NOTE DE SYNTHESE

Le droit français de l'adoption, que la proposition de loi adoptée le 17 janvier 1996 par l'Assemblée nationale cherche à modifier, reste très marqué par la loi du 11 juillet 1966, même si des évolutions législatives sont intervenues ultérieurement.

Comme les législations de nos principaux voisins (Allemagne, Angleterre et Pays de Galles, Belgique, Espagne et Italie) sont toutes plus récentes que la nôtre, il a semblé intéressant de comparer certaines des dispositions de la proposition de loi aux dispositions étrangères équivalentes.

La proposition de loi tend à modifier non seulement le code civil mais également celui de la famille et de l'aide sociale, ainsi que ceux de la sécurité sociale et du travail. On a donc, en limitant le champ de l'étude à l'adoption des mineurs, retenu les cinq points suivants :

- les conditions relatives aux adoptants ;

- les droits de l'enfant dans la procédure ;

- la valeur, nationale ou non, de l'agrément donné aux candidats à l'adoption ;

- le secret des origines ;

- les prestations sociales liées à l'adoption.

I - C'EST EN ITALIE QUE LES CONDITIONS RELATIVES AUX ADOPTANTS SONT LES MOINS SOUPLES

La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale vise à réduire l'âge minimal requis pour adopter ainsi que la durée minimale de mariage lorsque l'adoption est le fait d'un couple.

1) L'âge minimal requis est de 21 ans en Angleterre et au Pays de Galles et de 25 ans en Allemagne, en Belgique et en Espagne.

De plus, en Allemagne et en Espagne, lorsque l'adoption est réalisée par un couple, il suffit qu'un seul des deux conjoints ait 25 ans.

2) Aucune durée minimale de mariage n'est exigée dans ces quatre pays.

L'Espagne admet même qu'un couple non marié adopte un enfant.

3) Les dispositions italiennes sont plus strictes.

Seul un couple marié depuis au moins 3 ans peut adopter un enfant. La loi ne prescrit pas d'âge minimal, mais la différence d'âge entre l'adoptant et l'adopté doit être comprise entre 18 et 40 ans.

II - LES LOIS ESPAGNOLE ET ITALIENNE SONT LES PLUS EXPLICITES SUR LES DROITS DE L'ENFANT

La proposition de loi cherche à renforcer les droits de l'enfant en prévoyant sa consultation sur toute question relative à son placement ou à son adoption dès lors qu'il est capable de discernement.

1) A l'exception de la loi anglaise, toutes les lois requièrent le consentement explicite de l'enfant à partir d'un certain âge.

Cet âge est fixé à 12 ans en Espagne , à 14 ans en Allemagne et en Italie , et à 15 ans en Belgique .

En Angleterre et au Pays de Galles , la loi de 1976 sur l'adoption retient un critère pragmatique . Elle exige que les tribunaux décident de l'adoption dans le seul intérêt de l'enfant en prenant en considération " ses désirs et ses sentiments " compte tenu de " son âge et de sa compréhension ".Toutefois, le livre blanc sur la réforme de l'adoption prévoit le renforcement des droits de l'enfant, notamment par son consentement explicite à partir de l'âge de 12 ans.

2) Seules les lois espagnole et italienne prévoient l'audition des enfants trop jeunes pour donner leur consentement.

D'après le code civil espagnol, lorsqu'il a moins de 12 ans, l'enfant adopté doit être entendu par le juge à condition d'avoir " suffisamment de discernement ".

Le code civil italien oblige le juge à entendre l'enfant âgé de moins de 14 ans et de plus de 12 ans. En dessous de 12 ans, l'audition n'a lieu que si le tribunal le souhaite.

III - L'AGREMENT DONNE AUX CANDIDATS A L'ADOPTION N'EST PAS TOUJOURS RECONNU AU PLAN NATIONAL

Pour faciliter les démarches entreprises par les candidats à l'adoption, la proposition de loi tend à donner une valeur nationale à l'agrément qui leur est accordé.

1) En Allemagne, en Espagne et en Italie, on peut considérer que l'agrément donné aux candidats a une valeur nationale.

En Allemagne, des organismes agréés, publics ou privés, sont chargés de sélectionner les candidats. A l'intérieur d'une filière donnée, il y transmission des dossiers. Ainsi, lorsqu'un candidat à l'adoption change de domicile, il n'a pas à recommencer l'intégralité de la procédure.

De même, en Espagne, où l'adoption relève de la compétence des communautés autonomes, les services sociaux des différentes communautés se transmettent les dossiers.

En Italie, un couple qui désire adopter un enfant doit déposer une demande écrite auprès d'un tribunal des mineurs. Il peut présenter plusieurs demandes à différents tribunaux, à condition que chaque tribunal en soit informé. Les tribunaux, qui ont la possibilité de faire réaliser des enquêtes sur les couples candidats, échangent les renseignements dont ils disposent.

2) En Angleterre et au Pays de Galles ainsi qu'en Belgique, l'agrément des candidats à l'adoption n'a pas de valeur nationale.

