Développement économique de la filière du chanvre en France (PPR) - Texte déposé - Sénat

N° 769

SÉNAT


SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 juillet 2022

PROPOSITION DE RÉSOLUTION



en application de l’article 34-1 de la Constitution,


portant sur le développement économique de la filière du chanvre en France et l’amélioration de la réglementation des produits issus du chanvre,


présentée

Par MM. Guillaume GONTARD, Patrick KANNER, Jean-François LONGEOT, Guy BENARROCHE, Daniel BREUILLER, Ronan DANTEC, Thomas DOSSUS, Jacques FERNIQUE, Joël LABBÉ, Mme Monique de MARCO, M. Paul Toussaint PARIGI, Mme Raymonde PONCET MONGE, M. Daniel SALMON, Mme Mélanie VOGEL, MM. Jean-Michel ARNAUD, Joël BIGOT, Mme Nicole BONNEFOY, MM. Henri CABANEL, Rémi CARDON, Yan CHANTREL, Gilbert-Luc DEVINAZ, Mme Nassimah DINDAR, M. Jérôme DURAIN, Mmes Martine FILLEUL, Frédérique GERBAUD, MM. Hervé GILLÉ, Jean-Noël GUÉRINI, André GUIOL, Ludovic HAYE, Olivier JACQUIN, Éric JEANSANNETAS, Patrice JOLY, Bernard JOMIER, Mme Gisèle JOURDA, MM. Éric KERROUCHE, Gérard LAHELLEC, Mmes Marie-Noëlle LIENEMANN, Annie LE HOUEROU, Colette MÉLOT, MM. Serge MÉRILLOU, Franck MENONVILLE, Mme Michelle MEUNIER, M. Jean-Jacques MICHAU, Mmes Marie-Pierre MONIER, Évelyne PERROT, M. Sebastien PLA, Mmes Émilienne POUMIROL, Angèle PRÉVILLE, MM. Didier RAMBAUD, Claude RAYNAL, Mmes Sylvie ROBERT, Laurence ROSSIGNOL, MM. Rachid TEMAL, Jean-Claude TISSOT et Jean-Marc TODESCHINI,

Sénateurs et Sénatrices





Proposition de résolution portant sur le développement économique de la filière du chanvre en France et l’amélioration de la réglementation des produits issus du chanvre

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu le chapitre XVI du Règlement du Sénat,

Vu le règlement (UE) 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relatif aux nouveaux aliments, modifiant le règlement (UE)  1169/2011 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant le règlement (CE)  258/97 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE)  1852/2001 de la Commission,

Vu l’article L. 228-4 du code de l’environnement, tel que modifié par la loi  2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets,

Vu le décret  2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique,

Vu le décret  2021-1004 du 29 juillet 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine,

Vu l’arrêté du 30 décembre 2021 portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique,

Vu l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 novembre 2020 dans l’affaire C-663/18,



Vu l’ordonnance du Conseil d’État du 24 janvier 2022 ( 460055),



Vu l’avis de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) du 11 juin 2018 concernant l’arrêté du 22 août 1990 portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique pour le cannabis,



Vu le plan d’action 2018-2020 « Une stratégie bioéconomie pour la France »,



Vu le rapport d’étape sur le « chanvre bien-être » du 10 février 2021 de MM. Jean-Baptiste Moreau et Ludovic Mendes, députés, au nom de la mission d’information commune sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis,



Vu le rapport  727 (2017-2018) du 25 septembre 2018 de M. Joël Labbé, sénateur, fait au nom de la mission d’information sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales, des filières et métiers d’avenir,



Considérant l’insécurité juridique de l’ensemble des acteurs de la filière du chanvre (agriculteurs, industriels, laboratoires, détaillants) ;



Relevant les non-conformités des dispositions réglementaires pour les produits issus du chanvre aux normes législatives du code de la santé publique et à la réglementation européenne ;



Considérant les perspectives économiques offertes par le développement de la filière du chanvre, à savoir une projection d’ici à 5 ans d’un marché de 1,5 à 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel et l’emploi, directs et indirects, de 18 000 à 20 000 personnes supplémentaires ;



Relevant que la culture française du chanvre constitue une diversification de la production des agriculteurs à même de procurer des ressources financières complémentaires ;



Constatant le potentiel d’attractivité de la culture du chanvre pour les nouveaux professionnels du secteur agricole, alors que 45 % des agriculteurs actuels auront pris leur retraite d’ici 2026 ;



Considérant les projections de recettes fiscales et sociales supplémentaires issues de la filière du chanvre estimées entre 0,7 et 1,1 milliard d’euros par an ;



Considérant que 90 % des produits à base de cannabidiol (CBD) vendus dans les 2 000 points de vente auprès de 7 millions de consommateurs ne sont pas issus d’une production sur le territoire français ;



Observant le retard économique de la France dans la filière CBD comparativement aux autres États européens et aux États d’Amérique alors même qu’elle est le premier producteur européen de chanvre ;



Constatant l’existence de tests opérationnels permettant la mesure du taux de tétrahydrocannabinol (THC) contenu dans les fleurs de cannabis et la détermination en conséquence de leur légalité ;



Invite le Gouvernement à instaurer une obligation de déclaration des cultures de chanvre et de leur destination compatible avec les obligations de la politique agricole commune (PAC) et permettant la réalisation d’une cartographie de la production française de chanvre dans la perspective d’une vision précise de la réalité de la filière et d’une meilleure compréhension de ses enjeux, mais également afin de permettre la mise en place de contrôles par les autorités publiques et de fournir aux consommateurs la plus grande sécurité sanitaire ;



