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Table des matières



Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

OUTRE-MER

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Michel Magras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

Mme Jocelyne Guidez, en remplacement de Mme Nassimah Dindar, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois

M. Jean-Louis Lagourgue

Mme Esther Benbassa

Mme Catherine Conconne

M. Guillaume Arnell

M. Gérard Poadja

M. Michel Magras

M. Abdallah Hassani

Mme Victoire Jasmin

M. Stéphane Artano

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer

Examen des crédits et de l'article rattaché

Article 39

Article 77 quinquies

M. Maurice Antiste

Délégation sénatoriale (Nomination)

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

Rappel au Règlement

M. Pierre Laurent

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Jean-Louis Lagourgue

M. Richard Yung

M. Pierre Laurent

M. Jacques Le Nay

Mme Joëlle Garriaud-Maylam

M. André Vallini

M. Jean-Noël Guérini

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Examen des crédits, de l'article rattaché et du compte spécial

Article 39

M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial de la commission des finances

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Bernard Cazeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. André Vallini, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

M. Claude Kern, rapporteur pour avis de la commission de la culture

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Mme Christine Prunaud

M. Jean-Noël Guérini

M. Alain Fouché

Mme Joëlle Garriaud-Maylam

M. Claude Haut

Mme Hélène Conway-Mouret

M. Olivier Cadic

M. Rachid Temal

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères

Examen des crédits, de l'article rattaché et des amendements portant articles additionnels

Article 39

Articles additionnels après l'article 71 ter

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la commission des finances

M. Daniel Dubois, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication

M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Mme Nelly Tocqueville, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

M. Antoine Karam

M. Pierre Ouzoulias

Mme Françoise Laborde

M. Alain Fouché

Mme Sylvie Robert

M. Laurent Lafon

Mme Catherine Procaccia

M. Max Brisson

Mme Brigitte Lherbier

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Examen des crédits de la mission

Article 39

Article 78

Article additionnel

Annexes

Ordre du jour du mardi 4 décembre 2018

Analyse des scrutins publics

Nomination au sein d'une délégation sénatoriale




SÉANCE

du lundi 3 décembre 2018

34e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Joël Guerriau, M. Dominique de Legge.

La séance est ouverte à 10 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Rappel au Règlement

Mme Éliane Assassi .  - Des événements d'une extrême gravité se sont déroulés dans notre pays et nous ne pouvons pas continuer nos travaux sans nous faire écho de la colère qui s'exprime. Nous condamnons les violences sans précédent qui ont éclaté. Les images de ces ultras s'attaquant aux symboles de l'histoire de notre pays sont choquantes. Mais elles ne sauraient faire oublier le message très clair au président de la République : les Français demandent une augmentation du pouvoir d'achat.

Mon groupe n'a cessé de faire des propositions et de réclamer le rétablissement de l'ISF, qui rapporterait exactement de quoi ne pas augmenter les taxes sur les carburants. Les taxes sur les GAFA et autres permettraient de répondre à un besoin d'augmentation du pouvoir d'achat ou la revalorisation de 200 euros du SMIC qui est revendiquée.

Ici, au Sénat, ne soyons pas complices des choix du président de la République. (M. Philippe Dallier proteste.) Le peuple français en colère réclame la justice sociale. Nous sommes la représentation nationale, dont nos concitoyens se défient. En ce moment de crise sociale et institutionnelle, envoyons un signal à ceux qui souffrent. Refusons de continuer à débattre d'un budget qui accroît les souffrances humaines.

Je vous demande, monsieur le président, de réunir une Conférence des présidents face à la gravité de la situation. Nous devons exiger des engagements du Premier ministre.

Le Sénat devrait porter la voix du peuple pour être à la hauteur de sa sagesse. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR)

M. le président.  - Acte est donné de votre rappel au Règlement.

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Seconde partie (Suite)

OUTRE-MER

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission Outre-mer - 2,49 milliards en autorisation d'engagement et 2,57 milliards en crédits de paiement - correspondent à la diversité des 11 territoires auxquels ils sont destinés et présentent une diversité d'objectifs.

Satisfaire une telle diversité d'attentes dans un budget ne va pas de soi.

La stabilité budgétaire se confirme, malgré la forte hausse des crédits de 20,5 % en crédits de paiement et 22,5 % en autorisations d'engagement. Cette hausse correspond en fait à trois mesures de périmètre : la suppression de la TVA non perçue récupérable (TVA NPR), la réforme de l'impôt sur le revenu et l'exonération de charges spécifiques à l'outre-mer, en même temps que la réforme du CICE.

En l'absence de ces mesures de périmètre, les crédits sont quasiment stables.

Les crédits de la mission ne représentent que 15 % des crédits transversaux, répartis dans 31 missions en 88 actions, pour 18,7 milliards d'euros. Il faut ajouter les dépenses fiscales pour un total d'intervention de l'État de 23 milliards d'euros en augmentation de 4 % par rapport à 2018.

Des motifs d'inquiétude subsistent. La principale mesure de périmètre a pour objectif de stimuler la dynamique du territoire et renforcer le fonds d'investissement. Il est urgent d'initier des projets essentiels de transformation. Une évaluation objective des dépenses budgétaires est toujours nécessaire compte tenu de l'impact qu'elles auront sur le chômage.

Les financements au titre de la politique contractuelle de l'État représentent 23 millions d'euros en autorisations d'engagement et 15 millions en crédits de paiement. Ils devront impérativement monter en charge. Il conviendra d'être particulièrement vigilant sur le respect des engagements de l'État, car dans le passé on a constaté l'insuffisance des crédits inscrits.

On peut noter un maintien des moyens budgétaires en matière de formation.

On peut se satisfaire des crédits de la mission représentant 0,54 % du budget de l'État en 2019 contre 0,48 % en 2018.

Certaines collectivités connaissent des taux de chômage entre 25 et 30 % avec une part de la population éligible au logement social atteignant 60 %.

Avec ce budget, les crédits résultant de la mise en oeuvre de la loi sur l'égalité réelle commenceront à être mis en oeuvre.

Malgré les efforts qui restent à fournir pour que les outre-mer rattrapent leur retard sur la métropole, je vous propose de voter les crédits de la mission. (Applaudissements)

M. Georges Patient, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Hors mesure de périmètre, les crédits de la mission stagnent à 0 % en autorisations d'engagement et 0,1 % en crédits de paiement. L'effort total à destination des outre-mer représente 23 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 22 milliards en crédits de paiement. La mission Outre-mer semble à première vue respecter la programmation pluriannuelle. Le maintien de cette trajectoire est regrettable car contradictoire avec les besoins de redressement des outre-mer.

Les mesures de périmètre, très décriées, obligent à la prudence. La suppression de la TVA NPR et l'abaissement de l'impôt sur le revenu n'offrent aucune garantie quant à leur réaffectation, ni à leur pérennité. Je souhaite qu'on développe le contrôle budgétaire à cet égard.

L'exonération des charges sociales outre-mer a des effets contrastés selon les territoires. Le projet initial du Gouvernement a été corrigé pour éviter que le dispositif ne devienne une trappe à bas salaires. La Guyane en sort lésée, alors que le PIB par habitant est de moitié de celui de la métropole. Les espoirs des entreprises guyanaises se portent sur la promesse ministérielle d'un examen au cas par cas.

Comment sera ventilé le 1,7 milliard d'euros ne figurant pas dans les documents transversaux ? Quid des contrats de convergence ? Il faut faire vite, sachant que les territoires - on l'a vu en Guyane, à Mayotte, à La Réunion - sont en ébullition « tournante ».

Je voterai les crédits de la mission. Une extrême vigilance s'imposera.

M. Michel Magras, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - Ce budget reconduit l'enveloppe de deux milliards d'euros qui se maintient à ce niveau depuis 2011, avec une difficulté récurrente d'activation de ces crédits. La situation est particulièrement alarmante en matière de logement : au fil des ans, les crédits sont stables ou affichés en hausse mais la construction ralentit, pour un certain nombre de raisons au rang desquels la complexité du parcours administratif figure en bonne place. Notre premier message est de fluidifier les procédures pour favoriser le climat de confiance avec les opérateurs et leur permettre de consacrer plus de temps à leur coeur de métier.

Le Gouvernement propose, pour 2019, de greffer sur cette reconduction, deux recyclages qui ont suscité beaucoup de réactions

Au sortir des « Assises des outre-mer », et après la publication du Livre bleu, l'État nous propose une démarche budgétaire de recentralisation consistant à prélever 170 millions d'euros de fonds immédiatement disponibles entre les mains des ménages et des entreprises puis à les redistribuer sous forme de subventions accessibles aux ultramarins après instruction par l'administration d'un dossier de demande.

Comptablement les chiffres sont à peu près équivalents, mais économiquement, les subventions sont lentes à se mettre en place et les crédits sont volatiles d'année en année tandis que les suppressions de compensations fiscales sont beaucoup plus pérennes.

Le Gouvernement doit nous donner des garanties : l'activation rapide de ces crédits et la continuité de l'effort budgétaire pour les prochaines années.

L'autre recyclage est celui du CICE en exonérations de charges, avec des problèmes d'évaluation et d'impact. D'une part, on se demande s'il ne manque pas 180 millions d'euros, peut-être parce que les calculs du Gouvernement se sont basés non pas sur le « CICE exigible » mais sur le « CICE constaté », ce qui revient à pénaliser le fait que certaines entreprises ultramarines n'ont pas exercé leur droit au crédit d'impôt.

D'autre part, la concentration au voisinage du SMIC va certainement booster l'embauche dans un premier temps. Mais pour l'avenir, on risque d'enfermer nos outre-mer dans la « smicardisation » et les productions de moyenne gamme alors qu'il faut aussi aider les entreprises à retenir les talents ultramarins pour mener l'offensive sur les activités à haute valeur ajoutée.

Le Sénat a cependant adopté des mesures de rééquilibrage en matière de réduction du coût du travail et des réaménagements fiscaux.

Sous réserve de leur prise en compte, ne nous opposons pas à l'adoption des crédits de la mission Outre-mer pour 2019.

Mme Jocelyne Guidez, en remplacement de Mme Nassimah Dindar, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - La plupart des outre-mer constituent de véritables poudrières. La Réunion s'est embrasée contre la cherté de la vie, après la Guyane et Mayotte. Comment pouvait-il en être autrement quand les logements sont insalubres et la mortalité infantile si élevée ? Il ne suffit pas de se déplacer sur le terrain, mais de prendre des mesures concrètes, madame la ministre.

Que penser du renvoi des mesures annoncées sur le logement, alors qu'elles figuraient dans le Livre bleu ?

La commission alerte sur les trappes à bas salaire. Elle n'est pas opposée aux mesures de périmètre, à condition qu'elles fassent l'objet d'une évaluation préalable.

Notre rapporteure s'est opposée à la mesure sur l'impôt sur le revenu. Mal évaluée, elle ne fera qu'accentuer la cherté de la vie.

Nous voterons les crédits de la mission sans enthousiasme et en attendant un sursaut.

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur pour avis de la commission des lois .  - La hausse de 20 % des crédits de la mission est due à des mesures de périmètre : à périmètre constant, les crédits de la mission sont stables. La baisse du plafond de l'abattement fiscal a posé problème. Il n'y a rien de choquant à ce que les 4 % des foyers fiscaux les plus riches voient leur abattement fiscal reculer au profit des plus pauvres.

La commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits tout en marquant sa vigilance.

J'ai souhaité aborder au cours de mon avis la situation des établissements pénitentiaires dans les outre-mer.

En dépit d'améliorations récentes et en cours, cette situation reste déplorable et présente des spécificités qui sont insuffisamment prises en compte. Plusieurs thèmes se dégagent : la suroccupation des établissements, l'absence d'activités proposées, l'isolement des détenus, et le difficile accès aux soins. Cela a pour conséquence une grande violence, tant entre détenus qu'à l'égard des personnels pénitentiaires.

Au vu de ces difficultés, il me semble indispensable de mettre en oeuvre une politique ambitieuse, avec trois objectifs principaux.

Le premier est de mieux prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins, en transformant la mission des services pénitentiaires de l'outre-mer en direction interrégionale, à l'instar des services en charge du territoire métropolitain, avec des moyens humains et financiers renforcés.

Le deuxième objectif est de réduire la surpopulation carcérale, en prévoyant la construction de nouvelles places de prison, le renforcement des alternatives à l'incarcération et le développement des conventions internationales bilatérales.

Le troisième objectif est de favoriser la réinsertion des détenus, ce qui implique un renforcement des moyens des services pénitentiaires d'insertion et de probation dans les territoires ultramarins.

Enfin, il faut nouer un dialogue avec nos compatriotes des territoires ultramarins et faire oeuvre de pédagogie pour favoriser une meilleure acceptation de la prison et lutter contre la fameuse loi d'airain dénoncée par notre ancien collègue Robert Badinter : en raison de leurs conditions de vie souvent difficiles, nombre d'entre eux éprouvent le sentiment délétère, exacerbé lorsque la population carcérale comprend un grand nombre d'étrangers, selon lequel les personnes détenues auraient un sort plus enviable que le leur. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)

M. Jean-Louis Lagourgue .  - Le contexte économique et social des territoires ultramarins est très dégradé et nous devons entendre la colère des outre-mer face à l'incertitude de l'avenir et aux réactions de l'État qui ne fait que transférer les obligations vers les territoires ultramarins.

Ces territoires souffrent d'un chômage chronique. À La Réunion, madame la ministre, vous avez constaté les difficultés.

Je vous félicite pour votre courage et votre écoute, mais il faut à présent aller plus vite et plus loin.

Nos territoires d'outre-mer vivent dans la plus grande inquiétude et nos collectivités territoriales ne peuvent plus agir face à la contraction de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et à la suppression des contrats aidés.

Le programme 138 est crucial. Il prend en charge les exonérations de cotisations sociales et sera fortement impacté par le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2019 qui prévoit la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) outre-mer sauf pour Mayotte.

Pourquoi remplacer un dispositif qui fonctionne comme la TVA NPR ? Je m'interroge sur la pérennisation de la multitude de petits dispositifs, de l'émiettement des aides qui le remplace.

A-t-on mesuré l'impact sur la classe moyenne ? Ralentir leur consommation mènera à de nouvelles crises. L'État doit s'impliquer pour réduire l'écart avec la Métropole.

Nos outre-mer doivent surmonter l'éloignement géographique, l'insularité et les défis naturels.

Il n'y a aucunement lieu de remettre en cause la solidarité. Le budget n'est pas à la hauteur. Le groupe Les Indépendants s'abstiendra. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

Mme Esther Benbassa .  - Pauvreté et précarité record, criminalité en hausse, manque d'infrastructures scolaires et hospitalières. S'agit-il des banlieues ? Non, mais d'autres territoires oubliés de la République, les outre-mer, énième espace abandonné. Un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur l'effectivité des droits de l'homme dans les outre-mer fait état de l'extrême pauvreté à laquelle doit faire face un pourcentage élevé des populations ultramarines et d'un système éducatif limité dont les répercussions négatives portent sur les interactions socioprofessionnelles et le développement de ces territoires. Les infrastructures scolaires délabrées et mal réparties empêchent de fournir une éducation de qualité.

Quant au volet sanitaire, il se caractérise par le fait que le taux de mortalité maternel et infantile est largement supérieur à celui de la Métropole, alors qu'il pourrait être réduit par plus de moyens dans les établissements hospitaliers et davantage de mesures thérapeutiques.

À Mayotte et en Guyane, les spécificités climatologiques font prévaloir les maladies infectieuses et parasitaires, couplées à un déficit d'accès à l'eau potable.

L'outre-mer a trop longtemps souffert du désinvestissement de l'État.

Nous notons les hausses d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement. Mais nous vous enjoignons à examiner ce budget de plus près.

La ministre fait ce choix de doter massivement les entreprises au détriment des services publics et des collectivités territoriales.

Vous appliquez votre doxa selon laquelle la bonne santé économique passe par les entreprises et non les services publics.

Vous promettez plus d'un milliard d'euros pour la redynamisation des outre-mer mais n'accordez que 15 millions à un fonds vert.

Nous avions pourtant les moyens de devenir les champions des énergies propres.

Le 4 novembre, en Nouvelle-Calédonie, des ultramarins ont rappelé leur attachement à la France. Ne les considérons pas comme des citoyens de seconde zone.

Le groupe CRCE votera contre le budget de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Victoire Jasmin et M. Victorin Lurel applaudissent également.)

Mme Catherine Conconne .  - Madame la ministre, sentez-vous exonérée de mon plaidoyer. Je sais que vous avez été au front avec détermination et que vous avez fait tout votre possible pour obtenir le meilleur.

L'an dernier, j'avais qualifié votre budget de doliprane.

Le Livre bleu est de la même couleur que la pilule qui redonne de la motivation. (Rires) Mais le couple s'installe dans la routine...

Dans des territoires où le revenu est inférieur de 10 000 euros à celui de la métropole, où il manque des infrastructures de base élémentaire, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où l'industrie touristique est en berne et peine à faire face à la concurrence mondiale, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où plus de la moitié de la jeunesse est durablement installée dans le chômage, où en Guadeloupe et en Martinique, entre 3 000 et 5 000 jeunes quittent chaque année le pays pour ne plus y revenir, il faut sortir de la routine.

Dans des territoires où la confiance durable est érodée, 10 000 euros par-ci par-là ne suffisent pas et il faut sortir de la routine !

Dans des territoires où les classes moyennes ont déjà dépensé leur reste à vivre, on tente encore de le leur supprimer, dans des territoires où le logement insalubre fait florès et où la mortalité infantile est trois fois supérieure à la métropole, il faut sortir de la routine !

J'aurai fait le job sans espoir, car j'entends déjà un énième « nous gardons le cap », cette formule qui traîne des milliers de Français dans la rue.

Dans nos territoires habitués à la résignation, la saine résignation, dans nos pays habitués à la résilience, la saine résilience, nous savons résister à la fatalité de la misère, celle qui nous attache les mains avec des bouts de ficelles, des copeaux de bois, les morceaux les plus bas, comme écrivait le poète. Nos pays ont besoin d'un big bang !

Le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission.

On nous promet des hausses de budget, mais ce sont les budgets de la défense, de l'administration territoriale qui augmentent. What else ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

M. Guillaume Arnell .  - De prime abord, le budget apparaît en légère hausse avec +20 ,5 % en crédits de paiement et +22,5 % en autorisations d'engagement. Mais lorsqu'on retire les mesures de périmètre, on s'aperçoit que le budget est stable.

Une augmentation des crédits aurait montré que le Gouvernement avait pris la mesure des besoins. Nous devons nous battre avec acharnement pour simplement conserver l'existant.

Le Gouvernement s'attache à des mesures injustes sans études d'impact. C'est le cas contre le rhum. Il y a empressement à taxer d'un côté mais l'on tarde à mettre en place des mesures nécessaires de l'autre.

Madame la ministre, entendez mon message : donnez les moyens à Saint-Martin de se relever et aux territoires d'outre-mer de faire face aux défis.

Notre objectif est de défendre nos territoires, à vos côtés et non contre vous.

Les outre-mer ne doivent plus être considérés comme une charge mais comme une chance. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE, SOCR et RDSE)

M. Gérard Poadja .  - Je salue le travail des rapporteurs, en particulier Mme Dindar et M. Laurey. Il est difficile de se positionner sur une mission aussi vaste. Elle ne représente qu'un dixième des efforts, de 24 milliards d'euros au total dans 88 programmes.

La lisibilité du budget devrait être améliorée. Sur le fond, les défis sont nombreux.

Le taux de pauvreté et de chômage, la cherté de la vie à La Réunion qui ont donné une tournure violente aux manifestations, mettent en lumière les difficultés de l'outre-mer.

À première vue, la mission connaît une hausse exceptionnelle : +20,5 % en crédits de paiement et +22,5 % en autorisations d'engagement. Mais cette hausse n'est qu'apparente.

Il y a eu la transformation du CICE en exonération de charge, la suppression de la TVA NPR et les mesures sur l'impôt sur le revenu.

En réalité, les crédits sont stables et inférieurs aux besoins exprimés.

L'État doit apporter un soutien plus actif aux territoires éloignés, par exemple en matière de logement. Les coûts de construction sont plus élevés que dans l'Hexagone.

Il faudra prendre en compte l'impact de la baisse de l'impôt sur les sociétés en Nouvelle-Calédonie.

Je salue toutefois le volontarisme du budget. Le groupe UC votera ces crédits.

Les Néo-Calédoniens ont choisi souverainement leur destin. Je salue les moyens de l'État qui ont permis un déroulement pacifique. Il faut maintenant construire un avenir commun.

M. Michel Magras .  - La trajectoire de politique économique pour les outre-mer a suscité des inquiétudes d'une rare intensité. Une vision de long terme est nécessaire.

L'allègement des charges patronales ne se comprend pas sur le long terme car il enferme les marchés ultramarins dans la basse et la moyenne gamme.

Je salue l'effort sur la formation, mais il est vain tant que les salaires trop bas poussent les jeunes à quitter les territoires d'outre-mer.

Les outre-mer sont pionniers avec un service militaire adapté qui démontre son efficacité année après année.

Les travaux du Sénat ont permis de relever les seuils d'exonération ; sans répondre pleinement à la demande des socioprofessionnels, c'est une amélioration par rapport au texte initial.

Saint-Barthélemy n'était pas concerné par la transformation du CICE en baisse de charges. Je vous remercie madame la ministre de l'avoir quand même intégré au dispositif.

Nous comprenons, madame la ministre, les contraintes budgétaires qui obligent à des choix douloureux. Cependant, je regrette la hausse de fiscalité qui restreindra le comportement des acteurs économiques. Je regrette que les effets collatéraux des mesures budgétaires ne soient pas pris en compte. Ainsi, les augmentations fiscales, résultat de la réduction de l'abattement sur l'impôt sur le revenu, auront un effet déstabilisateur, tout comme la suppression de la TVA NPR, qui constitue un élément de la trésorerie des entreprises ; une augmentation des prix pour combler le manque à gagner favorisera l'inflation.

À la dépense fiscale faisant appel au libre arbitre des agents économiques, vous préférez la recentralisation des crédits et l'étatisation de la dépense, avec un risque récessif à la clé.

Il nous faudrait des garanties sur la célérité du traitement administratif des demandes de financement. L'annuité budgétaire se traduit trop souvent par des crédits non consommés.

Les outre-mer ont besoin d'un cadre fiscal et économique stable. Chaque Gouvernement se fait fort de présenter sa réforme avant que celle de ses prédécesseurs n'ait porté ses fruits. Ce stop and go conduit les investisseurs à se réfugier dans l'attentisme.

Fiscalement, il n'est pas certain que les réductions de charges ne soient pas atténuées par des augmentations d'impôt.

S'agissant des zones franches d'activité nouvelle génération, il faudra veiller aux effets d'éviction et au risque de trous dans la raquette.

Je ne m'opposerai pas à l'adoption des crédits de cette mission. Cependant, derrière les chiffres, il y a des choix politiques forts de votre Gouvernement, surprenants pour ne pas dire inquiétants.

C'est dans les territoires que se prennent les décisions les plus efficaces. Pourquoi ne pas leur redonner les moyens et la liberté d'agir ?

M. Abdallah Hassani .  - La mission Outre-mer s'inscrit dans un contexte de maîtrise de la dépense publique. Pour autant chaque territoire doit pouvoir être soutenu de manière pragmatique et durable. Le Livre bleu des outre-mer constitue la feuille de route. Après un budget 2018 de transition, ce budget 2019 est de transformation et de responsabilisation. Il s'agit de dépenser mieux pour plus d'efficacité avec des objectifs prioritaires comme le développement des infrastructures, la construction et la rénovation de logements et la formation des jeunes.

La mission ne couvre qu'un dixième de l'effort financier de l'État à destination des outre-mer. Celui-ci s'élève à 23,02 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 22,17 milliards d'euros en crédits de paiement, soit des hausses respectives de 7,6 % et 4,6 %. La mission, de 2,57 milliards d'euros en AE et de 2,49 milliards en CP, représente 0,54 % du budget général de l'État contre 0,48 % en 2018 et 0,40 % en 2017. Les crédits spécifiquement affectés à l'outre-mer sont préservés.

La hausse de 22,5 % des autorisations d'engagement et de 20,5 % des crédits de paiement s'explique par des mesures de transfert et de périmètre, conséquence de la transformation du CICE en exonération de charges, de la suppression de la TVA NPR, de la diminution du plafond de la réduction d'impôt pour les plus hauts revenus dans les DOM.

Ces changements ont donné lieu à d'intenses débats. Certains craignent que des entreprises ne soient perdantes, que des territoires ne perdent en attractivité, que le pouvoir d'achat ne baisse.

Vous promettez un redéploiement. Ce serait un changement de paradigme. Les outre-mer s'autofinanceraient entre eux, les moins faibles aidant les plus pauvres. Pourtant, l'État consacre 17 milliards d'euros de crédits aux outre-mer alors que la fiscalité ultramarine ne rapporte que 4 milliards d'euros. Cet effort est fondé, vu la faiblesse du PIB par habitant de nos territoires.

Nous attendons que la réduction des dépenses fiscales et sociales se traduise bien en dépenses budgétaires.

J'espère que le fonds d'investissement du programme 123 ne perdra pas de sa substance, d'autant qu'il est consacré à la construction d'établissements scolaires en Guyane et à Mayotte.

Le nouveau dispositif des zones franches contribuera à la revitalisation des économies ultramarines.

Madame la ministre, vous avez modifié les paramètres d'exonération de charges pour les entreprises afin d'éviter les trappes à bas salaires et élargi les secteurs éligibles, tenant compte des particularités.

Nos territoires restent fragiles. Un développement endogène est vertueux. Veillons à ce que des outils mal ajustés ou mal compris ne nous entraînent pas vers un mal-développement endogène. La crise de Mayotte, territoire dont le PIB est 3,6 fois plus faible que le PIB national, a montré le manque criant d'infrastructures. Celle de La Réunion a témoigné du mal-être des populations. Madame la ministre, vous avez annoncé la création d'une zone franche globale à 7 % à La Réunion. S'agit-il d'un dispositif particulier ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Abdallah Hassani.  - Les besoins en logement sont considérables. Il faudrait en construire 50 000 en Guadeloupe d'ici 2030, 4 000 par an pendant vingt ans en Guyane. À Mayotte, seuls 570 logements locatifs sociaux ont été financés entre 2015 et 2017. Pourquoi la LBU stagne-t-elle ?

Les déplacements ultramarins du président de la République témoignent de l'intérêt de la Nation pour les outre-mer. Nous en attendons une traduction concrète.

Le groupe LaREM votera les crédits de cette mission. (M. Julien Bargeton applaudit.)

Mme Victoire Jasmin .  - Notre combat jusqu'ici a été de tenter un rattrapage des outre-mer vers la Métropole. Souhait utopique, constatait le député de Guadeloupe Frédéric Jalton en 1990.

Il est crucial que nos collectivités sortent de l'incompréhension qui mène au mal-développement. Après de long mois d'Assises, la déception est grande. Mes collègues ont relevé avec pertinence les aspects purement budgétaires. Je reviendrai pour ma part sur les principes de la politique économique de votre Gouvernement.

L'augmentation des crédits résulte de plusieurs ponctions fiscales. Pour la première fois, les outre-mer financeront les outre-mer. On a le sentiment amer d'un Gouvernement qui reste sourd à la vision des socio-professionnels des territoires ultramarins. Le recentrage sur les bas salaires pénalisera plus encore une jeunesse en mal de débouchés.

Le recyclage relevé par M. Magras, la rebudgétisation dénoncée par M. Lurel, marquent une rupture brutale de la solidarité nationale à l'égard des outre-mer. Faut-il maintenir un ministère spécifique des outre-mer, gage de sanctuarisation budgétaire mais aussi plafond de verre qui nous enferme ? Vous avez justifié vos choix par l'obligation de vous en tenir à l'enveloppe allouée qui stagne à 2,5 milliards d'euros depuis plusieurs années, alors que les besoins s'accroissent.

