EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France a signé le 23 novembre 2018 un accord visant à consolider sa relation de défense avec la Suisse.

À la fin de l'année 2017, les deux États sont convenus de rénover leur coopération en matière de défense jusqu'alors fondée sur deux accords signés en 1997 et 2003 1 ( * ) . L'amendement des accords existants aurait nécessité de nombreuses et importantes modifications. La ministre des armées et son homologue suisse ont donc décidé de refondre le cadre bilatéral de cette coopération en concluant un nouvel accord intergouvernemental, qui offre un cadre rénové et élargi à notre coopération dans le domaine de la défense. Il abroge de ce fait les deux accords susmentionnés.

Cet accord, rédigé de manière réciproque, fixe les conditions et les modalités de la coopération franco-suisse en matière de défense. Il reprend les stipulations classiques de ce type d'accord, tout en tenant compte de la neutralité de la Suisse, au nom de laquelle la Confédération helvétique ne s'engage pas dans les conflits internationaux hormis lorsqu'il s'agit d'opérations humanitaires.

Il est composé d'un préambule et de vingt (20) articles, ainsi que d'une annexe précisant les modalités financières de la coopération.

Le préambule de l'accord rappelle la volonté des parties « de contribuer, dans l'esprit de la Charte des Nations unies, au renforcement de la paix, de la confiance et de la stabilité dans le monde ». Il vise également la Convention entre les États parties au Traité de l'Atlantique Nord et les autres États participant au Partenariat pour la Paix sur le statut de leurs forces (dit « SOFA PpP ») et son protocole additionnel du 19 juin 1995 2 ( * ) , auxquels est partie la Confédération helvétique, ainsi que les accords bilatéraux liant les deux États signataires.

L' article 1 er définit les termes employés dans l'accord et développe leur signification.

L' article 2 précise l'objet de l'accord, à savoir les modalités de la coopération franco-suisse en matière de défense. Il précise à son point 2 que l'accord, en conformité avec les exigences conventionnelles et constitutionnelles de la Suisse, ne couvre ni la planification, ni la préparation ni l'exécution d'opérations de combat ou toute autre opération militaire. Par ailleurs, les personnels de la partie d'envoi présents sur le territoire de la partie d'accueil n'ont pas vocation à participer aux opérations de maintien ou de rétablissement de l'ordre public ou de la sécurité, ni à des actions de préparation et/ou d'exécution d'opérations de guerre ou de rétablissement de la souveraineté nationale.

Cet article désigne également les autorités compétentes pour la mise en oeuvre de l'accord : principalement le ministre de la défense pour la partie française et le département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports pour la partie suisse. Il prévoit que la mise en oeuvre de l'accord peut être précisée par des textes d'application spécifiques (accords, arrangements techniques et documents conjoints de procédure).

L' article 3 explicite les formes que peut prendre la coopération entre les parties : activités de formation, exercices et entrainements conjoints ou individuels, organisation de réunions ou de conférences. Il précise les domaines concernés par ces activités tels que la planification en matière de défense, la logistique, l'armement, les systèmes militaires d'information ou de communication ou encore la gestion de la sécurité de l'information. Les différents aspects du domaine du renseignement militaire (absents des accords de 1997 et 2003) ont été ajoutés aux domaines de coopération pour tenir compte du développement des problématiques liées à la cyberdéfense.

De manière plus générale, cette coopération peut être développée dans tout autre domaine défini d'un commun accord entre les autorités compétentes des parties.

L' article 4 inscrit la coopération dans le champ du SOFA PpP et de son protocole additionnel qui prévoit l'application de la Convention du 19 juin 1951 entre les États parties au Traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces 3 ( * ) (SOFA OTAN), et en particulier de son article VIII relatif au mode de règlement des dommages. Ce SOFA régit le statut des membres du personnel et des personnes à charge présents sur le territoire de la partie d'accueil dans le cadre de l'accord.

L' article 5 renvoie, pour le traitement des informations classifiées produites ou échangées dans le cadre de la coopération, aux stipulations de l'accord relatif à l'échange et la protection réciproque des informations classifiées en vigueur avec la Suisse, signé à Soleure le 16 août 2006 4 ( * ) .

L' article 6 énonce les obligations générales des parties pour la mise en oeuvre de la coopération, à savoir la communication préalable des identités des personnels déployés en amont des activités, le respect par ces personnels de la législation de la partie d'accueil, ainsi que les qualifications professionnelles et exigences techniques auxquelles doivent répondre personnels et matériels de la partie d'envoi.

L' article 7 traite du statut des membres des forces armées d'États tiers parties au SOFA PpP et à son protocole additionnel, amenés à participer, lorsqu'ils sont insérés au sein des forces armées de la partie d'envoi, à une activité de coopération sur le territoire de la partie d'accueil. Il fixe les modalités de la demande d'autorisation de cette participation à l'État tiers et à la partie d'accueil.

L' article 8 prévoit que les services compétents des parties établissent, préalablement à chaque activité, les modalités relatives à l'organisation du commandement.

L' article 9 prévoit la tenue de réunions bilatérales entre les autorités compétentes des parties. Il pose également le principe d'établissement de bilans annuels de la coopération qui peuvent s'appuyer, le cas échéant, sur des plans de coopération.

L' article 10 fixe les règles applicables en matière de sécurité générale. Il prévoit en particulier les règles applicables à la sécurité des personnes et des installations, conformément à la législation nationale de la partie d'accueil. Il stipule que les membres du personnel de la partie française coopèrent dans ce but avec les autorités cantonales et communales compétentes suisses lorsqu'ils se trouvent sur le territoire suisse.

