, ni opportun. L'action serait recevable pour tout manquement, individuel ou collectif, alors que seul ce dernier cas le justifierait. C'est à la Cnil de faire cesser les troubles, pas au juge civil. Un projet de loi de réforme des procédures civiles est en cours d'examen à l'Assemblée nationale.

Enfin, rien n'est dit du partage des réparations du préjudice : avis défavorable à défaut d'un retrait.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Je suis favorable à l'action collective en cas de violation de la législation relative aux données personnelles. À l'ère de la data, il faut adapter notre droit aux nouvelles pratiques. Un individu seul a bien moins de poids que plusieurs milliers face à un géant comme Facebook pour faire cesser un manquement à la loi.

Mais, je l'ai appris hier, le Gouvernement à l'intention de déposer un amendement en ce sens au projet de loi Justice du XXIe siècle. Retrait ?

L'amendement n°243 est retiré, de même que l'amendement n°474.

L'article 3 bis A demeure supprimé.

ARTICLE 33 BIS B

Les amendements identiques nos224 rectifié et 137 ne sont pas défendus.

M. le président.  - Amendement n°244, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le montant de la sanction ne peut excéder 20 millions d'euros ou, dans le cas d'une entreprise, 4 % du chiffre d'affaires annuel total au niveau mondial réalisé lors de l'exercice précédant l'exercice au cours duquel le manquement a été commis, si ce montant est plus élevé. Toutefois, pour la méconnaissance du chapitre IV ainsi que des articles 34 à 35 de la présente loi, le montant maximal est de 10 millions d'euros ou, s'agissant d'une entreprise, de 2 % du chiffre d'affaires annuel total au niveau mondial réalisé lors de l'exercice précédant l'exercice au cours duquel le manquement a été commis, si ce montant est plus élevé. »

M. Roland Courteau.  - La commission des lois a revu à la baisse le montant des sanctions pouvant être prononcées par la Cnil. Cette rédaction aligne sur les termes du règlement européen, les critères que les autorités de contrôle doivent prendre en compte pour fixer le niveau de la sanction. Ainsi notre législation sera crédible, en matière de sanction, ce qui n'empêchera pas, lors de l'entrée en vigueur dudit règlement, de modifier à nouveau ces règles, le cas échéant.

M. le président.  - Amendement identique n°475, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - C'est le même.

L'amendement n°574 rectifié n'est pas défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Le règlement européen prévoit en effet une telle augmentation des sanctions, mais en reprenant prématurément ses dispositions, avant toute harmonisation européenne, vous assimilez la Cnil à un régulateur européen et rendez ses sanctions disproportionnées.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Le plafond est pour l'heure de 150 000 euros, soit une cacahuète, pour les géants de l'internet... (Sourires et marques d'appréciation sur plusieurs bancs)

M. Roland Courteau.  - Eh oui, c'est dérisoire pour eux...

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - La commission des lois a porté le niveau maximal des sanctions à 1,5 million d'euros contre 20 millions à l'Assemblée nationale. Je reste favorable à une rédaction identique à celle du règlement européen ; la Cnil, elle-même, a demandé qu'on relève ces sanctions.

Les amendements nos244 et 475 identiques ne sont pas adoptés.

L'article 33 bis B est adopté.

ARTICLE 33 BIS

M. le président.  - Amendement n°620, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Les autorités administratives indépendantes, lorsqu'elles envisagent des sanctions, doivent satisfaire aux exigences de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme qui offre à chacun le droit d'accéder à un tribunal impartial, statuant dans un délai raisonnable et au terme d'un procès équitable. L'arrêt rendu le 11 juin 2009 par la Cour en faveur de la société Dubus impose une stricte séparation des fonctions d'instruction, de poursuite et de jugement.

Une réforme menée en 2011 a consolidé la conformité du régime de poursuite et de sanction de la Cnil à cette exigence. Il importe de maintenir strictement l'indépendance et la séparation des fonctions visées.

La formation restreinte ne saurait être saisie par une tierce autorité et ne dispose pas du pouvoir de décider de l'examen d'un dossier, fût-ce à la demande d'une autorité de protection des données d'un pays offrant un niveau de protection adéquat. La possibilité pour une autorité tierce de saisir le président de l'autorité nationale d'une demande tendant à l'engagement de poursuites est, elle, de nature à remettre en cause l'indépendance de la fonction.

Dans ces conditions, les mécanismes d'information entre autorités, comme la possibilité pour toute personne s'estimant victime d'un manquement à la législation de déposer une plainte s'avèrent suffisants. Sous le contrôle des autorités compétentes, ils permettent d'assurer l'indépendance et la séparation fonctionnelle exigée par la CEDH.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable.

L'amendement n°620 est adopté.

L'article 33 bis, modifié, est adopté.

L'article 33 ter A demeure supprimé.

ARTICLE 33 TER (Supprimé)

L'amendement n°138 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°476, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article 2-23 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-24 ainsi rédigé :

« Art. 2-24.  -  Toute association régulièrement déclarée depuis au moins deux ans à la date des faits et se proposant, par ses statuts, de protéger les données personnelles ou la vie privée peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues aux articles 226-16 à 226-24 du code pénal. Toutefois, quand l'infraction a été commise envers des personnes considérées individuellement, l'association n'est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de ces personnes. »

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Cet amendement réintroduit la possibilité pour toute association prévoyant dans ses statuts la protection des données personnelles ou la vie privée, d'agir en cas d'atteinte à la personne résultant de traitement de données personnelles. Cet article rééquilibre la relation entre les internautes et les sites marchands.

Il n'est pas normal qu'une association de moins de deux ans ne puisse exercer une telle action : à phénomènes nouveaux, acteurs nouveaux !

M. le président.  - Amendement n°339, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article 2-23 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-24 ainsi rédigé :

« Art. 2-24. - Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant, par ses statuts, de protéger les données personnelles ou la vie privée peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues aux articles 226-16 à 226-24 du code pénal. Toutefois, quand l'infraction a été commise envers des personnes considérées individuellement, l'association n'est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de ces personnes. »

Mme Corinne Bouchoux.  - Cet amendement habilite les associations de défense des données personnelles et de la vie privée à agir en justice pour les délits prévus par la loi de 1978.

Cette disposition serait particulièrement utile dans les cas où les personnes visées par une mesure restrictive de liberté ne peuvent être représentées à l'audience, par exemple lorsqu'elles ont préféré rester anonymes. Le fait d'être déclarée depuis cinq ans pour l'association serait une condition nécessaire pour exercer cette possibilité.

C'est donc un amendement de repli par rapport au précédent, plus ambitieux.

M. le président.  - Amendement n°245, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l'article 2-23 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-24 ainsi rédigé :

« Art. 2-24.  -  Toute association régulièrement déclarée depuis au moins deux ans à la date des faits et se proposant, par ses statuts, de protéger les données personnelles ou la vie privée peut, si elle a été agréée à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues aux articles 226-16 à 226-24 du code pénal. Toutefois, lorsqu'il existe des victimes qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction, l'association n'est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de ces personnes.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles les associations mentionnées au premier alinéa peuvent être agréées. »

M. Yves Rome.  - Cet amendement habilite les associations qui souhaitent assurer la représentation des intérêts collectifs des victimes d'infractions liées aux atteintes à la réglementation sur les données personnelles.

Pour s'assurer du sérieux des associations, leur agrément dans des conditions fixées par décret est exigé.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - L'article 2 du code de procédure pénale dispose que « l'action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ».

Le législateur n'a prévu d'exceptions à ce principe que pour des associations de plus de cinq ans ou agréées, et sur des sujets beaucoup plus réduits que le domaine large de la protection des données personnelles et de la vie privée. Restons-en au droit actuel. Retrait.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Retrait des amendements nos476 et 339 au profit de l'amendement n°245 ? Conditionner la capacité d'action à un agrément et à deux ans d'existence est opportun.

L'amendement n°476 n'est pas adopté.

L'amendement n°339 est retiré.

L'amendement n°245 n'est pas adopté.

L'article 33 ter demeure supprimé.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°246, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 33 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'éducation est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre Ier du livre III de la deuxième partie est complété par une section 12 ainsi rédigée :

« Section 12 :

« Lutte contre le cyber-harcèlement

« Art. L. 312-20.  -  Une information consacrée à la détection et la lutte contre le cyber-harcèlement est dispensée à tous les stades de la scolarité. Les établissements scolaires, y compris les établissements français d'enseignement scolaire à l'étranger, peuvent s'associer à cette fin avec des associations et des personnels concourant à la prévention et à la répression du cyber-harcèlement. » ;

2° À la deuxième phrase de l'avant dernier alinéa de l'article L. 721-2, après les mots : « la lutte contre les discriminations », sont insérés les mots : « et le cyber-harcèlement. »

M. Roland Courteau.  - Le comportement des mineurs, nouvelle génération Y sur l'internet mobile, rend urgente la prise de mesures préventives et éducatives afin d'aider les plus en difficulté. Certes, l'internet mobile participe à la construction de l'identité et de la personnalité de nos enfants, mais les jeunes Français doivent faire face à des menaces virtuelles aux conséquences bien trop réelles : 40 % des élèves disent avoir été victimes d'une agression en ligne.

