Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SOCR) publiée le 26/12/2019

M. Hervé Gillé attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences économiques désastreuses pour le secteur de la vini-viticulture de l'entrée en vigueur le 18 octobre 2019 des taxes américaines sur les biens européens destinés à l'exportation, autorisées par l'organisation mondiale du commerce (OMC). Ce sont des droits de 25 % qui s'appliquent désormais sur la valeur de ces vins tranquilles, dont l'exportation concerne plus de 4 500 entreprises françaises, pour un chiffre d'affaires de plus d'un milliard d'euros en 2018.
Ce conflit est étranger aux viticulteurs français et concerne une guerre commerciale qui implique d'autres secteurs. La France est le deuxième exportateur de vin, comptant pour 25 % des exportations européennes, aux États-Unis après l'Italie. La résolution de cette question est avant tout européenne comme le ministère de l'agriculture a pu le rappeler. La Commission européenne a formulé des offres de négociations qui n'ont pour l'instant obtenu aucune réponse. Le ministre de l'agriculture a demandé que la Commission finance la mise en œuvre rapide de programmes de promotion spécifiquement dédiés aux produits impactés par l'application de ces taxes, et qu'elle étudie des possibilités de recours aux mesures exceptionnelles de l'organisation commune des marchés agricoles pour compenser les pertes ; il lui demande quelles réponses il a obtenues.
En attendant une solution européenne, il lui demande ce qu'il propose concrètement au niveau national, quels sont les dispositifs mobilisés pour soutenir ces entreprises dans les difficultés qu'elles affrontent aujourd'hui et les nouveaux projets de développement qu'elles doivent entreprendre demain. Il n'est pas nécessaire de rappeler combien ce secteur, de la vigne au négoce international, est un acteur majeur de nos territoires, par son dynamisme économique, et un facteur d'équilibre de nos ruralités dans toutes les régions.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 19/02/2020

Réponse apportée en séance publique le 18/02/2020

M. Hervé Gillé. Monsieur le ministre, ma question porte sur les conséquences économiques désastreuses pour le secteur de la vini-viticulture des taxes américaines autorisées par l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les biens européens destinés à l'exportation, entrées en vigueur mi-octobre 2019 et dont le maintien a été confirmé vendredi dernier.

La France est le deuxième exportateur de vin – cela représente 25 % des exportations européennes – aux États-Unis, après l'Italie. Elle est directement visée par ces sanctions. Aujourd'hui, ce sont les PME et les TPE de ce secteur viticole qui sont prises en otage ; 500 000 emplois sont menacés, alors que l'on constate au dernier trimestre de 2019 un recul de 17,5 % des exportations françaises.

Votre ministère nous le rappelle, la résolution est avant tout européenne, puisque liée à Airbus. L'Union européenne a déjà accordé des mesures pour offrir plus de flexibilité et une simplification des fonds de promotion, mais la mise en place d'un mécanisme européen de compensation des pertes est toujours attendue.

Quel est aujourd'hui le contexte ? La Commission européenne a formulé des offres de négociations avec les États-Unis ; elles n'ont pas permis de résoudre le conflit. Nous attendons un jugement de l'OMC concernant les subventions américaines accordées à Boeing. Cela offrirait peut-être à l'Europe la possibilité d'imposer, elle aussi, des sanctions, mais seulement au printemps. Pendant ce temps, les exportateurs perdent déjà des parts de marché, malgré leurs efforts financiers pour compenser leurs pertes de compétitivité.

L'ensemble des acteurs demandent la mise en œuvre d'un fonds de compensation ou d'indemnisation, qu'il soit européen ou non.

Monsieur le ministre, qu'en est-il ? Avez-vous prévu d'abonder ce fonds sur le plan national ? Comment prévoyez-vous de décliner votre plan d'action à l'échelle des régions sur les plans administratif et politique ? Avez-vous prévu des dispositifs d'accompagnement en termes d'ingénierie de crise ? Avez-vous prévu d'y associer les collectivités territoriales ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur, je ne pourrai évidemment pas répondre à toutes les questions que vous avez posées en seulement deux minutes.

Le sujet est clair. Les États-Unis ont pris une décision – certes, ils ont le droit de la prendre – scandaleuse : faire payer aux viticulteurs français, qui sont des victimes, un conflit entre Airbus et Boeing. C'est inacceptable ! La viticulture française ne peut pas être la variable d'ajustement de je ne sais quel débat économique.

La France a immédiatement réagi, depuis le mois d'octobre. J'ai rencontré voilà quelques semaines M. Sonny Perdue, secrétaire à l'agriculture des États-Unis.

Nos demandes sont très claires.

Premièrement, nous réclamons l'arrêt de ces taxes, qui ont été rétablies vendredi dernier. C'est le combat que mènent Bruno Le Maire et notre diplomatie. Je le mène également dans le cadre de rencontres bilatérales avec mon homologue américain.

Deuxièmement, nous demandons à la Commission européenne une aide directe de compensation de 300 millions d'euros, ce qui correspond grosso modo au montant des pertes des viticulteurs français. Le Président de la République réitérera cette demande après-demain lors du Conseil des chefs d'État et de gouvernement européen. L'Europe doit aider la viticulture française à passer ce cap.

Troisièmement, la France aide directement les agriculteurs. Nous avons obtenu que, dans le cadre de l'organisation commune de marché (OCM) vitivinicole, nos viticulteurs puissent attaquer de nouveaux marchés dans des pays tiers avec des aides de l'Union européenne. Parallèlement, FranceAgriMer essaye d'accélérer l'avancée des dossiers.

La France est déterminée à agir dans ces trois directions. Les viticulteurs français ne peuvent être les victimes expiatoires d'un conflit entre Airbus et Boeing. J'ai soutenu la filière quand elle a rencontré le patron d'Airbus ; je le croiserai moi-même au salon international de l'agriculture dans les jours qui viennent et je lui dirai que cette situation ne peut perdurer.

Il faut une mobilisation générale ! L'Europe doit aider les viticulteurs français à s'en sortir, et la France sera au rendez-vous.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.

M. Hervé Gillé. Je connais bien les mesures que vous avez exposées, monsieur le ministre.

J'attire toutefois votre attention sur l'intérêt d'une mobilisation collective plus forte qu'aujourd'hui. C'est pourquoi j'évoquais le rôle que pouvaient jouer les collectivités territoriales, au premier chef les régions, qui ont une compétence particulière en la matière.

Il serait intéressant également de disposer d'indicateurs sur la dégradation de l'activité de certaines entreprises viticoles.

M. Didier Guillaume, ministre. Nous les avons !

M. Hervé Gillé. La MSA nous fait part de situations critiques, avec des difficultés de paiement des cotisations. Nous avons besoin de travailler ensemble sur des indicateurs et des tableaux de bord pour accompagner au mieux les entreprises viticoles, notamment à l'échelle territoriale.

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