Question de Mme DURANTON Nicole (Eure - Les Républicains) publiée le 10/10/2019

Mme Nicole Duranton attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur l'accessibilité des petits meublés de tourismes.

L'article 41 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées avait porté des modifications au code de la construction et de l'habitation. D'une part, il avait prévu des dérogations : « art. L. 111-7-2. – […] des dérogations motivées peuvent être autorisées en cas d'impossibilité technique ou de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural, ou lorsqu'il y a disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences. Ces décrets sont pris après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées. ». D'autre part, il avait posé le principe général d'accessibilité pour les établissements recevant du public (ERP) : « art. L. 111-7-3. - Les établissements existants recevant du public doivent être tels que toute personne handicapée puisse y accéder […] ».

Or, les meublés de tourisme ne sont soumis aux obligations de sécurité et d'accessibilité des ERP qu'au-delà d'une capacité de quinze personnes. En deçà de ce seuil, une simple déclaration préalable à la mairie suivie de l'enregistrement auprès du centre de formalités des entreprises du greffe du tribunal de commerce suffit à recevoir du public. L'immatriculation au registre du commerce et des sociétés n'est d'ailleurs obligatoire que si l'activité est exercée à titre « habituel ou principal », ce qui ne concerne qu'une infime partie des gîtes, notamment en zone rurale.

De la même manière, la mise en accessibilité du bâti existant n'est obligatoire qu'au-delà du seuil de quinze personnes, y compris lors d'une rénovation. En cas de construction neuve, les chambres d'hôtes (moins de cinq chambres) peuvent éviter la mise en accessibilité si elles constituent l'habitation principale du propriétaire, et les meublés de plus de cinq chambres si le permis de construire ne mentionne pas explicitement la destination locative du bien.

Dans le département de l'Eure, certains sites gérés par des organismes agréés par le préfet de région au titre du programme « vacances adaptées organisées » ne sont pas accessibles aux personnes en situation de handicap. En effet, la subdivision du bâti en plusieurs « lots » de moins de quinze personnes permet de contourner la réglementation. Ainsi, sur les 287 gîtes eurois référencés, seuls une dizaine de gites ont à respecter les règles afférentes aux EPR.

Il existe donc un vide réglementaire concernant les petits meublés de tourisme, et ce vide est préjudiciable aux personnes en situation de handicap. S'il paraît exagéré de restreindre trop fortement l'ensemble des dérogations permettant aux propriétaires de rentabiliser leur bien immobilier face à la concurrence toujours plus grande des plateformes permettant la location de courte durée chez le particulier, il est donc essentiel d'envisager l'encadrement de ces établissements.

Afin qu'aucun établissement n'échappe sans justification à la volonté d'accessibilité portée par la loi de 2005, elle lui demande s'il serait possible d'envisager l'extension du cadre légal prévu pour les ERP à l'ensemble des meublés de tourisme quelle que soit leur taille, tout en veillant à la bonne prise en compte des dérogations existantes, et en assurant la vérification de leur bien-fondé par un service de contrôle de l'accessibilité spécifiquement formé.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 04/12/2019

Réponse apportée en séance publique le 03/12/2019

Mme Nicole Duranton. Madame la secrétaire d'État, l'article 41 de la loi du 11 février 2005 a apporté des modifications au code de la construction et de l'habitation, d'une part, en prévoyant des dérogations à la mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP) en cas d'impossibilité technique et, d'autre part, en posant le principe général d'accessibilité pour ces établissements.

Les meublés de tourisme ne sont soumis aux obligations de sécurité et d'accessibilité des ERP qu'au-delà d'une capacité de quinze personnes. En deçà, une simple déclaration préalable à la mairie suivie de l'enregistrement auprès du greffe du tribunal de commerce suffit. L'immatriculation au registre du commerce n'est d'ailleurs obligatoire que si l'activité est exercée à titre « habituel ou principal », ce qui ne concerne qu'une infime partie des gîtes, notamment en zone rurale.