À cause de leurs différences ou de rumeurs sur leur activité sexuelle, des adolescents peuvent devenir la cible d'un véritable lynchage, ce qui conduit certains d'entre eux à mettre fin à leurs jours.

La prévention est le premier moyen de lutter contre toute forme de harcèlement. Toute personne doit être initiée à la protection de ses informations personnelles et à la gestion de ses paramètres de confidentialité, et l'utilisation du téléphone mobile au sein des établissements scolaires doit être encadrée.

Cet amendement complète la définition de l'enseignement d'éducation civique. Des intervenants extérieurs pourront s'adjoindre aux enseignants pour les aider à dispenser cet enseignement.

Mme Colette Mélot, rapporteur pour avis de la commission de la culture.  - Il existe déjà deux circulaires sur le sujet, en date du 13 août 2013 et du 26 novembre 2013. Le Gouvernement a pris le problème au sérieux : avis défavorable.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Informer pour prévenir le cyber-harcèlement, telle est la priorité pour le Gouvernement. Faire circuler des photos de camarades dénudés dans un établissement n'est pas anodin, et ces agissements doivent être activement combattus.

Faut-il pour autant légiférer, d'autant que le Code de l'éducation contient déjà une disposition relative au principe d?égalité entre les femmes et les hommes ?

L'infraction de cyber-harcèlement créée par la loi de 2014 et celle de revanche pornographique créée par le présent texte suffisent peut-être. Mais tout pas en avant en ce domaine est souhaitable : sagesse.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - La loi donne tout de même une autre amplitude à ce qui n'est aujourd'hui fixé que par circulaire.

M. Roland Courteau.  - Si ces circulaires avaient fait preuve de la moindre efficacité, cela se saurait...Oui, je préférerais que cela soit inscrit dans la loi. Dans celle de 2010 adoptée à l'unanimité, j'avais proposé une telle mesure de sensibilisation à l'égalité entre les femmes et les hommes. Tous les chefs d'établissement reconnaissent l'utilité de ces initiatives.

Je ne comprends pas qu'on ait voté pour en 2010, et qu'on vote contre en 2016. Le cyber-harcèlement est un véritable fléau : donnons-nous les moyens de l'éradiquer. Cela en vaut la peine

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°246, mis aux voix par assis et levé, est adopté.

ARTICLE 33 QUATER

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Le projet de loi proclame le droit à l'internet pour tous. L'usage d'internet entraîne des déviances.

Cet article, ajouté à l'Assemblée nationale, s'intéresse à une forme particulière de cyber-violence : le revenge porn, diffusion d'image pornographique d'une compagne ou d'une ex compagne à son insu. Le phénomène est plus répandu qu'on ne le croit.

En France, un homme sur dix n'exclurait pas de se livrer à de tels actes, dont la gravité est manifestement sous-estimée. Un rapport récent met en lumière le désarroi des victimes, majoritairement des jeunes filles, et la complexité des procédures pour obtenir le retrait des contenus.

Cet article porte les peines d'un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende à deux ans d'emprisonnement et 50 000 euros. L'exposition de leur intimité pousse certaines victimes au suicide. Nous ne pouvons rester insensibles à leur détresse.

M. le président.  - Amendement n°651, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Rédiger ainsi cet article :

Le code pénal est ainsi modifié :

1° L'article 226-2 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Est puni des mêmes peines le fait, en l'absence d'accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d'un tiers tout enregistrement ou document obtenu à l'aide de l'un des actes prévus à l'article 226-1. » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « l'alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « le premier alinéa » ;

2° Après l'article 226-2, il est inséré un article 226-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 226-2-1.  -  Lorsque les délits prévus aux articles 226-1 et 226-2 portent sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 60 000 € d'amende.

« Est puni des mêmes peines le fait, en l'absence d'accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d'un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès de la personne ou par elle-même, à l'aide de l'un des actes prévus à l'article 226-1. » ;

3° À l'article 226-6, la référence : « et 226-2 » est remplacée par la référence : « à 226-2-1 ».

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Cet amendement améliore quantitativement et qualitativement la répression du revenge porn. Il crée dans le code pénal un article 226-2-1 spécifique aux circonstances aggravantes et incrimine toute diffusion d'image ou de parole à caractère sexuel sans le consentement de la personne concernée. Prenant acte de l'arrêt du 16 mars 2016 de la Cour de cassation, il permet la répression de la diffusion d'images ou de paroles dont le consentement aurait pu être présumé.

M. le président.  - Amendement n°247, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rédiger ainsi cet article :

Le code pénal est ainsi modifié :

1° Après l'article 226-2, il est inséré un article 226-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 226-2-1.  -  Lorsque les délits prévus par les articles 226-1 et 226-2 portent sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et 60 000 € d'amende.

« Dans ce cas, le délit prévu par l'article 226-2 est également constitué lorsque les actes mentionnés à l'article 226-1 ont été accomplis avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même, dès lors que ces paroles ou images sont diffusées sans son accord. » ;

2° À l'article 226-6, la référence : « et 226-2 » est remplacée par la référence : « à 226-2-1 ».

Mme Hélène Conway-Mouret  - Par une interprétation exagérément restrictive, la Cour de cassation a jugé le 16 mars 2016 que si le consentement devait être exprès pour la captation d'images, il n'en était pas de même pour la diffusion. Il faut remédier à cela car on peut consentir à l'un tout en s'opposant à l'autre. Le délit sera aussi constitué lorsqu'il s'agit d'un autoportrait ou selfie.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Nous partageons, madame Conway-Mouret, le même objectif. Mais cet amendement n°247 est satisfait par l'amendement n°651, qui me semble plus large et prend acte de la jurisprudence de la Cour de cassation qui porte sur toutes les atteintes à la vie privée, et pas seulement liées à la diffusion d'images à caractère sexuel. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Retrait de l'amendement n°651 au profit de l'amendement n°247. Nous poursuivons le même objectif : créer une nouvelle infraction pénale pour appréhender ce nouveau phénomène de revanche pornographique. Le Royaume-Uni a fait évoluer sa législation, nous devons en faire autant.

J'ai l'impression que la rédaction de l'amendement n°651 couvre moins de situations que celui de Mme Conway-Mouret. S'agissant du consentement, le renvoi à l'article 226-1 crée une confusion. Je m'engage à retravailler cette rédaction avec vous d'ici la CMP.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - L'amendement n° 247 est intégralement repris par le mien. Je vais plus loin en prenant acte de la jurisprudence de la Cour de Cassation.

L'amendement n°651 est adopté.

L'amendement n°247 devient sans objet, ainsi que l'amendement n°306.

L'article 33 quater, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°249, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les avant-dernier et dernier alinéas de l'article 222-33-2-2 du code pénal sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les faits mentionnés au premier alinéa sont punis de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende :

« a) Lorsqu'ils sont commis dans deux des circonstances mentionnées aux 1° à 3° ;

« b) Lorsqu'ils ont été commis par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne.

« Les faits mentionnés au premier alinéa sont punis de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende lorsqu'ils ont été suivis du suicide de la personne harcelée. »

M. Roland Courteau.  - Les cyber-harceleurs font intrusion dans la vie de leurs victimes de manière imprévisible et menaçante. Cela a des conséquences sur tous les aspects de la vie et de la réputation d'une personne, sa santé physique et psychique. Le plus souvent, le harceleur demeure inconnu, ce qui accroît l'anxiété de la victime. Le numérique facilite le harcèlement, aboutissant à de véritables lynchages en ligne.

Le Sénat avait souhaité incriminer spécifiquement le cyber-harcèlement dans la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes ; cette initiative n'a finalement pas vu le jour. La répression du cyber-harcèlement est assurée par référence au délit général de harcèlement prévu à l'article 222-33-2-2 du code pénal - mais ces faits sont moins sévèrement punis que le vol à l'étalage ou le recel d'une bicyclette ! Cet amendement porte la peine encourue à trois ans lorsqu'il est fait usage d'un réseau de communication au public en ligne et à cinq ans lorsque les faits ont été suivis du suicide de la victime.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je salue votre travail, monsieur Courteau, sur ce sujet qui vous tient à coeur. Inutile toutefois d'aggraver les peines : la Chancellerie m'a confirmé qu'une seule condamnation avait été prononcée sur ce fondement depuis la loi du 4 août 2014. Des incriminations plus générales sont utilisées sans recourir à ce délit très spécifique.

