LE STATUT DES MÉTROPOLES

La Division de la Législation comparée du Sénat a conduit une recherche sur le statut juridique des métropoles dans sept pays : l'Allemagne, l'Angleterre - cas particulier au sein du Royaume-Uni, l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, l'Italie et le Portugal.

Ont été retenus des pays où la réalité géographique métropolitaine a connu une élaboration spécifique et une structuration juridique, où la métropole est devenue une personne juridique dotée d'organes et de compétences propres, tout en connaissant divers degrés d'intégration et de différenciation par rapport aux autres collectivités territoriales selon les États.

Cas limite pour illustrer la région scandinave, le Danemark ne va guère au-delà d'une adaptation des règles générales d'organisation interne et de fonctionnement des communes au cas particulier de sa capitale Copenhague, sans élaborer de forme juridique nouvelle.

Dans la sphère germanique, des statuts particuliers applicables aux plus grandes villes existent et les différencient pour partie des autres communes, mais le mouvement de métropolisation semble beaucoup moins prononcé et saillant qu'en Angleterre, en Italie ou au Portugal où l'émergence de métropoles est au coeur de la réorganisation territoriale récente. Par contraste, la métropolisation demeure encore embryonnaire en Espagne, les instruments juridiques existants demeurant largement sous-exploités. Cela peut être dû au contexte politique délicat de ces dernières années.

On constate fréquemment que la volonté de faire émerger des métropoles dotées d'organes propres et de compétences renforcées a tardé à se concrétiser dans des textes normatifs et que ces textes ont eux-mêmes souvent tardé à porter des effets concrets. La dynamique de métropolisation s'est intensifiée nettement à partir du milieu des années 2010.

1. L'émergence des combined authorities comme instrument de décentralisation propre à l'Angleterre
a) Présentation de l'organisation territoriale britannique et particularités anglaises

Pour mieux comprendre la genèse et la structuration des métropoles anglaises, il est apparu utile de rappeler succinctement l'organisation territoriale globale du pays, notoirement complexe. L'Angleterre garde une position très particulière au sein du Royaume-Uni après le mouvement de dévolution différenciée aux nations d'Écosse, du Pays de Galles et d'Irlande du Nord. Malgré des compétences et des schémas institutionnels différents dans ces trois régions dotées d'autonomie, leur organisation territoriale interne articulée sur un réseau d'autorités locales de niveau communal est simple et uniforme. Celle de l'Angleterre procède d'une logique quelque peu différente.

L'Angleterre n'est pas à proprement parler une collectivité territoriale autonome du Royaume-Uni. Elle est gérée directement par le gouvernement britannique et son assemblée délibérante est le Parlement britannique 136 ( * ) . Il n'existe pas d'équivalent de l'échelon régional. Le pays demeure extrêmement centralisé, malgré un mouvement récent de décentralisation, et ne répond pas à un schéma uniforme d'organisation.

Une partie du territoire anglais stricto sensu connaît deux échelons superposés aux compétences distinctes. Ces zones sont gérées par le couple formé des conseils de comté ( county council ) dits collectivités d'échelon supérieur ( upper tier ) et des conseils de district ( district council ) dits collectivités d'échelon inférieur ( lower tier ). L'étendue géographique des comtés demeure faible en comparaison des départements français ou des provinces italiennes ou espagnoles. Sur le reste du territoire anglais, il n'existe qu'un seul niveau de collectivités territoriales autonomes ( local government ) dotées d'organes et de compétences propres, qu'on peut assimiler au niveau communal 137 ( * ) . En général, les zones plus rurales répondent au modèle à double échelon et les zones les plus urbanisées répondent au modèle de l'échelon unifié.

Toutefois, on peut encore distinguer pour des raisons historiques et contingentes deux types de collectivités dans les zones urbaines à échelon unique : on y trouve en effet soit des autorités unitaires ( unitary authorities ), soit des arrondissements métropolitains ( metropolitan boroughs ) dont les compétences diffèrent à la marge en matière de gestion des déchets, de police et de secours contre l'incendie.

En prenant le conseil local ( council ) comme unité territoriale de base, on considère que l'Angleterre comprend 343 conseils locaux répartis ainsi :

- dans les zones à deux échelons, 192 districts répartis dans 26 comtés ;

- dans les zones à échelon unique, 55 autorités unitaires et parallèlement 36 arrondissements métropolitains ;

- à Londres, l'Autorité du grand Londres et les 32 arrondissements londoniens ;

- la collectivité unitaire sui generis des îles Scilly.

À titre de comparaison, l'Écosse compte simplement 32 autorités unitaires, le Pays de Galles 22 autorités unitaires et l'Irlande du Nord 11 autorités du même type. Sur le territoire de ces trois nations, il n'existe pas de différence de statut entre zones, l'urbain et le rural étant traités de façon homogène.

Les compétences des conseils locaux en Angleterre sont fixées par la loi. Elles concernent sans surprise la collecte et la gestion des déchets, la levée des taxes locales, l'éducation, les bibliothèques, les services sociaux, les transports, l'aménagement et la planification, les cimetières, et sous certaines conditions, la police et la sécurité incendie. Dans les zones à double échelon, les conseils de comté et conseils de district se partagent pour l'essentiel les compétences qui sont exercées de façon unifiée dans les zones à échelon unique.

Ce n'est que très récemment qu'est apparu en droit public anglais l'équivalent d'une clause de compétence générale au bénéfice des conseils locaux. Leur a d'abord été concédée aux termes du Local Government Act de 2000 une responsabilité globale de promouvoir le bien-être de leur population dans toutes ses dimensions économique, sociale et environnementale ( well-being power ). Il n'en restait pas moins que les collectivités anglaises étaient seulement autorisées à agir lorsque la coutume de Common Law ou une loi approuvée par le Parlement britannique leur donnait positivement un pouvoir ou une compétence. Toute intervention au-delà était considérée comme illégale. C'est pourquoi, sous la forme de Private Bills , c'est-à-dire de proposition ou projet de loi s'adressant à un intérêt particulier ou répondant à une situation particulière, ont fleuri des initiatives visant à adopter des lois ciblées, les Local Acts , accordant des pouvoirs spéciaux ou des autorisations pour agir spécifiques à des collectivités nommément désignées et seulement à celles-ci. Le législateur au niveau central gardait ainsi la haute main sur le type d'initiatives que pouvait prendre chaque collectivité au plan local.

Un tournant est marqué par le Localism Act 2011 (sections 1 à 6) qui introduisit une clause de compétence générale en conférant aux collectivités un general power of competence . La logique précédente a été inversée : la compétence est maintenant supposée et la loi en précise les limites. Les collectivités, plus précisément les conseils locaux, sont désormais autorisées à faire tout ce qu'une personne individuelle a le droit de faire, sauf si une loi l'interdit spécifiquement. En particulier, elle peut établir des activités à but commercial et elle peut facturer des services. Elle n'a plus à apporter la preuve préalable que ses interventions dans de nouveaux domaines ou selon de nouvelles modalités bénéficieront à la collectivité ou à ses résidents, comme c'était le cas lorsqu'il fallait faire systématiquement approuver à Westminster un Local Act pour disposer de nouvelles prérogatives.

Cependant, cette nouvelle compétence générale demeure peu utilisée par les collectivités anglaises, en partie par la force des habitudes anciennes, parce qu'elles en sont encore peu familières, en partie aussi à cause des limitations importantes qui restreignent juridiquement la portée du principe. En effet, conformément à la Common Law et à la loi de 2011, la clause de compétence générale ne donne aucun pouvoir supplémentaire aux conseils locaux ni pour lever de nouvelles taxes ou de nouveaux emprunts, ni pour demander une contribution financière aux usagers de services qu'ils ont l'obligation d'apporter, ni pour étendre leur pouvoir réglementaire ou leur pouvoir de police administrative au-delà des limites précédemment établies. En outre, l'introduction de la clause de compétence générale n'a pas pour effet d'abroger des dispositions législatives antérieures, si bien qu'elle ne lève aucune des limitations explicites posées par des lois antérieures à l'exercice des autonomies locales ( pre-commencement limitations ). En revanche, les limitations nouvelles ou la redéfinition nouvelle des pouvoirs et compétences des collectivités ne peuvent limiter la clause de compétence générale qu'à la condition qu'elles le mentionnent expressément.

Malgré les évolutions récentes, l'État central reste encore nettement prédominant en Angleterre.

b) L'émergence de métropoles à partir de 2009 et la conclusion d'accords de décentralisation

Pour injecter plus d'autonomie locale et de décentralisation, pour rééquilibrer le développement économique très concentré autour de Londres et pour tenir compte également des aspirations et des capacités des grandes agglomérations urbaines qui souhaitaient disposer de plus de compétences et de moyens propres, a été créé et développé entre 2009 et 2016 un nouveau statut de combined authority qui répond à la notion française de métropole. En Angleterre, la métropolisation est ainsi conçue comme une décentralisation ( devolution 138 ( * ) ) associant transfert de compétences de l'État et compensations financières négociées, bien davantage que comme une rationalisation des strates de l'organisation territoriale.

Toutefois, ce mouvement, fondamentalement politique, demeure récent, fragile - certains commentateurs le considèrent comme potentiellement réversible - et dépendant de la détermination du gouvernement en fonction. De fait, David Cameron et Georges Osborne avaient beaucoup soutenu ce mouvement initié d'abord par les travaillistes mais la dynamique a été freinée par l'enlisement du Brexit.

Le cadre juridique a été défini par le Local Democracy, Economic Development and Construct Act de 2009 (Part 6, sct. 103 à 114), puis amendé et élargi par le Cities and Local Government Devolution Act de 2016 qui vise l'approfondissement de la décentralisation en Angleterre. Aux termes du dispositif légal, les combined authorities ou autorités conjointes qui gèrent les métropoles anglaises constituent des collectivités locales autonomes, établies par une ordonnance ( order ) du ministre compétent entre plusieurs conseils locaux contigus, quel que soit leur statut, afin de coordonner leurs actions et d'exercer en commun certaines compétences. Des compétences supplémentaires peuvent être également transférées par l'État central à la nouvelle métropole. L'ordonnance en question est une norme prise par le pouvoir réglementaire et soumise au Parlement ; elle a le statut juridique de législation déléguée ( statutory instrument ). La création d'une métropole est le résultat d'une concertation entre collectivités qui définissent un projet, qui doit être approuvé localement, puis soumis à l'État central. Elle concentre les responsabilités et la prise de décision au niveau de l'autorité conjointe sans supprimer les conseils locaux qui la constituent.

À plusieurs reprises, les conseils locaux ont rejeté des projets de constitution d'une autorité conjointe, à chaque fois sur des périmètres très larges et des zones hétérogènes. Ainsi, le projet du Grand Nord-Est a échoué en 2015 avant d'être repris sous un format plus étroit autour de Newcastle. De même, le Grand Lincolnshire a été rejeté en 2016 par un conseil de comté et un conseil de district avant d'être purement et simplement retiré. Enfin, un projet initial sur la totalité de l' East Anglia a été abandonné en 2016, puis repris mais divisé en deux : l'un sur Norfolk-Suffolk a été rejeté par cinq conseils de districts, l'autre autour du Cambridgeshire-Peterborough a finalement vu le jour. Les projets abandonnés s'apparentaient en un sens davantage à la constitution d'une région que d'une métropole. Lorsqu'ils ont été partiellement revisités, leur ressort a été resserré et les ambitions de transfert de compétences revues pour assurer la viabilité et l'opérabilité de la nouvelle collectivité. Dans la pratique, l'ambiguïté ou la flexibilité - selon la perspective adoptée - de l'instrument juridique de la combined authority , a été ainsi tranchée en faveur de la logique métropolitaine.

