Limiter le recours au licenciement économique
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à limiter le recours au licenciement économique dans les entreprises d'au moins 250 salariés, présentée par M. Thierry Cozic et plusieurs de ses collègues
Discussion générale
M. Thierry Cozic, auteur de la proposition de loi . - (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K) Je remercie mon groupe qui a rendu possible cette présentation en séance.
Cette proposition de loi limite la distribution de dividendes pour les groupes qui se prétendent en difficulté économique. Le marché ne peut plus tout et la souveraineté industrielle de notre pays ne se brade pas.
Nos concitoyens ne comprennent plus que les grands groupes profitables distribuent des dividendes et, dans le même temps, ferment des sites pourtant rentables. Cette logique financiarisée prédatrice nourrit un capital devenu insatiable.
Nous devons aussi encadrer les 200 millions d'euros de généreuses aides aux entreprises décaissées cette année.
Cette proposition de loi est examinée quand Michelin, Auchan, Sanofi, Valeo, Vencorex ou MA France ferment des sites. Et que dire d'ArcelorMittal ? La liste est vertigineuse. C'est 145 000 destructions d'emplois en 2025. En 2024, on compte 66 000 dépôts de bilan, soit 30 % de plus qu'en 2019.
Depuis la prise de fonction du 47e président des États-Unis, les dirigeants européens ressemblent à des croisiéristes accrochés au bastingage en pleine houle. Pris dans la guerre commerciale sino-américaine, soit nous demeurons dans l'illusion de la protection de l'oncle Sam, soit nous nous jetons dans les bras de l'Empire du Milieu, qui fait de notre continent le déversoir de ses surplus de production.
Nous devons faire la critique du néolibéralisme, qui a éviscéré la base industrielle de notre pays, a détruit la logique d'investissement public de l'après-guerre et a exclu les travailleurs des bénéfices de la croissance. Le politique doit reprendre la main sur l'économique !
Que l'on atteigne 100 milliards d'euros de versements de dividendes et de rachats d'actions cette année illustre la déconnexion de nos marchés. Le capitalisme financier ne vit plus sur la même planète !
Ces groupes sont devenus des monstres. En 2023, 38 groupes du CAC 40 ont réalisé 1 769 millions d'euros de chiffre d'affaires cumulé, soit plus que le PIB de l'Espagne.
Ils évoluent dans un environnement financiarisé qui leur est favorable. La politique d'attractivité leur est destinée. Tout est fait pour attirer les investisseurs étrangers, en assurant des rendements élevés. Baisse de la fiscalité des sociétés, fiscalité allégée pour les expatriés étrangers : une telle débauche de moyens pourrait au moins avoir des résultats sur l'emploi. Non ! La part de l'emploi industriel est passée de 16,4 à 15,5 %. En revanche les dividendes ont crû de 46 % depuis 2017 et les rachats d'action de 286 %.
Comment comprendre que Michelin supprime 1 254 emplois, quand il a versé 1,4 milliard d'euros de dividendes aux actionnaires l'année dernière ?
En 2019, un euro sur cinq de profit allait vers les actionnaires. C'est désormais un euro sur deux. Au bout de la course au moins-disant social, ce sont les salariés qui paient.
Comment croire que l'article 1er puisse être un repoussoir pour les investisseurs quand, dans notre pays, 100 milliards d'euros de dividendes et rachats d'actions ont été versés, record historique en Europe ?
Les plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) ont augmenté de 30 % entre 2023 et 2024. Pourtant, en 2022, 25 % des entreprises ayant procédé à ces plans affichaient une rentabilité positive.
Laisser faire, c'est continuer à éventrer notre industrie.
Cette proposition de loi agit aussi sur l'allocation des ressources publiques de la production. L'article 2 interdit le versement d'aides pour trois ans en cas de licenciement économique abusif ou exige leur remboursement en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Nous le voyons au sein de la commission d'enquête, les aides publiques sont hors de contrôle. Quelque 300 milliards d'euros d'aides publiques sont versés chaque année aux entreprises. Dans les années 1980, c'était 10 milliards d'euros par an.
Le capitalisme du XXIe siècle déstabilise les chaînes de production de notre pays. De grands groupes utilisent des PSE abusifs et délocalisent dans les pays de l'Est, alors qu'ils ont bénéficié de généreuses aides publiques. Cela doit cesser.
Je sais toute notre assemblée concernée par notre industrie. Il y a deux jours, un journaliste s'interrogeait sur les maigres chances de réussite de cette proposition de loi. Il me parlait de symbole, mais nous ne pouvons plus nous en contenter ! On doit s'interroger sur le lien entre capitalisme et démocratie.
Romain Rolland disait : « La fatalité, c'est l'excuse des âmes sans volonté. »
Soit nous continuons à voir les salariés comme des charges, soit nous devons envoyer un signal aux grands groupes, qui doivent comprendre que le capital ne peut fleurir sur le dos des salariés.