Le suicide peut ne pas être la conséquence directe et certaine du harcèlement. Difficile de créer une circonstance aggravante à un délit très précis qui ne dépend qu'indirectement du comportement de l'auteur. La responsabilité pour la mort d'autrui est plus efficacement poursuivie par le chef d'homicide involontaire. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis. La loi pénale doit être précise. Lorsque l'infraction est reconnue, ce qui importe, c'est la rapidité de la réponse apportée par les pouvoirs publics et les services en ligne pour éviter que les contenus préjudiciables ne deviennent viraux. Travaillons aussi à la sensibilisation des jeunes.

M. Roland Courteau.  - Face à ce qui s'apparente à un véritable lynchage, doit-on prévoir des peines aussi faibles ?

L'amendement n°249 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°43 rectifié, présenté par Mme Jouanno, M. Cadic, Mmes Joissains, Gatel et Loisier, MM. Bockel, L. Hervé, Lasserre, Cigolotti, Maurey, Marseille, Longeot, Gabouty, Guerriau, Chaize et Pellevat, Mme Deromedi et M. Laménie.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 226-2 du code pénal, il est inséré un article 226-2-... ainsi rédigé :

« Art. 226-2-...  -  Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, le fait de menacer une personne des actes mentionnés aux articles 226-1 et 226-2 lorsque l'enregistrement ou le document concerne une parole ou une image à caractère sexuel.

« Les articles 312-10, 312-11 et 312-12 s'appliquent sans préjudice de l'alinéa précédent. »

M. Patrick Chaize.  - Il s'agit de réprimer dans le code pénal le fait de menacer une personne de diffuser des images ou paroles à caractère sexuel obtenues avec ou sans son consentement.

M. le président.  - Amendement identique n°340, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.

Mme Corinne Bouchoux.  - Cet amendement, également déposé par Mme Jouanno et des membres de la délégation aux droits des femmes, a été suggéré par des associations et collectifs féministes. Dans les cas de divorce, de nombreuses femmes, mais aussi des hommes, sont victimes de ce type de menaces ou de chantage.

M. le président.  - Amendement n°248, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 226-2 du code pénal, il est inséré un article 226-2-... ainsi rédigé :

« Art. 226-2-...  -  Est puni d'un an d'emprisonnement et 45 000 € d'amende, le fait de menacer une personne de recourir aux actes mentionnés aux articles 226-1 et 226-2 lorsque l'enregistrement ou le document concerne une parole ou une image à caractère sexuel.

« Les articles 312-10, 312-11 et 312-12 s'appliquent sans préjudice de l'alinéa précédent. »

M. Roland Courteau.  - C'est presque le même.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je comprends cette démarche. Le droit actuel suffit toutefois à réprimer les menaces de revanche pornographique et les pratiques de chantage associées. Ainsi l'article 222-17 du code pénal, plus général, punit de manière satisfaisante la menace de commettre tout délit punissable, ce qui vaut pour le délit d'atteinte à la vie privée. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis. Le droit actuel suffit, et prévoit même des peines plus lourdes que celles proposées ici : cinq ans pour le chantage, trois ans pour la menace.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Me voici rassuré par les explications du rapporteur et de la ministre. Nous venons de voter le délit ; il s'agissait ici de la menace du délit. Nous avons la réponse, c'est l'article 222-17 du code pénal, qui réprime déjà le fait de menacer de commettre tout délit. Soyons simples si nous voulons être efficaces. S'il fallait ajouter la répression de la menace à chaque nouveau délit que nous créons, nous n'en sortirions pas ! N'ajoutons pas de kystes au code pénal : retrait ?

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Monsieur le président de la commission des lois, vous m'ôtez les mots de la bouche.

M. Roland Courteau.  - Vous m'avez convaincu et rassuré, je retire mon amendement.

M. Patrick Chaize.  - Moi aussi, en me réjouissant de voir que l'objectif est partagé.

Mme Corinne Bouchoux.  - Idem. Il était important que le Sénat débatte de ce sujet, les associations féministes se satisferont d'entendre que nous partageons leur combat.

Les amendements identiques nos43 rectifié et 340 sont retirés, ainsi que l'amendement n°248.

M. le président.  - Amendement n°179 rectifié ter, présenté par M. Grand, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mandelli, Revet et Raison, Mmes Deromedi et Hummel, MM. Laménie et Charon, Mme Gruny et MM. de Nicolaÿ et Husson.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 9 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les personnes publiques ou morales agissant dans le cadre de recherches à des fins de prévention ou de développement de l'écoconduite subventionnées par des fonds publics. »

M. Louis-Jean de Nicolaÿ.  - L'article 9 de la loi Informatique et libertés de 1978 réserve le traitement des données relatives aux infractions, condamnations et mesures de sûreté à des personnes morales détentrices de mission de service public.

De plus en plus, la collecte et le traitement des données d'infraction sont indispensables à la compréhension des mécanismes. Dans ces cas, les données collectées et traitées le sont uniquement à des fins de recherche et conservées pour une durée limitée à la durée de l'étude.

Plusieurs pays européens autorisent la collecte et le traitement de ces données, sous certaines conditions.

Afin de permettre ces recherches d'intérêt général et d'éviter que certains projets de recherche n'échappent aux laboratoires français, il est proposé d'autoriser les personnes publiques ou morales à effectuer des recherches à partir des données d'infraction.

M. le président.  - Amendement identique n°296 rectifié ter, présenté par MM. Détraigne et Bonnecarrère, Mme Férat et MM. Kern, Marseille, Guerriau et Maurey.

M. Hervé Maurey.  - Il est défendu.

L'amendement n°361 rectifié n'est pas défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je perçois mal la pertinence de l'amendement : pourquoi une personne morale aurait-elle accès à des données personnelles et pas à de simples données agrégées ? L'accès aux fichiers des infractions n'est ouvert qu'aux auxiliaires de justice ou aux sociétés de perception des droits d'auteur.

On ne saurait ouvrir trop largement l'accès à des données sensibles. Le Conseil constitutionnel est très vigilant, et a censuré une disposition jugée « ambiguë » de la loi du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel, qui laissait indéterminée la question du partage ou de la cession des données. L'absence de garanties a été jugée entachée d'incompétence négative du législateur.

Ces amendements permettraient à un constructeur automobile d'accéder à un fichier de personnes ayant causé un accident de voiture. Je n'en saisis pas la finalité, ou du moins je ne la saisis que trop... Retrait, sinon rejet.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Mon avis sera également défavorable, même s'il est peut-être plus nuancé. Il ne s'agit pas ici de fichiers relatifs à des infractions, mais de données.

On peut imaginer des voitures pourvues de capteurs transmettant automatiquement l'information en cas de franchissement d'une limitation de vitesse... Ce ne serait pas inutile aux constructeurs pour concevoir des dispositifs préventifs.

Mais de telles données sont sensibles et il s'agit ici de les transmettre à des entreprises privées. Il faudrait prévoir des garde-fous, étudier la conformité du dispositif au règlement européen relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données personnelles. À ce stade, il serait prématuré d'accorder un blanc-seing, mais je demeure disponible pour étudier l'opportunité d'avancer sur ce sujet.

Les amendements identiques nos179 rectifié ter et 296 rectifié ter ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°587, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires :

1° À la mise en conformité de la législation française à la proposition 2012/2011/COD de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (règlement général sur la protection des données), ainsi que les éventuelles mesures d'adaptation nécessaires pour l'application de cette proposition de règlement ;

2° Pour adapter aux caractéristiques et contraintes particulières des collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, les dispositions prises en application du 1° ;

3° Pour adapter à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon les dispositions prises en application du 1° ;

4° Pour étendre, avec les adaptations nécessaires, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et aux Terres australes et antarctiques françaises les dispositions prises en application du 1°, sous réserve des compétences dévolues à ces collectivités.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Le règlement européen s'appliquera directement au second semestre 2018 ; il rendra de facto obsolètes certaines dispositions de la loi Informatique et libertés. Le travail d'adaptation de la loi de 1978 sera fastidieux et très technique, d'où cette demande d'habilitation à y procéder par ordonnance, sachant que toutes les grandes orientations politiques figurent dans le présent texte. Nous avons une approche proactive de la construction du droit : nous tentons de peser sur les décisions prises à Bruxelles, parfois avec succès ; quand nous en avons la possibilité, nous anticipons l'intégration du règlement dans notre droit national, voire nous allons au-delà.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Il sera en effet nécessaire d'adapter notre législation au règlement européen. Mais il faudra plus qu'un simple toilettage de la loi informatique et libertés. Il serait préférable que le Gouvernement présente un projet de loi. Avis défavorable.

M. Philippe Bas, président de la commission.  - Nous n'aimons guère les habilitations.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - En tant qu'ancienne secrétaire de la commission des lois de l'Assemblée, je vous comprends ! Tous les grands principes du règlement européen figurent dans le présent texte. Le règlement étant d'application directe, il n'y a pas besoin d'une loi pour le transposer. Le Sénat perdrait son temps à supprimer les quelques 70 articles de la loi de 1978, alors qu'il a bien des chantiers plus prioritaires !

