Question de Mme HARRIBEY Laurence (Gironde - SOCR) publiée le 08/03/2019

Question posée en séance publique le 07/03/2019

Mme Laurence Harribey. En 2017, le Gouvernement avait fait de la réindustrialisation une priorité, mais les faits sont cruels : 850 emplois rayés de la carte chez Ford, 450 emplois chez Ascoval suspendus à des plans de reprise, ou encore 750 emplois en jeu à la Fonderie du Poitou, 900 sur les sites papetiers sarthois d'Arjowiggins. La liste n'est pas close.

Le Gouvernement a trouvé indigne l'attitude de Ford et s'est dit trompé dans la reprise avortée d'Ascoval. Au-delà de l'indignation, quelle est la colonne vertébrale de la politique industrielle ?

Pourquoi se désengager d'industries stratégiques, alors que d'autres font le contraire, des États-Unis à la Chine, en passant par certains de nos voisins européens ? Sur ce point, les reproches faits aux Pays-Bas pour leur attitude envers Air France-KLM étonnent au regard de l'énergie déployée pour privatiser quelques fleurons profitables, par exemple Aéroports de Paris.

Où est cette priorité donnée à la réindustrialisation ? Madame la secrétaire d'État, y a-t-il un État stratège ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie et des finances publiée le 08/03/2019

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2019

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Harribey, les faits sont têtus : la France crée aujourd'hui plus d'emplois industriels qu'elle n'en détruit. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Savin. Il n'y en a plus !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. La France ouvre et développe plus de sites qu'elle n'en ferme, et ce depuis deux ans… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Rachid Temal. C'est saint Macron !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. L'Insee, les statistiques… (Brouhaha.) Eh oui, mesdames, messieurs les sénateurs, les faits sont têtus, les chiffres aussi. Depuis vingt ans, le nombre d'emplois industriels avait diminué d'un million. Depuis deux ans, il remonte. Pourquoi ?

M. Rachid Temal. C'est l'effet ISF !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. Nous avons mis en place une politique industrielle ambitieuse,… (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, un peu de calme !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. … qui permet le développement de l'activité économique en rendant la plateforme française plus compétitive. C'est ce qui explique que Toyota investisse 300 millions d'euros en France, Daimler 500 millions d'euros, et que nous soyons désormais la première destination des investissements directs à l'étranger pour l'industrie.

Nous poursuivons une politique industrielle de développement des contrats stratégiques de filière pour dix-huit filières, avec des projets d'innovation et de compétences.

Quel est le premier point de blocage pour les emplois industriels ? C'est le recrutement, madame la sénatrice, qui empêche la croissance (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) : 50 000 emplois ne sont pas pourvus aujourd'hui dans l'industrie ! Si l'on était capable de mettre les compétences face aux chefs d'entreprise, c'est 200 000 emplois qui seraient créés.

Telle est la réalité ! Alors oui, il y a des guerres que l'on perd, sur Ford à Blanquefort, sur Ascoval, mais pourquoi ne parlez-vous pas des 3 000 emplois que nous avons sauvés chez William-Saurin, des emplois que nous avons sauvés chez AR Industries ou chez Doux ? Trois entreprises en difficulté sur quatre sont redressées grâce à l'action intense du Gouvernement. (Exclamations sur les mêmes travées.)

Voilà quels sont les faits, madame la sénatrice. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.

Mme Laurence Harribey. Madame la secrétaire d'État, soyons sérieux ! Peut-on réduire, comme votre ministre l'a fait hier, une stratégie industrielle au fait d'arracher 20 millions d'euros à un groupe qui a touché 24 millions d'euros, plus 500 millions d'euros de CICE, comme ce fut le cas pour Ford ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Permettez-nous de vous proposer quelques pistes de travail. Osons des prises de participation temporaires en cas de crise, comme l'a fait le président Obama pour General Motors ou la France, dans d'autres temps, pour Peugeot. Responsabilisons les grands groupes, donneurs d'ordre des PME : si Renault pérennise ses commandes à la Fonderie du Poitou, la reprise devient crédible.

Appuyons-nous sur les régions pour ancrer sur les territoires innovations et industries du futur. Madame la secrétaire d'État, les chiffres que vous donnez sont souvent le résultat des politiques des régions, à l'instar de celle de la Nouvelle-Aquitaine, avec Usine du Futur, qui a accompagné près de 300 entreprises, représentant 35 000 emplois, en deux ans.

Osons la coopération industrielle européenne, à l'image d'Airbus, en étant porteurs d'une vision européenne.

Voilà les pistes sur lesquelles nous sommes prêts à travailler ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

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