EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Partout sur notre territoire, nous assistons à une forte recrudescence des incivilités et surtout des agressions envers les élus locaux. D'après, les chiffres du ministère de l'Intérieur publiés en janvier dernier, les violences physiques contre les édiles ont augmenté de 47% sur les onze premiers mois de 2021 par rapport à la même période l'année précédente. Derrières ces statistiques, ce sont exactement 1.186 élus qui ont été pris pour cible et 419 outrages qui ont été recensés. Pour l'écrasante majorité, ce sont des maires, des adjoints, en première ligne face au déchainement de colère de leurs concitoyens.

Déjà, en août 2019, le choc de la mort de Jean-Mathieu MICHEL, maire de Signes, renversé par une camionnette, avait alerté le Sénat et donné lieu au lancement d'une consultation nationale par la commission des lois, présidée par Philippe BAS. Les résultats de cette consultation avaient permis de pointer du doigt certains disfonctionnements dans l'accompagnement de ces élus. A partir de ces témoignages, nous avons effet pu constater que seulement une poignée d'agressions verbales et physiques envers les élus de la République donnent lieu à une suite judiciaire , et ce en particulier dans les plus petites communes. Et, dans les rares situations où une procédure judiciaire était enclenchée, on enregistre en réalité un très faible nombre de condamnations même en cas d'agression physique . Dans la plupart des cas, les plaintes sont soit classées sans suite ou ne font l'objet d'aucune suite pénale.

Ces édiles, victimes de harcèlement ou d'agression, méritent pourtant d'être mieux soutenus dans l'engagement d'une procédure pénale pour que leur soit rendu justice. Pour cela, les associations d'élus semblent être les mieux placées pour les épauler dans cette bataille judiciaire, car capables de mettre à disposition leur expertise en la matière ainsi que leurs plus grandes ressources mobilisables.

C'est pourquoi, cette proposition de loi entend permettre aux différentes associations nationales d'élus de se constituer partie civile pour accompagner, au pénal, tout édile qui aurait donné préalablement son accord (I). L'Association des Maires de France pourrait ainsi faire appel de ces droits pour un élu municipal victime d'agression ou de harcèlement, l'Assemblée des Départements de France pour les élus départementaux tout comme l'Association des régions de France pour les élus régionaux. Cela leur permettrait d'être tenues informées du déroulement de la procédure, de faire appel à un avocat mandaté par leur soin, d'avoir accès aux pièces du dossier, d'être entendues sur l'affaire, de solliciter la réalisation d'actes d'investigation, d'aider à chiffrer le montant du préjudice et d'apporter tous les justificatifs nécessaires pour que le tribunal puisse prendre sa décision et de fixer une indemnisation. Aujourd'hui, l'article 2-19 du code de procédure pénale, ne permet qu'aux associations départementales affiliées à l'AMF d'intervenir pour les seuls élus municipaux.

Aussi, il apparaît nécessaire de revoir le champ d'application d'une telle démarche, prévue par l'article 2-19 du code de procédure pénale. En l'état actuel du droit, il n'est possible pour une association d'intervenir qu'en cas « d'injures, d'outrages, de diffamations, de menaces ou de coups et blessures ». Cette proposition de loi vise donc également à ce qu'une association nationale d'élus intervienne en cas de dégradation d'un de ses biens ou lorsque la victime est l'un de ses proches (II). De plus, il paraitrait judicieux d'inclure dans ce même champ d'application la nouvelle disposition introduite par la loi 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République à l'article 223-1-1 du code pénal. Cette dernière, aux fins d'assurer la protection des élus, incrimine l'exposition délibérée « des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne permettant de l'identifier ou de la localiser aux fins de l'exposer ou d'exposer les membres de sa famille à un risque direct d'atteinte à la personne ou aux biens ». Cette proposition de loi souhaite inclure cette infraction d'exposition délibérée à un risque grave par révélation d'informations privées à la liste de l'article 2-19 du code de procédure pénale définissant le cadre d'intervention pour une associations d'élus en tant que partie civile (III).

Enfin, toujours selon l'article 2-19 du code de procédure pénale, l'action des associations n'est malheureusement autorisée qu'en cas de faits commis contre l'élu « à raison de (ses) fonctions » particulières et non de son mandat. Or, le fait que l'adhésion à une association ne soit ouverte qu'à des présidents d'assemblée locale ne devrait pas faire obstacle en lui-même à la recevabilité d'une action de cette association pour accompagner tout élu local qui n'aurait pas cette qualité. Au-delà du soutien à l'élu lui-même, une telle action participe de la lutte en faveur d'un exercice serein des mandats locaux et donc du bon fonctionnement des assemblées locales. Cette mission relève à l'évidence des associations d'élus quand bien même l'adhésion ne serait ouverte qu'à ceux investis de fonctions exécutives. Cette proposition de loi s'attache donc aussi à apporter cette clarification : que les associations d'élus puissent accompagner tous les élus, victimes de harcèlement ou d'agression, même ceux qui ne sont pas investis de fonctions particulières (IV).

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