Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 08/12/2005

M. Roland Courteau attire une nouvelle fois l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur le dossier d'aménagement hydraulique des basses plaines de l'Aude. Il lui rappelle la crue particulièrement meurtrière de 1999 et lui indique qu'à tout moment les mêmes causes peuvent provoquer les mêmes effets. Il lui demande donc, d'une part, de bien vouloir lui faire un point précis sur l'évolution du projet global relatif aux basses plaines de l'Aude, en amont et en aval de Coursan. Il attire également son attention, d'autre part, sur la situation particulière des communes de Sallèles-d'Aude, Saint-Marcel-sur-Aude et Cuxac-d'Aude, en raison de l'existence du remblai de la ligne ferroviaire et des digues de voies navigables de France (VNF) qui, dans la partie située entre Sallèles-d'Aude et le lieu-dit « Le Gaillousty », font obstacle au déplacement naturel du cours d'eau, dans la zone de mobilité du lit mineur, lorsque le fleuve Aude est en crue, provoquant, de ce fait, la submersion de la commune de Sallèles-d'Aude ainsi que celle de Saint-Marcel, située en amont, avant de provoquer, lors de leur rupture, comme ce fut le cas par le passé à plusieurs reprises, un effet de vague meurtrier sur la commune de Cuxac-d'Aude, située en aval. Il lui rappelle également que, selon la loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels n° 2003-699 (article 48), complétant le chapitre 1er du titre 1er du Livre II du code de l'environnement, la responsabilité, en la matière, incombe à l'Etat ou à ses établissements publics. Il lui demande donc sous quels délais les travaux d'aménagement des ouvrages précités seront engagés par RFF et VNF, en corrélation avec les travaux de protection de la commune de Cuxac-d'Aude et il lui précise enfin que chaque mois de retard peut nous rapprocher d'une catastrophe plus meurtrière encore que celle de novembre 1999.

- page 3135


Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 01/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 31/01/2006

M. Roland Courteau. Madame la ministre, pour la deuxième fois en trois mois et la énième fois ces dernières années, le département de l'Aude vient d'être frappé par des inondations. Une fois de plus, dans des secteurs comme les basses plaines de l'Aude, les mêmes causes ont provoqué les mêmes effets. Mais il fallait s'y attendre, puisque rien n'a été entrepris sur le terrain depuis la crue meurtrière et dévastatrice de novembre 1999.

Une fois de plus, donc, mais surtout une fois de trop, car, pour nos populations, les limites du supportable sont maintenant largement franchies. Cela ne peut plus durer, madame la ministre, et surtout cela ne doit plus durer.

D'ailleurs, une fois passé ce nouveau choc, on peut s'attendre à des réactions particulièrement virulentes de la part des populations qui sont traumatisées à vie par le cataclysme de novembre 1999 et exaspérées de constater que les aménagements à réaliser en sont toujours, ou presque, au même point. Faut-il vous préciser que le climat est particulièrement tendu ? Lassitude, écoeurement, ras-le-bol et surtout colère.

Madame la ministre, dans ce secteur à haut risque, la mise en oeuvre des travaux de prévention et de protection contre les inondations doit constituer la première des urgences, faute de quoi le désastre de 1999 se renouvellera.

Du reste, le drame de 1999 n'était-il pas prévisible ? N'avais-je pas donné l'alarme à plusieurs reprises, ici ou dans votre ministère, en 1994, en 1995, en 1996 et en 1998 ? « Fausses alarmes » m'avait-on rétorqué ici ou là. Hélas, non ! Rien n'était faux, rien n'était exagéré ; la suite l'aura malheureusement démontré.

L'appel que je lance aujourd'hui n'est pas davantage exagéré. Pour les populations concernées et leurs élus, cette fois, la coupe est pleine !

Je vous le dis d'autant plus volontiers, madame la ministre, que vous n'êtes aucunement responsable du retard qui a été pris dans ce dossier, puisque vous n'êtes chargée de ce ministère que depuis peu. Mais, au nom des parlementaires de l'Aude et du président du conseil général, mon devoir était de vous alerter sur le fait qu'il y a réellement péril : des vies humaines dépendent des actions à engager.

Pouvez-vous donc nous dire quel est l'état d'avancement du projet global visant à protéger les basses plaines de l'Aude contre les inondations, tant en amont de Coursan qu'en aval, puisque le syndicat mixte du delta est d'ores et déjà en place ?

L'État s'engage-t-il à pérenniser sa propre intervention sur un fleuve qui est domanial et à garantir son financement, y compris pour ce qui concerne l'entretien des berges ? C'est une vraie question, madame la ministre.