Je sais votre investissement, madame la ministre, mais ne peux approuver les orientations de ce budget ni écarter d'autres voies institutionnelles.

« La politisation des masses se propose non d'infantiliser les masses mais de les rendre adultes », disait Frantz Fanon. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Stéphane Artano .  - En 2018, j'avais apporté sans réserve mon soutien à votre budget de transition et d'amorçage, en vous donnant rendez-vous pour un budget de transformation en 2019. Sans colonne vertébrale, ce budget devient un sac d'os. La politique demande lucidité et humilité. Vous avez su revisiter les méthodes, engager une réflexion forte sur les aides économiques et arraché un arbitrage à Matignon sur certaines dispositions. Je le mets à votre crédit.

Mais si le bateau gouvernemental ne suit pas la boussole parlementaire, il risque de s'échouer sur les récifs. La lucidité, c'est aussi de s'appuyer sur les parlementaires. Madame la ministre, soyez en rupture avec la méthode du Gouvernement. Sinon, comme lui, vous irez dans le mur, entraînant les outre-mer avec vous !

L'action publique est une oeuvre collective ; à l'Assemblée nationale comme au Sénat, nos délégations souhaitent oeuvrer à vos côtés pour porter la politique des outre-mer de manière participative.

Mais cela suppose la confiance, et des preuves de confiance. Dans mon territoire, le préfet demande à la collectivité de financer un investissement portuaire dans un port d'intérêt national. Dans le document de politique transversale, les crédits baissent de 15 millions d'euros pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Je suis inquiet pour mon territoire. J'espère que vous pourrez nous rassurer et nous éclairer. En attendant vos réponses, nous sommes réservés sur les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer .  - Je reviens tout juste de La Réunion. Je suis allée au contact de la population car l'écoute et le dialogue sont la seule méthode qui a du sens pour moi.

En Guyane, à La Réunion, à Mayotte, mais aussi à Paris, notre modèle du vivre ensemble est mis à mal.

Gouverner ce n'est pas imposer d'en haut des choix déconnectés, mais agir en responsabilité, guidée par l'intérêt général, pour que chaque citoyen trouve sa place dans la société.

L'État a pris des engagements forts. Je rendrai compte de leur mise en oeuvre dans tous les territoires. J'aurais aimé que chacun joue le jeu républicain. Responsabilité et transparence sont à la base de mon action.

Ce projet de budget traduit des convictions et des choix politiques, ceux de la transformation, du refus du conservatisme, de la démocratie participative. Lors des Assises de l'outre-mer, l'expression directe des citoyens nous a dit combien l'État était attendu pour faire mieux et aller plus loin. L'État est le garant des institutions. Il se doit de protéger les plus démunis et de libérer les énergies. Sans travail, sans fierté, un territoire n'est qu'un navire à la dérive, avec un équipage perdu.

Il faut développer le pouvoir d'achat, la qualité de vie, les crèches, le logement, les services publics. Nous devons aller vers une société moins inégalitaire, plus solidaire.

J'ai aussi pris l'engagement d'une transparence totale de l'action des pouvoirs publics. Les élus doivent être exemplaires.

Je ne promets pas une égalité réelle ni une convergence du niveau de vie vers la moyenne nationale. Chaque territoire d'outre-mer doit trouver son propre modèle de développement et l'État ne peut pas tout.

Pour enclencher ce dynamisme, le budget agit sur l'investissement public et l'appui aux entreprises.

Les crédits du fonds d'investissement public sont augmentés avec 500 millions d'euros sur cinq ans, affectés aux infrastructures essentielles. La loi relative à l'égalité réelle outre-mer a prévu la signature de nouveaux contrats qui scelleront les engagements de l'État avec les collectivités jusqu'en 2022. Mon ministère y consacrera 179 millions d'euros en 2019, une hausse de 15 %.

L'investissement public, c'est aussi la construction et la rénovation des logements. La LBU est maintenue à 225 millions d'euros, le produit de cession des parts de l'État au sein des Sidom, 19 millions d'euros, est réservé à mon ministère.

J'ai réaffirmé ces jours derniers nos engagements sur l'aide à l'accession à la propriété et à la rénovation de l'habitat privé. Ce projet de loi de finances comporte plusieurs mesures favorables à la construction : défiscalisation, hausse des quotas de PLS, allongement des délais de location, telles sont certaines des mesures que nous mettons en oeuvre.

Accroître l'investissement public est fondamental pour répondre aux besoins du quotidien.

Mon combat est aussi celui de l'emploi grâce au soutien aux entreprises et à la création de richesse, puis de son partage. Depuis décembre 2017, le Gouvernement a proposé l'évolution des aides pour l'emploi et l'activité économique en outre-mer via une politique de développement économique volontaire, pilotée et cohérente dans le temps long. Certains outils disparaissent car ils ne sont pas assez lisibles ou ne concernent que quelques-uns. Nos concitoyens demandent plus de transparence.

Quant à l'écosystème d'accompagnement des entreprises, nous créons un système pérenne et ciblé, pour faire des outre-mer des territoires de conquête économique.

La transformation du CICE en exonération de charges sociales a entraîné un bouleversement des exonérations spécifiques à l'outre-mer. Nous simplifions les barèmes et parions sur les secteurs d'avenir : économie bleue, tourisme, industrie. Les zones les plus intenses en emploi seront exonérées de charges.

En outre-mer, 53 % des salariés gagnent moins de 1,4 SMIC et 80 % des demandeurs d'emploi sont peu ou pas diplômés. Nous n'avons pas affaire à une trappe à bas salaire mais à une trappe à chômage. Les jeunes sans emploi qui manifestent demandent un avenir meilleur.

Je serai au rendez-vous. Le Gouvernement réalise un effort supplémentaire de 130 milliards d'euros pour baisser le coût du travail outre-mer. Les conséquences budgétaires sont tirées dans les amendements, c'est 65 millions d'euros au total de plus que dans le projet initial de budget. Nous collons ainsi à la réalité des besoins des territoires.

Quelque 300 millions d'euros entrent dans le périmètre, c'est purement technique. Je le dis en toute transparence.

De nouveaux outils nécessaires au démarrage des projets sont proposés dans l'action 4 du programme 138 pour un ensemble cohérent et efficace. Construire des écoles, des crèches, des infrastructures pour l'eau, c'est accroître l'activité et l'emploi sur les territoires. Quant au taux d'impôt sur les sociétés à 6 % dans les zones franches, c'est mieux que l'Irlande ! Nous démontrons que nous sommes capables de relever les défis, ensemble.

Ce projet de budget propose de transformer nos territoires pour les rendre plus attractifs, agréables à vivre et en faire des terres d'excellence et de rayonnement. Être une chance pour la France, cela ne se décrète pas, cela se construit. Ce ne sera possible que si l'ensemble des acteurs coopèrent. L'État ne peut pas tout à lui seul. Il lui faut l'aide de la classe politique des outre-mer et des acteurs de terrain.

Les Ultramarins sont exigeants, à raison. Je le suis moi-même. Soyons à la hauteur de leurs attentes, à la hauteur de la Marseillaise chantée mercredi par 2 000 manifestants à La Réunion. Nous devons être à la hauteur de nos valeurs. Fierté, unité, dignité et fraternité sont l'essence de la France et des outre-mer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président

Examen des crédits et de l'article rattaché

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-642, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

65 000 000

65 000 000

Conditions de vie outre-mer

TOTAL

65 000 000

65 000 000

SOLDE

+ 65 000 000

+ 65 000 000

Mme Annick Girardin, ministre.  - Dans un esprit volontariste, pour gagner la bataille de l'emploi et lutter contre les trappes à inactivité, nous faisons un effort supplémentaire de 100 millions d'euros, dont 35 millions seront financés par des redéploiements. Le travail pour tous, c'est la dignité d'un territoire.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - Nous avons eu à examiner cet amendement ce matin en commission des finances avec un montant différent, de 50 millions. Il vient tout juste d'être rectifié à 65 millions d'euros. Preuve que la réforme n'est pas aboutie : il aurait fallu suivre le Sénat, qui demandait un report d'un an !

Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les dernières concertations menées avec les organisations socioprofessionnelles ? Vous avez peu concerté avec les parlementaires.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Je suis rentrée hier soir de La Réunion et n'ai pu rectifier cet amendement que tardivement.

C'est avec les professionnels que j'ai décidé de maintenir cette réforme, car la fin du CICE leur faisait perdre 500 millions d'euros ; nous en excluons les entreprises qui ne bénéficiaient pas du CICE. C'est 24 millions d'euros de plus pour les entreprises de Guadeloupe, autant de plus pour celles de Martinique, 27 millions d'euros de plus pour celles de la Guyane et 41 millions de plus pour celles de La Réunion.

Je me suis battue pour continuer le dialogue jusqu'à la dernière minute. Ma priorité a été de travailler avec les entreprises, qui sont en première ligne pour développer l'emploi.

Si le compte n'y est pas en termes d'emplois, j'opérerai les changements nécessaires.

M. Georges Patient, rapporteur spécial.  - La commission des finances émet un avis favorable.

M. Victorin Lurel.  - Nous reconnaissons votre ténacité, madame la ministre. À la suite des travaux du Sénat, vous avez pris l'engagement de revoir votre copie. Le groupe socialiste votera cet amendement qui va dans le bon sens même s'il ne compense pas le caractère récessif du budget. Je le dis sans ambages : c'est le plus mauvais budget des outre-mer depuis une vingtaine d'années. Il n'y a pas un centime d'argent frais. On prend des mesures qui fragilisent la consommation sans penser aux conséquences macro-économiques. Or la consommation est le moteur de l'activité ! Les mesures proposées ne sont pas de nature à relancer l'emploi.

À l'époque, quand j'étais ministre, on m'avait demandé une économie de 130 millions d'euros sur l'outre-mer. J'ai refusé, et procédé à un coup de rabot de 24 millions d'euros sur les hauts salaires, à 4,5 smic. Le plafond est beaucoup plus bas aujourd'hui.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Le groupe LaREM votera cet amendement qui va dans le bon sens et montre la volonté de la ministre de défendre nos territoires jusqu'à la dernière minute. Les difficultés ne datent pas d'aujourd'hui. Pour la première fois, ce budget porte davantage d'attention aux territoires les plus en difficulté - ce n'était pas le cas sous le précédent quinquennat.

Mme Catherine Conconne.  - Cet amendement mérite d'être voté. Il témoigne de la volonté de la ministre de remplir un panier bien vide.

M. Guillaume Arnell.  - La ministre s'était engagée à la concertation, elle a tenu parole. Je redis notre volonté de travailler ensemble, en mettant de côté nos différences.

Vous avez accepté une proposition intermédiaire sur la fin de la Lodeom à Saint-Martin. Le groupe RDSE votera cet amendement, même s'il faut éviter les à-coups et l'absence de vision.

Mme Jocelyne Guidez.  - On ne saurait être contre des financements supplémentaires. Le groupe UC votera cet amendement.

L'amendement n°II-642 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-441, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

50 000 000

50 000 000

Conditions de vie outre-mer

50 000 000

50 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement d'appel porte sur les plans de convergence. Après une longue concertation, nous avons fait la loi Égalité réelle outre-mer sous François Hollande. Sans forfanterie, je m'en sens un peu le père.

Il y a eu une accélération du mouvement pour Mayotte avec une succession rapide d'ordonnances, n'en déplaise à M. Mohamed-Soilihi. Idem pour la Guyane.

Les collectivités territoriales n'avaient que trois semaines pour préparer les plans de convergence. Cela ne tenait pas la route. Une réflexion plurisectorielle était nécessaire pour préparer la contractualisation. D'où cet amendement qui augmente les crédits de 50 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-439, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

20 000 000

9 000 000

Conditions de vie outre-mer

20 000 000

9 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

9 000 000

9 000 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Depuis deux ans, la politique de l'État outre-mer en matière de logement est durement mise à mal : la LBU aura perdu 9 % en autorisations d'engagement et 4 % en crédits de paiement.

Les crédits liés à l'accession à la propriété sont le plus lourdement touchés avec une baisse pour 2019 de 36 %. Au total, en deux ans, ces crédits auront diminué de près de 78 % ! J'espère que l'amendement porté par Serge Letchimy à l'Assemblée nationale et voté par le Sénat survivra à la deuxième lecture. Il faut faire mieux et augmenter le programme 123 de 20 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-537, présenté par Mme Jasmin.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Conditions de vie outre-mer

1 500 000

1 500 000

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

Mme Victoire Jasmin.  - Nous abondons les actions 2 et 8 du programme 123 afin d'y adjoindre un volet sur la prévention des risques naturels majeurs en outre-mer, à la suite des ouragans Irma et Maria aux Antilles. Ce plan de prévention et d'investissement permettrait des actions de sensibilisation, d'information et de mobilisation à destination des populations, des entreprises, des collectivités locales et des forces de secours ; d'acquérir des moyens de surveillance des phénomènes météorologiques et d'institutionnaliser, dans tous les territoires, une semaine des risques naturels, sur le modèle de Replik ou Sismik.

M. le président.  - Amendement n°II-440, présenté par M. Lurel et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

1 500 000

1 500 000

Conditions de vie outre-mer

1 500 000

1 500 000

TOTAL

1 500 000

1 500 000

1 500 000

1 500 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement augmente les crédits de la continuité territoriale, pour compenser un peu les ponctions fiscales sur les ménages. La mobilité est un sujet récurrent.

M. le président.  - Amendement n°II-552, présenté par M. Lurel.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

300 000

300 000

Conditions de vie outre-mer

300 000

300 000

TOTAL

300 000

300 000

300 000

300 000

SOLDE

0

0

M. Victorin Lurel.  - Cet amendement porte sur les Observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR). La ministre m'a attaqué, disant que je n'avais rien fait - je l'entends avec détachement. (Sourires) S'il le voulait, le Gouvernement pourrait mettre des moyens pour s'assurer que les marges sont respectées et que les rentes de situation sont contrôlées.

J'en viens à l'objet de l'amendement : les OPMR doivent avoir des moyens. Cet amendement les augmente de 300 000 euros, ce n'est rien, par rapport au budget. Des concepts et des instruments d'une politique de la concurrence existent aujourd'hui, il faut les faire respecter.

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-441, compte tenu de la baisse des crédits de l'action 4, importante pour les collectivités. Avis défavorable à l'amendement n°II-439 pour les mêmes raisons. Avis favorable à l'amendement n°II-537 dont les préconisations tiennent compte des recommandations de la délégation sénatoriale à l'outre-mer sur la prévention des risques majeurs en outre-mer. Avis favorable à l'amendement n°II-440, compte tenu de la baisse significative du nombre de bénéficiaires du dispositif de continuité territoriale et avis défavorable à l'amendement n°II-552.

Mme Annick Girardin, ministre.  - L'amendement n°II-441 était d'appel. On dégage plus de 23 millions d'euros pour les contrats de convergence et de transformation, puisque l'une ne va pas sans l'autre. L'État y mettra 2,4 milliards d'euros sur quatre ans. Oui, il faut prendre le temps. L'État ne peut faire seul. Il se tient aux côtés des collectivités territoriales. Nous connaissons la divergence que nous avons sur l'adjectif « réel » dans une « égalité réelle ». Qu'est-ce à dire au juste, quand, par exemple, le taux de chômage à Saint-Barthélemy n'est que de 3 % ? La convergence signifie-t-elle que les outre-mer doivent se féliciter de se rapprocher des taux de la Métropole quand ceux-ci n'ont fait que baisser ? Je préfère le mot « équité » et j'y veillerai. Avis défavorable.

Le logement est un sujet urgent. Oui, il y a des bidonvilles à Mayotte. Ils existent aussi à La Réunion, en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane. Nous avons préservé la ligne budgétaire unique (LBU), fait en sorte que les 19 millions d'euros attendus soient bien versés au budget de l'outre-mer. Nous sommes au rendez-vous, sans doute pas aussi vite que souhaité, mais à la hauteur de ce que nous pouvons faire dans les territoires, tout simplement parce qu'à un moment donné, on ne peut construire plus vite avec les forces vives qui y sont. Avis défavorable.

Je demande le retrait de l'amendement n°II-537. Le fonds Barnier a été élargi, entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Un délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer sera nommé pour animer et coordonner toutes les politiques publiques dans ce domaine. Je veille à ce que les propositions des délégations parlementaires soient suivies. Le fonds vert est au rendez-vous et je le ferai évoluer par rapport aux demandes qui remontent du terrain.

Quant à l'amendement n°II-440, il concerne la mobilité territoriale. Il faut effectivement la prendre mieux en compte et nous nous y sommes engagés. Retrait ou avis défavorable.

Enfin, sagesse à l'amendement n°II-552. Nous disposons d'un arsenal législatif sur le prix. Qu'en a-t-on fait ? Nous nous donnerons les moyens. Les observatoires doivent être renforcés par les citoyens qui veulent de la transparence. Ainsi 50 citoyens y participeront à La Réunion. J'y ai moi-même siégé en tant que fonctionnaire puis députée et je sais que nous ne sommes pas à la hauteur. C'est pourquoi j'ai annoncé un doublement des crédits.

M. Thani Mohamed Soilihi - L'amendement n°II-537 ne fait que traduire une préconisation de la délégation sénatoriale aux outre-mer. Il n'est pas budgétivore et en cas de catastrophe naturelle les populations ont besoin d'être rassurées. Cet amendement répond à un besoin essentiel. J'exhorte ses auteurs à le maintenir.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Monsieur le sénateur, je suis d'accord avec vous. Les outre-mer sont les premières victimes du réchauffement climatique. Mais pourquoi cela concernerait-il uniquement le budget outre-mer ? C'est un problème que nous devons porter tous ensemble. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement

Mme Victoire Jasmin.  - Je souhaiterais maintenir mon amendement, car il s'agit de prendre des décisions pertinentes et cohérentes de façon urgente. Les recommandations du rapporteur de la délégation sénatoriale à l'outre-mer sont essentielles. Vos services ont dit les difficultés qu'ils avaient à mettre en oeuvre des mesures de prévention.

À voir les dysfonctionnements qui opèrent, dont nous avons eu connaissance lors de nos auditions, il est urgent d'agir. Oui, il faut faire vite pour que le personnel de la sécurité civile ait sur place les moyens de fonctionner, pour faire évacuer au plus vite les populations présentes dans les zones à risque (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Michel Magras, rapporteur pour avis.  - C'est l'essence même du travail de la délégation sénatoriale aux outre-mer, où tous les groupes sont représentés que de faire ce type de recommandation, afin qu'elles soient votées dans l'hémicycle. Nous avons peut-être perdu l'habitude d'attendre en outre-mer. Votons cet amendement quitte à abonder ce budget plus tard dans d'autres textes si le Gouvernement le souhaite.

M. Stéphane Artano.  - Je soutiendrai cet amendement, ainsi que celui de M. Lurel, n°II-552, sur l'observatoire des prix, à une précision près : les plans de convergence, prévisionnels, sont bien de convergence et non pas de transformation, terme auquel tient particulièrement le président Macron pour se démarquer de son prédécesseur. Mais à Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivité relevant de l'article 74 de la Constitution, qui compte 6 300 habitants, il ne serait pas très efficace de signer un tel type de plan. Mieux vaudrait un contrat unique, intégrant les dispositions en question. Voilà une mesure technocratique qui n'a pas de sens.

M. Victorin Lurel.  - Madame la ministre, vous étiez déjà ministre avec moi, lorsque nous avons inventé le concept d'« égalité réelle ». Il s'agit d'un concept statistique, fonctionnant sur un intervalle de confiance. Ne le remettez pas en cause.

Les 16 millions en crédits de paiement et 23 millions en autorisations d'engagement que le Gouvernement dégage ne sont pas plus qu'un dispositif d'annonce.

La Société nationale immobilière (SNI) a acheté les Sem immobilières d'outre-mer (Sidom). Vous aviez déclaré que le fléchage des bénéfices figurerait dans la loi de finances. Il n'y figure pas. La LBU diminue à 225 millions d'euros. C'est organisé une déflation dans les outre-mer. Enfin, concernant la collectivité de Saint-Martin, avec la CDC et la SNI, on impose un chantage à une directrice qui a fait des efforts pour diminuer son salaire. J'espère que vous vous y opposerez.

M. Antoine Karam.  - Madame la ministre, nous avons tous salué votre courage. La Guyane avait anticipé la colère qui s'exprime en France. Je voterai l'amendement n°II-537, fruit d'un travail collégial mené dans le cadre de la délégation. Nous avons trop longtemps été des cautions exotiques de la République. Cela devient de plus en plus insupportable d'attendre. Il faut agir vite. Ce qui se passe dans l'Hexagone résulte aussi de cette culture du « on va faire ».

Mme Viviane Malet.  - Je soutiendrai aussi l'amendement n°II-537, fruit des travaux de la délégation sénatoriale.

Mme Catherine Conconne.  - Je soutiendrai tous ces amendements de bon sens. Le ministère est dans son rôle quand il défend son budget. Il a su être à l'écoute du Sénat sur les exonérations. Cependant, un tien vaut mieux que deux tu l'auras. Les risques majeurs nous menacent tous les jours. Un grand plan promis par le Gouvernement, c'est bien beau. Mais que ferons-nous quand un autre aléa nous tombera sur la tête dans les mois qui viennent ? Les élus que nous sommes ont su faire preuve de bon sens. En proposant des amendements à périmètre constant, faisant pencher la balance vers les priorités. Suivez-nous !

Mme Esther Benbassa.  - Nous voterons l'amendement n°II-537 ainsi que les autres en discussion commune.

M. Guillaume Arnell.  - Le groupe RDSE remercie Mme Jasmin d'avoir porté cet amendement. Si on acte cette mesure maintenant, vous pourrez toujours la traduire dans d'autres lois ultérieurement.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Monsieur Artano, vous avez raison. Que signifierait la convergence pour Saint-Pierre-et-Miquelon ? L'essentiel reste que chaque territoire trouve sa place dans son bassin maritime. Il ne s'agit pas de supprimer 15 millions d'euros mais d'en ajouter 2 millions pour Saint-Pierre-et-Miquelon.

Quant au dérèglement climatique - et vous savez combien je me suis engagée dans la COP21, chacun s'accorde sur le fait que le milieu insulaire en est la première victime. Avec l'amendement n°II-537, vous ouvrez une porte en laissant entendre que les territoires d'outre-mer prendront en charge eux-mêmes les effets du dérèglement climatique. Faites attention !

L'amendement n°II-441 est adopté.

L'amendement n°II-439 n'a plus d'objet.

L'amendement n°II-537 est adopté.

L'amendement n°II-440 est adopté.

L'amendement n°II-552 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-536, présenté par Mme Jasmin.

I - Créer un programme :

Fonds pour l'accès à l'eau

II - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

20 000 000

20 000 000

Fonds pour l'accès à l'eau

20 000 000

20 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Victoire Jasmin.  - Le manque d'eau, au quotidien, fait partie de la vie ordinaire de nombreux ultramarins qui sont obligés de rechercher en permanence des solutions palliatives.

Cette situation indigne pour une Nation comme la nôtre, requiert de la part de la solidarité nationale un engagement massif et urgent pour doter l'ensemble des territoires, d'infrastructures adaptées en matière d'assainissement et de distribution d'eau potable.

Pour faire face à l'urgence, le Gouvernement a décidé de relancer le plan « Eau-DOM », de 2016 qui vise, en partenariat avec les ministères en charge de l'environnement, des outre-mer et de la santé, de l'Agence française pour le développement (AFD), de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et avec l'Agence française pour la biodiversité (AFB), à accompagner par contractualisation, sur une durée de cinq ans, les collectivités locales compétentes dans l'amélioration du service rendu à leurs usagers en matière d'eau potable et d'assainissement.

Cet amendement permettrait de mobiliser des crédits pour permettre l'égal accès à l'eau.

M. le président.  - Amendement n°II-509, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

10 000 000

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

Mme Esther Benbassa.  - Cet amendement crée un fonds d'urgence de 10 millions d'euros supplémentaires, venant renforcer l'action 4 « Sanitaire, social, culture, jeunesse ».

Les outre-mer souffrent d'un sous-investissement et le décalage avec l'Hexagone se creuse.

Ce fonds serait créé par un redéploiement de crédits initialement accordés à « l'appui à l'accès aux financements bancaires » (action 09), qui ne servent qu'à payer des intérêts bancaires.

Le chômage est élevé et l'emploi, précaire dans ces territoires. Il faut contrebalancer un budget tourné vers l'investissement. Le problème de la pauvreté ne peut pas se résoudre uniquement en donnant une activité professionnelle à tous. D'autres paramètres existent. Un soutien à l'action n°04 serait salutaire. Nulle part sur le territoire, la République ne devrait abandonner ses administrés, victimes des inégalités sociales. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°II-437, présenté par Mme Conconne et les membres du groupe socialiste et républicain.

I.  -  Créer un nouveau programme :

Fonds pour la mobilité retour

II.  - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

Conditions de vie outre-mer

10 000 000

10 000 000

Fonds pour la mobilité retour

10 000 000

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

Mme Catherine Conconne.  - Je ne crois pas à la tutelle bienfaitrice de l'État mais à une main qui se tend et n'écrase pas et au cheminement pacifique entre les populations pour que chacun se prenne en charge.

« Gardez-vous de vous tenir les bras croisés en l'attitude terrible du spectateur » disait le poète.

La Martinique a perdu 30 000 habitants en une dizaine d'années, soit entre 3 000 et 5 000 personnes, en moins dans nos rangs chaque année, surtout des jeunes ; or ce sont eux qui assurent le repeuplement par leur fertilité. On ferme des écoles à tour de bras, puisque la démographie scolaire suit l'évolution générale. Pas moins de 14 ont fermé leurs portes à Fort-de-France, ville que je connais le mieux.

Madame la ministre, les populations partent, aidées par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (ADOM), mais ne reviennent pas. Il faut une aide de 10 millions d'euros.

Avec un groupe de jeunes Martiniquais qui sont partis, mais qui sont aussi revenus au pays, nous avons mis en place un mouvement que nous avons appelé Alé, Viré, locution créole qui veut dire « partir mais revenir ». Il va proposer prochainement ses travaux que nous avons financés par nos propres moyens, dont une étude portant sur 8 000 ressortissants de l'outre-mer qui vivent aujourd'hui en France et ailleurs dans le monde entier.

Nous avons besoin de vous, madame la ministre, le travail a été fait en amont. Nous vous demandons, symboliquement, de flécher 10 millions d'euros pour amorcer la pompe et pouvoir mettre en oeuvre nos propositions.

M. le président.  - Amendement n°II-510, présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lalande, Duran et Todeschini, Mmes Conway-Mouret et Tocqueville, M. Daudigny et Mme Monier.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Emploi outre-mer

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Conditions de vie outre-mer

Fonds de soutien au sanitaire, social, culture, jeunesse

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

M. Maurice Antiste.  - Les délais de paiement dans les anciens départements et régions d'outre-mer ont atteint des niveaux insupportables pour les entreprises et ont nettement progressé ces dernières années.

Le délai légal de paiement pour les collectivités territoriales est de 30 jours. Dans les faits, il est en moyenne de 28 jours dans la France entière. Il atteint toutefois 74 jours en Guadeloupe, 115 jours en Martinique, 86 jours en Guyane, 45 jours à La Réunion, 57 jours à Mayotte.

Dans des territoires où les marchés sont étroits et au sein desquels la commande publique dans l'économie est prépondérante, il est délicat pour les entreprises de demander aux services de l'État des mandatements d'office. Il est urgent que l'État dresse un bilan clair de l'état des retards de paiement dans ces territoires et établisse un ordre de priorité des dépenses à payer.