Il convient de remarquer que des collectivités de type et de niveau différents (unitaires ; districts et comtés) peuvent s'associer pour former une métropole. La définition du périmètre n'impose pas de condition sur la densité de la population ou sur la restriction à des zones urbanisées. Chaque cas est examiné pour lui-même en fonction des bénéfices attendus pour la cohérence et l'efficacité de l'action publique locale. De fait, les principaux centres urbains d'Angleterre se sont organisés en métropole mais il faut noter que les périmètres géographiques apparaissent nettement plus larges qu'en France et certaines combined authorities comme Cambridgeshire-Peterborough couvrent des zones rurales et périurbaines autour de centres urbains d'importance moyenne. On peut enfin remarquer que certaines métropoles sont contiguës comme le chapelet urbain très dense formé par Sheffield, Leeds, Manchester et Liverpool.

La loi fournit un cadre très général qui doit être impérativement complété par des dispositions précises sur les compétences exercées, sur les organes internes, sur la fonction de maire de la métropole dans les ordonnances constitutives et dans des règlements intérieurs très détaillés approuvés par les conseils locaux. La clause de compétence générale s'applique expressément aux métropoles.

En outre, des négociations sont conduites entre l'État central et les conseils locaux formant la métropole pour définir des accords de décentralisation ( devolution deal ) qui règlent les transferts de compétences nouvelles et les questions financières. Les accords de dévolution sont régulièrement négociés en fonction de l'enracinement et de la montée en puissance de la métropole. Ainsi le Grand Manchester, la première métropole constituée dès 2011, a-t-elle négocié cinq accords successifs depuis 2014. Les démarches de métropolisation et de négociation d'accords de décentralisation sont fortement liées mais demeurent indépendantes. Par exemple, la Cornouailles a conclu avec l'État central un accord de dévolution sans pour autant constituer une combined authority . Une partie des dispositions des accords doivent être transposées dans une ordonnance complétant l'ordonnance constitutive pour pouvoir être appliquées. Les nouvelles compétences dont le transfert a été négocié portent en général sur les transports, la formation professionnelle, l'aménagement et la gestion des fonds structurels européens. Certaines métropoles comme le Grand Manchester, Birmingham ou Bristol dans une moindre mesure ont bénéficié de transferts plus larges. Manchester en particulier a considérablement étendu ses responsabilités sur le système de santé, sur le logement, sur la protection de l'enfance, à la justice de mineurs et à la police. D'autres comme Cambridgeshire-Peterborough, Newcastle ou Sheffield sont encore très en retrait.

En annexe figure un tableau synthétique résumant les compétences transférées lors des différents accords de décentralisation à chacune des dix métropoles 139 ( * ) constituées en Angleterre depuis 2011. Les transferts de compétences sont compensés par des transferts financiers négociés dans l'accord de décentralisation sous forme de subventions annuelles de l'État comprises entre 15 millions et 36,5 millions de livres par an 140 ( * ) pendant 30 ans. Ces subventions peuvent être complétées dans certaines métropoles par des éléments de fiscalité locale (rétention de l'équivalent de l'ancienne taxe professionnelle, contributions supplémentaires) ou par la constitution de fonds complémentaires fléchés. Là encore, le Grand Manchester est la métropole la plus avancée (cf. tableau en annexe).

On peut distinguer les métropoles selon le statut et les prérogatives du maire de la métropole ( mayor ), la loi de décentralisation de 2016 ayant considérablement renforcé cette fonction et ses pouvoirs propres. Dans huit métropoles (Birmingham, Bristol, Manchester, Liverpool, Middlesbrough, Newcastle, Peterborough et Sheffield) le maire est directement élu par la population au cours d'un scrutin distinct des élections dans les conseils locaux. C'est ainsi qu'on retrouve parfois des maires appartenant à un parti opposé à la majorité des conseils constituant la métropole (Middlesbrough et Birmingham actuellement). Les deux métropoles (Durham et Leeds) ne disposant pas de maire métropolitain élu au suffrage direct sont celles où la négociation d'accords de décentralisation avec l'État central a échoué. Les deux questions sont étroitement liées, le gouvernement considérant que le maire métropolitain doit être le garant de l'accord et porter la responsabilité des nouvelles compétences transférées devant la population.

La gouvernance des métropoles demeure à géométrie variable mais cherche partout à concilier la prédominance du maire métropolitain, considérée comme nécessaire pour impulser des projets communs, et les intérêts des collectivités membres placées sur un pied d'égalité. L`autorité conjointe qui dirige la métropole est constituée par le maire et les représentants ( council leader ) de chaque collectivité territoriale appartenant à la métropole. Chaque membre dispose d'un vote unique. Les pouvoirs propres du maire et les modalités de prise de décision au niveau de l'autorité conjointe diffèrent selon les métropoles. Certaines tendances se révèlent néanmoins. Dans la plupart des autorités conjointes, les maires disposent d'un véto assez général sur les décisions de la métropole. À l'inverse, certaines décisions nécessitent une majorité qualifiée ou l'unanimité des membres de l'autorité.

L'unanimité est en général requise pour l'approbation du règlement intérieur et des statuts, des plafonds d'emprunt et des documents de planification urbaine élaborés par le maire. Cependant, les règles varient nettement d'une métropole à l'autre. Par exemple, la stratégie ou les plans d'organisation des transports nécessitent un soutien des 2/3 à Manchester ou à Peterborough et l'unanimité à Bristol. Les conditions sont plus souples ailleurs : c'est le rejet de ces mêmes documents sur les transports locaux qui nécessite une majorité des 2/3 à Liverpool et des 3/5 à Middlesbrough. Les plans de dépenses élaborés par le maire peuvent être rejetés par une majorité des 2/3 des membres de l'autorité conjointe à Liverpool et à Birmingham. L'approbation du budget requiert l'unanimité à Liverpool alors qu'à Peterborough, son rejet exige qu'une majorité des 2/3 des membres vote contre.

Certains pouvoirs ne peuvent être exercés que par le maire métropolitain, comme l'établissement de Mayoral Development Corporations , des sociétés foncières métropolitaines chargées de porter des projets d'aménagement et de développement. Le maire de Cambridgeshire-Peterborough ne dispose toutefois pas de cette compétence. En outre, une fois constituée la société foncière et d'aménagement, elle ne peut intervenir dans le ressort d'une des collectivités formant la métropole sans l'accord du représentant de cette collectivité au sein de l'autorité conjointe.

Le législateur britannique a également autorisé l'exercice par le maire d'une métropole de la responsabilité des services de police, à condition que l'accord de décentralisation le prévoie et que ce transfert de compétences soit validé par une ordonnance lui conférant un statut législatif. Concrètement, le transfert signifie que le maire de la métropole devient également Police and Crime Commissioner (PCC) , un office normalement distinct et pourvu par élection au suffrage universel direct depuis le Police Reform and Social Responsibility Act de 2011. Le PCC nomme et révoque le chef de la police dans son ressort, définit une politique de lutte contre les délits et crimes et gère le financement de la police à partir d'une dotation de l'État. C'est déjà un pouvoir reconnu au maire du Grand Manchester par ordonnance. Des négociations sont en cours pour que le maire de la métropole de Birmingham assume lui aussi ces fonctions.

L'hétérogénéité des situations est patente. Malgré des convergences, aucune des dix métropoles anglaises ne dispose des mêmes compétences, du même mode de fonctionnement, des mêmes conditions de concours financier ou de subvention. Certes cela répond à des différences géographiques et démographiques importantes, par exemple entre les métropoles de Birmingham et Manchester, très urbaines et dynamiques avec près de 3 millions d'habitants, et les combined authorities péri-urbaines autour de Peterborough ou Middlesbrough, plus proches en population de Bordeaux et Toulouse. On pourrait y voir aussi un témoignage de l'empirisme et de l'horreur de l'uniformité typiques de la Common law qui caractérisent non seulement l'organisation territoriale mais aussi fréquemment la gestion des politiques publiques en Angleterre.

2. Le contraste marqué du sort de la métropolisation en Italie, au Portugal et en Espagne
a) En Italie, une impulsion décisive depuis 2014 concomitante à l'effacement des provinces et la prépondérance du maire de la ville-centre

La gestion des métropoles ( cittá metropolitane ) en Italie fut assez tortueuse jusqu'à la loi Delrio de 2014 141 ( * ) . En effet, ce nouveau type de collectivité territoriale fut prévu dès 1990 quand le législateur introduisit la notion d'aire métropolitaine et fixa la procédure d'instauration de métropoles, ainsi que les principales règles de leur organisation 142 ( * ) . Il visait déjà les principaux centres urbains et les communes qui entretenaient avec eux d'étroits rapports d'intégration territoriale. L'initiative d'instaurer la métropole était toutefois renvoyée à la région et aux communes concernées. Ces dispositions ne furent jamais mises en oeuvre à cause de l'indétermination du concept d'aire métropolitaine et d'une certaine inertie des pouvoirs locaux dans le contexte troublé de l'opération anti-corruption Mani pulite .

Cela n'empêcha pas leur consolidation quasiment à l'identique dans le nouveau texte unifié valant code général des collectivités territoriales en 2000 143 ( * ) , sans qu'elles fussent dotées de plus d'effet concret. Cependant, que la volonté de doter les grands centres urbains d'un statut juridique propre et de compétences renforcées existât toujours, la révision constitutionnelle de 2001 en témoigna clairement en accordant une reconnaissance constitutionnelle aux métropoles. L'article 114 de la Constitution prévoit depuis cette date que la République est constituée des communes, des provinces, des métropoles, des régions et de l'État (al. 1) et précise que les métropoles à l'instar des autres collectivités territoriales dotées de l'autonomie disposent de leurs propres statuts, pouvoirs et compétences (al. 2). 144 ( * ) L'article 117 leur reconnaît un pouvoir réglementaire propre en matière d'organisation interne et pour l'exercice des compétences qui leur sont attribuées (al. 6). L'article 118, tout en reconnaissant aux communes une compétence générale, pose un principe de subsidiarité sur le fondement duquel sont attribuées leurs compétences aux autres niveaux de collectivités, provinces, métropoles et régions (al. 1). Enfin, l'article 119 garantit l'autonomie financière et le bénéfice de ressources propres aux collectivités territoriales, dont expressément les métropoles (al. 1 et 2). En d'autres termes, la constitutionnalisation des métropoles a précédé leur existence concrète sans pour autant que le texte constitutionnel n'institue lui-même ce nouveau type de collectivités territoriales.

La première tentative pour dépasser le stade du concept juridique eut lieu en 2012 sous le gouvernement Monti. Amorcée dans un contexte financier très difficile et avec l'objectif avoué de diminuer la dépense publique en rationalisant l'organisation territoriale de la République en substituant les métropoles aux provinces, elle échoua devant l'opposition de la Cour constitutionnelle. La censure du décret-loi support de la réforme 145 ( * ) reposait sur le motif que ce type d'acte législatif ne doit servir qu'à affronter des cas extraordinaires de nécessité et d'urgence et qu'il ne pouvait être utilisé pour réaliser une réforme de niveau organique touchant aux structures mêmes de la République 146 ( * ) .