Enfin, pouvez-vous m'apporter des précisions quant aux délais envisagés pour l'aménagement ou la modification des digues de Voies navigables de France, VNF, et du remblai de la ligne ferroviaire situé sur la commune de Sallèles-d'Aude, car c'est l'un des points les plus dangereux ? Ce sont des éléments qui font obstacle au déplacement naturel du cours d'eau dans la zone de mobilité du lit mineur, lorsque le fleuve Aude est en crue. Ils provoquent ainsi la submersion non seulement de la commune de Sallèles-d'Aude, mais également des communes situées en amont, comme la commune de Saint-Marcel-sur-Aude, avant d'entraîner, lors de leur rupture, un effet de vague meurtrier sur la commune de Cuxac-d'Aude, située en aval. Je rappelle qu'il y a eu cinq morts en 1999.

Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, nous avons connu une catastrophe similaire en 1930, en 1940 et en 1962, pour ne parler que du siècle qui vient de s'écouler.

Je souligne que, à la suite de leur rupture, VNF et RFF s'étaient empressés, dans des délais record, non seulement de reconstruire ces digues à l'identique, mais, de surcroît, de les renforcer, chacun des acteurs étant mis devant le fait accompli.

Sur ce point, je rappelle que, en 2003, j'avais pris l'initiative d'amender le projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, en précisant que la suppression ou la modification des éléments faisant obstacle au déplacement naturel d'un cours d'eau serait à la charge de l'État dans la mesure où lesdits éléments lui appartiennent.

Madame la ministre, quelles sont vos intentions sur ce point précis ? Quelles initiatives ont été prises en application de ces mesures législatives et, surtout, dans quels délais se concrétiseront-elles par des aménagements importants ? Je me permets de vous interroger, car VNF et RFF ne daignent pas répondre aux courriers des parlementaires.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Je peux vous assurer, monsieur le sénateur, que la question de la prévention des risques d'inondation de l'Aude est suivie avec une attention particulière par mon ministère. Nous ne voulons pas revivre les événements de 1999 ! J'ai entendu ce matin, à la radio, les déclarations des habitants, qui sont effectivement désespérés.

Même si, sur le terrain, il semble que peu de chose ait été fait, des progrès ont néanmoins été accomplis s'agissant des actions relevant directement de l'État ; je pense notamment à l'élaboration des plans de prévention des risques d'inondation et à la modernisation de la prévision des crues.

La direction départementale de l'équipement de l'Aude est le support d'un des vingt-deux nouveaux services de prévision des crues, qui vont remplacer cette année les cinquante-deux structures existantes.

Les communes, le conseil général, ainsi que les autres acteurs concernés dans le bassin de l'Aude ont réalisé, avec le concours financier exceptionnel de l'État et de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée, pour un montant de 13 millions d'euros environ, d'importants travaux de remise en état des cours d'eau et des ouvrages hydrauliques, après la catastrophe de 1999.

Les travaux d'aménagement engagés par l'Association interdépartementale des basses plaines de l'Aude ont pris un nouveau départ en 2003, en s'intégrant dans un programme d'action concerté entre l'État et les collectivités territoriales concernées sur l'ensemble du bassin versant du fleuve Aude.

Le 1er juillet 2005, une réunion entre les élus et les services de l'État a permis de constater les progrès accomplis dans la mise au point de ce programme d'action.

Les différents partenaires ayant souhaité que la finalisation de ce projet fasse l'objet d'un appui technique de l'inspection générale de l'environnement, j'ai aussitôt demandé à celle-ci d'apporter son concours et de m'adresser son rapport pour la fin de l'année 2005. Les conclusions de ce travail ont été présentées vendredi dernier à Carcassonne.

Le rapport aborde notamment la question des remblais de la ligne ferroviaire et du canal qui, à l'aval du bourg de Sallèles-d'Aude, font obstacle à l'écoulement des crues et se sont rompus à de nombreuses reprises dans le passé, aggravant alors la situation à l'aval. Il conclut à la nécessité pour les maîtres d'ouvrage de ces remblais d'assurer le plus tôt possible une « transparence hydraulique aux crues ». Ceux-ci devront soumettre à M. le préfet de l'Aude leurs propositions en ce sens.

Monsieur le sénateur, compte tenu de la gravité de la situation, je viens d'adresser un courrier à M. le préfet lui demandant de prendre toutes les dispositions utiles pour conduire ces actions sans délai. Je puis vous assurer que je suivrai ce dossier personnellement.

Par ailleurs, je vous recevrai très prochainement avec le président du syndicat mixte du delta pour faire le point sur ce programme.

Tout sera fait pour que le programme d'action de prévention des inondations de l'Aude soit mis en oeuvre avec l'urgence qui s'impose.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Visiblement, vous avez pris conscience de la situation à haut risque que nous connaissons. Puissent les actes concrets suivre vos engagements !

- page 384

Page mise à jour le