À plus long terme, les dispositions prévues pour éviter les retards de paiement n'ayant pas permis d'éviter les dérives actuelles, il conviendrait d'engager une réflexion plus générale sur une éventuelle refonte les concernant.

M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à tous les amendements, compte tenu des réductions de crédit qui en résulteraient.

Mme Annick Girardin, ministre.  - Même avis.

Nous allons renégocier le plan aux DOM. Il faut la fin des tours d'eau.

L'idée d'un fonds d'urgence n'est pas mauvaise, mais il faut être cohérent.

Madame Conconne, quand je discute avec les jeunes, par exemple récemment à La Réunion, où la démographie est, il est vrai, bien différente, mais c'est vrai dans tout l'outre-mer, ils me disent : « On manque d'air ». C'est donc sur l'attractivité qu'il faut travailler.

Il n'est pas mauvais d'aider les jeunes ultramarins à acquérir de l'expérience ailleurs. C'est pourquoi, le billet d'avion est valable cinq ans. Peut-être faudra-t-il aller plus loin.

Quant au dernier amendement sur les délais d'impayés, je dis « chiche ». Ce ne sera pas simple.

Le sujet sera abordé dans le cadre de la conférence nationale des territoires.

L'amendement n°II-563 est adopté.

L'amendement n°II-509 est adopté.

L'amendement n°II-437 n'a plus d'objet.

L'amendement n°II-510 est adopté.

M. Claude Raynal.  - Je demande une suspension de séance de trois minutes.

La séance est suspendue pour quelques instants.

Les crédits de la mission sont mis aux voix par scrutin public, à la demande du groupe Les Républicains.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°33 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 236
Pour l'adoption 216
Contre    20

Les crédits de la mission « Outre-mer » sont adoptés.

Article 77 quinquies

M. Maurice Antiste .  - Le président Macron reste sourd au désarroi des ultramarins.

Quelque 82 % de leurs habitants conseillent aux jeunes de quitter leur pays. Depuis le début de mon mandat, je répète que les territoires ultramarins sont malades : c'est le cas de 90 collectivités territoriales sur 136, soit les deux tiers.

Le chômage des jeunes y est deux fois plus important que dans l'Hexagone. Les hôpitaux sont au bord de l'implosion.

Le Gouvernement fait pourtant le choix de l'austérité. L'augmentation en trompe l'oeil de cette mission n'abuse pas les populations.

J'ai des forts doutes sur la réalité des estimations fiscales de vos mesures.

Selon le président de la République, la clé de la stratégie c'est une responsabilité partagée. Il avait omis de préciser que l'outre-mer devait s'autofinancer, afin que l'État se désengage. Ce budget de l'outre-mer est un très mauvais signal, ne règlera rien. L'exécutif ignore le cri du peuple : il faut s'attendre au pire. J'aurai prévenu.

L'article 77 quinquies est adopté.

Délégation sénatoriale (Nomination)

M. le président.  - J'informe le Sénat qu'une candidature pour siéger au sein de la délégation sénatoriale aux outre-mer a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

La séance est suspendue à 12 h 55.

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

Rappel au Règlement

M. Pierre Laurent .  - Lors de son rappel au Règlement ce matin, la présidente Assassi a invité le Sénat à prendre en compte la situation de crise politique que traverse notre pays. Il est en effet hors de propos de poursuivre l'examen du projet de loi de finances alors que des consultations sont engagées qui peuvent conduire à de nouveaux arbitrages budgétaires. Nous nous dirigeons vers un débat de politique générale mercredi à l'Assemblée nationale et jeudi au Sénat. La sagesse serait d'interrompre l'examen du projet de loi de finances. Je réitère notre demande.

M. le président.  - Acte est donné de ce rappel au Règlement.

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Veuillez excuser mon co-rapporteur Jean-Claude Requier, qui rencontre en ce moment le Premier ministre avec une délégation d'élus radicaux.

L'exercice 2019 constitue une année charnière : elle déterminera si notre pays respectera l'objectif fixé par le président de la République d'une aide publique au développement (APD) représentant 0,55 % du revenu national brut (RNB) en 2022. En effet, étant donné le décalage entre l'engagement des crédits et leur décaissement, le niveau de l'APD en 2022 dépend du niveau des engagements de 2019. Les moyens engagés nous placent-ils sur la bonne trajectoire, en attendant la loi de programmation en 2019 ?

Les circuits de financement connaissent deux changements. L'Agence française de développement (AFD) ne percevra plus de ressources à condition spéciale. En outre, la taxe sur les transactions financières (TTF) est rebudgétée - ce qui a été critiqué par certaines ONG. Cela n'empêche pas les moyens de l'AFD d'augmenter sensiblement. C'est l'essentiel !

Les autorisations d'engagement augmentent de 1,4 milliard d'euros par rapport à 2018, les crédits de paiement de 127 millions d'euros, décalage qui s'explique par le temps de mise en oeuvre des projets. Si les moyens sont là, une grande partie de l'effort financier est reportée aux années à venir.

Avec une aide qui représente 0,43 % du PIB en 2017, nous ne respectons pas nos engagements internationaux : l'Allemagne et la Grande-Bretagne nous distancent grâce au niveau trois fois supérieur de leurs dons bilatéraux.

Le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) a défini une trajectoire en pourcentage de RNB mais sans traduction budgétaire. Notre APD devra augmenter de 5 milliards d'euros en 2022, sachant que les prêts ont un effet levier. Quels crédits budgétaires faudra-t-il inscrire pour y parvenir ? La future loi de programmation sera l'occasion de rendre des arbitrages.

Globalement, nous sommes sur la bonne voie. Ce budget est en hausse, conformément aux engagements du président de la République, qui a par ailleurs créé un Conseil de développement.

J'en viens à la partie dévolue à M. Requier. En 2019, l'AFD disposera d'un milliard d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement et 68 millions d'euros en crédits de paiement - le gros de l'effort financier est devant nous. Avec 500 millions supplémentaires de bonification, cela permettra d'accorder 1,5 milliard d'euros d'engagements supplémentaires.

Reste la question de l'insuffisance de ses fonds propres, d'autant que l'AFD est soumise au respect des ratios prudentiels qui l'empêchent de prêter à certains États. À court terme, l'État apportera une garantie, dans une limite de 750 millions. À compter de 2020, il faudra augmenter les fonds propres de l'Agence, dont les engagements s'élèveront à 17,6 milliards d'euros en 2022, soit doublement de son activité en six ans. Ce n'est pas anodin, et pose la question de la capacité des pays en développement à absorber un volume de prêts en telle hausse.

L'aide bilatérale bénéficiera des deux tiers de l'augmentation des crédits de l'APD d'ici 2022. Veillons toutefois à ne pas négliger l'aide multilatérale dans un monde où elle est fortement contestée.

L'article 72 autorise à souscrire à l'augmentation de capital de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement et de la Société financière internationale, deux institutions du groupe Banque mondiale. La première intervient auprès des pays à revenu intermédiaire ; la seconde, dans les pays en développement, auprès du secteur privé. Le coût sera de 464 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 93 millions d'euros en crédits de paiement par an entre 2019 et 2023. Cela permettra de maintenir la place de notre pays au sein de l'actionnariat de cette institution.

La commission des finances vous propose d'adopter les crédits de la mission, du compte de concours financier ainsi que l'article 72 rattaché. (MM. Richard Yung et Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudissent.)

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Il faut se féliciter de l'ambition de porter notre APD à 0,55 % du RNB car c'est un instrument pour lutter contre les désordres du monde. Le milliard d'euros supplémentaires permettra d'orienter notre aide vers les pays les plus pauvres. Notre commission a donné un avis favorable à ces crédits.

L'aide publique au développement ne doit pas seulement consister à distribuer des moyens mais aussi à contrôler l'efficacité de l'aide apportée. Le succès d'une politique publique se mesure à son pilotage et à son évaluation. Je souscris donc aux conclusions du rapport de la Cour des comptes. Le Cicid n'avait été réuni que onze fois en vingt ans ; le Conseil du développement auprès du président de la République et le Conseil d'orientation stratégique de l'AFD fixent les grandes orientations.

Lutte contre la pauvreté, transition énergétique, stabilisation des zones de conflits, réduction des migrations : notre aide poursuit des objectifs nombreux et parfois contradictoires qui méritent d'être davantage pilotés. L'AFD a acquis une large autonomie ; il faut que le Gouvernement et le Parlement soient davantage impliqués.

Le déficit de transparence et de redevabilité, la trop faible part des crédits dépensés et évalués est inacceptable. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour mettre en place une évaluation plus efficace. (MM. Richard Yung, Bruno Sido et Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudissent.)

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Comme Jean-Pierre Vial, je me félicite de l'augmentation des crédits de l'APD et surtout du choix de privilégier les dons et le bilatéral, qui permet de diriger nos financements vers les pays les plus pauvres.

L'AFD verra ses engagements augmenter de 11 milliards en 2018 à près de 18 milliards en 2022. C'est considérable, dans un contexte d'accès plus difficile aux prêts - notamment pour les pays africains qui ont contracté des emprunts massifs auprès de banques chinoises. Augmenter ses engagements sans diminuer ses exigences en matière financière, environnementale et sociale, un défi de taille pour l'AFD !

La France contribue largement à la lutte contre le changement climatique, avec 775 millions d'euros pour le Fonds vert pour le climat. Mais ce dernier a du mal à décaisser. Sa gouvernance et ses procédures devront être revues.

Nos contributions aux divers fonds en faveur du développement durable sont complexes, voire illisibles. Vu le nombre de vecteurs, difficile de savoir lesquels de nos financements contribuent à la cible de 0,55 %, et dans quelle proportion. Allez-vous faire évoluer la présentation budgétaire ?

Nous regrettons que la part de taxe sur les transactions financières (TTF) affectée à l'aide au développement diminue. Notre groupe s'est abstenu lors du vote en commission. Nous attendons la prochaine loi de programmation, en espérant qu'elle donnera un nouvel élan à notre APD. Nous pourrons ainsi rejoindre les leaders européens en la matière.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - (M. Bruno Sido applaudit.) Les autorisations d'engagement pour l'APD vont croître de 1,4 milliard d'euros : nous nous en réjouissons. L'affectation des deux tiers de cette augmentation à l'aide bilatérale nous satisfait. Ne nous méprenons pas : les financements multilatéraux ont permis des avancées importantes et constituent des leviers : ainsi, le Partenariat mondial pour l'éducation cofinance notre priorité éducative au Sahel. Mais est-ce le cas de nos cinquante contributions multilatérales, dont 850 millions d'euros que nous versons chaque année au Fonds européen de développement (FED, 361 millions d'euros au Fonds mondial Sida, 775 millions pour le Fonds vert pour le climat ? Notre aide gagnerait à être mieux structurée, expliquée et évaluée.

L'augmentation des financements bilatéraux est cohérente avec la volonté de reprendre en main le pilotage politique de notre APD. Il faut aussi en améliorer l'évaluation, lacunaire, dispersée et procédurale. Chaque euro doit être utilisé à bon escient ! Suivons l'exemple de la commission indépendante pour l'impact de l'aide mise en place en 2011 par le gouvernement britannique. Il nous faut une évaluation sans concession et indépendante.

La décision de rapprocher Expertise France de l'AFD au sein d'un même groupe a été quelque peu précipitée. (Mme Marie-Françoise Perol-Dumont approuve. Comment envisagerez-vous de garantir son autonomie ?

Notre commission s'est prononcée pour l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, LaREM et RDSE)

M. Jean-Louis Lagourgue .  - L'APD est une composante essentielle de la politique d'influence de la France et un instrument de justice et de solidarité. Or depuis quarante ans, nous avons échoué à atteindre les objectifs fixés par l'ONU. Nous saluons donc l'engagement du président de la République et l'évolution satisfaisante des crédits en 2019. Elle devra se traduire en actes. L'APD est trop souvent une variable d'ajustement budgétaire. Nous devons changer d'approche. C'est en effet un investissement d'avenir au profit des pays les plus pauvres, pour que leur jeunesse réussisse chez elle au lieu de s'abîmer dans une course folle vers l'Europe.

L'État, les collectivités territoriales, les ONG, les fondations et entreprises privées doivent travailler en partenariat.

Le rapprochement entre aide au développement et développement durable va dans le bon sens. Il s'est matérialisé à Addis-Abeba en 2015. Les risques climatiques pèsent en effet sur le développement économique.

Attention, enfin, à l'émiettement des crédits entre deux programmes, pilotés par deux ministères qui font perdre en lisibilité et en efficacité.

Sous réserve de ces points de vigilance, le groupe Les Indépendants votera ces crédits qui poursuivent une remontée en puissance bienvenue de notre aide au développement.

M. Richard Yung .  - Nous examinons le programme 110, consacré à l'aide économique, et le programme 209, consacré à la solidarité. Le premier fait 960 millions d'euros, le deuxième 1,8 milliard. Pourquoi deux programmes, qui couvrent des activités similaires ? D'autant qu'ils ne représentent que la partie émergée de l'iceberg à 36 % de notre APD. Où sont les 67 % restants ? On compte pas moins de 24 programmes budgétaires dépendant de quatorze ministères. Ce genre de découpage est une particularité bien française qui rend notre aide publique au développement incompréhensible. Fonds bilatéraux, fonds multilatéraux à 300 ou 700 millions d'euros : tout est dispersé. Certains demandent un ministère à part entière. (Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont approuve.) Ne s'agirait-il pas de recréer le ministère de la coopération ? Je ne suis pas pour, car je doute qu'il ait le pouvoir politique de contrôler les crédits.

Faut-il accroître le pouvoir de l'AFD ? Certains - je n'en suis pas - estiment qu'elle en a déjà trop et échappe à ses maîtres. Problème délicat, pour lequel je n'ai pas de solution.

Nos objectifs sont bien connus. D'abord, lutter contre la radicalisation, contre le djihad, par notre action militaire, économique et sociale au Sahel. « Quand je construis une école, je libère un bataillon », disait Lyautey. Nous sommes sur la même ligne. Deuxième objectif, la lutte contre l'immigration illégale. Le troisième objectif est la dimension climatique avec un verdissement important des projets financés par l'AFD.

Faut-il agir via des dons ou des prêts ? Le débat est classique ; aujourd'hui, le don a le vent en poupe. Est-ce une bonne chose ? Je ne sais.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères.  - C'est sûrement une bonne chose.

M. Richard Yung.  - Faut-il du multilatéral ou du bilatéral ? Le multilatéralisme a de grands mérites, surtout à l'échelon européen. Faut-il affecter à l'AFD la taxe sur les billets d'avion et la taxe sur les transactions financières ? Peut-être le ministre pourra-t-il nous dire où en est cette dernière au plan européen.

Le groupe La République En Marche votera avec enthousiasme les crédits de la mission. (Applaudissements sur le banc de la commission)

M. Pierre Laurent .  - La France n'a jamais été au rendez-vous de l'engagement international d'affecter à l'APD 0,7 % du PIB. Pour la première fois, le budget inverse la trajectoire, mais en fixant un objectif moindre pour 2022. J'espère que nous le réviserons à la hausse dans la future loi de programmation. Ce serait un signe fort, alors que notre politique extérieure est dominée par la militarisation des relations internationales. Grave contresens car la réduction des inégalités et le développement sont les clés de la paix et de la sécurité.

La création du Conseil du développement et la réactivité du conseil d'orientation stratégique de l'AFD constituent un premier pas vers un nouveau pilotage politique.

L'AFD connaîtra une croissance exponentielle de ses crédits : plus 4,9 % en 2019, plus 10 % en 2020, plus 51,4 % en 2021 et 2022. Mais l'effort est reporté dans le temps.

Cette année, on inscrit 1,4 milliard d'euros supplémentaires mais un milliard de crédits ne seront décaissés que sur plusieurs années. Nous regrettons également la diminution de la part de TTF consacrée à l'AFD. Des leviers existent pourtant, nous en avions proposé en première partie.

On peut s'interroger sur le périmètre de notre aide au développement, trop autocentrée. Est-ce bien comprendre les enjeux du développement quand la survie de la planète est en cause ? On inclut le financement d'accords discutables avec la Turquie visant à restreindre les migrations, alors que le développement favorisera nécessairement des migrations à moyen terme. Une conception restrictive de l'APD est contraire aux objectifs de l'Accord de Paris.

De même, il est contestable d'inscrire au titre de l'APD des dépenses de sécurité et de défense. L'insécurité naît avant tout des inégalités de développement.

Enfin, tant mieux si le secteur privé intervient à l'étranger via des fondations, mais cela ne saurait su substituer à l'aide publique.

Bref, nos réserves sont multiples. Nous aborderons avec exigence la loi de programmation. Nous ne voterons pas ce budget, tout en souhaitant un effort autrement ambitieux et une réorientation de l'aide. (Mme Christine Prunaud applaudit.)

M. Jacques Le Nay .  - La France et l'Europe sont au coeur d'enjeux structurels majeurs : crise écologique, pression migratoire. Ces défis appellent des solutions structurelles. C'est en accompagnant le développement des pays d'origine que nous inciterons la jeunesse à y rester.

Une réponse efficace à l'urgence climatique serait de proposer aux pays qui polluent malgré eux des infrastructures pourvues de technologies propres, afin de limiter leur dépendance aux énergies fossiles.

Au-delà d'une logique comptable de rendement sur investissement, nous avons une responsabilité de solidarité. Je salue la progression significative des crédits avec 1,3 milliard d'euros supplémentaires, ce qui montre l'implication de notre pays. Essentielle à l'influence de la France, l'APD doit nous permettre d'exister face au nouveau poids lourd qu'est la Chine. Elle passera à 0,55 % du RNB en 2022.

L'AFD devra accroître son activité pour atteindre 18 milliards d'euros à cette échéance. Une progression de 80 % en cinq ans, ce n'est pas rien. La volonté d'augmenter les engagements ne doit pas aller à l'encontre de la pertinence des projets.

Enfin, l'aide multilatérale au développement reste très opaque, ce qui est regrettable. Le Gouvernement et le Parlement devraient s'engager dans un suivi de ces fonds, qui augmentent de 9,14 %.

Le groupe UC votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC, Les Républicains, LaRem et Les Indépendants, ainsi que sur le banc de la commission)

Mme Joëlle Garriaud-Maylam .  - En 2019, le budget de l'AFD connaît une hausse substantielle - mais en trompe-l'oeil. Les autorisations d'engagement augmentent en effet de 1 milliard d'euros, mais les crédits de paiement de 130 millions d'euros seulement. La TTF ne sera plus affectée à l'APD qu'à hauteur de 32 %. Rien ne dit que la compensation budgétaire, pour le moins artificielle, sera reconduite à l'avenir. Je regrette que l'on renonce ainsi à un financement innovant. Pourquoi ne pas taxer les cargos qui sont très polluants ?

La cible de 0,55 % du RNB est ambitieuse mais risque de ne pas être tenue car la trajectoire repousse l'effort vers la fin du quinquennat.

Je salue le rééquilibrage entre dons et prêts. Les prêts à la Chine n'ont pas de raison d'être, alors que celle-ci investit en Afrique sans se préoccuper des normes environnementales ou sociales.

Je plaide depuis des années pour un renforcement de notre aide à l'éducation des jeunes, notamment des filles, et me réjouis que l'on en fasse enfin une priorité, tant les bienfaits de l'éducation sont nombreux.

L'APD sous forme de dons coûte plus cher au contribuable. Nous devons donc en renforcer le contrôle avec des indicateurs chiffrés et des mesures transversales.

La France ne consacre que 32 % de son APD à des pays francophones, deux fois moins que ce que le Royaume-Uni accorde aux pays de sa zone d'influence. Les sept pays prioritaires, tous en Afrique, ne concentrent que 7,2 % des engagements à l'étranger.

Nous devons jouer toutes nos cartes dans le contexte mondialisé qui est le nôtre et je défendrai un amendement sur l'audiovisuel extérieur.

Un déploiement financier de l'AFD sur fond d'étranglement budgétaire du Quai d'Orsay est contre-productif. Pour sortir du saupoudrage et du court-termisme, il faut inscrire notre aide au développement dans un dialogue diplomatique de qualité. À cet égard, le financement de 50 millions d'euros au peu démocratique gouvernement gambien est une provocation au regard des coupes drastiques imposées à notre ministère des Affaires étrangères. N'oublions pas que l'APD est un vecteur de notre diplomatie. (MM. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, et Bruno Sido applaudissent.)

M. André Vallini .  - Le président de la République s'est engagé à consacrer 0,55 % du RNB à l'aide au développement. Or ce budget n'engage pas la France sur une trajectoire crédible vers cet objectif. L'APD a souvent servi de variable d'ajustement et le report de l'effort en fin du quinquennat nourrit les soupçons. Nous sommes loin du ratio de 0,7% du RNB, déjà atteint par l'Allemagne, le Royaume-Uni ou le Danemark.

Les financements de la lutte contre le changement climatique sont renforcés pour atteindre 1,5 milliard d'euros par an d'ici 2020, avec une priorité donnée à l'Afrique.

Les crédits alloués à l'aide à l'éducation augmentent aussi, avec 200 millions pour le Partenariat mondial pour l'éducation et 190 millions d'euros additionnels via l'AFD.

La répartition entre prêts et dons est significative ; la progression des dons favorisera les pays les plus pauvres.

Les deux tiers de la hausse des engagements de l'APD seront consacrés à l'aide bilatérale, comme l'a préconisé le Cicid, ce qui correspond à ce que souhaite le Sénat. Les deux tiers des hausses d'autorisations d'engagement d'ici 2022 iront à la composante bilatérale.

Toutefois, dans la mesure où les autorisations d'engagement seront mises en oeuvre sur plusieurs années, l'aide réelle aux pays du Sahel dépendra de leur renouvellement à un niveau élevé. Attention à ce que l'AFD, concentrée sur les prêts, ne devienne pas de facto une banque de développement.

Le plan de croissance rapide de l'engagement de l'AFD pose problème. Dès 2018, la forte dégradation des capacités d'emprunts des pays intermédiaires en développement aidés par des prêts au taux de marché rendra difficile les engagements de l'AFD. En outre, ces engagements devront respecter des normes sociales et environnementales.

Les sénateurs considèrent que l'articulation entre la politique d'aide au développement et la diplomatie gagnerait à être améliorée. Le Gouvernement doit renforcer le pilotage politique de l'AFD.

Quant à la TTF, vous aviez décidé de revenir sur la taxation des opérations journalières en 2018. Vous aggravez votre cas en abaissant à 30 % la part de la TTF allouée au développement. Mme Perol-Dumont a eu raison d'exprimer nos craintes face à ce recul historique.

Ce budget n'est pas à la hauteur des ambitions affichées par le président de la République. Le groupe socialiste s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Jean-Noël Guérini .  - Il est d'usage de fournir des moissons de chiffres dans nos débats. Je dérogerai à cette règle. Je me félicite que l'APD progresse de 4,7 % pour atteindre 1,4 milliard en autorisations d'engagement et 127 millions de crédits de paiement.

Le président de la République a dit dans son discours de Ouagadougou, en juillet 2017 : « J'ai pris l'engagement d'avoir une France au rendez-vous du défi du développement. » Il a tenu parole. Je m'en félicite, d'autant qu'au niveau mondial, l'aide publique au développement -  146 milliards de dollars  - diminue de 0,6 %.

Au changement climatique s'ajoutent guerres et conflits. Réjouissons-nous donc de notre aide publique au développement qui joint les actes aux paroles, même si les efforts doivent être poursuivis.

J'ai fermement souligné l'an dernier le risque de déclassement de notre pays et me réjouis donc du changement de cap cette année. Si nous sommes loin des objectifs électoraux du président de la République, je préfère voir le verre à moitié plein. Nous avons tous entendu les critiques à l'APD - sparadrap sur une fracture, tonneau des Danaïdes. Pourtant, elle est indispensable, même imparfaite et insuffisante. Il y va de notre devoir de solidarité.

Renforcer l'APD c'est dire que rien ne peut se faire ici si on ne se préoccupe pas de ceux qui souffrent ailleurs. N'oublions pas que 17 000 enfants meurent chaque jour dans le monde. L'aide au développement est un enjeu géopolitique fort.

Le groupe RDSE votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et LaREM)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Cette mission connaît une progression très significative. Le programme 209 gagne 80 millions hors masse salariale, et 1,4 milliard en autorisations d'engagement : c'est une hausse sans précédent dans l'histoire, monsieur Vallini, car en matière d'APD, les projets sont longs à mettre en oeuvre.

Madame Garriaud-Maylam, il est important de fixer des autorisations d'engagement ambitieuses, mais d'être prudent sur les crédits de paiement ; n'en doutez pas : les autorisations d'engagement d'aujourd'hui seront les crédits de paiement de demain. La trajectoire du Comité interministériel de coopération internationale et du développement, fixée en février dernier, sera confortée par la loi de programmation à venir.

Je déposerai deux amendements qui entrent dans le financement des annonces récentes du Premier ministre ; je vous proposerai de minorer notre contribution au FED, sans qu'aucune action ne soit remise en cause.

La hausse de nos engagements financera des priorités claires : éducation, jeunesse, santé, lutte contre les fragilités en zone de crise, changement climatique, inégalités hommes/femmes. L'Afrique, 19 pays en particulier, sera prioritaire : 1,2 milliard lui sera consacré dont plus de 422 millions d'euros pour le Sahel en 2019.

Ce budget consacre l'inversion de la proportion entre prêts et dons, et entre aide multilatérale et bilatérale au profit de cette dernière. Nous consacrerons 45 millions d'euros au fond d'urgence humanitaire, pour devenir un acteur significatif. Il n'était pas normal d'y consacrer moins de subsides que la Belgique.

La prochaine loi de programmation de l'APD sera l'occasion d'un débat sur le financement, le pilotage et l'évaluation de notre action. Nous avons d'ores et déjà décidé de placer l'AFD en première ligne, elle recevra des moyens financiers nouveaux. Nous envisageons de créer un conseil de développement sous l'autorité du président de la République. Le ministre présidera le pilotage stratégique de l'agence et un organisme indépendant évaluera ses actions.

Monsieur Yung, je suis pour une clarification du budget. Programme 209 : dons ; programme 210 : prêts. L'architecture est en effet trop complexe. Les fonds multilatéraux continueront à être abondés par la France mais leur articulation avec l'aide bilatérale sera renforcée.

Je serai très vigilant sur le maintien de l'identité d'Expertise France au sein de l'AFD.

Le fonds vert sera reconstitué en 2019. Nous apporterons notre contribution à ce moment-là. Le Secrétaire général des Nations unies a demandé à la France de jouer un rôle majeur pour le sommet de septembre prochain à New-York. Elle devra identifier, avec la Jamaïque, les enjeux de financement du futur.

Madame Perol-Dumont, des règles internationales fixées par l'OCDE régissent les critères de l'APD. Nous les remplirons pour atteindre 0,55 % de notre RNB consacrés à l'APD en 2022. (M. Richard Yung applaudit ; applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains et applaudissements sur le banc de la commission)

Examen des crédits, de l'article rattaché et du compte spécial

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-687, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

6 684 507

6 684 507

TOTAL

6 684 507

6 684 507

SOLDE

-6 684 507

-6 684 507

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Le fonds européen de développement nous demande une moindre participation que prévu - cet amendement en tient compte, en déplaçant 6,68 millions vers une autre action, sans remettre en cause aucun projet de développement. Ce mouvement est purement technique.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial.  - Au cours de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, 236 millions ont dû être trouvés pour financer des mesures nouvelles, notamment les crédits destinés à la prime à l'emploi. Quelque 20 millions ont été pris à l'APD et à la mission « Action extérieure de la France », respectivement 12,6 millions  d'euros et 6,7 millions d'euros. Le Gouvernement propose donc de minorer de 6,7 millions le programme 209 pour faire porter l'effort sur la seule aide publique au développement, en faisant valoir que le fonds européen de développement (FED) sera moins sollicité que prévu.