Le mouvement de réforme parvint finalement à partir de l'approbation de la loi Delrio en 2014 à instaurer et doter d'un statut les métropoles, à redéfinir profondément le rôle des provinces et à réformer les unions et fusions de communes 147 ( * ) . Les deux objectifs avoués étaient de renforcer le niveau communal par concentration et réduction de leur nombre et de revoir entièrement le niveau intermédiaire de collectivités entre la commune et la région. À cette fin, les provinces voyaient leurs compétences redistribuées entre les niveaux inférieur (communal) et supérieur (régional) et leurs élections passaient au suffrage indirect, tandis que les nouvelles métropoles se substituaient à elles autour des grands centres urbains.

Cependant, la loi Delrio a toujours été présentée comme une « loi-pont », un dispositif transitoire qui devait être parachevé par une nouvelle ample révision constitutionnelle 148 ( * ) . Le nouveau système territorial tel qu'il ressortait du projet de loi constitutionnel devait être fondé sur deux échelons seulement de gouvernement local élus au suffrage universel direct, la région et la commune. Tout l'échelon intermédiaire, provinces et métropoles, aurait dû disparaître du texte constitutionnel au profit du nouveau concept de « collectivité à territoire vaste » ( ente territoriale di area vasta ) 149 ( * ) qui renvoyait à une vision administrative et fonctionnelle comme pivot de coordination rationnelle et cohérente de l'activité des communes du territoire, sans constituer un échelon politique de démocratie locale. Or la révision constitutionnelle est mort-née après l'échec du gouvernement Renzi lors du référendum constitutionnel du 4 décembre 2016. Ainsi, du vaste projet de réorganisation territoriale, ne demeurent plus que les dispositions en vigueur de la loi Delrio, qui de provisoires sont devenues définitives. 150 ( * ) C'est aussi ce qui explique les demandes récurrentes d'amendement de la loi, notamment portées par l'ANCI, l'association des communes italiennes.

Saisie par quatre régions (Vénétie, Lombardie, Campanie, Pouilles), la Cour constitutionnelle s'est aussi exprimée sur la loi Delrio en 2015. Elle en a validé tant la procédure d'adoption que les dispositions de fond 151 ( * ) . Il rentrait bien dans la compétence législative de l'État d'instituer les métropoles et d'en prévoir le régime. Il était même du devoir de l'État de prendre les mesures d'application de l'article 114 de la Constitution qui reconnaissait l'existence des métropoles comme composante à part entière de la République. Le régime des métropoles ne pouvait d'autant moins répondre à la compétence législative ordinaire des régions italiennes que la Constitution exigeait la définition d'un modèle uniforme sans divergence dans la structuration des métropoles d'un territoire à l'autre. La Cour a également validé l'élection au suffrage indirect pour les métropoles et les provinces en admettant la pleine compatibilité d'un mécanisme électif de second degré avec les principes de démocratie et d'autonomie locale sans que le caractère représentatif des organes de gouvernance des collectivités en soit amoindri.

La liste des métropoles, qui n'a pas évolué entre 1990 et 2014, est fixée dans la loi nationale, à tout le moins dans les régions à statut ordinaire. Elle comprend Turin, Milan, Venise, Gênes, Bologne, Florence, Naples et Bari. Rome Capitale est assimilée à une métropole mais répond à des textes de lois spéciaux 152 ( * ) en application de l'article 118 alinéa 3 de la Constitution italienne. Dans les régions à statut spécial que sont le Frioul-Vénétie Julienne, la Sardaigne et la Sicile, la loi nationale n'a pu créer nommément les métropoles dont l'institution appartient à la loi régionale. Des lois siciliennes sont venues établir les métropoles de Catane, Messine et Palerme, tandis qu'une loi sarde faisait de même pour Cagliari. Néanmoins, les régions à statut spécial n'ont pas le pouvoir de s'affranchir du cadre fondamental dessiné par la loi Delrio dont les dispositions en matière de compétences et d'organes s'appliquent à toutes les métropoles. La Cour constitutionnelle italienne a ainsi censuré une loi régionale de Sicile qui s'écartait du régime commun, notamment pour prévoir l'élection directe du maire métropolitain et du conseil métropolitain, pour modifier la représentation des différentes communes au niveau métropolitain et pour octroyer une indemnité au maire métropolitain. 153 ( * )

Le périmètre des métropoles est défini dans la loi pour recouvrir intégralement celui de l'ancienne province dont les communes-centres étaient le chef-lieu. Il n'y a pour autant aucune superposition des deux structures, qui se situent au même niveau d'administration territoriale, car dans leur ressort les métropoles se sont également substituées politiquement et juridiquement aux anciennes provinces à compter du 1 er janvier 2015.

Ce choix qui a le mérite de la simplicité donne un visage particulier aux métropoles italiennes : elles sont très étendues bien au-delà du noyau urbain, elles sont peu densément peuplées et rassemblent un grand nombre de communes. Globalement, elles représentent environ 36 % de la population italienne, 15 % de la superficie du territoire et 16 % du nombre des communes d'Italie. La métropole moyenne couvre environ 3 340 km 2 sur 90 communes pour 1,4 million d'habitants dont le centre pèse pour environ un tiers. La densité des métropoles italiennes est de l'ordre de 300 h/km 2 , ce qui est faible pour un pôle urbain majeur. Cela masque de grandes disparités. Ainsi la métropole de Turin rassemble environ 2,3 millions d'habitants sur 6 800 km 2 (40 % pour la ville-centre) et 312 communes, tandis que Bari compte 1,2 million d'habitants sur 3 900 km 2 (25 % dans la ville centre) et 41 communes. Les seules métropoles de densité supérieure à 2 000 h/km 2 sont Milan et Naples, qui dépassent les 3 millions d'habitants sur un périmètre beaucoup plus restreint.

Trois finalités sont assignées par la loi aux métropoles : le développement stratégique de leur territoire ; la stimulation et la gestion intégrée des services, des infrastructures et des réseaux de communication pertinents à leur échelle ; les relations institutionnelles afférentes avec les autres organes publics et collectivités, y compris les autres métropoles européennes.

Il leur revient alors d'exercer les compétences suivantes :

• les compétences fondamentales des provinces auxquelles elles se sont substituées : coordination de la planification urbaine, protection de l'environnement, définition des services de transports, construction et gestion des routes provinciales et réglementation de la circulation, définition du réseau scolaire provincial et gestion des bâtiments scolaires, contrôle des discriminations dans l'emploi et promotion de l'égalité des chances.

• des compétences fondamentales propres :

- définition du plan stratégique triennal de territoire, qui constitue aussi des lignes directrices pour les communes ;

- planification territoriale générale de tous les réseaux de services et d'infrastructures, en fixant également des obligations et des objectifs aux communes ;

- organisation des services publics d'intérêt général et structuration de systèmes coordonnés de gestion. Avec l'accord des communes, la métropole peut gérer les appels d'offres et les marchés publics ;

- gestion des mobilités, notamment en assurant la compatibilité et la cohérence des planifications urbaines des communes ;

- soutien et coordination du développement économique et social, en cohérence avec le plan stratégique de territoire ;

- développement et coordination des systèmes d'information et de la numérisation.

• d'autres compétences qui leur seraient attribuées par l'État ou par les régions, soit dans le cadre du complexe processus de redéploiement des compétences provinciales restantes, lui-même prévu par la loi Delrio 154 ( * ) , soit sur le fondement de l'article 118 de la Constitution en application des principes constitutionnels de subsidiarité de différenciation.

La structuration de la métropole et les pouvoirs de ses différents organes ont été prévus par le législateur, le texte de loi renvoyant aux statuts adoptés par la métropole le soin de préciser certaines dispositions ainsi que certaines procédures internes. Le fonctionnement de la métropole articule trois organes : le maire métropolitain, le conseil métropolitain et la conférence métropolitaine. Toutes les charges et fonctions métropolitaines sont exercées à titre gratuit. 155 ( * )

Le maire métropolitain est de droit le maire de la commune chef-lieu. Il est laissé la possibilité aux statuts de la métropole de prévoir l'élection directe du maire métropolitain et du conseil métropolitain selon des modalités à fixer par une loi nationale. 156 ( * ) Les statuts de Milan et de Naples le prévoient mais aucune loi n'est venue encadrer le scrutin, si bien que ces dispositions statutaires restent pour l'instant lettre morte. Tous les maires des métropoles italiennes sont actuellement les maires de la commune-centre.

Les fonctions du maire métropolitain comprennent la représentation de la collectivité, la convocation et la présidence des sessions du conseil et de la conférence de la métropole, la supervision du fonctionnement des services et de l'exécution des actes de la métropole. Il peut désigner un vice-maire, parmi les conseillers métropolitains, chargé d'assurer sa suppléance en cas d'empêchement. Le maire métropolitain peut également assigner des délégations au vice-maire et à des conseillers métropolitains, dans le respect du principe de collégialité, selon les modalités et dans les limites établies par les statuts. Cette organisation de l'exécutif distingue les métropoles autant des communes que des provinces. En effet, l'exécutif communal ou provincial ( giunta ) est composé du maire ou du président de la province et des assesseurs qu'il nomme et révoque librement sans qu'ils soient tenus d'appartenir au conseil municipal ou provincial, tandis que les délégations accordées par le maire métropolitain ne peuvent sortir du cercle des conseillers métropolitains. 157 ( * )

Le conseil métropolitain, organe de pilotage et de contrôle, est composé du maire métropolitain et de conseillers métropolitains, élus pour 5 ans, par les maires et les conseillers municipaux des communes appartenant à la métropole. Seuls sont éligibles les maires et les conseillers municipaux en fonction, la cessation du mandat entraînant la déchéance du mandat métropolitain. Après chaque renouvellement du conseil municipal de la commune-centre, de nouvelles élections métropolitaines ont lieu dans les 60 jours suivant la proclamation du nouveau maire de la commune-centre. L'élection est organisée au scrutin proportionnel de liste. Chaque électeur exprime un vote pondéré en fonction de la population de sa commune. La taille du conseil varie avec la population de la métropole : 24 conseillers pour les métropoles de plus de 3 millions d'habitants, 18 conseillers entre 800 000 et 3 millions d'habitants, 14 conseillers en-dessous de 800 000 habitants. 158 ( * )

Il revient au conseil métropolitain de proposer à l'approbation de la conférence métropolitaine les statuts de la métropole et leurs modifications, d'approuver les règlements, programmes et plans de la métropole, d'adopter tout autre acte qui lui est soumis par le maire. Il adopte notamment le schéma budgétaire qui doit être soumis à l'avis de la conférence métropolitaine, puis lorsque la conférence s'est exprimée, il approuve définitivement le budget et les états financiers de la métropole 159 ( * ) .

