H. ENTRETIEN AVEC M. SMAIL CHERGUI, COMMISSAIRE À LA PAIX ET À LA SÉCURITÉ DE L'UNION AFRICAINE (16 OCTOBRE 2015)

Le 16 octobre, la délégation a rencontré M. Smaïl Chergui, Commissaire à la Paix et à la Sécurité de l'Union africaine (UA). Le Commissaire a remercié la France pour avoir organisé la Conférence « Climat et Défense », à laquelle il avait participé le 14 octobre à Paris. Cette conférence avait été un succès, et les participants souhaitaient que cette initiative soit reconduite à l'avenir.


Conférence internationale sur les enjeux des changements climatiques en matière de sécurité internationale et leurs impacts sur les politiques de défense des États

Paris, 14 octobre 2015

Cette conférence, qui constitue une première a été organisée avec le soutien du Sénat dont la commission des Affaires étrangères et de la Défense a publié un rapport d'information intitulée : « climats : vers un dérèglement géopolitique ? ».

Cette conférence a permis aux plus hauts responsables de la défense de nombreux pays d'échanger sur la prise en compte du facteur environnemental et climatique dans l'analyse des risques internationaux. En effet, en contribuant à aggraver la situation sociale, économique ou politique de certains pays vulnérables et en amplifiant des déséquilibres susceptibles de déboucher sur des crises ou des conflits, les effets des changements climatiques s'imposent d'ores et déjà comme un enjeu.

Source : rapport d'information du Sénat n °14 (2015-2016) du 6 octobre 2015,
par M. Cédric Perrin, Mmes Leila Aïchi et Éliane Giraud.

Les sénateurs ont interrogé le Commissaire sur la capacité de l'Afrique à assurer elle-même la sécurité du continent africain au regard des crises actuelles ainsi que sur la lutte contre le terrorisme.

Le Commissaire a souligné les progrès de l'Afrique pour assurer sa sécurité, à travers l'Architecture africaine de Paix et de Sécurité (APSA) et le Conseil de Paix et de Sécurité de l'UA. L'exercice Amani Africa II, le 19 octobre 2015, serait l'occasion d'évaluer les performances de la Force africaine en attente (FAA). L'UA doit organiser une réunion avec les ministres de la Défense africains en janvier 2016, afin de tirer les enseignements de l'exercice militaire et de juger du caractère opérationnel de la Force africaine en attente avant le sommet de l'UA.

Un effort particulier concerne la prévention avec, en particulier, le système continental d'alerte précoce et une initiative en cours dans quatre pays volontaires, qui permettraient de déceler les fragilités ou l'imminence d'un conflit. Il existe aussi d'autres mécanismes d'évaluation par les pairs qui reposent sur une base volontaire et permettent de dégager les bonnes pratiques. Ce mécanisme regroupe quarante pays africains.

Le Commissaire a affirmé la détermination réelle de l'Afrique à prendre en charge sa propre sécurité, sans laquelle il n'y aura pas de développement. Pour cela, il a estimé qu'il ne faut pas hésiter à poser les questions qui fâchent très librement et ne pas être à la traîne de desseins personnels qui déstabilisent pays et régions et ternissent l'image de l'Afrique.

On constate une adhésion nette de la communauté internationale sur ce que l'Union africaine fait concrètement sur le terrain en particulier au sein de l'AMISOM en Somalie et de la MISCA en Centrafrique.

S'agissant du financement de ces opérations, le Commissaire a indiqué son ambition d'aboutir à une prise en charge par les États africains eux-mêmes qui dépendent « à un niveau très élevé, inacceptable de nos partenaires ». Un rapport est attendu avec des propositions de financements innovants qui pourraient faire appel à des taxes continentales. La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDAO) est l'organisation sous-régionale la plus évoluée, qui réunit 600 millions par an. D'ici à 2020, le Commissaire a fait valoir que les chefs d'État se sont engagés à couvrir 25 % du coût des missions de paix et de sécurité. « La détermination est totale », a-t-il martelé. Par ailleurs, le Président Barack Obama a proposé que les Nations Unies, à travers les contributions des États membres, puissent prendre en charge 75 % des engagements de l'Afrique autorisées par le Conseil de sécurité, ce qui permettrait une meilleure prévisibilité.

Le Commissaire considère la lutte contre le terrorisme comme le « défi du siècle ». Dans ce domaine, l'UA avait mis en place le processus de Nouakchott en Afrique de l'Ouest, et le processus de Djibouti en Afrique de l'Est, afin de favoriser des échanges réguliers entre ministres de la Défense, ainsi qu'entre services de sécurité des pays africains. La prochaine réunion du processus de Djibouti était prévue en novembre 2015 à Addis-Abeba.

Sur le Soudan du Sud, le Commissaire a indiqué que la mise en oeuvre de l'accord de paix constituait la seule solution envisageable pour résoudre le conflit. Le suivi de la mise en oeuvre de l'accord relève des Nations Unies et de l'UA, ainsi que de la « Joint Monitoring and Evaluation Commission », présidée par l'ancien Président de la République du Botswana, M. Festus Mogae. Il faut également s'assurer de la non-interférence des États de la région dans le processus de paix. L'IGAD (Autorité intergouvernementale pour le développement) doit également prendre du recul et laisser l'Union africaine et les Nations Unies mettre en oeuvre l'accord. Il existe d'énormes difficultés humanitaires, économiques et en matière de droits de l'homme. L'une des difficultés importante est la définition du mandat donné par les Nations Unies, celui-ci n'incluant pas l'imposition de la paix. A plus long terme, la réconciliation exige l'émergence d'une nouvelle élite politique dans le pays dans le cadre d'un processus de réconciliation.

Interrogé sur la présence chinoise à Djibouti, le Commissaire a souligné que la Chine avait permis au pays de diversifier ses partenariats et ses sources de revenus. Le Commissaire a prévu de se rendre à Pékin en novembre, avant le sommet Chine-Afrique des 4-5 décembre en Afrique du Sud.

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