Par qui cette minoration supplémentaire sera-t-elle absorbée ?

La commission n'a pas pu donner son avis sur cet amendement déposé quinze minutes après le début de la séance, mais j'y donnerai personnellement un avis favorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - La sollicitation du FED sera moindre que prévue, c'est l'intégralité de la somme déplacée ici...

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, rapporteure pour avis.  - Cette révision à la baisse est un mauvais signal politique. Le FED est un outil essentiel. La France doit le défendre, être plus ambitieuse.

L'amendement n°II-687 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-419 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Vall et Brisson, Mme Deromedi, MM. Danesi, Frassa, Grosdidier et Regnard et Mme Renaud-Garabedian.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

12 000 000

4 000 000

Solidarité à l'égard des pays en développement

dont titre 2

12 000 000

4 000 000

TOTAL

12 000 000

12 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Cet amendement conforte le financement des actions d'aide publique au développement réalisées par France Médias Monde, qui diffuse des émissions de service public destinées aux populations des pays en développement les plus pauvres, notamment en Afrique et dans les zones de crises. Ces émissions contribuent à l'éducation, l'apprentissage du français, la santé et l'environnement.

Les montants que je propose ici, correspondent au maintien de la production et de la diffusion de ces programmes en Afrique, et au développement de nouvelles émissions thématiques de service public.

Ces crédits supplémentaires sont pris sur l'action n°1 « Aide économique et financière multilatérale » du programme 110 - Aide économique et financière au développement.

C'est une priorité dans un environnement compétitif. Ne perdons pas de parts de marché.

M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Cet amendement relève de la mission Médias examinée demain. Les moyens de France Médias Monde baissent, mais ils ne sont pas portés par la mission que nous examinons aujourd'hui.

Qui plus est, les crédits de France Médias Monde et de Canal France International, qui finance des projets internationaux de coopération technique ne sont pas fongibles : par votre amendement, vous abonderiez la coopération technique... Du reste, vous n'êtes pas la seule à vouloir abonder France Médias Monde : dans la mission Médias, M. Karoutchi le fait pour 5 millions et M. Leleux, pour 3 millions...

Je comprends votre objectif, mais ne demandons pas à l'APD de financer les médias, sinon demain ce sont tous les secteurs où la France intervient à l'international qui pourraient être financés. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

L'APD ne doit effectivement pas devenir un guichet auquel chacun viendrait frapper. Du reste, France Médias Monde peut proposer des projets qui relèvent du soutien par l'APD.

M. Roger Karoutchi.  - Le Sénat a voté un système pour que l'audiovisuel public récupère 80 millions d'euros mais ni l'Assemblée nationale ni le Gouvernement n'en veulent : la mesure sera donc supprimée.

Je défendrai donc demain des amendements sur l'audiovisuel public, pour abonder France Médias Monde à partir d'autres opérateurs publics

Monsieur le ministre, France Médias Monde se focalise sur des pays francophones, souvent africains, où les programmes ne peuvent pas être suffisants financièrement. Si l'État ne l'aide pas, elle devra fermer des stations. Or les responsables voient que dans d'autres pays, en Allemagne, en Grande-Bretagne, les stations équivalentes, concurrentes, obtiennent des fonds au titre de l'aide publique au développement : pourquoi n'est-ce pas possible en France ?

Monsieur Requier, vous dites que l'AFD ne doit pas devenir un guichet. Elle a financé un programme de l'université de Grenoble. Était-elle compétente pour cela ?

M. David Assouline.  - La semaine dernière, en première partie du budget, nous avons constaté que l'audiovisuel public était amputé de 80 millions d'euros - France Medias Monde est touchée, mais aussi France Télévisions, on supprime France Ô, France 4, Radio France perd des moyens malgré ses succès d'audience... Nous avons remédié à la baisse en augmentant la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) à hauteur de 86 millions d'euros. C'est la bonne solution, parce que je ne crois pas de bonne méthode, pour renflouer France Médias Monde, de prendre à France Télévisions ou à l'aide publique au développement.

Je suis donc contre l'amendement de M. Karoutchi sur la mission Médias demain car il ne faut pas donner aux uns au détriment des autres, même si France Médias Monde mérite de ne pas voir son budget réduit. Enfin, ne décrédibilisons pas notre vote, même si l'Assemblée nationale y est défavorable !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Monsieur le rapporteur, il y a urgence. Les engagements du contrat d'objectif et de moyens de France Médias Monde ne sont pas tenus, il manque 7 millions d'euros ! Elle risque de devoir prochainement cesser des émissions, alors qu'il n'a jamais été aussi important d'assurer la présence médiatique française, notamment en Afrique.

Monsieur Assouline, il est légitime que l'APD participe à France Médias Monde, tout simplement parce que cette chaîne joue un rôle en matière de développement à travers ses émissions sur la santé ou sur l'apprentissage des langues, par exemple.

M. Jean-Marc Todeschini.  - France Médias Monde fait un bon travail mais l'APD ne doit pas être ponctionnée à son profit. Le groupe socialiste votera contre votre amendement.

M. Jean-Yves Leconte.  - Nous pourrions trouver un compromis. France Médias Monde produit des émissions en collaboration et en sous-traitance. L'APD pourrait financer certaines co-productions.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Je souhaiterais que le ministre regarde cette question de manière approfondie. Je retire mon amendement.

L'amendement n°II-419 rectifié bis est retiré.

Les crédits de la mission « Aide publique au développement », modifiés, sont adoptés.

L'article 72 est adopté.

Les crédits du compte spécial « Prêts à des États étrangers » sont adoptés.

ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances .  - En finançant notre réseau diplomatique et notre rayonnement à l'étranger, la mission Action extérieure de l'État remplit un rôle régalien essentiel. Un peu moins de 3 milliards en autorisations d'engagement et de crédits de paiement : c'est peu au regard des objectifs à satisfaire, d'autant que les crédits diminuent de 4,3 % en 2019, mais 2,2 % à périmètre constant. C'est moins que prévu par la loi de programmation des finances publiques.

Le ministère fait preuve de sérieux budgétaire alors même qu'il devrait conduire des réformes structurelles importantes l'an prochain.

Le programme 105 comprend les crédits de personnels et les contributions internationales ainsi que le financement du G7. Il est au coeur de la reconfiguration des réseaux français à l'étranger souhaité par le président de la République, en immobilier et en personnel. À partir de 2019, le ministère deviendra affectataire de l'ensemble des immeubles de l'État à l'étranger.

L'objectif de diminution de 10 % de la masse salariale d'ici 2022 sera partagé entre différents ministères. Pourriez-vous nous apporter des précisions quant à cette répartition ? Ce décloisonnement de fonctions support est bienvenu, même s'il aurait dû s'accompagner d'une réflexion sur l'utilité des différents postes à l'étranger.

Une réflexion sur les ressources humaines du ministère des affaires étrangères doit être lancée, car malgré la réduction de 10 % de postes à l'étranger depuis 10 ans, les dépenses de personnel ont crû de 23 %. Le dérapage continue cette année. Monsieur le ministre, pourquoi les dépenses en personnel cette année sont-elles 30 millions supérieures aux prévisions ?

Le décrochage économique de la France par rapport aux autres États conduit à réduire sa participation dans certaines opérations internationales - ce recul de la quote-part, de 70 millions, n'est donc guère une bonne nouvelle....

La politique immobilière du ministère doit être mieux pilotée. Le parc immobilier du ministère représente 4,3 milliards d'euros. Avec la mutualisation des fonctions supports, le ministère va récupérer pour 80 millions d'immeubles, qui vont être mis à contribution pour financer la sécurisation de nos implantations à l'étranger - via des avances du compte d'affectation spécial « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » pour 100 millions d'euros sur deux ans. Monsieur le ministre, comment comptez-vous rembourser ces avances ?

Quant au coût du G7 de Biarritz, je vous propose de l'établir au même niveau que celui du G8 à Deauville de 2008 en rognant sur quelques postes.

La commission des finances s'est prononcée en faveur de l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et de la commission)

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Je vous présente les programmes de la mission Action extérieure de l'État, qui concernent les Français à l'étranger et les affaires consulaires d'une part, la diplomatie culturelle et d'influence et l'enseignement français à l'étranger d'autre part - et qui représentent le tiers de la mission. La prévision budgétaire se maintient l'an prochain, je salue cette stabilité, même si la répartition de crédits ne correspond pas aux ambitions diplomatiques affichées par le Gouvernement.

Notre administration consulaire s'est modernisée. La délivrance des papiers d'identité est plus rapide que sur le territoire national, par exemple, et le vote électronique sera effectif dès les prochaines échéances.

La réserve parlementaire a été remplacée par le dispositif STAFE, qui bénéficiera de 2 millions d'euros en 2019, comme en 2018. Près de la moitié des projets financés ont une vocation éducative.

L'Institut français sera doté de 2 millions d'euros supplémentaires en 2019 pour financer le plan Langue française, annoncé par le président de la République - ce maintien des moyens apparaît comme un sursis, qui n'enlève rien à la nécessité d'établir une stratégie claire en matière de soft power. Des précisions doivent être apportées sur la fusion de l'Institut français et de l'Alliance française, actée l'an passé. Les autres opérateurs conservent un budget et des emplois stables.

L'AEFE est un atout précieux pour les Français expatriés et le rayonnement de la France, mais depuis l'annulation de 33 millions d'euros de subventions à l'été 2017, les tensions budgétaires demeurent. Les frais de scolarité par élève ont beaucoup augmenté et le nombre de postes d'enseignants financés par l'AEFE ne cesse de diminuer : 80 postes d'expatriés et 100 postes de résidents cette année, 166 prévus l'an prochain. La qualité de l'enseignement risque d'en souffrir. Cette politique contredit l'objectif de doubler le nombre d'élèves dans les établissements français à l'étranger d'ici 2030...

Ce budget apparaît donc insuffisant à long terme, par rapport aux ambitions et aux annonces. La commission le votera, mais elle sera très vigilante. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - J'ai quelques insatisfactions et inquiétudes. Lors de la Conférence des ambassadeurs, j'ai trouvé que vous aviez lâché bien vite la baisse du budget du ministère des affaires étrangères, dès lors que vous vous satisfaisiez d'un budget de l'APD en hausse.

C'est une bonne idée de rationaliser l'ensemble du réseau sous la tutelle de l'ambassadeur, mais tous les ministères - notamment Intérieur, Finances et Défense - joueront-ils le jeu ? Il ne semble pas, d'après ce que l'on nous dit...

Votre politique immobilière est à bout de souffle : vous avez tout vendu ! Comment assurer dès lors l'entretien de nos bâtiments ? Il faudrait entre 40 millions et 80 millions d'euros pour entretenir les ambassades.

Plus largement, quelle place voulez-vous donner à la France dans le monde ? Nos contributions internationales baissent : signe que notre économie souffre. Or, au même moment, l'Allemagne et la Grande-Bretagne renforcent leur présence à l'étranger. Les Allemands ne sont pas en l'espèce de si bons camarades : voyez les récents propos sur le siège français au Conseil de sécurité... Attention, la France perd son rang !

M. Bernard Cazeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - En 2019, les efforts en matière de sécurité extérieure se poursuivent. Des interrogations demeurent sur le financement. Nous nous félicitons de la stabilité des crédits de la mission Sécurité et défense. Le rééquilibrage entre sécurité intérieure et extérieure est satisfaisant.

Première recommandation, ne pas imposer une réduction d'effectifs, mais laisser la direction gérer sa masse salariale avec une certaine souplesse.

La deuxième recommandation concerne les actions de la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) qu'il faut financer hors programme 105.

Quant aux crédits dédiés à la sécurité des emprises françaises à l'étranger, ils passent de 75 millions d'euros à 44 millions d'euros, compensés par une affectation provisoire de 100 millions pendant deux ans du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Nous veillerons à ce que le ministère garde toute indépendance pour définir le programme de cession qui financera le compte d'affectation spéciale.

Nous voterons ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Le programme 151 voit ses crédits augmenter de 1,5 point en raison d'une réévaluation des crédits du titre 2 après la sous-évaluation de l'an dernier et ce, malgré le régime d'austérité imposé à notre réseau consulaire. Il perdra 37 ETP en 2019. Les crédits diminuent de 2,6 %, liés à la nécessité de préparer les élections européennes et à la compensation de la suppression de la réserve parlementaire.

L'aide sociale distribuée par les réseaux consulaires est en baisse de 1,9 million d'euros. On allègue la baisse du nombre d'allocataires. J'en doute.

La dotation destinée aux bourses scolaires passe à 105,3 millions d'euros, soit une baisse de 5 millions d'euros, au motif qu'on pourra puiser dans la soulte du ministère. Elle n'est pourtant pas sans fond.

Quant aux suppressions d'emplois, elles ne seront possibles qu'au prix de nouvelles rationalisations. Enfin, l'administration consulaire continuera à moderniser ses procédures, ce qui lui fera gagner en efficacité.

Je tiens à faire part de mon inquiétude face à la réduction continue des moyens. L'administration consulaire ne pourra pas indéfiniment faire plus avec moins, sinon la capacité d'influence et de rayonnement de la France en sera amoindrie.

Nous voterons cependant les crédits. (M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit.)

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Le programme 151 représente les services publics offerts aux Français de l'étranger. Le soutien au tissu associatif des Français de l'Étranger, dit Stafe, accuse une baisse de ses crédits d'un tiers de 3 millions à 2 millions d'euros. Aucune place n'y est réservée aux parlementaires alors qu'il fait suite à la suppression de la réserve parlementaire.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Très bien.

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis.  - Sur les bourses scolaires, il est crucial de sortir d'une situation préoccupante par un diagnostic partagé par les acteurs concernés : les associations des Français de l'Étranger, la représentation nationale et votre ministère.

Pour nos 300 000 concitoyens résidant au Royaume-Uni, nous nous réjouissons de la signature de l'accord entre le Royaume-Uni et l'Union européenne sur le Brexit, le 25 novembre dernier, même si la procédure de ratification n'a pas encore abouti. Quelles dispositions sont-elles prévues pour les postes consulaires pour les citoyens français sur le territoire britannique ? Un certain nombre d'associations s'inquiètent des délais dans lesquels le recensement sera opéré.

Quant à la réforme de la représentation des Français de l'étranger, elle fait encore débat. Pouvez-vous nous préciser ce qu'elle contient et quel sera son calendrier ? Interviendra-t-elle avant juin 2019 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Diplomatie culturelle et d'influence en chantier, réorganisation du réseau, plan pour la langue française et le plurilinguisme : les moyens sont-ils au rendez-vous ?

L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) voit ses crédits heureusement stabilisés. Le taux de participation des familles aux frais de scolarité est à 7 %. Nous demandons qu'il soit rabaissé à 6 %.

De plus en plus de familles françaises modestes résident à l'étranger.

La situation de l'Association nationale des écoles françaises de l'étranger (Anefe) est délicate.

Tout semble concourir à compliquer la tâche des établissements français à l'étranger alors que les effectifs doivent doubler dans les décennies à venir.

Les interrogations sont multiples tant est grande la disproportion entre les objectifs et les moyens de la diplomatie française.

Une partie des financements doit provenir des cessions immobilières du ministère. Dans certains pays, les ambassades appartiennent à une institution financière nationale. Pourquoi ne pas en faire autant en confiant nos joyaux nationaux à la Caisse des dépôts et consignations, qui pourrait ensuite les louer au ministère ? Je suis autrichien de résidence. Voilà sans doute pourquoi j'ose cette proposition un peu baroque. (M. Christian Cambon, président de la commission, applaudit.)

M. André Vallini, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - L'augmentation des frais d'inscription pour les étudiants extra-communautaires est brutale et considérable. Elle aggravera la diminution des crédits de bourses divisés par deux en dix ans. Cette augmentation affectera les étudiants venus d'Afrique qui sont les plus nombreux et les plus fragiles et ne viennent pas tous de familles favorisées, contrairement aux clichés. Au moment de la restitution des biens mal acquis décidée par le président Macron et de l'amorce de l'inventaire de la colonisation, c'est regrettable. La France renonce ainsi à toute relation avec les cadres africains de demain, qui seront formés ailleurs. Ainsi, en 2018, ils sont 80 000 à aller étudier en Chine avec une bourse de 400 euros par mois et le logement gratuit.

L'Arabie Saoudite est passé à la treizième place dans les pays pourvoyeurs de bourses, même progression pour les Émirats arabes unis, qui propose des places dans des universités islamiques, et la Turquie, passée du vingt-septième au onzième rang.

Ce renoncement augmentera la perte d'influence de notre pays. Les réactions sont nombreuses, à Dakar notamment. Monsieur le ministre, revoyez cette décision funeste pour la France et la francophonie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances.  - Très bien !

M. Claude Kern, rapporteur pour avis de la commission de la culture .  - Les crédits destinés à notre diplomatie culturelle ont été les grands sacrifiés du quinquennat Hollande avec une baisse inédite de 10 %, de 75 millions à 685 millions ?euros.

En cette deuxième année du quinquennat d'Emmanuel Macron, nous connaissons sa marque de fabrique : grandes envolées lyriques, et beaux discours, parsemés de louables intentions, mais des crédits maintenus à leur niveau bas de 2017. Les années à venir risquent d'être douloureuses avec la réduction de 10 % de la masse salariale des réseaux d'ici 2022. Comment mettra-t-on en oeuvre les 33 mesures du plan Langue française ? Comment accueillera-t-on les étudiants étrangers ? Comment atteindra-t-on les 700 000 élèves dans le réseau comme le souhaite le président de la République ?

Je m'interroge sur le devenir de la Fondation Alliance française dans sa fusion avec l'Institut français. Il faut rétablir la confiance et faire travailler ensemble ces deux pépites de notre présence à l'étranger.

Les frustrations sont grandes. Malgré mes réserves, la commission de la culture a néanmoins choisi de recommander l'adoption des crédits de cette mission.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées .  - Quoi de plus essentiels que les crédits du Quai d'Orsay qui portent l'action diplomatique de la France dans le monde. Ils sont essentiels dans le chaos politique qui nous entoure, marqué par des asymétries d'intérêts provoquant des situations de fait, en mer d'Azov aujourd'hui, comme hier en Crimée, mais aussi en mer de Chine, ou dans les Iles Éparses. De nouveaux espaces de conflictualité se créent, dans le cyberespace ou l'espace extra-atmosphérique.

Les outils de régulation des crises issus de la Seconde Guerre mondiale sont contestés. Le droit international est bafoué, la liberté de circulation en mer contestée, les traités anti-prolifération fragilisés. Nos alliances les plus solides vacillent et l'Europe elle-même est frappée par la montée des populismes.

La France, par sa diplomatie universelle, a un rôle particulier à jouer sur la scène internationale : membre du conseil de sécurité de l'ONU, Nation indépendante qui parle à tous, puissance militaire parmi les seules au monde à projeter au-delà de ses frontières des armées dotées d'une capacité autonome d'appréciation et d'intervention, elle ne vise qu'à produire de la sécurité et à se battre pour la paix.

Nous sommes comme vous favorables au triptyque diplomatie-défense-développement mais nous ne partageons pas tous vos choix. Ainsi, l'aide au développement n'est pas assez pilotée du point de vue des priorités politiques. La loi de programmation militaire a été mise à mal avec les OPEX, dont les surcoûts auraient dû être pris en charge par la solidarité interministérielle.

En matière de diplomatie, la France n'est pas à la hauteur de son rôle historique, la vision un peu trop angélique qu'a l'exécutif du multilatéralisme la privant de moyens d'action: Elle est sortie des radars au Moyen-Orient. Notre leadership est contesté en Afrique. Le couple franco-allemand ne pèse par le même poids d'un côté et de l?autre du Rhin. Après Ladislas Poniatowski, j'aimerais connaître votre réaction à l'étonnante proposition allemande, de mutualisation de notre siège au Conseil de sécurité de l'ONU, de notre point de vue, une faute de la part de nos amis allemands, qui porte atteinte à notre légitimité, mais aussi à une réforme plus globale. Cette proposition joue contre l'intérêt de l'Europe. J'espère que vous le direz haut et fort à votre collègue allemand dont les déclarations ne sont pas acceptables. (M. Philippe Dallier : « Bravo ! » ; applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Au moment où le Royaume-Uni et l'Allemagne augmentent leur budget et leurs effectifs, nous économisons 120 millions d'euros, soit une demi-journée d'assurance maladie sur notre diplomatie économique. Le faire alors que le monde est à feu et à sang, n'est-ce pas un contresens ?

Quant au modèle immobilier du ministère, il est à bout de souffle. L'entretien lourd du patrimoine à l'étranger est doté de 12 millions d'euros quand les besoins sont chiffrés à 80 millions d'euros.

Il faut mettre un terme à l'érosion du patrimoine qui découle de cette politique mortifère qui a cessé cependant, monsieur le ministre, reconnaissons-le, depuis votre arrivée. (M. le ministre approuve.)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Merci.

M. Christian Cambon, président de la commission.  - Nous comptons sur vous pour rétablir le poids de la France dans la diplomatie internationale. Nos diplomates méritent qu'on les soutienne pour le rayonnement de la paix. (Bravos et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Rachid Temal.  - Très bien !

Mme Christine Prunaud .  - Nous convenons tous que le potentiel de la France ne fait aucun doute en matière d'action extérieure. La réduction de nos moyens diplomatiques est néanmoins regrettable, d'autant que nous contestons la priorité donnée à la diplomatie économique. Il existe un reliquat de colonialisme dans les liens commerciaux que nous entretenons, en particulier, avec les pays d'Afrique. L'aide au développement ou les ventes massives d'armes en témoignent.

Je souhaite parler d'un point délaissé : le franc CFA. Le maintien d'une zone franc après la décolonisation nuit aux pays concernés. Si le franc CFA limite l'inflation, son indexation à l'euro, monnaie forte, freine l'activité des PME africaines et entraîne une fuite des cerveaux. Le franc CFA maintient un pré carré pour la France mais provoque le rejet de notre pays.

La situation de la diplomatie culturelle est délicate. Les moyens ne sont pas à la hauteur des besoins. Qu'en est-il de l'institut français de Naplouse ? Nous nous interrogeons aussi sur la situation des alliances françaises.

On ne peut que condamner la décision du Gouvernement d'augmenter drastiquement les frais d'inscription des étudiants étrangers à l'université française. Leur demander de payer ce qu'ils coûtent est contraire au sens même d'un service public. Les étudiants étrangers créent aussi indirectement de la richesse. Vous ôtez tout espoir aux étudiants modestes alors même qu'il y a déjà une sélection par l'argent. La France est le quatrième pays d'accueil des étudiants étrangers. On risque un recul.

La baisse des effectifs des représentations françaises à l'étranger inquiète. Le ministère des affaires étrangères a perdu 53 % de ses effectifs en trente ans, dont un tiers depuis 2008. Pourtant, le Gouvernement annonce encore une nouvelle baisse de 10 %. On compte 13 800 agents pour 2 millions d'expatriés. C'est peu. La dématérialisation entraîne un recul des services publics français à l'étranger.

Nous ne pourrons pas voter les crédits de la mission.

M. Jean-Noël Guérini .  - L'action extérieure de l'État est l'un des principaux instruments de rayonnement de la France à l'étranger. Le budget de 2,9 milliards d'euros pour 2019 en autorisations d'engagement et en crédits de paiement représente une baisse de 2,2 % des crédits par rapport à 2018 à périmètre constant.

Cette baisse devient toutefois relative si sont incluses les dépenses de sécurisation des implantations à l'étranger. Si le projet kantien de paix perpétuelle demeure un idéal, la France doit disposer d'un outil d'influence pleinement efficace pour continuer à participer à la résolution des conflits.

La promotion de la langue française reste une composante majeure de notre diplomatie. Je me réjouis de la sanctuarisation des crédits qui y sont alloués dans le programme 188. Mais l'objectif de 700 millions d'euros de locuteurs nécessite que notre réseau d'établissements d'enseignement à l'étranger soit conforté. Appuyons-nous également sur nos outre-mer pour diffuser la francophonie.

La réduction à marche forcée de la masse salariale des réseaux consulaires est inquiétante. C'est une nouvelle saignée, pour atteindre moins 10 % en 2022, alors que nos réseaux sont déjà contraints par le schéma pluriannuel d'emplois. Je partage l'idée que chaque ambassade devienne une agence de l'État mais attention à ne pas affaiblir notre réseau diplomatique, le troisième au monde.

Je salue l'initiative du président de la République d'installer un forum annuel de la paix. Nous devons être vigilants. Notre place est contestée : l'Allemagne souhaite ainsi que la France, abandonner son siège au Conseil de sécurité de l'ONU au profit de l'Union européenne. Encore faudrait-il que cette dernière ait une politique étrangère cohérente ! Nous devons préserver notre place pour conserver notre autonomie et défendre nos intérêts.

Le centenaire de la Grande Guerre a rappelé que la paix n'est jamais éternellement acquise. Il faut, monsieur le ministre, consolider nos outils diplomatiques au service des libertés humaines.

Malgré tout, le groupe RDSE votera ces crédits. (« Très bien » ! et applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Alain Fouché .  - L'action de la France dans le monde est plus que jamais attendue et nécessaire dans un contexte mondial dégradé et instable.

M. Raffarin, qui fut un grand président de la commission des affaires étrangères, tout comme M. Cambon, rappelait que la France devait, au XXIe siècle, à la fois défendre la paix et promouvoir le multilatéralisme. L'actualité internationale lui donne chaque jour un peu plus raison.

La France possède le troisième réseau diplomatique et consulaire, et d'excellents diplomates, parmi les meilleurs du monde. Elle a toutes les cartes pour conserver sa place. Mais nous ne devons pas la prendre pour acquise sans quoi elle s'affaiblira.

Notre action extérieure ne saurait être une variable d'ajustement. Le Quai d'Orsay, selon les spécialistes, est à l'os. Pourtant, monsieur le ministre, vous semblez poursuivre une logique de rabot. La diplomatie est pour la France un actif précieux et un atout pour l'avenir.

La rationalisation des primes est souhaitable et les économies de fonctionnement possibles mais les efforts structurels arrivent à leur terme.

La Chine, l'Allemagne, le Royaume-Uni investissent pendant ce temps massivement dans leur soft power et occupent les espaces que nous abandonnons.

Notre présence dans les institutions multilatérales doit être renforcée. La France ne doit pas renoncer à ce privilège, car elle a une responsabilité accrue pour défendre le multilatéralisme.

Nous devons aussi oeuvrer à la construction d'une politique extérieure commune en Europe.

Le groupe Les Indépendants s'abstiendra sur ces crédits qui ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam .  - La disproportion entre l'ampleur des efforts demandés au ministère des Affaires étrangères et sa part de 2 % du budget de l'État est flagrante. Ainsi, on demande au ministère des Affaires étrangères la réduction de la masse salariale de 10 % à 2022 après une diminution de 12 % ces dix dernières années. C'est au total 8 % des efforts réclamés à l'État, alors qu'il ne représente que 0,7 % des effectifs. Certes, les Français de l'étranger disposent de moyens de pression limités. Est-ce du cynisme de la part du ministère de l'Économie et des finances ou un manque de vision de long terme ?

Malgré l'immense qualité du personnel consulaire, il faut des moyens. Nul ne peut faire des miracles !

Ce budget manque de sincérité.

S'il est nécessaire d'optimiser la gestion de l'immobilier à l'étranger, on ne saurait brader nos joyaux qui participent de l'image de notre pays. Je note que 30 millions d'euros non inscrits au budget seront consacrés à des opérations de sécurité. Il faudra les rendre entre 2020 et 2025, par des opérations de ventes immobilières. Pourquoi ne pas les vendre à des institutions françaises ?

