Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 06/02/2014

M. Roland Courteau attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur une récente étude paraissant démontrer que sur la totalité des médicaments recensés, 50 % seraient inutiles, 20 % mal tolérés et 5 % potentiellement dangereux.

Il lui demande si, selon elle, ces informations sont confirmées et si les autorités sanitaires et, notamment, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), ont bien été saisies de cette question à fort impact en matière de santé publique mais également sur le plan économique.

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Transmise au Ministère des affaires sociales et de la santé


Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 29/05/2014

Tout médicament doit faire l'objet, conformément aux dispositions de l'article L. 5121-8 du Code de la santé publique, avant sa commercialisation, d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) octroyée aux termes d'une procédure européenne ou nationale selon des exigences d'efficacité, de qualité et de sécurité posées par la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Dans ce contexte, l'évaluation d'une spécialité pharmaceutique se base sur l'appréciation d'un rapport bénéfice/risque établi à un moment donné (moment de l'évaluation), compte tenu des connaissances scientifiques disponibles tant sur le produit concerné que sur sa substance active ou encore sur la pathologie pour laquelle son indication est revendiquée. Aussi, dans la mesure où cette balance entre les bénéfices et les risques est favorable, l'AMM du produit peut-elle être délivrée. Sur ce point, il importe de souligner que ce rapport bénéfice/risque n'est pas figé et est réévalué, lorsque de nouvelles données tant sur les bénéfices que sur de nouveaux risques sont disponibles. En effet, s'agissant plus particulièrement de l'existence de risques d'effets indésirables liés à l'utilisation du produit, il peut être précisé que l'ensemble des risques de survenue d'effets indésirables, qui sont identifiés au cours des essais cliniques conduits dans le cadre de la demande d'AMM, sont mentionnés dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de la spécialité concernée et figurent dans la notice d'information destinée au patient. Pour autant, les essais cliniques conduits et fournis à l'appui du dossier de demande d'AMM ne permettent pas toujours d'identifier et a fortiori de mesurer parfaitement les risques d'une spécialité en conditions réelles d'emploi. En effet, les essais cliniques sont limités dans le temps. Ils ne concernent qu'un nombre limité de personnes et par mesure de sécurité excluent des populations spécifiques (femmes enceintes par exemple). C'est pourquoi un processus de suivi des effets indésirables des médicaments est mis en œuvre au niveau européen ainsi qu'au niveau national, dans le cadre du système national de pharmacovigilance, destiné à surveiller, évaluer, prévenir et gérer le risque d'effet indésirable résultant de l'utilisation des médicaments. La pharmacovigilance comporte ainsi le signalement des effets indésirables et le recueil des informations les concernant, l'enregistrement, l'évaluation, l'exploitation de ces informations aux fins de prévention, la réalisation d'études ou de travaux concernant leur sécurité d'emploi (enquête nationale, suivi national et européen etc.), le suivi de rapport périodique de sécurité concernant chaque médicament, ainsi que la mise en place d'actions telles que les modifications des informations destinées aux professionnels de santé et aux patients, la suspension et le retrait de l'AMM. En outre, il y a lieu d'ajouter que certains médicaments sont soumis à une surveillance plus spécifique, soit parce qu'il s'agit d'une nouvelle substance active ou d'une nouvelle classe pharmacologique, soit, pour un médicament déjà commercialisé, en raison de la détection de nouveaux signaux nécessitant une exploration approfondie. Cette surveillance supplémentaire implique notamment la mise en place d'un plan de gestion des risques (PGR) européen et/ou national, ainsi que la mise en œuvre d'enquêtes de pharmacovigilance. Sur ce point, il peut être précisé que l'ensemble des médicaments faisant l'objet d'une surveillance supplémentaire était disponible sur le site internet de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) (www. ansm. sante. fr) ; un lien interactif avait été mis en place pour chacun des produits concernés, permettant ainsi de visualiser l'ensemble des informations relatives à chaque produit, telles que le résumé des caractéristiques du produit (RCP), les motifs du suivi renforcé, les différentes communications et les actions de sécurité sanitaire