Enfin, la conférence métropolitaine, composée du maire métropolitain qui la préside et des autres maires des communes appartenant à la métropole, dispose de pouvoirs de proposition et d'avis. En outre, elle adopte ou repousse les statuts de la métropole et leurs modifications. Ses actes sont approuvés par les votes de membres représentant au moins un tiers des communes de la métropole et la majorité de la population. 160 ( * )

La conférence représente une forme d'« intergouvernemental communal », qui est clairement subordonné au conseil métropolitain, organe nettement plus intégré où le maire de la commune-centre assume des fonctions prépondérantes. Parmi les propositions de révision de la loi Delrio, on trouve notamment en Lombardie des partisans influents :

- de l'élection directe du maire métropolitain en dissociant cette charge de celle de maire de la commune-centre ;

- du remodelage de l'exécutif métropolitain sur le modèle traditionnel des autres collectivités, en créant une junte métropolitaine et en abolissant les délégations ;

- du transfert des pouvoirs du conseil métropolitain, qui ne serait plus qu'un organe facultatif, vers la conférence métropolitaine 161 ( * ) .

b) Au Portugal, un projet ancien et des hésitations jusqu'à la consolidation du régime en 2013

On rappellera que le Portugal est un État unitaire dont l'organisation territoriale est restée partiellement en suspens depuis le retour de la démocratie. En effet, la Constitution de 1976 prévoyait la disparition des districts (distritos ) équivalents de départements et l'instauration de plus vastes régions ( regiões administrativas ) dotées de fortes compétences. Tardivement, en 1991, une loi fut votée pour préciser le fonctionnement de leurs organes, leurs compétences et attributions, ainsi que le régime électoral et financier applicable. Il fallut encore attendre une autre loi de 1998 pour délimiter les régions et lancer le processus concret de leur mise en place. Cependant, l'abolition des districts et la création des régions furent soumises à un référendum en novembre 1998 où les votants rejetèrent la réforme, avec une participation inférieure à 50 %. Le processus de régionalisation fut stoppé net, ce qui laisse ainsi sans effet tout un pan de la Constitution portugaise.

Toutefois, le mouvement d'effacement des districts, qui n'est pas sans rappeler l'évolution de la position des provinces en Italie, s'est poursuivi par le bas, via l'émergence de métropoles ( áreas metropolitanas ) qui les supplantent dans les principales zones urbaines. Dès 1991, le législateur portugais créa les métropoles de Lisbonne et de Porto 162 ( * ) . Il les définit comme des personnes morales de droit public à ressort territorial et visant la poursuite des intérêts propres des populations des communes qui en font partie 163 ( * ) . Le périmètre des métropoles est fixé dans la loi par énumération des communes couvertes. L'instauration concrète est soumise à l'approbation par deux tiers des communes de l'aire métropolitaine représentant plus de la moitié de sa population totale. 164 ( * )

Le régime des métropoles a été ensuite modifié en 2003, 2008 et 2013. En 2003, il s'agissait d'élargir le spectre en distribuant les grands centres urbains en deux catégories : les grandes aires métropolitaines rassemblant au moins 9 communes contiguës et 350 000 habitants, d'une part, les communautés urbaines comptant au moins 3 communes et 150 000 habitants, d'autre part. En 2008, le balancier repartit en sens inverse, notamment car les critères de constitution assez lâches avaient conduit à la constitution de communautés urbaines à majorité rurale : la qualification et le statut de métropoles furent alors réservées à Lisbonne et à Porto, tandis que les autres communes pouvaient seulement constituer des intercommunalités simples ( comunidades intermunicipais ). Enfin, en 2013 est remis à plat le régime juridique de base des collectivités territoriales (paroisses, communes, métropoles et intercommunalités).

Le chapitre II de la loi de 2013 définit les règles désormais applicables aux deux métropoles portugaises, Lisbonne (18 communes énumérées en annexe de la loi pour 2,8 millions d'habitants) et Porto (17 communes pour 1,8 million d'habitants). 165 ( * ) Les métropoles ont pour missions essentielles de :

- participer à l'élaboration des plans et programmes d'investissements publics et coordonner les investissements communaux à incidence métropolitaine ;

- planifier et gérer la stratégie de développement économique sur leur territoire ;

- participer à la définition des réseaux d'équipements et de services sur le territoire métropolitain ;

- prendre des participations dans des entités de droit public dans le domaine des transports, de l'eau, de l'énergie et du traitement des déchets.

Il revient aux métropoles d'assurer l'articulation des interventions des communes et de l'administration centrale en matière de réseaux d'alimentation, de traitement des eaux et des déchets, d'infrastructures de santé, d'éducation et de formation professionnelle, d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement, de sécurité et de protection civile, de mobilité et de transports, d'équipements culturels et sportifs. Elles exercent également les compétences que l'État leur transfère et celles que leur délèguent les communes membres.

En vertu d'une autre loi de 2015, les métropoles de Lisbonne et de Porto sont devenues pleinement compétentes en matière de transports publics de passagers par la route, le train ou la voie fluviale dans l'aire métropolitaine. 166 ( * ) Les investissements et financements, la détermination des obligations de service public et du régime tarifaire, l'exploitation en régie ou l'attribution de délégation de service public, la surveillance du réseau et de l'exploitation sont désormais de leur ressort.

Les métropoles portugaises comprennent aux termes de la loi de 2013 trois organes : le conseil métropolitain, la commission exécutive métropolitaine et le conseil stratégique pour le développement métropolitain.

Le conseil métropolitain, qui n'est pas élu mais constitué de droit par les maires des communes membres 167 ( * ) , forme l'organe délibératif. Son président et deux vice-présidents sont élus en son sein. Les fonctions de conseiller métropolitain sont exercées à titre gratuit. Le conseil métropolitain tient des séances publiques mensuelles. Il lui revient de définir et d'approuver les orientations politiques et stratégiques de la métropole. Il approuve les budgets et le rendu des comptes. Il adopte divers plans métropolitains d'aménagement, de mobilité, de protection civile, de gestion environnementale et de gestion des réseaux de santé et d'éducation. Il contrôle l'activité de la commission exécutive locale. Il autorise la conclusion d'accords de délégation de compétences avec l'État et avec les communes, ainsi que leur éventuelle résolution ou révocation.

La commission exécutive métropolitaine, composée d'un premier secrétaire et de quatre autres membres, forme l'organe exécutif de la métropole. Les cinq secrétaires sont élus par les conseils municipaux ( assembleias municipais ) des communes membres avec une pondération des votes en fonction de leur population. La liste des candidats est arrêtée au préalable par le conseil métropolitain. Le premier secrétaire de la commission exécutive métropolitaine est obligatoirement rémunéré, ainsi qu'au moins deux autres secrétaires sur délibération unanime du conseil métropolitain. La rémunération entraîne l'exercice à temps plein et à titre exclusif du mandat de secrétaire. Ce régime indemnitaire est calqué sur celui des exécutifs communaux. 168 ( * )

Si le conseil métropolitain apparaît comme une forme de conseil de surveillance, la commission exécutive prend les traits d'un conseil d'administration. En particulier, elle élabore tous les plans nécessaires à la réalisation des missions assignées aux métropoles avant de les soumettre au conseil métropolitain. Elle élabore en particulier le projet de budget. Elle assure l'exécution des plans et du budget. Elle propose à l'État les programmes et projets d'investissement et de développement d'intérêt métropolitain. Elle assure la coordination entre les communes membres et les services de l'administration centrale. Elle assure la gestion courante des affaires, des services et des biens de la métropole.

En revanche, le conseil stratégique pour le développement métropolitain est un organe consultatif intervenant en soutien du conseil métropolitain et de la commission exécutive. La loi de 2013 reste laconique à son égard. Il est censé être formé de représentants d'institutions, entités et organisations pertinentes pour l'intérêt métropolitain. Ses membres ne sont pas rémunérés. Son instauration et sa composition précise dépendent d'une délibération du conseil métropolitain. Le conseil stratégique de la métropole de Lisbonne rassemble ainsi des représentants d'une cinquantaine d'organismes : aéroports de Portugal, associations des paroisses, agence de l'environnement, ports de Lisbonne et Setúbal, agence nationale pour la formation professionnelle, syndicats patronaux, chambre de commerce et d'industrie, confédération des agriculteurs, instituts techniques et universitaires, ligue pour la protection de la nature, ligue des pompiers, office du tourisme,...

c) En Espagne, une métropolisation à l'arrêt restant dans les mains des communautés autonomes

L'organisation territoriale de l'Espagne repose sur trois niveaux de collectivités : la commune, la province et la communauté autonome. 169 ( * ) La province est définie comme regroupement de communes et la communauté autonome comme regroupement de provinces mais, une fois constituées, les provinces sont indépendantes des communes et les communautés autonomes indépendantes des provinces. Les communautés autonomes se distinguent en étant dotées d'un pouvoir législatif concurrent de l'État central dans un vaste champ de compétences, ainsi que de pouvoirs d'exécution des politiques nationales. Leur autonomie se manifeste aussi dans la marque qu'elles impriment sur leur organisation territoriale interne, dans le cadre fixé par la Constitution.

Au niveau intercommunal, ce pouvoir territorial propre aux communautés autonomes se manifeste avec évidence. À la différence non seulement de l'Italie, autre État régional, où le législateur national impose un cadre commun, mais aussi de l'Allemagne, État fédéral, où s'observe une convergence volontaire de l'organisation interne des Länder , l'Espagne laisse diverger les politiques régionales en matière d'intercommunalité et de métropoles.

La Constitution espagnole reconnaît en effet la possibilité de constituer des groupements de communes dotés d'une personnalité juridique et de capacités d'action propres. D'une part, les communes peuvent constituer des regroupements différents de la province. 170 ( * ) D'autre part, les statuts des communautés autonomes peuvent établir des circonscriptions territoriales propres jouissant de la pleine personnalité juridique. 171 ( * ) Il convient de distinguer dans cette catégorie les comarques ( comarcas ), les syndicats intercommunaux ( mancomunidades ) et les métropoles ( áreas metropolitanas ), énumérées comme collectivités subsidiaires « supramunicipales » dans la loi nationale consolidée posant les fondements du régime des collectivités territoriales 172 ( * ) .

Si le législateur national a précisé le texte constitutionnel pour définir les types d'intercommunalités, il revient aux communautés autonomes le pouvoir de les instituer concrètement et de dicter leurs compétences, leur organisation et leurs règles de fonctionnement. Ainsi que l'a relevé le Tribunal constitutionnel espagnol, les intercommunalités présentent un « fort degré d'intériorisation par les Autonomies ». L'État ne peut que « rester à la marge » face à la compétence exclusive des communautés autonomes 173 ( * ) . En droit, les communautés peuvent attribuer aux comarques et aux métropoles, des compétences appartenant aux communes et aux provinces. Dans tous les cas, le législateur a prévu que la création d'intercommunalités ne puisse remettre en cause la libre administration des communes et les compétences qui leur sont confiées en propre par la loi nationale. 174 ( * )

Comarques et syndicats intercommunaux en Espagne

Les comarques sont des collectivités territoriales à caractère supramunicipal formées par regroupement de communes qui présentent des intérêts communs dus à leurs caractéristiques. Leur création vise la prestation de services locaux et la gestion en commun de compétences 175 ( * ) . Leur délimitation, leur institution, leur objet et leur mode de fonctionnement dépendent de lois des communautés autonomes.

Dans les faits, on observe de grandes divergences régionales. En Aragon, en Cantabrie et en Catalogne, des lois autonomiques sont venues poser un régime général des comarques en les dotant de compétences importantes empruntées aux communes et aux provinces en matière d'urbanisme, de planification territoriale, d'environnement, de protection civile, de culture et sport notamment. En Galice, il s'agit plutôt de subdivisions administratives dans lesquelles est appliqué le plan de développement régional de façon différenciée. Dans ces communautés autonomes, l'ensemble du territoire régional est divisé en comarques. En Castille-et-Léon, seule une comarque a été constituée par une loi spéciale, celle de Bierzo.