La France n'est pas à vendre, et les salariés non plus. Cette proposition de loi a le mérite de le dire franchement. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER ; Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)
Mme Monique Lubin, rapporteure de la commission des affaires sociales . - Cette proposition de loi limite le licenciement économique dans les entreprises de plus de 250 salariés. La multiplication des PSE appelle une réponse rapide du législateur contre les abus.
Le licenciement pour motif économique permet une rupture du contrat de travail autorisée par des raisons externes : les difficultés économiques. Les critères ont été peu à peu précisés par le juge et codifiés par le législateur. Ils sont au nombre de quatre.
Dans 46 % des cas, les entreprises qui ont procédé à un PSE en 2024 invoquent des difficultés économiques. Suivent ensuite des raisons plus générales, de transformation de l'emploi en raison de l'évolution technologique, puis le critère de la réorganisation de l'entreprise nécessaire à sa compétitivité. Ce dernier est le plus invoqué par les entreprises de plus de 250 salariés. Enfin, la dernière condition est la cessation définitive de l'activité de l'entreprise.
Depuis l'ordonnance de 2017 dite Macron, les causes de licenciements sont appréciées au niveau de l'entreprise sur le territoire national : un groupe peut être très rentable au niveau européen ou mondial, tout en licenciant pour motif économique dans un de ses établissements français.
Les PSE sont censés favoriser le reclassement des salariés ou la reprise des activités. En pratique toutefois, ils aboutissent à un licenciement pour 63 % des salariés concernés.
De 2023 à 2024, le nombre de PSE a augmenté de 30 %, et 129 procédures ont été enclenchées entre le 1er janvier et le 28 février 2025. Plus de 77 000 emplois risquent d'être supprimés au titre des PSE de 2024, et cet étiage devrait être dépassé en 2025. Or il est difficile de retrouver un emploi dans un bassin d'emploi sinistré à la suite d'un PSE.
Le code du travail, allégé en 2016 et 2017, est inadapté pour caractériser les « difficultés économiques » justifiant le licenciement.
Certaines opérations financières, certes légales, choquent quand elles interviennent en même temps que des licenciements collectifs. La distribution massive de dividendes, la poursuite d'un programme d'actionnariat salarié en faveur des dirigeants traduisent-elles des difficultés économiques réelles ? Ne devraient-elles pas faire obstacle au licenciement économique ? Et quand l'entreprise a bénéficié d'aides publiques telles que le CIR ou d'exonérations de cotisations patronales ?
Michelin a annoncé la suppression de 1 254 emplois après avoir versé 1,4 milliard d'euros de dividendes en 2024. Sanofi entend supprimer 330 postes après avoir reçu 100 millions d'euros de CIR, distribué 4,4 milliards d'euros de dividendes en 2023 et racheté 600 millions d'euros d'actions. ArcelorMittal, qui négocie un PSE pour 637 emplois, a distribué 200 millions d'euros de dividendes par an en moyenne sur les dix dernières années.
L'article 1er interdit les licenciements économiques aux entreprises de plus de 250 salariés qui ont, durant leur dernier exercice, distribué des dividendes, octroyé des actions gratuites ou racheté des actions. Idem si elles ont réalisé un résultat positif, ou bien bénéficié du CIR ou des allègements généraux de cotisations patronales.
L'article 2 propose de priver l'entreprise de certaines aides publiques afin de dissuader les licenciements économiques abusifs, alors que les ordonnances Macron ont réduit les risques encourus.
Il ne s'agit nullement d'administrer les entreprises, ou de revenir au droit antérieur à la loi du 3 juillet 1986, qui a supprimé l'autorisation administrative préalable au licenciement pour motif économique - autorisation à laquelle, à titre personnel, j'étais favorable.
Il ne s'agit pas non plus d'interdire ces licenciements. Pas question d'obliger une entreprise à s'entêter dans une activité non rentable. Le texte vise les entreprises non vertueuses, dans un souci de cohérence et de moralisation. Si elle distribue des dividendes, l'entreprise ne peut être dite en difficulté.
C'est aussi une question de justice. Les risques de l'activité économique doivent être supportés équitablement par les salariés et par les actionnaires. Quand le PSE intervient alors que l'on distribue des dividendes, la répartition de l'effort est manifestement déséquilibrée.
Cet encadrement limiterait également les licenciements boursiers, visant uniquement à accroître à court terme la valorisation de l'entreprise.
La proposition de loi est équilibrée. Les licenciements économiques resteront possibles, seuls les excès de certains groupes sont empêchés. Elle ne résoudra pas tout : c'est une étape vers le rééquilibrage du droit du travail en faveur de la protection des salariés.
J'ai proposé à la commission des affaires sociales de la soutenir. Elle ne l'a toutefois pas adoptée, sa majorité jugeant nécessaire que les entreprises puissent s'adapter aux évolutions économiques pour rester compétitives. J'espère que nos débats aboutiront à une issue différente. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Cette proposition de loi interdit de procéder à des licenciements économiques aux entreprises ayant versé des dividendes, distribués des actions gratuites ou racheté des actions, au motif que cela refléterait l'absence de difficultés économiques, et impose de rembourser les aides publiques en cas de licenciement abusif.