La stagnation des budgets correspond en réalité à une dégradation. Les crédits alloués aux bourses scolaires continuent de baisser. Cela conduit en réalité à écarter les familles modestes de nos établissements, car les frais de scolarité flambent.

Emmanuel Macron s'est engagé à doubler le nombre d'élèves dans les écoles françaises. Cherchez l'erreur !

Les crédits du programme d'influence culturelle baissent. Les modalités de rapprochement entre les Alliances françaises et l'Institut français restent flous.

Le ministère des Affaires étrangères est réduit aux expédients et aux économies de bouts de chandelle. Il est à l'os !

Je ne reviendrai pas sur la suppression regrettable de la Journée défense et citoyenneté (JDC) pour les jeunes compatriotes de l'étranger, alors que ce sont nos meilleurs ambassadeurs de demain. C'est une faute morale et stratégique.

Les autres pays se donnent, eux, les moyens de leur réussite. (MmeClaudine Lepage et Hélène Conway-Mouret applaudissent.)

M. Claude Haut .  - Tandis que nous examinons ces crédits, nos diplomates sont à la tâche aux quatre coins du monde. Ils ont la lourde responsabilité de travailler pour notre communauté croissante à l'étranger. Remercions-les.

Ils oeuvrent dans un monde en instabilité. La COP de Katowice nous rappelle l'urgence climatique. Il est urgent d'agir ensemble pour trouver des solutions ambitieuses pour sauver notre planète.

Je pense aussi aux défis sécuritaires, aux vagues migratoires, aux coups portés au projet européen et à la remise en cause du libre-échange.

Trop de partenaires remettent en cause le multilatéralisme. Ainsi, les États-Unis le contestent, au profit d'un nationalisme inquiétant. Notre pays doit pouvoir continuer à compter sur une diplomatie forte.

Le budget du ministère des Affaires étrangères baisse de 4 %, notamment en raison de la réduction automatique du coût des participations aux opérations internationales et aux opérations extérieures.

Le budget de la mission reflète notre fervent engagement dans le multilatéralisme. Nous consacrons 326 millions d'euros à nos opérations avec l'ONU. Dans un monde incertain, le maintien des actions multilatérales est essentiel.

Nous nous réjouissons de la sanctuarisation des moyens de l'action culturelle, compte tenu de son importance. Les crédits de l'Institut français augmentent, après avoir baissé de 11% entre 2012 et 2017.

Mme Claudine Lepage.  - C'est artificiel !

M. Claude Haut.  - Les bourses d'étude sont sanctuarisées. Notre réseau d'enseignement français est unique au monde ; il accueille 350 000 élèves répartis dans 500 établissements. Je salue le travail exceptionnel des instituts et des alliances françaises.

Ce budget acte une réforme structurelle du ministère. Dans le cadre d'Action publique 2022, le Quai d'Orsay pilotera l'ensemble du réseau français à l'étranger, sous l'égide de l'ambassadeur. Cela permettra à notre diplomatie de mieux embrasser ses priorités. À travers ses 133 ambassadeurs, la France fait entendre la voix de la paix, de la prospérité et du bien commun. Nous savons pouvoir compter sur votre engagement, monsieur le ministre.

Le groupe LaREM votera en faveur de ces crédits, témoignant de son soutien à notre diplomatie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE)

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Vous êtes à la tête d'un beau ministère, celui de la paix. Notre influence à l'international reste forte grâce à notre réseau consulaire, l'un des premiers au monde, et notre présence culturelle, éducative et économique. La France compte ! Grâce à son engagement, la COP 21 fut un succès.

Hélas, le budget du Quai d'Orsay fait office de variable d'ajustement. La vente de nos antennes à l'étranger, qui entraîne une baisse de notre présence, est mal perçue. Et voilà que l'on ponctionne 10% sur la masse salariale, ce qui se traduira par des suppressions de postes. Un vrai massacre à la calculette ! La réduction des effectifs concerne 130 ETP issus de plusieurs ministères. Certains ont déjà annoncé qu'ils refuseraient les suppressions demandées. Seront-elles dès lors supportées par le seul ministère des affaires étrangères ? Va-t-on encore fermer des consulats ? Le licenciement de personnel recruté localement coûtera cher, et l'image de la France sera ternie.

Dématérialisation et externalisation seront sûrement accélérées, au détriment du contact humain. Heureusement, nos 442 conseillers consulaires jouent un rôle essentiel auprès de nos concitoyens à l'étranger et sont indispensables au lien social dans nos communautés.

Quant à l'enseignement du français, il se fait dans les 497 établissements répartis dans 197 pays gérés par l'AEFE. Ils accueillent 350 000 élèves, chiffre en hausse de 2 % par an.

L'annulation de 33 millions d'euros de crédits de l'AEFE en 2017 et l'obligation de compensation faite aux établissements a conduit à augmenter les frais de scolarité, reportant la charge sur les familles. Or l'enveloppe des bourses n'augmente pas.

Le président de la République veut doubler le nombre d'apprenants du français dans le monde, mais la fin de la garantie de l'État bloque les projets d'agrandissement des établissements. Comment sortir de l'impasse ? Le retrait de l'État est-il le premier pas vers la recherche d'investisseurs privés ? Comment atteindre l'objectif quand on limite le recrutement et le détachement de professeurs ?

L'ambition d'une diplomatie universelle et de services consulaires de qualité est incompatible avec la baisse des engagements. L'image de la France est en jeu ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Olivier Cadic .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) L'examen des crédits de cette mission est un rendez-vous essentiel pour les Français de l'étranger. Je peux témoigner que l'élection d'Emmanuel Macron a redonné du lustre à l'image de la France à l'étranger. Pourvu que cela dure ! (Exclamations amusées sur les bancs des groupes SOCR et Les Républicains ; applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Richard Yung.  - Bravo !

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances.  - C'est une grosse ficelle pour susciter des réactions ! (Sourires)

M. Olivier Cadic.  - En quatre ans, j'ai effectué 289 déplacements dans 79 pays. (Marques d'admiration) J'y ai rencontré nos ambassadeurs, consuls, consuls honoraires, acteurs économiques, et les remercie pour leurs suggestions. Je salue nos rapporteurs pour la qualité de leurs travaux.

La baisse globale des crédits correspond au souhait des Français d'une réduction de la dépense publique. Je partage l'objectif mais suis plus réservé sur les moyens. Pour le Quai d'Orsay, Bercy a inventé le coup de rabot permanent ! La diminution de la masse salariale de 10 % d'ici 2022 décourage les agents, qui ne voient aucune amélioration en contrepartie.

Nos ambassades sont des vitrines. La vente de la résidence à Hong Kong dégrade notre image. Elle est d'autant plus absurde qu'il nous faut désormais louer ! À force de vendre les bijoux de famille, nous n'avons plus de marge de manoeuvre. En 2018, onze opérations, pour un produit de 30 millions d'euros. Résultat, la nouvelle ambassade en Corée est suspendue. Faute d'entretien, notre patrimoine se dégrade. Quelle est la stratégie du Gouvernement à moyen terme ?

Nous avons de plus en plus d'expatriés mais de moins en moins de moyens. L'effet ciseau est regrettable. Nous pourrions transformer les consulats en centres de profit, équiper les consuls honoraires d'outils de saisie d'empreintes biométriques.

L'enseignement français à l'étranger est source de satisfaction. Le président de la République a fixé comme objectif de doubler les effectifs d'ici 2030. Nous espérons que cette évolution s'accompagnera d'une réforme de l'AEFE qui n'accueille qu'un enfant français sur cinq.

Les rémunérations des chefs d'établissement, supérieures à celles des ministres, et des enseignants interrogent. Pour quatre enfants sur cinq, les familles se tournent vers l'enseignement local ou international, de sorte que beaucoup d'enfants binationaux ne parlent pas notre langue. Notre objectif devrait être que tous les enfants français parlent français ! Je proposerai la création d'un chèque Éducation, financé par un transfert de crédits de l'AEFE vers l'Institut français, pour ce faire.

Je me félicite que l'Institut français échappe à la stagnation, avec un budget en hausse de 7 %. (Mme Claudine Lepage proteste.) La Fondation Alliance française est en revanche dans une situation financière difficile.

Le groupe UC votera les crédits de la mission, tout en restant vigilant sur leur mise en oeuvre et leur évolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ainsi que sur le banc de la commission.)

M. Rachid Temal .  - L'action environnementale multilatérale de la France est essentielle, et nous nous réjouissons de la prochaine loi de programmation. Les luttes d'influence ne sont plus seulement le fait d'États mais aussi de géants économiques. L'avenir du multiculturalisme est engagé ; il est important que la France maintienne sa doctrine et convainque ses partenaires.

Le rayonnement français est au coeur de la mission. Les Français de l'étranger en sont le premier vecteur. Il aurait fallu sanctuariser les aides sociales et les bourses. J'espère que notre proposition d'associer l'ensemble des partenaires sera acceptée.

La suppression de la Journée défense et citoyenneté, qui favorisait le lien entre les jeunes binationaux et la République, est regrettable.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam.  - Très bien !

M. Rachid Temal.  - La baisse des crédits consulaires nuira au service public délivré.

L'augmentation des frais d'inscription des étudiants étrangers dans les universités françaises est une erreur en termes d'influence. Il en va de même du soutien à l'audiovisuel extérieur, qui ne doit pas se faire au détriment de France Télévisions. Le tourisme - 7 % du PIB et 2 millions d'emplois - dépend aussi des visas pour le financement de sa stratégie. Nous devons y travailler.

Je salue la qualité des travaux de la commission et espère que le ministre ne sera pas sourd à nos observations. Néanmoins, le groupe SOCR votera contre ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères .  - Ce budget est reconduit à périmètre constant, toutes dotations confondues. La réduction de 4 % s'explique par la baisse de notre participation aux opérations de maintien de la paix et par une anticipation de l'évolution du taux de change qui a permis de dégager des économies. D'autre part, les crédits liés à la sécurité - 100 millions d'euros à rembourser à partir de 2021 - se retrouvent dans le CAS Immobilier. Nous allons bénéficier d'un apport supplémentaire du parc immobilier, avec 250 emprises à la suite de l'unification du pilotage interministériel de l'Action extérieure de l'État.

Je déposerai un amendement pour ajouter 6,6 millions d'euros à la mission, qui retrouve ainsi son montant initial. Merci aux rapporteurs de l'avoir souligné.

La décision de conforter le ministère des Affaires étrangères dans son rôle de pilotage interministériel des services français à l'étranger met fin à l'effet silo. On crée une agence de l'État à l'étranger, sous l'autorité de l'ambassadeur. En contrepartie, le Premier ministre a fixé un objectif de réduction de 10 % de la masse salariale d'ici 2022. Le ministère des Affaires étrangères perd cette année 130 ETP. Ses dépenses de personnel augmentent néanmoins de 36,6 millions d'euros en raison de l'inflation, plus forte à l'étranger qu'en France.

L'objectif de 10 % concerne l'ensemble des ministères présents à l'étranger ; chacun devra contribuer. Je veillerai à ce que cette réduction ne pénalise en rien notre capacité à mener à bien nos missions. Je ne suis pas dans une politique du rabot mais dans une logique de cohérence et de maîtrise des dépenses publiques.

Ce budget permettra de mettre en oeuvre les priorités de notre diplomatie, à commencer par le soutien au multilatéralisme - en crise il est vrai. Nous sommes en désaccord avec les propositions d'Olaf Scholz, qui n'est pas mon homologue mais le ministre de l'Économie allemand, de partager avec l'Allemagne notre siège au Conseil de sécurité de l'ONU. Cette proposition est inconvenante, nous l'avons fait savoir aux Allemands. Elle est de plus aléatoire vu que l'Europe dépose actuellement de cinq sièges. Nous proposons de notre côté une réforme plus large du Conseil de sécurité.

Nous avons pris nos dispositions pour renforcer nos consulats en cas de Brexit sans accord.

Pour préserver notre influence, j'ai souhaité que les moyens de notre réseau de coopération et d'action culturelle soient sanctuarisés, ce qui est inédit. Cela nous permettra de porter notre vision de la culture, de développer nos partenariats scientifiques, de renforcer notre activité universitaire. Les moyens de l'AEFE seront maintenus, selon le voeu du président de la République, à 384 millions d'euros et son modèle conforté. Nous engagerons l'évolution nécessaire à son développement ; j'y travaille avec M. Blanquer et ferai bientôt des propositions.

L'enveloppe des bourses scolaires sera préservée. Son passage de 110 à 105 millions d'euros ne fait que l'adapter aux dépenses réelles observées. À l'Assemblée nationale, j'ai annoncé que j'allais étudier la revalorisation du barème du quotient familial maximal à 23 000 euros. En cas de risque, la soulte de l'AEFE pourra être mobilisée.

Quant au Stafe, je suis prêt à travailler avec vous pour l'améliorer.

Les moyens de l'Institut français sont accrus pour financer le plan Francophonie annoncé par le président de la République en mars.

Pour ce qui est de notre patrimoine immobilier à l'étranger, nous restons vigilants. Monsieur Cadic, l'ambassade de Séoul sera la première priorité de la programmation 2019.

Le programme 347 sur la présidence française du G7 a été paramétré au plus près des besoins. La maîtrise en est très rigoureuse, sous le contrôle de la Cour des comptes.

Les moyens mis à ma disposition permettent au Quai d'Orsay d'agir de manière cohérente et efficace en assurant une présence de la France à la hauteur de sa place dans le monde et des enjeux de refondations du multilatéralisme. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE ainsi que sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

Examen des crédits, de l'article rattaché et des amendements portant articles additionnels

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-688, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

2 200 825

2 200 825

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

1 562 940

1 562 940

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

2 920 742

2 920 742

Présidence française du G7

TOTAL

6 684 507

6 684 507

SOLDE

+ 6 684 507

+ 6 684 507

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Comme je l'ai indiqué précédemment, cet amendement ajoute 6,6 millions d'euros sur les crédits de l'Action extérieure de l'État sur les trois chapitres concernés, pour revenir à la situation initiale.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Comment s'explique cette amputation de 6,6 millions à l'Assemblée nationale ? Cet amendement nous est parvenu très tardivement, de sorte que la commission n'a pas pu l'examiner. À titre personnel, les rapporteurs spéciaux y sont favorables, mais nous aurions souhaité un peu plus d'anticipation.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Je m'en suis expliqué. Une régulation a été initiée par le Premier ministre pour financer les annonces en matière de transition énergétique. Chaque ministère a été mis à contribution, d'où une amputation de 15 millions d'euros. J'ai eu tout récemment confirmation que les crédits affectés au FED seraient moins élevés que prévus, ce qui nous permet de réabonder cette mission.

M. Richard Yung.  - Cet amendement est une divine surprise ! Sur la ligne Français de l'étranger, on a inscrit 2,9 millions d'euros. Pouvez-vous nous en préciser l'affectation ?

M. Ladislas Poniatowski.  - Monsieur le ministre, nous allons voter votre budget, malgré nos inquiétudes. Voilà ce que j'aurais voulu vous dire tout à l'heure en conclusion de mon amicale critique. Cet amendement rectifie le tir, j'y suis favorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Monsieur Yung, les crédits ainsi débloqués serviront à rétablir entièrement l'aide sociale à son niveau d'origine.

Monsieur Poniatowski, j'ai toujours considéré qu'il ne fallait mener qu'un combat à la fois ; jusqu'ici, la méthode me réussit ! (Sourires)

L'amendement n°II-688 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-210 rectifié, présenté par Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Créer le programme :

Promotion du français

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

34 356 040

34 356 040

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

451 022 156

451 022 156

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

37 178 020

37 178 020

Présidence française du G7

20 000 000

20 000 000

Promotion du français

468 200 176

468 200 176

TOTAL

505 378 196

505 378 196

505 378 196

505 378 196

SOLDE

0

0

Mme Christine Prunaud.  - Le Premier ministre a annoncé 10 % de suppression de postes dans votre ministère alors même que 150 demandes de missions de renfort ne peuvent pas être satisfaites faute de moyens. Les heures écrêtées et les congés perdus équivalent à 70 ETP. Le différentiel entre les besoins et les ressources a pour conséquence la baisse de la qualité du service rendu, au point que les Français renoncent aux démarches administratives.

La dématérialisation des procédures est une alternative qui ne doit pas remplacer la possibilité de se déplacer dans une antenne. Les agents titulaires ne sont plus qu'un tiers, un autre tiers est composé de recrutements locaux et le dernier par des contractuels intérimaires de droit français - bien moins rémunérés. Quelle image de son réseau consulaire la France donne-t-elle ainsi ?

M. le président.  - Amendement n°II-268, présenté par M. Cadic.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

31 000 000

31 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

31 000 000

31 000 000

Présidence française du G7

TOTAL

31 000 000

31 000 000

31 000 000

31 000 000

SOLDE

0

0

M. Olivier Cadic.  - Cet amendement met en place un chèque éducation permettant à tous les élèves français de prendre des cours de français auprès des Instituts français. Il servira aussi à soutenir le réseau FLAM plébiscité par les familles françaises vivant à l'étranger.

M. le président.  - Amendement n°II-37, présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

3 200 000

3 200 000

TOTAL

3 200 000

3 200 000

SOLDE

- 3 200 000

- 3 200 000

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Cet amendement réduit les crédits dédiés à l'organisation du G7 pour s'en tenir au budget du G20 de Deauville de 2011, corrigé de l'inflation. C'est un amendement de principe !

M. le président.  - Amendement n°II-470, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

15 000 000

15 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

15 000 000

15 000 000

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - En 2017, l'AEFE a subi une annulation de 33 millions d'euros qui s'est ajoutée au transfert, non compensé, de compétences relatives au patrimoine immobilier et la charge des pensions civiles. Cette amputation l'a contrainte à diminuer le nombre de titulaires détachés de l'Éducation nationale. L'AEFE a affaibli ses capacités d'intervention, d'investissement et de pilotage dans un réseau indispensable à notre diplomatie d'influence.

Cette baisse survient alors que le président de la République a fixé l'objectif de doubler le nombre d'élèves scolarisés à l'étranger d'ici 2030. Alors que les effectifs croissent de 2 % par an, il conviendrait d'augmenter aussi le budget de l'AEFE.

M. le président.  - Amendement n°II-28 rectifié quater, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

4 700 000

4 700 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

4 700 000

4 700 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

TOTAL

4 700 000

4 700 000

4 700 000

4 700 000

SOLDE

0

0

M. Damien Regnard.  - Cet amendement augmente de 4,7 millions d'euros les crédits de l'AEFE afin de compenser l'annulation d'une partie de la subvention en 2017. Alors que le président de la République veut doubler le nombre d'élèves d'ici 2025, se pose la question de la soutenabilité budgétaire du réseau.

Avec 350 000 élèves scolarisés dans 492 établissements à travers 137 pays, le seuil de tolérance des familles est atteint et le désengagement de l'État devient menaçant. Cet amendement augmente les crédits de l'AEFE de 4,7 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°II-467, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

10 000 000

10 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

10 000 000

10 000 000

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Cet amendement flèche 10 millions de crédits de paiement supplémentaires vers l'action « Réseau diplomatique » au sein du programme « Action de la France en Europe et dans le monde » et réduit d'autant ceux de l'action « Préparation et organisation du sommet du G7 » au sein du programme « Présidence française du G7 ». Nous préférons flécher les crédits au profit du plus grand nombre.

M. le président.  - Amendement n°II-29 rectifié quater, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

7 000 000

7 000 000

Présidence française du G7

7 000 000

7 000 000

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

M. Damien Regnard.  - Cet amendement abonde le financement des bourses scolaires. Les familles les plus modestes doivent être accompagnées pour que l'excellence du réseau de l'AEFE leur soit accessible.

M. le président.  - Amendement n°II-468, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Présidence française du G7

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Après un gel de 33 millions d'euros en 2017, le président de la République s'était engagé à sanctuariser le budget de l'AEFE à son niveau de 2018.

Or le programme prévoit une aide à la scolarité à 105 millions d'euros, et non 110 millions, ainsi qu'un prélèvement de 5 millions sur la soulte de l'AEFE. C'est un artifice comptable.

N'en déplaise au Gouvernement, l'AEFE n'a pas les moyens nécessaires pour faire face à cette augmentation de 5 millions d'euros.

La hausse des frais de scolarité impacte les familles les plus modestes ; les impayés se multiplient. Les lycées de l'AEFE doivent-ils être réservés aux seuls privilégiés ?

M. le président.  - Amendement n°II-524, présenté par Mme Lepage et M. Leconte.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

5 000 000

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - La stratégie d'attractivité pour les étudiants étrangers annoncée par le Premier ministre repose sur l'augmentation des frais d'inscription pour les étudiants extra-communautaires. Si les Chinois ou les Indiens peuvent y voir un synonyme de qualité, cette hausse nous privera des étudiants les plus modestes ; notamment ceux d'Afrique francophone qui ont le sentiment d'être trahis, alors que le président de la République avait indiqué son ambition pour la francophonie. Cet amendement flèche 5 millions d'euros vers l'accueil et les conditions de vie des étudiants étrangers en France.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Très bien.

M. le président.  - Amendement n°II-30 rectifié ter, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

1 340 000

1 340 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

1 340 000

1 340 000

Présidence française du G7

TOTAL

1 340 000

1 340 000

1 340 000

1 340 000

SOLDE

0

0

M. Damien Regnard.  - Pour 2017, 3,34 millions d'euros de crédits étaient inscrits au titre de la réserve parlementaire des députés et sénateurs des Français de l'étranger - une contribution vitale à la vie associative française à l'étranger dans le domaine de la culture, de la solidarité ou de l'emploi.

Pour en compenser la suppression, le Gouvernement a mis en place le Stafe. En 2018, 1,74 million d'euros ont été versés pour le financement de 223 projets à travers le monde.

Pour 2019, le programme 151 est doté de 2 millions d'euros. Devant l'Assemblée des Français de l'étranger, le président de la République a dit souhaiter un dispositif permettant d'accompagner le tissu associatif des Français de l'étranger pour compenser la suppression de la réserve.

Le Stafe en est très loin. Entre 2017 et 2019, l'effort budgétaire en direction des associations françaises à l'étranger a baissé de 40 %. Or elles ne peuvent s'appuyer sur aucune autre personne publique...

Inégalitaire et peu démocratique, le système d'appels à projet favorise les associations les mieux placées pour lever des fonds et exclut les parlementaires...

Cet amendement transfère 1,34 million d'euros du programme 105 pour abonder la dotation prévisionnelle du programme 151. (M. Alain Fouché applaudit.)

M. le président.  - Amendement n°II-514, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Mission « Action extérieure de l'État »

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

1 340 000

1 340 000

Présidence française du G7

1 340 000

1 340 000

TOTAL

1 340 000

1 340 000

1 340 000

1 340 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Yves Leconte.  - La suppression de la réserve parlementaire a privé les députés et sénateurs représentant les Français établis hors de France d'un montant de 3,2 millions d'euros, qu'ils attribuaient à des associations pour des projets majoritairement orientés vers le soutien aux activités associatives, culturelles, humanitaires des Français de l'étranger et la coopération internationale.

Pour compenser partiellement celle-ci, le Gouvernement s'est engagé à ce que 2 millions d'euros soient réservés pour ces usages.

Peu importe le nombre de Français de la circonscription, seuls six projets peuvent être soutenus. L'exigence d'enregistrer une association localement, plutôt qu'en France, exclut ou limite les projets en provenance de pays où la vie associative est difficile ou contrôlée.

Enfin, la réserve parlementaire permettait d'amorcer des projets, ce qui n'est guère possible avec le plafond du financement à 50 % du coût de l'action.

M. le président.  - Amendement n°II-503 rectifié, présenté par M. Cadic et les membres du groupe Union Centriste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

600 000

600 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

600 000

Présidence française du G7

600 000

TOTAL

600 000

600 000

600 000

600 000

SOLDE

0

0

M. Olivier Cadic.  - La Fondation Alliance Française (FAF) était il y a un an en situation désespérée. Elle a pu, avec l'appui des pouvoirs publics, être sauvée au prix d'une restructuration majeure. Elle a été recentrée sur ses missions premières d'animation du réseau mondial des alliances françaises dans le monde et rapprochée avec l'Institut français dans le cadre d'une clarification de leurs rôles respectifs. Son contentieux avec l'AFPIF est en cours de règlement.

Cet assainissement n'est toutefois pas entièrement acquis.

La Fondation tire ses recettes, pour une part substantielle, de ses locations immobilières sur son site du boulevard Raspail. Or dans le cadre du rapprochement décidé entre Fondation et Institut français, il est prévu que ce dernier vienne s'installer, en tant que locataire, dans les locaux de la première. Cette installation annoncée par le président de la République en mars dernier, si elle était confirmée, priverait la Fondation de ressources le temps de travaux lourds et d'une durée estimée à plus de deux ans.

En l'absence de confirmation de cette décision, le budget de la FAF pour 2019 ne peut être établi. En 2018, le ministère des affaires étrangères avait demandé à la FAF de ne pas renouveler certains baux locatifs dans l'attente de confirmation de venue de l'Institut, et versé une subvention exceptionnelle pour soutenir cet effort. Si l'an prochain le chantier d'installation était confirmé, c'est un manque à gagner de quelque 600 000 euros, auquel elle serait confrontée. Pour mémoire, dans le cadre de sa restructuration, la Fondation a déjà réduit ses effectifs de 45 % ; avec moins de dix agents, elle court le risque d'être en incapacité de faire face à ses missions au service de quelque 835 alliances.

Cet amendement transfère 600 000 euros du programme 347 vers le programme 185, afin d'améliorer la situation financière de la Fondation Alliance Française.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-210 rectifié. Cet amendement réduit de 20 millions les crédits pour Atout France et d'autant ceux consacrés à l'organisation du G7. Cela compromettrait le bon fonctionnement d'Atout France et la bonne tenue du G7. La commission des finances propose une baisse plus mesurée des crédits pour le G7.

Enfin, la hausse de 37 millions d'euros des crédits de l'administration consulaire proposée par l'amendement n'est pas nécessaire.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-268. Cet amendement retire 33 millions d'euros, soit 8 %, au budget de l'AEFE qui a déjà supprimé 174 postes en 2018 et s'apprête à en supprimer166 en 2019.

Avis défavorable à l'amendement n°II-470. Cet amendement abonde de 15 millions le budget de l'AEFE, privant d'autant le budget d'organisation du G7. L'équilibre n'est pas raisonnable. Idem pour l'amendement n°II-28 rectifié quater. Ces crédits manqueraient au programme 105.

Les crédits alloués à l'AEFE sont stables, ou presque. Les dépenses de sécurisation relèveront d'un compte d'affectation spécial. Dans les budgets suivants, il faudra les rembourser, certes.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°II-467. Réduire de 10 millions le budget d'organisation du G7, c'est trop.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - L'amendement n°II-29 rectifié quater et l'amendement n°II-468 augmentent les bourses scolaires, en prélevant encore l'organisation du G7. Or, à barème constant, le budget 2019 devrait couvrir les bourses : avis défavorables.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Avis défavorable à l'amendement n°II-524. La subvention de Campus France est préservée en 2019 et en large hausse par rapport à 2016. L'attractivité de la France sur des étudiants étrangers se confirme : de 184 000 en 2016, ils sont passés à 192 000 en 2018 et seront 200 000 en 2020.

Avis du Gouvernement sur les amendements nosII-30 rectifié ter et II-514, qui abondent de 1,340 million d'euros les crédits du Stafe. Avec 302 projets déposés début octobre, les postes diplomatiques et consulaires semblent s'être correctement appropriés le dispositif, déjà doté de 2 millions d'euros - ce qui reste inférieur aux 3,34 millions de la réserve parlementaire. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n°II-503 rectifié ? Le montant demandé est très limité et tient compte de la spécificité de l'Alliance française de Paris et du rapprochement avec l'Institut français. Les 600 000 euros demandés ne semblent pas déraisonnables.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Le Gouvernement partage l'avis de la commission sur tous les amendements, à l'exception de celui... de la commission. J'ai entendu plusieurs d'entre vous souhaiter renforcer la présence et l'influence de la France - mais aussi, vouloir prélever sur l'organisation du G7...

