Menaces transfrontières graves pour la santé (PPRE) - Texte déposé - Sénat

N° 343

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 février 2021

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE PORTANT AVIS MOTIVÉ


au nom de la commission des affaires européennes,
en application de l’article 73 octies du Règlement,


sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision n° 1082/2013/UE, COM(2020) 727 final,


présentée

Par Mmes Laurence HARRIBEY et Pascale GRUNY,

Sénateurs


(Envoyée à la commission des affaires sociales.)




Proposition de résolution européenne portant avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision  1082/2013/UE, COM(2020) 727 final

La proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision nº 1082/2013/UE – COM(2020) 727 – prévoit un nouveau cadre juridique pour la mise en œuvre de mesures de préparation et de réaction aux menaces transfrontières graves pour la santé.

Ce texte propose de renforcer le rôle du Comité de sécurité sanitaire (CSS) qui pourra adopter officiellement des orientations et des avis, à la majorité simple, à destination des États membres pour renforcer la coordination des mesures prises face à une menace transfrontière grave pour la santé. La Commission doit préciser par voie d’actes d’exécution les procédures nécessaires à la mise en œuvre de cette disposition. Si elle estime cette coordination insuffisante, la Commission pourra adopter des recommandations concernant des mesures communes et temporaires de santé publique destinées aux États membres.

La Commission propose également d’élaborer un plan européen contraignant de préparation et de réaction aux crises sanitaires et aux pandémies. Ce plan sera complété par les plans des États membres, adoptés à l’échelon national ou local, et tenus d’être interopérables avec celui de l’Union. La Commission doit définir par un acte d’exécution les modèles à utiliser lors de la fourniture des informations relatives à la planification de la préparation et de la réaction. Elle déterminera également par des actes délégués les procédures, les normes et les critères relatifs aux audits visant à évaluer la planification de la préparation et de la réaction à l’échelon national, audits dont les conclusions pourraient conditionner le soutien financier de l’Union aux plans nationaux.

Vu l’article 88-6 de la Constitution,

Considérant les termes du courrier adressé au Président du Sénat le 11 octobre 2019 par le Premier vice-président de la Commission européenne, selon lesquels la période allant du 20 décembre d’une année donnée au 10 janvier de l’année suivante est exclue du délai de 8 semaines fixé dans le protocole  2 annexé aux traités pour l’évaluation par les parlements nationaux de la conformité des projets d’actes législatifs de la Commission avec les principes de subsidiarité et de proportionnalité,

Le Sénat fait les observations suivantes :

– La proposition de règlement COM(2020) 727 a pour base juridique l’article 168, paragraphe 5, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Cet article prévoit que le Parlement européen et le Conseil peuvent adopter des mesures d’encouragement visant à lutter contre les grands fléaux transfrontières, des mesures concernant la surveillance des menaces transfrontières graves sur la santé, l’alerte en cas de telles menaces et la lutte contre celles-ci, à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres ;

– La Commission s’appuie, en ce qui concerne la subsidiarité, sur l’article 2, paragraphe 5, du TFUE qui prévoit que, dans le domaine de la santé, l’Union dispose d’une compétence pour mener des actions pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres, sans pour autant remplacer leur compétence dans ces domaines ;

– Or, l’article 168 du TFUE, dans son paragraphe 7, stipule que l’action de l’Union est menée dans le respect des responsabilités des États membres, en ce qui concerne la définition de leur politique de santé, ainsi que l’organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux. Les responsabilités des États membres incluent la gestion de services de santé et de soins médicaux, ainsi que l’allocation des ressources qui leur sont affectées ;



– Concernant les mesures visant à renforcer la coordination



– Il convient que la Commission précise, dans la proposition de règlement et pas dans un acte d’exécution, dans quelles mesures les avis du CSS pourraient lier les États membres. Cela permettra de garantir que les compétences des États membres sont respectées, conformément à l’article 168, paragraphe 7, du TFUE ;



– Les recommandations de la Commission, bien qu’elles ne soient pas contraignantes, sont prises en considération par les juges nationaux, notamment lorsque celles-ci éclairent l’interprétation de dispositions nationales prises dans le but d’assurer la mise en œuvre de ces recommandations, ou encore lorsqu’elles ont pour objet de compléter des dispositions communautaires ayant un caractère contraignant. De ce fait, il convient que la Commission précise dans la proposition de règlement les sujets sur lesquels peuvent porter ces recommandations afin de garantir que les compétences des États membres sont respectées, conformément à l’article 168, paragraphe 7, du TFUE ;



Dans l’attente de ces précisions, le Sénat estime que les articles 21, paragraphe 4, et 22 de la proposition de règlement COM(2020) 727 ne respectent pas le principe de subsidiarité ;



– Concernant les plans de préparation et de réaction



– La Commission renvoie à un acte d’exécution la détermination des domaines couverts par ces plans, ce qui ne permet pas d’apprécier le respect des compétences des États membres ;



– Pour garantir l’interopérabilité des plans nationaux avec le plan de l’Union, une harmonisation de dispositions de nature législative et réglementaire sera nécessaire, ce qui est exclu par l’article 168, paragraphe 5, du TFUE ;



– Les plans nationaux doivent pouvoir contenir des dispositions spécifiques, qui peuvent être classifiées ou non, propres à chaque État membre, notamment en ce qui concerne l’organisation et la fourniture de services de santé et de soins médicaux, conformément à l’article 168, paragraphe 7, du TFUE ;



Pour ces raisons, le Sénat estime que les articles 6 et 7 de la proposition de règlement COM(2020) 727 ne respectent pas le principe de subsidiarité ;



– Concernant les évaluations et audits des plans nationaux



– Ces évaluations et audits ne sauraient conduire à une remise en cause de lois et règlements nationaux, en vue de garantir l’interopérabilité des plans nationaux avec celui de l’Union, conformément à l’article 168, paragraphe 5, du TFUE qui exclut toute harmonisation de dispositions législatives et réglementaires ;



– Ces évaluations et audits ne sauraient impliquer la révélation d’informations classifiées liées aux plans de préparation et de réaction nationaux ;



Pour ces raisons, le Sénat estime que les articles 8 et 9 de la proposition de règlement COM(2020) 727 ne respectent pas le principe de subsidiarité.

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