Malgré un taux d'emploi record et un taux de chômage parmi les plus faibles en quarante ans, la situation de l'emploi reste tendue. Les PSE n'en sont que la partie la plus visible.
Je sais les conséquences de ces suppressions d'emplois sur les salariés, leurs familles et sur les territoires. En 2024, 665 PSE ont été initiés, contre 511 en 2023. Il faut toutefois relativiser : on comptait 861 dossiers en 2020, à la suite de la crise sanitaire, et 2 245 en 2009, à la suite de la crise financière. Les PSE de 2024 représentent 77 000 ruptures prévisionnelles de contrats, contre 55 000 en 2023. Ces chiffres sont à rapprocher des créations nettes d'emplois : 107 000 en 2024, 262 000 en 2023. Il faut regarder les flux d'entrée et de sortie.
À ces difficultés, vous répondez en restreignant la possibilité pour les grandes entreprises de recourir au licenciement économique et en obligeant les entreprises condamnées pour licenciement abusif à rembourser certaines aides publiques perçues.
Si je ne partage pas l'approche des auteurs, je suis très attentive aux travaux de la commission d'enquête pilotée par Olivier Rietmann et Fabien Gay. La conditionnalité des aides publiques fait débat depuis des années ; elle avait été écartée lors de la création du CICE, en 2013.
Aujourd'hui, la proposition de sanctionner des entreprises contraintes de licencier semble inadaptée. On exposerait à l'incertitude nombre d'entreprises qui bénéficient d'allègements de cotisations patronales. Selon la Drees, les cotisations patronales, même après allègements généraux, représentent 10 % du PIB en France, contre 7 % en Allemagne et dans l'Union européenne.
Le CIR vise à soutenir les dépenses de R&D des entreprises : il serait étrange de le conditionner a posteriori à un objectif d'emploi.
Oui, certains comportements sont choquants, certaines méthodes indignes. Faut-il y répondre par une mesure générale qui rigidifie le droit du travail, et modifier les critères d'appréciation des difficultés économiques ? Le code du travail prévoit un dispositif suffisant pour éviter, sous le contrôle du juge, des licenciements économiques abusifs.
Pour les auteurs de la proposition de loi, le versement de dividendes, l'attribution des actions gratuites ou le rachat d'actions seraient la preuve de l'inexistence de difficultés économiques, de leur mauvaise foi, donc de l'illégitimité des licenciements économiques.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Oui.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. - Le dividende est le revenu du capital, c'est-à-dire de l'investissement, dont notre économie a tant besoin. Rappelez-vous la phrase d'Helmut Schmidt : « les profits d'aujourd'hui sont les emplois d'après-demain ».
La notion de difficulté économique est définie dans le code du travail : il serait contre-productif d'introduire des critères matériels non pertinents. Le contrôle de l'administration est réel. L'assouplissement du droit du licenciement en 2016 et 2017 n'a donné lieu à aucune dérive.
Si nous voulons limiter les destructions d'emplois, nous devons aussi veiller à ne pas freiner les créations d'emplois, et regarder le solde net.
Faible croissance, incertitudes : l'année 2025 pourrait être plus difficile que 2024. Nous sommes mobilisés pour apporter des réponses, veiller à la qualité des PSE et aider les entreprises à faire face sans détruire l'emploi, grâce à l'activité partielle de longue durée rebond (APLD-R). Les PSE sont souvent mixtes et comportent aussi des départs volontaires. Nous privilégions la continuité salariale et professionnelle en protégeant les salariés et en mobilisant les dispositifs adaptés. Avec Catherine Vautrin, nous avons demandé aux partenaires sociaux de se remettre autour de la table pour parler transition et reconversion. Si un compromis est trouvé, il pourra être repris dans le projet de loi de transposition des accords nationaux interprofessionnels (ANI).
Il faut aussi challenger les directions sur les plans de revitalisation, comme nous l'avons fait avec Michelin, améliorer l'information des CSE sur les aides publiques existantes, faire de la compétence un sujet de discussion au niveau des branches et des entreprises.
Nous disposons d'outils, certes perfectibles, pour faire face aux difficultés. Inutile d'introduire des rigidités contre-productives - elles n'existent pas dans les pays d'Europe du Nord qui concilient pourtant base industrielle forte, protection sociale élevée et cohésion sociale. On peut faire mieux avec l'existant. (Mme Pascale Gruny applaudit.)
M. Michel Masset . - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Les plans sociaux se multiplient ; au deuxième trimestre 2024, les licenciements économiques étaient une hausse de 5 % par rapport au trimestre précédent. Paradoxalement, 25 % des entreprises concernées affichent pourtant une rentabilité nette positive.
On observe un décalage croissant entre la situation des entreprises et les motifs invoqués pour licencier. Ancien chef d'entreprise, je m'étonne de ces licenciements brutaux quand l'entreprise bénéficie de subventions ou de crédits d'impôt.
Les aides publiques aux entreprises représentent plusieurs dizaines de milliards d'euros - d'où la question de leur conditionnalité. Chaque euro d'argent public injecté dans l'économie doit être efficace, sans quoi ces investissements devraient être récupérés.