M. Ladislas Poniatowski.  - Absolument !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Évitons les effets de manche. L'accumulation des retraits sur le budget de l'organisation du G7 est contradictoire avec les demandes de renforcer le rôle international de la France.

Avis défavorable à l'amendement n°II-210 rectifié, ainsi qu'à l'amendement n°II-268. Des efforts importants sont effectués pour les Français de l'étranger.

Monsieur Delahaye, la maîtrise des coûts de l'organisation du G7 sera extrêmement rigoureuse. Il est vrai que le coût sera un peu plus élevé qu'à Deauville, mais inférieur aux sommets en 2017 et 2013 au Canada et aux États-Unis, mais c'était à une autre époque. Avis défavorable à l'amendement n°II-37.

Les crédits de l'AEFE sont sanctuarisés et j'entends qu'ils le demeurent dans les années à venir. Le président de la République m'a demandé des propositions d'actions en faveur de l'enseignement du français. Avis défavorable aux amendements nosII-470 et 28 rectifié quater.

Les dépenses de sécurisation de l'AEFE seront prises en charge par le compte d'affectation spéciale « Immobilier de l'État ». Il n'y aura donc pas diminution des crédits de l'AEFE pour ce faire. J'attends le rapport de Mme Cazebonne pour formuler des propositions définitives. Avis défavorable à l'amendement n°I-467.

Sur les bourses scolaires, les crédits baissent de 5 millions d'euros, mais c'est parce que les fonds ne sont pas tous mobilisés. Si d'aventure il y avait un besoin supplémentaire, il existe une soulte des bourses de l'AEFE qui pourra être utilisée. Pour le quotient familial, j'ai proposé un relèvement du plafond de 21 000 à 23 000. Ce n'est pas une mesure législative, mais je m'y engage. Avis défavorable à l'amendement n°II-29 rectifié quater.

La subvention de Campus France sera identique en 2019 et en 2018. Sur les frais d'inscription des étudiants étrangers extracommunautaires : les droits d'inscription que nous demanderons ne représenteront que le tiers du coût de la formation ; on triple les bourses d'exonération pour les étudiants étrangers ; leur accueil sera renforcé ; enfin, le vrai sujet, c'est d'installer des formations en français dans les pays concernés, des études de qualité française labellisée sur leur propre sol : c'est le cas à Abidjan avec un hub universitaire franco-ivoirien, et bientôt en Tunisie. Avis défavorable aux amendements nosII-468 et II-524.

Sur le fonds Stafe, merci d'avoir reconnu que je respecte mes engagements. Le fonds finance des actions, pas du fonctionnement ; il n'a pas été entièrement dépensé - 1,7 million d'euros sur les 2 millions ont été consommés -, 75 % des projets ont été retenus. Avis défavorable aux amendements nosII-30 rectifié ter et II-514.

Bonne question, monsieur Cadic, posée par votre amendement n°II-503 rectifié. La réponse serait prématurée. L'accord entre l'Alliance française et l'Institut français vient de se produire. Reparlons-en plus tard. Avis défavorable.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - J'ai entendu l'argument du ministre sur Stafe. Seuls trois quarts des projets ont été retenus, c'est donc qu'un sur quatre n'a pas été retenu. Sur quels critères ? Nous avons besoin d'une transparence totale. Sagesse aux amendements nosII-30 rectifié ter et II-514.

L'amendement n°210 rectifié n'est pas adopté.

M. Olivier Cadic.  - 31 millions d'euros, c'est moins que l'effort fait l'an dernier. Attention, les moyens mis dans l'AEFE sont très loin de couvrir les besoins d'apprentissage du français par les Français établis hors de France eux-mêmes : seul un enfant sur quatre en profite, j'y reviendrai.

L'amendement n°II-268 est retiré.

L'amendement n°II-37 est adopté.

L'amendement n°II-470 n'est pas adopté.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis.  - Monsieur le ministre, si vous additionnez toutes les ponctions sur l'organisation du G7, il ne vous restera plus rien - on lui prend comme on prenait hier sur le tabac pour gager les amendements... Mais l'amendement n°28 rectifié quater, lui, prélève sur le programme 105, dont je suis rapporteur - je voterai donc résolument contre.

L'amendement n°II-28 rectifié quater n'est pas adopté, non plus que les amendements n°II-467, 29 rectifié quater et n°II-468.

M. Jean-Yves Leconte.  - L'amendement n°II-524 pose une vraie question : le 19 novembre, le Premier ministre annonce qu'il triple les bourses mais le bleu budgétaire conserve le même chiffre qu'en 2018, à l'euro près. Sur quoi allez-vous gager ces dépenses nouvelles ?

Pour doubler le nombre d'élèves, ceux qui ont passé le bac dans nos établissements doivent conserver les mêmes tarifs et la délivrance des visas étudiants doit être simplifiée et accéléré, car les lourdeurs rebutent les candidats dans de nombreux pays. Tout ceci s'ajoute aux difficultés liées à l'éloignement des établissements et du réseau consulaire...

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - D'abord, je n'ai fermé aucune ambassade.

Ensuite, nous triplons le nombre de bourses d'exonération et nous n'appliquons pas la mesure aux étudiants déjà en cours d'études.

M. Pierre Ouzoulias.  - L'augmentation des droits d'inscription est dramatique. Vous avez raison de dire que le nombre d'étudiants en français progresse de 4,6 %, mais c'est à comparer au nombre des étudiants qui étudient à l'étranger partout dans le monde, qui progresse de 7 % : en réalité, la France décroche !

Résultat : l'Australie comme la Russie nous dépasseront bientôt... Certains pays, comme l'Arabie Saoudite ou la Turquie, en sont à payer les étudiants étrangers pour venir sur leur sol - avec succès puisque le nombre d'étudiants étrangers y progresse de 12 %. La question est donc de savoir ce que vous voulez pour la France...

M. Olivier Cadic.  - Au Royaume-Uni, de tels frais de scolarité dépassent 20 000 livres sterling par an.

L'amendement n°II-524 n'est pas adopté.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis.  - Ici encore, un amendement gagé sur le programme 105, alors que certains signataires ont demandé de ne pas en diminuer les ressources : il faut être cohérent. Je voterai contre.

L'amendement n°II-30 rectifié ter n'est pas adopté.

L'amendement n°II-514 n'est pas adopté.

M. Claude Kern, rapporteur pour avis.  - Après sa restructuration, la Fondation Alliance française compte 10 ETP, et pourrait descendre à 6 ETP en 2019.

Des travaux de 15 millions d'euros sont à prévoir dans deux ans sur le site de Raspail. Il faudra surveiller la situation de près, monsieur le ministre.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - L'an dernier déjà, vous disiez qu'il était trop tôt, monsieur le ministre. Notre amendement aurait évité le dépôt de bilan et la démission de personnalités importantes comme M. Juppé ou de Mme Carrère d'Encausse du conseil d'administration.

Il manque un pilote dans l'avion ! Les directeurs d'alliances françaises veulent que la Fondation reprenne, il serait incompréhensible de ne pas la soutenir.

M. Jean-Yves Leconte.  - Les alliances françaises ont été perturbées ces dernières années par les diminutions de moyens, alors qu'elles assurent une large présence de la France à l'étranger. Monsieur le ministre, il faudrait que l'an prochain, vous receviez leurs présidents à Paris, ce serait un signe important du soutien que vous leur accordez.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - J'avais demandé un débat sur les alliances françaises avant le projet de loi de finances pour 2018. Cet amendement va dans le bon sens, il est raisonnable et répond bien aux difficultés que nous constatons sur le terrain. Les subventions ont considérablement diminué sous le quinquennat précédent...

M. Olivier Cadic.  - Merci pour votre soutien. La Fondation est indispensable.

L'amendement n°II-503 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-269, présenté par M. Cadic.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

30 000 000

30 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

30 000 000

30 000 000

Présidence française du G7

TOTAL

30 000 000

30 000 000

30 000 000

30 000 000

SOLDE

0

0

M. Olivier Cadic.  - L'article 2 de notre Constitution dispose que « la langue de la République est le français » ; mais comment s'assurer que tous les Français parlent la langue de la République dès lors que, de plus en plus, les nouvelles générations qui naissent à l'étranger ne pratiquent pas le français ? Dans certains pays, plus d'un Français né à l'étranger sur deux ne maîtrise pas notre langue, parfois deux sur trois en Amérique latine.

Seul un jeune Français sur cinq à l'étranger suit l'enseignement offert par le réseau AEFE. L'objectif de l'amendement est de réorienter une partie du budget de l'AEFE vers les 80 % d'enfants français à l'étranger qui ne reçoivent aucune aide pour apprendre notre langue.

Cet amendement garantit un accès égal pour tous nos compatriotes à l'enseignement du français à l'étranger en créant un chèque Éducation pour chaque enfant en âge d'être scolarisé vivant hors de France, dont la valeur dépendrait du pays.

Ce chèque Éducation pourra être utilisé exclusivement pour financer un enseignement du français ou en français, soit au sein d'un établissement du réseau AEFE, mission laïque française, Institut français, Alliance française, soit en école privée, et avec un objectif de suivi par acquisition obligatoire de certification DELF (diplôme enseignement de langue française) du Centre international d'études pédagogique (CIEP).

Ce chèque nécessite de transférer 30 millions d'euros du programme 151 vers le programme 185, et notamment son action n°2 « Coopération culturelle et promotion du français ».

L'attribution et le suivi seraient confiés à l'Institut français, dont la mission est justement d'assurer la promotion de la langue française en s'appuyant sur un réseau d'alliances françaises et d'instituts français bien plus développé et décentralisé que celui de l'AEFE, afin de toucher davantage de familles.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - C'est un amendement d'appel, mais il priverait les bourses scolaires de 30 millions d'euros, soit presque 30 % de leur budget. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Il ne faut pas déshabiller Pierre pour habiller Paul mais réfléchir à la capacité de nos établissements à diffuser le français. Cela réclame un travail de fond.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Cet amendement tombe au mauvais moment ; alors que les Français expriment leur colère contre l'injustice sociale, comment instaurer un chèque Éducation qui serait d'un même montant pour toutes les familles, en prenant des moyens aux bourses qui, elles, dépendent des revenus ?

M. Olivier Cadic.  - Je ne souhaite pas retirer de l'argent aux bourses scolaires : le montant aurait été compensé par l'AEFE. N'êtes-vous pas gêné qu'on n'apprenne pas le français à tant de jeunes Français ?

M. Jean-Marc Todeschini.  - Rien à voir !

M. Olivier Cadic.  - À quoi servent les grandes déclarations sur la francophonie ? Il faut rechercher des solutions, expérimenter.

L'amendement n°II-269 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-270, présenté par M. Cadic.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

1 000 000

1 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

1 000 000

1 000 000

Présidence française du G7

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

M. Olivier Cadic.  - Initié en 2001 par le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, à l'initiative d'élus représentant les Français établis hors de France, le dispositif FLAM - Français LAngue Maternelle - soutient des associations qui proposent à des enfants français établis à l'étranger, dans un contexte extrascolaire, des activités permettant de conserver la pratique du français en tant que langue maternelle et le contact avec les cultures française et francophones.

Les associations peuvent bénéficier de subventions d'appui au fonctionnement au démarrage de leur projet, ainsi que de subventions pour l'organisation de regroupements régionaux d'associations FLAM.

Cet amendement vise à développer le programme FLAM en lui affectant un budget dédié, et à en transférer la gestion à l'Institut français, dont la mission est justement d'assurer la promotion de la langue française en s'appuyant sur un réseau d'alliances françaises et d'instituts français bien plus développé et décentralisé que celui de l'AEFE.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

M. Olivier Cadic.  - Je le retire, tout en maintenant que FLAM serait mieux géré par les instituts français...

L'amendement n°II-270 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-38, présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

3 100 000

3 100 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

TOTAL

3 100 000

3 100 000

SOLDE

- 3 100 000

- 3 100 000

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit 8,6 millions d'euros de plus pour les dépenses protocolaires, pour l'organisation de la réunion ministérielle « affaires étrangères » du G7.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Retrait ; je reviens du G20 où j'ai donné rendez-vous à mes collègues du G7. Dès demain, je leur expliquerai que cette réunion ne peut avoir lieu car le Sénat a voté la suppression de son financement...

L'amendement n°II-38 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-402, présenté par M. Yung.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

14 700 000

14 700 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

14 700 000

14 700 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

TOTAL

14 700 000

14 700 000

14 700 000

14 700 000

SOLDE

0

0

M. Richard Yung.  - Les crédits de sécurité alloués aux établissements scolaires à l'étranger ont leur importance dans le contexte actuel. Inscrits au programme 185, ils ont été transférés dans le compte d'affectation spéciale Immobilier ; ce qui signifie qu'ils devront être remboursés. Je crains qu'on ouvre ainsi la voie à une réduction de ces crédits. D'où ma proposition de les réaffecter au programme 185.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Cela priverait le programme 105 de 14,5 millions d'euros. L'enjeu est celui du remboursement de ces avances.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable. L'affectation de 100 millions d'euros sur un compte spécial a été décidée à ma demande après une discussion vigoureuse avec le ministre de l'Action et des Comptes publics, après mon déplacement à Ouagadougou où, si nous n'avions pas effectué des travaux dans l'Ambassade, il y aurait eu des morts. D'où mon projet d'accélérer la sécurisation des sites sensibles, ambassades, centres culturels, lycées.

Les 14,5 millions d'euros dont vous parlez sont déjà utilisés. Le remboursement sera effectué à partir de 2021 sur un parc immobilier largement agrandi. C'est du gagnant-gagnant.

L'amendement n°II-402 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-511, présenté par M. Leconte et Mme Lepage.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

8 000 000

8 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

8 000 000

8 000 000

Présidence française du G7

TOTAL

8 000 000

8 000 000

8 000 000

8 000 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Yves Leconte.  - Oui, il y a des enfants français qui ne sont pas scolarisés dans notre réseau, faute de pouvoir payer des frais de scolarité, de l'ordre de 5 000 jusqu'à à 20 000 euros, par an. Et les bourses ne sont que partielles. Il est essentiel de revoir le barème pour que les familles puissent scolariser leurs enfants. Pour une école inclusive, des auxiliaires de vie scolaire doivent pouvoir être mises à disposition et il faut dégager des bourses à cette fin.

Enfin, des voies de recours doivent être prévues et systématiquement expliquées aux familles, car parfois les bourses attribuées en première commission ne suffisent pas. C'est une souffrance de voir dans le projet de loi de finances rectificative 2018 11 millions d'euros revenir au budget général, alors que nombre de familles ne peuvent pas scolariser leurs enfants faute de moyens. Mon amendement est identique à l'amendement n°II-468. Il aurait dû tomber.

L'amendement n°II-511 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-469, présenté par Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Diplomatie culturelle et d'influence

dont titre 2

5 000 000

5 000 000

Français à l'étranger et affaires consulaires

dont titre 2

Présidence française du G7

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

0

Mme Claudine Lepage.  - Cet amendement double l'augmentation de crédit de 5 millions d'euros décidée par le Gouvernement en abondant le budget par un montant équivalent en faveur de la coopération culturelle et de la promotion du français. Ce doublement des crédits obéit à la conviction que l'apprentissage, ainsi que la promotion de la langue française et du plurilinguisme, constituent une nécessité et un atout dans la mondialisation, de même qu'un facteur de diversité indispensable. Ce doublement des crédits viendrait renforcer les dotations aux Instituts français et les subventions aux Alliances françaises qui en ont besoin pour être de véritables acteurs de la modernisation de l'offre éducative et de la coopération linguistique.

M. le président.  - Amendement identique n°II-564, présenté par MM. Capus, Bignon, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot et M. Wattebled.

M. Alain Fouché.  - Je souhaite rappeler les effets néfastes de la suppression de la réserve parlementaire, qui n'a pas été redistribuée, mais conservée dans les caisses de l'État.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Retrait ou avis défavorable. On a voté 600 000 euros de plus pour l'Alliance française.

Mme Claudine Lepage.  - Pour la Fondation Alliance française, à Paris. Ce n'est pas la même chose...

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Avis défavorable quand même.

Mme Claudine Lepage.  - L'Institut français est un EPIC dont le siège est à Paris.

La Fondation Alliance française en est distincte. Quand on lui accorde une subvention, les alliances françaises du réseau n'en bénéficient pas forcément.

Les amendements identiques nosII-469 et II-564 ne sont pas adoptés.

Les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » sont adoptés.

L'article 71 ter est adopté.

Articles additionnels après l'article 71 ter

M. le président.  - Amendement n°II-517, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Après l'article 71 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour l'application du plafond des autorisations d'emplois du programme « Diplomatie culturelle et d'influence » de la mission « Action extérieure de l'État », le calcul du montant des équivalents temps plein travaillés attribué à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger s'effectue par l'addition des prorata de rémunération de chaque équivalent temps plein travaillé qui ne sont pas financés par une ressource extrabudgétaire.

M. Jean-Yves Leconte.  - Le président de la République annonce le doublement du nombre d'élèves dans les États conventionnés et pourtant, les plafonds d'emplois de l'AEFE diminuent. Je propose de calculer les ETP sur la base de la part prise en charge par l'État et non pas par l'établissement scolaire. À la page 125 du bleu budgétaire on indique que le calcul vaut hors plafond dans le budget. Pourtant, ce plafond s'applique à l'AEFE. Comment expliquer cette contradiction ?

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - De mémoire, nous avions donné un avis défavorable à un amendement similaire que vous aviez déposé l'an dernier. Par cohérence, même avis.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Avis défavorable, même si la question est pertinente. Il serait prématuré d'y apporter des réponses au détour d'un amendement.

L'amendement n°II-517 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-513, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Après l'article 71 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après le 6° du II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° Réduction d'impôt accordée au titre des frais de scolarité des enfants poursuivant des études du premier ou du second degré dans un établissement français d'enseignement à l'étranger

« Art. 199 quater ...  -  I.  -  Les contribuables peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu lorsque les enfants qu'ils ont à leur charge, au sens de l'article 196, sont scolarisés dans les enseignements du premier ou du second degré dans des établissements français d'enseignement à l'étranger, mentionnés au titre V du livre IV de la deuxième partie du code de l'éducation, durant l'année scolaire en cours au 31 décembre de l'année d'imposition.

« La réduction d'impôt s'applique également lorsque l'enfant est majeur et âgé de moins de vingt-et-un ans, qu'il a opté pour le rattachement au foyer fiscal dont il faisait partie avant sa majorité, en application du 3 de l'article 6 du présent code, dès lors qu'il est scolarisé dans un enseignement du second degré durant l'année scolaire en cours au 31 décembre de l'année d'imposition en vue de l'obtention du baccalauréat.

« II.  -  La réduction d'impôt est égale aux frais de scolarité engagés par les contribuables, déduction faite de la part prise en charge par l'employeur ou par une bourse, mentionnée au 5° de l'article L. 452-2 du code de l'éducation.

« Son montant est divisé par deux lorsque l'enfant est réputé à charge égale de l'un et l'autre de ses parents.

« III.  -  Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné à la condition que soient mentionnés sur la déclaration des revenus, pour chaque enfant concerné, ses nom et prénom, le nom de l'établissement scolaire et la classe qu'il fréquente.

« Le 5 du I de l'article 197 est applicable.

« IV.  -  Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »

II.  -  Le I ne s'applique qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Yves Leconte.  - Cet amendement propose que les frais de scolarité payés par un contribuable donnent lieu à réduction d'impôt. Je ne comprends pas pourquoi cet amendement intervient à cette étape de la discussion.

M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Une réduction d'impôt spécifique aux Français de l'étranger ? Et pourquoi pas pour les autres, qui ont aussi des frais de scolarité pour leurs enfants ? La mesure que vous proposez a un coût que vous n'avez pas établi, mais que nous continuons à évaluer à 650 millions d'euros au bas mot, pour 125 000 personnes. C'est hyper-coûteux. L'avis est hyper-défavorable. (Sourires)

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis.  - Garantissez-les crédits du G7 !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis, avec le même superlatif.

M. Jean-Yves Leconte.  - Je préfère ne pas chiffrer que de sortir des chiffres aussi déraisonnables. Les frais de scolarité avoisinent les 2 milliards à 2,2 milliards d'euros pour l'ensemble des parents d'élèves d'établissements français à l'étranger. Or 90 % d'entre eux au moins sont contribuables dans leur pays de résidence. Comment pouvez-vous arriver à un montant de réduction d'impôt équivalent au quart de ce que paient les familles ?

Les frais de scolarité vont de 4 000 euros à 15 000 euros par enfant et par an, bien supérieurs à ceux qui sont normalement pratiqués dans les établissements privés situés en France. Chaque famille qui paie ces frais contribue au rayonnement de la France et il n'y pas parmi elles que des Français de l'étranger.

L'amendement n°II-513 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-516, présenté par M. Leconte et Mme Lepage.

Après l'article 71 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'article L. 452-8 du code de l'éducation, après les mots : « des frais de scolarité », sont insérés les mots : « , du produit des frais de cession ».

M. Jean-Yves Leconte.  - Pour la première fois en 2018, une partie d'un établissement public a été cédée à une personne privée sans appel préalable à manifestation d'intérêt et sans protocole d'accord. C'est inacceptable. Cet amendement exige que l'AEFE précise le produit des frais de cession qu'elle opère en son sein dans le rapport qu'elle remet chaque année.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis favorable. D'autant que cela ne coûte rien.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-516 est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°II-515, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Après l'article 71 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les établissements scolaires établis à l'étranger, homologués par l'éducation nationale et accueillant du personnel détaché direct par l'éducation nationale, paient annuellement à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger une redevance de :

1° 4 000 € par détaché direct s'il y a moins de 2,5 détachés directs pour 100 élèves inscrits dans le cursus homologué, ou si le cursus a moins de 30 élèves et un maximum d'un détaché ;

2° 10 000 € par détaché direct s'il y a plus de 2,5 détachés pour 100 élèves dans le cursus homologué.

M. Jean-Yves Leconte.  - On est passé de 2 190 à 2 490 personnes détachées directes dans le réseau homologué. Cela a un coût car une partie des pensions de retraite sont prises en charge par l'État. Je propose un dispositif donnant à l'État 10 millions d'euros supplémentaires pour faire face à ce coût réel mais caché. Nous ne pouvons pas continuer à recruter des détachés directs, dont les établissements payent le salaire, mais qui coûtent ensuite autant à l'État.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Avis défavorable, comme l'an dernier, même si la question est pertinente. Cet amendement conduirait à mettre en place une redevance des établissements partenaires.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - Retrait ou avis défavorable même s'il faut étudier la question dans un cadre plus vaste. Une réflexion est en cours.

M. Jean-Yves Leconte.  - Soit. Il faudra étudier la question.

L'amendement n°II-515 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-519, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage.

Après l'article 71 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois à compter de la publication de la présente loi, le ministre chargé de l'économie et le ministre des affaires étrangères remettent au Parlement un rapport portant sur l'application de l'article 51 de la loi de finances rectificative pour 1964 (n° 64-1278 du 23 décembre 1964), complété par l'article 89 de la loi n° 70-1199 de finances pour 1971.

M. Jean-Yves Leconte.  - Le décret du 4 octobre 1971 précise les modalités d'attribution de la garantie de l'État prise en vertu des dispositions de la loi de finances pour 1971 pour les écoles françaises à l'étranger développant des projets immobiliers.

Toutefois, la Direction générale du Trésor a décidé en août 2018 de ne plus participer aux comités des prêts qui permettaient l'étude des demandes de garantie.

On ne peut pas bloquer, voire abandonner des projets à cause de l'incertitude où nous sommes placés quant aux garanties de l'État.

M. Rémi Féraud, rapporteur spécial.  - Nous demandons un rapport sur ce sujet. Avis plutôt favorable, même s'il s'agit d'une demande de rapport, utile en l'occurrence.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre.  - oui, c'est un vrai sujet et il faut que des propositions soient faites. Sagesse.

L'amendement n°II-519 est adopté et devient un article additionnel.

La séance est suspendue à 19 h 55.

présidence de M. David Assouline, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de paiement alloués à la mission - soit 27 milliards d'euros - progressent de plus de 500 millions d'euros, ce qui doit cependant être rapproché des 200 millions d'annulations de crédits dans le projet de loi de finances rectificative pour 2018. Ce que la loi de finances initiale donne, une loi de finances rectificative peut le reprendre, ce qui limite la portée de notre vote...

Le budget de l'enseignement supérieur stricto sensu s'inscrit dans la trajectoire dessinée par la loi de finances pour 2018. Les programmes 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » et 231 « Vie étudiante » connaissent une légère progression, un peu plus de 1 %, soit 173 millions d'euros.

Ce budget est globalement satisfaisant dans le contexte budgétaire actuel. De plus, il faut prendre en considération les crédits consacrés à l'enseignement supérieur et à la recherche à travers le Grand plan d'investissement (GPI), qui s'élèvent à 645 millions d'euros.

Je partage les principales orientations de la politique qui sous-tend ce budget, en particulier le plan Étudiants et l'importance accordée à l'orientation. C'est en orientant mieux les étudiants que l'on réduira l'échec en licence, qui touche 40 % des étudiants, et que l'on améliorera l'insertion professionnelle des jeunes. Voilà pour le point positif.

J'observe en revanche que, cette année encore, des dépenses salariales contraintes ne sont pas intégralement budgétées, et ce à hauteur de 50 à 100 millions d'euros. Il est insupportable qu'une dépense certaine ne soit pas prévue. Le glissement vieillesse-technicité (GVT) des établissements, dépense obligatoire, ne pourra pas être couvert. Par ailleurs, beaucoup d'emplois budgétés ne sont pas créés : ils servent de variable d'ajustement. Ce n'est pas une bonne méthode ! Cela réduit la portée des moyens annoncés.

S'agissant des dotations des universités, la subvention pour charge de service public est peu revalorisée d'une année sur l'autre. Il faudrait un pilotage plus fin.

Les ressources propres des universités ne représentent en moyenne que 16 % de leurs dépenses de fonctionnement, ce qui est tout à fait insuffisant. On espère que la valorisation de la recherche pourra faire évoluer cette situation. Les frais d'inscription demeurent extrêmement faibles. Le Premier ministre a annoncé que les étudiants non européens pourraient voir leurs cotisations augmenter substantiellement, potentiellement de 170 euros à 2 700 euros. Un rapport de la Cour des comptes recommande d'augmenter les frais d'inscription pour les étudiants français également, du moins en master et en doctorat. Je milite chaque année pour améliorer la situation des étudiants en augmentant les frais d'inscription. On accepte plus facilement de payer une cotisation à un club de sport que des frais d'inscription ! Les étudiants en licence contribuent pour moins de 2 % au coût de la formation : il y a de la marge. Cela dit, ces nouvelles ressources devraient être réellement mises au service des étudiants, de leur environnement et de la pédagogie... Elles ne devraient pas être utilisées pour couvrir, par exemple, le GVT. Madame la ministre, pouvez-vous nous l'assurer ?

Le soutien à l'enseignement privé progresse de 2,5 % par rapport à 2018, après une diminution de 45 % entre 2008 et 2018. Un étudiant inscrit dans un établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (Eespig) est peu soutenu par l'État : moins de 600 euros par étudiant, alors que le coût par étudiant s'élève à plus de 9 000 euros. L'économie que représentent les 100 000 étudiants concernés pour le budget de l'État s'élève à environ 800 millions d'euros ! La commission vous proposera donc d'adopter un amendement tendant à augmenter la dotation allouée à ces établissements, dont certains ont de réelles difficultés.