Le processus de constitution des mancomunidades, ou syndicats intercommunaux, donne plus de poids à l'initiative des communes elles-mêmes qui disposent du droit de s'associer ainsi pour exécuter en commun des travaux ou des services déterminés relevant de leur compétence. Il n'est pas nécessaire qu'elles soient contiguës. Elles sont régies par leurs statuts propres mais le processus d'approbation des statuts relève de la loi régionale. 176 ( * )

Le régime des métropoles espagnoles est esquissé par la loi nationale et décliné par des lois régionales. Les métropoles sont définies génériquement comme « des collectivités territoriales constituées de communes appartenant à de grandes agglomérations urbaines telles que les liens économiques et sociaux existant entre les noyaux de population rendent nécessaires une planification conjointe et la coordination de travaux et de services déterminés » 177 ( * ) . Trois points permettent de distinguer la métropole des autres types d'intercommunalités : le caractère nécessairement urbain au sein d'un bassin de population conséquent ; l'existence avérée de liens économiques et sociaux forts entre les différentes communes membres, et non de simples intérêts communs ou caractéristiques communes ; la nécessité d'instruments de planification partagés. La loi nationale ne va pas au-delà et ne dessine aucun modèle plus concret. En particulier, elle laisse ouverte la question du degré d'intégration et de l'unicité de la métropole sur un même territoire selon que l'on privilégie une lecture plus organique ou plus fonctionnelle.

La création des métropoles, ainsi que, par parallélisme, leur éventuelle modification ou suppression, relève de la compétence des communautés autonomes. Après avoir entendu l'administration de l'État 178 ( * ) et les provinces potentiellement affectées et en conformité avec leurs statuts, elles adoptent les dispositions nécessaires dans des lois régionales qui déterminent les organes de gouvernement et d'administration, le régime financier, le mode de fonctionnement, le champ des services et travaux de compétence métropolitaine et les procédures d'exécution. En particulier, la législation régionale doit garantir une représentation et une participation à la prise de décision de toutes les communes membres au sein de la métropole, ainsi qu'une juste répartition des charges entre elles 179 ( * ) .

On doit relever d'importantes disparités entre les communautés autonomes. 180 ( * ) Dans les faits, la plupart des dispositions sur les métropoles contenues dans les statuts autonomiques ou dans les lois régionales sont restées lettre morte. Seules la Catalogne et la Communauté valencienne se sont emparées de cet objet, en suivant des orientations totalement divergentes qui exploitent les virtualités irrésolues du texte national, alors que des conflits politiques aigus ont abouti en 2018 à la suspension par la justice de la constitution de la métropole de Vigo bien que les instruments législatifs nécessaires aient été adoptés 181 ( * ) . Sans recourir au format métropolitain, l'Aragon a récemment choisi une autre voie sui generis pour régler la situation de sa capitale Saragosse qui devient une commune à statut spécial 182 ( * ) . Ni Madrid 183 ( * ) , ni Bilbao, ni Séville, ni Malaga, pour citer parmi les agglomérations les plus importantes, ne bénéficient davantage du statut de métropole.

À la différence des dispositions légales applicables à la création des comarques, il n'est pas prévu que la création des métropoles puisse naître d'une initiative des communes elles-mêmes. À moins que la législation régionale n'en dispose autrement, l'initiative de la création des métropoles ne peut venir que du Parlement régional ou de l'exécutif régional. Les Canaries et la Galice ont explicitement prévu la possibilité d'une telle initiative dans leur loi régionale régissant l'administration territoriale.

À ce jour, on ne recense en Espagne que deux aires métropolitaines, Barcelone et Valence, cette dernière étant dédoublée en deux structures fonctionnellement différenciées. Elles sont inscrites au registre des collectivités territoriales, tenu par le ministère de la politique territoriale et de la fonction publique, la Galice ayant refusé même l'inscription au registre de Vigo. L'inscription au registre comporte le nombre et la dénomination des communes membres, le siège, la dénomination, l'organisation et le fonctionnement des organes de représentation, de gouvernance et d'administration de la métropole, ainsi que les compétences qui lui sont attribuées par la loi régionale. 184 ( * )

Chaque métropole dispose de sa propre organisation politique et administrative. Les cas de Barcelone et de Valence illustrent deux interprétations divergentes des dispositions de la loi nationale relative aux métropoles : d'un côté, on trouve une structure intégrée avec une gouvernance centrale et une vocation stratégique, de l'autre, une superposition d'entités métropolitaines à compétences très restreintes.

La création de la métropole de Barcelone ( Área Metropolitana de Barcelona-AMB ) répond à un désir de renforcement de la coordination de l'action politique sur son territoire afin d'en améliorer l'efficacité. En effet, avant la loi catalane de 2010 portant création de la métropole de Barcelone 185 ( * ) , coexistaient trois entités différentes : la corporation métropolitaine de Barcelone, l'entité métropolitaine environnementale de services hydrauliques et traitement des déchets, et enfin, l'entité métropolitaine des transports. La loi régionale a confié d'importantes compétences à la métropole en matière d'urbanisme, de transports et de mobilités, d'adduction d'eau et d'assainissement, de traitement des déchets, de protection de l'environnement et de promotion des énergies renouvelables, de réseaux d'infrastructures, de développement économique et social et de cohésion sociale. La métropole est notamment en charge du plan directeur d'urbanisme sur son territoire. Elle conçoit également un plan stratégique de développement.

Barcelone répond à un modèle unifié de gouvernance métropolitaine dont les organes sont habilités et délimités dans leur pouvoir par la loi autonomique. Ainsi, la gouvernance de l'AMB s'articule en quatre organes principaux : le conseil métropolitain, le président et le collège exécutif, ainsi que la commission spéciale des comptes.

Le conseil métropolitain est l'organe de gouvernance suprême de la métropole de Barcelone. Il correspond au plénum de l'assemblée municipale dans les communes et de l'assemblée provinciale dans les provinces. Il comprend de droit les maires des 36 municipalités membres et les conseillers municipaux élus par chaque municipalité. Le nombre de conseillers métropolitains élus dans chaque commune dépend de sa population. Au total, ils sont 90 dont 25 pour la seule commune de Barcelone.

Parallèlement est constitué un conseil des maires réunissant les 36 alcaldes des communes membres. Il dispose d'un pouvoir de proposition auprès du conseil métropolitain. Il présente également un avis sur le programme d'actions de la métropole.

L'exécutif métropolitain est constitué par le président du conseil métropolitain, élu en son sein parmi les maires, et par un collège exécutif ( Junta de Gobierno ) dont le président nomme les membres sur proposition du conseil, selon un modèle à nouveau décalqué de l'exécutif communal et provincial. Les candidats à la présidence de l'AMB doivent recueillir l'accord du conseil des maires, obtenu à une majorité qualifiée représentant les deux tiers de la population totale de la métropole. La perte de la qualité de maire fait également perdre celle de président.

Le président représente l'AMB. Il est responsable de la gestion politique devant le conseil métropolitain. Il dirige son administration et exerce un pouvoir de direction sur son personnel lorsque celui-ci n'est pas dévolu à un autre organe.

La commission spéciale des comptes évalue les comptes de l'AMB rassemblant ceux des organes de direction, de l'administration métropolitaine, des organes autonomes de l'AMB et des entreprises à capital public qu'elle contrôle. Elle peut demander au président tout document qu'elle jugerait utile pour l'examen de ces comptes et elle peut également décider d'auditionner des conseillers métropolitains et des membres de l'administration.

Les communes membres participent à la prise de décision par les organes métropolitains selon les modalités suivantes :

- l'incorporation de nouvelles communes à l'aire métropolitaine ne peut se faire que sur leur initiative propre ou après avoir recueilli leur avis ;

- la formulation et l'approbation des plans et programmes métropolitains nécessite leur avis ;

- elles peuvent formuler des initiatives et des propositions, soit directement soit via le conseil des maires.

Par contraste avec ce qui prévaut en Catalogne, la Communauté valencienne n'a pas créé de métropole intégrée. Elle n'a donc pas fait disparaître les entités préexistantes dédiées à la gestion de certains services publics au niveau de l'agglomération de Valence mais leur a attribué le statut de métropole et le régime applicable défini dans la loi d'organisation territoriale de la Communauté valencienne 186 ( * ) . Il existe donc deux métropoles fonctionnelles superposées à compétence étroite à Valence : l'agence métropolitaine de traitement des déchets ( Entidad Metropolitana para el Tratamiento de Residuos ) et l'agence de la gestion de l'eau de Valence ( Entidad Metropolitana de Servicios Hidráulicos ).

Les deux entités présentent la même structure de gouvernance, commune à toutes les métropoles existantes et futures créées dans la communauté autonome. Conformément à la loi valencienne de 2012, elle s'articule autour de trois organes : l'assemblée, la présidence et la commission de gouvernement ( Comisión de Gobierno ).

L'assemblée, organe suprême, comprend seulement les représentants des municipalités membres de la métropole. Chaque commune est représentée par une personne élue par le conseil municipal. Il ne s'agit donc pas nécessairement du maire. En revanche, chaque représentant ne dispose pas du même nombre de voix pour voter en plénière ; les votes sont pondérés en fonction de la population de la commune. Elle élit le président de l'entité, contrôle et approuve les mesures de l'exécutif et peut notamment décider de la création et de l'organisation des services administratifs.

Le président représente l'entité métropolitaine, il est l'organe exécutif unipersonnel de l'entité, élu par l'assemblée à la majorité qualifiée des deux tiers au premier tour, ou bien, à la majorité absolue lors d'un deuxième tour. Il dispose d'un pouvoir de contrôle et de direction sur l'ensemble des services de l'entité. Il est assisté dans ses fonctions exécutives par la commission de gouvernement. Elle est composée, outre le président, de huit membres de l'assemblée tels que soient représentées parmi eux les communes petites, moyennes et grandes, distinguées par tranche de population.

En définitive, seule Barcelone constitue une métropole au sens plein, alors que Valence perpétue sous une forme détournée des syndicats intercommunaux préexistants. L'échec de la métropolisation en dehors de ces cas, malgré les possibilités offertes par la Constitution espagnole et la loi nationale trouve sans doute pour partie sa raison dans les tensions politiques extrêmement fortes qui prévalent en Espagne depuis plus de dix ans, à la fois entre formations politiques et entre certaines communautés autonomes et l'État central, sans que parviennent facilement à s'imposer des consensus locaux autour de projets métropolitains.

3. L'organisation peu différenciée des centres urbains dans la sphère germanique
a) En Allemagne : des villes-États et villes-arrondissements entre droit fédéral et droit régional

En Allemagne, la Loi fondamentale règle la répartition des compétences entre l'État fédéral ( Bund ) et les Länder fédérés, tout en reconnaissant l'autonomie des communes et de leurs groupements.

Elle précise en son article 30 que « l'exercice des pouvoirs étatiques et l'accomplissement des missions de l'État relèvent des Länder » à moins que la Loi fondamentale n'en dispose autrement. Chaque Land en tant qu'État fédéré est doté d'une Constitution. Toutefois, en vertu de l'article 31, le droit fédéral de toute nature l'emporte sur le droit des Länder .

Par ailleurs, l'article 28(2) garantit aux communes « le droit de régler, sous leur propre responsabilité, toutes les affaires de la communauté locale, dans le cadre des lois. Les groupements de communes ont également le droit à la libre administration dans le cadre de leurs attributions légales et dans les conditions définies par la loi. La garantie de la libre administration englobe également les bases de l'autonomie financière ». Dans le respect du cadre déterminé par la Loi fondamentale, la fixation du droit communal revient aux Länder .

Il convient de distinguer en Allemagne :

- les grandes villes qui sont également des Länder et qui cumulent ainsi les compétences et pouvoirs du Land et de la commune ;

- les grandes villes qui sont situées à l'intérieur d'un Land sans en constituer l'unique composante.

(1) L'exemple de la ville-État de Hambourg

Les villes qui se confondent avec un Land sont au nombre de trois : Berlin, Hambourg et Brême. On détaillera à titre d'exemple le cas de Hambourg. La Constitution du Land de Hambourg précise que les capacités d'agir en tant qu'État et en tant que commune ne sont pas séparées (§ 4).