La proposition de loi de M. Cozic interdit les licenciements économiques aux entreprises de plus de 250 salariés qui ont un résultat positif, ont bénéficié d'aides publiques ou réaffecté leur bénéfice hors de la production. Un bémol toutefois, s'agissant du résultat net comme de la privation de certaines aides publiques, car il faut tenir compte de la crise économique, des mutations technologiques...
Il ne s'agit pas d'impacter la liberté des PME mais de renforcer l'efficacité de nos investissements collectifs, de s'assurer du patriotisme économique des entreprises et d'éviter des drames sociaux injustes.
L'objectif doit être de maintenir une main-d'oeuvre qualifiée sur notre sol. Le Sénat attend avec impatience les conclusions de la commission d'enquête sur les aides publiques aux entreprises.
Le RDSE sera divisé sur ce texte. Chaque membre votera individuellement.
M. Olivier Henno . - Cette proposition de loi est le prototype d'une mauvaise réponse à une question légitime.
Sa temporalité interroge, alors que la croissance faiblit, que le chômage risque d'augmenter, et que les entreprises ont au contraire besoin de plus de souplesse.
La réalité économique est rude par nature, mais les mesures de gestion, dont les licenciements économiques, sont parfois indispensables, sous peine de sacrifier l'avenir.
L'entreprise se doit d'être profitable : cela garantit ses capacités d'investissement et d'embauche. La profitabilité n'est pas le diable !
Il peut y avoir de vilains petits canards, mais pour la majorité des entreprises, le licenciement économique est la mesure ultime. Pour des raisons morales, mais aussi d'efficacité, car la richesse de l'entreprise, c'est son capital humain, ses salariés, son savoir-faire. Les dirigeants d'entreprise ont à coeur de le préserver.
Retarder des mesures de gestion et donc les licenciements fragilise l'entreprise et rend son avenir incertain. Les gouvernements qui s'y sont risqués sont toujours revenus en arrière : cela avait au mieux retardé l'échéance, au pire tué les entreprises, et coûté cher au contribuable.
Il ne s'agit pas de défendre un libéralisme brutal et inhumain, mais de s'inspirer du modèle rhénan. Humaniser les mesures de gestion ne passe pas par des normes, par une législation plus contraignante, mais par un paritarisme refondé et un dialogue social confiant.
L'État doit concentrer ses moyens sur les filières stratégiques, à commencer par l'industrie sidérurgique - c'est l'élu des Hauts-de-France qui parle. ArcelorMittal a réaffirmé sa volonté d'investir 1,2 milliard d'euros dans la décarbonation, et autant pour un four électrique. Dont acte - mais rappelons que la préservation de la filière acier est un objectif national.
La France doit retrouver sa compétitivité et sa capacité à créer de la richesse. Aussi nous voterons contre cette proposition de loi.
Mme Cathy Apourceau-Poly . - Cette proposition de loi est une excellente chose. Auchan, Michelin, Valeo, Vencorex... Comment accepter que des groupes qui réalisent des bénéfices licencient pour motifs économiques ?
Cette absurdité est le résultat de la politique de libéralisation du code du travail menée depuis 2015.
Alors que les plans sociaux se multiplient dans tous les secteurs, le Gouvernement doit agir pour préserver l'emploi et nos industries.
Il ne s'agit pas d'administrer l'économie mais de moraliser le capitalisme et de protéger notre souveraineté.
Quand ArcelorMittal supprime 600 emplois alors qu'il a versé 600 millions de dividendes l'an dernier et qu'il a reçu 364 millions d'euros d'aides publiques depuis 2013, nous sommes bien face à des licenciements boursiers - que notre groupe avait proposé d'interdire.
Ces plans de licenciement sont inacceptables. Je pense aux travailleurs des usines de Dunkerque, Fos-sur-Mer et Florange. C'est un coup de massue, l'injustice étant aggravée par la difficulté à retrouver un emploi et la réduction de la durée d'indemnisation chômage.
Les entreprises sont gavées d'argent public : on compte 2 210 dispositifs d'aides publiques, sans aucune transparence.
Les entreprises demandent sans cesse des aménagements supplémentaires pour faire des gains de productivité. Lorsque les actionnaires jugent la rentabilité insuffisante, ils ferment tout, sans évidemment réparer les dégâts ou rembourser les aides publiques.
Les auditions de la commission d'enquête montrent combien il est difficile d'extraire les entreprises de leur dépendance aux aides publiques. Ceux qui défendent l'économie devraient prôner la suppression de ces aides qui nuisent à la libre concurrence et relèvent de l'économie administrée !
C'est pourquoi nous soutenons l'article 2, qui impose le remboursement en cas de licenciement économique abusif. Les entreprises hésiteront avant de lancer un PSE.
Le groupe CRCE-K votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Michel Masset applaudit également.)
Mme Raymonde Poncet Monge . - Depuis des années, les gouvernements tolèrent que des grandes entreprises, pourtant rentables, ferment ou multiplient les plans de licenciement, nommés dans le langage orwellien « plans de sauvegarde de l'emploi ».