L' article 11 fixe les règles en matière de port d'armes et de munitions en prévoyant notamment que celui-ci est autorisé pour les membres du personnel de la partie d'envoi sur le territoire de la partie d'accueil, ou à bord de ses aéronefs et navires, dans les conditions prévues par la législation nationale. Cet article précise également que la partie d'accueil facilite, autant que possible compte tenu de sa législation, le passage à la frontière de ces membres du personnel. Il prévoit enfin les règles applicables pour le transport, la garde et l'utilisation de ces armes et munitions.

L' article 12 énonce les obligations des parties dans le but de faciliter la coopération mise en oeuvre par l'accord. Il prévoit l'accès des membres du personnel de la partie d'envoi aux installations militaires de la partie d'accueil et l'octroi de facilités de circulation (territoire, espace aérien, autorisations de survols et d'atterrissage) et d'utilisation des espaces électromagnétique et cybernétique.

L' article 13 , relatif à la sécurité aérienne, énonce que les parties s'assurent de l'aptitude au vol et du bon fonctionnement de leurs appareils et équipements. Il fixe les règles applicables en cas d'accident ou d'incident aérien impliquant un aéronef des parties dans le cadre de la coopération concernant l'échange et la divulgation d'informations et la tenue de l'enquête de sécurité.

L' article 14 prévoit le maintien de la domiciliation fiscale des membres du personnel (et de leurs personnes à charge), présents sur le territoire de l'État d'accueil, dans l'État d'origine, en application de la convention fiscale franco-suisse et de son protocole additionnel du 9 septembre 1966 et leurs amendements successifs 5 ( * ) .

Les articles 15 et 16 sont relatifs aux soins médicaux, ainsi qu'aux règles applicables en cas de décès. L'article 15 stipule que les membres du personnel de la partie d'envoi ont accès aux soins médicaux sur le territoire de la partie d'accueil dans les mêmes conditions que les personnels de cette partie. Ces prestations, fournies en milieu civil ou militaire, sont prises en charge par la partie d'envoi. Il précise par ailleurs que les personnels participant aux activités de coopération doivent satisfaire aux exigences d'aptitude requises et disposer d'une couverture médicale suffisante.

En cas de décès d'un membre du personnel de la partie d'origine sur le territoire de la partie d'accueil, l'article 16 prévoit les modalités applicables, notamment en ce qui concerne l'établissement du certificat de décès, les règles applicables en cas d'autopsie, ainsi que les conditions de la remise du corps du défunt aux autorités compétentes de la partie d'origine aux fins de rapatriement.

L' article 17 fixe les règles de financement de la coopération. Il prévoit que chaque partie prend à sa charge les frais relatifs à sa participation aux activités de coopération prévues dans le cadre de l'accord. Ces charges n'excèdent cependant pas celles du fonctionnement courant de l'administration.

L'accord précise que des prestations peuvent être fournies et des équipements mis à disposition, par exception, à titre gratuit par l'une des parties à l'autre. Afin d'assurer l'équilibre global des charges, ces prestations et mises à disposition, ainsi que les dispositions prises par les parties conformément au point 1 de l'article 12, font l'objet d'un bilan annuel.

L' article 18 stipule que les différends relatifs à l'application ou à l'interprétation de l'accord sont réglés par voie de consultations ou de négociations entre les parties.

L' article 19 prévoit l'abrogation des accords bilatéraux signés en 1997 et 2003 à la date d'entrée en vigueur de cet accord. Il prévoit également que tout renvoi à ces textes s'entend désormais comme un renvoi au présent accord.

L' article 20 précise les stipulations finales de l'accord. L'accord prend effet le premier jour du deuxième mois suivant le jour de réception de la dernière notification écrite. Il est conclu pour une durée indéterminée.

L' annexe à l'accord , qui en fait partie intégrante, fixe les modalités pratiques de remboursement des prestations fournies par l'une des parties à l'autre dans le cadre des activités de coopération.

Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la coopération bilatérale en matière d'instruction militaire, signé à Paris le 23 novembre 2018. L'approbation de cet accord qui comporte des dispositions de nature législative doit être soumise à l'autorisation préalable du Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.


* 1 - Décret n° 2004-115 du 2 février 2004 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif aux activités communes d'instruction et d'entraînement des armées françaises et de l'armée suisse : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000611844&categorieLien=cid

- Accord relatif aux activités bilatérales d'entraînement et d'échanges entre l'armée de l'air française et les forces aériennes suisses, signé le 14 mai 1997.

* 2 Décret n° 2000-269 du 17 mars 2000 portant publication de la convention entre les États parties au traité de l'Atlantique Nord et les autres États participant au partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces (ensemble un

protocole additionnel), faite à Bruxelles le 19 juin 1995 : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000752646&categorieLien=id

* 3 Décret n° 52-1170 du 11 octobre 1952 portant publication de la convention entre les États parties au traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces, signée à Londres le 19 juin 1951 : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000000327337

* 4 Décret n° 2007-197 du 13 février 2007 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à l'échange et la protection réciproque des informations classifiées, signé à Soleure le 16 août 2006 : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000640885&categorieLien=cid

* 5 - Décret n° 2010-1532 du 10 décembre 2010 portant publication de l'avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris le 9 septembre 1966 (et son protocole additionnel), modifiée par l'avenant signé à Paris le 3 décembre 1969 et par l'avenant signé à Paris le 22 juillet 1997, signé à Berne le 27 août 2009 : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000023218006&categorieLien=id

- Décret n° 2016-534 du 29 avril 2016 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse modifiant le protocole additionnel à la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée, en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales, signé à Berne le 25 juin 2014 : https:/ /www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032482040&categorieLien=id

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page