L'amendement n°587 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°673, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Après l'article 33 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa du III de l'article 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La désignation d'un correspondant est obligatoire pour les personnes morales de droit privé dont le personnel est supérieur à 250 personnes ou dont les activités consistent en des traitements de données qui, en raison de leur nature, de leur portée ou de leur finalité, exigent un suivi régulier et systématique de personnes. »

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je reprends l'amendement n°542 bis qui rend obligatoire la désignation d'un correspondant informatique et libertés (CIL) dans les entreprises traitant des données à caractère personnel de manière régulière et à une échelle importante, ou dans les entreprises de plus de 250 salariés. Cela permet d'anticiper l'entrée en vigueur du règlement européen.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cet amendement couvre un champ beaucoup plus large que le règlement, qui prévoit que ces deux critères sont cumulatifs et non exclusifs l'un de l'autre. Je crains qu'il ne freine l'essor des TPE et PME en matière de développement numérique.

L'amendement n°673 est adopté et devient article additionnel.

La séance, suspendue à 17 h 15, reprend à 17 h 30.

ARTICLE 34

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Milon, Calvet, Laufoaulu, Huré, Laménie et Lefèvre, Mmes Duchêne et Gruny, MM. Pellevat, Gremillet, Charon et Houel, Mme Deroche et M. Husson.

Alinéa 6, seconde phrase

Après la première occurrence du mot :

correspondance

insérer les mots :

, les données de connexion

Mme Marie-Annick Duchêne.  - L'amendement vise à inclure les données de connexion, définies par l'article 6 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique et le décret du 25 février 2011, dans le champ du secret des correspondances.

M. le président.  - Amendement identique n°477, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Le Conseil d'État en juillet dernier a transmis au Conseil constitutionnel une QPC sur le périmètre de surveillance des réseaux et la définition des données de connexion, tels qu'inscrits dans la loi de programmation militaire. Le Conseil d'État estimait en effet que se posait la question de la conformité aux principes constitutionnels de droit au respect de la vie privée, de droit au procès équitable et de liberté de communication.

Le ministère de la défense, le ministère de l'intérieur ou Bercy sont depuis la loi de programmation autorisés à aspirer tous les documents et informations dans les tuyaux des opérateurs. La loi sur le renseignement de 2015 et la dernière loi antiterroriste ont amplifié le mouvement. Les sondes, les IMSI-catchers et tous les outils d'écoute rendent nécessaire une évolution de la législation. Il est logique d'inclure les données de connexion dans le secret des correspondances dans la mesure où elles donnent parfois autant, voire plus d'indications que le contenu en lui-même. On ne peut laisser l'administration moissonner à loisir toutes ces données qui fondent une identité virtuelle, soit une part déterminante de notre individualité.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Les données de connexion ne sauraient être soumises au secret des correspondances : elles sont l'équivalent des mentions portées sur l'enveloppe ! Avis défavorable.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Même avis.

Les amendements nos20 rectifié bis et 477 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°648, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Alinéa 7, première phrase

Remplacer les mots :

Les personnes qui éditent un service de communication au public en ligne, au sens du deuxième alinéa du II de l'article 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2014 pour la confiance dans l'économie numérique

par les mots :

Les fournisseurs de services de communication au public en ligne

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Coordination rédactionnelle.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°648 est adopté.

L'amendement n°139 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°613 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°79 rectifié, présenté par MM. Chaize, Mandelli, de Nicolaÿ et Calvet, Mme Cayeux, MM. Bignon, Bizet, de Legge, Mouiller, B. Fournier, Kennel et Masclet, Mme Gruny, MM. Grand, Cornu et Vaspart, Mme Estrosi Sassone, MM. Bouchet, Vasselle, P. Leroy, Delattre et Rapin, Mme Deroche et MM. Husson, Laménie, Trillard et Magras.

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  Lorsque la fonctionnalité permettant aux utilisateurs d'échanger des correspondances est purement accessoire au service principal fourni par un opérateur de plateforme en ligne mentionné au 2° de l'article L. 111-7 du code de la consommation, et est uniquement destinée à assurer la bonne utilisation du service principal, lesdites correspondances ne sont pas couvertes par le secret défini au II du présent article.

M. Patrick Chaize.  - Certaines plateformes de mise en relation entre particuliers offrent à ceux-ci une fonctionnalité leur permettant d'échanger des messages entre eux. L'objectif est uniquement de faciliter la conclusion ou l'exécution de la transaction entre les utilisateurs. Il peut s'agir par exemple de convenir d'un lieu et une heure de rendez-vous. En pratique, les plateformes se trouvent dans l'obligation de modérer le contenu, de s'assurer par exemple que les utilisatrices féminines ne sont pas victimes de harcèlement, que les messages ne contiennent pas d'insultes.

Quoi qu'il en soit, ce sont des messages accessoires : il convient de les exclure du champ d'application du secret des correspondances.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis défavorable. La notion de correspondance accessoire est trop floue.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cet amendement atténue en fait la portée de l'article 34. Comment s'assurer qu'un service de messagerie est « accessoire » à un service principal ? Et qu'il est utilisé comme tel ? Cette règle serait facile à contourner. Avis défavorable, il faut maintenir un principe fort de secret des correspondances privées.

L'amendement n°79 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié bis, présenté par MM. Grand et Milon, Mme Giudicelli, MM. Vasselle, Gilles, Rapin, Pellevat, Lefèvre, Bizet, Chasseing, Charon et Laménie et Mme Deroche.

Alinéa 8

Remplacer les mots :

ou statistiques

par les mots :

, statistiques ou d'amélioration du service apporté à l'usager

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - La commission reprend cet amendement. Il vise à empêcher le scan automatique des courriers sans le consentement de l'utilisateur.

M. le président.  - Ce sera le n°674.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Ne vidons pas de sa substance l'article 34 qui protège le secret des correspondances. La rédaction autorise des interprétations trop extensives.

L'amendement n°674 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°78 rectifié, présenté par MM. Chaize, de Nicolaÿ, Mandelli et Calvet, Mme Cayeux, MM. Bignon, Bizet, de Legge, Mouiller, B. Fournier, Kennel et Masclet, Mme Gruny, MM. Grand, Cornu et Vaspart, Mme Estrosi Sassone, MM. Rapin, Pellevat, P. Leroy, Dallier, Bouchet et Vasselle, Mme Deroche et MM. Husson, Laménie, Trillard et Magras.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  Est autorisée l'analyse du contenu de la correspondance en ligne, de l'identité des correspondants, ainsi que, le cas échéant, de l'intitulé du message ou des documents joints à la correspondance lorsque ce traitement a pour fonction les questions de sécurités, la détection de contenus non sollicités, de programmes informatiques malveillants.

M. Patrick Chaize.  - La rédaction initiale du texte prohibait toute analyse automatisée du contenu des correspondances en ligne, sauf si ce traitement avait pour objectif la « détection de contenus non sollicités ou de programmes malveillants », au bénéfice des utilisateurs.

L'Assemblée nationale a modifié cet alinéa afin de prévoir le consentement exprès de l'utilisateur, mais la nouvelle rédaction ne mentionne plus les raisons de cette exception - la sécurité.

Revenons à la rédaction initiale, pour renforcer la sécurité des réseaux et éviter aux usagers d'être submergés par une quantité astronomique de mails non sollicités ou victimes de programmes malveillants.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis défavorable : dès lors que nous venons d'adopter l'amendement n°674, il est préférable de nous en tenir à cette nouvelle rédaction.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. La notion de sécurité est beaucoup trop large et l'amendement ne reprend pas la condition fixée par le texte de la commission, à savoir le consentement des utilisateurs.

L'amendement n°78 rectifié est retiré.

L'article 34, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°118 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Milon et Laufoaulu, Mme Deromedi, MM. Revet et Rapin, Mme Estrosi Sassone, M. Pellevat, Mme Lamure, MM. Béchu et Charon, Mme Hummel, M. Gremillet, Mme Giudicelli, MM. Calvet, Perrin, Raison, Huré, Laménie et Lefèvre, Mmes Duchêne, Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Chasseing, Lemoyne et Houel et Mme Deroche.

Après l'article 34

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce délai est porté à un an si ces infractions ont été commises au moyen d'un service de communication au public en ligne. »

Mme Marie-Annick Duchêne.  - Pour les délits de presse, la loi du 29 juillet 1881 prévoit un délai de prescription de trois mois. À l'époque, avec un journal ou des libellés papier, il n'y avait plus de trace du délit trois mois après. Sur internet, non seulement on peut découvrir que l'on est victime six mois après les faits, mais l'injure ou la diffamation reste éternellement en ligne.