En novembre dernier, le ministre de l'industrie s'attendait à une multiplication des plans sociaux. De janvier à mars, 18 000 procédures collectives ont été ouvertes. Fin février, on atteignait 66 000 défaillances sur douze mois ; l'année dernière, 89 sites industriels ont fermé.
C'est dévastateur pour l'emploi et pour les territoires. L'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) table sur un taux de chômage de 8,5 % fin 2026. Une hausse aggravée par votre politique austéritaire : les coupes sur la mission « Travail et emploi » détruiront 77 000 emplois en 2025 et 54 000 en 2026.
Les aides publiques aux entreprises, elles, sont passées de 10 milliards d'euros en 1979 à 160 milliards aujourd'hui, sans contrepartie sociale ou écologique, ni évaluation ou contrôle.
ArcelorMittal a reçu 850 millions d'euros pour la décarbonation du site de Dunkerque, sans mettre en oeuvre son projet, puis 300 millions d'euros en 2023, et supprime 600 emplois après avoir versé 433 millions d'euros de dividendes en 2024. Michelin ferme les sites de Chollet et Vannes, avec 1 200 salariés, après avoir perçu 42 millions d'euros de CIR en 2023 et versé 1,5 milliard d'euros de dividendes et d'actions. Auchan supprime 2 400 emplois après avoir bénéficié de 630 millions d'aides fiscales et de 1,3 milliard d'euros d'exonération de cotisations sociales en dix ans.
Le Gouvernement, qui répète qu'il faut couper dans les dépenses, refuse d'interroger l'utilité de ces aides, alors que la Cour des comptes déplore le peu de contrôles, et que plusieurs études remettent en doute l'efficacité du CICE, du CIR ou des exonérations de cotisations sociales.
Lorsqu'un foyer reçoit indûment des aides de la CAF, il doit les rembourser. Lorsqu'un bénéficiaire du RSA ne respecte pas les conditions prévues par la loi, l'allocation peut être suspendue.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Exactement !
Mme Raymonde Poncet Monge. - Quid des aides aux entreprises ? Quelles contreparties ? Quelles sanctions ? Quelle évaluation ?
Ce deux poids deux mesures devant la dépense publique doit cesser. Le GEST votera cette proposition de loi, dont je remercie l'auteur. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Simon Uzenat . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Cette proposition de loi écrit un nouveau chapitre de la responsabilisation sociale de l'économie, en interdisant les licenciements économiques des entreprises de plus de 250 salariés qui ont des stratégies prédatrices.
Nous voulons éviter des drames sociaux et humains.
Nous n'avons pas de problème avec l'économie et la rentabilité. Mais les Français nous attendent face à ces PSE utilisés pour augmenter les dividendes au profit des actionnaires - à la différence des PME dont les dirigeants protègent leurs salariés.
C'est un bel exemple de socialisation des pertes et de privatisation des profits. Les aides publiques, l'accompagnement social des salariés licenciés pèsent sur le contribuable. Comme l'a dit Patrick Pouyanné : « L'argent de l'État, c'est l'argent des Français ». Nous sommes parfaitement d'accord ! (Mme Cathy Apourceau-Poly s'en amuse.)
Je m'arrêterai sur le cas de Michelin : le site de Vannes, qui était rentable, comme celui de Cholet, a vu sa diversification engagée bien trop tardivement. Pour autant, 1,4 milliard d'euros de dividendes et de rachats d'actions ont été réalisés en 2024 - alors que l'on supprimait 1 254 emplois d'un trait de plume. Entre 2019 et 2024, la valeur de l'action Michelin a augmenté de 46 %, et encore de 2,2 % en 2025. C'est une course sans fin au profit, mais la fin de la course pour les salariés.
Les inégalités explosent et l'emploi industriel trinque. Notre souveraineté en paie le prix.
Les PSE ont augmenté de 30 % entre 2023 et 2024. Ils concernent 77 000 salariés, 40 % de plus qu'en 2023. Nous ne parlons pas de contrats, mais d'êtres humains qui ne sont pas interchangeables, madame la ministre : les moins ne peuvent être compensés par les plus.
Chers collègues Les Républicains, qui vous faites les chantres de la lutte contre l'assistanat, il existe en l'espèce un assistanat en faveur des actionnaires. J'espère que vous prendrez la bonne décision.
Nous voulons limiter cet assistanat en limitant les licenciements économiques. Pile, les actionnaires gagnent, face, les salariés perdent. Que les actionnaires gagnent toujours, au grattage ou au tirage, nuit à la cohésion de notre pays.
Comme nous, les Français comprennent les difficultés économiques des entreprises et certaines décisions parfois douloureuses. Mais ils n'acceptent pas les dérives de la financiarisation de l'économie, qui consument des vies, des compétences et des territoires. Nous ne pouvons l'accepter au Sénat.
Oscar Wilde disait : « La fatalité veut que l'on prenne toujours les bonnes résolutions trop tard. » Je vous invite à réagir à temps. C'est pourquoi, avec conviction et détermination, nous apportons un soutien total à la proposition de loi de notre collègue Cozic. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST ; M. Michel Masset applaudit également.)
