Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 23/05/2019

M. Yves Détraigne appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur la taxation du kérosène.
Commandée par la Commission européenne à la suite d'un engagement pris dans le cadre de sa stratégie pour l'aviation de 2015, une récente étude hollandaise estime que taxer le kérosène réduirait les émissions de CO2 de l'aviation européenne de 11 % sans, pour autant, avoir d'effet négatif sur l'économie.
Actuellement, les taxes sur ce carburant pratiquées par certains États de l'Union européenne se montent en moyenne à 11 € par vol. Selon l'étude, si toutes les taxes sur l'aviation européenne étaient supprimées, le nombre de passagers augmenterait de 4 %. À l'inverse, si une taxe sur le kérosène se généralisait à tous les États membres, elle aurait pour effet d'entraîner une baisse de la demande de 11 %. Cependant, les revenus fiscaux dégagés par cette taxe permettraient de compenser les désavantages économiques et auraient une incidence quasi nulle sur le PIB (produit intérieur brut).
En outre, un système unifié permettrait une réelle simplification là où la situation actuelle est très disparate, selon que les États pratiquent une TVA intérieure sur les vols ou une taxe aux frontières sur le kérosène…
Le rapport conclut également que l'aviation européenne est considérablement sous-taxée, notamment par rapport à des pays tels que les États-Unis, l'Australie, le Brésil et la Chine où il est courant de taxer le kérosène pour l'aviation intérieure.
La présidente de la Commission des transports du Parlement européen a d'ailleurs confirmé que l'Union européenne ne devait plus être un « paradis fiscal pour le kérosène » mais qu'elle devait devenir pionnière de l'action climatique au niveau mondial.
Considérant que l'aviation est responsable d'une pollution massive et qu'elle doit contribuer à la réalisation des objectifs climatiques de Paris, il lui demande s'il entend enjoindre à ses homologues européens de prendre les mesures qui s'imposent vis-à-vis du secteur de l'aviation, avec la mise en place d'une taxe commune sur le kérosène.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports publiée le 28/11/2019

Le secteur aérien est à l'origine de 2,5 % des émissions de CO2 au niveau mondial et ses émissions sont en progression compte tenu du dynamisme du secteur et ce, malgré des gains d'efficacité importants. La croissance des émissions attendue avec la hausse du trafic dans les années à venir place ce secteur sur une trajectoire incompatible avec nos objectifs climatiques à moins que des mesures additionnelles ne soient mises en place. La réduction des émissions du secteur aérien est nécessaire pour atteindre l'objectif de neutralité climatique en 2050, que la France a adopté. Par ailleurs, alors que les carburants routiers sont taxés en France via la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), il n'existe pas d'imposition équivalente sur les carburants du secteur aérien, même si le secteur est, par ailleurs, soumis à d'autres taxes. Le niveau actuel de prix des quotas d'émissions du secteur aérien sur le marché européen du carbone (ETS) ne constitue pas un signal suffisant et adapté au coût de l'externalité climatique négative pour la collectivité. Plusieurs États européens, comme la France ou le Royaume-Uni ont, d'ores et déjà, mis en place des taxes sur les billets d'avion. Au niveau européen, plusieurs pistes sont envisageables : taxe harmonisée sur les billets d'avion, renforcement de l'ETS, taxe sur le kérosène, augmentation de la TVA…). Le Gouvernement considère qu'il faut garder toutes les pistes ouvertes à ce stade et, notamment, la révision de la directive « accises » dans ses dispositions relatives au transport aérien. En outre, il importe d'articuler toute réflexion menée au niveau européen avec le paysage réglementaire actuel au plan européen : ETS aviation, et international : dispositif Corsia (Carbon Offset and Reduction Scheme for International Aviation). La France soutient l'engagement de cette réflexion au niveau de l'Union européenne sur la contribution du secteur de l'aviation en prenant en considération toutes les pistes envisageables. Elle s'est exprimée en ce sens lors du Conseil des ministres européens des transports du 6 juin 2019 et lors de la conférence Aviatax organisée par les Pays-Bas le 20 juin dernier. Si la France soutient ainsi les avancées de l'Europe sur la voie d'une taxation du transport aérien, le Gouvernement a souhaité agir très vite sur le plan national en décidant de mettre en place, dès 2020, une contribution supplémentaire. Décidée dans le cadre du Conseil de défense écologique du 9 juillet 2019, elle s'appliquera sur les vols au départ de la France. Toutes les compagnies sont concernées, quelle que soit leur nationalité, ce qui ne désavantagera pas les compagnies françaises. Cette contribution sera progressive et modulée selon la classe : de 1,5 € par billet sur un vol intérieur ou intra-européen en classe économique, jusqu'à 18 € par billet sur un vol hors Union européenne en classe affaires. Le transport aérien est par ailleurs engagé dans un effort important pour sa transition écologique. Le Gouvernement l'accompagne, notamment en matière de recherche pour parvenir à des motorisations plus propres, ou d'accélération du déploiement du biocarburant dans la filière.

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