Nous portons à un an le délai de prescription pour toutes les infractions de presse commises en ligne.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - La commission des lois a écarté cette mesure. Une mission sur les délits de presse est en cours, menée par M. Mohamed Soilihi et M. Pillet. Et la proposition de loi sur la prescription en matière pénale de MM. Tourret et Fenech, le projet de loi « égalité et citoyenneté » seront des occasions plus propices pour approfondir la question. Retrait.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Les arguments du rapporteur sont convaincants. Le délai abrégé de prescription retenu en 1881 tenait au souci de garantir la liberté d'expression, droit fondamental reconnu par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - La diffamation et l'injure par voie de presse sont des délits. Leur reproduction fait courir à nouveau les délais de prescription, comme l'a rappelé le TGI de Paris en mars 2013. La création d'un lien hypertexte donnant accès à des commentaires anciens correspond à une nouvelle mise en ligne. En outre, pour certaines diffamations, liées à l'origine, au sexe, à l'ethnie, à la race ou au handicap, le délai est d'un an. Cet amendement n°21 rectifié bis est donc partiellement satisfait. J'ajoute que les services comme Whatsapp ou Snapchat sont des services de communication privée. Nous voterons contre l'amendement.

L'amendement n°21 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°250 rectifié, présenté par M. Gorce et les membres du groupe socialiste et républicain.

A.  -  Après l'article 34

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après le II de l'article 25 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis.  -  Pour l'application du 8° du I, ne peuvent être autorisés que les traitements dont la finalité est la protection de l'intégrité physique des personnes, la protection des biens ou la protection d'informations dont la divulgation, le détournement ou la destruction porterait un préjudice grave et irréversible et qui répondent à une nécessité excédant l'intérêt propre de l'organisme les mettant en oeuvre. »

II.  -  Les responsables de traitements de données à caractère personnel dont la mise en oeuvre est régulièrement intervenue avant l'entrée en vigueur de la présente loi disposent, à compter de cette date, d'un délai de trois ans pour mettre leurs traitements en conformité avec les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, dans leur rédaction issue de la présente loi.

Les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, demeurent applicables aux traitements qui y étaient soumis jusqu'à ce qu'ils aient été mis en conformité avec les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée, dans leur rédaction issue de la présente loi, et, au plus tard, jusqu'à l'expiration du délai de trois ans prévu au premier alinéa du présent article.

B.  -  Faire précéder cet article d'un chapitre et de son intitulé ainsi rédigé :

Chapitre III

Limitation de l'usage des techniques biométriques.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Serions-nous prêts à accepter une banalisation des données biométriques, une diversification de leur usage à des fins de contrôle social ou de confort commercial ? Une clarification législative est nécessaire, car ces données relèvent bien de la protection de la vie privée et de l'intégrité du corps humain.

Notre amendement conditionne l'usage des données biométriques à une nécessité stricte de sécurité des personnes et des biens, ajoutant une exigence de proportionnalité entre la nature de l'information ou du site à sécuriser et la technologie utilisée.

Cet amendement s'inspire d'une proposition de loi de M. Gorce votée au Sénat le 27 mai 2014.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable, d'autant que j'ai suggéré une rectification qui a été acceptée par les auteurs.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Plutôt qu'à une interdiction par la loi, le recours aux techniques biométriques doit donner lieu à un encadrement au fur et à mesure des innovations. Les données biométriques sont sensibles. Elles ne sauraient être invasives. Cette conscience des enjeux et la volonté d'assurer un cadre commun à toute l'Europe se sont concrétisées avec l'article 9 du règlement européen sur les données personnelles, qui pose le principe de l'interdiction de traitement des données biométriques, sauf exception.

Restons-en à ce cadre commun harmonisé : Avis défavorable.

L'amendement n°250 rectifié est adopté.

TITRE III (L'accès au numérique)

M. Hervé Maurey .  - La couverture numérique du territoire n'a fait l'objet d'aucun texte depuis la proposition de loi votée en 2012 par le Sénat, rejetée par l'Assemblée nationale à la demande du Gouvernement.

J'espère qu'au-delà des effets d'annonce, ce texte sera l'occasion d'améliorer la couverture de nos territoires, tant pour le mobile que pour le fixe, car de grosses difficultés subsistent.

Dans les zones AMII, il faut que les opérateurs tiennent leurs engagements. Le financement des réseaux d'initiatives publiques (RIP) doit être assuré : que l'État débloque les fonds, nous attendons les chèques qu'il a promis...

En matière de téléphonie mobile, le Gouvernement a identifié 268 communes mal couvertes. Chacun sait qu'elles sont beaucoup plus nombreuses ! Rien que dans mon département, le conseil départemental en a identifié 200 : or seules 15 d'entre elles sont reconnues comme telles dans le plan du Gouvernement.

CHAPITRE PREMIER (Numérique et territoires)

Mme Éliane Assassi .  - En dépit du rapport de la commission du développement durable de 2015, ce projet de loi affiche des objectifs très modestes. On continue à socialiser les pertes et à privatiser les profits. Ainsi, le bénéfice d'Orange a triplé l'an dernier, pour atteindre 2,65 milliards d'euros. Pourquoi autoriser les opérateurs à posséder le réseau dans les zones denses et les exonérer de cette obligation ailleurs ? Pourquoi ne pas séparer la gestion du réseau de son utilisation par des opérateurs ? Le modèle hybride est inopérant. Nous proposons la création d'un opérateur national propriétaire du réseau, financé par les opérateurs et l'État. Souvenez-vous de ce Fonds national pour améliorer la couverture du territoire, qui n'a hélas jamais été alimenté. Nous souhaitons aussi que l'État assure sa mission au service de l'intérêt général, aidé par les entreprises bénéficiaires.

M. Yves Rome .  - Les propos de M. Maurey m'étonnent. Le Gouvernement avec le plan France très haut débit (FTHB) a accéléré le rythme : 3 milliards d'euros, ce n'est pas rien. Ces aides aux collectivités territoriales ont doublé, même si nous n'avons pas pu renverser la table, comme le propose le groupe CRC, pour créer un tout nouveau système.

Le plan France très haut débit, dans lequel sont engagés 98 départements, est un succès qui place la France en pointe ; près de 10 000 emplois sont en jeu. Nous pourrions être la nation la plus fibrée d'Europe d'ici 2022.

ARTICLE 35

L'amendement n°367 n'est pas défendu non plus que l'amendement n°559 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°509 rectifié, présenté par MM. Requier, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Vall.

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre V du titre II du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1425-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 1425-3 -  Dans les domaines de compétence que la loi leur attribue ou qui leur ont été transférés, les conseils départementaux, syndicats de communes ou syndicats mixtes d'échelle au moins départementale et les conseils régionaux établissent des stratégies de développement des usages et services numériques existants sur leur territoire. Ces stratégies favorisent la cohérence des initiatives publiques, ainsi que la mise en place de ressources partagées et mutualisées afin de doter l'ensemble des territoires d'un maillage équilibré de services numériques. Elles sont établies en cohérence avec les schémas régionaux de développement économique et les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique. »

M. Guillaume Arnell.  - Il n'y a pas lieu d'intégrer les stratégies des usages et services dans les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN).

L'amendement n°317 n'est pas défendu.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - La commission du développement durable a cherché à simplifier, et pour éviter de multiplier les documents - il y en a suffisamment ! - elle a intégré les nouvelles stratégies des usages et services dans les SDTAN.

Pour répondre aux inquiétudes des communes, avis favorable aux amendements nos369 et 562 rectifié. Quant au n°509 rectifié, il pourrait sans doute être retiré ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - J'attribue tous ces amendements de suppression à une mauvaise compréhension de l'objet de cet article.

En France, les stratégies locales se concentrent beaucoup sur les infrastructures et les tuyaux, beaucoup moins sur les contenus...

M. Philippe Dallier.  - Il ne faut pas trop en demander non plus !

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Résultat, nous sommes les consommateurs passifs d'une culture internet produite ailleurs. Alors que services en ligne, programmes éducatifs, Mooc, télémédecine, e-administration, se multiplient, nos concitoyens ont besoin d'être accompagnés pour développer leur literacy numérique. Pour y remédier, nous avons créé un réseau national de médiation numérique, par exemple dans les maisons de services au public. Il n'y a pas d'agenda caché dans ce texte ; la réflexion sur les usages est au coeur de la réussite de la transition numérique en France.

M. Bruno Sido.  - Je n'ai pas de souci pour les contenus : l'État comme les entreprises multiplient les procédures dématérialisées !

Mon inquiétude porte sur les usages. Il faudra peut-être bientôt recréer l'équivalent des anciens écrivains publics pour aider les personnes peu à l'aise avec internet à s'y retrouver. Pourquoi l'État, qui attend 60 millions d'économies de la dématérialisation et de la fermeture de services préfectoraux qui en découlera, n'y consacrerait-il pas des moyens spécifiques ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Nous avons à cette fin renforcé les moyens de l'Agence du numérique, qui pourra se consacrer à trois missions : la mission France très haut débit, la mission French Tech auprès des entreprises innovantes et la mission pour une société numérique, dans laquelle s'insèrent les écrivains numériques. Le Gouvernement sera toujours à vos côtés pour définir une stratégie commune sur ces questions.