M. Jean-Luc Brault . - Patron d'une PME qui pèse 80 millions d'euros sur mon territoire, j'ai préféré vendre ma boutique plutôt que d'être un jour amené à licencier... Diriger une entreprise est un combat de tous les jours. Il faut trouver des clients, produire, vendre et se faire payer. Le chef d'entreprise doit rémunérer ses salariés, investir pour projeter son entreprise dans l'avenir et, parfois, rémunérer ses actionnaires pour s'assurer de la pérennité de leur investissement.
Les entreprises de ce pays nous rendent fiers. Sans ces chefs d'entreprise, pas de richesse dans nos territoires. C'est la vérité, même si cela déplaît aux dirigistes de tout bord, qui rêvent de voir les entreprises gérées par l'État. Il en est incapable : qu'il apprenne d'abord à gérer nos finances !
Certaines aides n'auraient peut-être pas dû être versées, certes, et devraient même, dans certains cas, être remboursées - mais interdire les licenciements aux entreprises ayant reçu des aides n'est pas acceptable.
Ces dispositifs existent pour des raisons précises. C'est parce que les charges sociales patronales sont beaucoup trop élevées qu'il y a des allègements de cotisations sociales et un CICE ; parce que les impôts qui pèsent sur nos entreprises minent leur compétitivité que nous avons un CIR, pour qu'elles puissent investir dans l'innovation.
Ce sont les crédits d'impôts pour les grandes entreprises nationales qui posent problème : quand elles licencient, elles devraient rembourser.
Les licenciements économiques sont très encadrés par le code du travail. Sinon, gare aux oreilles. Le caractère réel et sérieux du motif économique est vérifié par l'administration et peut être contesté devant les tribunaux.
Chers collègues socialistes, interdire aux entreprises de licencier...
M. Thierry Cozic. - On n'interdit pas !
M. Jean-Luc Brault. - ... ne sauverait pas les emplois. Quand une entreprise va mal, elle doit réaliser des économies de fonctionnement. Lui imposer de garder des salariés est contreproductif et inutile. Pire, cette interdiction entraînerait plus de licenciements dans un futur proche, voire la disparition de l'entreprise. On ne licencie jamais avec plaisir, mais c'est parfois nécessaire pour sauver les emplois restants.
Ce débat n'est pas inutile, mais pour remplir votre objectif, il y a plus efficace : interdire les difficultés économiques. (M. Thierry Cozic proteste.) Ce serait beaucoup plus simple !
Remettons ensemble notre pays en marche ! Le groupe Les Indépendants s'opposera à cette proposition de loi.
Mme Pascale Gruny . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous partageons votre constat sur la désindustrialisation de la France. Depuis 1980, 50 000 emplois ont été détruits chaque année dans nos usines. Chaque territoire est concerné par des fermetures de site, des pertes d'emplois. Quelle que soit notre sensibilité politique, nous nous battons pour en sauver le maximum.
Mais nous divergeons sur les solutions. En proposant des mesures très coercitives, vous témoignez à nouveau de votre vision erronée du monde. Vous voulez interdire aux entreprises de recourir aux licenciements économiques quand elles réalisent des profits ou distribuent des dividendes.
Or les licenciements font partie de la vie économique. Nos entreprises ne licencient pas par plaisir ou facilité, mais par contrainte, qu'elles soient en situation de crise ou qu'elles cherchent à préserver leur compétitivité. L'économie mondiale impose une adaptation permanente de l'offre à la demande ; elle sanctionne l'inadaptation des savoir-faire. Le licenciement, solution douloureuse, est parfois le dernier recours pour préserver l'entreprise et maintenir des emplois. Aucune entreprise n'est éternelle. Si elle ne s'adapte pas, elle disparaît.
Voilà ce qui nous différencie des derniers partisans de l'économie dirigée qui, par leur idées fausses et dangereuses, dénaturent le débat. Non, on ne protégera pas l'emploi en France en multipliant les obstacles au licenciement, ni en agitant l'épouvantail des licenciements boursiers pour stigmatiser l'ensemble des entreprises.
Un peu de pédagogie : les dividendes servent à rémunérer une prise de risque des actionnaires, qui peuvent être petits, par exemple des retraités qui souhaitent diversifier leur épargne. En quoi est-ce blâmable ? Ils pourraient choisir d'autres placements, sans emploi à la clé. Je suis sûre que vous placez une partie de vos économies et en attendez un revenu : on peut l'assimiler à un dividende.
Quant aux grands investisseurs, réjouissons-nous qu'ils choisissent encore la France ! Votre proposition de loi est un repoussoir à la création d'activité dans notre pays.
Vous voulez interdire les licenciements dans les entreprises ayant bénéficié du CIR, et privez même l'entreprise, pendant trois ans, de certaines aides publiques en cas de licenciement économique. Or la finalité du CIR n'est pas de maintenir l'emploi mais bien de soutenir l'effort de R&D. Les allègements de charges sociales sont indispensables pour atténuer une fiscalité sur le travail trop élevée.