Deux autorités concourent à la gouvernance de la ville : le Bürgerschaft et le Senat . Le Bürgerschaft sert de parlement régional (Landtag) . Il compte 120 députés et détient la compétence législative exclusive dans les domaines de la culture, de la police, de l'école et de la formation, de la presse, de la radio et de la télévision, du système pénitentiaire, du droit de réunion et dans le domaine universitaire, compétences qui reviennent à Hambourg en tant que Land aux termes de la Loi fondamentale. Il exerce une compétence partagée avec l'État fédéral dans les domaines du droit civil, du droit pénal, de l'état civil, du droit associatif, du droit de séjour pour les étrangers, du droit du travail, du droit économique, des infrastructures routières, de la santé, de la chasse, de la protection de la nature et de l'entretien des paysages, du compactage des sols et du développement du territoire 187 ( * ) .

Le Senat est l'autorité exécutive de Hambourg, il est présidé par un maire (Erster Bürgermeister) accompagné d'un adjoint (Zweiter Bürgermeister) et de 10 autres conseillers (Senator ) qui se partagent les champs d'action de l'exécutif, qui correspondent à des ministères à l'échelle du Land . Le Senat conduit et supervise l'administration de la ville, il exerce à la fois des tâches étatiques, liées au fait que Hambourg soit un Land , et municipales. Le Bürgerschaft élit le maire, qui nomme ensuite son adjoint ainsi que les autres conseillers et éventuellement les révoque. Leur mandat s'achève en même temps que le mandat des membres du Bürgerschaft . Le maire détermine les lignes directrices de la politique et en porte la responsabilité devant le Bürgerschaft . Le Senat représente enfin la ville de Hambourg auprès du Bund , des autres Länder et des autorités étrangères.

À un échelon plus petit, Hambourg est divisé en 7 districts (Bezirke) qui possèdent chacun un bureau de district dirigé par un chef de district. La loi régionale sur l'administration des districts 188 ( * ) précise que chaque bureau de district exécute des tâches administratives locales et que son travail est contrôlé par une assemblée de district (Bezirksversammlung) élue par les citoyens. L'assemblée doit être tenue informée des questions d'importance fondamentale dont l'intérêt dépasse la gestion courante, soit parce qu'elles concernent de nombreux cas, soit parce qu'elles revêtent un poids particulier. L'assemblée de district localement concernée doit être entendue avant toute décision qui concerne le règlement, la fermeture ou toute modification substantielle - si cette décision est essentielle pour le district - des services de protection de la jeunesse, des services fiscaux, des pompiers volontaires et professionnels, des lieux commémoratifs, des tribunaux, des sites universitaires, des établissements pénitentiaires, des institutions culturelles, le logement public des migrants et des sans-abris, les commissariats de police, les écoles et les installations sportives.

(2) Les villes-arrondissements, le cas de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie

La plupart des grandes villes allemandes qui pourraient être considérées comme des métropoles, même si cette notion n'est pas thématisée en droit public allemand, ne sont pas des Länder et ne disposent pas du pouvoir législatif concurrent. Elles tombent plutôt sous la catégorie de villes-arrondissements ( Kreisfreie Städte ). Elles exercent des compétences à la fois de la commune et du Landkreis 189 ( * ) . Ce dernier est une sorte d'arrondissement administratif et politique, échelon intermédiaire entre la commune et le Land , qui couvre surtout les zones rurales. Un conseil d'arrondissement ( Kreistag ) est élu au suffrage universel direct, en général pour 5 ans, son président dirige l'exécutif local. Les communes appartenant à un arrondissement et le conseil d'arrondissement entretiennent des relations étroites. Les compétences du Landkreis couvrent notamment les prestations d'aides sociales, l'organisation des transports publics de proximité, l'établissement de zones naturelles protégées, la sécurité civile et certains établissements de formation professionnelle. L'arrondissement peut se substituer aux communes les plus petites, lorsqu'elles ne peuvent exercer certaines de leurs compétences.

Les villes-arrondissements sont elles-mêmes composées de plusieurs quartiers urbains ou districts. Il existe 107 villes-arrondissements en Allemagne 190 ( * ) . Malgré la densité du maillage urbain en Allemagne, ce nombre est très élevé, ce qui témoigne qu'au-delà des plus grandes villes 191 ( * ) , le statut de ville-arrondissement est largement étendu, y compris à des agglomérations moyennes. On constate une assez forte convergence des droits régionaux concernant les villes-arrondissements.

On a retenu l'exemple du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, qui contient 23 villes-arrondissements, notamment Cologne et les grandes villes de la Ruhr (Düsseldorf, Dortmund, Essen).

Au niveau supérieur de la ville-arrondissement se trouve le conseil municipal ( Rat ), à la tête duquel officie le maire. Le conseil municipal est compétent pour toutes les affaires générales et il lui est interdit de déléguer les décisions en matière de principes généraux de gestion de l'administration, d'élection des membres des commissions, de leurs présidents, des adjoints au maire, de modification du territoire communal, de promulgation, modification ou abrogation de dispositions normatives locales.

Le Rat conserve aussi la décision finale en matière de plan d'occupation des sols et en ce qui concerne les mesures en matière de droit de la construction. Il vote le budget et approuve les comptes annuels. Il est compétent en matière de cession ou de location de régies ou de participations directes ou indirectes dans des sociétés ou associations de droit privé. Il est responsable pour la création, la reprise, l'expansion, la limitation ou la dissolution d'institutions de droit public.

Le règlement régional sur les communes de Rhénanie-du-Nord-Westphalie précise que toute zone urbaine correspondant à une ville-arrondissement doit être divisée en districts urbains ( Bezirke ), dont le nombre varie de 3 à 10 et dans chacun desquels une représentation doit être élue. 192 ( * ) Chaque représentation comporte entre 11 et 19 membres, incluant un président.

Les tâches incombant à la représentation des districts d'une ville-arrondissement, sauf en cas de compétence exclusive du conseil municipal, sont de plusieurs ordres. La représentation de district prend des décisions en considérant les intérêts de la ville-arrondissement dans son ensemble dans le cadre de directives générales émises par le conseil municipal. Elle se prononce sur des domaines dont l'importance ne dépasse pas largement le niveau du district, notamment :

- l'entretien et l'équipement des écoles et des équipements publics du district, tels que les terrains de sport, les maisons de retraite, les cimetières, les bibliothèques et les équipements sociaux et culturels ;

- les affaires de protection des monuments, d'entretien du paysage urbain et des espaces verts ;

- l'ordre dans lequel les travaux de transformation, de développement, d'entretien et de réparation des rues, de chemins et de places ayant une importance au niveau du district, y compris l'éclairage public lorsqu'il ne s'agit pas d'une obligation de sécurité routière ;

- la prise en charge et le soutien des associations, organisations et initiatives du district ;

- les affaires culturelles du district, y compris l'art dans les espaces publics, la préservation des lieux familiers et des coutumes, la préservation des parrainages et jumelages existants ;

- l'information, la documentation et la représentation pour les affaires concernant le district.

La représentation du district doit être entendue pour toute affaire importante concernant le district avant que le conseil municipal ne délibère, en particulier en matière d'aménagement urbain. Elle a également un droit de suggestion en la matière, ainsi que pour toute question relative au district.

Le maire ou le président du district peut s'opposer à une décision prise par la représentation du district dans les 14 jours suivant son adoption si cette décision met en danger le bien de la ville. Dans ce cas, l'opposition suspend la décision initiale, la représentation du district ayant entre 3 jours et 3 semaines après celle-ci pour procéder à un nouveau vote. Si la représentation du district maintient son vote et que le maire ou président du district maintient son opposition, la décision finale revient au conseil municipal qui se retrouve saisi du sujet.

Enfin, l'Allemagne compte aussi depuis 2001 des « régions-métropoles », une dénomination qui peut porter à confusion. Au nombre de 11 sur tout le territoire, il s'agit en fait de groupements d'intérêt public destinés à améliorer la compétitivité économique d'un territoire. Ainsi, en Basse-Saxe, la région-métropole de Hannover-Braunschweig-Göttingen-Wolfsburg est organisée sous la forme juridique d'une société à responsabilité limitée (GmbH) autour des quatre villes mentionnées, du Land de Basse-Saxe et d'associations communales, économiques et scientifiques. Elle est gouvernée par un conseil d'arrondissement de 18 membres dont la présidence est assurée alternativement par les maires de Hanovre et de Brunswick. 193 ( * )

b) En Autriche et au Danemark : une relative différenciation légale des statuts des grandes villes qui vaut surtout pour les capitales
(1) Vienne entre Land et ville à statut autonome

En Autriche , la ville de Vienne possède un triple statut, et de ce fait une position particulière. Elle est à la fois :

- la capitale et le siège des plus hauts organes autrichiens, sans obtenir de privilèges spéciaux liés à ce statut ;

- un Land indépendant depuis 1922, qui envoie à ce titre des représentants à la chambre haute du Parlement. En tant que Land autonome, Vienne est autorisée à avoir sa propre législation. Le Parlement de Vienne, qui comporte 100 membres, exerce ce droit. Vienne est aussi responsable de sa mise en oeuvre par l'intermédiaire du gouvernement fédéré viennois, composé de 12 membres. À sa tête se trouve le gouverneur du Land ;

- une commune qui revêt la forme juridique de Statutarstadt , c'est-à-dire qui possède sa propre loi municipale, ou statut. En plus des tâches propres à la municipalité (à l'instar du domaine de la construction), le conseil municipal assume les fonctions habituellement gérées au niveau du district.

Les Statutarstädte en Autriche

Aux termes du § 116 de la Constitution fédérale autrichienne 194 ( * ) , les municipalités d'au moins 20 000 habitants peuvent, si cela ne menace pas les intérêts du Land , se voir accorder un statut propre, sur demande, par une loi du Land . Une ville ayant son propre statut assume ses missions municipales ainsi que celles relevant habituellement de l'administration du district. 15 villes autrichiennes ont opté pour cette forme : Eisenstadt, Graz, Innsbruck, Klagenfurt am Wörthersee, Krems, Linz, Rust, Salzbourg, St Pölten, Steyr, Vienne, Villach, Waidhofen an der Ybbs, Wels et Wiener Neustadt.

Les organes et les représentants élus du Land de Vienne et de la municipalité de Vienne se confondent : les députés membres du Parlement régional (Landtag) sont également les membres du conseil municipal (Gemeinderat) . Le conseil municipal est donc le Parlement de Vienne, ses commissions et comités sont également les commissions et comités du Parlement viennois. Le maire de Vienne est également le gouverneur du Land de Vienne, le bureau exécutif municipal (Stadtsenat) est le gouvernement du Land et le directeur des services municipaux est également le directeur des services du Land (§ 114 de la Constitution viennoise).

La Constitution de Vienne 195 ( * ) précise qu'à des fins administratives, la ville est divisée en 23 arrondissements. Divers organes sont en charge de la gouvernance de la ville : le conseil communal, le bureau exécutif municipal (Stadtsenat) , le maire, ses adjoints, les conseillers municipaux, les commissions du conseil communal, les commissions d'enquête du conseil communal, les conseils d'arrondissements, les maires d'arrondissements, les commissions des conseils d'arrondissements. Il faut également mentionner le Magistrat . Il s'agit d'un collège municipal composé du maire, des principaux adjoints, du directeur des services municipaux et des collaborateurs nécessaires. Le Magistrat de Vienne sert à la fois d'administration communale de la ville de Vienne, d'autorité administrative de district du district administratif de Vienne et de bureau du gouvernement du Land de Vienne.

