Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 20/10/2006

Question posée en séance publique le 19/10/2006

M. Roland Courteau. Nous souhaitons que ce qui se trame avec la privatisation de GDF soit parfaitement connu des Français,...

M. Josselin de Rohan. On ne parle que de ça !

M. Roland Courteau. ...car, en fait, toute la stratégie du Gouvernement sur ce sujet pourrait se résumer à la question suivante : Comment privatiser GDF sans en avoir l'air et tout en parlant d'autre chose ? (Applaudissements sur les mêmes travées.)

M. Jean-Marc Todeschini. Bravo !

M. Roland Courteau. Or les Français doivent savoir que rien ne sera plus comme avant, notamment en ce qui concerne les prix du gaz puisque ces derniers dépendront surtout de l'intérêt financier, d'actionnaires privés.

Au-delà du profond désordre qui règne sur ce dossier et qui a été mis en lumière par l'irruption de M. François Pinault et les exigences de l'Europe, je reprendrai volontiers les propos de notre ami Daniel Raoul : « ce projet est irrecevable, inacceptable, irresponsable » et même « immoral » (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Protestations sur les travées de l'UMP.)

D'abord, il est irrecevable, car la privatisation de GDF pose de lourdes questions juridiques au regard de la Constitution. Nous saisirons, d'ailleurs, si nécessaire et en temps opportun, le Conseil constitutionnel.

Ensuite, ce projet de loi est inacceptable. Il est en effet dangereux, car il remet en cause notre service public de l'énergie, lequel a largement démontré son efficacité en matière de sécurité d'approvisionnement, de péréquation tarifaire et de prix abordables.

Oui, il est inacceptable, car la morale ne s'y retrouve pas ! Je pense au reniement du Gouvernement à la suite des engagements de M. Sarkozy ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Claude Domeizel. Eh oui !

M. Roland Courteau. Je pense également au plan de distribution des stock-options d'ores et déjà préparé par certains dirigeants avec empressement et gourmandise.

Enfin, ce projet est irresponsable. En effet, comment assurer la sécurité énergétique de la France en commençant par abandonner à un groupe privé l'ensemble des infrastructures lourdes qui en sont les outils ?

M. Alain Vasselle. La question !

Mme Christiane Hummel. C'est une déclaration, pas une question !

M. Roland Courteau. Oui, ce projet est dangereux, car nul ne sait qu'elle sera en définitive la décision de Bruxelles ou celle qui sera prise par l'assemblée des actionnaires !

M. Alain Vasselle. Ce n'est pas Bruxelles, c'est Paris !

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Courteau !

M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.

Au final, on pourrait se retrouver avec GDF privatisé et sans projet industriel, et facilement opéable.

En somme, c'est au nom du patriotisme économique que le Gouvernement demandait au Parlement de privatiser GDF, afin de porter secours à une entreprise privée. C'est au nom de ce même patriotisme qu'au final nous pourrions nous retrouver avec une entreprise française susceptible de passer sous le contrôle d'un groupe étranger !

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !

M. Roland Courteau. Devant de tels désordres et face à de tels dangers pour les Français, allez-vous enfin, monsieur le ministre, retirer ce funeste projet ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 20/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 19/10/2006

M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Monsieur Courteau, je suis très heureux de pouvoir continuer, à l'occasion de cette séance de questions d'actualité au Gouvernement, le débat permanent que nous avons depuis plusieurs jours. (Sourires.)

Manifestement, je ne vous ai pas encore complètement converti (Rires sur les travées du groupe socialiste)...

M. Jean-Marc Todeschini. Pas plus que les Français !

M. Didier Boulaud. Il faudrait que vous soyez convaincu vous-même !

M. François Loos, ministre délégué. ...à ce très beau projet industriel, qui nous a été présenté au début de l'année et dont nous avons largement discuté avec les organisations syndicales. Ce projet, s'il se concrétisait, aurait la vertu de créer une entreprise à partir de Gaz de France et de Suez qui disposerait d'un grand parc énergétique très diversifié, qui serait le leader européen du gaz, le leader mondial du gaz naturel liquéfié, et qui serait même le cinquième producteur européen d'électricité !

MM. Jean-Marc Todeschini et Didier Boulaud. Arcelor !

M. François Loos, ministre délégué. Vous avez peur que ce projet ne remette en question les obligations de service public.

Or ces obligations de service public sont inscrites dans les lois de 2000,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n'est plus appliquée, la loi de 2000 ! C'est de la rigolade !

M. François Loos, ministre délégué. ...2003, 2004 et 2005, et nous en ajoutons encore dans le projet de loi relatif au secteur de l'énergie !

M. Jean-Marc Todeschini. Vous n'y croyez pas vous-même !

M. François Loos, ministre délégué. Nous ajoutons notamment, ce qui est absolument indispensable, le maintien des tarifs régulés, qui permet effectivement à tous les consommateurs de pouvoir bénéficier de bonnes conditions, au-delà de la date limite de transposition de la directive européenne d'ouverture des marchés.

M. Didier Boulaud. Allez leur dire !

M. François Loos, ministre délégué. Par-delà le service public, l'État maintien une minorité de blocage, ce qui nous permet d'être décideurs sur tous les investissements stratégiques.

M. Jean-Marc Todeschini. Ce sont des paroles !

M. François Loos, ministre délégué. Par ailleurs, nous obtenons - avec l'accord de Bruxelles - une action spécifique, qui nous permet de maintenir toute décision au niveau de l'État pour ce qui concerne les ports méthaniers, les équipements de transport, les stockages souterrains, c'est-à-dire pour tout ce qui est vraiment fondamental afin de garantir une politique de sécurité d'approvisionnement dans notre pays.

Monsieur le sénateur, j'ai encore quelques jours pour vous convaincre, je vais continuer ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - M. Bernard Seillier applaudit également.)

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