L'arrivée au pouvoir de François Hollande en 2012 s'était traduite par un matraquage fiscal inédit, avec 50 milliards d'euros de prélèvements supplémentaires - suivi de la création du CICE, pour atténuer la bombe fiscale. C'est une énième illustration du mal français : on crée des impôts et des taxes très élevés, puis on en atténue les effets par des dispositifs complexes, qui serviront à jeter l'opprobre sur les entreprises... Vous vous plaignez d'un mal dont vous chérissez les causes !
Vous défendez une vision punitive de l'entreprise, au lieu de soutenir l'emploi et la réindustrialisation. Alors que nos voisins facilitent l'investissement, vous préférez la sanction. Au lieu de créer un cadre stable et incitatif, vous dissuadez d'investir en France. Au lieu de traiter les causes de la désindustrialisation, vous en accélérez le processus.
Les allègements de cotisation concernent toutes les entreprises de plus de 250 salariés : aucune ne pourrait plus licencier ! Il faut au contraire raisonner au cas par cas, chaque entreprise étant différente.
Rien n'interdit en revanche d'améliorer les contrôles. Quand une entreprise ne respecte pas ses engagements, elle doit rembourser. Le code du travail encadre déjà strictement le licenciement économique : s'il n'est pas justifié, le juge peut l'annuler.
La commission d'enquête présidée par Olivier Rietmann travaille sur ces aides aux grandes entreprises. Attendons les conclusions du rapporteur Fabien Gay avant d'envisager des évolutions.
Nous croyons à la liberté, à un État qui encourage et accompagne, pas à un État qui contraint. Il faut assumer la réalité de l'économie de marché pour lutter contre ses effets. On peut anticiper les conséquences sociales des restructurations, prévenir l'exclusion des salariés les plus vulnérables, engager une politique de réindustrialisation de notre pays.
Partout, les élus se mobilisent pour sauver les emplois. Je rappelle toujours aux représentants du personnel que venir vers nous quand l'entreprise n'investit plus depuis trois ans ne sert à rien. C'est le premier signe qu'il y a un problème.
Les solutions sont bien connues : baisser le coût du travail, mettre fin aux surtranspositions, accélérer le programme sur le nucléaire pour baisser le coût de l'énergie, pratiquer la préférence européenne dans les achats publics, encourager la recherche et l'innovation pour anticiper les ruptures technologiques. Voilà notre boussole, pour que la France redevienne un grand pays industriel et retrouve le plein emploi.
Le groupe Les Républicains votera contre cette proposition de loi.
M. Stéphane Fouassin . - Si l'intention est compréhensible, ce texte nous inspire de nombreuses réserves. Il procède d'une conception rigide du fonctionnement des entreprises. De fait, une entreprise peut être contrainte de se restructurer tout en présentant une performance globale. Cela ne relève pas d'un abus, mais d'une gestion stratégique responsable dans un environnement incertain.
En rigidifiant la capacité d'évolution des entreprises, le dispositif proposé risquerait d'entraîner des destructions d'emplois. En outre, le caractère automatique des sanctions prévues contrevient à des principes fondamentaux du droit.
S'agissant des aides publiques, des travaux parlementaires sont en cours sur le remboursement des aides indûment perçues.
Enfin, songeons à la portée de ce texte sur notre attractivité. Les grandes entreprises sont aussi celles qui investissent et forment. Elles sont tenues à l'exemplarité, mais doivent aussi pouvoir s'adapter, notamment pour anticiper les transformations.
Une économie moderne et ouverte ne se construit pas par des injonctions punitives, mais par la confiance entre l'État, les entreprises et les salariés. Le RDPI votera contre cette proposition de loi. (Mme Pascale Gruny s'en félicite.)
Discussion des articles
Avant l'article 1er
Mme la présidente. - Amendement n°1 de Mme Apourceau-Poly et du groupe CRCE-K.
Mme Cathy Apourceau-Poly. - Nous revenons sur la définition du licenciement économique. Les motifs ont été fortement assouplis par les lois Macron et El Khomri et les ordonnances Pénicaud. Résultat : les licenciements massifs n'ont jamais été aussi faciles !
Alors que la dérégulation de l'économie a provoqué une dérégulation du marché du travail, les salariés ne sont plus considérés que comme des coûts à réduire, externaliser ou délocaliser.
Revenons sur la définition actuelle pour subordonner le recours au licenciement économique à des critères stricts.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - L'amendement redéfinit les motifs du licenciement économique en revenant notamment sur la loi Travail de 2016. En outre, il supprime le périmètre national pour apprécier les difficultés économiques ou les mutations technologiques dans une entreprise appartenant à un groupe international. La commission a émis un avis défavorable. À titre personnel, j'estime cet amendement bienvenu pour rééquilibrer le droit en faveur des salariés.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. - La redéfinition du licenciement économique a permis de lever des freins à l'embauche et d'éviter la multiplication des contrats à durée déterminée. Il n'est pas opportun d'y revenir.
Selon l'Insee, 25 % des entreprises industrielles considèrent que les difficultés de recrutement limitent leur production, contre 7 % en 2006. Les besoins de recrutement dans le secteur industriel sont estimés à 90 000 par an d'ici à 2030.