M. Bruno Sido.  - Merci pour cette réponse.

M. Philippe Dallier.  - Installons d'abord des tuyaux partout, le reste suivra... Mme la ministre en revanche n'a pas répondu à la question soulevée au travers de cet amendement.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°509 rectifié. Nous voulons inclure les usages dans le SDTAN, aujourd'hui uniquement consacré aux infrastructures.

L'amendement n°509 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°368 n'est pas défendu, non plus que les amendements nos560 rectifié et 561 rectifié.

Les amendements identiques nos369 et 562 rectifié ne sont pas défendus.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Je reprends les amendements identiques n°369 et n°562 rectifié.

M. le président.  - Ce sera l'amendement n°676.

Amendement n°676, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette stratégie prend en compte les stratégies des collectivités et leurs groupements en matière de développement des usages et des services numériques. »

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable ; le SDTAN est déjà élaboré en concertation avec les collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales - celles qui ne sont pas prévues peuvent être associées à leur demande. Cet amendement est satisfait par l'article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales.

L'amendement n°676 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°497 rectifié, présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette stratégie est obligatoire dans les zones rurales et hyper-rurales.

M. Guillaume Arnell.  - Les zones rurales et hyper-rurales doivent être prioritaires dans le financement des actions des partenaires privés chargés de la couverture numérique du territoire. Sinon, elles ne pourront jamais attirer familles et entreprises, et les jeunes continueront à partir.

Cet amendement réaffirme l'importance à accorder à ces zones qui représentent entre le quart et la moitié du territoire national.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis défavorable, vous créez une nouvelle charge pour les collectivités.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Le Gouvernement préfère une approche souple et l'incitation pour développer les usages. Même si je partage votre avis sur l'importance du numérique pour les zones très rurales.

L'amendement n°497 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°608, présenté par M. Chaize, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un document-cadre intitulé "Orientations nationales pour le développement des usages et services numériques dans les territoires" est élaboré, mis à jour et suivi par l'autorité compétente de l'État. Ce document-cadre comprend une présentation des choix stratégiques de nature à contribuer au développement équilibré des usages et services numériques dans les territoires et un guide méthodologique relatif à l'élaboration des stratégies de développement des usages et services numériques mentionnées au deuxième alinéa du présent article. »

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - L'État ne peut se défausser sur les collectivités territoriales pour développer les services numériques. Un soutien financier et un cadrage par l'État, comme celui sur le réseau de très haut débit, est nécessaire pour aider à construire la République numérique.

Cet amendement prévoit l'élaboration au niveau national d'un document-cadre pour le développement des usages et services numériques dans les territoires.

Sans cet accompagnement par l'État, les effets de l'article 35 sur le développement des usages et services numériques risquent de demeurer limités.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Avis favorable à l'amendement n°608.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Difficile de ne pas poursuivre un tel objectif. Mais nous ne sommes plus sous les Trente Glorieuses, où l'on définissait une politique industrielle depuis un bureau ministériel : partons des territoires, pour diffuser les bonnes pratiques ; l'État accompagnera leurs initiatives.

Sous cette réserve, j'approuve la publication d'une stratégie nationale. Un document-cadre entraîne peut-être aussi la définition d'une ligne budgétaire dédiée, je ne saurais m'avancer à ce point...

Nous avons déjà signé des conventions avec les partenaires privés impliqués dans les territoires ; je m'engage, non au nom du Gouvernement, mais à titre personnel, à ce que le budget suive.

M. Yves Rome.  - Je me rallie à l'amendement n°608.

L'amendement n°497 rectifié est retiré.

L'amendement n°608 est adopté.

L'article 35, modifié, est adopté.

ARTICLE 36 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°406 rectifié, présenté par M. Camani et les membres du groupe socialiste et républicain.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le deuxième alinéa du I de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa de l'article L. 5721-2, un syndicat mixte relevant du titre II du livre VII de la cinquième partie peut adhérer, jusqu'au 31 décembre 2021, à un autre syndicat mixte exerçant, par transfert ou délégation, tout ou partie des compétences mentionnées au premier alinéa du présent I.

« L'adhésion d'un syndicat mixte qui exerce ses compétences par délégation à un autre syndicat mixte n'est possible que si ce dernier comprend au moins une région ou un département. »

M. Pierre Camani.  - Cet amendement rétablit l'article 36 qui permet la mise en place de grands projets et garantit la cohérence des projets d'implantation des réseaux de communications électroniques à très haut débit sur l'ensemble du territoire.

Autoriser, sur une durée limitée dans le temps, le regroupement de syndicats mixtes ouverts (SMO), permettra aux collectivités d'atteindre une taille critique en vue d'accélérer le déploiement des réseaux d'initiative publique à très haut débit et d'attirer les investissements privés des fournisseurs d'accès à internet.

La taille du marché permet de rééquilibrer les rapports de force au profit des territoires.

M. le président.  - Amendement identique n°609, présenté par M. Chaize, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - Je me réjouis que nos collègues socialistes aient repris mon amendement. Il s'agit aux collectivités de se regrouper en syndicats mixtes de syndicats mixtes pour établir des réseaux à l'échelle qui convient à leur déploiement et qui dépasse souvent les limites d'un seul département.

L'amendement n°318 n'est pas défendu.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Constituer des SMO de SMO ? Pourquoi pas, mais ces amendements ne fixent pas de date butoir. La suppression de cet article en commission des lois est cohérente avec la position constante du Sénat sur la loi NOTRe. Le rapporteur Jean-Jacques Hyest, depuis appelé à d'autres fonctions, avait alors opportunément demandé : « à quand des syndicats mixtes de syndicats mixtes ? » 

M. Philippe Dallier.  - Je m'en souviens !

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Les solutions les plus simples existent : groupement de commande, société publique locale, dissolution puis création d'un SMO, fusion d'un SMO unique, et M. Richard a même suggéré la contractualisation entre SMO. La commission des lois confirme son avis défavorable à cet article, dans un souci constant de simplification, en cohérence avec les objectifs de toute réforme territoriale.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Faisons confiance aux élus de terrain engagés sur ces questions depuis des années, qui réclament la possibilité de créer de tels SMO de SMO. Cette solution améliore la gouvernance et poursuit également un objectif économique.

En effet, Les sociétés publiques locales sont complexes et longues à créer ; et la commercialisation des réseaux est rendue plus facile dans un marché large.

M. Yves Rome.  - Cet amendement vise à la réussite du plan FTHD. Les grands fournisseurs d'accès à internet, pour l'heure, ne se précipitent pas sur les réseaux d'initiative publique. Seuls les plus larges, à l'échelle régionale, celui de la Bretagne par exemple, suscitent, eux, des offres. Plus les collectivités territoriales se regrouperont, plus elles feront venir les exploitants. Monsieur le rapporteur, pourquoi cet entêtement ?

M. Bruno Sido.  - Je n'ai rien a priori contre les SMO de SMO, mais pourquoi ne pas simplifier ? Il faut que les opérateurs y comprennent quelque chose ! J'ajoute une sixième solution aux cinq citées par le rapporteur : que les grandes régions que nous venons de constituer s'occupent de ces questions, même pour une partie seulement de leur territoire.

Dans le cadre du suivi plan France très haut débit, où je siège aux côtés de M. Chaize, l'on voit parfois de drôles de choses, à une échelle trop petite souvent.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Nul entêtement de ma part. Un peu de mesure dans vos propos, monsieur Rome.

Les amendements identiques nos406 rectifié et 609 sont adoptés et l'article 36 est rétabli.

ARTICLE 36 BIS

M. le président.  - Amendement n°407, présenté par M. Rome et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que les dispositions facilitant la transition vers le très haut débit

M. Yves Rome.  - À la suite de la mission présidée par M. Champsaur, dont j'ai fait partie, la loi du 6 août 2015 a institué un statut de « zone fibrée ». Ce fut une avancée considérable vers le très haut débit, mais les implications concrètes se font encore attendre, dans bien des cas.

Afin d'assurer l'effectivité de ce dispositif, cet amendement précise que le décret auquel renvoie l'article 36 bis prévoira les dispositions facilitant la transition vers le THD. Il importe que les fournisseurs d'accès déploient leurs services dans ces territoires.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - L'esprit du mécanisme de zone fibrée est précisément de faciliter la transition vers le THD. L'article L. 33-11 du code des postes et communications électroniques, dans sa rédaction actuelle devrait vous donner entière satisfaction. Retrait ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - C'est juste. Sagesse puisque le sujet vous tient à coeur.

