Question de M. BERTRAND Alain (Lozère - RDSE) publiée le 14/12/2011

Question posée en séance publique le 13/12/2011

Concerne le thème : La compétitivité

M. Alain Bertrand. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans les zones hyper-rurales, le chiffre d'affaires des PME de toutes sortes – de l'artisanat, des services, des professions libérales, du commerce – est plus difficile à réaliser que dans d'autres zones.

M. Roland Courteau. C'est vrai !

M. Alain Bertrand. L'hyper-ruralité est une notion nouvelle, qui diffère quelque peu du concept de zone rurale. Elle peut se caractériser par le faible nombre d'habitants, par l'éloignement des capitales régionales – huit heures de train sont nécessaires pour aller de la préfecture de la Lozère à la capitale régionale, seize à dix-huit heures pour aller à Paris –, par l'absence de facultés et de grandes villes. La Lozère ne compte aucune ville de 15 000 habitants ni aucune agglomération. C'est le cas dans bien d'autres parties de départements français, notamment dans la Creuse, l'Ariège – chère au président Bel – ou en Corse, notamment.

L'hyper-ruralité, souvent localisée en zone de montagne, se caractérise aussi par des prix plus élevés qu'ailleurs. Ainsi, le gazole est plus cher en Lozère qu'à Paris, à Marseille ou à Lille. Les études des enfants sont aussi beaucoup plus coûteuses, tout comme le sont les denrées alimentaires, car il y a moins de bassins de chalandise et moins de concentrations de grandes surfaces. Bref, tout est plus cher !

Malgré les mesures existantes, qui, déjà faibles, s'étiolent – je pense notamment aux aides à finalité régionale comme l'ancienne prime d'aménagement du territoire, aux zones de revitalisation rurale, aux pôles d'excellence rurale –, c'est un véritable sacerdoce que d'entreprendre en milieu rural. Il convient donc de mettre en place des mesures spéciales, adaptées et particulières, qui permettent à chaque initiative de prospérer : davantage de dotations aux communes de l'hyper-ruralité, des aides spécifiques aux artisans, commerçants et PME, un dispositif « initiatives dans l'hyper-ruralité », qui inclura nécessairement des aides à l'investissement touristique, notamment, fournies par l'État, les régions et les départements. Jusqu'à présent, ce n'est que très mal fait.

Qu'envisagez-vous donc, monsieur le secrétaire d'État, pour que ces territoires, déjà défavorisés et sous-équipés, puissent retrouver leur compétitivité et ainsi participer plus et mieux à la richesse nationale et à la création d'emplois, qui vous tiennent tant à cœur ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation publiée le 14/12/2011

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2011

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, j'aime beaucoup la Lozère. Sachez que ma belle-famille est originaire de la Haute-Loire. Je connais donc bien toutes ces zones que vous avez parfaitement décrites.

M. Alain Néri. Et le Puy-de-Dôme ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Je serai dans le Puy-de-Dôme jeudi prochain, monsieur Néri.

M. Ronan Kerdraon. La Bretagne n'est pas mal non plus !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. J'y étais il n'y a pas très longtemps ! Je fais trois déplacements par semaine, partout en France.

Monsieur Bertrand, j'entends bien les arguments que vous avez développés. Néanmoins, permettez-moi de vous dire que le logement est beaucoup moins cher en Lozère qu'à Paris, à Marseille ou à Lille. Certains problèmes méritent évidemment que nous agissions, mais, fort heureusement, les populations vivant dans les régions que vous avez décrites disposent aussi d'avantages que ne connaissent pas les habitants d'autres régions de France. Je tiens à insister sur ce point, car il ne s'agit pas de tomber dans le misérabilisme, même si, je le sais, ce n'était pas votre intention.

M. Alain Bertrand. Non, en effet !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Vous avez évoqué l'attractivité des territoires, les zones de revitalisation rurale et la politique de cohésion. À cet égard, il faut évidemment maximiser les retours financiers des dispositifs existants.

Les restructurations de défense, l'accès de tous les citoyens aux services publics et aux services de santé sont des aspects absolument majeurs, tout comme la couverture numérique du territoire, puisque c'était l'un des sujets sous-jacents dans votre intervention. Sur ce point, aller au contact des artisans et commerçants de beaucoup de nos territoires me permet de constater les difficultés qu'ils peuvent rencontrer. Je sais donc qu'ils veulent disposer du commerce multicanal, parce qu'ils savent que cela représente l'avenir.

La compétitivité passe par la mise en synergie de tous les atouts économiques français, à travers les politiques des pôles, vous y avez fait allusion, et des grappes.

Pour accompagner les projets ruraux innovants, créateurs de croissance et d'emplois, nous avons mis en place les pôles d'excellence rurale, à travers quatre appels à projets nationaux depuis 2006, dont le dernier s'est conclu en mai 2011. Au total, 652 projets ont été financés par près de 475 millions d'euros.

Les pôles de compétitivité regroupent les acteurs de la recherche, de l'enseignement supérieur et de l'industrie pour favoriser l'innovation sur les territoires. Nous avons consacré 1,5 milliard d'euros sur la période 2009-2011 au lancement de la deuxième phase de cette politique.

Le Gouvernement croit beaucoup dans la politique des grappes d'entreprise, parce que ce sont les TPE et les PME qui créent la richesse et l'emploi dans nos territoires. Les grappes permettent à ces petites entreprises d'améliorer leur compétitivité et leurs performances, en mettant en commun un certain nombre de services. Ainsi, 126 grappes ont été sélectionnées, pour un budget total de 24 millions d'euros sur deux ans.

Vous le voyez, les actions du Gouvernement sont concrètes et structurées. Elles visent à agir aux côtés des acteurs économiques et à engager notre pays sur la voie de l'innovation, qui représente son avenir et celui de ses territoires ruraux.

M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour la réplique.

M. Alain Bertrand. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui est assez complète.

Quand tous les territoires français seront équipés en haut et très haut débit, ce sera une bonne chose, car nous aurons donné à tous l'outil qui convient. Mais, à ce moment-là, il ne s'agira pas d'une discrimination positive en faveur des territoires ruraux ou hyper-ruraux, contrairement à ce qu'annoncent à leurs électeurs les députés et les sénateurs ruraux, puisque tout le monde en bénéficiera. Cette piste ne répond donc pas précisément à la question que je pose, même si elle est cruciale.

Les secteurs très ruraux regorgent d'énergie, de bonnes volontés, de capacités et d'initiatives qu'il faut absolument accompagner différemment. Comme j'aime à le répéter, la plus grande ville de France n'est pas Paris, c'est la chaîne de dizaines de milliers de villages et de petits villages. Nous avons, nous aussi, les possibilités de créer des emplois, objectif que nous poursuivons tous pour faire bien vivre notre République. Nous voulons participer à cet effort national, mais il faut pour cela nous donner une chance : cela passe par l'application d'une discrimination positive plus importante.

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