Les crédits du programme 231 « Vie étudiante » connaissent des changements modestes. Le produit de la contribution vie étudiante et de campus (CVEC) affecté la vie étudiante est plafonné : ce n'est pas satisfaisant. Cette taxe n'a pas vocation à contribuer à l'équilibre des finances publiques !

Les cotisations pour les mutuelles étudiantes, qui s'élevaient en moyenne à 217 euros par étudiant, sont remplacées par cette CVEC, qui sera de l'ordre de 90 euros. L'allégement de coût qui en résulte pour les étudiants est plutôt une bonne chose. En revanche, la méthode employée a quelque chose de peu convenable : tous les étudiants paieront cette contribution, y compris ceux qui sont inscrits dans des Eespig, alors que ces derniers recevront seulement 20 euros en retour, contre 40 pour ceux des établissements publics. Allez-vous remédier à cette inégalité de traitement ?

Compte tenu de toutes ces observations, la commission est favorable à l'adoption des crédits de la mission, sous réserve de l'amendement que je vous présenterai.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission Recherche voit ses crédits progresser pour la deuxième année consécutive, dans un contexte budgétaire contraint. C'est le reflet d'une priorité accordée à cette mission, qui constitue l'exemple même d'une dépense d'avenir.

La somme des budgets des programmes « Recherche » devrait atteindre 11,75 milliards d'euros au titre des autorisations d'engagement et 11,86 milliards d'euros au titre des crédits de paiement en 2019, ce qui représente une hausse de 274 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit 2,4 %. Les crédits alloués aux programmes 172 « Recherches scientifiques et techniques pluridisciplinaires » et 193, « Recherche spatiale » se situent à 8,7 milliards d'euros en autorisations de programme et 8,8 milliards en crédits de paiement : des hausses, respectivement, de 3,9 % et de 4,5 %.

La recherche spatiale absorbe les deux tiers de la hausse des crédits, avec 1,8 milliard d'euros. Il s'agit de financer les engagements de la France dans le programme Ariane 6 et d'apurer la dette de notre pays à l'égard de l'Agence spatiale européenne. Notre contribution franchira du reste cette année le milliard d'euros.

Autre fait saillant, le relèvement des moyens financiers de l'Agence nationale de la recherche (ANR). L'objectif défini par le président de la République sera-t-il atteint, redonner à l'ANR des moyens dignes de ceux des agences étrangères ? Non. La hausse de ces crédits doit donc demeurer prioritaire, afin que la part de la recherche sur projet se rapproche de la moyenne européenne, 24 %. Les chercheurs français peinent à obtenir des crédits européens !

Enfin, le plan Intelligence artificielle bénéficiera de 17 millions d'euros, à quoi s'ajoutent les 12 millions en provenance du Programme d'investissements d'avenir, afin de créer un réseau d'instituts dédiés. Je me félicite qu'une vraie stratégie soit définie en la matière, mais les moyens, très en deçà de ceux annoncés par le Gouvernement, sont peu traçables. L'intelligence artificielle européenne est seule capable de nous éviter une dépendance à l'égard des géants mondiaux !

Plusieurs situations d'impasse budgétaire à moyen et long terme m'ont été signalées, appelant à une gestion plus prospective des crédits dédiés aux organismes de recherche.

Ainsi, le CEA se trouvera confronté à un surcoût de plusieurs centaines de millions d'euros pour la construction du réacteur Jules Horowitz. De même les plans de santé commandés par le Gouvernement à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ne bénéficieraient pas de financements adéquats.

À plus long terme, l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) devra faire face à des besoins de financement de l'ordre de 500 millions d'euros pour le renouvellement de la flotte océanographique, sans qu'aucun plan d'investissement à moyen terme ait été élaboré à ce jour. Cependant, lors du comité interministériel de la mer du 15 novembre, le Premier ministre a annoncé le lancement d'une réflexion pour le maintien de la capacité opérationnelle de la flotte scientifique et la modernisation de ses équipements. Je ne saurais que soutenir cette démarche et inviter le Gouvernement à anticiper au mieux les besoins de financement de l'institut. Il s'agirait d'un vrai choix en faveur d'une politique d'excellence.

À l'inverse, les programmes de la mission qui ne dépendent pas du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche verront pour la plupart leurs moyens stagner, voire diminuer en 2019. Ce sera notamment le cas des programmes 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle », 191 « Recherche duale (civile et militaire) » et 186 « Recherche culturelle et culture scientifique ».

Deux exceptions à cette tendance morose. En premier lieu, le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricole », qui porte notamment les crédits de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et de l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (Irstea), voit ses crédits progresser de 2 %. L'année 2019 sera marquée par la fusion de ces deux organismes au 1er janvier 2020.

M. Jérôme Bascher.  - Il était temps !

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Selon les informations qui m'ont été communiquées, la préparation se déroulerait dans de bonnes conditions.

En second lieu, le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » bénéficiera d'une hausse de 5,8 millions d'euros en autorisations d'engagement. La dotation de l'IFP Énergies nouvelles (Ifpen), hélas, recule.

Si le CIR est une dépense fiscale considérable, à 6,2 milliards, il a un effet positif manifeste : il doit être maintenu, afin que la France, cinquième puissance scientifique, ne se laisse pas distancer dans la compétition mondiale.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits, qui sont en hausse importante. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. André Gattolin applaudit également.)

M. Daniel Dubois, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques .  - Notre commission a émis un avis favorable aux crédits, qui marquent un nouvel effort pour la recherche.

Premier poste d'augmentation, la politique spatiale européenne doit s'engager dans une réduction des coûts et un effort d'innovation. Une préférence européenne devrait également s'opérer au profit de nos lanceurs, c'est une question de souveraineté européenne...

Sur l'ANR, l'effort doit être amplifié, pour parvenir à un taux de sélection de 20 % et éviter le découragement des chercheurs.

Le programme 190 nous inquiète. L'Ifpen subit une baisse continue de ses crédits. Sur le programme 192, le recul des aides à l'innovation versées par Bpifrance doit cesser !

La suppression du fonds unique interministériel manifeste un désengagement de l'État à l'égard des pôles de compétitivité : cela pourrait conduire à l'assèchement financier. La répartition État-régions dans la phase 4 doit être mieux définie.

La stratégie nationale pour l'intelligence artificielle n'a que trop tardé, mais elle a le mérite d'exister ; le montant de 1,5 milliard sur cinq ans peut sembler impressionnant, il ne l'est pas au regard des investissements des États-Unis ou de la Chine. En outre, seulement 9 % de ce total correspond à des crédits nouveaux. Ne perdons plus de temps, développons des coopérations bilatérales et pesons sur la politique européenne.

Une requête enfin : que la ventilation des crédits affectés aux plans soit plus précise dans les documents budgétaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; MM. Max Brisson et Bruno Retailleau applaudissent également ; applaudissements sur le banc de la commission)

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication .  - La recherche à moyen terme est menacée ; le financement sur appel à projets prend de plus en plus d'importance au détriment des dotations.

De plus, la non-compensation du glissement vieillissement technicité (GVT) conduit les établissements à ne pas utiliser leurs plafonds d'emploi. Ce recul des effectifs n'est pas supportable à long terme.

Cette année, 17 millions d'euros supplémentaires sont affectés aux plans Santé confiés à l'Inserm. Nos alertes ont porté leurs fruits ! Mais la stratégie nationale de santé publique ne mériterait-elle pas une inscription de crédits en loi de finances initiale ?

Trois recommandations pour conclure. Revaloriser les salaires des chercheurs, réussir la fusion entre l'INRA et l'Instea, rétablir le lien de confiance entre l'État et le CEA, vitrine de la recherche française. Donnez au plateau de Saclay les moyens de ses ambitions... à commencer par des infrastructures de transport ! Il est urgent de mener à bien la ligne 18 du métro du Grand Paris. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur le banc de la commission)

M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication .  - Au sein de la Mires, le programme 150 augmente de 1,2 %. Mais l'inflation est de 1,7 %, l'augmentation des effectifs de 2,5 %.

Les établissements d'enseignement supérieur ont des charges contraintes importantes, dont le GVT. Elles sont imposées par des décisions de l'État, mais celui-ci ne les compense pas intégralement. Si bien que les conditions des études supérieures, contrairement à l'objectif du Gouvernement, ne seront que peu améliorées.

Je proposerai une réévaluation sur trois ans de la dotation aux Eespig, à 1 000 euros par étudiant - grâce à une ponction sur le fonds mobilité, car il est porté à 30 millions alors qu'il a été très peu consommé. Le plafonnement de la CVEC interroge également.

Il conviendra, après la loi relative à l'orientation et la réussite des étudiants, d'observer si le taux d'échec en licence diminue. J'ajoute qu'il subsiste 120 000 places vacantes après l'entrée en vigueur Parcoursup.

Le programme 231 « Vie étudiante » est marqué notamment par une suppression de la cotisation d'assurance maladie, en partie compensée par la CVEC, ainsi que par une baisse symbolique des frais de scolarité et un versement plus rapide des bourses.

La commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nelly Tocqueville, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - La commission de l'aménagement du territoire s'est saisie du programme 190, dont les crédits sont stables, ce qui cache des évolutions inégales entre les sept opérateurs financés.

Le CEA reçoit 75 % de la subvention pour charges de service public prévue par le programme. Cet organisme mène d'importants travaux sur l'utilisation de l'hydrogène dans les mobilités ; c'est un domaine dans lequel la France a encore de l'avance mais pour combien de temps ? L'AIIemagne a mis en service un premier train à hydrogène en Basse-Saxe...

La subvention à l'Ifpen est passée de 169 millions à 128 millions d'euros entre 2010 et 2018. Or cet institut soutient des projets avec les PME pour partenaires. Vous vous êtes prononcée à l'Assemblée nationale en faveur d'un redéploiement de crédits au profit de cet institut : maintenez-vous cette disposition, madame la ministre ? Quelles seront les modalités ?

Il faut maintenir les crédits du programme 190, qui contribue à décarboner l'économie, à la rendre plus compétitive sur les énergies renouvelables et la transition écologique.

Notre commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable à l'adoption des crédits mais restera vigilante.

M. Antoine Karam .  - (M. André Gattolin applaudit.) Ce domaine hautement stratégique pour la France conditionne la performance de nos économies et constitue un levier de développement pour nos territoires outre-mer. L'enseignement supérieur est pour eux une porte ouverte sur le monde, il faut les accompagner vers la réussite !

La mission Recherche et enseignement supérieur est l'une des mieux préservées de ce budget : 549 millions de hausse et un total de 25 milliards. Tant mieux.

La mise en oeuvre de la loi Orientation et réussite des étudiants a connu des difficultés mais Parcoursup a donné satisfaction - raccourcissement du calendrier, mobilité inter-académique, présentation des offres de formation... Le comité scientifique et éthique de Parcoursup vous remettra bientôt son rapport.

Le budget Enseignement supérieur, doté de 13,6 milliards d'euros, en hausse de 166 millions, poursuit la mise en oeuvre des plans étudiants avec pour objectifs un moindre échec en licence, une amélioration des conditions de la vie étudiante. Il faudra veiller, dans le projet de loi de finances rectificative, à ce que l'argent de la vie étudiante aille à la vie étudiante.

La suppression des 217 euros de cotisation à la sécurité sociale a pour la première fois réduit le coût de la rentrée. C'est loin d'être négligeable !

En 2019, l'autonomie des établissements devra être affirmée et leur rayonnement international renforcé. Le processus de Bologne implique une reconnaissance mutuelle des formations. Pour autant, l'université de demain, dans nos territoires d'outre-mer, doit aussi s'inscrire dans son environnement régional.

Avec 8,66 milliards d'autorisations d'engagement et 8,76 milliards de crédits de paiement, les crédits de la recherche spatiale progressent considérablement. En particulier, 205 millions d'euros sont destinés à sécuriser le développement du lanceur Ariane 6. Le centre spatial guyanais a lancé en septembre dernier le centième tir d'Ariane 5...

M. Jérôme Bascher.  - Pour dix échecs !

M. Antoine Karam.  - La concurrence s'accroît, il y a là un défi à relever. Les associations écologiques veulent spécialiser la Guyane dans l'économie de la connaissance, elles oublient nos 22 % de chômeurs... Oui à la revalorisation de notre biodiversité, mais avec quels investisseurs ?

Saurons-nous avoir la même volonté forte que le général de Gaulle en 1964, lorsqu'il a installé le centre spatial de Guyane ? (MJérôme Bascher approuve.)

Il est essentiel d'articuler recherche fondamentale, recherche appliquée, économie bleue, économie circulaire, bref tout ce qui converge vers la transition écologique, voie incontournable.

Notre groupe votera ces crédits. (MM. André Gattolin et Jérôme Bascher applaudissent.)

M. Pierre Ouzoulias .  - Les chercheurs, les syndicats, et plusieurs sociétés savantes sont plongés dans l'inquiétude. Ils déplorent le décrochage de la recherche française, à laquelle on consacrait 2,23 % du PIB en 2015, mais seulement 2,19% en 2019. L'objectif de 3 % s'éloigne... La Belgique a dépassé la France en 2012 sur ce critère. L'Allemagne, elle, approche les 3 %. Les dépenses de recherche et développement des industries baissent de 3,2 %. Résultat : l'emploi des chercheurs baisse de 1 %.

Jean Bodin affirmait : il n'y a richesse ni force que d'hommes. Or les effectifs des opérateurs publics se réduisent. Les plafonds d'emploi sont préservés mais ils ne sont jamais atteints ! Où est la sincérité ?

Je salue l'analyse de M. Rapin : il montre bien que les mesures salariales ne sont jamais compensées intégralement, si bien que les organismes sont contraints de comprimer leur masse salariale, donc de réduire le nombre de chercheurs employés : encore 50 pour le CNRS, qui aura perdu 1 000 postes depuis 2011.

Quel signal négatif ! Le départ à l'étranger est devenu la seule issue pour une génération entière de chercheuses et de chercheurs. Il en résulte une perte d'influence de la recherche française. Votre ministère n'a-t-il d'autre vocation que de l'accompagner ?

Le nouveau Fonds pour l'industrie et l'innovation a fonctionnement totalement différent du CIR - qui mobilise 6 milliards d'euros pour des résultats que la représentation nationale considère comme non quantifiables. Les modalités d'intervention du fonds sont plus conformes aux pratiques des autres pays, avec un pilotage par un conseil de l'innovation, une convention passée pour chaque action et une restitution évaluée. Pourquoi ne pas l'appliquer au CIR ?

L'enseignement supérieur souffre d'un désinvestissement croissant de l'État ; conséquence, le taux d'encadrement des étudiants ne cesse de diminuer : entre 2013 et 2016, 76 % seulement des emplois ont été effectivement ouverts au recrutement.

Pourquoi n'avons-nous pas de bilan de Parcoursup ? Il semble que des discriminations aient été signalées.

Nous voterons contre ce budget, qui organise le déclin. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Françoise Laborde .  - (MM. Alain Fouché, Yves Bouloux, Mme Brigitte Lherbier et M. François Bonhomme applaudissent.) « L'infériorité de la France a surtout été intellectuelle ; ce qui nous a manqué, ce n'est pas le coeur, mais la tête » écrivait Ernest Renan, méditant sur la défaite de 1870, dans La réforme intellectuelle et morale. Vous avez dévoilé une stratégie nationale pour la recherche, avec 665 millions de crédits, portés à 1 milliard pour 2019-2022. Pour éviter la fuite des cerveaux, il faudrait doubler le salaire des enseignants-chercheurs, comme le suggère dans un rapport Cédric Villani.

Il est difficile d'évaluer le coût de l'enseignement à la recherche. Ce budget, avec une hausse de 2,4 % sur les autorisations d'engagement et 2,9 % sur les crédits de paiement, reste en deçà de nos espérances. Et la hausse est due aux crédits du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche, alors que les dotations aux programmes relevant d'autres ministères stagnent.

Au sein de la Mires, certains organismes de recherche sont dans une impasse budgétaire : CEA, Inserm, Ifremer... Et la réforme de l'ISF a fait chuter les dons de 50 %, au moins, selon France Générosité, aux dépens des organismes de recherche qui en recevaient, comme le CNRS. Enfin le plan « Étudiants » avec 123 millions d'euros supplémentaires, ne dégage que 26 millions pour les actions nouvelles.

Il faut un pilotage plus fin des ressources des opérateurs. Malgré ces zones d'inquiétude, notre groupe votera ces crédits, car il faut investir dans la France de la connaissance ; et ce budget en hausse a aussi des aspects positifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE, MM. Bernard Lalande, André Gattolin, Mme Annick Billon, M. Alain Fouché, Mmes Esther Benbassa, Brigitte Lherbier et M. François Bonhomme applaudissent.)

M. Alain Fouché .  - La Mires, qui prépare l'avenir, augmente de plus de 5 % en deux ans, à 28,17 milliards de crédits de paiement. Nous nous approchons de l'objectif de 3 %, mais nous restons loin de la Corée du Sud, d'Israël ou du Japon, ces véritables puissances de la recherche.

Une grande partie des crédits de la recherche spatiale va aux remboursements à l'Agence spatiale européenne, mais une petite part ira à la sécurisation du lancement d'Ariane 6 en 2020. La France doit s'adapter à la nouvelle économie de la connaissance et de l'immatériel, où la concurrence se fait sur la capacité à innover.

Il faut donc augmenter le niveau de qualification. Si le diplôme reste le meilleur rempart contre le chômage, l'accès à la formation tout au long de la vie doit être la deuxième priorité.

Le Gouvernement favorise les passerelles et développe une culture de l'émancipation et du rebond, à juste titre.

Nous soutenons les mesures pour l'enseignement supérieur et la recherche. Mais pourquoi diminuer de 5 millions l'enveloppe consacrée à l'aide au mérite, fer de lance de l'émancipation, dans les milieux défavorisés ? La France, pays aux 68 prix Nobel, se classe au quatrième rang pour les brevets, mais n'est que septième en nombre de publications scientifiques. Le soutien de l'État, via le CIR, est fondamental. Le programme 172 renforce les liens entre recherche et entreprise ; le programme 190 est un peu décevant.

Le groupe Les Indépendants votera ces crédits.

Mme Sylvie Robert .  - Vous avez déclaré, madame la ministre, que le plan Étudiants devait faciliter les recrutements et l'entrée des jeunes dans le supérieur. De ce point de vue, les résultats sont au rendez-vous, avec 30 000 places ouvertes, mais il faudrait 400 millions en plus pour suivre la démographie - alors que les établissements d'enseignement supérieur reçoivent 206 millions de crédits supplémentaires, dont seulement 26 millions pour des actions nouvelles, tant les dépenses contraintes sont importantes - GVT et compensation de la CSG, en particulier.

Assurer la réussite des étudiants, c'est bien les orienter. Parcoursup a fonctionné comme outil d'affectation, mais en tant qu'outil d'orientation le doute est permis. Acceptation d'une formation ne vaut plus satisfaction, et avec la fin de la hiérarchie des voeux, on ne sait pas ce qui est choisi, et ce qui est subi. Cela mériterait une enquête nationale qualitative sur Parcoursup - seule manière de lever les doutes, madame la ministre, et d'évaluer cet outil sur des bases sérieuses.

Le nombre élevé de candidats - 53 700 - ayant quitté la plateforme interroge. A-t-on des données sur le décrochage ?

Sur le volet vie étudiante, je salue la poursuite de l'effort engagé sous le précédent quinquennat de construction de logements - 60 000 d'ici 2022 -, le gel du prix du ticket U et la suppression de la cotisation d'assurance-maladie.

En revanche, l'utilisation de la CVEC pose problème puisque tout dépassement du plafond de collecte alimente le budget de l'État - augmentez donc ce plafond, puisque notre groupe n'a pu le faire par amendement !

Deuxième inquiétude, la très forte hausse, non concertée, des frais de scolarité des étudiants extra-européens. Vous annoncez le triplement des bourses : où en sont les crédits ? La Suède a pris cette voie - le nombre d'étrangers a chu de 80 % ! L'émoi est considérable. Est-ce ainsi que vous voulez atteindre 500 000 étudiants étrangers d'ici 2027 ?

Dynamisons le réseau culturel de la France, développons des formations de pointe reconnues à l'étranger, mais n'attirons pas les plus riches en écartant les plus pauvres ! (MM. Jean-Pierre Sueur et Jean-Yves Leconte applaudissent ; applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

La stratégie européenne de recherche Horizon 2020 est handicapée par la rémunération indigne des chercheurs. Madame la ministre, allez-vous lancer une réforme pour doter les chercheurs d'un véritable statut, protecteur et stimulant ?

La recherche culturelle et la recherche scientifique et technique subissent une nouvelle baisse qui touche surtout Universcience et je soutiens l'amendement de M. Fréville qui lui affecte 2 millions d'euros supplémentaires.

Enfin, la recherche sur les énergies renouvelables souffre d'une érosion des investissements publics, mis en lumière par le Commissariat général au développement durable en 2016 : 913 millions soit 0,05 % du PIB, c'est insignifiant. La dotation du CEA se répartit en 450 millions pour la recherche nucléaire, 51 millions pour les énergies non renouvelables...

La baisse des crédits de l'Ifpen est elle aussi préoccupante : il a perdu 4,5 millions depuis 2017.

Ces ambiguïtés reflètent les contradictions de la recherche énergétique française. Il faut un changement d'échelle, dit la Cour des comptes.

L'ambition affichée dans la loi d'orientation ne se retrouve pas dans ce projet de loi de finances. Dommage ! Le groupe socialiste ne votera pas les crédits. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

M. Laurent Lafon .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le consentement à l'impôt est remis en cause en ce moment, ce qui donne un grand relief à la discussion du troisième poste budgétaire de la Nation. Au moins ce budget tient-il compte de la pression démographique sur le système universitaire : de 2015 à 2025, la population étudiante aura augmenté de 21 % ; les crédits de paiement commencent enfin à suivre le mouvement.

La priorité doit être la lutte contre l'échec universitaire. Parcoursup va dans le bons sens. Le taux de validation des licences en quatre ans est de moitié en France, contre trois quarts en Allemagne et aux Pays-Bas. Il faudrait encourager l'accompagnement du « Oui, si » et soutenir les expérimentations de propédeutique comme celle que mène Paris-Descartes.

Un budget en hausse n'est pas forcément un bon budget. Chaque euro est-il toujours utile ? Répond-on aux besoins économiques et d'insertion ? Il subsiste des archaïsmes coûteux et chronophages comme la procédure de qualification du Conseil national des universités (CNU), et des filières où le nombre d'étudiants n'est plus significatif.

La demande pour les filières scientifiques est insuffisante : orientons mieux les jeunes, dès l'école. Le besoin de financement de l'enseignement supérieur a été évalué à 1 milliard en plus chaque année d'ici à 2020. Tout près, à Lausanne par exemple, on investit jusqu'à 1 million dans un doctorant.

Votre Gouvernement réduit de 8 % les droits de scolarité, après trois ans de gel, au détriment des ressources propres des universités. C'est pourquoi nous ne sommes pas opposés à l'augmentation des frais de scolarité pour les étudiants étrangers, si un effort est consenti sur les bourses.

La recherche gagne 330 millions d'euros cette année, après 830 millions l'an prochain, cela va dans le bon sens. La matière grise est déterminante dans l'attractivité d'un pays, dans l'économie. Le corollaire est bien sûr la rémunération des chercheurs, gage d'attractivité internationale. Le prix Nobel français François Jacob, soulignait qu'auparavant, la puissance d'une Nation se mesurait à son armée, mais aujourd'hui à son potentiel scientifique : tel est le défi !

Le groupe UC votera les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et Les Républicains)

Mme Catherine Procaccia .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Je félicite les chercheurs français, parmi les meilleurs du monde - 38 Nobel, dont cette année Gérard Mourou en physique. Insight vient de se poser sur Mars : son sismographe, qui va lui permettre d'explorer le sol, est français - et, même, Val-de-Marnais !

En cette période de restriction budgétaire, je ne verrai pas la coupe à moitié vide : le budget est à la hausse, tant mieux - même s'il aurait mieux valu un chiffre intégrant l'inflation. Avec 2,2 % du PIB, nous sommes loin des 3 % définis par la stratégie de Lisbonne.

La France respectera ses engagements vis-à-vis de l'Agence spatiale européenne (ESA), avez-vous annoncé ; je m'en félicite. Il faut y associer une préférence communautaire pour les lanceurs.

Depuis le premier Spoutnik, les débris spatiaux s'accumulent, entraînant un risque de collision avec les satellites. L'ESA a lancé un programme pour cela - des Français y participent-ils ?

L'ANR n'est, enfin, plus malmenée, elle gagne même 34 millions. En 2012, 20 % des projets étaient sélectionnés ; 14 % aujourd'hui. Des chercheurs le considèrent comme un échelon lourd et inutile, sa procédure étant très longue mais il semble qu'elle ait été réformée. Des projets sur le chlordécone ont-ils été retenus ? Les Antilles ne s'en sortiront pas sans un effort de recherche.

Le programme Recherche dans la gestion des milieux et des ressources devrait être le levier de la transition énergétique ; il est décevant, avec une baisse de 7 millions d'euros en crédits de paiement. Il faut avancer sur des technologies comme l'hydrogène.

Une satisfaction enfin, le fléchage des crédits de la recherche sur les cancers pédiatriques.

Le groupe Les Républicains votera les crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Max Brisson .  - Sélection par tirage au sort, allocations sans contrepartie comme l'ARPE : ces choix polémiques sont derrière nous, ce budget le montre, et c'est tant mieux. Mais l'enseignement supérieur n'évolue pas aussi vite que le budget général de l'État ni avec les effectifs étudiants. Le plafonnement du CVEC à 95 millions le démontre, M. Piednoir l'a dit. En fait, les moyens nouveaux donnent de l'air à des programmes asphyxiés, colmatent quelques brèches, sans vision d'ensemble.

La rémunération d'un chercheur, de 1,8 SMIC à l'embauche, atteint péniblement 2 800 euros après dix ans de carrière ; les 130 millions de crédits supplémentaires ne suffisent pas à une remise à plat du régime indemnitaire.

Dernier chantier, l'échec universitaire. Le taux de réussite en licence est de 28 % - et notre objectif est d'atteindre 30 % en 2020... Vous annoncez 208 millions supplémentaires, mais la moitié sera absorbée par le GVT et la hausse de la CSG. Il faudrait pourtant renvoyer aux limbes ce taux d'échec massif qui nous caractérise, en donnant leur place aux Eespig, en travaillant, surtout, à l'articulation entre le lycée et la licence. La loi d'orientation sur la recherche a été votée avant la réforme du bac ! Les deux ministères concernés, l'amont et l'aval, ne travaillent pas en partenariat.

Je voterai les crédits, sous réserve de l'adoption de nos amendements, mais il est urgent de lancer ces chantiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

Mme Brigitte Lherbier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Il y a plus d'un siècle, Benjamin Disraeli disait que de l'éducation de son peuple dépend le destin d'un pays. Enseignante de vocation, je sais que notre jeunesse fait des merveilles lorsqu'on lui fait confiance. Curie, Lavoisier, Buffon, Ampère, Pascal, Poincaré : j'arrive à les imaginer nous regardant ce soir.

Je salue le fait que la mission Recherche et enseignement supérieur soit le troisième budget de l'État, avec 28 milliards, en augmentation de 1,8 %.

Les crédits du programme 193 sont en hausse de 205 millions et ceux du programme 172, de 171 millions d'euros.

Si je salue cet effort, je déplore que le salaire d'un jeune chercheur, de 2 191 euros soit 1,8 SMIC à l'embauche plafonne à 2 885 euros après dix ans - contre 136 000 dollars par an pour un biologiste ou un chimiste aux États-Unis.