M. Yves Rome.  - Certes, mais les mesures sont loin de s'être traduites dans les faits. Chez M. Chaize lui-même, il a fallu attendre des lustres pour que les fournisseurs d'accès à internet investissent le réseau d'initiative publique.

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - Nous sommes d'accord sur le fond, je trouvais simplement que ce texte était rendu un peu bavard. Mais soit : sagesse.

L'amendement n°407 est adopté.

L'article 36 bis, modifié, est adopté.

ARTICLE 37 A

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Nous sommes favorables à ce que les collectivités territoriales bénéficient du FCTVA au titre de leurs dépenses d'investissement pour les réseaux de téléphonie mobile, comme c'était le cas jusqu'au 31 décembre 2014, mais est-ce bien à elles de faire ces investissements ? Nous ne le pensons pas.

Dans les campagnes, ils seront particulièrement lourds. L'État attend des collectivités territoriales un engagement de 14 milliards d'euros à l'horizon 2020. L'équation semble insoluble alors que les dotations sont en berne et que les collectivités peinent à assurer leurs propres compétences.

Créons un opérateur unique national dédié. Cela limiterait les surinvestissements en zone plus urbanisée, où les infrastructures se superposent. Ainsi pourrait être mis en oeuvre un principe de sobriété en matière d'ondes.

M. Bruno Sido .  - Oui, la question se pose. Un certain nombre de départements ont tenu ce raisonnement et n'ont rien fait ; d'autres ont appliqué le principe « Aide-toi, le ciel t'aidera ». Force est de constater que les seconds s'en sont mieux sortis.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Je ne propose pas de ne rien faire mais que la nation prenne ses responsabilités !

Mme Éliane Assassi.  - Encore faut-il avoir des moyens !

M. Bruno Sido.  - Agissons ! Nos concitoyens attendent !

L'article 37 A est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

L'amendement n°15 rectifié ter n'est pas défendu non plus que les amendements nos145 et 351 rectifié ter.

M. le président.  - Amendement n°408 rectifié bis, présenté par M. Camani et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

I. - Après l'article 37 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1615-7-... ainsi rédigé :

« Art. L. 1615-7-...  -  Par dérogation aux articles L. 1615-2 et L. 1615-7, les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient des attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses exposées pour créer des infrastructures dont ils conservent la propriété, lors de l'enfouissement des réseaux de communications électroniques, dès lors que ces dépenses n'ouvrent pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée par la voie fiscale. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Pierre Camani.  - La faiblesse des redevances d'occupation des fourreaux, payées par les opérateurs à l'occasion de l'enfouissement des réseaux ne permet pas la récupération de la TVA.

Or l'enfouissement des réseaux électriques et de communications électroniques améliore l'esthétique, mais surtout sécurise ces réseaux, indispensables à l'activité économique et aux services publics.

Les collectivités, en charge du passage au très haut débit sur 85 % du territoire national, sont directement concernées par la qualité de l'infrastructure pour leurs réseaux. Cette mesure concourt donc à la réussite du plan FTHD sur le long terme.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Qu'en pense le Gouvernement ? Par deux fois, celui-ci, répondant à des questions écrites, a confirmé que ces dépenses pouvaient bénéficier du FCTVA. Mais il semble y avoir des difficultés...

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cet amendement est satisfait par l'article L. 1615-7 du CGCT, modifié lors des débats sur la loi de finances pour 2016. Dès lors que les investissements entrent dans le cadre du plan France très haut débit, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent bénéficier des attributions du FCTVA ; l'Assemblée nationale a étendu cette règle à la couverture mobile.

La partie relative aux infrastructures de voirie et du plan France très haut débit, représentera plus de 260 millions d'euros de dépenses fin 2016.

L'amendement n°408 rectifié bis est retiré.

L'article 37 B est adopté.

ARTICLE 37 C

M. le président.  - Amendement n°588, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 24-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu'une demande de raccordement à un réseau de communications électroniques à très haut débit en fibre optique est effectuée par le propriétaire, locataire ou occupant de bonne foi d'un logement d'un immeuble comportant plusieurs logements ou d'un immeuble à usage mixte dans les conditions prévues à l'article 1er de la loi n° 66-457 du 2 juillet 1966 relative à l'installation d'antennes réceptrices de radiodiffusion, le syndicat des copropriétaires ne peut s'opposer, nonobstant toute convention contraire, sans motif sérieux et légitime conformément au II du même article 1er, à l'installation de telles lignes dans les parties communes de l'immeuble de manière à permettre la desserte de chacun des logements, sous réserve que l'immeuble dispose des infrastructures d'accueil adaptées.

« Cette installation, réalisée aux frais de l'opérateur conformément à l'article L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques, fait l'objet d'une convention conclue dans les conditions prévues à l'article L. 33-6 du même code avec le syndicat des copropriétaires, après avis du conseil syndical lorsque celui-ci a été institué. »

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - La commission des lois du Sénat a réécrit l'article 37 C visant à faciliter le raccordement des immeubles existants à la fibre optique sans avoir à recueillir l'accord préalable des copropriétaires. Elle a considéré que le dispositif s'insérerait mieux dans la loi de 1966, au sein du « droit à la fibre » qui y est consacré depuis 2008, sur le modèle de l'Espagne, pays le plus avancé pour le déploiement de la fibre optique dans ses agglomérations. Elle exclut les occupants sans titre du bénéfice de ce droit.

Or si la fibre progresse rapidement partout ailleurs en Europe, le choix de passer par la loi de 1966 implique de modifier aussi celle de 1965 relative aux copropriétés, ainsi que l'article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques.

Cet amendement revient à la rédaction initiale, tout en réservant ce droit à la fibre aux propriétaires, locataires ou occupants de bonne foi.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur.  - Remplacer l'exclusion des occupants « sans titre » par la mention des occupants « de bonne foi » est heureux.

Mais le dispositif n'est pas plus lisible puisqu'il reste deux mécanismes que le texte de la commission des lois articule plus intelligiblement. Sans doute évoluerons-nous d'ici la CMP. Avis défavorable pour l'heure.

L'amendement n°508 n'est pas adopté.

L'article 37 C est adopté.

ARTICLE 37 D

Mme Éliane Assassi .  - Cet article revient sur un avantage fiscal consenti aux entreprises investissant dans la fibre optique, occasion de rappeler le caractère ubuesque de la construction de ce marché dit « concurrentiel », où les risques sont limités, les opérateurs privés étant libre de n'intervenir qu'en zone rentable !

Il est proposé de partager les bénéfices de l'avantage fiscal entre Orange, opérateur historique, et les autres, via la notion de « droits d'usage cédés », sur laquelle nous sommes très réservés. Nous préférons une intervention directe par l'État plutôt que de tels dispositifs fiscaux, très difficiles à contrôler et à limiter.

L'investissement pour la fibre optique devrait être planifié par la puissance publique et non pas « encouragé » fiscalement de cette façon. La vision stratégique pour le numérique mérite mieux.

Nos amendements ont été jugés irrecevables. L'accès égal à un service public universel est pourtant une exigence fondamentale, que l'État se doit d'affirmer sans craindre les foudres de l'Union européenne...

M. le président.  - Amendement n°634, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  L'article 39 decies du code général des impôts est ainsi modifié :

A. Le I est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, l'année : « 2016 » est remplacée par l'année : « 2017 » ;

2° Au 6°, la date : « 31 décembre 2016 » est remplacée par la date : « 14 avril 2017 » ;

3° Au 7°, la seconde phrase est remplacée par quatre phrases ainsi rédigées :

« Ces biens peuvent bénéficier de la déduction quelles que soient leurs modalités d'amortissement. En cas de cession de droits d'usage portant sur les biens mentionnés à la première phrase du présent 7°, le montant des investissements éligibles est égal à la différence entre le montant total des investissements effectués, hors frais financiers, et le montant ouvrant droit à la déduction des droits d'usage cédés à une entreprise tierce. Par dérogation au premier alinéa du présent I, les entreprises titulaires d'un droit d'usage portant sur ces biens peuvent déduire une somme égale à 40 % du montant facturé au titre de ce droit d'usage pour sa fraction afférente au prix d'acquisition ou de fabrication des biens, y compris par dérogation à la première phrase du présent 7°, lorsque ces biens font partie de réseaux ayant fait l'objet d'une aide versée par une personne publique. Par dérogation au même premier alinéa, la déduction s'applique aux biens mentionnés au présent 7° qui sont acquis ou fabriqués par l'entreprise à compter du 1er janvier 2016 et jusqu'au 14 avril 2017 et aux droits d'usage des biens acquis ou fabriqués au cours de la même période qui font l'objet d'une cession avant le 15 avril 2017. »

4° Après le huitième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« 8° Les logiciels qui contribuent à des opérations industrielles de fabrication et de transformation. Par dérogation au premier alinéa, la déduction s'applique aux biens mentionnés au présent 8° quelles que soient leurs modalités d'amortissement ;

« 9° Les appareils informatiques prévus pour une utilisation au sein d'une baie informatique acquis ou fabriqués par l'entreprise et les machines destinées au calcul intensif acquises de façon intégrée, à compter du 12 avril 2016 et jusqu'au 14 avril 2017. Par dérogation au premier alinéa, la déduction s'applique aux biens mentionnés au présent 9° quelles que soient leurs modalités d'amortissement. » ;

5° Le dixième alinéa est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « , conclu à compter du 15 avril 2015 et jusqu'au 14 avril 2016, » sont supprimés ;

b) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ces contrats sont ceux conclus à compter du 15 avril 2015 et jusqu'au 14 avril 2017 pour les biens mentionnés aux 1° à 6° et au 8°, à compter du 1er janvier 2016 et jusqu'au 14 avril 2017 pour les biens mentionnés au 7° et à compter du 12 avril 2016 et jusqu'au 14 avril 2017 pour les biens mentionnés au 9°. » ;

c) À la deuxième phrase, le mot : « huitième » est remplacé par le mot : « onzième ».