Propose l’ouverture de l’obtention du label « Agriculture biologique » à tous les produits du chanvre destinés à la consommation humaine et animale ;



Souhaite un élargissement du catalogue des cultivars aux variétés contenant moins de 1 % de THC, tel que pratiqué notamment en République tchèque, en Suisse, en Australie et, vraisemblablement, prochainement aux États-Unis, au Canada et dans de nombreux autres pays ;



Encourage l’autorisation de l’usage de techniques agricoles de base par les producteurs de chanvre, notamment la sélection variétale, le bouturage et la capacité de replantation des graines ;



Invite le Gouvernement à faire de la commande publique, par son devoir d’exemplarité, un levier de la massification des filières biosourcées locales ;



Pour ce faire, dans le respect du droit communautaire, propose la création d’un label public exigeant pour les produits biosourcés français ainsi que la prise en compte des économies d’énergie dans les critères des marchés publics ;



Demande de corréler l’obtention des aides à la rénovation énergétique (Ma Prime Renov, éco-PTZ…) à des critères liés aux caractéristiques environnementales des matériaux, en cohérence avec les objectifs de la règlementation environnementale 2020 (RE2020) sur les bâtiments neufs ;



Propose d’intégrer dans l’ensemble des cursus de formation des architectes et des métiers du bâtiment des cours portant sur la construction biosourcée et les critères environnementaux ;



Invite le Gouvernement à lancer une campagne de communication à grande échelle à destination des collectivités territoriales, du grand public et des professionnels, mettant en avant les produits de la bioéconomie, tel que le prévoyait le plan d’action 2018-2020 du ministère de l’Agriculture « Une stratégie bioéconomie pour la France » ;



Appelle le Gouvernement à s’assurer que les représentants de la filière définissent une feuille de route, un planning, et des règles professionnelles stabilisées s’agissant des matériaux biosourcés afin de répondre au cahier des charges de la RE2020 avant la fin de l’année 2022 ;



Propose au Gouvernement la création d’un label qualité textile biosourcé et à terme l’intégration de ce label dans les critères des marchés publics relatifs aux textiles ;



Invite le Gouvernement à une harmonisation des analyses de cycle de vie qui corresponde aux exigences européennes en matière d’empreinte environnementale et à déployer le plus rapidement possible les dispositifs d’affichage environnemental des textiles actuellement imaginés au niveau européen ;



Propose que le Gouvernement mette en place des dispositifs de subventions et d’investissement pour répondre aux besoins d’équipement de la filière française du chanvre afin de contribuer à la décarbonation de l’économie en soutenant l’industrialisation d’une filière vertueuse ;



Appelle le Gouvernement à soutenir la recherche en appui à la filière chanvre industrielle mais également la recherche sur les bienfaits du CBD pour le bien-être, le confort et l’entretien de la bonne santé des consommateurs ;



Propose l’élaboration par le Gouvernement de normes homogènes, pour les procédures d’analyse des produits CBD, pouvant se baser sur le modèle d’agrément du Comité français d’accréditation ou de la norme « appellation d’origine protégée » ;



Suggère au Gouvernement la fixation de normes d’étiquetage et d’un seuil de résidus de THC dans les produits finis issus du chanvre ;



Appelle le Gouvernement à définir des doses journalières recommandées (DJR) non contraignantes de consommation de CBD, à mentionner sur les emballages des produits, afin de prévenir toute forme de consommation problématique des produits à base de CBD ;



Appelle le Gouvernement à mettre rapidement en place un encadrement de l’utilisation du CBD dans les compléments alimentaires ;



Invite le Gouvernement, en ce qui concerne la règlementation européenne dite « Novel Food » (règlement (UE) 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 précité), à considérer que seuls les produits alimentaires enrichis en CBD au-delà de ce que comporte naturellement la plante (soit 5 % de CBD) relèvent de la catégorie « Novel Food », comme le prévoyait la Commission européenne jusqu’en 2019, date à partir de laquelle tous les produits alimentaires contenant des extraits de chanvre sont considérés comme relevant de la catégorie « Novel Food » ;



Suggère d’ajuster les taux de la taxe sur la valeur ajoutée concernant les différentes typologies de produits contenant du CBD selon leur usage ;



Invite le Gouvernement à catégoriser clairement les produits issus du chanvre à principe actif afin d’identifier ceux relevant du bien-être et de la consommation courante et ceux relevant du soin médical et du régime de la pharmacopée ;



Suggère de mettre à la disposition des forces de l’ordre (douane, police, gendarmerie) des tests portatifs permettant de distinguer précisément les teneurs respectives en CBD et en THC des produits brut ;



Suggère au Gouvernement de préciser les modalités d’autorisation et d’extraction, en particulier concernant le dépassement temporaire en cours de processus de THC et de contrôle de l’élimination des résidus THC ;



Demande l’autorisation de la vente au détail de la fleur et de la feuille de chanvre (du catalogue des variétés autorisées) sous toutes leurs formes ;



Propose au Gouvernement de créer un label de qualité pour les produits français de CBD ;



Invite le Gouvernement à un assouplissement, un complément et une précision du cadre légal et réglementaire pour la filière du chanvre et à un appui des acteurs de la filière pour son développement économique en prenant appui sur les propositions susmentionnées.

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