réalisées, en cours ou envisagées pour chacun d'entre eux. En ce sens, la directive 2011/84/UE précitée impose désormais que pour les médicaments listés par l'EMA comme devant faire l'objet d'une surveillance particulière, la notice et le RCP doivent comporter un symbole noir (triangle noir inversé) et une phrase explicative tels que déterminés par la Commission européenne. Ces dispositions ont été mises en œuvre depuis septembre 2013. La liste des médicaments faisant l'objet d'une surveillance au niveau européen (additionnal monitoring list) est disponible sur le site de l'EMA et est venue se substituer à la liste nationale. En résumé, il s'agit d'évaluer de façon continue, dans les conditions réelles d'utilisation du médicament, le rapport bénéfice/risque de ce dernier. Dès lors que l'évaluation des effets thérapeutiques positifs du médicament au regard des risques pour la santé du patient ou de la santé publique liés à sa qualité, à sa sécurité ou à son efficacité n'est plus considérée comme favorable dans les conditions normales d'emploi, l'AMM du produit peut être modifiée, suspendue ou retirée et ce à tout moment, au niveau national pour les AMM purement nationales, au niveau européen pour les autres (dès qu'un produit est autorisé dans plus d'un État membre). À ce titre, l'ANSM a notamment engagé un programme de révision de la balance bénéfice/risque des médicaments dont les AMM ont été octroyées selon une procédure nationale avant 2005, en tenant compte à la fois de l'évolution des connaissances concernant leurs bénéfices et leurs risques, ainsi que des progrès de la thérapeutique. L'objectif de cette révision est donc, d'une part de retirer ou suspendre les AMM des médicaments dont le rapport bénéfice/risque apparaît comme défavorable, compte tenu des connaissances acquises au moment de la révision, d'autre part d'évaluer la nécessité de modifier les RCP pour les adapter aux derniers développements des connaissances médicales et scientifiques. Cette révision systématique suit toutefois un ordre déterminé par les problématiques potentielles de risque et de rapport bénéfice/risque. Ainsi, cette révision a-t-elle démarré par les médicaments soumis à prescription médicale obligatoire, dont l'action est systémique (par opposition à ceux qui ont une action principalement locale), et non réservés à l'usage ou à la prescription hospitalière, ainsi qu'en fonction du niveau de service médical rendu (SMR) (critère d'amplitude d'efficacité) et du niveau de risque inhérent à son utilisation. Cette révision des AMM comporte pour chaque médicament une première étape de révision interne par l'ANSM ; laquelle est complétée si nécessaire par une seconde étape, de réévaluation plus complète du rapport bénéfice/risque en faisant intervenir le laboratoire titulaire de l'AMM, afin qu'il documente les informations permettant de mettre à jour les données du rapport bénéfice/risque du médicament concerné. Parallèlement à cette révision systématique des anciennes AMM, l'ANSM poursuit le travail de réévaluation en continu du rapport bénéfice/risque des médicaments, quelle que soit la date de leur AMM, quand un signal est susceptible de remettre en cause le profil de sécurité d'un médicament. Dans tous les cas, la décision française est soumise à un arbitrage européen, traité selon une procédure adaptée au critère d'urgence, au terme de laquelle la Commission européenne statue. Ainsi, en 2012-2013, l'ANSM a réévalué 59 substances ou associations de substances. Ces réévaluations ont abouti à 13 suspensions ou arrêts de commercialisation, 10 restrictions d'indication, 36 modifications / renforcements / harmonisations des RCP. Il est à noter que 23 des 59 substances ont fait l'objet d'une procédure d'arbitrage européen. L'ensemble de ces informations est disponible sur le site internet de l'Agence. Plus précisément, s'agissant de la liste des médicaments publiée par la revue médicale Prescrire de février 2014, il y a lieu de préciser que sur les 68 médicaments cités, 29 ont fait ou font l'objet d'une réévaluation du rapport bénéfice/risque au niveau national ou européen, ayant abouti à la modification des RCP notamment en termes de restriction d'indications thérapeutiques ou de mise à jour des informations relatives à l'efficacité, à la sécurité d'emploi et aux risques (flunarizine, trimétazidine, tianeptine, orlistat, quinine, etc), à la mise en place de mesures de minimisation du risque (fer dextran, tianeptine, etc). Les 39 autres médicaments sont suivis dans le cadre du système national et européen de pharmacovigilance. Pour 13 d'entres eux, un suivi renforcé ou une enquête de pharmacovigilance a été mis en place.

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