Question de M. CORBISEZ Jean-Pierre (Pas-de-Calais - RDSE) publiée le 19/12/2019

M. Jean-Pierre Corbisez attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé concernant l'évolution possible de la politique européenne en matière d'aide alimentaire.
Cette politique s'incarne aujourd'hui dans le fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD), un fonds qui aura consacré, sur la période 2014-2020, 3,8 milliards d'euros à la lutte contre la pauvreté et qui contribue notamment aux actions menées en France par les grands opérateurs de l'aide alimentaire. Ainsi, pour Les Restaurants du cœur, l'appui du FEAD permet de financer un quart des repas distribués.
La programmation européenne pour la période 2021-2027 envisage de fusionner, au sein du fonds social européen +, différents fonds et programmes dont le FEAD. Cette évolution porte le risque de voir diminuer les moyens consacrés à l'aide alimentaire.
En effet, la proposition de règlement élaborée par la Commission européenne prévoit de fixer un seuil de 2 % de l'enveloppe du FSE + dédiés à la privation matérielle et à l'aide alimentaire. Sur un budget fixé à 101 milliards d'euros pour le FSE +, cela signifierait un montant de 2 milliards d'euros alloués à l'aide alimentaire, soit deux fois moins que sur la période 2014-2020.
Pour la France, le FSE + représenterait 7 milliards d'euros, soit, par application du seuil de 2 %, 144 millions d'euros destinés à l'aide alimentaire contre 587 millions dans la programmation actuelle.
La direction serait donc celle d'une division par quatre du montant octroyé à l'aide alimentaire en France via les fonds européens. Cette perspective, dans un contexte où la pauvreté ne fléchit pas dans notre pays, où la précarisation s'intensifie pour certains de nos concitoyens, constituerait un recul considérable de nos politiques d'accompagnement des plus démunis en diminuant drastiquement les capacités d'intervention des acteurs associatifs.
La France doit donc se mobiliser pour que l'aide alimentaire et la lutte contre la privation matérielle conservent un rôle central dans les politiques de solidarité de l'Union européenne et éviter que la fusion des fonds et programmes n'aboutisse à une dramatique concurrence entre les outils de la politique sociale européenne.
Il souhaite donc savoir dans quelle mesure l'État entend s'engager auprès de la Commission européenne pour préserver les moyens de l'aide alimentaire et garantir la mobilisation d'un budget au moins équivalent au sein du FSE +, l'aide alimentaire constituant le cœur des actions d'aide aux plus fragiles de nos concitoyens.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 18/02/2021

Le Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) constitue l'un des piliers de l'Europe sociale. Cet instrument financier établi par le cadre financier pluriannuel 2014-2020 représente aujourd'hui une source majeure de financement pour les associations de distribution alimentaire en France. La mobilisation et le rôle d'un financement européen en matière de lutte contre la pauvreté resteront essentiels dans les années à venir, dans le contexte de la crise actuelle et des risques d'accroissement des inégalités qu'elle entraine. Pour ce qui concerne le cadre financier pluriannuel 2021-2027, la Commission européenne a proposé le regroupement de différents instruments financiers à vocation sociale, dont le FEAD, dans un nouveau fonds : le Fonds Social Européen (FSE+). Le FEAD ne constituerait donc plus un instrument financier distinct mais son objectif, à savoir l'aide aux plus démunis et spécifiquement la lutte contre les privations matérielles, fera l'objet d'une programme opérationnel spécifique au sein du FSE+. La Commission a proposé que chaque État membre attribue au moins 2% de ses fonds FSE+ à la lutte contre les privations matérielles. Les derniers échanges entre la Commission, le Parlement et le Conseil européen laissent penser que ce plancher sera amené à 3%. Dans tous les cas, il s'agit uniquement d'un taux minimum obligatoire, qui ne préjuge absolument pas de la part finale du FSE+ que chaque État choisira de consacrer à la lutte contre les privations matérielles. En France, cette part sera très largement supérieure à 3%.  En effet, si les discussions sur la programmation 2021-2027 sont encore en cours de finalisation, le Gouvernement a pris l'engagement auprès des acteurs associatifs que les enveloppes globales dédiées à l'aide aux plus démunis seront maintenues. C'est fidèlement à cet engagement que le Gouvernement a annoncé en novembre 2020 qu'une enveloppe de 550 millions d'euros serait consacrée à cette mission sur l'enveloppe française du FSE+. De plus, le Gouvernement poursuivra la mobilisation de ces enveloppes pour financer un dispositif d'achat centralisé de denrées. Par ailleurs, dans le cadre de sa proposition de plan de relance du 27 mai 2020, la Commission a introduit l'initiative REACT-EU, qui vise à allouer 55 Md€ supplémentaires aux fonds de la politique de cohésion entre 2020 et 2022 et permet notamment aux États membres d'allouer des ressources supplémentaires au FEAD. Sur cette enveloppe, la France consacrera 132 millions d'euros à l'achat centralisé de denrées aux bénéfice de ces associations.  Enfin, en 2021, la France consacrera à cette même mission un reliquat de plus de 70 millions d'euros de crédits européens de la programmation 2014-2020 dont le remboursement n'a pas été accepté par les autorités d'audit.  Au total, pour la période 2021-2027, les financements européens à l'aide alimentaire en France augmentent de 50% par rapport à la période 2014-2020. 

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