De la même manière, rendre le bâti existant accessible n'est obligatoire qu'au-delà de quinze personnes. En cas de construction neuve, l'accessibilité est une obligation, pour les chambres d'hôtes de moins de cinq chambres, s'il s'agit de l'habitation principale du propriétaire et, pour celles de plus de cinq chambres, si le permis de construire ne mentionne pas explicitement la destination locative.

Les propriétaires contournent parfois la loi, en subdivisant leur bien en plusieurs « lots » de moins de quinze personnes.

Dans mon département de l'Eure, certains sites gérés par des organismes agréés par la préfecture de région au titre du programme « vacances adaptées organisées » ne sont pas accessibles aux personnes en situation de handicap. Ainsi, sur les 287 gîtes eurois référencés, une dizaine de gîtes seulement ont à respecter les règles.

Il existe donc un vide réglementaire, préjudiciable aux personnes en situation de handicap. S'il paraît exagéré de restreindre trop fortement les dérogations permettant aux propriétaires de rentabiliser leur bien face à la concurrence toujours plus grande d'Airbnb, il est essentiel d'envisager un meilleur encadrement.

Aussi, serait-il possible d'envisager l'extension du cadre légal prévu pour les ERP à l'ensemble des meublés de tourisme, quelle que soit leur taille, tout en assurant la vérification de leur bien-fondé par un service de contrôle spécifiquement formé ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Nicole Duranton, ne pouvant être présente, Sophie Cluzel m'a chargée de vous répondre.

La chambre d'hôtes est définie légalement depuis la loi du 14 avril 2006 : « Les chambres d'hôtes sont des chambres meublées situées chez l'habitant en vue d'accueillir des touristes, à titre onéreux, pour une ou plusieurs nuitées, assorties de prestations. »

Cette définition est complétée au niveau réglementaire : « L'activité de location de chambres d'hôtes mentionnée à l'article L. 324-3 est la fourniture groupée de la nuitée et du petit-déjeuner. Elle est limitée à un nombre maximal de cinq chambres pour une capacité maximale d'accueil de quinze personnes. L'accueil est assuré par l'habitant. »

Ce seuil de quinze personnes a été fixé en cohérence avec la réglementation de sécurité incendie, qui fixe le seuil d'effectif public à partir duquel l'établissement est assujetti à la réglementation des établissements recevant du public de cinquième catégorie.

Les ERP sont, quant à eux, définis dans le code de la construction et de l'habitation. Ils désignent les lieux publics ou privés accueillant des clients ou des utilisateurs autres que les employés, à l'exception des chambres d'hôtes et des gîtes ayant une capacité d'accueil allant jusqu'à quinze personnes au maximum.

En conséquence, les chambres d'hôtes que sont les meublés de tourisme comportant un nombre maximal de cinq chambres pour une capacité maximale d'accueil de quinze personnes dépendent de la réglementation afférente aux logements pour lesquels il n'y a obligation de mise en accessibilité que pour les constructions neuves.

De ce fait, les meublés de tourisme d'une capacité maximale d'accueil de quinze personnes installés dans des bâtiments existants, sans qu'il soit réalisé de travaux soumis à permis de construire, ne sont pas concernés par l'obligation d'accessibilité. Dans ces conditions, les meublés de tourisme sont astreints aux mêmes obligations que les locations de courte durée chez le particulier. De fait, il s'agit d'une location chez un particulier. La subdivision du bâti en plusieurs « lots » de moins de quinze personnes permet parfois de contourner la réglementation.

C'est un biais qu'il est difficile de contrer, mais qui n'est pas loi générale. En effet, il ressort de l'examen des 5 000 établissements labellisés « tourisme et handicap », hôtels, restaurants, musées et autres établissements divers que 50 % d'entre eux sont précisément des meublés de tourisme, ce qui atteste de la volonté de 2 500 gestionnaires de meublés de tourisme d'accueillir des personnes en situation de handicap.

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