Le conseil municipal (Gemeinderat) est le plus haut organe de la commune de Vienne. Ses membres étant à la fois membres du Landtag , ils sont donc au nombre de 100, élus pour 5 ans au scrutin direct. Le conseil municipal a pour mission de protéger les intérêts de la municipalité. Il exerce la tutelle globale de la communauté, élit le maire, ses adjoints et les conseillers municipaux. En particulier, il décide du budget prévisionnel, des projets d'affectation et de la clôture des comptes. À partir de certains montants, le conseil municipal est également responsable des opérations immobilières, des octrois de prêts ou encore des autorisations pour les constructions nouvelles. Vienne est une entité économique indépendante possédant le droit, dans la limite des lois générales de l'État fédéral et du Land , d'acquérir des actifs, d'exercer des activités économiques, de gérer son budget de façon indépendante et de lever les impôts.

Vienne possède des domaines d'activité propres, lesquels sont listés aux § 75 et suivants de sa Constitution. Il s'agit, outre les questions qui sont dans l'intérêt exclusif ou prédominant de sa communauté locale, de la nomination dans les organes municipaux, de celle des agents de la commune, de la gestion de la police locale de sécurité et de celle liée aux événements, de l'administration des zones de circulation et de la police routière, de l'administration de différents types de police (sanitaire, des moeurs ...) ou encore des questions liées à la construction et à l'aménagement du territoire. À côté de ces domaines, elle a aussi des compétences qui lui ont été transférées par l'État fédéral et devant être réalisées pour son compte et conformément à ses instructions.

Le conseil municipal a la faculté de transférer certaines de ses tâches à d'autres instances communales, en l'occurrence au bureau exécutif municipal (Stadtsenat) , à une commission du conseil municipal ou au Magistrat . Il peut également transférer certains domaines d'activité propres aux conseils d'arrondissements si cela est, aux termes du § 89 de la Constitution viennoise, dans l'intérêt de la rapidité, de la simplicité et de l'efficacité économique.

La Constitution viennoise détaille les sphères d'activité dévolues à chaque instance municipale. Ainsi le bureau exécutif municipal (Stadtsenat) est en charge de sujets tels que la nomination du directeur des services municipaux, la promotion et la rémunération du personnel, l'approbation des décisions des commissions pour les dépenses imprévues, l'autorisation de saisir la Cour constitutionnelle fédérale ou encore les décisions relatives à la compétence d'une commission.

Les commissions du conseil municipal, quant à elles, sont les organes de décision du conseil municipal pour les sujets qui relèvent de leur compétence : il existe ainsi une commission de l'éducation, de l'intégration, de la jeunesse et des ressources humaines, une commission de la culture et des sciences, une commission de l'Europe et des affaires internationales ...

La gestion courante de la municipalité relève du Magistrat . Il s'occupe en particulier de la conclusion et de la résiliation des contrats de service, de la gestion directe du patrimoine, des fonds, des institutions et des fondations de la commune, de la rédaction des budgets prévisionnels, de l'octroi de rémunérations, d'aides, de bourses, de prêts ...

S'agissant des 23 arrondissements, leurs organes sont associés aux décisions régionales et leur implication est croissante via le processus de décentralisation. Cela se traduit par :

- l'information du conseil d'arrondissement par les services municipaux sur tous les projets de mesures prévus par la municipalité ;

- le principe de l'audition, qui offre à chaque conseil d'arrondissement la possibilité de présenter ses souhaits et idées au service municipal compétent dès les premières étapes d'un projet général ;

- la participation, qui permet au conseil d'arrondissement de co-décider, il peut notamment assumer certaines tâches seul ;

- et les compétences propres, qui permettent aux organes des arrondissements de mettre en oeuvre certaines missions en fonction de leur vision, et disposent des fonds nécessaires pour le faire.

Ces tâches propres sont prévues et énumérées au § 103 la Constitution de la ville de Vienne. Il s'agit des crèches et des écoles, des rues, de l'éclairage public et des transports, du nettoyage des rues et du déneigement, des espaces verts et des aires de jeux pour les enfants, des clubs du troisième âge, des locaux de la représentation des districts, des marchés, des cimetières (transférés depuis 2008 à des entreprises détenues par la ville de Vienne).

Les compétences propres des arrondissements comportent également l'encadrement extrascolaire des enfants et des jeunes, les toilettes publiques, les bains publics et les saunas, le domaine culturel, les écoles de musique, l'attribution de contrats pour les projets de construction et d'aménagement, et la construction de canaux.

Les arrondissements de la ville de Vienne disposent de fonds pour financer les missions pour lesquelles ils possèdent un droit de décision direct. En 2015, la somme totale allouée s'élevait à plus de 194 millions d'euros, soit 1,52 % du budget total de la ville, pour les 23 arrondissements.

Malgré cette décentralisation, l'échelon de l'arrondissement reste hiérarchiquement en-deçà des organes généraux de la commune. Ainsi, le conseil municipal peut prendre des décisions urgentes dans les domaines relevant de la compétence propre des arrondissements si en raison de l'urgence, attendre une décision du conseil d'arrondissement serait préjudiciable. De plus, les organes de l'arrondissement ne peuvent faire partie du Magistrat .

(2) L'exemple d'une capitale nordique, Copenhague

L'organisation locale du Danemark a été profondément remaniée en 2005 et 2007. La loi sur les conseils municipaux 196 ( * ) autorise des variations d'organisation selon les communes.

La commune de Copenhague est gérée par une représentation civique (borgerrepræsentationen) , équivalente à un conseil municipal, composée de 55 membres élus pour 4 ans. Elle est présidée par le maire (overborgmestre) , lequel a 6 adjoints (borgmestre) .

Les règles particulières concernant l'organisation de l'exécutif local sont déterminées dans des statuts adoptés par le conseil municipal. Ceux de la ville de Copenhague 197 ( * ) ont été modifiés pour la dernière fois en mars 2018 et précisent que le président et ses deux vice-présidents sont élus lors de la réunion constitutive par la représentation civique. Le président du conseil municipal est le maire. L'exécutif municipal est composé du maire et de 6 adjoints, ces 7 représentants sont également chacun président d'une des 7 commissions permanentes de la ville, la commission des finances étant présidée par le maire en vertu de la loi sur les conseils municipaux.

La loi sur les conseils municipaux permet que les statuts des grandes villes danoises (Frederiksberg, Copenhague, Odense, Aalborg et Århus) contiennent des dispositions permettant à un « magistrat », c'est-à-dire un bureau exécutif composé du maire, d'adjoints et de membres du conseil municipal, de participer à l'administration des affaires de la commune 198 ( * ) . Dans ces communes également, les présidents des commissions permanentes de la commune peuvent assurer la gestion courante de l'administration municipale qui couvre le domaine de compétence de leur commission. Ce principe de direction administrative partagée (delt administrativ ledelse) est repris dans les statuts de la ville de Copenhague.

La prise de décision dans la commune relève de la représentation civique et de l'exécutif municipal, à savoir le maire et ses adjoints. Lors des réunions à huis clos, les commissions prennent des décisions sur les questions relevant de leur domaine de compétence. La représentation civique, quant à elle, siège lors de réunions publiques et décide sur les cas généraux. La représentation civique est la plus haute autorité communale, elle peut donc se saisir et décider sur toute question intéressant la municipalité et assume la responsabilité de toute décision prise par la municipalité.

En pratique, par le processus de délégation, la représentation civique laisse la prise de décision aux différentes commissions et à l'administration. Cette délégation ne s'applique pas à tous les domaines, la représentation civique peut ne pas être autorisée à déléguer certaines décisions, soit parce que cela est prévu par la loi, soit en raison de la nature même de la décision. Les contours des délégations de compétence sont déterminés en réunion et sont détaillés dans le compte rendu s'y rapportant. Par exemple, la décision de la représentation civique du 21 novembre 2019 modifie les modalités de la délégation de compétence à la commission des finances et à l'administration financière 199 ( * ) .

Les statuts de la ville de Copenhague prévoient également l'établissement d'un conseiller citoyen (borgerrådgiver) , qui aide la représentation civique dans ses fonctions de surveillance et de contrôle vis-à-vis des commissions, de l'exécutif local et de l'administration. Il est recruté et congédié par la représentation civique, laquelle précise également le contour de ses activités, et effectue les tâches définies de conseil et assistance et, en tant que lanceur d'alerte de la commune, reçoit, examine et diffuse les informations des employés municipaux et des collaborateurs concernant les erreurs et négligences, grossières ou importantes et répétées de l'administration municipale.

À un échelon plus réduit, depuis 2007, la ville de Copenhague est composée de 12 comités locaux (lokaludvalg) qui assurent le lien et le dialogue entre les habitants de Copenhague et les élus. Ils ont pour but de renforcer la démocratie de proximité et de permettre aux habitants de Copenhague d'exercer une influence sur les décisions que la représentation civique prend et qui ont un impact sur leur quartier. Le comité local est consulté sur les questions qui revêtent une importance particulière pour le quartier par la représentation civique avant que celle-ci ne prenne la décision finale. Un comité local peut également formuler des propositions à la représentation civique et ses commissions politiques. Il est aussi responsable de l'élaboration des plans de quartier pour son développement en coopération avec la commission des finances de la ville. Un comité local se compose de 23 personnes élues pour 4 ans, dont 14 sont des membres actifs d'associations du quartier et 9 sont des représentants des partis politiques siégeant à la représentation civique. Les comités locaux se réunissent une fois par mois et sont eux-mêmes organisés en groupes de travail. Le comité local du quartier Brønshøj-Husum 200 ( * ) , par exemple, est composé de 5 groupes de travail permanents et d'un comité exécutif. Divers groupes de travail ad hoc peuvent également être constitués. Les groupes de travail préparent les dossiers qui concernent leur domaine de compétence pour la réunion du comité local et lancent et soutiennent financièrement des projets dans le quartier.

Pour promouvoir ses activités culturelles et de développement de la démocratie et des réseaux, le comité local a disposé d'une enveloppe globale de 1 653 000 couronnes danoises (environ 221 195 euros) en 2019. Cette enveloppe est divisée en trois parties, la première étant consacrée au financement des projets citoyens, la deuxième permettant de financer les projets propres du comité local et la troisième étant réservée à la communication.