Ce n'est pas avec ce genre de propositions que l'on facilitera les embauches : avis défavorable.
À la demande du groupe Les Républicains, l'amendement n°1 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°285 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 226 |
L'amendement n°1 n'est pas adopté.
Article 1er
M. Thierry Cozic. - Contrairement à ce qui a été prétendu, cette proposition de loi ne change pas les éléments constitutifs d'un PSE. Simplement, nous rappelons avec force que, lorsqu'une entreprise se prévaut d'un PSE, elle ne doit pas pouvoir verser de dividendes. Nous répondons ainsi à la contradiction consistant pour des entreprises profitables à fermer des sites tout en touchant des aides publiques.
Voilà huit ans qu'Emmanuel Macron est au pouvoir. Le moment est venu de faire le bilan de la politique de l'offre et de la théorie du ruissellement.
La dette publique culmine à 3 300 milliards d'euros, les défaillances d'entreprises explosent et 400 000 emplois ont été détruits en un an, en dépit du versement de 300 milliards d'euros d'aides publiques et alors que les dividendes et rachats d'actions battent des records.
Nos concitoyens ne peuvent plus l'accepter, et j'en appelle à la responsabilité de chacun.
M. Simon Uzenat. - Certains ne veulent pas comprendre ce que nous proposons. Il ne s'agit pas d'économie administrée ni d'interdire les licenciements. Mais vous balayez d'un revers de la main la façon dont les Français perçoivent les situations dont nous parlons.
Nous savions le Président de la République adepte d'une forme d'arrogance. Il est à craindre qu'elle n'ait contaminé un certain nombre de responsables nationaux...
Oui, les petits actionnaires prennent des risques et méritent d'être rémunérés pour cela, mais leur responsabilité doit être interrogée : acceptent-ils de toucher des dividendes un peu moins élevés pour préserver l'emploi en France ?
Quand il s'agit des entreprises, les aides publiques ne semblent pas poser problème au Gouvernement. Vous voulez un État qui contraint pour les uns, pas pour les autres. Nous voulons l'égalité républicaine.
À la demande du groupe Les Républicains, l'article 1er est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°286 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 225 |
L'article 1er n'est pas adopté.
Article 2
Mme la présidente. - Le rejet de cet article entraînerait celui de l'ensemble du texte.
M. Thierry Cozic . - L'article 2 confie au juge le soin d'établir si le licenciement est abusif ou non et, le cas échéant, de contraindre l'entreprise à rembourser les aides publiques perçues ou à ne plus en percevoir à l'avenir.
Je remercie le groupe SER d'avoir retenu cette proposition de loi, sur laquelle je travaille depuis plusieurs années. Le débat ne s'arrêtera pas ce soir. En particulier, la commission d'enquête présidée par Olivier Rietmann et dont Fabien Gay est rapporteur fera des propositions.
Nous devons dépasser les dogmatismes. Nos concitoyens ne comprennent pas que des groupes licencient alors qu'ils bénéficient d'aides publiques. Ce n'est pas supportable, au moment où des efforts sont demandés à chacun.
M. Simon Uzenat . - Ce texte répond à une attente et exprime une volonté politique. Nous avons pris des engagements devant nos électeurs pour changer le cours des choses. Nous ne promettons pas la Lune, mais agissons en responsabilité, ici comme dans les collectivités territoriales que nous gérons.
La concurrence internationale, nous en sommes pleinement conscients. Le monde évolue, et nous devons nous doter d'outils pour préserver l'emploi en France et en Europe. Dans la commission d'enquête que je préside et dont Dany Wattebled est rapporteur, je vois qu'en matière de commande publique, l'idée de préférence européenne fait son chemin.
Nous ne sommes pas opposés à la rémunération du capital, mais dans des proportions raisonnables, qui préservent notre outil industriel, nos emplois et nos compétences, indispensables à notre souveraineté.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l'emploi . - Je suis plutôt connue pour ne pas être dogmatique et porter une parole libre.
Selon l'Insee, 35 000 emplois industriels ont été créés en 2023, puis 25 000 en 2024. Entre 2019 et 2023, 1,3 million d'emplois salariés ont été créés. Pour la sixième année consécutive, la France est le premier pays européen pour l'accueil des investissements étrangers. Cette dynamique a commencé avec les mesures prises en 2016 - une part du crédit vous en revient donc.
Les contributions patronales représentent 10 % du PIB français, même en tenant compte des aides publiques, contre 7 % en Allemagne et en moyenne européenne. Cet écart doit nous interroger, comme nos compatriotes s'interrogent de plus en plus sur la différence entre leur salaire superbrut et leur salaire net.
Difficultés de recrutement, énergie, politique européenne : nous pouvons nous rejoindre sur certains agendas, mais ce que vous proposez avec ce texte n'est pas une bonne réponse.
À la demande du groupe Les Républicains, l'article 2 est mis aux voix par scrutin public.
Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°288 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l'adoption | 115 |
Contre | 226 |
L'article 2 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.