Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 19/09/2019

Mme Sylviane Noël attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la réforme en cours du permis de conduire et les nombreuses inquiétudes des gérants d'auto-écoles face au développement intensif des plateformes de conduite.

La mission parlementaire sur l'éducation routière, lancée en août 2018, avait remis son rapport « Vers un permis de conduire plus accessible et une éducation routière renforcée » au Premier ministre le 12 février 2019. En juillet 2019, le ministère de l'intérieur a d'ailleurs annoncé la volonté du Gouvernement de rendre cet examen plus accessible ainsi que la possibilité pour les jeunes de 17 ans d'avoir désormais leurs permis en conduite accompagnée.

En France, plus de 1,5 million de personnes, surtout des jeunes de moins de 25 ans, se sont présentés à l'examen de passage du permis de conduire en 2018. Parmi eux, 350 000 avaient pris des cours via la plateforme de conduite Ornikar. Avec 20 % du marché à elle toute seule, cette startup compte une troisième levée de fonds d'un montant conséquent de 35 millions d'euros, rejoints pour l'opération par Bpifrance, via son fonds Large Venture. L'importante croissance de ces plateformes représente assurément une concurrence féroce pour les auto-écoles qui ne se sentent plus à armes égales avec elles et ont le sentiment d'être abandonnées par l'État.

En effet, ces dernières, contrairement à ces plateformes ont de nombreuses charges imposées par la loi, qui impactent nécessairement le coût du permis comme, par exemple, disposer d'un local, rémunérer leurs professeurs salariés de conduite, obtenir un agrément départemental, permettre la possibilité d'effectuer 10 heures de conduite sur un simulateur de conduite (investissement lourd), etc.

Le fait que l'État favorise ouvertement ces plateformes de conduite en les finançant au travers de Bpifrance ou en modifiant les obligations d'obtention du label qualité des autos écoles pour leur permettre de l'obtenir à leur tour, rend encore plus difficile la vie des auto-écoles et risque de brader la sécurité des futurs jeunes conducteurs.

Cette attitude de l'État, entraîne un véritable sentiment de déconsidération des auto-écoles traditionnelles alors que leur professionnalisme est avéré depuis des années.

Aujourd'hui, entièrement démunies face au coût des prestations proposées par ces plateformes pour l'obtention d'un permis de conduire qui cassent les prix des permis tout en s'octroyant un pourcentage de bénéfice de 20 % du coût de chaque heure de conduite, les auto-écoles ne renoncent pas pour autant à leur savoir-faire et à baisser le niveau d'exigence demandé aux futurs conducteurs pour leur garantir un maximum de sécurité lorsqu'ils seront sur la route.

En Haute-Savoie, les gérants d'auto-écoles sont nombreux à s'interroger sur l'éthique de ces plateformes animées par la quête du profit et ils sont très inquiets quant à l'avenir de leur profession face à cette nouvelle forme de concurrence.

Face à cette situation déconcertante à laquelle doivent faire face les auto-écoles, Madame la Sénatrice souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage de les aider et les moyens envisagés. Elle souhaiterait également connaître la position du Gouvernement quant à une éventuelle évolution de la législation afin de davantage soutenir les auto-écoles de France.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 17/09/2020

La formation à la conduite est une priorité du Gouvernement dans la lutte contre l'insécurité routière. Elle est un levier de changement très puissant des comportements sur la route. L'ambition de l'éducation routière est de former des conducteurs sûrs pour eux-mêmes et pour autrui, responsables et respectueux de l'environnement, au-delà de la seule réussite aux épreuves du permis de conduire. Pour autant, la réglementation du code de la route ne doit pas être un obstacle à l'émergence de nouveaux modèles économiques dès lors que les objectifs précités sont respectés. Les plateformes en ligne peuvent constituer un complément à l'offre proposée par les écoles de conduite de proximité, dont le maillage territorial est essentiel en ce sens qu'il favorise le lien social. Il convient de préciser que le nombre d'écoles de conduite reste stable. Le Gouvernement est très attaché à protéger cette situation extrêmement encourageante et positive. Ainsi, des mesures d'accompagnement sont mises en œuvre dans le cadre de la réforme du permis de conduire, annoncée par le Premier ministre le 2 mai 2019, et en étroite collaboration avec les organisations professionnelles. Ce plan de réforme est constitué de dix mesures élaborées pour réduire le coût du permis de conduire et améliorer encore davantage la qualité de la formation rendue dans le cadre de l'apprentissage à la conduite. Sur ces dix mesures, quatre sont déjà entrées en vigueur, dont le développement de l'usage du simulateur de conduite. En effet, ce dernier apparaît comme un outil majeur d'amélioration de la qualité de la formation. Ainsi, le Gouvernement a souhaité faciliter l'acquisition de simulateurs en mettant en œuvre un plan de sur-amortissement applicable sur l'achat, ou sur la location, d'un simulateur par les écoles de conduite. D'autres mesures, portées notamment par la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, sont en cours de déploiement. Elles concernent, entre autres, la gratuité de l'examen théorique pour les volontaires du service national universel, le développement des apprentissages accompagnés de la conduite et la mise en place d'une nouvelle épreuve théorique moto du code de la route. Par ailleurs, certains dispositifs de la réforme du permis de conduire s'inscrivent dans une démarche de modernisation en faveur du secteur de la sécurité routière et présentent, eux aussi, d'importants enjeux pour la cohésion des territoires et le maillage des services de proximité. À ce titre, le ministre de l'intérieur a sollicité le secrétaire général pour l'investissement afin que ces travaux fassent l'objet d'un appel à projet spécifique relatif à l'accompagnement de la transformation digitale du secteur et de soutien à la filière, notamment dans le cadre du grand plan d'investissement et de la mise en œuvre du programme d'investissements d'avenir (PIA). Ainsi, le Gouvernement entend accompagner les acteurs du secteur de l'éducation routière dans le cadre de ces changements afin d'assurer la continuité et la reprise de leurs activités.

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