Il est urgent de mettre en service la ligne 18 du métro qui désenclavera les établissements du plateau de Saclay, ses 63 000 étudiants et 9 000 chercheurs qui réalisent 135 000 publications par an et représentent 15 % de la recherche française.

Parcoursup a été moins chaotique que prévu, reste à l'améliorer. En particulier, il faut de la transparence sur les critères d'attribution. Attention à la fracture sociale entre établissements, contraire aux principes républicains.

Suivant l'avis de la commission, notre groupe votera ces crédits, à condition que le Gouvernement prenne en compte nos recommandations. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  -  Tenir notre rang dans la compétition internationale, jouer un rôle déterminant dans l'élucidation des grandes questions scientifiques, favoriser l'innovation, mieux former et mieux diplômer nos étudiants sont les piliers de mon engagement en tant que ministre.

Cette mission budgétaire traduit cet engagement porté par l'ensemble du Gouvernement depuis plus de 18 mois, vers l'objectif de 28 milliards d'euros en 2020 : nous nous y dirigeons.

Ce budget voit ses crédits augmenter de 5,3% en deux ans, soit 1,3 milliard d'euros.

L'année prochaine, le budget du ministère atteindra près de 25,1 milliards d'euros, soit 549 millions d'euros de plus par rapport au budget 2018. Sur le périmètre complet de la Mires, cette hausse est de 500 millions portant les crédits de l'ensemble de la mission à 27,9 milliards d'euros. S'y ajoutent le Programme investissements d'avenir (PIA) et l'effort des collectivités territoriales dans le financement de la recherche.

En matière d'enseignement supérieur, l'année 2019 sera prioritairement consacrée à la poursuite de la réforme du premier cycle pour établir un continuum « Bac -3 - Bac + 3 » : 123 millions seront consacrés aux parcours personnalisés de réussite. L'aide au mérite n'est pas plafonnée.

Le PIA continuera à soutenir la rénovation des cursus universitaires. Ce dispositif conjugué aux dispositions du nouvel arrêté de licence publié en juillet dernier nous permettra de repenser le contenu du premier cycle pour que chaque étudiant construise son parcours en toute autonomie, avec des passerelles et un contact avec plusieurs disciplines pour se spécialiser progressivement. La réforme des études de santé s'inscrira dans ce même esprit.

Nous avons débloqué 3 millions en fin de gestion pour les agents BIATSS engagés dans ces réformes.

Je salue la constance du soutien du Sénat pour l'enseignement privé. Nous avons stoppé la baisse des subventions ; 2 millions ont d'ores et déjà été abondés en gestion.

La vie étudiante est au coeur de notre politique. Pour la première fois, les Crous ont pu collecter la CVEC, en vue de nouvelles prestations sportives ou culturelles. J'entends les inquiétudes - mais je vous redis que le plafond de 95 millions ne s'appliquera pas cette année, qu'il a été fixé sur le fondement des prévisions réalisées et qu'il est révisable fin 2019.

Les Eespig bénéficient aussi de cette contribution à hauteur de 3 millions en 2018, auxquels s'ajoutent 2 millions d'effort de gestion, ce qui porte à 5 millions l'effort de l'État pour les Eespig.

La suppression de la cotisation de 217 euros à la sécurité sociale étudiante et le paiement à date des bourses a réduit, pour la première fois, le coût de la rentrée universitaire : il en a coûté, au total, 100 millions de moins aux étudiants et à leurs familles.

En 2019, je veillerai à ce que nous nous donnions les moyens d'aller plus loin dans l'autonomie des universités. Avant la fin de cette année, nous publierons l'ordonnance sur les regroupements expérimentaux, pour donner à nos universités les moyens juridiques et administratifs, de se rapprocher plus simplement, de gagner en visibilité internationale, tout en se replaçant au coeur de politiques de sites fortes, ancrées dans leur territoire.

En complément de cette ordonnance, j'expérimente depuis la rentrée un dialogue stratégique de gestion avec neuf universités pour échanger directement avec elles sur leurs besoins, leurs projets et le développement de leur propre signature. C'est un élément fondamental de modernisation du pilotage des opérateurs du programme 150.

L'attractivité, au-delà du triplement des bourses, bénéficiera de 10 millions de fonds « Bienvenue en France » et de 10 millions du ministère des Affaires étrangères pour développer les campus internationaux. Je citerai aussi les titres de séjour pour la durée du cycle universitaire et la possibilité par les titulaires d'un master ou d'un doctorat de travailler directement en France, sans avoir à redemander un visa dans leur pays d'origine.

La politique de recherche est la colonne vertébrale de cette mission. Face à la concurrence internationale, mes priorités sont le soutien à la recherche fondamentale, la mobilisation des forces scientifiques pour répondre aux grands défis sociétaux et le renforcement du partenariat entre universités et organismes de recherche. Pour cela, nous confions des programmes nationaux de recherche aux grands organismes. Le CNRS recrutera 300 nouveaux doctorants d'ici 2020.

Avec plus de 2,5 % du budget de la recherche cette année, la hausse atteint 8 % en deux ans.

En matière spatiale, nous travaillons à la définition d'une préférence européenne pour les lanceurs, et l'observation des débris nous préoccupe.

Le Sénat s'est emparé de la question des cancers pédiatriques, comme l'Assemblée nationale. Nous y consacrons 5 millions d'euros supplémentaires par an.

L'Ifpen bénéficiera d'un million d'euros par an supplémentaire. Et le plan hydrogène sera financé par 100 millions d'euros issus du ministère de la Transition écologique et solidaire.

Il ne faut pas opposer le financement sur projet au financement de base. Je reconduis le second à hauteur de 25 millions en direction des laboratoires. La rémunération du personnel des EPST sera revalorisée à hauteur de 28 millions. Le financement sur projet, lui, bénéficiera de 33 millions supplémentaires via l'ANR, soit 65 millions en deux ans.

Nous soutenons aussi les initiatives vertueuses, associant le meilleur de la recherche publique et le meilleur de la recherche privée - en reconduisant l'effort de 5 millions d'euros. En 2018, nous consacrons 300 millions d'euros à régulariser la situation de la France vis-à-vis des grandes agences internationales, dont plus de 170 millions hors secteur spatial.

Sur la recherche, l'Europe joue un rôle fondamental. C'est à la fois le lieu géographique naturel de la coopération scientifique et universitaire mais aussi celui dans lequel se dessinent l'université et la recherche de demain. Le Conseil de compétitivité du 30 novembre a adopté une orientation générale partielle sur le programme « Horizon Europe ». Ce programme, qui est le premier programme mondial en matière de recherche est pour notre pays une opportunité que nous nous devons de saisir.

Nous avons obtenu une orientation générale conforme à ce que nous visions, avec la création d'une agence européenne de l'innovation de rupture, l'European Innovation Council, qui aidera à l'émergence de start-up. Je me réjouis de l'appel à propositions de 30 millions d'euros pour six projets pilotes d'universités européennes.

La France y consacrera 100 millions d'euros sur dix ans. J'appelle tous les établissements à se saisir de cet apport sans précédent.

Merci aux rapporteurs pour leur travail de qualité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants ; M. Laurent Lafon applaudit également ; applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

Examen des crédits de la mission

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-134, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

700 000 000

700 000 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

700 000 000

700 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

700 000 000

700 000 000

700 000 000

700 000 000

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - Cet amendement ne vise rien de moins que la suppression de l'ANR ; il est radical, mais je vous le présenterai sans gilet jaune. (Sourires)

Vous souhaitez 20 % de réussite pour les projets déposés devant l'ANR. Ce taux est faible comparé aux 40 % en Suisse ou 30 % en Allemagne.

Or le montant moyen du soutien est passé de 487 000 euros en 2009, à 360 000 euros l'an passé ; le problème c'est qu'en continuant à diminuer le dimensionnement, les demandes vont baisser elles-mêmes - et vous pourriez bien alors, mécaniquement, atteindre votre objectif, sans dépenser plus, au point qu'on se demande si ce n'est pas là votre objectif...

En fait, soit on porte les crédits à un milliard pour répondre aux besoins de financement, comme le recommandait Michel Berson, soit on supprime l'ANR. Vous choisissez un moyen terme - mieux vaut peut-être supprimer l'ANR.

M. le président.  - Amendement n°II-176 rectifié bis, présenté par M. Sol, Mmes Noël et Gruny, MM. Paccaud, Daubresse et Calvet, Mme Garriaud-Maylam, M. Sido, Mme Deromedi, MM. Moga et Mandelli, Mmes Vullien, Lanfranchi Dorgal, F. Gerbaud et Lamure et MM. B. Fournier, Grand, Babary, Charon, Genest, Delcros, L. Hervé et Piednoir.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

266 000 000

266 000 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

266 000 000

266 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

266 000 000

266 000 000

266 000 000

266 000 000

SOLDE

0

0

M. Stéphane Piednoir.  - Défendu.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - M. Ouzoulias supprime les crédits de l'ANR. Vous dites que l'agence ne se justifie pas sans un milliard ; mais nous nous en approchons doucement, et nous verrons si l'augmentation des crédits accroît le nombre de projets déposés. Vous évoquez une action 9, par erreur semble-t-il : c'est l'action 17 qui correspond à votre amendement. Laissons une chance au Gouvernement de faire progresser ces crédits, cette année et l'an prochain. Avis défavorable à l'amendement n°II-134.

L'amendement n°II-176 va dans l'autre sens, en ajoutant des crédits à l'ANR. Mais il le fait en ponctionnant 20 % des crédits de sécurisation des bâtiments universitaires. Problématique. J'ajoute que le CIR doit être préservé, car il profite à nombre de petites entreprises. Retrait.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Mêmes avis. L'ANR permet à des jeunes équipes de créer leur laboratoire, et l'urgence climatique est évidemment une priorité de ce Gouvernement, qui a déjà ouvert un programme de recherche sur la transition écologique et le climat.

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis.  - Monsieur Ouzoulias, votre amendement est assez radical... J'ai rencontré la nouvelle équipe dirigeante de l'ANR, à laquelle je crois. L'ANR a cette utilité qu'elle sécurise des thématiques de recherche et donne de la visibilité. Distribuer des crédits aux laboratoires directement, ce serait assez foutraque... Laissons faire l'ANR !

M. Pierre Ouzoulias.  - Foutraque non, dialectique sans doute. (Sourires) Disons qu'il n'y a guère de moyen terme entre zéro et un milliard... En effet, une telle agence de moyens, pour bien fonctionner, a besoin d'un gros volume de financement. Sinon, les frustrations sont grandes, étant donné la quantité de travail demandé aux chercheurs pour des résultats très faibles.

J'ai bien entendu votre argumentation très détaillée, monsieur le rapporteur spécial, et je vous remercie pour la qualité de notre dialogue. Mais, au rythme de progression actuel, nous n'atteindrons pas un milliard en 2022 : nous en sommes à 866 millions d'euros.

Enfin, l'État utilise l'ANR pour financer des projets nouveaux, sans garantie de financement.

M. Jérôme Bascher.  - En son temps, le groupe communiste s'est opposé à la création de l'ANR - je sais aussi être, à mes heures, archéologue ! Chacun sa vérité historique : à l'époque, on déplorait que, avec l'ANR, l'État se dessaisisse du rôle stratégique, qu'il avait du temps du Général de Gaulle. Mais laissons la vivre : comme toute structure, l'ANR doit s'améliorer. Donnons-lui ce temps.

L'amendement n°II-134 n'est pas adopté.

L'amendement n°II-176 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-135, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

81 895 852

81 895 852

Vie étudiante

81 895 852

81 895 852

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

81 895 852

81 895 852

81 895 852

81 895 852

SOLDE

0

0

M. Pierre Ouzoulias.  - Je soutiens la liberté de conscience et je n'ai rien contre l'enseignement privé et catholique... (Sourires) mais il ne convient pas de soutenir le privé avec des financements publics sans avoir en retour un bilan des missions de service public exercées, sans se préoccuper du nombre de bourses accordées, par exemple, mais aussi de la composition du cursus.

C'est pourquoi je choisis de solliciter le privé pour financer la vie étudiante. Plus de la moitié des étudiants travaillent, le reste à charge des étudiants boursiers est de 1 000 euros dans les grandes villes universitaires. Il y a un vrai problème de misère étudiante, qui explique en partie le taux d'échec insupportable dénoncé à l'instant. Cet amendement est une alerte.

M. le président.  - Amendement n°II-34, présenté par M. Adnot, au nom de la commission des finances.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

14 000 000

14 000 000

Vie étudiante

14 000 000

14 000 000

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

14 000 000

14 000 000

14 000 000

14 000 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Cet amendement, a contrario, donne de l'air au privé, qui en dix ans, a perdu 45 % de l'acompte financier de l'État. Dans certaines villes, comme Lyon, Lille, Paris, certains établissements sont en difficulté. La moyenne de l'aide accordée par étudiant, qui a considérablement baissé, est de 600 euros environ. Quelle est l'équation de cet amendement d'appel ? Quelque 106 000 étudiants se retrouveraient à disposition de l'enseignement supérieur public qui n'aurait pas de place pour les accueillir et à qui cela couterait 9 000 euros par étudiant. Entre 80 millions et 900 millions d'euros, le choix est vite fait !

Cet amendement flèche 14 millions d'euros de crédits vers les Eespig. C'est un premier pas. Faisons en sorte que le public et le privé fonctionnent en harmonie pour faire progresser notre pays.

M. le président.  - Amendement identique n°II-54, présenté par M. Piednoir, au nom de la commission de la culture.

M. Stéphane Piednoir.  - Depuis quinze ans, les effectifs ont augmenté de 60 % dans le privé - de 20 % en moyenne dans le supérieur. De plus, le privé contribue au service public de l'enseignement supérieur.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Le Gouvernement ne souhaite pas mettre fin au financement du privé ; l'action n°4 du programme 150 que l'amendement supprime, vise exclusivement le privé non lucratif désigné comme d'intérêt général et contractualisé avec l'État, c'est-à-dire les associations et fondations reconnues d'utilité publique et les syndicats professionnels. Ces établissements ont des engagements en matière de politique sociale. Retrait de l'amendement n°II-135.

Par définition, le modèle économique de ces établissements est différent. Leur budget a été augmenté en gestion de 2 millions en 2018, soclé en 2019, avec un nouvel engagement de 2 millions d'euros.

De plus, ces amendements ponctionnent le Fonds d'aide à la mobilité, ce qui n'est pas souhaitable.

La contribution vie étudiante doit aller à la vie étudiante, et non aux Eespig. Retrait ou avis défavorable, donc, aux amendements nosII-34 et II-54.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je ne retire pas : la garde meurt et ne se rend pas ! (Sourires)

Monsieur Adnot, le nombre d'étudiants en licence, master ou doctorat dans le privé a doublé entre 2003 et 2016. Pourquoi ? Ce sont des établissements à taille humaine, qui, notamment pour les instituts catholiques, s'intéressent au développement humain de la personne et pas seulement à la transmission des savoirs.

On y enseigne, par exemple, à l'institut catholique de Paris, le droit canonique ou le Code des canons des Églises orientales - discipline estimable, que j'aurais aimé étudier, mais dont la valeur pour l'insertion des étudiants est relative. On est là dans le cadre d'un enseignement désintéressé. Pourquoi ce qui assure le succès de ces institutions ne profiterait-il pas à l'université publique ? Pourquoi demandons-nous tout autre chose à ces dernières ?

L'amendement n°I-135 n'est pas adopté.

Les amendements identiques nosII-34 et 54 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-203 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Loisier, M. Milon, Mme M. Mercier, MM. Kern, B. Fournier et Bonhomme, Mme Gruny, MM. Détraigne, Pierre et Huré, Mme Bruguière, MM. Mouiller et Charon, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Vaspart et Cornu, Mmes Imbert et Sollogoub, M. Longeot, Mmes Vullien et Procaccia, MM. Panunzi, Louault, Henno, Le Gleut et Daubresse, Mme Micouleau, M. Morisset, Mmes Deromedi et Morhet-Richaud, MM. Gilles, D. Laurent, Revet, Poniatowski, Rapin, Longuet, Bonne, Savary et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. L. Hervé, Luche, Gremillet, Duplomb et J.M. Boyer, Mme Deroche, MM. Moga et Priou, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Delcros, Darnaud, Pellevat et Genest.

I.  -  Créer le programme :

Recherche appliquée et innovations agroalimentaires

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

20 000 000

20 000 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

Recherche appliquée et innovations agroalimentaires

20 000 000

20 000 000

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Catherine Procaccia.  - Cet amendement crée un nouveau programme, intitulé « Recherche appliquée et innovations agroalimentaires », pour soutenir l'innovation dans le secteur agroalimentaire en le dotant de 20 millions d'euros.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Quand on voit arriver un amendement sur l'agriculture, dont le premier signataire est Michel Raison, l'on fait attention de ne pas trébucher...(Sourires) Cette mission est déjà portée par l'INRA. De plus, cet organisme est en phase de fusion avec l''Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (Irstea). Il faut, sans jeu de mot, raison garder...

M. Jérôme Bascher.  - Très bien !

M. Jean-François Rapin.  - Retrait ? De plus, l'amendement mettrait en difficulté des établissements comme le Palais de la découverte ou la Cité des sciences et de l'industrie.

L'amendement n°II-203 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-414, présenté par M. Lafon.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

8 000 000

8 000 000

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

8 000 000

8 000 000

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

8 000 000

8 000 000

8 000 000

8 000 000

SOLDE

0

0

M. Laurent Lafon.  - Le recul des crédits de la recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables est très préoccupant : il atteint près de 50 %. Cet amendement les ramène à leur niveau de l'an passé.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - C'est une extinction de crédits progressive et naturelle. Retrait ?

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-414 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°II-554, présenté par Mmes Préville et S. Robert et M. Tissot.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

2 000 000

2 000 000

Recherche culturelle et culture scientifique

2 000 000

2 000 000

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

Mme Angèle Préville.  - Le budget alloué à la culture scientifique et technique est en baisse de 2 millions d'euros. Quel dommage, nous avons tant besoin de science !

Chacun doit être en mesure de savoir pour mesurer les enjeux de la transition énergétique, qui ne peut être acceptée, dans une société apaisée, qu'à cette condition. Rien ne pourra se faire sans la diffusion de cette culture, qui favorise la connaissance, laquelle facilite l'adhésion, indispensable.

La culture sociale et technique croise d'autres enjeux d'actualité comme l'intelligence artificielle, dont nous devons également débattre. Nous avons besoin de techniciens, de chercheurs sublimés par la passion ; ils pourront trouver de nombreux postes à pourvoir où ils inventeront des solutions innovantes.

L'an dernier, lorsque j'avais déposé cet amendement, vous aviez évoqué un groupe de travail. Qu'en est-il ?

Cet amendement abonde à hauteur de 2 millions d'euros les crédits de l'action n°3 « Culture scientifique et technique » du programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique » en réduisant d'autant les crédits de l'action n°3 « Recherche duale dans le domaine aérospatial » du programme 191 « Recherche duale » (civile et militaire).

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Je partage l'objectif mais la ponction sur la recherche duale est problématique. Retrait ou avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - La diffusion de la culture scientifique, à laquelle je tiens personnellement, ne relève pas du seul budget de l'État, ni de ce seul programme 186. Chacun des seize organismes de recherche sous la tutelle du ministère y consacre entre un et deux millions d'euros par an ; au titre du programme 150, pour la diffusion des savoirs et les musées, 125 millions d'euros sont inscrits.

Ainsi, le ministère contribue pour 1,1 million d'euros à la Fête de la science chaque année. Universcience, institution très importante, ne résume pas la culture scientifique, technique et industrielle (CSTI), loin s'en faut. Le ministère de la culture participe à son budget et s'implique dans la diffusion de la CSTI. Retrait ?

L'amendement n°II-554 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-502, présenté par M. Gattolin.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitairedont titre 2

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

900 000

900 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

900 000

900 000

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

900 000

900 000

900 000

900 000

SOLDE

0

0

M. André Gattolin.  - Plus modeste que les deux précédents, cet amendement transfère 900 000 euros de l'action n°1 du programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » à l'action n°3 du programme « soutien de la recherche industrielle stratégique » du programme « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle ». Cela pour financer le fonds d'aide au jeu vidéo (FAJV) créé en 2008 et jusqu'à présent cofinancé par le ministère de l'Économie, via la direction générale des entreprises (DGE) et par le ministère de la Culture, indirectement, via le CNC, le Centre national du cinéma et de l'image animée. Or le ministère de l'Économie a décidé de retirer sa part de 900 000 euros et c'est extrêmement dommageable, pour la myriade des petites entreprises, de studios, qui constituent l'écosystème de ce secteur. Certes, il existe un crédit d'impôt, mais il s'adresse à des entreprises de plus grande taille.

Nous avons un véritable écosystème du jeu vidéo, que le Sénat et l'Assemblée nationale se sont engagés à préserver, dans un secteur où la compétition internationale est acharnée. C'est un combat de longue haleine mené avec notre ancien collègue Patrice Martin-Lalande à l'Assemblée nationale et Catherine Morin-Desailly et Bruno Retailleau. Des crédits d'impôts colossaux attirent de plus en plus d'entreprises vers le Canada, les États-Unis ou l'Inde. Or nous avons des écoles parmi les meilleures au monde dans ce domaine qui est la première industrie culturelle, devant le cinéma, et qui irrigue l'ensemble de nos territoires.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Je suis surpris que vous ponctionniez le programme 172, qui vous intéresse beaucoup, notamment au titre de l'intelligence artificielle.

De plus, cet amendement a été rejeté à l'Assemblée nationale par la commission et le Gouvernement.

Enfin, la DGE finance ce secteur dans le cadre du plan Nano 2022.

Le FAJV, lui, a conservé les financements du ministère de la Culture. C'est davantage une restructuration qu'une baisse. Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Même avis.

M. André Gattolin.  - Cet amendement vise les petites entreprises, que le plan Nano 2022 ne couvre pas. La DGE ne connaît pas le monde du jeu vidéo.

L'amendement n°II-502 n'est pas adopté.

Les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », modifiés, sont adoptés.

Article 78

M. le président.  - Amendement n°II-133, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

M. Pierre Ouzoulias.  - C'est un amendement pour obtenir des explications. Pourquoi l'aide à la recherche du premier emploi (ARPE) n'a-t-elle pas eu de succès ? Est-ce à dire que les étudiants n'ont pas besoin qu'on les aide à trouver un emploi ? Une nouvelle réussite au crédit de l'Université française...

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.  - Les crédits n'ont jamais été consommés et les étudiants sans diplôme ne pouvaient pas en bénéficier ce qui est absurde !

En donnant plusieurs mois de répit aux jeunes, le dispositif, qui n'a pas obtenu d'effets significatifs sur l'insertion professionnelle, était même contre-productif : c'est bien avant la fin des études qu'il faut commencer à chercher un emploi. Avis défavorable.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - En effet, ce dispositif n'était pas efficace : le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A de moins de 25 ans a baissé de 1 % en un an selon le ministère du Travail.

Avec Mme Pénicaud, nous avons proposé de remplacer l'ARPE par la garantie jeune, de 484,82 euros par mois cumulable jusqu'à 300 euros avec un revenu d'activité : elle semble plus efficace.

M. Pierre Ouzoulias.  - Je retire mon amendement : il est minuit et la citrouille est compatissante... (Sourires) Les fonds sont affectés à un fonds de mobilité, sur lequel je vous interrogerai l'an prochain !

L'amendement n°II-133 est retiré.

M. le président.  - Vous êtes l'un des seuls à vous projeter si loin...

L'article 78 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°II-539, présenté par Mme L. Darcos.

Après l'article 78

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 129 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette annexe présente la contribution de l'État, des administrations publiques, des associations et des entreprises au financement de la recherche fondamentale utile à la lutte contre le cancer pédiatrique. »

Mme Laure Darcos, rapporteure pour avis.  - Me voici placée par M. Ouzoulias dans le rôle de Cendrillon... (Sourires) Merci d'avoir ajouté 5 millions d'euros pour le cancer pédiatrique. Cet amendement, qui améliore l'information du Parlement, nous aiderait à mieux suivre leur utilisation.

À la différence des pays anglo-saxons, qui présentent des financements au coût réel, intégrant la masse salariale des chercheurs travaillant à améliorer notre compréhension des mécanismes fondamentaux à l'origine des cancers les plus résistants chez l'enfant, la France n'affiche que les financements additionnels consacrés aux programmes ou aux bourses de recherches en la matière qui transitent principalement par l'INCa.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement lors de l'examen de la mission Recherche et enseignement supérieur qui consacre 5 millions d'euros par an à la mobilisation et à la coordination de la recherche fondamentale sur l'embryon, nous avez-vous dit lors de votre audition devant notre commission de la culture.

Cet amendement complète l'annexe budgétaire consacrée aux politiques de financement de la recherche de manière à ce qu'elle puisse rendre compte de manière détaillée de l'usage qui sera fait de ces sommes et, plus généralement, de la réalité des montants consacrés chaque année à cette question d'intérêt pour nos concitoyens.

Je remercie les nombreux collègues qui m'ont dit vouloir s'associer à cet amendement que j'ai déposé à la dernière minute.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial.  - Vous touchez la corde sensible. Sur ce sujet, on est toujours trop radin. La commission a rendu un avis de sagesse. Je voterai pour à titre personnel.

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - La France lutte contre les cancers avec des moyens importants. Le Sénat et l'Assemblée nationale ont appelé l'attention sur les cancers pédiatriques et nous nous engageons à améliorer la visibilité et l'information. Avis favorable.

M. Alain Fouché.  - Certains de ces fonds passaient autrefois dans le fonctionnement des CHU... Espérons que ce n'est plus le cas.

Mme Catherine Deroche.  - Je soutiens cet amendement. Le Sénat, qui accueille chaque année un colloque consacré à ce sujet, est très attaché aux traitements spécifiques du cancer pédiatrique. Cette rallonge budgétaire est bienvenue. La recherche avance pas à pas, mais la lisibilité de l'usage des fonds sera très utile.

L'amendement n°II-539 est adopté et devient un article additionnel.

L'article 78 bis est adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, mardi 4 décembre 2018, à 9 h 30.

La séance est levée à minuit dix.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mardi 4 décembre 2018

Séance publique

À 9 h 30

Présidence : M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

Secrétaires : Mme Agnès Canayer - Mme Françoise Gatel

1. 36 questions orales.

À 14 h 30 et le soir

Présidence :

Mme Valérie Létard, vice-présidente Mme Catherine Troendlé, vice-présidente M. Philippe Dallier, vice-président

2. Projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019 (n° 146 rectifié, 2018-2019).

Culture (+ article 74 septies).

Médias, livre et industries culturelles.

Pouvoirs publics, Conseil et contrôle de l'État et Direction de l'action du Gouvernement.

Travail et emploi (+ articles 84 et 84 bis).

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°33 sur les crédits de la mission « Outre-mer » figurant à l'état B du projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2019.

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 342

Suffrages exprimés : 236

Pour : 216

Contre : 20

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (145)

Pour : 143

Abstention : 1 - Mme Viviane Malet

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe socialiste (73)

Contre : 4 - M. Maurice Antiste, Mme Catherine Conconne, M. Victorin Lurel, Mme Sophie Taillé-Polian

Abstentions : 69

Groupe UC (51)

Pour : 50

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Vincent Delahaye, président de séance

Groupe du RDSE (22)

Pour : 21

Abstention : 1 - M.  Stéphane Artano

Groupe LaREM (23)

Abstentions : 23

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (12)

Abstentions : 12

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 2

N'ont pas pris part au vote : 4 - M. Gérard Collomb, Mme Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Nomination au sein d'une délégation sénatoriale

M. Patrick Kanner est membre de la délégation sénatoriale aux outre-mer, en remplacement de M. Didier Guillaume.