Question de M. DUPLOMB Laurent (Haute-Loire - Les Républicains) publiée le 26/06/2019

Question posée en séance publique le 25/06/2019

M. Laurent Duplomb. Monsieur le Premier ministre, lors de votre discours de politique générale, vous avez une fois de plus appelé l'agriculture française à changer de modèle.

Or, à force de critiquer notre modèle ces dernières années et de distiller ce message, vous amplifiez son déclin !

La production agricole française stagne en volume, alors que celle de nos concurrents augmente. L'excédent commercial agricole a été divisé par deux en cinq ans, et risque de disparaître en 2023.

Les importations augmentent à un tel rythme que, aujourd'hui, les Français consomment uniquement des produits agricoles importés plus d'un jour par semaine, alors même qu'un quart de ceux-ci ne respectent pas les normes imposées en France. Un légume et un fruit sur deux sont importés, ainsi qu'un quart du porc. Et même le jambon bio vient d'Espagne !

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous conscient de cette réalité ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

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Réponse du Premier ministre - Relations avec le Parlement publiée le 26/06/2019

Réponse apportée en séance publique le 25/06/2019

M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur Duplomb, je vous prie d'excuser l'absence de Didier Guillaume, qui ne pouvait pas être présent parmi nous aujourd'hui.

J'ai lu attentivement le rapport que vous avez présenté au nom du Sénat sur l'avenir de l'agriculture française. Vous dressez un bilan sévère de l'état de notre agriculture, en particulier de sa capacité de production et d'exportation. Mais finalement, quand on regarde bien les chiffres, votre bilan porte sur les quinze dernières années.

Partageons le constat qu'une partie du chemin n'a pas été fait et qu'il reste du travail à accomplir collectivement – Gouvernement et Parlement – pour que notre agriculture reconquière à la fois des capacités de production et de la compétitivité.

Vous nous interrogez en particulier sur les distorsions de concurrence et sur la question des normes et des produits importés.

Vous l'avez souligné : les importations de produits agricoles et alimentaires ont fortement augmenté depuis 2000, de même que les exportations, mais dans une moindre mesure. La qualité des produits importés constitue un enjeu majeur en termes à la fois de santé publique et de respect des normes qui sont les nôtres.

Ces produits font l'objet de contrôles stricts par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Les services régionaux réalisent 5 000 prélèvements par an sur les végétaux placés sur le marché.

En 2017, le taux de non-conformité des produits soumis à un contrôle renforcé à l'importation s'élève à 9,3 %. Il est lié soit à la présence de résidus d'un produit non autorisé, soit au dépassement de ce que l'on appelle la limite maximale de résidus – la LMR – pour un produit dont l'usage est autorisé sur le végétal considéré.

Ce taux de non-conformité, vous avez raison de le souligner, est tout à fait anormal. Pour mieux contrôler ces denrées, nous avons donc décidé de doubler le nombre de prélèvements. Les LMR sont calculés pour chaque denrée et chaque substance, afin d'assurer un traitement efficace et une alimentation saine.

Comme l'a constaté la DGCCRF, la fraude semble plus importante pour les produits importés issus de l'agriculture biologique, ce qui pose un problème de relation de confiance à l'égard des consommateurs. Le Gouvernement met tout en œuvre pour lutter contre cette concurrence déloyale pour les producteurs français auxquels il souhaite évidemment réaffirmer son soutien : c'est une question de respect et de confiance vis-à-vis des consommateurs. C'est aussi une question essentielle pour la compétitivité de notre agriculture ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour la réplique.

M. Laurent Duplomb. La réalité, monsieur le ministre, c'est que plus vous opposez les modèles, plus vous favorisez l'agribashing, alors qu'un tiers des agriculteurs a plus de 55 ans et qu'il faudrait renouveler les exploitants plutôt que dégoûter les vocations !

La réalité, c'est que plus vous contraignez nos agriculteurs sans suffisamment contrôler les importations, plus vous ouvrez la porte à des produits qui ne respectent pas les normes françaises !

La réalité, c'est que changer de modèle et monter en gamme se traduira par une segmentation des Français : d'un côté, il y aura ceux qui auront les moyens de se payer une alimentation prétendument plus vertueuse ; de l'autre, il y aura ceux qui seront condamnés à manger exclusivement des produits importés !

Ce gouvernement se caractérise par des annonces qui sont aussi fortes que la réalité de son action est faible.

Alors, monsieur le ministre, j'en appelle à votre bon sens : arrêtez ce jeu de massacre suicidaire pour notre agriculture française ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

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