Annexe 1 : Tableau des compétences des métropoles anglaises
(Synthèse des accords de décentralisation - décembre 2019)

Métropole
(ville-centre)

Transports

Entreprises
& Formation

Logement
& Aménagement

Services publics

(santé, social, justice, police, protection civile)

Financement
et fiscalité

Birmingham

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales et collaboration avec l'Agence anglaise des autoroutes

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Responsabilité de l'émission des billets et pass électroniques

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines 201 ( * ) pour porter des projets d'aménagement

Bénéfice de subventions de l'État pour la rénovation de l'habitat dans des zones prioritaires de l'agglomération

Transfert en discussion de la responsabilité des services de police et de sécurité incendie

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 36,5 millions £ par an

Rétention de la totalité de l'impôt foncier sur les commerces et entreprises 202 ( * ) + contribution supplémentaire

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Bristol

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales et collaboration avec l'Agence anglaise des autoroutes

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Responsabilité de l'émission des billets et pass électroniques

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

Bénéfice de subventions de l'État pour la rénovation de l'habitat dans des zones prioritaires de l'agglomération

Développement de la stratégie de planification urbaine

Exercice de pouvoirs de préemption 203 ( * )

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 30 millions £ par an

Rétention de la totalité de l'impôt foncier sur les commerces et entreprises + contribution supplémentaire

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Liverpool

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales et collaboration avec l'Agence anglaise des autoroutes

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Responsabilité de l'émission des billets et pass électroniques

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

Développement de la stratégie de planification urbaine

Exercice de pouvoirs de préemption

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 30 millions £ par an

Rétention de la totalité de l'impôt foncier sur les commerces et entreprises + contribution supplémentaire

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Manchester

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales et collaboration avec l'Agence anglaise des autoroutes

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Responsabilité de l'émission des billets et pass électroniques

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

Bénéfice de subventions de l'état pour la rénovation de l'habitat dans des zones prioritaires de l'agglomération

Contrôle d'un fonds pour l'habitat de 300 millions £ sur 10 ans pour financer par des prêts aux entreprises les programmes de construction de logements

Développement de la stratégie de planification urbaine

Exercice de pouvoirs de préemption

Responsabilités dans :

- le pilotage du système de santé et de l'aide
sociale ;

- la protection de l'enfance et les services sociaux de suivi des familles ;

- l'accompagnement et la réhabilitation des délinquants, la probation et la justice des mineurs.

Compétence sur les services de police et de sécurité incendie

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 30 millions £ par an

Rétention de la totalité de l'impôt foncier sur les commerces et entreprises + contribution supplémentaire

Bénéfice de la taxe 204 ( * ) pour les infrastructures locales prélevée sur les nouveaux projets de développement immobilier

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Middlesbrough

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 15 millions £ par an

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Newcastle

X

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

Exercice de pouvoirs de préemption

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 20 millions £ par an

Cambridgeshire-Peterborough

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Services de soutien aux entreprises

Bénéfice de subventions de l'État pour la rénovation de l'habitat dans des zones prioritaires

Développement de la stratégie de planification urbaine

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 30 millions £ par an

Possibilité de lever une contribution supplémentaire sur l'impôt foncier sur les commerces et entreprises

Sheffield

Transfert d'un budget consolidé pour les transports

Définition du réseau des routes locales et collaboration avec l'Agence anglaise des autoroutes

Définition des lignes de bus et possibilité de délégation possible à des entreprises privées

Responsabilité de l'émission des billets et pass électroniques

Formation professionnelle des adultes (initiale et continue)

Possibilité de créer des sociétés foncières métropolitaines pour porter des projets d'aménagement

Développement de la stratégie de planification urbaine

X

Bénéfice d'un fonds d'investissement de 30 millions £ par an

Autorité de gestion pour les fonds structurels européens

Sources : M. Sanford, Devolution to local government in England, House of Commons Briefing Paper 7029, 15 mai 2019 ;

National Audit Office, Progress in setting up combined authorities, Report HC 240, 6 juillet 2017.


* 136 Des mécanismes complexes permettent d'écarter du vote sur les textes concernant uniquement l'Angleterre les députés représentant les autres nations, notamment l'Écosse.

* 137 La notion de commune ne correspond pas forcément bien à l'organisation territoriale anglaise qui connaît city, town, parish, borough. Elle tend aussi en sens inverse à recouvrir les districts.

* 138 Même terme juridique que lors du transfert de compétences aux gouvernements régionaux des nations écossaise, galloise et nord-irlandaise.

* 139 Cambridgshire-Peterborough, Greater Manchester, Liverpool City Region, North East (Durham) , North of Tyne (Newcastle), Sheffield City Region, Tees Valley (Middlesbrough), West Midlands (Birmingham), West of England (Bristol) et West Yorkshire (Leeds). Le cas de Londres est entièrement à part.

* 140 Cela représente selon les métropoles entre 17,5 et 43 millions d'euros par an environ en décembre 2019. Les fluctuations de la livre dues au Brexit invitent à la prudence sur la conversion.

* 141 I. Comini & F. Moi, “Le cittá metropolitane nella riforma Delrio”, Il Piemonte delle Autonomie, Anno I, n. 3 - 2014.

* 142 Art. 17 & 18, Legge n. 142 sull'ordinamento delle autonomie locali du 8 juin 1990.

* 143 Decreto Legislativo n. 267/2000, Testo Unico Enti Locali (TUEL).

* 144 Le cas particulier de Rome est également réglé par l'article 114 dont l'alinéa 3 lui accorde le statut de capitale et la soumet à des lois spécifiques.

* 145 Decreto Legge n. 95/2012, ratifié par la loi n°135/2012.

* 146 Corte Costituzionale, sentenza n. 220/2013 du 3 juillet 2013.

* 147 Legge - Dispozioni sulle cittá metropolitane, sulle province, sulle unioni e fusioni di comuni, n.56/2014 du 7 avril 2014.

* 148 Le texte même de la loi se présente lui-même sous forme d'un très long article unique « en attendant la réforme du titre V de la seconde partie de la Constitution. (Article unique, alinéas 5 et 51) ».

* 149 La Loi Delrio de 2014 définit les métropoles (Art. unique al. 2) et les provinces (Art. unique al. 3) comme collectivité à territoire vaste sans clarifier davantage la notion.

* 150 M. De Donno, “La riforma del governo locale nella legge Delrio: qualche riflessione cinque nani dopo”, federalismi.it - Rivista di diritto pubblico, n. 7/2019, 3 avril 2019.

* 151 Corte Costituzionale, sentenza n. 50/2015 du 24 mars 2015.

* 152 Art. 24, Legge 42/2009 (federalismo fiscale) & Decreti Legislativi 156/2010, 61/2012 & 51/2013.

* 153 Corte Costituzionale, sentenza n. 168/2018 du 4 juillet 2018.

* 154 Art. unique, alinéas 85à 97, Loi 56/2014.

* 155 Art. unique, alinéas 7 et 24, Loi 56/2014.

* 156 Art. unique, alinéas 19 et 22, Loi 56/2014. Pour mémoire, en Italie, le maire d'une commune est élu au suffrage universel direct le même jour que l'élection du conseil municipal. Il n'est pas élu par le conseil municipal.

* 157 Art. unique, alinéas 8, 40 et 41, Loi 56/2014.

* 158 Art. unique, alinéas 20, 21, 25 à 39 et annexe A, Loi 56/2014.

* 159 Art. unique, alinéa 8, Loi 56/2014.

* 160 Art. unique, alinéas 8 et 9, Loi 56/2014.

* 161 Document sur la réorganisation institutionnelle des provinces et des métropoles, élaboré et approuvé le 12 mars 2019 par la métropole de Milan, l'association des communes de Lombardie, l'Union des provinces de Lombardie et la Région Lombardie.

* 162 Lei n°44/91 - Áreas metropolitanas de Lisboa e do Porto, du 2 août 1991.

* 163 Art. 1°, al. 2, Lei 44/91.

* 164 Art. 2° & 3°, Lei 44/91.

* 165 Art. 66°- 79°, Lei N° 75/2013 - Regime jurídico das autarquias locais, du 12 septembre 2013.

* 166 Lei n°52/2015 - Regime jurídico do serviço público de transporte de passageiros, du 9 juin 2015.

* 167 Il s'agit des « presidentes das câmaras municipais », qui sont à la tête du collège exécutif dans les communes membres.

* 168 Cf. les études de législation comparée LC 194 et LC 284.

* 169 Art. 137 de la Constitution espagnole de 1978. On laissera de côté les cas des îles Baléares et Canaries et des enclaves de Ceuta et Melilla.

* 170 Art. 141 al. 3 de la Constitution espagnole.

* 171 Art. 152 al. 3 de la Constitution espagnole.

* 172 Art. 3, Ley 7/1985 reguladora de las Bases del Régimen Local du 2 avril 1985.

* 173 TC, sentencia 214/1989 (pt. 4) du 21 décembre 1989.

* 174 Art. 42 al. 4, Ley 7/1985. La jurisprudence constitutionnelle est vigilante (Cf. TC, s. 214/1989 précitée).

* 175 Art. 42 al. 1, Ley 7/1985.

* 176 Art. 44, Ley 7/1985.

* 177 Art. 43 al. 2, Ley 7/1985.

* 178 La doctrine espagnole considère que l'avis de l'État et des provinces ne lient pas les communautés autonomes. Elles peuvent passer outre l'avis négatif de l'État pour créer des métropoles.

* 179 Art. 43 al. 1 & 3, Ley 7/1985.

* 180 O. Prada cit. par F. Toscano Gil, “El área metropolitana en el ordenamiento jurídico español”, Fundación Democracia y Gobierno Local, février 2011.

* 181 Communauté autonome de Galice, Ley 4/2012 del Área Metropolitana de Vigo du 12 avril 2012.

* 182 Communauté autonome d'Aragon, Ley 10/2017 de régimen especial del municipio de Zaragoza como capital de Aragón, du 30 novembre 2017.

* 183 La ville de Madrid et la Région de Madrid comme communauté autonome sont bien différenciées et ne se superposent pas.

* 184 Art. 3 F, Real Decreto 382/1986, por el que se crea, organiza y regula el Funcionamiento del Registro de Entidades Locales du 10 février 1986.

* 185 Communauté autonome de Catalogne, Ley 31/2010 del Área Metropolitana de Barcelona du 3 août 2010.

* 186 Communauté autonome valencienne, Ley 8/2010 de régimen local de la Comunitat Valenciana du 23 juin 2010.

* 187 Landeszentrale für politische Bildung Hamburg, « Wie funktioniert Politik in Hamburg ? » , 2010.

* 188 Hamburg Bezirksverwaltungsgesetz (BezVG) du 6 juillet 2006

* 189 La dénomination peut varier d'un Land à l'autre.

* 190 https://www.bundeswahlleiter.de/europawahlen/2019/kreise.html

* 191 Certaines villes relativement importantes comme Sarrebruck, capitale de la Sarre, ne sont pas des villes-arrondissements et appartiennent à un Landkreis comme les zones rurales environnantes.

* 192 § 35, Gemeindeordnung für das Land Nordrhein-Westfalen (GO NRW) du 14 juillet 1994. En revanche, en Bavière, si la Gemeindeordnung régionale prévoit la possibilité de diviser la ville-arrondissement en districts, elle n'en fait pas obligation. Sur les 25 villes-arrondissements bavaroises, seules Munich et Ingolstadt sont divisées en districts dotés d'une représentation élue.

* 193 https://www.metropolregion.de/

* 194 Gesamte Rechtsvorschrift für Bundes-Verfassungsgesetz

* 195 Verfassung der Bundeshauptstadt Wien (Wiener Stadtverfassung - WStV)

* 196 Lov om kommunernes styrelse du 6 juillet 2018

* 197 Styrelsesvedtægt forKøbenhavns Kommune

* 198 Dans les faits, seule la commune d'Århus parmi les cinq autorisées à recourir à ce type de procédure a opté pour une gestion communale confiée à un magistrat.

* 199 Ændring af delegation af kompetence fra Borgerrepræsentationen til henholdsvis Økonomiudvalget og Økonomiforvaltningen (2018-0329457)

* 200 https://broenshoej-husumlokaludvalg.kk.dk/

* 201 Mayoral Development Corporations

* 202 Cet impôt local appelé business rates est largement déterminé par l'État central et son produit est en principe attribué pour moitié à l'État et pour moitié au conseil local d'implantation de la propriété foncière taxée (boutiques, entrepôts, bureaux, usines, ...).

* 203 Compulsory purchase orders

* 204 Community Infrastructure Levy

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