Question de M. RAPIN Jean-François (Pas-de-Calais - Les Républicains) publiée le 11/04/2019

M. Jean-François Rapin alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les dérives associées à certaines retraites complémentaires, souscrites notamment par les agriculteurs. En effet, ces derniers perçoivent des indemnités de retraites minimes en comparaison de la pénibilité des tâches qu'ils ont exercées tout au long de leur carrière. Afin de remédier à cette précarité, plusieurs organismes de retraites complémentaires leur proposent d'anticiper cette situation. Or, un trop grand nombre de retraités agriculteurs constatent, après avoir demandé l'exécution de leur contrat, que les revenus complémentaires ne sont pas à la hauteur des cotisations versées pendant plusieurs dizaines d'années. En l'espèce, un administré du Pas-de-Calais, qui avait versé 60 000 euros durant trente-cinq ans, doit vivre jusqu'à 100 ans afin de pouvoir percevoir l'intégralité de sa rente. L'organisme complémentaire s'oppose à tout aménagement possible. De telles dérives sont inexplicables. Il lui demande ce qu'elle propose afin d'améliorer la situation des agriculteurs retraités. À l'heure des concertations sur la prochaine réforme des retraites, il est essentiel de prendre en considération « ces remontées terrains » afin de pouvoir y répondre par un texte de loi.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 17/07/2019

Réponse apportée en séance publique le 16/07/2019

M. Jean-François Rapin. Vous êtes chargé des dossiers concernant la jeunesse, monsieur le secrétaire d'État, mais la question que je vais vous poser a trait aux retraités. Remarquez, les jeunes d'aujourd'hui sont les retraités de demain… Cela pourrait aussi les intéresser !

Ma question porte sur les dérives associées à certaines retraites complémentaires souscrites, notamment, par les agriculteurs.

En effet, ces derniers perçoivent des indemnités de retraite minimes, en comparaison de la pénibilité des tâches qu'ils ont exercées tout au long de leur carrière.

Afin de remédier à cette précarité, plusieurs organismes de retraites complémentaires leur proposent d'anticiper cette situation. Or un trop grand nombre de retraités agriculteurs constatent, après avoir demandé l'exécution de leur contrat, que les revenus complémentaires ne sont pas à la hauteur des cotisations versées, parfois pendant plusieurs dizaines d'années.

En l'espèce, on m'a exposé le cas d'un administré du Pas-de-Calais, qui, ayant versé 60 000 euros durant trente-cinq ans, devrait vivre jusqu'à 100 ans pour pouvoir percevoir l'intégralité de sa rente. L'organisme complémentaire s'oppose à tout aménagement possible. De telles dérives sont inexplicables.

Que propose le Gouvernement afin d'améliorer la situation des agriculteurs retraités ? À la veille de la remise des conclusions de M. Delevoye aux partenaires sociaux, dans la perspective d'une prochaine réforme des retraites, il est essentiel de prendre en considération ces remontées de terrain, afin de pouvoir y répondre.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Rapin, la question du pouvoir d'achat des retraités agricoles est en effet une question majeure. Elle concerne tous les Français, y compris les jeunes, qui sont attachés à ce que toute personne puisse bénéficier de conditions de vie dignes au moment de sa retraite.

Ne pouvant être présente ce matin, Agnès Buzyn m'a demandé de vous communiquer la réponse préparée à votre attention.

Des mesures ont été adoptées pour améliorer le pouvoir d'achat des retraités agricoles. Ainsi, depuis la réforme des retraites de 2014, portée par Marisol Touraine, les agriculteurs partant à la retraite ne peuvent percevoir une pension inférieure à 75 % du SMIC.

Le Président de la République souhaite désormais aller encore plus loin. Lors de la conférence de clôture du grand débat, il a demandé que la pension de ceux qui partent à la retraite, après avoir travaillé tout au long de leur vie active, soit supérieure à 1 000 euros par mois.

Dans le cadre de la préparation de la réforme des retraites, visant à refonder notre système pour le rendre plus juste et plus simple, le Gouvernement travaille à la mise en œuvre de cet engagement.

Au-delà des systèmes de retraite légalement obligatoires, notre système de protection sociale encourage la souscription de produits d'épargne permettant aux particuliers de financer leur retraite, afin d'améliorer leur pouvoir d'achat.

Pour les exploitants agricoles, un dispositif dit « Madelin agricole » a été mis en œuvre par la loi du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

Pour ce type de contrats, les dispositions en vigueur dans le code des assurances réglementent précisément les conditions tarifaires et l'utilisation d'outils de calcul fiables pour l'établissement de la rente qui sera versée au bénéficiaire.

Ainsi, pour établir la rente viagère d'un bénéficiaire, les organismes assureurs sont tenus, d'une part, de reverser aux assurés au moins une partie des produits des placements de leurs cotisations, et, d'autre part, d'utiliser des tables de mortalité homologuées par arrêté du ministre de l'économie et des finances ou certifiées par un actuaire indépendant et agréé à cet effet par l'une des associations d'actuaires reconnues par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Or ces tables de mortalité ne prévoient pas une espérance de vie de 100 ans.

Aussi, en l'absence de précision supplémentaire, il faudrait que cet administré puisse saisir le médiateur des assurances.

En outre, afin de renforcer l'attractivité des produits d'épargne retraite supplémentaire, la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, procède à une réforme en profondeur de ces produits.

Cette réforme offrira une liberté de choix entre une sortie en rente et une sortie en capital pour les sommes issues de versements volontaires.

Les textes d'application de cette réforme, qui seront publiés rapidement, préciseront les conditions dans lesquelles les nouvelles règles pourront s'appliquer aux produits existants et aux contrats en cours, y compris pour les contrats de type « Madelin agricole ». Le travail est donc en train d'être mené et j'espère, monsieur le sénateur, avoir répondu à vos interrogations.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.

M. Jean-François Rapin. Monsieur le secrétaire d'État, vous y avez partiellement répondu, c'est-à-dire de manière très technique comme l'appelait la précision de ma question. Néanmoins, si l'exemple que j'ai cité est atypique, il n'en revêt pas moins un caractère assez général. Ainsi, nous sommes très souvent interpellés – je pense que c'est aussi le cas de mes collègues parlementaires – sur le pouvoir d'achat des agriculteurs retraités. C'est une réelle question.

Je ne sais pas s'il faut travailler au niveau des tables de mortalité. Peut-être faut-il aussi prendre réellement en compte les problématiques liées à la pénibilité du travail. Les conditions de travail des agriculteurs ne sont plus celles qui prévalaient voilà une vingtaine ou une trentaine d'années, avec une plus grande technicité, certes, mais de moindres difficultés en termes d'opérabilité. Par le passé, c'était beaucoup plus difficile et cela se ressentait probablement dans l'usure des corps.

Je vous remercie donc de m'avoir répondu, mais il me semble que le sujet est encore à mettre sur la table et ne sera pas résolu du jour au lendemain. J'espère que la loi qui nous est annoncée sur les retraites intégrera ces dispositions.

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