Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 23/01/2019

Question posée en séance publique le 22/01/2019

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la métropole bordelaise est un pôle européen majeur du spatial civil et militaire. On y produit notamment les boosters d'Ariane, on y fabrique le missile de dissuasion M51 et on y développe l'activité de microgravité, en particulier les vols zéro-g.

En 2020, Bordeaux sera capitale européenne de l'espace et présidente de la communauté des villes Ariane. On assistera cette année-là à une première spatiale mondiale : le tir inaugural d'Ariane 6.

Cette présidence intervient toutefois dans un contexte international incertain, compte tenu de l'émergence d'acteurs industriels très concurrentiels.

Voilà quelques semaines, ArianeGroup annonçait la suppression de 2 300 postes, dont un grand nombre dans la métropole bordelaise. Si l'on peut y voir une volonté d'adaptation au contexte international, on comprend aussi que l'entreprise peine dans un environnement agressif.

Le rapport que doit remettre la ministre des armées au Président de la République sur la stratégie spatiale militaire comprendra, j'imagine, un volet industriel. Nous espérons qu'il intégrera pleinement l'avenir du cluster aquitain.

Parmi l'aide que l'État peut apporter au groupe figure la commande publique. Force est de constater que la préférence européenne n'est pas systématique, malgré l'enjeu. Ainsi, le satellite de renseignement CSO vient d'être lancé par une fusée Soyouz. Il est difficile d'expliquer à nos concitoyens que le lancement de nos satellites de renseignement est confié à des fusées russes !

La politique de concurrence européenne, érigée en dogme, fait payer un bien cher tribut à nos entreprises. Les Américains ne se posent pas autant de questions. Ils conçoivent américain, produisent américain, et lancent américain.

Quelle perspective souhaite donner à ArianeGroup Mme la ministre des armées, à part celle de décrocher la Lune ? Quel carnet de commandes, quel nombre de lancements envisage-t-elle pour la future fusée Ariane 6, mais aussi pour le lanceur Vega, alternative au lanceur Soyouz ?

En cette année d'élections européennes, la France doit faire campagne pour un Buy European Act. Je rappelle que cette mesure figurait dans le programme du candidat Macron.

Je vous en conjure, faites-le, madame la ministre, avant qu'il ne soit trop tard ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

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Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation publiée le 23/01/2019

Réponse apportée en séance publique le 22/01/2019

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Madame la sénatrice Delattre, vous l'avez rappelé, la France est une grande nation spatiale, un pays moteur pour le développement de l'Europe du spatial.

Si celle-ci a connu autant de succès, c'est parce que l'Europe a toujours soutenu le développement de ses lanceurs, Ariane 5 et Vega – Ariane 6 et Vega C à l'avenir. Cela continuera, bien sûr. Ce succès européen est dû à l'excellence et au professionnalisme du Centre national d'études spatiales, le CNES, d'ArianeGroup, d'Arianespace et, bien sûr, de l'Agence spatiale européenne.

Vous l'avez également rappelé, dans le contexte actuel, d'autres acteurs du secteur spatial – je pense évidemment à SpaceX, mais aussi à d'autres, notamment en Asie – viennent bouleverser le marché. C'est pourquoi nous devons avoir une politique volontariste de soutien aux lanceurs et à la recherche et au développement. Il s'agit de rendre Ariane 6 plus compétitive et de permettre les développements nécessaires à son adaptation aux évolutions du marché.

Nous devons également nous investir dans ce que l'on appelle le « new space », les nouveaux usages du spatial. À cet effet, 200 millions d'euros supplémentaires ont été prévus pour soutenir le CNES dans le budget pour 2019.

Il nous faut aussi aider ArianeGroup et Arianespace à se réorganiser de façon à gagner en compétitivité, ce qu'ils font déjà, comme l'ensemble de leurs partenaires et de leurs sous-traitants. Il est très important de rappeler la confiance que nous avons dans les lanceurs européens. La commissaire européenne a d'ailleurs signé avec Ariane 6 les premiers contrats pour le lancement des satellites européens.

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