En Angleterre et au Pays de Galles, la sélection des candidats à l'adoption est effectuée par des agences agréées. Or, la plupart des agences répugnent à prendre en compte les demandes de personnes qui sont déjà entrées en contact avec d'autres agences. Une personne qui s'adresse à une agence dont la couverture géographique est limitée doit donc reprendre l'intégralité des démarches après un changement de domicile.

En Belgique, la procédure d'agrément des candidats est réglementée différemment dans les trois communautés. En outre, à l'intérieur de chacune des trois communautés, chaque organisme d'adoption agréé établit ses propres critères de sélection.

IV - SAUF EN ITALIE, LA RECHERCHE DES ORIGINES EST FACILITEE PAR L'IMPOSSIBILITE DE L'ACCOUCHEMENT ANONYME

Tout en maintenant l'accouchement anonyme, la proposition de loi prévoit le recueil auprès de la mère d'éléments d'information " non identifiants ", mais susceptibles de faciliter la recherche ultérieure des origines.

1) L'accouchement anonyme n'existe qu'en Italie.

Un dossier médical comportant des renseignements médicaux sur la mère et sur l'enfant est alors constitué. Seul le médecin traitant peut y avoir accès. Même devenu majeur, l'enfant adopté ne peut en avoir connaissance.

Dans les autres pays, l'accouchement anonyme est impossible. En Belgique, une proposition de loi tendant à l'introduire a été déposée à la Chambre des représentants en 1982. Discutée par la commission compétente, elle n'a pas été retenue.

2) L'information sur les origines est très diversement assurée.

a) En Allemagne, la Cour constitutionnelle garantit à chacun le droit de connaître sa propre filiation.

A partir de 16 ans, l'enfant adopté peut consulter les registres d'état civil le renseignant sur sa filiation d'origine.

b) En Angleterre et au Pays de Galles, la loi a organisé la communication des informations sur les origines.

Une copie de tous les jugements d'adoption est adressée au greffe central de l'état civil qui tient le " registre des adoptions ". Or, le greffe central a l'obligation de fournir à toute personne de plus de 18 ans les renseignements lui permettant d'obtenir une copie de son acte de naissance, lequel mentionne les noms et adresse(s) des parents au moment de la naissance.

En outre, depuis 1989, il existe un " registre des contacts " qui permet aux parents naturels et aux enfants adoptés devenus majeurs de demander les informations dont ils ont besoin pour prendre contact. L'information n'est fournie que si les deux parties sont d'accord.

c) En Belgique, en Espagne et dans une moindre mesure en Italie, les mentions portées en marge de l'acte de naissance garantissent une certaine transparence.

Dans chacun de ces trois pays, l'adoption est mentionnée dans l'acte de naissance. Or, ce dernier révèle nécessairement l'identité de la mère, sauf en Italie en cas d'accouchement anonyme.

Comme les actes d'état civil et les mentions marginales font respectivement en Belgique et en Espagne l'objet d'une publicité restreinte, le secret des origines est garanti à l'égard des tiers, mais pas de l'adopté.

En Italie, les copies des actes d'état civil des adoptés doivent être délivrées avec la seule indication du nouveau nom, sans la moindre mention relative à l'adoption. Il faut une autorisation expresse du tribunal pour que l'officier d'état civil communique les mentions marginales concernant l'adoption.

V - L'ARRIVEE D'UN ENFANT ADOPTE OUVRE DROIT A DES PRESTATIONS SOCIALES SPECIFIQUES DANS TOUS LES PAYS SAUF EN ANGLETERRE ET AU PAYS DE GALLES

La proposition vise à étendre aux familles adoptantes le bénéfice des prestations et des congés accordés actuellement au moment de la naissance d'un enfant ou en raison de la présence de très jeunes enfants au foyer.

1) L'Allemagne, la Belgique, l'Espagne et l'Italie assimilent plus ou moins adoption et naissance.

En Allemagne , la législation sur le congé parental d'éducation prend en compte le cas particulier des enfants adoptés. L'enfant adopté n'étant pas nécessairement un nourrisson, le congé peut être pris jusqu'à ce que l'enfant ait 8 ans, au lieu de 4 ans dans le cas d'un enfant non adopté.

En Belgique , les parents adoptifs reçoivent une prime d'adoption lors de l'arrivée de l'enfant. Le montant de cette prime est le même que celui de l'allocation versée pour la naissance d'un premier enfant. En outre, les agents de l'Etat ont droit à un congé rémunéré de 4 ou 6 semaines selon que l'enfant adopté a plus ou moins de 3 ans.

En Espagne et en Italie , l'arrivée d'un enfant adopté ouvre doit à un congé comparable au congé de maternité.

2) En Angleterre et au Pays de Galles, l'arrivée d'un enfant adopté ne s'accompagne d'aucune prestation spécifique.

Les organismes de protection sociale ne fournissent aucune aide particulière lors de l'arrivée d'un enfant adopté. En revanche, les agences d'adoption accordent parfois des aides financières aux adoptants.

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