Les critères de choix

Dana GRUIA-DUFAUT,
Avocat au barreau de Paris,
Avocat-Conseil de l'Ambassade de France en Roumanie,
Cabinet Bertagna-Gruia Dufaut

Je voudrais ce matin vous parler de la Roumanie et du choix à faire entre investissements directs et privatisations. Selon l'Agence Roumaine de Développement, 6,4 milliards de dollars avaient été investis dans le pays, à fin 1999. La France occupe la première place en termes de capitaux investis, pour un montant de 715 millions de dollars. France Telecom, Renault, la Société Générale et Lafarge sont en la matière les principaux intervenants. La France est suivie par les Pays-bas, les Etats-Unis et l'Allemagne. Par ailleurs, notre pays occupe la première place en termes de sociétés créées, avec 8 500 entités. Les types d'investissements étrangers en Roumanie, ce qui inclut les bureaux de représentation -contrairement à l'expression « investissement direct »-, renvoient aux filiales, aux succursales, aux sociétés mixtes...

Les bureaux de représentation ont un rôle sur le marché roumain, un rôle de VRP ou d'agent commercial. Ces bureaux ne peuvent normalement pas signer eux-mêmes des contrats... Les autorisations de fonctionnement sont généralement délivrées pour un an, et sont renouvelables. Les bureaux de représentation ont longtemps bénéficié d'une imposition favorable. Actuellement, ils sont soumis à l'impôt sur les sociétés, soit selon une grille du nombre de salariés, soit selon le revenu net, c'est-à-dire commissions de la société-mère moins les charges.

Les filiales et sociétés mixtes sont de formes diverses : SA (sachant que plus aucun capital minimal n'est exigé pour les investisseurs étrangers), Société à Responsabilité Limitée (SRL), société en nom collectif, en commandite simple ou par action. Les investisseurs étrangers choisissent souvent une SRL à associé unique, parfois la SA. Salomon, lors de son investissement en Roumanie, a choisi la solution de l'associé unique de SRL, comme Bouygues ou Guyomar par exemple.

Le second volet à prendre en compte est celui des privatisations. En août 1990, les unités de l'Etat sont devenues des régies autonomes, dans les secteurs stratégiques de l'Etat, ou se sont organisées en sociétés commerciales type SA ou SRL, destinées à être privatisées. Je constate d'ailleurs que les régies sont de plus en plus appelées à être privatisées, ainsi que nous le vérifions dans le domaine de l'électricité.

Les privatisations se sont intensifiées en 1995, suite au vote de la loi sur l'accélération de la privatisation. La population a reçu, en plus des certificats de 1991, des coupons nominatifs : l'on parle désormais d'actionnaires PPM. Nous avons donc assisté à une privatisation de masse, qui a concerné, dans certains cas, jusqu'à 60 % du capital. Même lorsqu'un acteur étranger est intéressé, l'Etat conserve toujours au minimum 51 % du capital. Tel fut le cas pour Romcin, avant l'opération de Lafarge. Romcin comptait d'ailleurs 10 000 à 15 000 petits actionnaires. Entre 1996 et 2000, les méthodes de privatisation furent la vente d'actifs et la vente d'actions. S'agissant de la vente d'actions, le Fonds de la Propriété d'Etat a privilégié la négociation directe puis d'autres procédures comme les enchères publiques, l'offre sur le marché, les offres publiques de vente... Par ailleurs, dans le cas de la vente d'actifs, le Fonds de la Propriété d'Etat a considéré certains actifs pour la privatisation mais aussi pour la liquidation.

Que choisir donc, investissement direct ou privatisation ? Toute solution a ses avantages et ses inconvénients. Longtemps, les privatisations ont souffert car les pouvoirs publics n'accordaient pas de garantie de passif. Désormais, cette garantie existe mais seulement pour le volet fiscal. Des sociétés, comme Lafarge ou la Société Générale, ont préféré travailler sur les privatisations afin de s'implanter plus rapidement sur le marché. En revanche, la création d'une société nouvelle a été privilégiée pour développer un nouveau marché. L'exemple de France Telecom avec Dialog, pour la téléphonie mobile, est à cet égard probant.