B. Le II est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) La deuxième occurrence du mot : « les » est remplacée par le mot : « des » ;

b) L'année : « 2016 » est remplacée par les mots : « 2017, d'une part au titre des biens affectés exclusivement à des opérations exonérées, d'autre part au titre des biens affectés à la fois à des opérations exonérées et à des opérations taxables au prorata du chiffre d'affaires des opérations exonérées rapporté au chiffre d'affaires total » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « , déterminée à proportion » sont remplacés par les mots : « ainsi déterminée égale à la proportion ».

II.  -  Le B du I s'applique aux biens acquis, fabriqués ou pris en crédit-bail ou en location avec option d'achat par les coopératives à compter du 26 avril 2016.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - La définition du service universel telle qu'elle figure au code des postes et télécommunications est issue de directives européennes dont le Gouvernement demande avec insistance la révision dans le cadre de celle du Paquet Télécom. Vous avez raison, madame Assassi, elle ne correspond plus aux pratiques de nos concitoyens, et la France, je le répète, est très active dans le combat pour son actualisation. J'en discutais encore récemment avec mon homologue britannique.

Le Gouvernement propose de proroger la déduction exceptionnelle d'amortissement de 40 % en faveur de l'investissement productif qui a fait ses preuves puisque l'investissement productif, industriel, repart - les ventes des machines-outils ont bondi de 6 % l'an passé, à la différence des biens d'équipement, de l'information et de la communication, qui stagnent ou reculent - en reportant son terme au 14 avril 2017 et en l'étendant à certains équipements informatiques.

Par ailleurs, le présent amendement comporte les adaptations nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de la mesure aux réseaux de communications électroniques en fibre optique adoptée en loi de finances rectificative pour 2015.

L'entreprise qui entretient un tel réseau, comme les opérateurs la cofinançant, sont éligibles à ce dispositif. Ce qui contribuera à mailler efficacement le territoire.

La déduction exceptionnelle est même étendue aux réseaux faisant l'objet d'une aide publique. La déduction s'applique aux droits d'usage cédés avant le 15 avril 2017 au titre de réseaux eux-mêmes construits ou acquis entre le 1er janvier 2016 et le 14 avril 2017.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - La commission des finances n'a pu examiner cet amendement, déposé il y a peu, mais je suis certain qu'elle aurait été très favorable à l'extension d'un mécanisme dont elle avait elle-même proposé l'inscription en loi de finances, à l'initiative de la majorité sénatoriale et que le Gouvernement avait alors refusée.

Avez-vous une estimation du coût ? Deux questions : ces mécanismes sont vraiment incitatifs lorsqu'ils sont stabilisés dans le temps. Là, vous repoussez sa fin d'un an. Mais que se passera-t-il dans un an ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Cela dépendra de vous !

L'amendement n°634 est adopté et devient l'article 37 D.

Les amendements nos175 rectifié et 372 rectifié deviennent sans objet.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°373 rectifié, présenté par MM. Chaize, de Nicolaÿ, Mandelli, Bignon, Commeinhes, B. Fournier, Vaspart, P. Leroy et Bizet, Mme Deroche, MM. Laménie, Lefèvre, de Legge, Husson et Doligé, Mme Cayeux et MM. Mouiller, Rapin et Pointereau.

Après l'article 37 D

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lorsque des collectivités territoriales cèdent des droits permanents, irrévocables et exclusifs d'usage de longue durée de réseaux de communications électroniques, ceux-ci peuvent être comptabilisés, en totalité, l'année de leur encaissement, en section d'investissement.

Lorsque des collectivités territoriales acquièrent des droits permanents, irrévocables et exclusifs d'usage de longue durée de réseaux de communications électroniques, ceux-ci peuvent être comptabilisés en section d'investissement.

M. Patrick Chaize.  - Afin de répartir le bénéfice du dispositif de suramortissement des investissements dans les réseaux en fibre optique déployés par des opérateurs privés entre l'opérateur chargé du déploiement et les opérateurs cofinanceurs, l'article 37 D appréhende les droits d'usage acquis par les opérateurs privés acquis sur ces réseaux comme des investissements. Or les droits d'usage acquis ou cédés par les collectivités territoriales ne bénéficient pas d'un traitement comptable similaire.

Il est essentiel pour l'économie des réseaux d'initiative publique soutenus dans le cadre du plan « France très haut débit » que les droits irrévocables d'usage de réseaux de communications électroniques, acquis ou vendus par une collectivité territoriale, puissent être imputés en section d'investissement et non en section d'exploitation.

Cela permettra d'équilibrer plus facilement les budgets annuels des réseaux d'initiative publique. Cette évolution est d'autant plus souhaitable que les collectivités territoriales sont contraintes par le cahier des charges du plan « France très haut débit » à acquérir de tels droits d'usage sur certains segments du réseau, pour ne pas créer des réseaux parallèles coûteux et contraires à l'objectif de mutualisation.

M. le président.  - Amendement identique n°409 rectifié, présenté par M. Camani et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

M. Pierre Camani.  - Défendu.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis.  - Qu'en pense le Gouvernement ? Dès lors que c'est une recette, cela ne change rien...

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - Merci d'avoir attiré l'attention du Gouvernement sur ce sujet important.

Votre objectif est largement partagé. En effet, votre proposition a donné lieu à une réunion interministérielle. Cet amendement n'étant pas du domaine de la loi, son dépôt a incité Bercy à revoir sa doctrine fiscale. Retrait ?

M. Yves Rome.  - En l'absence de garanties plus fermes, non...

Les amendements identiques nos373 rectifié et 409 rectifié sont adoptés et deviennent article additionnel.

ARTICLE 37 E

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Nous souscrivons à l'objectif affiché d'une meilleure régulation, afin d'éviter la multiplication des implantations en zone rentable, alors que le réseau serait mutualisé en d'autres endroits. Cet article va donc dans le bon sens, mais sera-t-il vraiment dissuasif ? En matière d'infrastructure, il faut être plus ferme face au risque de dédoublement. Celui-ci devrait être interdit parce qu'il est coûteux, inefficace et inutile pour les usagers.

Nous y insistons : les infrastructures devraient être propriété de la puissance publique et ensuite utilisées par les différents opérateurs. Le simple pragmatisme que professe M. Sido ne remplira pas les caisses. (M. Bruno Sido l'admet) C'est bien d'un service public essentiel pour nos concitoyens qu'il s'agit.

L'amendement n°349 rectifié n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°346 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°590, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État.  - L'article 37 E du projet de loi a pour objectif de garantir la complétude des déploiements de réseaux à très haut débit, en prévenant le comportement de certains acteurs qui pourraient être tentés de limiter leurs déploiements aux centres-villes au détriment des zones moins denses.

La modification introduite par la commission des lois permet de moduler dans le temps les obligations de déploiement en fonction des coûts.

Or cela aboutira à un relâchement des calendriers de déploiement également pour les opérateurs privés en zone d'appel à manifestation d'intention d'investissement (AMII), à rebours de l'objectif d'accélération du plan « France très haut débit ».

M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.  - À deux reprises, l'Arcep a envisagé une modification du délai dans lequel la complétude est imposée, pour le porter de deux à cinq ans ; une telle durée est très contraignante, en zone rurale par exemple.

Les évolutions techniques quant à la notion de logement raccordable ne donnent pas la souplesse utile aux collectivités territoriales. D'où la rédaction de la commission, qui permet de leur donner un peu de temps et de ne pas les obliger à réaliser la complétude là où elle n'est pas souhaitée.

L'amendement n°590 n'est pas adopté.

L'article 37 E est adopté.

L'amendement n°176 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Nous avons examiné 158 amendements aujourd'hui. Il en reste 125.

Prochaine séance lundi 2 mai 2016, à 10 heures.

La séance est levée à 19 h 25.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus